1. Introduction et résumé
Une réunion officieuse des organisations intéressées et d'un certain nombre d'experts du commerce des produits agricoles a été organisée par la FAO à Rome les 12 et 13 juin 2000. Quatorze experts, dont les représentants de six organisations internationales et commissions régionales de l'ONU, ainsi que des fonctionnaires de la FAO, ont participé à la réunion[96]. Celle-ci avait pour but de permettre un échange de vues sur les questions critiques soulevées lors des négociations sur l'agriculture pour lesquelles les organismes et instituts de recherche internationaux pourraient fournir un appui analytique et une assistance technique. L'autre objectif était d'étudier les possibilités de synergie et de collaboration entre organisations pour la fourniture de cette assistance.
Historique
La Conférence ministérielle de Seattle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui s'est tenue du 30 novembre au 3 décembre 1999, n'a pas réussi à lancer un cycle de négociations complet. Toutefois, le 7 février 2000, les gouvernements membres ont décidé, lors du Conseil de l'OMC, de poursuivre les négociations sur l'agriculture et les services, comme demandé dans les Accords du Cycle d'Uruguay pertinents. En ce qui concerne l'agriculture, il a été convenu que les négociations se poursuivraient sous l'égide du Comité de l'agriculture et auraient lieu dans le cadre de sessions extraordinaires organisées à l'occasion des réunions ordinaires du Comité.
La première session extraordinaire du Comité de l'agriculture, qui s'est tenue à Genève les 23 et 24 mars 2000, a adopté un programme de travail sur la première phase du processus de négociations. Celle-ci, d'une durée d'un an environ, sera consacrée à la soumission et à l'examen des propositions de négociation et des documents techniques dans le cadre de l'article 20 de l'Accord de l'agriculture. Cette phase s'achèvera par une réunion de synthèse en mars 2001 au cours de laquelle une décision devrait être prise sur la procédure à suivre sur les futures négociations. Les réunions de la session extraordinaire auraient lieu avant ou après celles du Comité de l'agriculture, en juin, septembre et novembre 2000, afin d'examiner les documents techniques et les propositions à négocier, une quatrième réunion étant envisagée, à titre provisoire, pour la dernière semaine de janvier 2001.
Dans le cadre du programme convenu, et pour préparer la première phase des négociations, la session extraordinaire de mars a demandé au Secrétariat de l'OMC de préparer un certain nombre de documents techniques, qui ont été mis à la disposition des participants avant la session extraordinaire de juin 2000: i) des documents de travail révisés et mis et jour fondés sur les notifications relatives aux contingents tarifaires, au soutien intérieur et aux subventions à l'exportation, ainsi que sur un tableau indiquant l'utilisation faite par les membres des différentes catégories de soutien intérieur, des subventions à l'exportation et des crédits à l'exportation dans une monnaie commune; ii) un document de travail mis à jour sur le commerce international des produits agricoles des pays en développement; iii) un document de travail sur les effets de l'article 20 b), autrement dit sur les effets des engagements de réduction sur le commerce international des produits agricoles; et iv) un document de travail sur l'application de la Décision ministérielle de Marrakech relative aux mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires.
À mesure que la première phase avancera, le Comité de l'agriculture pourra souhaiter disposer de documents techniques supplémentaires sur diverses autres questions:
En prévision de cette éventualité, et afin d'être prête à fournir un soutien analytique au processus de négociations, particulièrement sur les principaux problèmes concernant les pays en développement, la FAO a invité un certain nombre d'organisations internationales et d'experts du commerce des produits agricoles à réfléchir aux principaux problèmes que pose aux pays (développés et en développement) l'après-Seattle et à identifier les travaux analytiques qui pourraient faciliter la compréhension de ces questions et des diverses solutions possibles.
Résultats de la réunion officieuse
Les conclusions générales de la réunion sont indiquées ci-après.
1. Tout en notant la diversité des intérêts et des positions des membres de l'OMC, la réunion a identifié trois questions intéressant plus particulièrement les pays en développement au cours des négociations, à savoir
l'application aux pays en développement d'un traitement spécial et différencié qui soit pertinent, concret et ciblé.
2. Les organisations et les instituts de recherche internationaux doivent collaborer plus étroitement pour fournir une assistance analytique et technique à l'appui des négociations mieux coordonnée. Chaque organisation doit travailler dans les domaines où elle possède un avantage comparatif, tout en coopérant avec les autres. La coordination entre organisations, grâce au partage de l'information sur les activités d'assistance technique envisagées et, le cas échéant, grâce à la réalisation d'activités conjointes, a été jugée essentielle pour éviter des chevauchements inutiles des activités et des mesures programmées pour les mêmes pays.
3. Les domaines prioritaires en matière d'assistance technique sont les suivants:
Amélioration de la connaissance du système commercial multilatéral, notamment de l'Accord sur l'agriculture - mode de fonctionnement, expérience acquise et impact;
Assistance à la préparation des propositions en vue des négociations - notamment soutien analytique pour l'identification des intérêts nationaux;
Compréhension des incidences des diverses propositions;
Renforcement des institutions nationales (pour l'élaboration de politiques commerciales, la coordination relative aux négociations, le suivi et l'analyse du commerce international, les systèmes juridiques et réglementaires concernant le commerce international, etc.) et aptitude des pays à participer efficacement au système OMC et en particulier au mécanisme de règlement des différends;
Renforcement de la capacité d'exportation des pays en développement, notamment des pays les moins avancés, afin qu'ils puissent tirer parti des nouveaux débouchés et des nouvelles possibilités (promotion de l'investissement dans les activités d'exportation, mise au point et commercialisation des produits, adaptation des produits aux conditions stipulées dans les Accords SPS et OTC, infrastructure et services liés à la production, etc.
4. Autres besoins en matière d'analyse et d'assistance technique pour aider les pays en développement dans les négociations:
Accès aux marchés
Impact potentiel des diverses modalités de réduction des droits (formule suisse, réductions tarifaires générales, zéro pour zéro, etc.) sur la structure des droits et les flux commerciaux;
Analyse par produit et pays de l'impact potentiel sur le commerce d'une expansion des contingents tarifaires;
Impact d'autres modalités d'administration et d'attribution de contingents tarifaires sur les taux d'utilisation des contingents;
Évaluation du problème que rencontrent certains pays pour faire face à l'instabilité des cours mondiaux et aux poussées d'importation qu'elle entraîne, qui nuisent à la base de production des producteurs intérieurs et menacent la survie des ménages ruraux pauvres;
Analyse d'autres instruments temporaires possibles pour limiter les importations qui pourraient être utilisés dans ces situations (utilisation de clauses de sauvegarde, fourchettes de prix, système de calcul des taux de droit moyens);
Comment obtenir une libéralisation plus complète des marchés protégés, tout en facilitant l'ajustement des pays en développement lourdement tributaires de ces marchés grâce à des préférences commerciales? Quels avantages commerciaux équivalents ou autres mesures compensatoires mettre en place pour ces pays?
