Perspectives de l'Alimentation 03/97

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CEREALES



BILAN DE L’OFFRE ET DE LA DEMANDE


Les premières prévisions de la production céréalière de 1997 laissaient espérer un chiffre proche du record de l'année passée. Vu l'état des cultures déjà en terre et les intentions des producteurs pour le reste de l'année, et en supposant que les conditions météorologiques resteront normales pour la récolte, la FAO estime en première approximation que la production céréalière mondiale sera cette année de 1 880 millions de tonnes (y compris le riz usiné), chiffre à rapprocher des prévisions révisées de 1996 , 1 873 millions de tonnes , et qui serait supérieur à la tendance pour la deuxième année consécutive. Si ces prévisions se réalisent, la production céréalière permettra de répondre aux besoins de la consommation tels qu'on les projette en 1997/98 et de renforcer encore les stocks de réserve. Mais, comme beaucoup de cultures restent à entreprendre et que d'autres en sont aux premières étapes de leur développement, ces prévisions restent très hypothétiques et on ne peut encore exclure l'éventualité d'une dégradation de la récolte de 1997 qui annulerait les progrès des disponibilités alimentaires mondiales enregistrés cette année.

Ces perspectives favorables au niveau mondial font contraste avec la situation de 29 pays qui font face à des pénuries alimentaires plus ou moins graves. En Afrique, plusieurs régions connaissant encore des difficultés d'approvi-sionnement. Du côté des Grands Lacs, la guerre civile qui se poursuit au Zaïre a poussé les réfugiés rwandais à quitter en masse leurs camps pour gagner des zones inaccessibles. La situation alimentaire et nutritionnelle est devenue critique et l'on signale déjà des décès dus à la famine. Au Rwanda, la situation est rendue difficile par le retour d'un nombre considérable de réfugiés en novembre et décembre derniers. Au Burundi, une série de récoltes médiocres et les sanctions économiques imposées par les pays voisins ont gravement déprimé l'offre de denrées alimentaires. En Afrique orientale, malgré le volume satisfaisant de la récolte céréalière principale de 1996/97, de vastes secteurs de la population font face aux graves pénuries provoquées par l'échec de la deuxième campagne. Il faudra prévoir une aide alimentaire d'urgence dans l'Est et le Nord-Est du Kenya, dans les régions du Sud de l'Ethiopie habitées par les pasteurs (où l'alerte alimentaire a été déclenchée), dans les régions du Nord de la Tanzanie et de l'Ouganda et en Somalie. Pour ce qui est de l'Afrique de l'Ouest, la situation des approvisionnements reste précaire au Libéria mais s'améliore progressivement en Sierra Leone grâce à l'accord de paix qui a été signé dans le pays. En Afrique australe, les perspectives restent favorables pour l'instant.

En Asie, la situation alimentaire continue de se dégrader en République démocratique populaire de Corée et les perspectives de 1997 ne sont pas brillantes. Au Laos, après les lourdes pertes entraînées par les crues de l'an passé, il faut prévoir une aide d'urgence pour 420 000 personnes. En Mongolie, la production vivrière reste gravement compromise par les problèmes de la transition économique, qui se sont traduits par des ruptures de stocks d'intrants agricoles. Après la grave sécheresse de 1994/95, la faiblesse et l'irrégularité des prix à Sri Lanka ont une fois encore touché la production rizicole. Il faudra prévoir une assistance alimentaire pour les populations du Nord, victimes à la fois de la sécheresse et de la guerre civile. Malgré l'importance des inondations de l'année passée, la situation des approvisionnements est dans l'ensemble satisfaisante au Cambodge. Dans la CEI, le Tadjikistan reste dans une situation précaire et il attend d'urgence un appoint alimentaire ou des promesses d'aide.

