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Chapitre 9. Techniques d'amélioration de l'efficacité agronomique des phosphates naturels


Les chapitres 5 et 7 montrent que la performance agronomique des phosphates naturels (PN) appliqués directement comme engrais phosphaté dépend de divers facteurs et de leurs interactions. Les facteurs principaux comprennent: (i) les propriétés physiques et chimiques des PN, (ii) les facteurs pédologiques et climatiques, (iii) les espèces de plantes cultivées et les systèmes de culture et (iv) les procédures de gestion de la production. Il existe des situations où les PN appliqués directement ne sont pas efficaces. Dans ces cas-là, il est possible d'employer divers moyens pour augmenter leur efficacité agronomique et rendre de ce fait les produits plus attrayants économiquement. Ce chapitre discute des diverses possibilités pour ce qui est des moyens biologiques, chimiques et physiques.

MOYENS BIOLOGIQUES

Les moyens biologiques d'augmenter l'efficacité agronomique des PN appliqués comme engrais phosphaté sont: (i) le compostage de résidus organiques avec du PN (phospho-composts), (ii) l'inoculation des graines ou des jeunes plantes avec des micro-organismes solubilisant le phosphate (champignons, bactéries et actinomycètes) et (iii) l'inclusion dans le système de culture de génotypes de plantes qui montrent une plus grande croissance racinaire et augmentent ainsi l'ampleur de l'exploration du sol, exsudent des protons et des acides organiques qui augmentent la solubilisation de phosphates difficilement solubles en diminuant le pH et/ou la chélation, et/ou produisent des niveaux élevés de phosphatase qui peuvent décomposer le phosphore organique en phosphore inorganique.

Phospho-composts

Le traitement des PN avec des matériaux organiques et leur compostage est une technique prometteuse pour augmenter la solubilité des PN et la disponibilité du phosphore (P) pour les plantes. La technologie est particulièrement attrayante quand: (i) des PN moyennement à fortement réactifs sont disponibles mais peu adaptés pour la production d'engrais entièrement acidulés tels que le superphosphate simple ou triple, (ii) des engrais organiques sont appliqués d'habitude pour maintenir la fraction organique des sols et combler en partie leurs besoins d'éléments nutritifs (comme dans la plupart des pays tropicaux), (iii) une agriculture biologique est pratiquée, qui exclut l'utilisation d'engrais transformés chimiquement et (iv) des sous-produits urbains et d'exploitation agricole doivent être débarrassés d'une façon sûre pour l'environnement. Les produits compostés avec des PN sont habituellement désignés sous le nom de phospho-composts.

Principes du phospho-compostage

Le phospho-compostage est basé sur des principes scientifiques. Pendant la décomposition des matériaux organiques, une activité microbienne intense se produit. Ceci a comme conséquence l'existence de nombreux types de bactéries et de champignons qui produisent un grand nombre d'acides organiques et de substances humiques. Certains des acides organiques les plus généralement produits sont: citrique, malique, fumarique, succinique, pyruvique, tartrique, oxaloacétique, 2-cétogluconique, lacticoxalique, propionique et butyrique (Stevenson, 1967).

Le terme de substances humiques est un nom générique donné à un grand nombre de polymères organiques amorphes et colloïdaux formés pendant la décomposition de la matière organique. Les substances humiques ont des poids moléculaires élevés et sont généralement plus stables que les acides organiques. Les substances humiques peuvent être divisées en trois fractions principales basées sur leur solubilité dans les acides et/ou les bases. La fraction qui est soluble dans les acides et les bases s'appelle acide fulvique, celle qui est soluble dans les bases mais précipite dans les acides est l'acide humique, et ce qui est insoluble dans les acides et les bases est l'humine. La fraction d'acide fulvique a le plus faible poids moléculaire, suivi de l'acide humique et de l'humine.

