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7. ÉTUDE DE CAS

ENCART 2. PROPOSITIONS POUR L’AMÉNAGEMENT DES ZONES DE SAZILEY (MAYOTTE) ENVAHIES PAR LANTANA CAMARA.

Cette étude de cas est fondée sur Mas (1999) et le Schéma opérationnel de gestion de la pointe Saziley en 1998.

Lantana camara est la plante envahissante la plus présente à Mayotte en région sud, plus sèche, dans tous les endroits ouverts. Une étude menée en 1999 a contribué à une meilleure connaissance de la dynamique écologique de la plante sur le domaine de Saziley, situé dans un massif littoral atteignant 233 m d’altitude et protégé depuis 1991 entre autres pour ses qualités botaniques. Les résultats et recommandations de cette étude sont applicables en dehors du domaine de Pointe Saziley.

1. Caractéristiques envahissantes de Lantana camara:

• Grande plasticité biologique. Bien que l’espèce pousse principalement dans les zones sèches, elle colonise aussi les zones plus humides. A Pointe Saziley, elle est rencontrée à toute altitude.

• Heliophilie marquée qui favorise l’espèce dans les milieux ouverts ou de basse végétation. A Pointe Saziley, l’espèce est quasi-absente en forêt haute mais peut représenter jusqu’à 15 pour cent de la densité de population totale en faciès naturel de fourré bas.

• Toxicité marquée pour nombre de mammifères. Le bétail présent à Pointe Saziley ne broute pas la plante, dont l’étendue ne régresse donc pas.

• Propagation efficace par bouturage et marcottage, outre la grande capacité d’essaimage par les graines appréciées des oiseaux et des rats. A Pointe Saziley marcottage et bouturage sont les principales armes de la plante dans sa phase ‘d’avancée frontale’.

• Capacité à former des fourrés denses impénétrables, qui concurrencent sévèrement les autres plantes et causent la disparition des espèces endémiques. Au stade ultime d’envahissement à Pointe Saziley, des tapis mono spécifiques se développent.

• Allélopathie qui affaiblit les autres espèces et aboutirait même à Pointe Saziley à une auto-allélopathie du Lantana camara adulte sur ses propres graines.

2. Évolutions spatiale et temporelle de Lantana à Pointe Saziley.

L’intérêt de l’étude menée à Pointe Saziley réside dans l’analyse de l’implantation du Lantana camara et de sa dynamique temporelle.

• Première étape d’installation: la nucléation. Au centre d’une parcelle nouvellement en friche, le Lantana camara apparaît au pied des arbres résistants à la sécheresse, qui ont réussi leur implantation ou ont été préservés (le plus souvent Mimusops comorensis, Ochna ciliata, Erythroxylum sp., Tarenna supra-axillaris). Le Lantana disséminé par ornithochorie pousse en couronne plus ou moins continue autour des arbres. Il profite de la lumière intense et de l’enrichissement local du sol en matière organique par les arbres pour se développer.

• Seconde étape: l’avancée frontale. Les branches les plus anciennes des vieux pieds issus de la première étape d’implantation subissent un déséquilibre architectural, se courbent vers le sol, et marcottent, donnant naissance à un clone qui s’individualisera plus tard lorsque l’attache avec le pied mère se nécrosera. La protection du sol par ces vieux pieds avec enrichissement en matière organique morte permet une régénération naturelle par fructification en seconde couronne.

• Troisième étape: l’envahissement par barrochorie. La banque de graines de Lantana camara augmente dans le sol.

• Quatrième étape: le vieillissement de la phase envahissante. Le couvert se ferme. Il en résulte une organisation régulière des pieds de Lantana distants de 2 à 3 mètres, avec un étagement biologique des tiges. Sur le premier mètre de hauteur, le milieu est abiotique tant l’ombre est importante. Seul un enchevêtrement de branches mortes est visible. De un à trois mètres de hauteur, les branches viables s’épanouissent en se surcimant. La population est stable.

3. Degré d’envahissement, fonction:

• Du pâturage. Un pâturage actif favorise les herbacées telles que Panicum umbellatum (Poaceae) au détriment du Lantana. Un pâturage discontinu favorise une meilleure installation du Lantana moins concurrencé et piétiné et permet sa colonisation frontale jusqu’à la fermeture définitive du couvert et le blocage de toute régénération naturelle.

• Du potentiel de régénération naturelle de la zone. Sur une friche diversifiée en espèces et comportant notamment Ochna ciliata, Mimusops comorensis et Tarennna supra-axillaris, la fermeture du couvert arboré ou arbustif par la régénération naturelle permettra la stabilisation du développement du Lantana.

4. Recommandations pour l’aménagement des zones envahies.

• Arrachage des pieds de Lantana camara au stade de la nucléation.

• En forêt: coupe en dessous du plateau de tallage du Lantana camara au plus fort de la saison sèche.

• En faciès de fourrés ou de forêt basse et dans les enclaves où il est mono spécifique: arrachage du Lantana. La coupe à 0 cm n’empêche pas toujours la repousse en milieu ouvert.

• Dans tous les cas, il faut replanter immédiatement avec des espèces d’arbres et arbustes adaptées. Toutes les techniques visant à accélérer la fermeture de la couverture arborée doivent être mises en œuvre: réalisation de potets grands et enrichis, utilisation de grands plants en motte produits sur site, réalisation de la plantation dès les premières pluies, limitation de la reprise arbustive alentour par utilisation de systémique foliaire sur les repousses, entretien suivi des plantations (binage au cours de la saison des pluies, taille pour favoriser la montée des plants).

• Les principales espèces à utiliser sont indigènes: Mimusops comorensis, Poupartia gummifera, Erhetia cimosa, Commiphora arafy, Ochna ciliata, Ficus antandronarum, Trianolepsis africana et Sterculia madagascariensis.

5. Mise en oeuvre du contrôle de population.

Le travail d’éradication et de réhabilitation de Saziley s’effectue sur 115 ha occupés par Lantana camara (et autres exotiques).

En 2002, 10 ha ont été éradiqués à Saziley en utilisant les méthodes préconisées. Néanmoins la replantation ne s’est pas faite avec les espèces indigènes préconisées car ces espèces ne sont pas maîtrisées en pépinière. Calophylum inophyllum (takamaka), le Pterocarpus indicus (sandragon), et Gliricidia sepium, qui peut se révéler très envahissants aux Comores, ont été utilisées. Les essais en pépinière d’espèces indigènes font partie des objectifs à court terme du Service des eaux et forêts pour améliorer les prestations de réhabilitation.

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