(La base de données sur l'accès au marché des produits agricoles (AMAD), en cours d'élaboration par un certain nombre d'organismes nationaux et internationaux travaillant en collaboration, pourrait être utile pour certaines des analyses indiquées ci-dessus[97]).
Soutien national
Évaluation des effets de distorsion sur la production et le commerce de certains produits résultant de divers types de politiques de soutien national;
Critères de substitution pour le reclassement, le plafonnement et la réduction du soutien national;
Incidences sur la production et le commerce d'un plafonnement des MGS par produit;
Impact potentiel de méthodes de substitution pour rééquilibrer une MGS par produit négative par rapport à une MGS positive non spécifique.
Concurrence à l'exportation
Évaluation de l'impact de divers taux de réduction ou de la suppression totale des subventions à l'exportation sur les cours des produits et sur les flux commerciaux;
Évaluation de l'impact potentiel de la réduction/suppression des subventions à l'exportation sur les pays importateurs de denrées alimentaires à faible revenu;
Effets de divers facteurs, tels que les subventions à l'exportation, les crédits à l'exportation, les entreprises commerciales d'État et les grandes entreprises privées sur la concurrence à l'exportation sur les marchés agricoles;
Évaluation d'autres types de réglementation des exportations visant à prévenir les restrictions à l'exportation, notamment celles qui pourraient compromettre la sécurité alimentaire des pays tributaires de leurs importations.
Préoccupations non commerciales
Évaluation de la nature des problèmes de sécurité alimentaire des pays en développement et des pays développés;
Autres instruments d'intervention visant à résoudre les problèmes de sécurité alimentaire des pays en développement et des pays développés, ainsi que leur impact sur le commerce;
Autres instruments d'intervention tendant à atteindre des objectifs publics précis associés au rôle multifonctionnel de l'agriculture, avec un effet de distorsion minimal.
Traitement spécial et différencié
Analyse des raisons pour lesquelles certaines catégories de pays en développement ont besoin d'un traitement spécial et différencié pour l'agriculture et des types de traitements spéciaux et différenciés qui seraient les plus efficaces dans ces situations;
Mesure dans laquelle les formes actuelles de traitement spécial et différencié pour l'agriculture sont utiles ou adéquates pour encourager une pleine participation des pays en développement au système commercial international et leur donnent les moyens d'en tirer tout le parti possible;
Autres conditions d'octroi de différents types de traitement spécial et différencié pour l'agriculture;
Éléments d'un ensemble de mesures intégrées (couvrant, par exemple, l'accès au marché, les règlements commerciaux, l'assistance technique et des mécanismes efficaces d'application) pour répondre aux besoins de différentes catégories de pays en développement en matière de traitement spécial et différencié pour l'agriculture;
Impact potentiel d'un accès exempt de droits et de contingents de tous les produits agricoles des pays les moins avancés sur les principaux marchés.
Décision ministérielle relative aux mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réforme sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires
Identification des cas où les "effets négatifs" ont réellement eu lieu et peuvent être liés à la réforme des règles du commerce international des produits agricoles;
Moyens d'améliorer l'efficacité opérationnelle de la Décision (comment définir, par exemple, avec plus de précision le problème auquel la Décision est censée répondre, identifier un mécanisme de déclenchement automatique, spécifier les responsabilités des différentes parties et établir une procédure d'application efficace);
Autres modalités d'assistance et mécanismes de compensation (tels que l'assistance visant à accroître la productivité agricole, un fonds de roulement approprié ou un mécanisme de financement compensatoire FMI modifié, non accompagné de conditions d'octroi supplémentaires, etc.).
2. Aperçu des négociations - Seattle et l'avenir
La réunion a commencé par un examen du contexte politique dans lequel les négociations sur l'agriculture avaient commencé ainsi que des principaux problèmes qui risquaient de se poser et des possibilités d'avancer sur la voie de leur règlement. Deux points ont été mis en relief à cet égard: les incidences qu'aurait sur les négociations sur l'agriculture l'échec des efforts entrepris pour lancer une série de négociations générales à Seattle et la diversité des intérêts, des aspirations et des approches des Membres de l'OMC. L'on a considéré que les négociations avanceraient sans doute lentement au cours de la première année ou deux mais qu'il existait des possibilités considérables de progresser sur les questions liées à l'agriculture.
Le cadre des négociations
Quelques-uns des experts ont considéré que l'impossibilité de lancer une série complète des négociations à Seattle avait compromis les perspectives d'un progrès rapide dans les négociations sur l'agriculture. Ils ont relevé que certains des principaux participants aux négociations sur l'agriculture avaient indiqué clairement que, compte tenu des considérations politiques internes, ils ne pourraient faire de réelles concessions dans l'agriculture qu'en échange de concessions réciproques dans d'autres domaines (par exemple droits de douane sur les produits industriels, investissements ou politiques de la concurrence).
Quelques experts ont fait valoir que l'ampleur et la complexité de l'ordre du jour proposé à Seattle étaient l'une des raisons de l'échec de la Conférence ministérielle. Si un ordre du jour plus large pouvait créer des possibilités de compromis, ces experts ont noté qu'il importait de ne pas perdre de vue la capacité des divers Membres de l'OMC de négocier simultanément sur des questions multiples et que les pays participants ne pouvaient pas tous négocier simultanément sur une dizaine ou une quinzaine de questions différentes. De plus, quelques experts ont considéré que certaines questions, notamment les normes du travail, étaient si controversées qu'elles risquaient de mettre en danger l'ensemble des négociations. Ils ont noté que les divergences de vues qui s'étaient manifestées au sujet de l'inscription à l'ordre du jour des normes du travail ne s'étaient pas rétrécies et qu'il fallait être politiquement réaliste et aborder cette question de façon très discrète. Quelques experts ont fait observer que les négociations concernant les services pourraient fournir des possibilités suffisantes de compromis avec l'agriculture car il s'agissait d'un domaine dans lequel les pays développés, y compris ceux qui pensaient avoir les plus considérables concessions à faire dans l'agriculture, sortiraient probablement gagnants.
Diversité et communauté d'intérêts
La réunion a noté que la situation de l'agriculture, l'intérêt qu'ils portaient aux négociations et leurs approches au processus de réforme variaient beaucoup entre les différents Membres de l'OMC (qu'il s'agisse de pays développés ou de pays en développement). L'on a considéré que les principales divergences de vues entre les pays concernaient davantage l'étendue et le rythme des réformes que leur orientation générale. Il subsistait néanmoins des défis formidables.