D'après les estimations préliminaires de la FAO, la production céréalière mondiale devrait s'établir à 1 880 millions de tonnes en 1997 (riz usiné compris), contre 1 873 millions de tonnes en 1996. La production de blé est estimée pour l'instant à 590 millions de tonnes, soit pratiquement le même volume qu'en 1996, c'est-à-dire supérieur à la normale pour la deuxième année consécutive. La production devrait augmenter dans la plupart des pays d'Asie et d'Europe et dans la CEI, mais le surcroît sera en bonne partie annulé par la réduction des récoltes attendue en Amérique du Nord, en Amérique du Sud et dans l'Océanie. Pour les céréales secondaires, les premières prévisions de la FAO fixent la production mondiale en 1997 à 910 millions de tonnes ce qui, comme dans le cas du blé, est pratiquement le même chiffre qu'en 1996 mais reste au-dessus de la normale pour la deuxième année consécutive. La production augmentera en Amérique latine et dans la CEI, mais cet accroissement sera largement annulé par des récoltes décevantes en Afrique et en Europe. Mais, comme la plupart des céréales secondaires cultivées dans l'hémisphère Nord ne sont pas encore semées, ces premières prévisions sont très incertaines. Quant au riz, la principale campagne de 1997 est bien avancée dans l'hémisphère Sud et dans la zone équatoriale mais, dans la plupart des pays d'Asie où se récolte le plus gros du riz mondial, la saison n'a pas encore commencé puisqu'on attend encore les pluies de mousson. S'il est trop tôt pour estimer avec quelque certitude la production de paddy de 1997, on peut la fixer, en supposant que les conditions de maturation seront aussi bonnes qu'en 1996, à 565 millions de tonnes (soit 380 millions de tonnes de riz usiné); autrement dit, elle restera pratiquement inchangée par rapport à l'année précédente.


La FAO a révisé en hausse ses prévisions du commerce de céréales dans le monde pour la campagne commerciale 1996/97 : elle les a relevés de 3 millions de tonnes depuis le dernier rapport et donne actuellement un chiffre de 189 millions de tonnes, qui reste de 9 pour cent inférieur au volume de l'année passée et atteint le niveau le plus bas depuis 1990/91. Les prévisions des importations mondiales de blé et de farines de blé (en équivalent blé) ont été portées à 87,4 millions de tonnes, et, même à ce niveau, elles restent inférieures de 8 millions de tonnes à celles d'il y a un an, à cause essentiellement d'une reprise de la production dans plusieurs des pays importateurs de 1996. Les prévisions de la FAO concernant les importations de riz en 1997 restent à 18,4 millions de tonnes, soit 0,7 million de tonnes de moins que l'année précédente et 2,5 millions de tonnes de moins que le record de 1995.

PRODUCTION MONDIALE DE CEREALES - PREVISION POUR 1997


Blé Céréales secondaires Riz (paddy) Total 1/

1996 1997 1996 1997 1996 1997 1996 1997

(. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . millions de tonnes. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .)
Asie 228,5 234 213,4 214 514,2
956,1
Afrique 22,4 18 88,7 83 16,2
127,4
Amérique centrale 3,6 4 26,6 27 1,8
31,9
Amérique du Sud 21,1 19 53,9 61 18,4
93,3
Amérique du Nord 92,6 92 296,5 299 7,8
396,9
Europe 128,2 131 159,6 156 2,9
290,6
CEI 69,4 73 56,2 61 1,3
126,9
Océanie 23,8 18 10,8 9 1,0
35,5
TOTAL MONDIAL 589,5 590 905,6 910 563,5 565 2/ 2 058,6 2 065
Pays en développement 272,3 272 371,2 376 537,7 539 1 181,2 1 187
Pays développés 317,2 318 534,4 534 25,8 26 877,4 878

SOURCE: FAO
1/ Y compris le riz, exprimé en paddy. 2/ Prévision provisoire; part de l’hypothèse qu’il n’y aura pas de changement important par rapport au record de 1996.


Les dernières prévisions concernant l'utilisation des céréales dans le monde en 1996/97 indiquent une augmentation de 41 millions de tonnes (2,3 pour cent par rapport à l'annéeprécédente), ce qui donne 1 833 millions de tonnes. La consommation mondiale de céréales vivrières devrait être de 941 millions de tonnes en 1996/97, soit une augmentation de 13 millions de tonnes. Cette augmentation sera le fait des pays en développement, où la consommation par habitant devrait atteindre 172 kg par an. La consommation animale de céréales devrait augmenter de 14,5 millions de tonnes, volume qui s'ajouterait aux 634 millions de tonnes de 1996/97, grâce aux pays développés. Les céréales destinées à d'autres usages (semences, industrie, etc.) et les pertes après récolte sont estimées à 257 millions de tonnes en 1996/97, chiffre légèrement supérieur à celui de 1995/96.


