Sena S. De Silva,
School of Ecology &
Environment,
Deakin University, PO Box 423, Warrnambool,
Victoria,
Australia 3280
John Moehl,
Fonctionnaire régional pour
lAfrique chargé de laquaculture
Benedict Satia, Devin Bartley et Rohana
Subasinghe
Département des pêches de la FAO
Rome,
Italie
Introduction
Les pêches réalisées à lintérieur des terres (en eaux intérieures) et laquaculture divergent sur certains aspects mais ont également des points communs. En général, les pêcheurs sont des chasseurs cueilleurs et sont très différents des aquaculteurs dun point de vue socioculturel. Les composants essentiels de ces cultures influencent la façon dont ils perçoivent leur environnement respectif et ses ressources. Dun point de vue institutionnel, la production des pêches est souvent contrôlée par la gestion des pêcheurs, soit directement (par le nombre de pêcheurs, la taille des bateaux, etc.), soit indirectement (par le nombre total de prises autorisées, etc.) alors que la production daquaculture est susceptible dêtre contrôlée par la gestion de lenvironnement aquatique. Dans ce contexte, une différence importante entre les pêches en eaux intérieures et laquaculture est la question de la propriété, officielle ou coutumière. Laquaculture implique lacceptation de la propriété des produits et, souvent, des installations délevage alors que les pêcheries exploitent la propriété commune. Typiquement, les pêches de capture utilisent des ressources en libre accès pour lesquelles la seule intervention humaine est la récolte de stocks de poissons sauvages. Laquaculture, dun autre côté, implique lexistence de systèmes où léleveur exerce un contrôle à la fois sur les organismes élevés et le milieu délevage. Certaines pratiques empruntent aux domaines des pêches de capture et de laquaculture et sont connues comme les pêches basées sur laquaculture ou pêches améliorées.
Les pêches basées sur laquaculture font référence à des pêches qui sont soutenues par un empoissonnement (post-larves, alevins ou juvéniles, etc.) dont lorigine est un établissement daquaculture, écloserie ou nurserie, et non des corps deau qui jusqualors ne soutenaient pas les activités de pêche. Les pêches améliorées font référence à des activités dont le but est de compléter ou de supporter le recrutement dun ou plusieurs organismes aquatiques et daugmenter la production totale ou la production déléments sélectionnés dune pêche existante jusquau niveau, ou au-delà du niveau, qui est normalement soutenu par les processus naturels.
Les pêches basées sur laquaculture et les pêches améliorées sont les composantes de systèmes de production aquatique existant dans de nombreuses parties du monde. Le savoir traditionnel et les pratiques de pêche améliorées, telles que des réserves dans la brousse ou système des Acadja, existent depuis longtemps (Welcomme, 2002). La plupart de ces pratiques sont complexes, impliquant différentes formes daccès à la ressource et de partition de celle-ci et sont, de façon caractéristique, basées sur des valeurs ou des croyances établies et acceptées. Les pêches basées sur la culture et les pêches améliorées sont considérées comme de laquaculture si lon admet que le matériel destiné au rempoissonnement est possédé par un seul individu ou un groupe dindividus (i.e. les éleveurs) tout au long de la période de croissance jusquà la récolte.
Convergences et Synergies
Le dénominateur commun entre les pêches dans les eaux intérieures et laquaculture est la production de poisson destiné à lalimentation humaine. Traditionnellement, dans la plupart des cas, cela se traduit par le fait que les deux activités sont surveillées par les mêmes services gouvernementaux (services des pêches, par exemple). Cependant, les disparités entre les deux types dactivité ont dans certains cas conduit à une séparation institutionnelle où, par exemple, laquaculture est liée à lélevage et les pêches, pratiquées dans les eaux intérieures, liées à la sylviculture et la faune sauvage. Les pêcheurs et les aquaculteurs ont souvent besoin de différentes formes de support technique. De plus, alors que les pêcheurs sont plus ou moins concentrés au bord de leau, les aquaculteurs peuvent être très éparpillés et difficiles à atteindre. Lorsque les fonctionnaires des pêches sont chargés de la réglementation et du contrôle de lactivité, une dimension supplémentaire intervient par le fait que les agents gouvernementaux sont perçus comme chargés dactions de police plus que de développement. La complexité institutionnelle peut être simplifiée, et le suivi amélioré, par des stratégies de cogestion des pêches qui deviennent de plus en plus prisées, notamment en Asie (Amarasinghe et De Silva, 1999; Middendorp et al., 1999; Sverdrup-Jensen, 2002).