S'agissant des pays en développement, il a été relevé que les États-Unis et les pays de l'OCDE membres du Groupe de Cairns partageaient, pour l'essentiel, des vues et des aspirations semblables axées sur les trois principaux domaines de négociation en cause (accès aux marchés, subventions à l'exportation et soutien interne). D'un autre côté, l'UE, le Japon, la Norvège, la Suisse et quelques autres pays de l'OCDE avaient jusqu'alors mis l'accent sur des besoins spécifiques liés à la sécurité alimentaire et à des considérations non commerciales touchant ce qu'ils considéraient être les fonctions ou rôles divers de l'agriculture. Certains de ces pays avaient également mis en relief la nécessité d'établir un meilleur équilibre entre les droits et les obligations des pays importateurs et exportateurs en resserrant les règles applicables aux exportations. Un expert a commenté que si ces pays envisageaient des compromis entre l'agriculture et d'autres secteurs, ils ne seraient sans doute pas disposés à accepter un processus de réformes qui condamnerait leur agriculture nationale. Dans ce contexte, un autre expert a fait observer que l'attitude fondamentale de l'Union européenne à l'égard du commerce de produits agricoles avait changé depuis le Cycle d'Uruguay, citant la réforme de la politique agricole commune de 1992 et Action 2000 comme des exemples d'une approche plus libérale dans ce domaine.
Pour ce qui était des pays en développement, la réunion a noté qu'en gros, les pays pouvaient être classés en trois groupes: les importateurs nets de produits alimentaires de base (par exemple les pays en développement membres du Groupe de Cairns), les importateurs nets structurels de produits alimentaires et les pays ayant un grand nombre d'agriculteurs de subsistance. Toutefois, nombre de pays en développement avaient des intérêts qui chevauchaient ces trois catégories. Beaucoup d'entre eux avaient des intérêts commerciaux communs avec ceux du Groupe de Cairns (par exemple la recherche d'un plus large accès aux marchés de leurs exportations et l'élimination des subventions à l'exportation) tandis que d'autres avaient des intérêts semblables à ceux des PDINA et des pays ayant de nombreuses populations agraires (par exemple la sécurité alimentaire et le développement rural). La réunion a noté que la plupart des pays en développement considéraient le commerce international comme un élément essentiel de leurs stratégies de développement.
Malgré la diversité des intérêts des pays en développement, l'on a estimé qu'il y avait une certaine communauté d'intérêts et une certaine convergence de vues. La réunion a relevé qu'il existait apparemment un terrain d'entente entre les pays en développement sur trois points:
La concurrence devait être égalisée dans le domaine de l'agriculture, c'est-à-dire qu'il fallait réduire les disparités entre pays développés et pays en développement pour ce qui était de l'utilisation de mesures de soutien et de protection;
Il fallait faciliter l'accès aux marchés des produits dont l'exportation présentait un intérêt pour les pays en développement; et
Un traitement spécial et différencié devait être accordé aux pays en développement pour leur permettre de poursuivre leurs objectifs de développement de l'agriculture.
Il a été relevé toutefois qu'il y avait entre pays en développement deux importantes lignes de clivage qui devraient retenir l'attention. L'une avait trait aux préférences commerciales (question de savoir comment les marchés protégés pourraient être libéralisés davantage sans compromettre les intérêts des pays en développement qui étaient lourdement tributaires d'un accès préférentiel à ces marchés) et l'autre était liée à la crainte des PMA et des PDINA de souffrir des effets négatifs possible du programme de réformes.
Nombreux ont été les experts à considérer que d'importants compromis avaient été réalisés pour aplanir les divergences de vues entre pays développés dans le projet de texte sur l'agriculture présenté à Seattle. En outre, ils ont été d'avis que le texte de Seattle avait également tenu compte dans une large mesure des préoccupations des pays en développement, y compris les pays les moins avancés. Ainsi, le texte de Seattle apparaissait comme un indicateur utile des questions à propos desquelles un accord était proche ou au contraire des compromis pourraient s'avérer difficiles. Un expert a fait observer qu'alors même que le texte de Seattle était dépourvu de statut officiel, "tout le monde sait ce qu'il contient".
Perspectives des négociations
La réunion a noté que les négociations avaient bien commencé malgré le problème qui s'était posé dans un premier temps et qui avait été réglé par la suite pour élire un président. La première session, en mars 2000, avait établi un programme de travail et les Membres s'étaient engagés à soumettre leurs propositions avant la fin de l'année, cette date butoir pouvant être repoussée en cas de besoin jusqu'en mars 2001. De plus, plusieurs des propositions devraient être présentées lors de la session extraordinaire du Comité de l'agriculture qui devait avoir lieu fin juin 2000. Par ailleurs, les aspects techniques des négociations avaient été considérablement facilités par l'information générée grâce au processus d'analyse et d'échange d'informations et aux préparatifs de la Conférence ministérielle de Seattle, y compris les informations rassemblées dans la documentation publiée par le Secrétariat de l'OMC.
Outre l'étendue des négociations à mener et la possibilité de compromis réciproques entre les secteurs susmentionnés, la réunion a noté que différents facteurs affecteraient sans doute le rythme et l'avancement des négociations. L'expiration de la "clause de paix" (Article 13 de l'Accord sur l'agriculture) à la fin de 2003 a été considérée comme un élément qui devrait aiguillonner beaucoup les négociations. La réunion a considéré douteux qu'en l'absence d'accord global, une entente puisse se dégager sur une prorogation de la clause de paix. Ainsi, le risque que les subventions à l'exportation et le soutien interne de l'agriculture (actuellement interdit par l'Article 13) suscitent des mesures de rétorsion ainsi que la perspective de devoir verser une indemnisation aux autres Membres de l'OMC pour compenser la perte de leurs débouchés encouragerait sans doute les gouvernements à parvenir à un accord avant la fin de 2003.
La réunion a observé en outre que, dans nombre de pays de l'OCDE, il s'exerçait des pressions tendant à obtenir une réduction des dépenses budgétaires consacrées à l'agriculture. Dans l'UE, par exemple, il y avait des pressions particulièrement vives tendant à réduire le soutien de l'agriculture avant l'expansion majeure de l'Union devant intervenir en 2004. La réunion a relevé que le climat deviendrait sans doute plus favorable à une libéralisation plus poussée dans nombre de pays de l'OCDE si les prix mondiaux des produits de base remontaient à moyen terme, comme cela était à prévoir dans la perspective d'une reprise de l'expansion économique mondiale. Enfin, s'agissant des pays en développement, la mesure dans laquelle leurs vues et leurs besoins seraient pris en considération lors des négociations dépendrait de leur degré de préparation technique et de leur aptitude à créer des coalitions entre eux et avec des pays développés.
