Page précédente Table des matières Page suivante


5 ACTIVITÉS DE GROUPE

Les groupes participatifs sont constitués autour d'activités qui répondent aux besoins et aux aspirations prioritaires déclarées de ceux qui souhaitent en devenir membres. L'objet de ces activités est essentiellement de caractère économique et répond à un besoin de développement: accroître la production et le revenu des membres, réduire les coûts, promouvoir l'autodépendance financière et contribuer au bien-être de la communauté.

La nature des activités de groupe est fonction des besoins, des vœux et des capacités de chacun des groupes, des perspectives économiques, et du potentiel social et institutionnel local, ainsi que de l'orientation, des objectifs, du personnel et des ressources du projet.

Quoique les activités de groupe puissent être très diverses, on en distinguera quatre grands types:

Choix des activités génératrices de revenus du groupe

Le principal objectif des activités de groupe dans tous les projets PPP est d'améliorer le revenu des membres du groupe, et de mobiliser l'épargne de celui-ci. C'est pourquoi le PPP met l'accent sur les activités génératrices de revenus ou réductrices des coûts, s'appuyant sur l'expérience locale et sur une technologie bon marché. Ces efforts ne se substituent pas à la production normale des membres, mais sont censés s'y ajouter. Les activités de ce type ont toutes chances d'élargir la base économique du groupe, de mobiliser l'épargne de ses membres, de renforcer sa cohésion, et de développer les compétences de gestion. Ce n'est qu'à un stade ultérieur que les groupes sont encouragés à entreprendre des activités de développement social ou communautaire.

Il importe que, dans toute la mesure possible, chaque groupe identifie, organise, entreprenne et évalue ses propres activités. Cela est essentiel pour le développement et le renforcement du groupe, et, à terme, pour son autonomie. Si, certes, le rôle des promoteurs de groupes est capital pour stimuler les activités collectives, surtout au départ, il doit se borner à faciliter les choses, et est appelé à décroître à mesure que les groupes s'affirment.

Vu que l'objectif principal de toute entreprise est de produire quelque chose qui trouvera preneur, le groupe doit apprendre à effectuer des études de marché simples dans leur communauté, afin d'identifier quels produits ou services correspondent à une demande, et de déterminer combien les consommateurs sont préparés à payer pour cela. Le groupe doit alors déterminer si ses membres, ont les ressources et les capacités voulues pour produire le bien ou le service en question. Le groupe doit choisir un produit ou un service qu'il soit à même de produire de façon à la fois économique et convenable, en évitant les processus de production complexes. Ensuite, le groupe doit calculer de quoi il a besoin pour créer l'entreprise, c'est-à-dire quelles compétences et autres ressources peuvent être apportées par chacun des membres. L'étape finale, et la plus importante, consiste à calculer les profits escomptables.

Chaque groupe doit établir un plan commercial collectif, simple, tenant compte de la situation socio-économique, des ressources et des problèmes des ménages participants. Il doit aussi établir un calendrier d'opération et planifier les activités rémunératrices accessoires, agricoles ou non agricoles, pour chacun de ses membres, individuellement, qui seront susceptibles de consolider leur base économique. Les études de faisabilité à petite échelle pourront être nécessaires pour aboutir à des propositions raisonnables d'activités de groupe. Ces études devront tenir compte des activités de génération de revenus existantes et des autres activités proposées par les pouvoirs publics ou les ONG dans la région. L'identification d'activités de groupe viables est aussi l'une des vocations de la recherche-action menée en parallèle-de nombreuses propositions pourront par exemple ressortir de l'enquête sur les ménages.

Problèmes rencontrés dans les activités de groupe

Le développement des activités de groupe peut rencontrer divers obstacles. Citons ici la fourniture insuffisante, inadéquate ou tradive des apports, l'insuffisance de la formation du personnel local de terrain et des membres du groupe à la dynamique des groupes et à la gestion des entreprises collectives, ou encore la prise en compte insuffisante des questions de faisabilité, de rapport coût-avantage, et de solvabilité des entreprises collectives.

La première haie à franchir pour la plupart des groupes est celle du financement de l'activité. Quand bien même le projet peut envisager d'apporter du crédit au groupe, l'expérience révèle que les activités initiales doivent être financées par les membres du groupe eux-mêmes sur leur épargne personnelle. Cela permet d'assurer que la portée des activités reste proportionnée aux capacités et aux ressources actuelles du groupe, cela renforce la détermination de celui-ci, et limite son endettement. Un autre des problèmes fréquents rencontrés dans le développement des activités est celui des besoins de formation du groupe. Ses membres n'ont souvent que des notions rudimentaires de lecture et de calcul, ce qui entrave la gestion. Hélas, les outils de formation adéquats manquent souvent cruellement.

A mesure qu'un groupe développe ses activités et constate les avantages que celles-ci lui procurent, il commence en général à en entreprendre d'autres, plus complexes. Le risque, dès lors, est que le groupe ait «les yeux plus grands que le ventre». Les promoteurs doivent donc aider le groupe à examiner objectivement la faisabilité des activités nouvelles envisagées, en évaluant la disponibilité des ressources collectives, des financements et des marchés locaux.

Ce n'est pas chose facile que d'enseigner à des groupes peu alphabétisés, maîtrisant mal l'arithmétique et sans grandes capacités d'organisation à gérer une entreprise. Le projet devra le cas échéant élaborer des outils et des méthodes de formation adaptés aux capacités d'apprentissage des membres des groupes. Ceux-ci devront s'efforcer de développer leurs compétences dans deux domaines critiques: la gestion opérationnelle et la gestion stratégique. La gestion opérationnelle traite des problèmes qui se posent dans les activités au jour le jour. La bonne gestion opérationnelle renvoie à la fois à une bonne maîtrise de la dynamique des groupes, de la gestion commerciale, au suivi et à l'évaluation, ainsi qu'à l'épargne et au crédit.

