Il nous faut une technique efficace de présentation de notre thèse, garante de la crédibilité de la démarche suivie. Dans ces domaines, la légitimité dune argumentation tient essentiellement à son caractère systématique. Il nous faut donc trouver un mode dexposition des connaissances acquises qui soit fondé sur le processus suivi pour les obtenir... non en tant que seul mode dexposition possible.... mais comme un instrument indispensable pour aller au fond des choses et pouvoir les faire évoluer.
Michael A. Agar (1996:13)
Le recours à des méthodes de recherche éprouvées aidera les responsables des pêches à recueillir des informations fiables et probantes sur la culture des communautés de petits pêcheurs tout en procédant correctement dun point de vue déontologique. Le présent chapitre traite dans un premier temps de la nécessité de méthodes judicieuses et dapproches conformes à des règles déontologiques, avant de passer en revue plusieurs méthodes générales couramment employées dans les recherches en sciences sociales. On trouvera par ailleurs au chapitre suivant la présentation dune méthode générale remarquable par son efficacité et son exhaustivité, connue sous le nom de méthode d «évaluation rapide». La liste des ouvrages de référence suggérés figure à la fin de ces deux chapitres et permettra aux responsables des pêches de se faire une meilleure idée des modalités dapplication de telle ou telle approche à létude des communautés de petits pêcheurs.
De façon simple la définition dune méthodologie consiste essentiellement à trouver des réponses à la question fondamentale suivante: comment recueillir des informations fiables et probantes sur une pratique ou un comportement particulier observable au sein dun groupe, dune communauté ou dune culture? Cette question en entraîne deux autres étroitement liées: (1) comment peut-on étudier les phénomènes de façon à obtenir des informations exactes et pertinentes; et 2) comment dautres personnes peuvent-elles savoir ce que les chercheurs veulent dire effectivement lorsquils exposent leurs idées, leurs propositions et leurs théories et doivent-elles les croire?
La première question se rapporte aux techniques à mettre en oeuvre et aux conditions à réunir pour mener à bien les travaux dapproche et les recherches. La collecte dinformations sur les multiples phénomènes susceptibles dêtre étudiés doit faire lobjet de techniques et doutils spéciaux. Il en est ainsi de létude des cultures et des comportements humains, qui soulève des problèmes particuliers et comporte des besoins spécifiques quant au choix des méthodes. La plupart des données de base des travaux de sciences sociales proviennent de trois sources: (1) observation directe du comportement humain; (2) écoute et enregistrement de la teneur des propos des personnes étudiées; (3) examen des productions de lactivité humaine, en particulier du contenu des archives, des statistiques et des bibliothèques.
Outre les outils et instruments fondamentaux dobservation et de mesure, un chercheur en sciences sociales doit se référer à plusieurs ensembles de règles de procédure, notamment des concepts et des définitions, permettant de transformer les données recueillies en généralisations sur le sujet considéré. Lactivité scientifique semploie par ailleurs à établir des liens entre des généralisations limitées, de façon à former des ensembles plus vastes de propositions qui permettent de prévoir et dexpliquer les phénomènes observés. Un ensemble structuré de propositions est connu sous le nom de théorie. La méthodologie désigne les procédures et les règles de transformation au moyen desquelles un chercheur fait progresser les informations recueillies sur cette échelle dabstraction, dans le but de produire et de structurer un savoir de plus en plus étendu. Il est donc possible de distinguer la notion de «méthodologie» de celle de «techniques de recherche», dans la mesure où ces dernières se rapportent exclusivement en règle générale à la phase concrète de la collecte des données de base. Par contre, la méthodologie désigne la logique suivie lors du choix des techniques dobservation particulières adaptées au sujet considéré, du type dinformation recherché, du mode dévaluation des données et en définitive de la façon de les mettre en rapport avec des théories spécifiques. Aussi la méthodologie employée détermine-t-elle finalement la validité et la fiabilité des conclusions dun travail de recherche.
La science halieutique, à linstar de toutes les autres disciplines, fait lobjet des attentes propres à la «méthode scientifique» communément utilisée pour garantir la validité, la fiabilité et la répétabilité des données recueillies et des informations qui en sont déduites. Létude des êtres humains qui composent les communautés de petits pêcheurs amène souvent un chercheur à subir linfluence des impressions et des opinions exprimées par tel ou tel; il importe donc de disposer dun moyen pour faire la part entre ces impressions et ces opinions, et les faits recueillis de façon plus objective.
On peut définir la méthode scientifique comme une tentative visant à mieux comprendre une réaction, un comportement ou un phénomène en procédant comme suit: (1) définir clairement les problèmes, pour que les conclusions dégagées sappuient sur les connaissances acquises au préalable; (2) obtenir les données ou les informations indispensables à létude de ces problèmes; (3) analyser et interpréter ces données conformément à des règles clairement définies; et (4) transmettre les résultats de ces travaux à dautres personnes. La qualité des mesures détermine la qualité des travaux scientifiques - grâce au processus de vérification de la méthodologie.
Un travail scientifique sérieux doit comporter les éléments suivants pour que ses conclusions soient jugées exactes et fiables, comme pour constituer le point de départ dexplications et détudes plus détaillées:
(1) Le problème étudié ou le but du travail doit être clairement énoncé et ce problème doit se prêter à des travaux de recherche. Lénoncé du problème peut se réduire à celui dune hypothèse à vérifier, dun événement à décrire ou tout autre type possible dobjectifs de recherche.
(2) Il est impératif de définir les termes du problème. La définition peut comporter lidentification déléments ou dunités bien connus des chercheurs, la formulation de définitions pratiques (mesures, types dobservations, etc.), ou de définitions préalablement établies. Ces termes doivent se rapporter à des phénomènes observables.