3. Points clés des négociations et analyses à entreprendre
Afin de faciliter l'évaluation de la coopération technique dont les pays en développement avaient besoin, en particulier en matière d'analyses, les experts ont cherché à déterminer quels seraient sans doute les points clés des négociations dans le contexte des trois principaux piliers de l'Accord sur l'agriculture ainsi que des préoccupations non commerciales, du traitement spécial et différencié en faveur des pays en développement et de la Décision ministérielle de Marrakech sur les mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réformes sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires. Ils ont discuté des domaines dans lesquels des analyses plus poussées pourraient aider à élucider les problèmes et à évaluer les options dans le cadre actuel des négociations.
Accès aux marchés
Principaux points liés à l'accès aux marchés
Les experts ont noté qu'une simplification et une libéralisation des conditions d'accès aux marchés des produits agricoles permettraient aux pays de bénéficier davantage des échanges. La réunion a noté que si, en principe, les Membres de l'OMC appuyaient très généralement de nouvelles réformes en matière d'accès aux marchés, il serait peut-être difficile d'avancer vraiment dans le cas des produits "sensibles" (par exemple riz, sucre et produits laitiers). La réunion a discuté de plusieurs options qui pourraient améliorer l'accès aux marchés des produits agricoles:
Réduction des droits de douane. La plupart des experts ont été d'avis qu'il serait possible, dans le contexte des négociations, de parvenir à des réductions substantielles des droits consolidés pour la plupart des produits agricoles. Nombre de pays avaient apparemment assez d'"eau" dans leurs droits de douane pour pouvoir réduire leurs droits consolidés sans vraiment affecter leurs droits appliqués. L'on a considéré par conséquent que ces pays pouvaient défendre énergiquement des réductions substantielles des droits de douane. Dans ce contexte, l'on a évoqué la question de savoir si les futures réductions tarifaires devraient être fondées sur les droits consolidés ou sur les droits appliqués, souvent moins élevés. Toutefois, cette approche risquait, pensait-on, d'aller à l'encontre du but recherché car elle punirait les pays qui avaient décidé de façon unilatérale d'appliquer des droits inférieurs à leurs droits consolidés et découragerait les pays à appliquer à l'avenir des droits réduits du même type.
Crêtes tarifaires et progressivité des droits. La plupart des experts ont été d'avis qu'il fallait réduire la dispersion des taux des droits de douane appliqués aux produits agricoles et aux denrées alimentaires, tant par produit que par pays, tout en reconnaissant qu'il serait difficile pour certains pays de réduire les crêtes tarifaires dans le cas des produits sensibles. Ils ont relevé que la progressivité des droits posait un problème particulier pour les pays en développement car elle décourageait la diversification de leurs exportations dans des articles traités à valeur ajoutée.
Simplification des droits complexes. La réunion a noté que l'existence de droits spécifiques et de droits complexes compliquait la comparaison des conditions d'accès aux marchés d'un pays à un autre. En outre, les droits spécifiques tendaient à augmenter en termes ad valorem à mesure que les prix des importations baissaient. La plupart des experts sont convenus que des droits simples ad valorem étaient préférables du point de vue de l'efficacité des marchés.
Sauvegardes spéciales et autres mesures de stabilisation des prix. Il a été rappelé à la réunion que seuls les pays ayant adopté des mesures de "tarification" pendant le Cycle d'Uruguay et ayant réservé leurs droits d'invoquer les clauses spéciales de sauvegarde pour des produits particuliers étaient autorisés à le faire, et que tel était en particulier le cas du Canada, des États-Unis, du Japon et de l'Union européenne. Ainsi, cette mesure ne pouvait être invoquée que par très peu de pays en développement et par aucun pays dont l'adhésion était récente. Cela apparaissait comme un déséquilibre fondamental de l'Accord sur l'agriculture qui risquait de soulever un problème lors des négociations. En outre, la réunion a observé que rares étaient les pays en développement qui disposaient des capacités institutionnelles nécessaires pour appliquer des mesures comme la sauvegarde générale, les mesures antidumping et les droits compensateurs, et que l'application desdites mesures était un processus long et coûteux qui n'était guère d'utilité pratique dans le cas de l'agriculture. Plusieurs experts ont été d'avis qu'il faudrait utiliser la sauvegarde spéciale, mais d'autres ont estimé que les pays qui en bénéficiaient actuellement refuseraient sans doute d'y renoncer et que son élimination n'aiderait pas les pays en développement qui pouvaient l'utiliser et qui n'avaient pas d'autres moyens de réguler les poussées d'importations.
Utilisation des droits de douane pour compenser l'instabilité des prix. Il a été relevé que pour atténuer les effets perturbateurs des fluctuations des cours mondiaux sur leurs marchés intérieurs, quelques pays en développement appliquaient des droits variables dans les limites du plafonnement des droits consolidés. Dans un premier temps, quelques experts ont été d'avis que cette pratique était une forme de droits variables et qu'elle devrait être interdite. Cependant, lorsqu'il leur a été rappelé que les pays en développement n'avaient guère d'autres choix en présence de poussées des importations provoquées par une baisse des cours mondiaux, la réunion est convenue qu'il s'agissait là d'une question qui devait être analysée plus avant pour déterminer les mesures qui pourraient être adoptées pour tenir compte des besoins des pays en développement dans ce domaine (voir ci-dessous la section concernant le TSD).
Élargissement des contingents tarifaires et réforme de leur administration. La réunion a été d'avis que si l'élargissement des contingents tarifaires pourrait être un moyen efficace d'améliorer l'accès aux marchés, une expansion substantielle risquait de se heurter à une forte résistance. En revanche, la solution des problèmes qu'avait soulevés l'administration des contingents tarifaires semblait être une question sur laquelle un consensus général pourrait se faire, et la plupart des experts sont convenus que des réformes étaient à la fois nécessaires et possibles dans le contexte des négociations.
Préférences commerciales. Il a été relevé que les préférences commerciales accordées aux pays en développement, ou tout au moins à certains d'entre eux, étaient une question qui devait retenir l'attention. Le SGP, la Convention de Lomé et les préférences commerciales en faveur des PMA étaient les principaux systèmes qui appelaient une analyse plus approfondie.