Les pêcheries basées sur laquaculture peuvent offrir des avantages par rapport à des formes plus traditionnelles de pratiques aquacoles. Les avantages les plus évidents sont:
Les pêches en appui sur laquaculture ne sont pas consommatrices deau par opposition à certains systèmes intensifs ou semi-intensifs qui nécessitent un apport deau à intervalles réguliers pour maintenir la croissance et le bien-être du cheptel.
Les pêcheries constituent des utilisateurs, naturels ou quasi-naturels, de second rang de la ressource en eau existante et qui se posent rarement en compétiteurs des utilisateurs de premier rang, par opposition aux réservoirs deau établis pour laquaculture et pouvant interférer avec la disponibilité deau pour dautres usagers, agriculteurs, horticulteurs, etc...
Les pêches en appui sur laquaculture ne nécessitent daptitudes techniques que limitées et des investissements minimes, contrastant avec ceux imposés par des pratiques intensives ou semi-intensives délevage; de sorte que le transfert technique relatif aux premières est plus facile et attractif, même dans les secteurs les plus pauvres dune communauté.
Les pièces ou corps deau, propres à une pêche en appui sur laquaculture, sont souvent situés en zones rurales et sont, souvent, des ressources en propriété collective; lutilisation de ces pièces dans ce contexte doit se faire à léchelle de la communauté, au travers dinstitutions appropriées, et aura une incidence directe sur la réduction de la pauvreté.
En général, les pêches en appui sur laquaculture nimpliquent pas dapport en aliment, à lexception dherbe pour la carpe herbivore, en faisant ainsi une activité complètement non polluante; les poissons récoltés dépendent de la production naturelle du site.
Il existe également des inconvénients à ce type dactivité:
Ce sont des activités complètement dépendantes du climat et qui souvent nont pas de schéma de gestion de leau; les producteurs nont que peu de contrôle sur une production qui peut varier dune année à lautre et rendre ainsi difficile le développement dune stratégie de commercialisation.
La récolte de plusieurs pièces deau peut être nécessaire dans une zone ou une région donnée et sur un laps de temps relativement restreint (du fait de facteurs climatiques ou de régimes hydrologiques similaires); cela peut avoir pour conséquence une surproduction de poisson, créant un problème de marché et réduisant les profits des producteurs.
Ces activités sont généralement menées dans les eaux communales et dont laccès est public. Dans ce contexte, des structures et institutions adaptées et efficaces de gestion communautaire doivent être mise en place avant dinitier ce type dactivité.
Interactions
A léchelle mondiale, leau devient une ressource limitée et les activités qui sont basées sur les environnements aquatiques risquent daccroître la compétition alors que la ressource se réduit et que la demande augmente. De plus, à la fois la pêche et laquaculture sont en compétition pour des ressources rares, selon le lieu et le moment. La compétition peut revêtir diverses formes au-delà de la question de leau; laquaculture et la pêche partagent les mêmes fonds gouvernementaux pour leur soutient, en plus de partager le capital consommateur et le temps utilisateur. Ces interactions peuvent être neutres, synergiques ou antagonistes.
Pêche et aquaculture peuvent également avoir un impact lun sur lautre de différentes manières sur la ressource. Le poisson délevage peut, soit délibérément, soit accidentellement, séchapper dans le milieu naturel et entrer en compétition devenir prédateur ou encore perturber lhabitat naturel et la ressource. Dans le cas des pêcheries améliorées ou des pêcheries basées sur de laquaculture, il peut y avoir une augmentation de la pression de pêche pouvant influer sur les pêcheries classiques. La transmission de maladies des animaux délevages aux animaux sauvages peut aussi se produire. La contamination inverse est également possible quand des alevins sauvages sont collectés pour leur élevage. Les stocks sauvages et domestiques ont dautres interactions, notamment lorsque les premiers fournissent la diversité génétique nécessaire aux programmes damélioration génétique ou lorsque laquaculture permet de soutenir les espèces rares ou en danger. Lutilisation despèces exotiques ou de génotypes différents ou modifiés ont également un impact potentiel sur les pêcheries.
