Dans certaines provinces de Chine, principalement dans les régions deltaïques du Chang Jiang (par exemple Jiangsu et Zhejiang) et du Zhu Jiang (Guangdong), les petites rivières et les chenaux navigables peuvent être aménagés en vue d'y pratiquer un système cultural extensif d'élevage de poisson. Les investissements sont relativement peu coûteux, se limitant en général à l'érection de barrières destinées à empêcher la fuite des individus empoissonnés.
Le groupe d'étude a pu observer ce genre d'activité piscicole en deux occasions: l'aménagement piscicole d'une petite rivière du District de Xinhui (Guangdong) et les élevages extensifs en chenaux du Centre Annexe de Pisciculture du District de Shaoxing (Zhejiang).
C'est la Commune populaire de Tangxia (Xinhui, Guangdong) qui est responsable pour l'exploitation piscicole d'un tronçon du chenal principal de la rivière Tiansha (20 km) et des chenaux secondaires y affluant (30 km), soit 50 km de chenal sur une longueur totale de 140 km. Cette exploitation est gérée en partie par la commune populaire elle-même (140 ha) et en partie par cinq brigades de production (env. 233 ha). Les observations suivantes concernent l'exploitation communale.
La zone aménagée est délimitée à ses extrémités par des clôtures de filet de diverses dimensions. Cinq clôtures relativement grandes existent, dont deux dans le chenal principal et trois à l'embouchure d'affluents. La plus grande a une longueur de 136 m et une profondeur maximum de 7 m (Figure 51). Trente-et-une clôtures de moindre importance, d'une longueur de 3–4 m et d'une profondeur maximum de moins de 4 m, sont placées à l'embouchure des autres affluents. La navigation devant être permise dans un chenal principal, un passage avec clôture mobile est prévu dans chacune des deux clôtures qui y sont construites.
Afin de ne pas entraver le débit de la rivière, tout en diminuant les forces exercées sur les panneaux de filet des grandes barrières, leur longueur totale est augmentée par une construction en zigzag dont l'axe est perpendiculaire à celui du chenal.
Les premiers empoissonnements ont eu lieu en 1974 et se sont répétés depuis, annuellement (Tableau 33). De grands alevins (150–250 g) de quatre espèces de carpe sont maintenant stockés, une fois l'an, à raison de 714 ind./ha, afin de permettre une polyculture extensive basée sur les carpes marbrées (50 pour cent) et les carpes argentées (40 pour cent). Au cours des quatre premières années, les récoltes ont été en moyenne de 180 kg/ha/an. En 1979 cependant, le rendement a légèrement augmenté, passant à 195 kg/ha/an. Ceci a rapporté environ 30 000 yuans, dont un tiers constituait les bénéfices de l'exploitation. En général, le rendement piscicole annuel des élevages extensifs en rivière peut varier de 135 à 645 kg/ ha, en fonction du secteur considéré, et les résultats repris ci-dessus ne se classent donc pas parmi les meilleurs.
La gestion piscicole se limite dans la majorité des cas: i) au maintien de la navigation par l'ouverture et la fermeture de la section mobile des clôtures principales; ii) au nettoyage des clôtures, surtout après de fortes pluies; iii) à la réparation des clôtures, les filets en particulier; iv) au contrôle des poissons prédateurs par pêches sélectives; v) à l'empoissonnement; et vi) à la récolte. La fertilisation et l'alimentation ne se pratiquent qu'exceptionnellement et alors d'une façon semi-intensive. Un certain enrichissement naturel des eaux peut cependant se produire par l'intermédiaire des eaux de ruisellement des zones cultivées.