Analyses à entreprendre au sujet de l'accès aux marchés
La réunion est convenue que différents aspects des conditions d'accès aux marchés devaient être analysés plus en détail. Il serait particulièrement utile d'analyser l'impact potentiel des différentes approches de la réduction des droits (formule suisse, réduction générale, zéro-contre-zéro, etc.), y compris leur impact aussi bien sur la structure des droits que sur les courants commerciaux. En outre, la réunion a considéré qu'il faudrait étudier les options pouvant politiquement être envisagées pour libéraliser les contingents tarifaires. En ce qui concerne les sauvegardes et la stabilisation des marchés, il a été convenu qu'il faudrait entreprendre une analyse pour identifier des mécanismes qui soient plus transparents, perturbent moins les marchés mondiaux et soient appropriés pour les produits agricoles.
S'agissant de savoir qui devrait entreprendre de telles analyses, les experts sont convenus qu'il faudrait établir une coopération plus structurée entre les instituts nationaux et internationaux de recherche et de développement pour mettre au point des outils d'analyse et de recherche. La Base de données sur l'accès aux marchés des produits agricoles[98] a été citée comme exemple d'une telle coopération. La réunion a examiné les moyens de coordonner les efforts à déployer pour rassembler les données nécessaires aux analyses visant à faciliter les négociations.
Concurrence des exportations
Principaux points liés à la concurrence des exportations
Les experts ont noté que les subventions à l'exportation étaient peut-être, de tous les instruments d'intervention employés dans le secteur agricole, ceux qui avaient l'effet de distorsion du commerce le plus marqué. Ils ont reconnu également que les exportateurs pouvaient tourner les disciplines applicables aux subventions à l'exportation au moyen d'autres pratiques anti-compétitives. La réunion a noté que les crédits à l'exportation étaient réglementés par l'Article 10 relatif à la prévention du contournement, mais il s'agissait là d'une question qui devait retenir davantage l'attention. La réunion a noté en outre que les règles applicables en matière d'exportation, dont certains considéraient qu'elles n'avaient pas assez retenu l'attention par le passé, devraient être étudiées plus avant. En outre, il a été admis qu'une concurrence déloyale pouvait être le fait aussi bien d'entreprises privées que d'entreprises commerciales d'État. Ainsi, il a été convenu qu'il faudrait analyser les comportements sur les marchés de ces deux types d'entreprises dans le secteur agricole. Il a été reconnu que quelques pays à faible revenu et à déficit vivrier étaient devenus tributaires d'exportations subventionnées, qui avaient beaucoup facilité leurs importations de produits alimentaires. Il fallait par conséquent trouver le moyen de résoudre les problèmes que poserait à ces pays la suppression des subventions à l'exportation.
Analyses à entreprendre sur la concurrence des exportations
La réunion a identifié plusieurs aspects de la concurrence des exportations qui devaient faire l'objet d'analyses plus approfondies. Il a été convenu que toutes les formes de concurrence des exportations devaient être analysées pour déterminer celles qui faussaient le plus le commerce et qui appelaient par conséquent l'application de disciplines. Les crédits à l'exportation et le commerce d'État ont été particulièrement mentionnés à cet égard. La réunion est convenue qu'il fallait analyser les différentes approches de l'élimination des subventions à l'exportation, comme l'impact des différents taux de réduction sur les prix des produits de base et les courants commerciaux. L'impact potentiel de l'élimination des subventions à l'exportation sur les pays à faible revenu et à déficit vivrier, en particulier, devait être étudié. La réunion est convenue qu'il était encore difficile de dire quel avait été l'impact, si impact il y avait eu, du Cycle d'Uruguay sur les prix des produits de base.
Soutien interne
Principaux points liés au soutien interne
La réunion a observé qu'en dépit des disciplines applicables en matière de soutien interne qui avaient été convenues dans l'Accord sur l'agriculture, elles n'avaient guère réduit le montant global des transferts à l'agriculture. En fait, le montant total des transferts à l'agriculture dans les pays de l'OCDE avait augmenté depuis 1995, bien que la plupart de ces pays n'aient utilisé que moins de la moitié de la MGS qu'ils s'étaient engagés à observer pendant la période 1995-1999[99]. Aussi ces pays avaient-ils la possibilité d'accroître encore plus le niveau de leur soutien. La réunion a fait observer que l'Accord sur l'agriculture était caractérisé par un déséquilibre fondamental en ce sens que rares étaient les pays en développement qui avaient les moyens financiers et les capacités institutionnelles nécessaires pour appliquer les types de programmes de soutien (mesures de la "catégorie verte") autorisés par l'Accord. En conséquence, nombre des experts ont considéré qu'il fallait simplifier et resserrer considérablement les dispositions relatives au soutien interne, particulièrement pour ce qui était des politiques exemptées. Il a également été rappelé à la réunion que de nombreux pays considéraient l'agriculture comme n'étant pas simplement une activité de production de produits alimentaires et de fibres et s'opposeraient à l'application de disciplines qui limiteraient leur capacité de préserver les fonctions multiples de l'agriculture (voir ci-dessous les "préoccupations non commerciales"). Plusieurs autres questions liées au soutien interne ont également été relevées, dont la mesure du soutien interne (MGS ou ESP), la fongibilité du soutien pour les produits spécifiques et sans considération de produit, l'impact de l'inflation et des taux de change sur la MGS et les effets sur la production et le commerce des paiements découplés.
Analyses à entreprendre au sujet du soutien interne
La réunion est convenue qu'il faudrait pousser plus loin l'analyse des questions susmentionnées en rapport avec le soutien interne, et en particulier des effets potentiels sur la production et les courants commerciaux des différentes propositions de reclassement et de réduction des mesures de soutien interne. Pour les pays en développement, il fallait analyser l'impact potentiel de la compensation d'une MGS négative pour un produit spécifique et d'une MGS positive sans considération de produit. Pour les pays développés, la "problématique du découplage" revêtait une importance fondamentale. Différents types de politiques de soutien devaient être évaluées pour déterminer dans quelle mesure elles faussaient la production et le commerce car, souvent, cela était difficile à dire. Les préoccupations non commerciales, en particulier, devaient être analysées dans le contexte des programmes de soutien interne (voir ci-dessous).
Préoccupations non commerciales
Principaux points liés aux préoccupations non commerciales
Les préoccupations non commerciales sont apparues comme une question risquant de susciter des controverses lors des négociations étant donné qu'il existe un profond désaccord quant à leur définition et à leur nature. Dans ce contexte, la réunion a considéré qu'il serait plus productif pour les pays d'identifier avec autant de précision que possible les objectifs spécifiques de leur politique dans les domaines non commerciaux ainsi que les instruments envisagés pour les atteindre, plutôt que de débattre dans l'abstrait du concept de préoccupation non commerciale ou de multifonctionnalité. La plupart des experts ont considéré que la "catégorie verte" constituait un cadre approprié à l'intérieur duquel les pays pourraient être autorisés à mettre en uvre des politiques tendant à défendre les différentes fonctions de l'agriculture. Le problème fondamental était de mettre au point, pour poursuivre les objectifs non commerciaux visés, des politiques de nature à avoir le moindre effet de distorsion du commerce. Il a été relevé que si la sécurité alimentaire était un problème qui préoccupait aussi bien les pays développés que les pays en développement, il était utile d'établir une distinction entre les préoccupations non commerciales des deux catégories de pays.