(3) Les procédures ou méthodes dobservation liées à létude considérée doivent être indiquées de façon suffisamment détaillée pour permettre au chercheur qui en prend connaissance, dévaluer la pertinence et lexactitude des observations réalisées et de comprendre clairement comment reproduire ou répéter létude.
(4) Lanalyse des observations et des données doit respecter les règles logiques appliquées dans toutes les sciences.
(5) Les étapes (1), (2) et (4) doivent faire lobjet dune description de façon à pouvoir identifier le type de données susceptibles de contredire les résultats obtenus par le chercheur.
Lutilisation de la méthode scientifique donne des résultats satisfaisants qui réduisent les problèmes de crédibilité entachant souvent les recherches en sciences sociales. Les critiques des études consacrées par les chercheurs en sciences sociales aux communautés de pêche, ont souvent mis en cause la «validité» et la «fiabilité» de leurs conclusions..
La «validité» indique le degré selon lequel les observations scientifiques mesurent ou enregistrent effectivement ce quelles prétendent mesurer. Par exemple, un chercheur devrait utiliser un thermomètre pour mesurer la température et une règle pour mesurer des longueurs; sil ny a aucune modification des instruments utilisés, on devrait sattendre en principe à ce que les résultats restent identiques à la suite de plusieurs mesures répétées.
Létude des comportements humains suscite toutefois de nombreuses controverses quant à la validité des observations relatives aux cultures. La nourriture proposée à un invité par exemple, est-elle réellement une mesure des sentiments damitié et de lhospitalité? Les réponses fournies lors dinterviews porte-à-porte sont-elles effectivement représentatives des opinions et des sentiments de lensemble de la population? On suppose habituellement quil est possible de vérifier la validité de ces données en réunissant des informations complémentaires auprès dautres sources, et en procédant à leur collecte dans le cadre de séjours prolongés au sein dune communauté.
La «fiabilité» est étroitement liée à la validité puisquelle reflète la répétabilité des observations scientifiques. Autrement dit, le chercheur ou tout autre scientifique peut-il recueillir les mêmes informations en faisant appel aux mêmes techniques et parvenir aux mêmes conclusions? La fiabilité des travaux de recherche en sciences sociales sest avérée problématique parce-que les méthodes et documents employés, comme le style et le ton des interviewers et les contextes dans lesquels les entrevues ont eu lieu, sont autant de facteurs pouvant conduire à des résultats différents, même lorsque le travail est mené à bien par la même personne. Les chercheurs se sont donc employés à maximiser la validité et la fiabilité dans des situations de terrain en faisant appel à un assortiment de méthodes de recherche. Ainsi, lusage conjoint dobservations à long terme et dinterviews non structurées et par ailleurs, dinterviews structurées, de questionnaires et denquêtes, renforcent la fiabilité et la répétabilité et conduira en définitive à des résultats scientifiques de meilleure qualité.
Les problèmes méthodologiques mettent sérieusement au défi les chercheurs en sciences sociales, mais, en maintes circonstances, le bien-fondé éthique de leur tâche les met encore plus à lépreuve. La dimension éthique des travaux de recherche est prise en considération dans nombre de cas à la suite dun incident ou lorsque les travailleurs de terrain commencent à sentir un certain malaise dans la poursuite de leur travail. A ce stade, léthique des méthodes mises en oeuvre risque dêtre mise en cause, ou leur rôle à lintérieur du groupe social étudié, peut être contesté. On risque ensuite de se heurter à une brutale modification des conditions daccès au terrain, voire à un refus pur et simple. Sans doute les chercheurs considéreront-ils alors que leurs objectifs sont impossibles à atteindre et sinterrogeront peut-être sur les erreurs commises et sur leur origine.
Les préoccupations éthiques des responsables des pêches désireux de consacrer des travaux de recherche aux communautés de petits pêcheurs sont dautant plus complexes que leur travail est censé avoir un effet concret. Or, la déontologie de laction est étroitement liée à celle des travaux de recherche, puisque ces derniers peuvent conduite à ladoption de mesures concrètes comme au choix dorientations politiques. Quelques notions simples reflètent ainsi les principes de base des travaux de recherche consacrés aux communautés de petits pêcheurs conformément aux règles de déontologie: transparence quant à lobjet des travaux et quant à leur objectif ultime; confidentialité, qui garantit aux participants que leur contribution ne sera pas divulguée sans leur autorisation expresse; participation librement consentie qui garantit une parfaite liberté de participation aux travaux de recherche; et divulgation des risques qui implique une information claire des participants quant aux risques éventuels queux-mêmes ou dautres membres de la communauté peuvent encourir.
Pour des raisons dordre déontologique les recherches consacrées aux mesures concrètes et aux orientations politiques doivent être menées en fonction des intérêts des communautés considérées et de leurs membres, comme en fonction des préoccupations des organismes clients qui les financent. Ainsi, lorsquun chercheur pose la question «auprès de qui suis-je responsable?» La réponse doit être manifestement «en dernier ressort, auprès des pêcheurs de la communauté que jétudie». Cette réponse est une source de problèmes et dembarras pour les chercheurs dans les rapports avec leurs collègues et leurs supérieurs, raison pour laquelle les considérations déontologiques constituent un aspect dautant plus délicat des travaux de recherche en sciences sociales.