A la fois les pêches de capture et laquaculture nécessitent des environnements propices au bien être des cheptels même si les interactions apparaissent différentes en matière dusage de la terre comme de leau. Les changements dans les modes dutilisation peuvent avoir des effets à long terme sur la ressource primaire. En convertissant de la mangrove en bassins délevage, les producteurs de crevettes ont réduit lusage potentiel des écosystèmes notamment pour des pêcheries côtières. De tels changements de lhabitat naturel peuvent induire des perturbations de la diversité biologique dhabitats, comme la mangrove, qui sont des zones de reproduction et de nurseries ou nourriceries. Ces changements écologiques peuvent également être accompagnés de changement socioéconomiques significatifs voire même plus conséquents. Modifier les moyens de subsistance par une modification de la ressource peut avoir des répercutions qui, si lon ny prête pas attention, peuvent conduire à des confi its sérieux et même exacerber des conditions par ailleurs déjà désavantageuses.
Il y a de nombreuses facettes à ces relations à léchelle de la ressource. Au cours des cinq dernières décennies, lenvironnement aquatique, pour les eaux intérieures, a été lobjet de changements profonds dus aux activités humaines en particulier lendigage, la construction de barrages et la transformation des zones humides pour lagriculture. Ces interventions peuvent conduire à des interactions entre aquaculture et pêche. Les principaux objectifs de lendigage ont été la production de courant électrique, hydroélectrique, et la promotion de lirrigation en agriculture. La conversion de pêcheries de rivière en pêcheries de réservoir provoque généralement des changements dans la composition et la diversité des prises. Laquaculture est souvent mise en place afin de compenser les pertes (sous certaines conditions) et prendre avantage des habitats lacustres et fournir ainsi une alternative en matière de moyens de subsistance pour les personnes déplacées par la confiscation de terres agricoles. En plus des grands barrages, de petits réservoirs, dont les surfaces cumulées sont importantes, ont été mis en place à des fins dirrigation (FAO, 1999).
Les interactions spatiales peuvent être plus directes. Les installations aquacoles peuvent entrer en compétition directe avec celles des pêcheries. Dans certains cas, des fermes délevage de poissons ancrées à terre peuvent venir en compétition avec des communautés de pêcheurs et des zones de pêche. Dans des cas plus évidents encore, les élevages en cage se trouvent dans des pièces deau correspondant à dimportantes pêcheries. Dans ce cas, il peut y avoir des interactions positives lorsque les populations de poissons sauvages bénéficient de lalimentation dispensée aux élevages. Cependant, laccumulation de ces mêmes aliments sous les cages peut avoir un impact globalement négatif sur lenvironnement pouvant conduire dans des situations extrêmes à des mortalités de poissons quils soient sauvages ou élevés. La construction de bassins, à proximité de rivières, peut altérer les habitats aquatiques de manière profonde. La destruction des plantes terrestres et littorales pour dégager des zones de bassin peut avoir des conséquences sur la biodiversité locale; le détournement de leau par des digues ou des canaux altère le profil hydrologique dans des proportions conséquentes pour leau dont les pêcheries dépendent. En marge de ces changements, physiques de lhabitat, laquaculture peut déverser des effluents qui incluent des déchets métaboliques de laliment non consommé des pathogènes des échappés (espèces allochtones, parfois) qui peuvent avoir des conséquences sur la nature chimique et biologique des écosystèmes.
