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Avant propos

La dégradation continue des terres et la proportion croissante de la population vivant dans la pauvreté comptent parmi les symptômes de la pression qui s'exerce actuellement sur les ressources en terres. Aux deux défis que sont la satisfaction des besoins humains et le maintien de l'intégrité des écosystèmes mondiaux, le monde n'a apporté à ce jour que des réponses sans succès. De tout temps, un cadre pour la planification foncière a fait défaut, et cela s'est combiné à des stratégies d'aménagement déficientes, à l'impossibilité d'identifier les intéressés1, à l'incapacité de les englober dans les processus de planification et d'aménagement tout en leur donnant un certain pouvoir, et à la faiblesse des structures institutionnelles.

Ces problèmes ont été clairement reconnus au cours de la Conférence des Nations Unies pour l'Environnement et le Développement (CNUED) en 1992 à Rio de Janeiro (Brésil), qui a plaidé pour une approche intégrée de la planification et de la gestion des ressources en terres. Dans l'agenda 21, qui est le document du Sommet sur la Terre, la CNUED a proposé un certain nombre de mesures politiques et stratégiques; elles comprennent l'intégration de résultats biophysiques, sociaux et économiques, la participation active des communautés locales et le renforcement des institutions afin d'aboutir à un développement durable.

En collaboration avec le Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) et avec d'autres institutions nationales et internationales, la FAO a élaboré un cadre amélioré pour le développement et la gestion des ressources en terres qui aborde la nature évolutive de la gestion foncière intégrée. Les nouveaux concepts ont été introduits par une série de trois publications; la première, Nos terres, notre futur (1995) introduit brièvement une nouvelle approche pour aborder la planification; la seconde, Négocier un futur durable pour les terres (1997) donne des directives structurelles et institutionnelles pour les politiques et les décideurs au niveau national.

Le présent document, "Le futur de nos terres - faire face au défi" est le troisième de cette série; il propose une approche de la planification intégrée pour un aménagement durable des ressources en terres qui se base sur un partenariat interactif entre gouvernement et population. C'est le résultat d'un processus participatif devant mettre en relief les résultats, les expériences et les défis relatifs à la planification et à l'aménagement intégrés des ressources en terres en vue de la 8e session de la Commission du Développement Durable (CDD 8); elle examinera, entre autres, les progrès accomplis dans l'exécution du chapitre 10 de l'Agenda 21. Cette approche est centrée sur le concept des intéressés et de leurs objectifs, et sur le rôle que doit jouer le gouvernement en créant les conditions dans lesquelles les populations rurales peuvent utiliser de manière productive et durable leurs ressources en terres. Intégrer la participation de la base dans des procédures systématiques d'évaluation des ressources et de planification est la clé de cette approche, et un facteur nécessaire à son succès.

Ce document est destiné en premier lieu aux professionnels et aux praticiens de la planification foncière et de l'aménagement des ressources en terres aux niveaux national, infra-national et communal, qui désirent mettre en oeuvre une approche intégrée de la gestion des ressources en terres. Des manuels pratiques sur la gestion intégrée des ressources en terres (GIRT) doivent être préparés pour chaque région ou pays, en se basant sur l'expérience acquise lors de l'utilisation de ces directives.

En premier lieu, le présent document retient que la planification intégrée des terres est:

Le succès de la planification intégrée des ressources en terres comprend sept éléments-clés:

  • un objectif clairement formulé et/ou un problème à résoudre
  • une politique et un environnement légal favorables
  • des institutions efficientes aux niveaux local, infra-national et national
  • une base de connaissance des conditions physiques accessible, comprenant des alternatives pour l'affectation des terres, les conditions socio-économiques et un cadre légal
  • une identification des intéressés et de leurs objectifs souvent divergents
  • une plate-forme pour des négociations
  • un ensemble de procédures de planification

L'environnement favorable comprend les aspects politiques, réglementaires et institutionnels. Le premier et le plus important des instruments est une politique foncière nationale; il contrôle la tenure et l'affectation des terres et peut générer un environnement menant à l'adoption de pratiques d'affectation des terres durables et productives, et à la mise sur pied de forums permettant des négociations libres et effectives entre les intéressés. La planification émanant du niveau local ou régional doit être la base d'une politique nationale qui en retour facilitera les initiatives locales.