La phase de terrain dun travail de recherche devra nécessairement lever les obstacles sociaux et les barrières culturelles qui existent souvent entre le chercheur, les «sujets étudiés» et les «informateurs» ou «déclarants». Dans un travail de recherche consacré aux communautés de petits pêcheurs, les sujets étudiés sont potentiellement tous les membres de la communauté considérée, tandis que les déclarants sont des individus particuliers avec lesquels les chercheurs collaborent. La levée des barrières protectrices entre chercheurs, sujets étudiés et informateurs, correspond à un processus dit «détablissement de rapports». A la faveur de ce processus, on observera une certaine atténuation des tendances de tous les participants à protéger leur personnalité et leurs intérêts individuels.
Sujets étudiés et déclarants reçoivent souvent des garanties danonymat, bien que les chercheurs en aient rarement la maîtrise une fois les données recueillies. Tel est particulièrement le cas pour les études appliquées dans le domaine social et culturel quand les données sont transmises à un organisme client, qui ensuite en a le contrôle en dernier ressort. Il est également possible, pour certaines données ou conclusions de travaux, de les associer ou des les affecter à certaines personnes, bien que leurs identités ne soient jamais divulguées. Aussi est-il impératif de coder les données personnelles des déclarants de façon à protéger leurs identités effectives, et de présenter les données et les résultats de manière à empêcher leur attribution à des déclarants particuliers. Les déclarants doivent par ailleurs être informés quant aux limites de la confidentialité garantie et il convient de ne pas leur faire de promesses au-delà des possibilités réalistes dans ce domaine.
Le principe du consentement de plein gré exige des chercheurs quils informent parfaitement les déclarants quant aux buts poursuivis, au champs dinvestigation et aux répercussions éventuelles de létude, sils veulent obtenir leur consentement à y participer. Cette participation doit être volontaire, sans aucune menace ou implication éventuelle de mauvaise volonté ou encore de répercussions dun autre type advenant un refus de participation de déclarants potentiels. Un consentement de plein gré nexige cependant pas nécessairement dêtre donné par écrit. Dans certains cas, le fait que ce consentement soit exprimé oralement est souhaitable.
Lobtention dun consentement de plein gré exige des chercheurs une collaboration transparente et sans arrière-pensée avec les déclarants potentiels en encourageant leur coopération et leur confiance à légard de létude. De plus, les déclarants doivent être mis au courant des répercussions possibles de létude au sein de leur communauté - tant positives que négatives, même si cela risque daffecter leur disposition à participer. Enfin, les chercheurs doivent généralement éviter le recours à des moyens dissimulés pour étudier les communautés humaines.
Surtout dans le cadre dun travail de recherche appliquée, il est essentiel pour les chercheurs denvisager les implications potentielles de leur façon dagir et de leur travail au sein de la communauté étudiée. Au cours de la phase de conception, ils doivent en permanence poser les deux questions suivantes: «cette étude aura-t-elle des effets négatifs ou préjudiciables?» et «ce projet bénéficiera-t-il à la communauté?»; aussi, lobtention à ce stade de la participation des sujets étudiés est-elle souvent une première étape majeure, notamment pour les études susceptibles davoir des conséquences pratiques et stratégiques au sein de la communauté. Il incombe en outre aux chercheurs, depuis le début effectif de létude jusquà sa conclusion, de maintenir un niveau élevé dengagement en faveur du bien-être général de la collectivité en question.
Compte tenu de la complexité des sociétés, des communautés et des cultures humaines, qui faut-il croire ou en qui faut-il avoir confiance? Les données proprement dites, indépendamment de la façon dont elles ont été recueillies, sont-elles suffisamment probantes pour donner des arguments? Bien quune théorie convaincante développée dans un document bien écrit puisse influencer certains, pour être scientifiquement probant, lexposé dune thèse doit fournir des informations au sujet du chercheur, sur les modalités et les circonstances de la collecte des données et la façon dont elles ont été analysées et interprétées; toujours à cet effet, il doit donc être méthodique, et présenter les moyens mis en oeuvre par les chercheurs pour obtenir leurs résultats.
La conception dun travail de recherche implique donc lélaboration dun plan ou dune stratégie de principe concernant tous les aspects de la tâche entreprise, notamment un plan étape par étape décrivant le mode de collecte et danalyse des données utilisées. Il doit en outre définir des principes directeurs permettant détablir un lien entre les orientations théoriques et les méthodes de collecte et danalyse des données, de façon à assurer la validité scientifique des résultats. En tant que tel, le travail de recherche intègre les données méthodologiques et analytiques qui contribueront à la crédibilité, la validité, la répétabilité et la plausibilité de toute étude.
La suite de ce chapitre présente les méthodes suivantes couramment utilisées pour procéder à la collecte des données dans le cadre dun travail de recherche en sciences sociales: observation participante; collaboration avec des déclarants privilégiés; prise de notes sur le terrain; entretiens non structurés et semi-structurés; entretiens structurés; questionnaires et enquêtes; échelles et notations; observation discrète et approches participatives; le cas échéant, lintérêt particulier ou les inconvénients de leur application à létude des communautés de petits pêcheurs sont passés en revue. Les responsables des pêches auront tout intérêt à intégrer, dans la mesure du possible, des combinaisons des méthodes susmentionnées dans ce domaine. Le concours des spécialistes en sciences sociales dotés par ailleurs dune expertise en matière tant de conception et de méthodologie des travaux de recherche, que détudes sur le terrain, sera sans doute également un précieux apport.
Lobservation participante implique limmersion progressive des chercheurs au sein des communautés étudiées. Les chercheurs participent aux activités quotidiennes, aux rituels, aux interactions et à différents événements qui se produisent dans la population étudiée, ce qui leur permet de connaître sa culture. Cette approche fait appel à un vaste éventail de techniques de collecte des données, notamment entretiens (structurés, semi-structurés et non structurés), prise de notes sur le terrain, utilisation de listes de contrôle, questionnaires et observation discrète. Dans le cas des communautés de petits pêcheurs, lobservation participante peut seffectuer en mer lors des activités de pêche, à quai, dans les installations de transformation, de commercialisation et de distribution et dans les ménages, et de fait, pratiquement partout où les sujets étudiés peuvent se trouver.