Laquaculture et les pêches en eaux intérieures interagissent également du point de vue économique et social. En réponse à la réduction des prises et au revenu généré par la pêche de capture, les gouvernements se tournent vers laquaculture perçue comme moyen de subsistance. Dans de nombreux cas, des produits aquacoles de haute valeur sont ciblés et perçus comme des marchandises destinées à des marchés dexportation. Cela conduit à transformer des zones jusqualors daccès libre, pour satisfaire les besoins domestiques, en des propriétés ou zones contrôlées par des producteurs ou des groupes de producteurs généralement absents de la zone ou producteurs absentéistes. Ce changement peut se compliquer des éléments socioculturels déjà mentionnés lorsque différents segments de la société élèvent ou prélèvent du poisson. Lorsque les prises baissent et que des gouvernements ciblent laquaculture pour combler ces pertes, laquaculture peut apparaître comme une conversion possible. Toutefois si les individus ne peuvent sadapter et passer du statut de chasseur cueilleur à celui déleveur, il y a peu de chance quils assument cette transition. Il existe de nombreuses illustrations de cette situation. Au cours des dernières décennies, par exemple, des gouvernements ont été encouragés à fournir le soutient initial pour létablissement de pratiques aquacoles (élevage en cage) comme une alternative aux moyens de subsistance de personnes déplacées. Toutefois le capital relativement élevé et les coûts récurrents des investissements pour laquaculture ont souvent tenté ces personnes de vendre leurs concessions à des producteurs commerciaux ouvrant ainsi de nouvelles opportunités pour des éleveurs absentéistes.
De plus, les sous secteurs interagissent en matière de prix et de commercialisation du poisson. Dans des zones où les pêches de captures prédominent, le consommateur peut parfois préférer des poissons sauvages à ceux délevage, et le prix pour les poissons sauvages est souvent plus bas. Dans des zones plus éloignées de pêcheries établies, où lélevage est plus compétitif, il peut ny avoir aucune tradition de consommation de poisson et les produits de la pêche nêtre pas bien reçus. En outre, les surplus de pêche des années particulièrement fastes peuvent trouver leur voie et pénétrer des marchés locaux assez reculés par rapport aux zones de pêche et affecter le marché du poisson daquaculture. Un scénario inverse, du type de celui de lindustrie du saumon en Europe et en Amérique du Nord, est celui où lefficacité de la production a conduit à un produit délevage à prix faible et à une baisse du prix du poisson sauvage. Si cette situation est bonne pour le consommateur, les pêcheurs en souffrent financièrement. De sorte quil y a un conflit potentiel entre les acteurs qui peuvent entrer en compétition pour lusage de leau et de la terre ainsi que des marchés. Dans les pays en voie de développement de la zone tropicale, cependant, la plupart des pêcheries en eaux lacustres sont artisanales et subviennent aux besoins quotidiens de communautés vivants dans un proche rayon de ces pièces deau (Murray, et al., 2001). Le poisson issu de ces pêcheries ne vient généralement pas en compétition avec des produits daquaculture qui tendent à être commercialisés plutôt sur des marchés centraux pour une clientèle totalement différente, voire être exportés.
Les aspects des interactions entre pêche et aquaculture liés au développement sont considérables. Laquaculture commerciale est souvent proposée comme stratégie de développement. Cependant, ce scénario, basé sur des gains économiques théoriques et des expériences faites ailleurs dans le monde, na pas, le plus souvent, considéré de manière satisfaisante la contribution de la pêche aux moyens de subsistance et au recul de la pauvreté en zone rurale. Bien souvent, la valeur de ce type décosystème et de ressources na pas été correctement appréhendée.
Dans les zones tropicales, il existe des petits corps deau (< 100 ha), en nombre important (voir lexemple des lacs morts du Bangladesh), naturels ou artificiels, destinés à divers usages au premier rang desquels figure lirrigation. Ces pièces deaux ne sont pas, en général, perpétuelles, ne retenant leau que pour 6 à 10 mois de lannée, et le recrutement de poissons dans ces eaux est souvent difficile et inadapté à une activité de pêche, même de subsistance. Dun autre côté, de telles pièces deau sont idéales pour le développement dune pêche en appui sur laquaculture. Le choix des espèces pour ce type de pêcheries est en appui sur la demande des marchés et les préférences socioculturelles et la complémentarité des modes dalimentation des espèces lorsque plusieurs espèces partagent les mêmes eaux. Grossièrement, la production dépend de la quantité et de la qualité des alevins mis en élevage ainsi que de la productivité de la pièce deau.