L'augmentation de la libération de phosphore par les PN semble être une fonction de l'acidification du PN par les acides organiques et surtout de leur capacité de chélation sur le calcium (Ca), le fer (Fe) et l'aluminium (Al) (Pohlman et McColl, 1986). La capacité plus grande des acides organiques, par rapport aux acides minéraux de force comparable, pour libérer le phosphore du PN et l'évidence directe de leurs capacités de chélation ont été étudiées (Johnston, 1954a, 1954b, Kpomblekou et Tabatabai, 1994a). Un autre facteur important dans la libération du phosphore du PN est la participation des groupements OH dans les acides organiques. Par exemple, il a été montré que l'acide citrique avec trois groupements carboxyles (COOH) et un groupement OH pouvait dissoudre plus de phosphore à partir du PN que l'acide cis-aconitique qui a trois groupements carboxyles mais pas de groupement OH (Kpomblekou et Tabatabai, 1994a).

L'acide fulvique est la plus réactive des substances humiques en adsorbant des quantités significatives de Ca2+ et en libérant des ions H+, augmentant de ce fait la dissolution du PN. L'acide humique peut former des complexes avec le phosphore et le calcium, et créer un puits entraînant une augmentation de la dissolution du PN (Singh et Amberger, 1990). L'application au sol de substances humiques augmente également le phosphore disponible pour les plantes du fait de la concurrence dans le sol pour les sites de rétention du phosphate et de la formation d'un enduit protecteur autour de ces sites. Un avantage additionnel de l'application de phospho-compost est le mouvement du phosphore dissous à une plus grande profondeur dans le sol, ce qui permet l'exploration d'un plus grand volume de sol pour l'absorption de phosphore par les plantes.

Considérations pratiques du phospho-compostage

L'engrais organique est un terme large qui comprend: les engrais préparés à partir du fumier de bétail, les déjections d'autres animaux, les résidus de récolte, les composts ruraux et urbains, et d'autres déchets animaux. La concentration des éléments nutritifs dans les matériaux organiques est variable. Bien que la plupart de ces matériaux contiennent des quantités significatives d'azote (N), ils contiennent peu de phosphore (tableau 28). L'efficacité des composts pour la solubilisation des PN change avec le type et la composition des déchets et avec leur niveau de décomposition. Cette efficacité est fonction de l'importance de la production d'acides organiques et de substances de chélation dans le compost, qui entraînent à leur tour des activités métaboliques des microorganismes comprenant des bactéries, des champignons et des actinomycètes. Les rapports indiquent que des matériaux végétaux tels que les feuilles, les résidus de récolte (par exemple les pailles de céréale) et les tontes de pelouse compostés avec des déchets animaux sont préférables parce qu'ils produisent plus d'acides organiques et de substances humiques. Le compostage du PN avec des fientes de volaille peut ne pas être une option choisie parce que les fientes de volaille contiennent de grandes quantités de carbonate de calcium et d'autres composés basiques qui gênent la dissolution du PN (Mahimairaja et al., 1995).

TABLEAU 28
Teneur en éléments nutritifs des déchets organiques et du compost d'exploitation agricole (base matière sèche sauf pour l'urine)

Catégorie

Source

Teneur en élémente nutritifs

N

P

K

Déchets animaux

Fumier de bovins

0,7

0,5

2,31

Urine de bétail

0,8

< 0,01

0,03

Excréments de mouton et de chèvre

2,0

0,51

2,32

Sol de nuit

1,2

0,35

0,21

Déchets de cuir

7,0

0,04

0,10

Engrais de ferme

Engrais de ferme

0,8

0,08

0,25

Composts et résidus de végétaux

Fientes de volaille

2,9

1,26

0,97

Compost urbain

1,8

0,44

0,62

Compost rural

0,8

0,09

0,21

Paille de riz

0,6

0,08

2,10

Feuilles et tontes de pelouse

3,0

0,30

3,50

Subba Rao (1982b) a fourni quelques conseils pratiques pour le phospho-compostage des résidus de culture:

La décomposition des matériaux organiques peut être accélérée par une inoculation microbienne du mélange (par exemple Aspergillus spp., Penicillium spp., Trichoderma viride, Cellulomonas spp. et Cytophaga spp.), et par l'addition de sources d'énergie (mélasse) aux résidus avant le compostage (Singh et Amberger, 1991).