EMPOISSONNEMENTS PAR LA COMMUNE POPULAIRE DE TANGXIA POUR LA PISCICULTURE EXTENSIVE DANS 140 HA DE RIVIERE
| Espèce piscicole | 1974 | 1976–1979 | ||||
| Nombre tot. indiv. | Densité N/ha | % | Nombre tot. indiv. | Densité N/ha | % | |
| Carpe marbrée | 60 000 | 428 | 40 | 50 000 | 357 | 50 |
| Carpe argentée | 50 000 | 357 | 33 | 40 000 | 286 | 40 |
| Carpe herbivore | 30 000 | 215 | 20 | |||
| 10 000 | 71 | 10 | ||||
| Carpe commune | 10 000 | 71 | 7 | |||
| TOTAL | 150 000 | 1 071 | 100 | 100 000 | 714 | 100 |
Figure 51. Pisciculture extensive dans la rivière Tiansha, Commune populaire de Tangxia, Guangdong. Vue de la clôture principale (136 m), installée en zig-zag en travers de la rivière
Il semblerait qu'en certaines occasions, l'alevinage des sujets destinés à l'empoissonnement se réalise dans des dépressions artificiellement créées dans les zones aménagées (ADCP, 1979). Ces dépressions sont mises en charge avec de très jeunes poissons (3–4 jours d'âge), dès qu'elles deviennent isolées de la rivière, en saison sèche. Un alevinage semi-intensif y est alors pratiqué jusqu'à la remontée des eaux et l'empoissonnement automatique de cellesci. A ce moment, les alevins sont suffisamment grands (200–300 g) que pour limiter leur mortalité ultérieure à 20–40 pour cent.
Dans le District de Shaoxing (Zhejiang), il existe une tradition millénaire de pisciculture extensive dans les nombreux chenaux navigables1 qui sillonnent la région. Il y a actuellement 12 693 ha en exploitation, soit par l'Etat représenté par le District (6 360 ha) et par le Centre piscicole du District (1 200 ha), soit par les communes populaires (5 133 ha). La profondeur d'eau y est en moyenne de 3 m.
Afin de faciliter la gestion, ces chenaux sont divisés en sections de 40–53 ha chacune, par des barrières de bambou et de filet. Une porte mobile permet le passage des bateaux, s'ouvrant et se refermant soit automatiquement, soit manuellement (Figures 52 et 53). La gestion piscicole de ces sections consiste: i) à entretenir les barrières; ii) à empoissonner annuellement; iii) à contrôler les poissons prédateurs par des pêches intensives; iv) à réglementer la taille minimum des poissons pêchés (plus de 0,5 kg) ainsi que les lieux et saisons de pêche; et v) à récolter les poissons de consommation en hiver, à la seine.
Il y a deux empoissonnements par an, au printemps et en été. Selon les sections de chenaux, l'on stocke soit 1 800 ind./ha (alevins de 15 g ou 10–15 cm), soit 960 ind./ha (alevins de 250 g). L'on pratique la polyculture extensive de carpes marbrées (60 pour cent) et de carpes argentées (40 pour cent). En présence de plantes aquatiques, l'on ajoute un nombre limité de carpes herbivores et de brèmes de Wuchan. La majorité des alevins sont produits sur place, en cages flottantes (Section 5.4). Il faut remarquer que le tout premier empoissonnement d'une section ne se fait qu'après une pêche exhaustive des poissons prédateurs qui y vivent naturellement. Il en résulte que l'importance relative de ceux-ci devient ensuite minime et qu'elle est facilement maintenue à ce niveau par des pêches régulières sélectives.
Annuellement, l'on récolte en moyenne 300–1 350 kg/ha de poisson commercialisable. Les meilleurs rendements sont obtenus lorsque l'on applique les règles de gestion piscicole suivantes: i) empoissonnement de jeunes alevins de 20–50 g; ii) augmentation de la densité d'empoissonnement; iii) polyculture d'un nombre plus élevé d'espèces piscicoles complémentaires, jusqu'à 10 espèces; iv) pratique de la rotation des pêches, par la récolte estivale d'alevins de deuxième âge et la récolte hivernale de poissons de consommation; v) intensification du taux de pêche qui est progressivement passé de 20 pour cent à plus de 90 pour cent.
Ce type de gestion est appliqué par le Centre Annexe de Pisciculture du District de Shaoxing qui exploite 335 ha de chenaux. Jusqu'en 1978, la production annuelle moyenne y fut de 900 kg/ha. Cependant, par l'application d'une gestion améliorée, la production atteignit 1 125 kg/ha en 1979, soit en moyenne plus de 5 600 kg de poisson par membre salarié du personnel.
Figure 52. Pisciculture extensive en chenal navigable; barrière séparant deux sections de chenal avec porte mobile manuelle et logis de l'opérateur. District de Shaoxing, Zhejiang
Figure 53. Barrière séparant deux sections de chenal, avec porte mobile automatique. District de Shaoxing, Zhejiang