Contribution à la Production de Poissons Destinés à lAlimentation Humaine
La contribution relative des pêches de capture en eaux intérieures à la production mondiale de poisson au cours des vingt dernières années est restée relativement stable (Fig. 1; FAO, 2001). Laugmentation de la production de poisson deau douce au cours des deux dernières décennies reflète en fait laugmentation de laquaculture. Cette tendance est particulièrement nette pour lAsie, le pilier de laquaculture mondiale (Subasinghe et al., 2001). En Asie, il y avait pénurie de produits issus des pêches en eaux intérieures et la contribution à la production de poissons deau douce a décru par opposition à la contribution de laquaculture (Fig. 2). Ce défaut de croissance des pêches en eaux intérieures est probablement dû à différentes raisons parmi lesquelles: (a) le déclin des populations de poissons des rivières pour diverses causes dont les barrages (Ex. hilsa - Tenualosa spp.), ou la pollution qui ont affecté de nombreuses pêcheries; (b) la sous-estimation des données effectives de capture dans les principaux systèmes de production (e.g., Sverdrup-Jensen, 2002); (c) le défaut relatif de pêcheries lacustres de poissons destinés à lalimentation humaine comparé aux activité récréationnelles dans la plupart des pays développés (Welcomme et Bartley, 1998; Miranda, 1999); et (d) le développement de pêcheries dans des zones lacustres de taille importante reste relativement récent (Huang et al., 2001), dont la gestion reste le plus souvent à optimiser (De Silva, 2001).
Figure 1. Total de la production mondiale des eaux intérieures et des pêches de capture en eaux intérieures et contribution de ces dernières au total (FAO statistiques, 2002).
Figure 2. Total de la production de poissons en eaux intérieures et des pêches de capture en eaux intérieures en Asie et contribution de ces dernières au total (FAO statistiques, 2002).
La production de poissons daquaculture dans les pays en voie de développement est dominée par les cyprinidés et les tilapias à un rapport de 25 pour 1, approximativement (FAO, 2001). Les principales carpes chinoises et indiennes sont indigènes à la Chine, lInde et le Bengladesh respectivement. Ces deux groupes de carpes élevées individuellement ou en association, parfois également avec des tilapias, sont réputés pour donner les meilleurs niveau de production (Thayaparan, 1982; Middendorp et al., 1999; Quiros and Mari, 1999). Tous les autres pays qui projettent le développement de pêcheries basées sur laquaculture peuvent dépendre despèces choisies dans ces deux groupes de carpes et de tilapias en plus de quelques espèces indigènes lorsquelles sont disponibles. Dans une perspective globale, un tel développement dépend fortement despèces exotiques plutôt quindigènes.
Dans la plupart des pays en voie de développement, les pêcheries basées sur laquaculture sont encore dans une phase initiale de développement, même si il est accepté depuis vingt maintenant quelles représentent un réel potentiel pour la production de poisson destiné à la consommation humaine comme le montre lexemple du Sri Lanka (Thayaparan, 1982; De Silva, 1988). Actuellement, cest en Chine que lactivité sest le plus développée avec en 1997 un production de plus dun million de tonnes pour une productivité moyenne de 743 kg par hectare et par an (Fig. 3). Les pratiques chinoises en la matière sont également exceptionnelles en ceci quelles sont essentiellement en appui sur des espèces indigènes comme les carpes chinoises ou le poisson Wuchang.