Une proportion de quatre parts de déchets organiques avec une part de PN (sur la base du poids sec) semble être une combinaison efficace. Singh et Amberger (1991) ont étudié la dissolution de deux PN sédimentaires (Mussoorie et Hyperphos) appliqués séparément. Ils ont incubé le PN mélangé avec de la paille de blé avec un rapport de 1:4, l'ont inoculé avec l'extrait de sol et de compost, et ont également ajusté le rapport C/N en ajoutant de l'urine. Les auteurs ont indiqué qu'en 30 jours, la dissolution du PN a augmenté de 7 pour cent du phosphore total pour le PN Hyperphos et de 15 pour cent pour le PN de Mussoorie. L'addition de mélasse a augmenté de 3 pour cent la solubilité du phosphore pour les deux PN.

Efficacité agronomique des phospho-composts

Une augmentation de l'efficacité agronomique du PN dans les phospho-composts par rapport au PN directement appliqué est prévisible en raison de sa plus grande teneur en phosphore hydrosoluble et soluble dans l'acide citrique, phosphore qui serait disponible pour les plantes. De plus, les fractions solubles de phosphore devraient stimuler la croissance racinaire et faciliter une plus grande exploitation du sol enrichi en phosphore (Chien et al., 1987a, Rajan et Watkinson, 1992, Habib et al., 1999). Les travaux publiés sur l'efficacité agronomique des phospho-composts semblent être rares.

TABLEAU 29
Effet des sources de phosphore sur le rendement et l'absorption de phosphore par le pois chiche et guar

Traitement

Rendement de pois chiche

Rendement de guar

tonnes/ha

Grain

Paille

Grain

Paille

Témoin

1,47

5,10

0,54

1,9

PN de Mussoorie

1,57

5,40

0,68

2,16

Superphosphate simple

1,64

5,65

0,82

2,53

Phospho-compost

1,83

6,15

0,84

2,63

Compost seul

1,69

5,50



Compost + PN de Mussoorie

1,67

5,75



LSD (p = 0,5)

0,14

0,67

0,18

0,38

Note: Toutes les sources de phosphore sont appliquées à une dose équivalente à 17,3 kg de P par hectare.

Le phospho-compost préparé en mélangeant des résidus de l'exploitation agricole, des déjections du bétail et du sol (comme source d'inoculum bactérien) s'est avéré aussi bon que le superphosphate simple (SSP) (Bangar et al., 1985, Palaniappan et Natarajan, 1993). Les sources de phosphore ont été appliquées sur une base équivalente de phosphore total à un sol tropical et les cultures étaient: pois d'Angole, mil, Vigna radiata, guar et blé. A des valeurs de pH supérieures à 7,5, où on ne s'attend pas à ce que le PN directement appliqué se dissolve, le phospho-compost était aussi efficace que le SSP (tableau 29) (Mishra et Bangar, 1986). Cependant, les sources de phosphore ont été appliquées à une seule dose de phosphore dans ces études, ce qui réduit la portée des résultats.

Les besoins futurs de recherche

Le phospho-compostage offre l'avantage d'employer des PN inutilisables autrement, et d'éliminer des résidus organiques d'une manière sûre pour l'environnement. Dans les situations où les engrais organiques sont déjà utilisés ou sont une alternative viable aux engrais chimiques (Mugwira et al., 2002), le phospho-compostage est avantagé. Par ailleurs, si le phospho-compost doit être appliqué principalement comme source de phosphore, alors les avantages doivent être pesés par rapport au coût de préparation et d'application. Une recherche complémentaire est nécessaire pour déterminer scientifiquement la quantité minimum de compost exigée pour solubiliser le PN à un niveau où le produit serait économiquement aussi efficace que les engrais phosphatés hydrosolubles. Le programme de recherche devrait inclure des PN de différentes réactivités et diverses combinaisons des résidus organiques disponibles localement.

Inoculation de jeunes plants avec des endomycorhizes

Principes fondamentaux

Le terme de mycorhize se rapporte à l'association symbiotique entre les racines de plante et les champignons. Dans la nature, la plupart des racines de plantes forment des associations mycorhiziennes d'un type ou d'un autre avec des champignons du sol, les champignons mycorhiziens faisant fonction de poils racinaires. La mycorhize à vésicule et arbuscule (VAM) est le type de mycorhize qui améliore l'absorption de phosphore par les plantes et les espèces généralement utilisés sont Glomus fasciculatum, G. mosseae, G. etunicatum, G. tenue et Gigaspora margarita. Les champignons VAM infectent les cellules du cortex racinaire et forment un réseau interne d'hyphes ainsi qu'une croissance externe des hyphes. Ils possèdent des structures spéciales connues sous le nom de vésicules et d'arbuscules. Les arbuscules fortement ramifiés aident au transfert des éléments nutritifs du champignon vers les cellules de la racine de la plante, et les vésicules sont des structures en forme de sac, qui stockent le phosphore sous forme de phospholipides.