Analyses à entreprendre concernant les préoccupations non commerciales
Comme indiqué ci-dessus, la réunion a recommandé d'entreprendre de nouvelles analyses concernant la question des préoccupations non commerciales dans le contexte du soutien interne. L'analyse devait tendre principalement à évaluer les différents instruments d'intervention pouvant être envisagés à la lumière de leurs objectifs spécifiques afin d'élaborer des politiques qui aient le moindre effet de distorsion du commerce possible. Il fallait également analyser les différentes options politiques pouvant être envisagées pour renforcer la sécurité alimentaire, comme la constitution de stocks internationaux, des mécanismes de gestion des risques, des programmes d'assurance, etc. Il fallait préciser les préoccupations non commerciales aussi bien des pays développés que des pays en développement étant donné que les mesures et politiques à adopter pour y faire face pouvaient différer d'un groupe de pays à l'autre.
Traitement spécial et différencié (TSD)
Principaux points liés au TSD
La réunion a noté que l'objectif fondamental du traitement spécial et différencié devrait être d'encourager les pays en développement à participer plus étroitement au système commercial mondial et de faire en sorte qu'ils aient une part accrue des avantages apportés par les échanges. Les experts ont fait observer que, pour l'essentiel, la plupart des dispositions de l'Accord sur l'agriculture relatives au TSD étaient dépourvues de pertinence. Par exemple, la possibilité d'avoir recours à des taux de réduction moins élevés en matière de subventions à l'exportation et de soutien interne n'était d'aucune utilité pour la très grande majorité des pays en développement qui n'avaient ni le droit, ni les moyens financiers, d'appliquer de telles mesures. La réunion a noté que, paradoxalement, c'étaient les pays développés - et pas les pays en développement - qui bénéficiaient d'un traitement spécial en vertu de l'Accord sur l'agriculture (par exemple par le biais de la création de nouvelles barrières non tarifaires sous forme de contingents tarifaires, de la tarification "sale", de l'accès à la sauvegarde générale et de la possibilité de continuer d'utiliser des subventions à l'exportation et des mesures de soutien interne ayant un effet de distorsion de la production et du commerce supérieur aux niveaux de minimis de la MGS). Il a été rappelé à la réunion que les pays en développement et les pays dont l'adhésion était récente étaient souvent tenus d'appliquer des normes plus rigoureuses, pour ce qui était des instruments d'intervention qu'ils pouvaient utiliser, que la plupart des pays développés.
La réunion a discuté des différentes formes de TSD qui, en gros, étaient axées sur deux préoccupations de caractère général, à savoir une protection contre une instabilité excessive des cours mondiaux et les poussées concomitantes des importations pouvant perturber les marchés locaux et des conditions stables et prévisibles d'accès aux marchés privilégiant les pays les plus pauvres et s'appliquant non seulement aux produits en vrac mais aussi aux produits comportant une valeur ajoutée.
Fluctuations des cours mondiaux et poussées des importations. Il a été relevé que les cours mondiaux des produits agricoles étaient plus instables que ceux des autres produits et qu'il était difficile pour les pays en développement d'appliquer les mesures de sauvegarde et les mesures antidumping classiques. Par exemple, la cargaison d'un seul navire pouvait condamner à la ruine les producteurs nationaux d'un petit pays bien avant qu'une mesure de sauvegarde classique ne puisse être imposée. Par ailleurs, quelques pays en développement qui appliquaient des droits de douane à des taux bien inférieurs à leurs taux consolidés avaient à l'occasion relevé les taux appliqués lorsque les cours mondiaux étaient tombés à des niveaux très faibles. Aussi longtemps que le taux appliqué demeurait inférieur au taux consolidé, cette pratique était généralement considérée comme acceptable au regard de l'Accord sur l'agriculture. L'on a estimé néanmoins que nombre de pays ne seraient guère disposés à réduire encore plus leurs droits consolidés car cela pourrait limiter leur capacité de compenser les fluctuations des prix. La question a été posée de savoir si les pays en développement devraient être autorisés à porter leurs droits appliqués au-dessus du taux consolidé dans certaines circonstances (par exemple chute extrême des cours mondiaux ou poussées majeures des importations) pour protéger la production nationale de denrées alimentaires de grande consommation ou les producteurs de subsistance, aussi longtemps que la moyenne sur une période déterminée demeurait égale ou inférieure au taux consolidé. Il a été noté qu'un tel système, s'il était transparent, automatique et limité dans le temps et s'il encourageait la production de biens pour lesquels le pays n'avait pas d'avantage comparatif à longue échéance, pourrait constituer un mécanisme utile pour atténuer l'impact de l'instabilité des prix.
Meilleures conditions d'accès aux marchés. L'obtention de meilleures conditions d'accès aux marchés pour les exportations des pays en développement a été considérée comme une question de la plus haute priorité pour ces pays. Pour les pays les plus pauvres, il fallait étudier la question de l'octroi d'un accès préférentiel aux marchés des pays développés et des pays en développement à revenus élevés pour tous les produits, y compris les produits traités, ainsi que de la consolidation de ces préférences afin d'encourager les investissements dans le secteur. Il a été suggéré notamment que les exportations de PMA soient exemptées des contingents tarifaires sur les marchés des pays qui les appliquaient ou que les PMA et les autres pays en développement aient des droits prioritaires dans l'allocation des contingents tarifaires. Il a été relevé en outre que, pour certains pays, il ne suffisait pas de pouvoir accéder aux marchés: ils avaient également besoin d'une assistance technique et financière pour renforcer leur capacité d'exportation et ainsi tirer parti des possibilités de commercer qui s'offraient à eux.
Les autres questions considérées comme particulièrement pertinentes dans le contexte du TSD étaient notamment la fourniture d'une assistance aux pays en développement pour les aider à participer efficacement aux procédures de règlement des différends de l'OMC, l'importance d'un allongement des périodes de transition, une égalisation des droits et des obligations des pays développés et des pays en développement dans différents domaines (comme l'utilisation des subventions à l'exportation ou la possibilité de passer d'un soutien interne pour un produit spécifique à un soutien interne général sans être soumis aux limites de minimis) et la consolidation des engagements pris en matière d'assistance technique qui ne créaient précédemment qu'une obligation de moyens.