Pour ce qui est des expéditions de céréales au titre de l'aide alimentaire en 1996/97 (de juillet à juin) la FAO ne change pas ses prévisions, qui restent établies à 7,5 millions de tonnes. Ce chiffre correspond à l'estimation révisée de 1995/96 mais ne représente que la moitié des volumes du début des années 90. Sur ce total, les pays à faible revenu en déficit alimentaire devraient recevoir environ 5,9 millions de tonnes, volume comparable à celui de l'année précédente et représentant à peu près 10 pour cent de leurs importations totales de céréales en 1996/97 (15 pour cent en 1992/93).


Les cours internationaux du blé se sont raffermis en février et sont restés généralement stables en mars, mais à un niveau nettement inférieur au plus haut de la saison précédente. A la fin du mois de mars, le cours du blé américain No 2 était de 180 dollars la tonne, prix légèrement supérieur à celui de février mais supérieur de 40 dollars à celui de l'année précédente à la même époque. Les marchés ont été soutenus par la réduction des volumes disponibles à l'exportation aux Etats-Unis au second semestre. Dans la CE, la hausse des prix locaux a provoqué ces dernières semaines une baisse du volume des restitutions. Les prix des maïs argentins et américains ont légèrement augmenté en mars et, à la fin du mois, leurs cours atteignaient 121 dollars et 128 dollars la tonne respectivement, ce qui reste quand même inférieur de 50 dollars aux cours correspondants de la période précédente. Les cours internationaux du riz ont fléchi en mars, l'indice du prix à l'exportation du riz de la FAO (base 1982/84 = 100) s'établissant en moyenne à 132 points, c'est-à-dire à peine au-dessous de l'indice de février, mais à 9 points au-dessous de l'indice correspondant de 1996. Le rix du Thaïlandais 100 B a continué de fléchir (moins 22 dollars) pour atteindre 335 dollars la tonne à la fin du mois de mars.

Les prévisions de la FAO concernant les stocks céréaliers mondiaux n'ont pas été modifiées depuis le rapport précédent. Elles restent à 294 millions de tonnes, ce qui est un progrès de 33 millions de tonnes (13 pour cent) par rapport au niveau médiocre du début de campagne. La totalité de cette augmentation sera le fait des principaux pays exportateurs. Elle fera plus que compenser l'affaiblissement de l'ensemble des stocks des autres pays. Les réserves mondiales de blé devraient augmenter de 11 pour cent et atteindre 117 millions de tonnes; les réserves de céréales secondaires devraient progresser plus encore (23 pour cent), jusqu'à 127 millions de tonnes. En revanche, les stocks de riz devraient s'appauvrir pour la quatrième année consécutive, de 50 millions de tonnes encore, à la clôture des campagnes de commercialisation de 1997.

La reprise de la production céréalière mondiale en 1996 et le réapprovisionnement des stocks de report auxquels on s'attend pendant le cycle de 1996/97 en cours a détendu la situation exceptionnellement difficile des marchés pendant l'année précédente. Les cours internationaux des céréales se sont donc stabilisés ces derniers mois. Cela dit, le rapport entre les stocks de fin de campagne et l'utilisation tendancielle de 1997/98, actuellement estimé à près de 16 pour cent, restera encore inférieur à la fourchette de 17-18 pour cent que le Secrétariat de la FAO considère comme le seuil minimum pour garantir la sécurité alimentaire mondiale. Mais, comme on l'a déjà dit, si l'on escompte une météorologie normale jusqu'à la fin des récoltes, les premières perspectives de la production de 1997 laissent entrevoir un volume qui répondra aux besoins de la consommation telle qu'elle est projetée pour 1997/98, et permettra même de renforcer quelque peu les stocks de céréales. Mais il faudra suivre la situation de près dans les mois qui viennent, car toute dégradation tant soit peu sensible des récoltes de céréales en 1997 - éventualité encore possible - annulerait les récents progrès de la situation vivrière dans le monde.


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