Les VAM sont géographiquement omniprésents et se trouvent dans une grande gamme d'environnements depuis les milieux aquatiques jusqu'aux déserts (Mosse et al., 1981, Bagyaraj, 1990). Les champignons VAM colonisent des plantes appartenant aux familles de la plupart des cultures. Les familles qui forment rarement des VAM comprennent les Cruciféracées, les Chénopodiacées, les Polygonacées et les Cypéracées.

Miyasaka et Habte (2001) ont passé en revue l'intégration des champignons mycorhiziens à arbuscules dans les systèmes de culture en vue de maintenir des rendements tout en réduisant les intrants en phosphore.

Mode d'action

L'augmentation de l'absorption de phosphore dans les plantes infectées par les VAM semble être facilitée par: (i) les hyphes fongiques qui explorent un plus grand volume de sol pour trouver du phosphore et rencontrent ainsi un plus grand nombre de sources ponctuelles de phosphore, (ii) les champignons qui solubilisent les minéraux phosphatés peu solubles (par exemple les PN) et (iii) les racines mycorhizées qui améliorent le taux d'absorption de phosphore, a) en augmentant le gradient de diffusion, b) en épuisant le phosphore jusqu'à des concentrations inférieures à ce que peuvent faire les racines non mycorhizées et c) en augmentant le transfert de phosphore entre racines vivantes et des racines mortes vers les racines vivantes (Bolan et Robson, 1987, Sylvia, 1992, Frossard et al., 1995, Lange Ness et Vlek, 2000, Brundrett, 2002). Les taux de transport de phosphore des racines mycorhizées ont été calculés comme étant 2 à 6 fois ceux des racines non mycorhizées (Jones et al., 1998).

L'effet des plantes mycorhizées par rapport aux non mycorhizées sur l'absorption de phosphore change avec le taux d'application de phosphore -l'absorption est généralement augmentée aux teneurs en phosphore faibles à intermédiaires (Ortas et al., 1996, Sari et al., 2002). L'infection change la courbe de réponse au phosphore qui a alors une pente plus forte et atteint un maximum à des teneurs en phosphore beaucoup plus basses, que ce soit avec un engrais entièrement soluble ou un faiblement soluble comme certains PN. Bien que certains chercheurs (Murdoch et al., 1967) aient conclu que l'efficacité est plus grande avec des engrais de faible solubilité (par exemple les PN), de telles conclusions semblent être le résultat des procédures utilisées avec une ou deux doses d'application de phosphore au lieu de plusieurs (Pairunan et al., 1980). Pour que les mycorhizes soient efficaces, une certaine concentration - seuil de phosphore dans la solution du sol doit être atteinte (Bolan et Robson, 1987), qui pourrait être aussi faible que 0,02 mg de P par litre (Manjunath et Habte 1992). Dans un même temps, des niveaux élevés de phosphore en solution pourraient diminuer le niveau de l'infection mycorhizienne (Kucey et al., 1989).

Application de la technologie pour augmenter la disponibilité du phosphore des PN

Par rapport aux plantes non mycorhiziennes, Pairunan et al. (1980) ont indiqué que les plantes mycorhiziennes augmentent l'efficacité des engrais d'environ 30 pour cent, y compris pour les PN. Comme les champignons mycorhiziens infectent déjà des plantes de la plupart des familles, l'objecif devrait être d'introduire, dans les plantes, l'endophyte mycorhizien le plus efficace. Les études indiquent que l'introduction de champignons VAM adaptés peut augmenter de trois fois les rendements en riz par rapport aux traitements non inoculés (Secilia et Bagyaraj, 1992). Arihara et Karasawa (2000) ont signalé que, au champ, le rendement et l'absorption de phosphore par le maïs augmentent quand il est planté après des cultures mycorhiziennes.