Analyses à entreprendre concernant le TSD
La réunion a recommandé qu'il soit entrepris plusieurs types d'analyses concernant les mesures relevant du TSD. L'un des thèmes de recherche devrait être une analyse plus approfondie des effets des formes actuelles de TSD afin d'identifier quels étaient les pays qui en bénéficiaient, dans quels domaines il se posait des problèmes et quelles formes de TSD étaient dépourvues d'utilité ou insuffisantes et devraient par conséquent être revues. Un problème fondamental était celui de savoir quels étaient les pays qui devraient pouvoir bénéficier des différents types de TSD, et il convenait par conséquent d'entreprendre une analyse sur les divers critères pouvant être appliqués. Il fallait également analyser les mesures spécifiques examinées plus haut pour en comprendre pleinement les incidences. Par exemple, l'idée consistant à autoriser les pays en développement à compenser les droits applicables aux denrées alimentaires de grande consommation sur une période donnée pour atténuer l'impact des fluctuations des cours mondiaux sur leurs producteurs devait être analysée pour en déterminer les effets potentiels sur les niveaux des droits, la production et les prix internes, les cours mondiaux et les courants commerciaux.
La Décision ministérielle de Marrakech sur les mesures concernant les effets négatifs possibles du programme de réformes sur les pays les moins avancés et les pays en développement importateurs nets de produits alimentaires
La réunion a relevé que si, du point de vue de la forme, les engagements pris dans la Décision avaient été appliqués, cela n'avait pas résolu comme il convient les difficultés des pays en développement importateurs de produits alimentaires. Il y avait à cela plusieurs raisons. Premièrement, la Décision ne définissait pas le problème comme il convenait. Essentiellement, elle cherchait à indemniser les pays des "effets négatifs" du programme de réformes, sans définir ce qu'étaient ces effets négatifs, ce qui laissait la porte ouverte à des interprétations divergentes. En outre, il a été relevé que la Décision ne déterminait pas quels étaient les droits et les responsabilités des différents acteurs. La réunion a identifié quatre domaines dans lesquels des études plus approfondies s'imposaient si l'on voulait que la Décision soit plus concrète et plus contraignante. Ainsi, il fallait:
Définir le problème avec plus de précision. Sur ce point, la réunion s'est généralement accordée à reconnaître que la Décision était censée remédier à l'éventualité d'une augmentation des factures d'importation de produits alimentaires due à une réduction des mesures de soutien interne et des subventions à l'exportation par les pays développés. La plupart des experts ont reconnu que la Décision devrait tenir compte des besoins des pays dont les capacités d'importer des produits alimentaires varient.
Identifier un mécanisme de déclenchement automatique. Il a été relevé que, dans la pratique, la Décision exigeait la preuve d'un préjudice et d'un rapport de causalité avec la mise en uvre du processus de réformes, ce qui était très difficile à établir étant donné la multiplicité des facteurs qui peuvent affecter les courants d'échanges et les prix de produits agricoles[100]. Plusieurs experts ont considéré qu'il faudrait envisager un mécanisme de déclenchement automatique lié aux coûts unitaires des importations "plutôt que de passer trois ans à débattre des raisons de la hausse brutale des cours internationaux des produits alimentaires de 1995-1996";
Spécifier les responsabilités des différentes parties (par exemple l'OMC, les institutions financières internationales et les pays exportateurs). À ce propos, l'on a considéré qu'il faudrait entreprendre une analyse de la question de savoir si l'OMC pourrait ou non jouer un rôle plus central dans l'application de la Décision, indépendamment d'un simple suivi de son respect;
Établir un mécanisme d'application efficace. Quelques experts ont pensé qu'il faudrait envisager de créer un fonds autorenouvelable spécial pour fournir une assistance et/ou une indemnisation. D'autres ont préconisé d'envisager un type de régime d'assurance pouvant être mutuellement bénéfique pour les importateurs et les exportateurs.
Il a été identifié d'autres difficultés pratiques liées à la Décision, qui avaient trait notamment à la détermination des produits qui devraient être couverts et des pays qui devraient pouvoir recevoir une assistance. Ces domaines appelaient une analyse plus approfondie.
La réunion a noté que quelques pays en développement importateurs de produits alimentaires qui avaient connu des difficultés depuis la mise en uvre de l'Accord sur l'agriculture, notamment une augmentation de leurs factures d'importation de produits alimentaires, des expéditions anticycliques d'aide alimentaire (l'aide alimentaire était abondante lorsque les cours mondiaux étaient faibles mais s'est contractée lorsque les prix ont augmenté) et la diminution des courants d'aide extérieure. Il fallait, dans le contexte aussi bien de l'OMC que de la Convention relative à l'aide alimentaire, trouver le moyen d'empêcher que l'aide alimentaire ne soit réduite lorsqu'elle était particulièrement nécessaire.
4. Besoins d'assistance technique
La réunion a relevé que, du fait de l'ouverture des nouvelles négociations sur l'agriculture, nombre de pays en développement avaient un besoin accru d'assistance technique. Elle a noté que l'Accord sur l'agriculture et les accords connexes du Cycle d'Uruguay n'étaient pas encore bien compris et que la complexité des rapports à présenter dépassait les capacités institutionnelles de nombre de pays en développement. Il a été rappelé à la réunion qu'environ la moitié des pays actuellement membres de l'OMC y avaient adhéré pendant ou après le Cycle d'Uruguay et n'avaient pas participé aux négociations. Ils n'avaient donc guère l'expérience de l'Organisation et pas de mémoire institutionnelle des négociations antérieures. La réunion est convenue que ces pays, en particulier, avaient besoin d'une assistance pratique pour les analyses et pour l'étude des aspects juridiques des nouvelles négociations.
La réunion a instamment demandé aux différentes institutions internationales de collaborer plus étroitement pour offrir une enveloppe cohérente d'assistance technique, à la fois pour pouvoir ainsi utiliser plus efficacement leurs ressources limitées et pour mieux satisfaire les besoins des bénéficiaires. Elle a reconnu l'énorme diversité des intérêts et des besoins des pays en développement et a instamment demandé aux institutions internationales de tenir compte de cette diversité dans la formulation de leurs activités d'assistance technique. Elle est convenue que les différentes institutions devraient donner des indications concrètes aux donateurs touchant les pratiques optimales à suivre en matière de renforcement des capacités. Tout en rappelant qu'il importait de préserver une diversité de vues, la réunion est convenue que les institutions devraient coordonner leurs efforts d'analyse et de renforcement des capacités pour éviter qu'ils ne se chevauchent à l'excès.