La collecte relativement non systématique de linformation par observation participante est à la base de toutes les autres méthodes de recherche, comme des méthodes plus perfectionnées examinées ci-après. Les données préliminaires recueillies de cette façon fournissent aux chercheurs les informations et les renseignements nécessaires à lélaboration des questions posées en entretien, des questionnaires, des tests psychologiques et de différents outils de recherche spécialisés. Lobservation participante permet en outre de procéder à dautres vérifications permettant de contrôler et dévaluer les informations de terrain et les différentes données obtenues à laide de techniques plus spécialisées.
Lobservation participante exige beaucoup plus quune simple présence sur le terrain et lenregistrement passif de ce que les gens font et disent. Souvent, après avoir observé un événement ou un comportement particuliers, un chercheur doit prendre connaissance dautres informations qui ne peuvent être observées directement; selon son cadre de référence personnel, il pensera par conséquent à poser dautres questions, à établir des liens entre le comportement observé et dautres types de comportement, aux données à obtenir et à différents éléments à réunir pour compléter ses observations personnelles. Grâce à la structuration des observations, à létude systématique des relations envisageables, à une observation méticuleuse et à différentes méthodes, lobservation participante peut être adaptée en vue dune utilisation scientifique.
Dans des situations comportant une évaluation rapide, lobservation participante consiste généralement à se lancer et à se mettre à récolter des données, sans passer au préalable un temps considérable à établir des rapports. Cela consiste dans nombre de cas à se placer dans une situation de terrain, armé dune liste de questions à poser et dune liste de contrôle des données à recueillir. Bien que ce travail de terrain réduit limite le type et la quantité dinformations qui peuvent être recueillies, un chercheur peut accroître son efficacité en étant en partie familiarisé avec la culture et la communauté considérées lorsquil aborde la situation sur place. La lecture de toute publication disponible consacrée à cette communauté, les conversations avec les chercheurs qui ont auparavant travaillé dans ce cadre, et enfin, la vérification des données historiques et des données détat civil, de façon à réunir des données générales préliminaires, peuvent contribuer à ce résultat.
Lobservation directe réactive est une extension de lobservation participante. Il sagit dune technique dans laquelle le chercheur est directement impliqué dans lobservation du comportement des membres de la communauté, en faisant simultanément tout son possible pour effectuer des mesures ou prendre des notes, ou encore en leur demandant souvent comment ils réagissent à ce quil pense des observations réalisées. Cette forme intrusive dobtention des données savère au demeurant très utile pour recueillir des informations spécifiques, notamment lorsquil faut les obtenir rapidement. Elle a été mise en oeuvre de façon extrêmement probante pour recueillir des informations précises sur lefficacité au travail et le niveau deffort fourni, sur les niveaux de production, les régimes alimentaires, les interactions enseignants-élèves, et les contacts policiers- population civile, pour citer quelques exemples. Elle devrait donc constituer en outre un moyen efficace pour se renseigner rapidement sur ce que les membres des communautés de petits pêcheurs pensent des différentes pratiques envisagées de gestion et de politique. De façon générale, cette forme intensive et difficile de collecte des données exige une interaction constante entre le chercheur et les populations observées et place par conséquent sous tension toutes les parties concernées. Elle savère particulièrement efficace lorsquil y a eu suffisamment dinteractions préalables entre les chercheurs et les participants pour que la présence des premiers ne distraie, ni ne gêne indûment les seconds.
Lorsquon réalise une enquête par questionnaire, les déclarants sont choisis au hasard, ce qui garantit une représentation des différences dopinion et de comportements observables dans une communauté. Toutefois, les chercheurs désireux de recueillir des données spécifiques détaillées sen remettent parfois à des déclarants privilégiés. Par comparaison à lutilisation de questionnaires ou denquêtes - méthodes pouvant comporter lutilisation dun vaste échantillon de déclarants - la technique des déclarants privilégiés peut consister à se limiter à un très petit échantillon de membres de la communauté, lequel est par ailleurs étudié de façon plus approfondie. Pour que cette façon de procéder constitue une méthode de terrain efficace, les déclarants privilégiés doivent être fiables, et interrogés sur des sujets quils sont susceptibles de connaître. De plus, il convient de travailler avec plusieurs déclarants privilégiés, puisquen règle générale aucun déclarant à lui tout seul ne peut fournir des informations sur tous les aspects de tel ou tel phénomène auquel le chercheur sintéresse. En principe, les déclarants privilégiés doivent représenter différents horizons, de façon à garantir aux chercheurs lobtention dun point de vue le plus large possible, mais leur importance réside essentiellement dans le fait quils apportent une connaissance approfondie dun phénomène particulier. Autrement dit, les déclarants privilégiés seront généralement choisis davantage sur la base de leurs compétences et des informations spécifiques dont ils disposent que sur leur représentativité par rapport à la communauté.
Les entrevues de déclarants privilégiés constituent une partie importante du travail de recherche sur le terrain. Les bons déclarants sont les personnes avec lesquelles le chercheur peut parler facilement, qui comprennent le type dinformations requis et qui le fourniront aux chercheurs ou sauront où lobtenir. Ces entrevues sont utilisées au mieux de leurs possibilités lorsquelles sont étroitement intégrées à une observation participante; elles sont en outre particulièrement efficaces pour recueillir des informations concernant des pratiques et des comportements culturels qui ont disparu ou qui ont profondément changé au fil du temps.