Figure 3. Production annuelle (1980 à 1997) de poissons, exprimée en milliers de tonnes, issue des pêcheries basée sur laquaculture et production moyenne par ha (en kg) en réservoirs en Chine (daprès Song, 1999)
Les récents développement dans les lacs morts du Bangladesh (Middendorp et al., 1999) et les petits corps deau de Cuba (Quiros et Mari, 1999), du Laos PDR (Lorenzen et al., 1998a), du Sri Lanka (Pushpalatha, 2001), de Thaïlande (Lorenzen et al., 1998b) et du Vietnam (Nguyen et al., 2001) sont très encourageants. Dans la plupart des pays, ce développement est en Figure 3. Production annuelle (1980 à 1997) de poissons, exprimée en milliers de tonnes, issue des pêcheries basée sur laquaculture et production moyenne par ha (en kg) en réservoirs en Chine (daprès Song, 1999). appui sur les communautés; des groupes dindividus en accès locatif (auprès des autorités gouvernementales appropriées) et/ou gérant des corps individuels deau pour des activités de pêche. Lorganisation de communautés conduisant à létablissement dinstitutions appropriées a été reconnue comme un facteur de développement décisif. La mise en place de stratégies adaptées en matière de récolte et de mise sur le marché est également cruciale pour la durabilité du secteur et assurer des bénéfices à court terme.
On estime quen Asie, ce sont près de 6,6 millions dhectares qui présentent un potentiel pour les pêcheries en eaux intérieures (FAO, 1999). De Silva (2003) estime que lutilisation de 25% de ce potentiel à des niveaux de production comparables à ceux de la Chine (Song, 1999) pourraient produire quelques 1,23 millions de tonnes et renforcer la production de manière significative. Il est également possible danticiper que dans la plupart des pays concernés, les structures privées dapprovisionnement en juvéniles ou alevins en support aux activités de pêches basées sur laquaculture vont se développer et pourraient amener une nouvelle dimension au développement rural.
Défis et Perspectives
Les synergies et les interactions décrites dans ce qui précède incluent des aspects institutionnels, sociaux,, économiques et biotechnologiques- espaces de complémentarité et espaces de compétition possible. La question transversale est celle de la disponibilité dune ressource limitée dans un monde où la population augmente et la qualité de lenvironnement baisse. Le dé. aujourdhui est de savoir équilibrer ces facteurs pour optimiser les interactions synergiques tout en minimisant celles qui apparaissent antagonistes. Cest en reconnaissant ces interactions que souvrent les possibilités de développement sectoriel pour une amélioration des moyens de subsistance en milieu rural, de la sécurité alimentaire, et une réduction de la pauvreté. Le dé. est de trouver des voies qui assurent un bénéfice mutuel pour laquaculture et la pêche dans les eaux intérieures. Les deux sous-secteurs demandent la formation dun partenariat car ils dépendent de la qualité du milieu et sont également affectés par dautres activités liées au développement. Cest une tâche aux multiples facettes. Elle implique lutilisation despèces correctement sélectionnées et leur adaptation responsable à des conditions délevage.
Lutilisation conjointe de lenvironnement et le partage de la ressource pour le bénéfice de communautés demandent que les actions individuelles ne soient pas traitées isolément mais comme une part dun système hydrologique plus large. Cette approche nécessite une compréhension large des systèmes et la perception intime de la complexité des interactions qui les rendent durables. Pour bon nombre des systèmes de pêcheries en eaux intérieures ou daquaculture, cela dicte une approche décisive du développement, délinéant les différents réseaux de ces biosphères. Dans certains cas, pour des ressources en eau de taille importante, il peut être judicieux davoir une approche intégrée, notamment lorsque des centres urbains existent et peuvent entrer en situation de conflit dusage. Quoique lélevage et la capture produisent un même produit final, les activités et les processus quelles impliquent sont sensiblement différents. Less femmes et les enfants jouent un rôle prépondérant pour la récolte, le traitement et la distribution du poisson. Lorsque la promotion est faite de laquaculture comme substitut à la pêche, il faut sassurer que le rôle des différentes parties concernées est correctement envisagé de sorte à ne pas déplacer certains segments de la société et que les nouvelles opportunités seront effectives.