Diverses méthodes pour introduire des inoculums de VAM dans une culture au champ ont été examinées, par exemple l'enrobage des graines avec des inoculums de VAM et le placement des inoculums au champ sous les graines dans les sillons. La manière la plus intéressante et la plus pratique d'employer des inoculums de VAM se rencontre avec les cultures propagées de manière végétative et/ou les cultures transplantées. Dans cette situation, les cultivateurs doivent incorporer des inoculums sur les plateaux de bouturages ou les lits de pépinière. Les jeunes plantes qui poussent seront ainsi colonisées par les champignons introduits, et peuvent alors être transplantées au champ. Cette méthode a été employée avec succès en Inde sur des cultures agronomiquement importantes (par exemple piments, éleusine, tomate, citronnier et manguier) et sur des espèces d'arbres forestiers (par exemple Tamarindus indica et Acacia nilotica). Les champignons VAM sont disponibles dans le commerce dans certains pays tels que l'Inde. L'inoculation de VAM pour cultiver des jeunes plants de citronnier est en utilisation commerciale aux Etats-Unis (Menge et al., 1977). Recherche future

Il est évident que les champignons VAM augmentent l'absorption du phosphore des PN par certaines plantes (Pairunan et al., 1980, Barea et al., 1983, Toro et al., 1997, Yusdar et Hanafi, 2003). Cette technologie est particulièrement prometteuse pour des cultures poussant en pépinières, sur des plateaux de bouturage ou dans des gaines de polyéthylène et plantées ensuite au champ. Des recherches complémentaires sont nécessaires pour intégrer des champignons VAM dans les systèmes de culture dans le but spécifique d'utiliser le PN comme engrais phosphaté. Devront être évalués les effets quantitatifs des souches de champignons choisies sur l'absorption du phosphore des PN par des cultures par comparaison avec des sols naturels non inoculés. De telles études devraient inclure: des PN de réactivité différente, un engrais phosphaté hydrosoluble (par exemple le SSP) comme produit de référence et plusieurs doses de phosphore appliquées de sorte que des courbes de réponse puissent être dessinées. Les études devraient être entreprises au champ de sorte que le rapport coût/bénéfice de l'utilisation du PN avec et sans les champignons VAM par rapport à l'utilisation des engrais solubles puisse être calculé. Comme il est prouvé que les espèces de VAM sont très spécifiques par rapport à leur hôte et variables dans leur réponse à l'environnement minéral des sols (Bever et al., 2001, Ortas et al., 2002), les programmes de recherche devraient prendre en compte ces paramètres.

Utilisation des ectomycorhizes

Les ectomycorhizes se rencontrent généralement sur des cultures pérennes dans les familles telles que les Bétulacées, Diptérocarpacées, Fagacées, Myrtacées, Pinacées et Salicacées. Les ectomycorhizes sont décrites comme étant une association racine/champignon, dans laquelle le champignon se développe comme une gaine ou un manteau à la surface des racines. Le filet des hyphes pénètre jusqu'au cortex racinaire mais est confiné aux espaces intercellulaires (à la différence des VAM), qui forment des structures intracellulaires et produisent un réseau d'intercommunication connu sous le nom de réseau de Hartig. Du manteau, les hyphes avancent dans le sol et améliorent le transport du phosphate et de l'eau vers les plantes hôtes (Duddridge et al., 1980). Ceci devrait aider à augmenter la disponibilité de phosphore des engrais à émission lente tels que certains PN. Le champignon partenaire des ectomycorhizes peut être cultivé sur milieu synthétique avant l'inoculation. Castellano et Molina (1989) présentent des procédures détaillées pour la production d'inoculum et l'inoculation en pépinière.

Utilisation de micro-organismes solubilisant les phosphates

On a trouvé qu'un groupe de microorganismes hétérotrophes solubilise les formes inorganiques de phosphore, en excrétant des acides organiques qui dissolvent les minéraux phosphatés et/ou chélatent directement les cations associés à l'ion phosphate, libérant le phosphore dans la solution (Halder et al., 1990, Gaur, 1990, Bojinova et al., 1997, He et al., 2002). Ces microorganismes importants comprennent des bactéries: Bacillus megaterium, B. circulans, B polymyxa, B. subtilis et Pseudomonas striata et des champignons comme Aspergillus awamori, Penicillium bilaii, P. digitatum et Trichoderma sp. Les analyses des filtrats de culture ont identifié un certain nombre d'acides organiques tels que les acides lactique, glycolique, citrique, 2-cétogluconique, malique, oxalique, malonique, tartrique et succinique, qui ont tous des propriétés de chélation (Kucey et al., 1989).