Par contre, il importe que les chercheurs ne choisissent pas trop rapidement leurs déclarants privilégiés, par exemple, immédiatement après leur arrivée sur le terrain. Dans nombre de cas, les premières personnes à approcher un chercheur risquent dêtre des «autochtones marginaux», cest-à-dire des personnes proscrites dune façon ou dune autre, ou du moins imparfaitement acceptées de la communauté; aussi cherchent-elles parfois à améliorer leur statut et à prendre plus dimportance en gagnant la faveur des chercheurs, notamment ceux qui ont apparemment des liens avec les pouvoirs publics. Malheureusement, en cherchant à gagner la faveur des chercheurs, elles risquent de fournir des informations inexactes ou fausses, la majorité de la population pouvant alors hésiter à travailler avec des chercheurs qui se sont associés aux marginaux de la communauté. Lidentification et la sélection de bons déclarants privilégiés peut par conséquent prendre un certain temps et il préférable à cet égard dattendre que le chercheur se soit familiarisé avec la communauté et la culture en question.
La prise de notes sur le terrain est une technique fondamentale denregistrement de linformation; les notes de ce type incluent les livres de bord quotidiens, les journaux personnels, les descriptions dévénements et les propres notes des chercheurs à ce sujet. En principe, elles doivent être rédigées tous les jours pour éviter la perte de détails importants et doivent être aussi précises que possible de façon réaliste.
Lavènement des techniques modernes a facilité la prise de notes sur le terrain. Lutilisation de magnétophones et dordinateurs portables, par exemple, assure une plus grande précision dans lenregistrement des entrevues par comparaison aux notes manuelles ou à la reconstitution ultérieure ou de mémoire, de paroles ou dévénements, bien après les faits. De plus, la photographie, la vidéo et le cinéma peuvent saisir et retenir une somme de détails beaucoup plus importante par comparaison aux simples notes, fournissant ainsi des informations infiniment précieuses aux chercheurs. Naturellement, les déclarants ne doivent pas être enregistrés, photographiés ou filmés sans autorisation préalable. Toutefois, quel que soit lintérêt de ces techniques, elles ne doivent pas remplacer entièrement les notes prises sur le terrain, mais être mises en oeuvre conjointement, de façon à acquérir une connaissance plus complète de la communauté.
Les entretiens non structurés constituent la forme la plus répandue dentretiens utilisée pour recueillir des informations sur une communauté et sa population. Les membres de la communauté sont interrogés de façon formelle tout au long dune journée ordinaire - à bord de leurs embarcations, dans les champs ou chez eux, en mangeant ou en buvant avec eux, dans la rue ou en tout lieu approprié. En dépit de sa simplicité, ce type dentretien exige néanmoins un savoir-faire considérable de la part dun chercheur sil veut obtenir de bons résultats. Etablir des rapports, réussir à faire parler les déclarants en toute liberté et à obtenir linformation recherchée, savoir terminer lentretien et sassurer que linformation est systématiquement effectivement recueillie, quel que soit le caractère informel apparent de lapproche suivie à cet effet, figurent parmi les principales aptitudes dont un chercheur doit savoir faire preuve lorsquil utilise cette méthode.
Le contrôle exercé par un chercheur sur une situation dentretien non structuré peut être classé sur une échelle continue. A une extrémité, figure lentretien informel, caractérisé par une absence complète de structure ou de contrôle. Le chercheur sefforce simplement de se remémorer des conversations entendues dans la journée sur le terrain, puis les enregistre tous les soirs. Ces conversations sont habituellement consignées sous forme de notes de terrain au moyen dun ordinateur portable, ou dictées sur magnétophone. Il sagit sans doute de la meilleure méthode dentretien non structuré au début dune observation participante, lorsque le chercheur commence simplement à se familiariser avec les gens. Ce procédé continuera néanmoins à présenter un intérêt tout au long du travail sur place, pour établir un contact avec de nouveaux déclarants et pour explorer les nouveaux thèmes détude qui se dégagent.
Le niveau de contrôle suivant correspond aux entretiens non structurés, menés de façon plus formelle. En règle générale, déclarant et chercheur sinstallent spécialement pour procéder à un entretien. Bien que linterviewer ait un plan précis en tête, celui-ci est extrêmement souple et les réponses du déclarant ne font pratiquement lobjet daucune restriction. Ce type dentretien a pour principe damener les gens à parler librement et à sexprimer dans leurs propres termes, à leur propre rythme. Ils sont généralement utilisés lorsquon dispose de beaucoup de temps - par exemple, dans le cadre de travaux de terrain à long terme où les déclarants peuvent être interrogés à plusieurs reprises.
Par contre, lorsquun déclarant ne peut être interrogé quune seule fois, il peut convenir de procéder à un entretien semi-structuré. Ce type dentretien repose généralement sur lutilisation dune liste écrite de questions et de sujets introduits par le chercheur au cours de lentretien et traités dans un ordre particulier. Linterviewer conserve certes la souplesse nécessaire pour suivre les pistes ouvertes par le déclarant, mais semploie à obtenir par ailleurs certaines informations bien précises; celles-ci sont généralement consignées par écrit sur un imprimé appelé guide dentretien, suivi par linterviewer au fur et à mesure du déroulement de lentrevue; ces guides sont élaborés à partir des informations recueillies lors de précédents entretiens informels et non structurés; lapproche ainsi suivie est souvent particulièrement efficace pour recueillir des informations auprès des élites dune communauté, comme auprès de ceux qui ont acquis un certain niveau dinstruction, et des fonctionnaires de ladministration publique.