Pour relever ces défis, les gouvernements, en collaboration avec les autres parties intéressées, doivent avoir une stratégie claire et complète pour le développement de leurs ressources aquatiques. Cela devrait se faire sur une approche holistique, compte tenu de la nature même de lutilisation de la ressource, aux multiples facettes, ainsi que les possibles compétitions et conflits. Ce cadre stratégique est des plus importants alors que les ressources humaines et.scales de nombreux pays deviennent de plus en plus limitées et que le secteur public doit faire plus avec moins, le plus fréquemment en partenariat avec le secteur privé. Cette stratégie doit identifier sans ambiguïté le rôle de tous les partenaires, leurs responsabilités et bénéfices. Une approche basée sur lécosystème est nécessaire, dans bien des cas circonvenant les limites géographiques. Les gouvernements, agences de développement et autres partenaires doivent reconnaître le bien fondé dincorporer la connaissance traditionnelle dans les programmes de développement de laquaculture et des pêcheries. De sorte que des études devraient être entreprises pour disséminer les bases de connaissance traditionnelle en pêche et amélioration des pêcheries afin daméliorer la compréhension de la complexité de lutilisation de la ressource. Des efforts devraient être portés à une construction en appui sur des pratiques existantes ou sur lagrégation de ces connaissances aux technologies et savoir-faire modernes.
Au travers de ces processus, il y a une dépendance forte vis à vis de linformation. Des voies dinformation efficaces et actives sont nécessaires au spectre des acteurs impliqués dans la gestion des ressources aquatiques afin quils prennent les décisions judicieuses et apprécient les implications relatives aux écosystèmes aquatiques considérés. La technologie de linformation a globalement rapidement évoluée mais, pour autant, des difficultés réelles ou apparentes perdurent notamment auprès des communautés et des zones rurales. Cela implique une recherche permanente des besoins pour comprendre la dynamique et les limites des interventions sur les écosystèmes liées à la pêche ou laquaculture. Il y a par exemple un besoin de mieux comprendre leffet des poissons échappés et des changements induits dans la biodiversité, des conséquences de la pollution et de la dégradation de lhabitat. Les gouvernements devraient appliquer lEvaluation de lImpact sur lEnvironnement (Environmental Impact Assessment, EIA) avant de sengager dans des activités qui ont un impact potentiel et devraient continuer de suivre les changements survenant dans les écosystèmes.
Les états et autres partenaires impliqués devraient travailler à lapplication effective des recommandations du Code de Conduite pour les Pêches Responsables (Code of Conduct for Responsible Fisheries) et appliquer les éléments des Directives pour la Pêche et lAquaculture dans les Eaux Intérieures (Guidelines for Inland Fisheries and Aquaculture), lorsque cest possible. Il faut rendre plus visible le rôle potentiel de laquaculture et de la pêche dans la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté et améliorer limplication des différents partenaires. Le rôle potentiel de laquaculture et de la pêche dans léconomie doit être souligné pour promouvoir la coopération des intérêts publics et privés. Le développement de laquaculture comme des pêches de captures doit être envisagé et abordé comme part intégrante du développement rural sur la base des outils disponibles que sont le Code de Conduite pour les Pêches Responsables, et, si justifié, lApproche pour des Modes de Subsistance Durables.
Limportance croissante de laquaculture dans la production de poisson destiné à lalimentation humaine est largement reconnue. De nouvelles améliorations des pratiques aquacoles et de nouveaux développements seront confrontés à des problèmes différents de ceux rencontrés au cours de la seconde partie du siècle dernier et dont lessentiel sera la compétition accrue pour les ressources primaires que sont leau et la terre. La situation est exacerbée là où lensemble de la production daquaculture est réalisé dans un monde en voie de développement et dans des pays parmi les plus peuplés, tels la Chine, lInde, etc... où la terre ou leau sont des biens précieux. Dans un tel contexte, lutilisation de grandes surfaces deau dans les pays en voie de développement pour produire du poisson par des pêcheries basées sur laquaculture constitue un potentiel considérable. Les efforts consentis en matière de développement doivent prendre en compte les interactions subtiles, les convergences et les différences ainsi que les synergies entre aquaculture et pêcheries.
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[6] Ce chapitre fournit
également des informations et données issues dune
communication intitulée Interactions entre les pêches de
capture en eaux intérieures et laquaculture; leur contribution
à la sécurité alimentaire et au recul de la pauvreté
en Afrique sub-saharienne, préparée pour la vingtième
session du Comité for les Pêcheries en Eaux Intérieures
(Committee for Inland Fisheries for Africa, CIFA), tenu à Yaounde,
Cameroun, les 2-5 décembre 2002. |