Les essais en champ en Inde et dans l'ex-URSS ont prouvé que l'utilisation des micro-organismes solubilisant du phosphate (MSP) peut augmenter les rendements de cultures jusqu'à 70 pour cent (Verma, 1993, Wani et Lee, 1992, Subba Rao, 1982a). Ces cultures comprenaient l'avoine, la moutarde, les betteraves à sucre, le chou, la tomate, l'orge, le trèfle d'Alexandrie, le maïs, la pomme de terre, le riz, le pois chiche, le pois d'Angole, le soja et l'arachide. Les études in vitro ont montré la dissolution du PN par les MSP (Barea et al., 1983). Les résultats des tests en serre ont indiqué une meilleure réponse du blé et de l'oignon à l'application de PN quand les graines ou les jeunes plantes sont inoculées avec des MSP. L'augmentation de la croissance est plus grande avec des champignons VAM et des MSP en association que quand ces organismes sont employés séparément (Young, 1990, Toro et al., 1997, Singh et Kapoor, 1999). Il est probable que les MSP dissolvent du phosphore peu soluble, qui est absorbé par les mycéliums de VAM, selon différents processus, y compris la libération d'acides organiques (Illmer et al., 1995) et la solubilisation des phosphates de calcium (Illmer et Scinner, 1995).

Les besoins de recherches

Il est évident que les MSP, particulièrement en combinaison avec des VAM, augmentent l'efficacité agronomique des PN (Barea et al., 2002). Les MSP sont disponibles dans le commerce dans quelques pays (par exemple en Inde), où la production à grande échelle de MSP est en cours (cultures dans de grands flacons sur des agitateurs rotatifs ou dans des fermenteurs). Cependant, il n'est pas évident que ces microorganismes puissent augmenter l'efficacité des PN dans des conditions de champ à un niveau tel que les PN puissent être utilisés comme engrais alternatif. Des expériences au champ doivent être installées en des lieux spécifiques afin de fournir un test scientifique rigoureux de l'utilité pratique des MSP et des VAM pour l'augmentation de l'efficacité des PN, et en favoriser de ce fait leur utilisation accrue.

Utilisation des génotypes de plante

L'efficacité de l'absorption de phosphore peut être augmentée en choisissant des espèces ou des génotypes de plantes qui montrent plusieurs mécanismes permettant une absorption accrue de phosphore dans de mauvaises conditions d'approvisionnement en phosphore, comme: (i) une plus grande croissance racinaire permettant ainsi l'exploration d'un plus grand volume de sol, (ii) l'exsudation de protons et d'acides organiques qui augmentent la solubilité des phosphates peu solubles en diminuant le pH et/ou la chélation et (iii) la production de niveaux élevés d'enzymes phosphatases qui peuvent décomposer le phosphore organique en phosphore inorganique (Miyasaka et Habte, 2001). Une autre approche est d'utiliser les plantes qui sont tolérantes à la toxicité aluminique (Ishikawa et al., 2000).

L'acidité accrue du sol rhizosphérique peut augmenter la dissolution des PN et la disponibilité du phosphore pour les plantes. Ceci a été observé directement en tant que dissolution accrue de PN mais plus souvent indirectement en tant qu'absorption accrue de phosphore par les plantes qui acidifient leur rhizosphère (Bekele et al., 1983, Hedley et al., 1983, Moorby et al., 1988, Gahoonia et al., 1992, Haynes, 1992, Nakamaru et al., 2000). Hinsinger et Gilkes (1995) et Habib et al. (1999) ont également trouvé que la dissolution des PN était augmentée dans la rhizosphère de quelques espèces de cultures dans les sols alcalins. La sécrétion de protons par des racines se produit quand la somme équivalente de cations absorbés par les plantes (K+, Ca2+, Mg2+ et Na+) excède celle des anions (habituellement, NO3, H2PO4, SO42-, et Cl-). L'acidification du sol rhizosphérique est plus grande pour les légumineuses fixatrices d'azote, qui accumulent l'azote sous forme de NH3 par la symbiose avec des microorganismes du genre Rhizobium. Pour cette raison, les plantes légumineuses sont particulièrement adaptées à l'usage de PN.