La législation traduit la politique en un cadre de prise de décision et crée les institutions pour appliquer ces décisions. Des institutions sont nécessaires aux niveaux local, infra-national et national, qui facilitent l'intégration des disciplines et l'accès aux informations indispensables à une planification foncière. Les institutions nationales - généralement des ministères - doivent être clairement mandatées pour résoudre les conflits. Au niveau national, un groupe de travail doit être créé en tant qu`neutre' (un comité ou une commission); il sera composé de représentants des ministères compétents en matière d'usage des terres et venant d'autres institutions de la société civile. Il doit avoir pour fonctions d'aider, de contrôler et de résoudre les conflits, au moyen d'avis techniques. Au niveau du village ou de la commune, des groupes de gestion des ressources locales (GGRL) représentant les responsables, doivent être institués.

Les connaissances sont la base de la planification et de la négociation. Elles sont aussi la clé du pouvoir pour les intéressés locaux, en particulier pour les groupes désavantagés qui, autrement, seraient exclus des processus de négociation. Un flux d'informations adéquates doit circuler au niveau des villages sur les ressources, les technologies, les droits et les réglementations; de même, les connaissances sur les terroirs locaux et traditionnels et sur leur utilisation doivent être mobilisées. La planification foncière participative devient ainsi un processus d'apprentissage mutuel, qui se base sur la fusion entre les connaissances techniques émanant du gouvernement et des autres agents associés à l'expérience avec celles des autochtones. Un flux d'informations ira également du niveau local au niveau national, pour assurer que tout programme ou décision concernant les terres est formulé de telle manière qu'il reflète en bout de course les besoins et demandes des utilisateurs des terres.

La principale tribune de négociation sera le GGRL opérant au niveau du village ou de la commune. La prise de décision sera dévolue autant que possible à ce niveau, partiellement comme moyen de responsabilisation des villageois pour les ressources sous leur contrôle, et partiellement pour réduire la charge du gouvernement en mobilisant la population, son énergie et son enthousiasme. Il reste cependant du devoir du gouvernement de faire en sorte que tous les groupes d'intéressés, y compris les groupes désavantagés, soient équitablement représentés dans les processus de négociation.

Les procédures utilisées dans la planification et la gestion foncières intégrées comprennent l'identification des problèmes, des intéressés engagés et de leurs objectifs, la collecte des données nécessaires à la planification, l'évaluation des ressources en terres comparée à la demande en terres et le classement des options en termes d'impact économique, social et environnemental, toutes ces mesures se faisant au travers d'une approche participative impliquant tous les intéressés. Ces procédures doivent être appliquées par les représentants des intéressés, adaptant autant que possible les procédures techniques au niveau auquel peut les appliquer un technicien qualifié travaillant dans un village. Des procédures plus sophistiquées peuvent être adoptées aux niveaux national ou infra-national.

L'approche présentée ici doit être essayée, testée et validée dans plusieurs zones pilotes et les leçons tirées de ces études doivent être utilisées pour adapter la planification foncière intégrée aux conditions particulières du pays, et pour promouvoir et guider son expansion. La gestion durable des ressources en terres est aussi bien de l'intérêt du gouvernement que de celui de la population et les politiques qui délèguent la prise de décisions et donnent pouvoir aux utilisateurs des terres, devraient recevoir le soutien populaire. En même temps, le caractère interactif de la planification foncière soutiendra les engagements faits par les gouvernements à la Conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le Développement de 1992 et aux conventions postérieures pour combattre la désertification (CNUD), sur les changements climatiques (CNUCC) et sur la préservation de la biodiversité (CBDNU).

Le CD-ROM en annexe est le résultat d'un effort conjoint de la FAO et de la Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit (GTZ); il contient une série de documents complémentaires relatifs à la planification foncière et à la gestion des ressources en terres. Il comprend des directives, des études de cas, des communications de travail, des comptes rendus de séminaires et autres publications, publiés principalement par la FAO et par la GTZ.


1 Dans le contexte de la gestion des ressources en terres, un intéressé est tout individu ou tout groupe ayant un intérêt légitime dans les ressources en terres, ou pouvant être affecté par des modifications dans la manière dont sont gérées ces ressources.


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