Eu égard à la distinction établie entre l'assistance technique "matérielle" (assistance opérationnelle et renforcement des capacités physiques) et "intellectuelle" (par exemple information, formation et conseils), la réunion a identifié les principaux domaines ci-après, dans lesquels l'assistance technique devrait tendre à:
Améliorer la connaissance que les pays en développement avaient du système commercial. La réunion a observé qu'il existait un besoin continu de formation dans ce domaine, eu égard en particulier à la rotation relativement rapide et au manque d'expérience des questions liées au commerce international des administrateurs des Ministères de l'agriculture et des affaires étrangères dans nombre de pays en développement. Elle est convenue que des séminaires d'information et des négociations à blanc constituaient d'importants supports didactiques, mais a souligné que le renforcement des capacités devait aller beaucoup plus loin. Les questions concernant les mesures sanitaires et phytosanitaires et les obstacles techniques au commerce étaient en particulier des domaines dans lesquels les pays en développement avaient besoin d'une assistance technique.
Formuler des propositions en vue des négociations. La réunion a observé que nombre de pays en développement avaient besoin d'être aidés à formuler des propositions en vue des négociations sur la base d'une analyse solide de ce qui répondrait le mieux à leurs intérêts nationaux. Il a été rappelé à la réunion que l'on ne pouvait pas fournir une assistance plus complète pour la formulation des politiques en quelques jours et que cela exigeait un engagement à longue échéance.
Faire comprendre les incidences des propositions. La réunion est convenue qu'il fallait constamment analyser l'impact des accords existants et les incidences des différentes propositions afin de faciliter le déroulement des négociations. Or, rares étaient les pays en développement qui avaient la capacité de mener de telles analyses. Il a été relevé que ce type d'assistance était déjà fourni dans certains cas sur la base des analyses réalisées par la FAO, la CNUCED, la Banque mondiale, l'OCDE et d'autres organisations. La réunion est convenue que des efforts supplémentaires, et mieux coordonnés, s'imposaient. Il a été relevé que les institutions devraient fournir aux pays en développement les informations et les analyses dont ils avaient besoin pour évaluer par eux-mêmes les incidences des différentes propositions avancées aux fins des négociations.
Améliorer la capacité d'exporter. La réunion a reconnu que les pays en développement, et particulièrement les PMA, avaient besoin de formes "matérielles" d'assistance pour améliorer la compétitivité et la capacité d'exporter de leurs économies. L'on a considéré que, pour ces pays, une libéralisation des échanges et une formation ne suffiraient pas pour leur permettre de satisfaire leurs besoins de développement, qui étaient complexes. Les institutions internationales devaient conjuguer l'expérience et les compétences qu'elles avaient acquises dans ces domaines pour aider les pays.
Renforcer les institutions nationales. Il a été noté que le commerce de produits agricoles, bien que crucial, n'était, quel que soit le pays, qu'un élément des efforts de développement. En outre, nombre de questions d'une importance vitale pour le secteur agricole avaient un caractère intersectoriel, comme la stabilité macroéconomique, des institutions juridiques efficaces, une infrastructure adéquate, l'éducation et la formation technique. Il fallait donc mettre l'accent aussi sur les aspects plus généraux du renforcement des capacités institutionnelles. Dans ce contexte, la réunion a reconnu que les institutions devraient aider à resserrer la coordination entre les Ministères de l'agriculture, de l'industrie, du commerce extérieur et des finances des pays en développement pour veiller à ce qu'une large gamme d'intérêts soient représentés dans les positions adoptées par les pays et que l'ordre du jour en matière de commerce extérieur fasse partie intégrante d'un cadre général de développement.
Annexe
Liste des participants
Experts indépendants |
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Iftekhar Ahmed Chowdhury |
Keiji Ohga |
Ashok Gulati |
Nestor Osorio-Londono |
Dale Hathaway |
Stefan Tangermann |
Rashid Kaukab |
Alberto Valdés |
Institutions |
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CNUCED |
OMC |
Banque mondiale |
OCDE |
Commissions régionales de l'Organisation des Nations Unies |
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Mohsin Hilal |
Cornelius Mwalwanda |
Secrétariat de la FAO
H. de Haen, Sous-Directeur général, Département économique et social
P. Fortucci, Directeur, Division des produits et du commerce international
Harmon Thomas, Chef du Service des politiques et des projections concernant les produits, Division des produits et du commerce international
Panos Konandreas, Fonctionnaire principal chargé de la liaison, Bureau de liaison auprès de l'Organisation des Nations Unies, Genève
Ramesh Sharma, Économiste principal, Service des politiques et des projections concernant les produits, Division des produits et du commerce international
Maria Grazia Quieti, Fonctionnaire principale chargée du soutien aux politiques agricoles, Service du soutien aux politiques agricoles, Division de l'assistance aux politiques
[95] Rapport d'une
réunion informelle de représentants des institutions
intéressées et experts sélectionnés du commerce
agricole tenue à la FAO à Rome les 12 et 13 juin 2000. [96] Voir l'annexe pour la liste des participants. [97] Les organismes coopérants sont les suivants: Agriculture et Agri-Food Canada, Commission des Communautés européennes, Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, Organisation de coopération et de développement économiques, Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement et Ministère de l'agriculture des États-Unis. [98] Voir note 3 ci-dessus. [99] OCDE, Policy monitor, 1999. [100] Selon les études de la FAO, l'impact sur les prix et les échanges a été modeste parce que les changements de politique imposés dans l'Accord sur l'agriculture étaient eux-mêmes réduits et que la période qui s'est écoulée depuis son application a été brève. Il est très difficile d'isoler l'impact qu'a eu l'Accord sur l'agriculture des effets du temps ou de l'infléchissement des politiques macroéconomiques et autres. La FAO suit la facture des importations céréalières des PDINA et des PMA. Il y a lieu de s'attendre que les pays ayant bénéficié de subventions à l'exportation et d'une aide alimentaire aient été lésés par l'Accord sur l'agriculture. Comme prévu, les études de la FAO ont constaté que la facture d'importation de ces pays a augmenté en 1995-1996 car, pendant cette période, ces pays ont procédé à des importations à des conditions commerciales. Lorsque les prix ont diminué, tel a également été le cas de leurs factures, qui sont demeurées néanmoins supérieures à leurs niveaux antérieurs. Voir par exemple P. Konandreas et R. Sharma, "The Net Food-Importing Developing Countries: Role and Perspectives", Chapitre 16 dans S. Bilal et P. Pezaros, eds., Agricultural Trade and the "Millennium" WTO Round, Institut européen d'administration publique et Kluwer Law International, Londres (à paraître). |