Les racines de certaines plantes (par exemple le colza) peuvent également augmenter la dissolution de PN par sécrétion d'acides organiques, tels que les acides malique, citrique, oxalique et 2-cétogluconique, qui pourraient complexer les cations libérés par le PN (Ca, Al et Fe) en plus d'abaisser le pH du sol de la rhizosphère (Moghimi et Tate, 1978, Hoffland et al., 1989, Zapata et al., 1996, Nakamaru et al., 2000, Montenegro et Zapata, 2002).

Les stratégies pour améliorer l'efficacité des PN comportent l'utilisation de génotypes de cultures entraînant une acidification dans la rhizosphère, telles que les légumineuses -fixatrices d'azote et sécrétant des acides -en culture intercalée (légumineuses à graines) ou en mélange dans les fourrages (prairies), qui augmenteront la dissolution des PN et rendront du phosphore disponible pour les plantes voisines. Une alternative serait d'inclure ces plantes dans la rotation de cultures de sorte que du PN supplémentaire se dissolve et entre dans le pool de phosphore labile du sol.

Une nouvelle stratégie est d'améliorer génétiquement les espèces cultivées existantes afin d'augmenter la sécrétion par les racines d'acides organiques et de protons. De la Fuente et al. (1997) ont rapporté qu'une plus grande sécrétion de citrate se produisait hors des racines de tabac en raison de l'insertion d'un gène de citrate synthase de Pseudomonas aeruginosa. Des recherches supplémentaires doivent se concentrer sur la possibilité d'insérer des gènes producteurs d'acides organiques dans les plantes qui sont de mauvais utilisateurs de PN. Récemment, une approche combinée, c'est à dire recherche des génotypes tolérants à l'aluminium et efficaces pour l'absorption de phosphore, a été proposée afin de développer des systèmes durables de culture pour les sols acides des zones tropicales et subtropicales (Hocking, 2001, Keerthisinghe et al., 2001).

MÉTHODES CHIMIQUES

Acidulation partielle du phosphate naturel

Des phosphates naturels partiellement acidulés (PNPA) sont préparés en faisant réagir des PN, avec des acides -habituellement H2SO4 ou H3PO4 -en quantités inférieures à celles nécessaires pour faire, respectivement, du superphosphate simple (SSP) ou triple (TSP). L'utilisation de PNPAs s'est répandue en Europe et Amérique du Sud depuis que Nordengren (1957) a rapporté pour la première fois leur utilisation. La fabrication de PNPA peut offrir un moyen économique d'augmenter l'efficacité agronomique des sources locales de PN qui, autrement, peuvent être peu adaptées pour l'application directe. Pour cette raison, des études approfondies ont été -et continuent à être -conduites au niveau international (Hammond et al., 1986b, Rajan et Marwaha, 1993, Chien et Menon, 1995a, Chien, 2003, Zapata, 2003b). Les PNPA sont moins coûteux que les engrais phosphatés entièrement acidulés parce que des quantités inférieures d'acide et d'énergie sont nécessaires par unité de phosphore dans le produit. En outre, les PNPA sont souvent plus concentrés que le SSP. De même, dans certaines situations, l'acidulation partielle peut être une manière d'améliorer l'efficacité des PN importés.

Choix du niveau d'acidulation partielle et de l'acide

Le niveau de l'acidulation du PN est habituellement mentionné en termes de pourcentage. Par exemple, quand un cinquième de l'acide sulfurique requis pour préparer le superphosphate à partir de ce PN particulier est employé, le produit est désigné sous le nom de PNPA-20 % H2SO4. Le terme de PNPA-20 % H3PO4 se rapporte au PNPA utilisant 20 % de la quantité d'acide phosphorique nécessaire pour produire du TSP.