Les entretiens structurés consistent à soumettre chaque déclarant exactement au même ensemble de stimuli. Les stimuli peuvent être constitués dun ensemble de questions, dune liste de noms, dune série de photographies, déquipements de pêche, etc. Ces entretiens ont pour principe de contrôler les données de départ qui déclenchent chaque réponse, de façon à pouvoir établir une comparaison fiable des réponses obtenues. Les entretiens structurés permettent donc à un chercheur détablir des comparaisons dune personne et dun groupe à lautre.
Le schéma dentretien est une forme dentretien structuré comportant un ensemble formel de questions, semblables à celles dun recensement. Les entretiens structurés de ce type jouent dordinaire un rôle important afin de vérifier les données recueillies par dautres moyens et peuvent représenter un élément majeur dun travail de recherche visant à mieux connaître des communautés particulières. Par exemple, lorsque différents groupes sont présents dans une région il sera important dobtenir des données démographiques, pour pouvoir en extraire ultérieurement des échantillons stratifiés. Les schémas dentretien structuré peuvent demander des informations sur la composition des ménages notamment noms, sexe, liens de parenté, liens ethniques, appartenance religieuse, revenus, dates de naissances, niveau dinstruction, problèmes de santé, et activités professionnelles des différents membres du ménage. Evidemment, au sein des communautés de petits pêcheurs, ils peuvent également servir à obtenir des informations sur les méthodes de pêche, le matériel de pêche, les espèces récoltées, les niveaux de capture, ainsi que la participation aux activités auxiliaires.
Le recours aux schémas dentretien exige généralement une très bonne connaissance de la culture locale et des regroupements sociaux. Aussi, ne doivent-ils être employés quaprès avoir recueillis suffisamment de données à laide des techniques dobservation participante et dentretien informel et non structuré. Utilisés prématurément, les schémas dentretien risquent sinon de se traduire par une série de questions maladroites ou inappropriées et aussi par des réponses trompeuses.
Le questionnaire est la forme la plus courante dentretien structuré. Les questionnaires peuvent être remplis par le déclarant lui-même qui les envoie par la poste, ou être distribués et recueillis ultérieurement. Ils peuvent être complétés par téléphone ou en personne. Dans tous les cas, les questions posées sont les mêmes pour tous les déclarants. A lexception des questionnaires remplis par téléphone, les questionnaires peuvent être distingués des schémas dentretien dans la mesure où les déclarants répondent aux questions sous la forme indiquée par le chercheur, au lieu que le chercheur enregistre lui-même les informations.
La création dun questionnaire doit observer un certain nombre de règles, indépendamment du fait quil soit complété en personne ou à distance:
(1) Les questions doivent être sans ambiguïté, aussi claires et concises que possible, et utiliser un vocabulaire compréhensible de la part des déclarants, sans néanmoins paraître paternaliste ou condescendant.
(2) Les déclarants doivent avoir des connaissances suffisantes pour fournir des réponses précises aux questions posées. Faute de quoi ils risquent dêtre embarrassés et mal à laise si, à maintes reprises, ils doivent dire quils nont pas de réponse à la question posée.
(3) Le questionnaire doit paraître soigneusement conçu et bien organisé. Il ne doit pas comporter de questions apparemment gratuites et lorsquun sujet a été abordé il doit être terminé avant de passer au sujet suivant.
(4) Le chercheur doit se pencher attentivement sur les réponses aux questions conditionnelles ou aux questions de filtrage, en évitant de poser au déclarant des questions que leurs réponses antérieures ont dores et déjà éliminées.
(5) Il convient dutiliser des barèmes de notation clairs pour répondre aux questions de classement tout en donnant au déclarant toute latitude pour établir des distinctions, par exemple en prévoyant 5 réponses possibles et non 3 (par exemple «approuve fermement», «approuve», «neutre», «désapprouve» et «désapprouve fortement», au lieu de «approuve», «neutre» et «désapprouve».
(6) La liste des réponses doit couvrir, dans la mesure du possible, tout léventail des réponses envisageables.
(7) Les questions qui ne sont pas embarrassantes peuvent être posées directement, mais celles qui abordent des thèmes plus sensibles doivent être formulées de façon plus indirecte.
(8) Eviter les questions tendancieuses comme celles qui commencent par une formule telle que «est-il selon vous inexact que...»
(9) Eviter des questions qui laissent entendre ou impliquent lopinion, le sentiment du chercheur, sur certains sujets.
Les questionnaires sont mal conçus lorsque les chercheurs élaborent des séries de questions sans disposer des données générales appropriées: doù une série de questions mal formulées et de choix de réponses peu clairs. Il importe par conséquent pour le chercheur davoir une bonne connaissance pratique de la communauté avant de concevoir des questionnaires. Les questions doivent porter tout dabord sur des aspects plus généraux, puis passer à des demandes de renseignements spécifiques plus détaillés. De manière analogue, les demandes de renseignements à caractère plus privé ou délicat doivent être précédées de demandes portant sur des aspects plus généraux. Seules doivent figurer les questions concernant létude entreprise, mais en cas de doute, il est préférable de demander trop dinformations plutôt que pas assez. Enfin, à moins que le chercheur possède dores et déjà une vaste expérience en matière de rédaction de questionnaires dans la communauté considérée, il est indiqué deffectuer un essai auprès dun nombre restreint de déclarants, permettant ensuite dintroduire les modifications appropriées.
Un questionnaire à échelle graduée permet dattribuer des unités danalyse à des catégories dune variable ou dun concept, généralement au moyen dune valeur numérique. Les questions peuvent impliquer des considérations touchant à lâge, au sexe, au bonheur, à la satisfaction professionnelle et aux préférences en matière de loisir, pour nen citer que quelques-unes. Presque tous les aspects culturels peuvent être analysés au moyen dune échelle graduée.