La gestion stratégique renvoie à la résolution des problèmes liés à l'évolution, dans la longue durée, de certaines activités de groupe, pour permettre à leurs membres de prévoir l'incidence de facteurs externes (par exemple nouvelles politiques de prix, ou dommages subis par l'environnement en raison d'une surexploitation agricole, ou d'un effort de pêche excessif).

Enfin, les groupes doivent examiner très soigneusement la faisabilité des activités de production collective qu'ils souhaiteraient entreprendre. L'expérience du PPP l'a montré: même si les membres du groupe obtiennent un meilleur rendement en mettant en commun les intrants et l'expérience, beaucoup ont appris, parfois à leurs dépens, que la production effective se fait le plus efficacement sur un mode individuel. De nombreuses tentatives d'exploiter des parcelles collectives ont échoué en raison des litiges relatifs à la répartition de la main-d'œuvre et à la division du revenu.

Le personnel de projet conseille en général aux groupes qui souhaitent utiliser des parcelles communes de planifier ensemble leur activité, mais de diviser la terre en lopins individuels pour la production effective. Les efforts collectifs sont mieux adaptés à la mise en commun de capacités techniques nouvellement acquises, ou aux tâches coûteuses ou pénibles telles que le transport des intrants et des produits.

Accroître le revenu

Au Ghana, les groupes s'adonnent à la culture du maïs, à la transformation du manioc, à la fabrication de briques et à la production d'articles de vannerie et de perles. En Thaïlande, ils élèvent des porcs, de la volaille et du poisson d'eau douce. Les groupes de Zambie ont créé des pépinières de multiplication de plants d'anacardiers pour la vente. D'autres groupes tirent un revenu de la production et de la commercialisation de légumes (ci-dessous).

Au Lesotho, les activités vont de la couture et du tricot à la production végétale, à l'élevage de volaille et autres animaux (un groupe qui élève des porcs a remporté le premier prix à l'exposition agricole nationale). Des groupes de Sri Lanka se procurent un supplément de revenus en pratiquant des cultures de rente intensives, en extrayant l'huile de sésame, en élevant des chèvres, ainsi qu'en louant leurs services.

Construction d'une école

Plusieurs groupes PPP du Ghana ont décidé que l'un de leurs besoins prioritaires était une école pour leurs enfants. Ils ont obtenu une petite parcelle d'un propriétaire, construit une école en terre compactée et en bambou, puis ont fait un recensement pour montrer que 60 enfants du secteur étaient d'âge scolaire. Le promoteur de groupe s'est rendu auprès des services académiques avec les résultats du recensement et avec une demande que des enseignants soient nommés à l'école. Les services ont donné leur accord, et l'école (ci-dessous), qui compte maintenant trois enseignants, accueille tous les enfants de la zone, et non pas seulement ceux des membres du projet PPP. Les groupes PPP ont aussi parrainé des rassemblements consacrés à la sensibilisation des villageois aux questions sanitaires.


Création d'une entreprise rurale

Deux groupes PPP au Ghana ont créé une entreprise hautement rentable de transformation du manioc.

Les groupes ont commencé en 1983 à produire du gari (farine de manioc déshydraté) pour se procurer un revenu supplémentaire. Ils se sont rapidement rendu compte qu'ils pouvaient dégager davantage de profit en développant leur production, en quantité et en qualité.

Les membres ont fait l'inventaire des matières premières, de la main-d'œuvre et des techniques de transformation disponibles, et ont évalué leurs besoins de transport, de commercialisation, de savoir-faire technique et de capital. Après avoir pris part à un atelier FAO sur les méthodes de transformation du manioc et sur la gestion des petites entreprises, ils ont construit un atelier de transformation sur une parcelle obtenue grâce à un membre de la parenté de l'un d'entre eux.

L'entreprise s'est développée rapidement. Les membres (ci-dessus avec un plant de manioc) transforment plus de 50 tonnes de manioc par an, et reçoivent maintenant des commandes des autorités publiques et des exportateurs vivriers.

Récemment, les groupes ont utilisé leur propre épargne pour acheter une broyeuse fonctionnant à l'essence. Ils ont aussi créé une exploitation de culture du manioc pour accroître leurs approvisionnements, et un élevage de porcs (qui sont nourris avec des épluchures de manioc).

L'importance de la planification collective

Les exemples empruntés à la Zambie et au Swaziland montrent bien combien il importe de bien planifier les activités de groupe.

Un groupe swazi avait décidé d'élever des poulets de chair pour la vente. Ses membres avaient obtenu un crédit pour construire un poulailler, avant de découvrir certains des problèmes que pose la gestion d'une entreprise rurale: variations imprévisibles de la disponibilité de poussins, coûts de transport élevés et marchés très volatils. Au bout de trois ans, cette activité parvenait à peine à dégager un profit, et les membres devaient rembourser le prêt sur leurs propres économies.

En Zambie en revanche, deux groupes ont décidé de créer des vergers d'orangers, mais une fois seulement achevée une étude détaillée de faisabilité qui montrait qu'ils pouvaient escompter des profits de 7 500 dollars par an au bout de 10 ans (voir graphique ci-dessus). L'étude estimait les coûts totaux à 3 800 dollars au cours des cinq années précédant l'entrée en production des arbres. Par la suite, les vergers produiraient initialement 1,5 tonne d'oranges, pour arriver à 9 tonnes à la cinquième saison de production. Il était alors prévu que le bénéfice total s'élèverait à 21 000 dollars.


Page précédente Début de page Page suivante