Lorsque les informations demandées deviennent plus abstraites, passant de questions simples sur lâge et le sexe à des notions plus complexes comme la satisfaction professionnelle, la classe sociale ou le statut socioéconomique, la mesure doit utiliser un instrument complexe comportant plusieurs indicateurs. Ces mesures complexes ou composites sont appelées des échelles. Pour mesurer le statut socioéconomique, on associe communément des mesures du revenu, du niveau dinstruction et du prestige professionnel, du point de vue des déclarants. Aucune de ces mesures prises individuellement ne traduit la complexité du statut socioéconomique, mais une fois combinées elles en donnent une image plus complète. En fait, les mesures complexes sont utilisées lorsquun indicateur unique ne fournit pas suffisamment dinformations.
Lindex cumulatif constitue le type le plus courant de mesure complexe. Il regroupe plusieurs questions ou notions, toutes dotées du même poids. Les examens à choix multiples sont un exemple dutilisation dun index cumulatif. Leur principe réside dans le fait quaucune question ne peut mesurer la connaissance acquise par un étudiant du contenu dun programme; aussi, pose-t-on plutôt à ce dernier un assez grand nombre de questions sur ledit contenu. A chaque question correspond une valeur en points, attribuée à chaque réponse correcte. Ainsi, lorsquil y a 60 questions qui valent chacune 1 point, et si létudiant obtient 45 bonnes réponses, lindex cumulatif de réussite du test par étudiant est de 45 ou encore 75 pour cent. Néanmoins, le simple fait de réunir une série déléments pour constituer un index ne garantira aucunement la pertinence de la mesure composite obtenue.
Par comparaison à un index cumulatif, les mesures réalisées au moyen dune échelle de Guttman semploient à identifier certaines structures de réponses. Autrement dit, elles vérifient lexistence de corrélations conditionnelles: par exemple, si la caractéristique B est présente, alors A lest nécessairement, et si C est présente, alors A et B doivent lêtre également. Cette approche repose sur la théorie selon laquelle les attributs culturels sont acquis dans un certain ordre et présentent une certaine structure. Evidemment, il ne sagit pas dun système parfait et il y aura toujours des erreurs dans les données, dues habituellement à lexpression dun autre comportement culturel, par exemple la volonté de revenir à des valeurs plus traditionnelles. Néanmoins, des échelles de Guttman bien conçues permettent de se faire une très bonne idée des comportements propres à une communauté ou une culture particulière.
La forme la plus répandue déchelle est léchelle de Likert. Il sagit essentiellement dune échelle sur 5 points communément utilisée dans les questionnaires et particulièrement adaptée à la mesure de létat desprit individuel des gens - leurs attitudes, leurs émotions, leurs orientations - cest-à-dire de variables multidimensionnelles. Pour créer une échelle de Likert il faut tout dabord établir une liste des positions potentielles de léchelle de notation correspondant à un concept, puis déterminer les sous-ensembles mesurant les différents aspects. La création dune échelle de Likert doit suivre plusieurs étapes:
(1) Identifier et mesurer la variable mesurée, par exemple la satisfaction professionnelle. Les travaux menés à bien auparavant au sein de la communauté permettent généralement de réaliser cette opération initiale.
(2) Etablir une longue liste de questions et dénoncés indicateurs, susceptibles de fournir des informations sur la variable. Là encore, cette étape sappuie sur les étapes précédentes, sur une lecture approfondie des publications pertinentes ou sur des entretiens avec des déclarants privilégiés.
(3) Des idées indicatrices peuvent également être recueillies en interrogeant un vaste échantillon de la communauté sur les caractéristiques quils associent à la variable considérée.
(4) Ne pas fixer les positions extrêmes des rubriques indicatrices. Laisser les déclarants proposer eux-mêmes le domaine de variation des émotions concernant le sujet considéré.
(5) Etablir léchelle en observant les mêmes règles que pour lélaboration dun questionnaire.
(6) Déterminer le nombre de catégories de réponses. La plupart des échelles de Likert comportent un nombre impair de réponses possibles, les réponses intermédiaires correspondant généralement aux personnes sans opinion.
(7) Tester léchelle sur un échantillon de déclarants.
(8) Réaliser une analyse par rubrique afin didentifier les rubriques qui constituent une échelle unidimensionnelle de la variable mesurée.
(9) Réaliser létude complète et procéder à une analyse par rubrique pour vérifier si léchelle établie convient. Si tel est le cas, vérifier lexistence de liens entre les graduations de léchelle et les autres variables concernant la population étudiée.
La méthode sémantique différentielle danalyse par échelle graduée est une autre méthode permettant à un chercheur danalyser le mode dinterprétation des sujets étudiés vis-à-vis de choses telles que les objets inanimés, les objets animés, les comportements ou les concepts immatériels. Mais, contrairement à léchelle de Likert, la méthode sémantique différentielle vérifie les opinions des sujets étudiés en leur présentant un item ou un concept-cible, tel que le foyer, le mariage, linceste et établit ensuite une liste dadjectifs associés au concept-cible. Les déclarants sont ensuite invités à noter leur opinion concernant la rubrique-cible sur une échelle allant de 1 à 7, au moyen de groupes dadjectifs, tels que bon-mauvais, actif-passif, beau-laid, etc., suivant le type de cibles.
Lobservation discrète désigne toutes les méthodes détude du comportement lorsque les sujets considérés ignorent quils sont observés. Certaines méthodes dobservation discrète soulèvent des questions éthiques que les chercheurs doivent résoudre avant de les utiliser. On trouvera ci-dessous la description de certaines méthodes courantes dobservation discrète:
(1) Étude des traces de comportement; ce type détudes analyse les traces laissées par les actions et les comportements humains. Il comporte lexamen de détritus, de traces dusure sur les carrelages afin de déterminer la pièce la plus usée exposée dans un musée, et la durée de vie moyenne dune automobile en Amérique, notamment. On peut obtenir ainsi beaucoup dinformations quantifiables et comparables dun groupe à lautre et dans le temps. Des questions déthique se posent toutefois dans ce contexte en cas de découverte dinformations personnelles, par exemple dans létude par analyse des détritus. Néanmoins, à condition de prendre des précautions adéquates, elle peut constituer un précieux outil de recherche.
(2) Étude des archives; cette méthode implique dordinaire létude des documents publics concernant les naissances, les mariages, les décès, les délits, les migrations, les statistiques économiques et différents facteurs. En tant que méthode véritablement discrète, elle peut aboutir à des informations très précieuses, en particulier au sujet de lévolution dans le temps des caractéristiques culturelles. Les archives posent néanmoins le problème suivant: elles risquent de contenir de nombreuses erreurs, ce qui altère la fiabilité des données qui en sont extraites, en particulier lorsque le mode de collecte des informations de départ est indéterminé.
(3) Analyse de contenu; ce type détudes inclut lanalyse de toutes sortes de documents écrits en tant que source de données qualitatives, quil sagisse de fictions ou non, de contes populaires, darticles de journaux, de publicités, de films, de vidéos, de photographies ou de chansons. Il est possible de les étudier en sattachant à toute variable susceptible dêtre mise en corrélation ou interprétée en fonction dinformations historiques ou ethnographiques. Les problèmes inhérents à cette technique concernent généralement les bases de données proprement dites. En fait, linformation contenue dans les documents écrits nest pas forcément une image précise ou fidèle de la communauté ou de la culture étudiée.
(4) Observation déguisée; selon cette méthode dobservation le chercheur fait semblant de sassocier à un groupe et procède ensuite à son observation et à lenregistrement du comportement de ses membres sans leur dire quils sont observés. Il sagit sans doute de la forme la plus extrême de lobservation participante et dont lefficacité exige la capacité pour le chercheur de subir une intégration physique, linguistique et culturelle au sein du groupe étudié. Evidemment, cette méthode pose de nombreuses questions déontologiques, notamment dimmixtion dans la vie privée et daccord de plein gré.
Les méthodes de recherche dites «participatives» sont souvent évoquées sous le nom de méthodes de «participation populaire» et «dévaluation rurale participative» (ou PRA, Participatory rural appraisal) (voir Chambers 1994a, 1994b et 1994c). En fait, ces approches préconisent des niveaux élevés de participation et de collaboration entre les chercheurs (par exemple, des responsables des pêches) et les sujets étudiés (les membres des communautés de pêche), à tous les stades dun projet de recherche. Elles confèrent en outre aux intéressés des niveaux élevés de contrôle quant à la conception, à la conduite, à linterprétation et à lutilisation ultérieure du travail de recherche.
En dernier ressort, ces méthodes peuvent contribuer largement à une rapide amélioration des rapports entre les responsables des pêches et les pêcheurs; au mieux, elles peuvent constituer un moyen efficace pour promouvoir une meilleure gestion tout en renforçant le bien-être des communautés de petits pêcheurs. Les lecteurs sont invités à examiner les annexes figurant à la fin du présent rapport, dans lesquelles ils trouveront une description des approches participatives en matière de recherche, de gestion et de développement, qui ont été à lorigine dune amélioration de la gestion des pêches et dun renforcement des communautés de petits pêcheurs: Annexe 10.1, (Akimichi); 10.2 (Ben-Yami), 10.3 (Freeman et 10.5 (Stoffle).
Les approches participatives sont complexes et impliquent généralement une interaction permanente entre chercheurs et sujets détude, au cours de périodes de temps relativement longues. De fait, dans certains cas, le travail de recherche nest jamais terminé et implique en réalité la poursuite des efforts déployés par les chercheurs et par les sujets étudiés pour trouver des solutions à différents problèmes grâce à une adaptation continue de ces mêmes solutions, sur la base de lexpérience progressivement accumulée. Les étapes particulières à prévoir sont donc très variables en fonction de la communauté ou des communautés considérées et des principaux problèmes à résoudre, mais en règle générale, elles impliquent peu ou prou les phases suivantes:
(1) Les chercheurs (les responsables des pêches) et les sujets étudiés (par exemple, les membres de communautés de petits pêcheurs) font connaissance et sinforment de leurs préoccupations respectives. Cette phase peut être riche denseignements sur le plan culturel, du point de vue de tous les participants, dans la mesure où ils sont issus dhorizons culturels très différents. Il faut impérativement insister dès le début sur la nécessité de coopérer et de parvenir en définitive à un accord.
(2) Les principaux participants sont identifiés parmi les chercheurs et les sujets étudiés désireux dassumer des responsabilités, afin de travailler ensemble et de trouver aux problèmes précédemment rencontrés des solutions satisfaisantes pour la plupart des intéressés.
(3) Des solutions sont suggérées face aux préoccupations respectives des divers participants. Différents moyens sont également proposés pour évaluer lefficacité potentielle de ces solutions. Ces questions sont examinées aussi souvent et de façon aussi détaillée quil le faut, pour amener les participants à un accord quant aux mesures à prendre.
(4) Différentes solutions sont essayées à une échelle expérimentale, et leur efficacité est évaluée.
(5) En sappuyant sur la somme dexpériences acquises au préalable, les participants modifient les solutions expérimentées, continuent à travailler ensemble dans un esprit de coopération et poursuivent par ailleurs lexamen des étapes (1) à (4) ci-dessus.
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