La figure 31 illustre les rapports entre le niveau d'acidulation d'un PN réactif (PN de Caroline du Nord) avec H3PO4 ou H2SO4 et les teneurs en phosphore total et hydrosoluble du produit. Comme H3PO4 contient du phosphore hydrosoluble, l'acidulation partielle du PN avec H3PO4 a toujours comme conséquence que le PNPA obtenu contient plus de phosphore total et de phosphore hydrosoluble que le PN non acidulé. L'acidulation partielle de PN avec H2SO4 entraîne une diminution de la teneur en phosphore du produit en raison de la formation de sulfate de calcium. Cependant, la teneur en phosphore hydrosoluble augmente en même temps que le degré d'acidulation. La pente de la courbe de la teneur en phosphore hydrosoluble est plus faible au début en raison de la présence de minéraux accessoires tels que les carbonates libres, qui sont plus solubles que l'apatite et consomment préférentiellement l'acide apporté. Il est possible de préparer des PNPA à partir des PN de faible réactivité. Cependant, si cette faible réactivité est due aux teneurs élevées en oxydes de fer et d'aluminium, le PN peut ne pas convenir à l'acidulation partielle avec H2SO4, du fait que le phosphore hydrosoluble formé se transforme en phosphore insoluble dans l'eau pendant la préparation du PNPA (Hammond et al., 1989).

FIGURE 31
Rapport entre le niveau d'acidulation avec (A) acide phosphorique et (B) acide sulfurique du PN de Caroline du Nord et la teneur en phosphore total et phosphore hydrosoluble des produits de la réaction

Dans le meilleur des cas, l'acidulation partielle d'un PN donné devrait être décidée après une étude de développement qui fasse varier: (i) le type d'acide tel que l'acide sulfurique, l'acide phosphorique et des acides mélangés et un mélange d'acide sulfurique et de sels ammoniacaux, (ii) la quantité et la concentration des acides, (iii) la température et (iv) le type de procédé de mélange (par exemple en ajoutant le PN à l'acide en vrac avec un malaxage constant ou en pulvérisant de l'acide en fines gouttelettes sur un rideau de particules de PN). L'objectif est de solubiliser une quantité maximum de PN pour un niveau donné d'acide apporté. L'expérience a montré que les niveaux les plus efficaces d'acidulation, donnant le maximum de phosphore soluble par quantité d'acide utilisée, vont de 30 à 60 pour cent. A ces niveaux, les acides attaquent l'apatite mais ont peu d'effet sur les gangues dures telles que les silicates.

Les principaux composants phosphatés dans les PNPA sont le phosphate monocalcique hydrosoluble et la partie du PN, peu soluble, non attaquée par l'acide. L'acidulation partielle du PN avec H3PO4 et sa granulation donne des produits contenant un agglomérant soluble, le phosphate monocalcique, qui se dissout aisément quand l'engrais est appliqué au sol, permettant ainsi la dissolution du PN résiduel. Par ailleurs, l'acidulation partielle avec H2SO4 et la granulation peuvent donner des produits avec du CaSO4 recouvrant les particules de PN. Ceci peut gêner la dissolution du PN résiduel (Rajan et Ghani, 1997). Il est possible de surmonter ce problème en contrôlant la température de séchage, comme l'ont démontré des chercheurs du Centre international de développement des engrais (IFDC) en préparant des PNPA dans un processus à une seule étape (Schultz, 1986).

La performance agronomique des PNPA

La performance agronomique des PNPA change avec: (i) les propriétés physiques et chimiques du PN employé, (ii) le degré d'acidulation, (iii) les propriétés chimiques du sol, particulièrement le pH et la rétention de phosphore (ou fixation) et (iv) le système de culture. En général, les facteurs qui augmentent l'efficacité des PNPA sont: une réactivité élevée et une dimension fine des particules de PN, des sols acides, une fixation élevée du phosphore dans le sol, un long cycle de croissance et des cultures en rotation. Le produit est susceptible également d'être plus avantageux que les engrais phosphatés hydrosolubles dans les situations où la lixiviation du phosphate peut être un problème, comme dans les sols sableux (Bolland et al., 1995). L'augmentation du niveau d'acidulation accroît la teneur en phosphore hydrosoluble et l'efficacité agronomique des PNPA, mais ceci doit être contrebalancé par le plus grand coût de production de l'engrais. Dans tous les cas, la performance agronomique des produits devrait être évaluée pour déterminer le niveau rentable d'acidulation pour un ensemble de conditions (Owusu-Bennoah et al., 2002, Casanova et al., 2002a, Rodriguez et Herrera, 2002).

Les recherches sur l'efficacité agronomique des PNPA ont été revues (Bolan et al., 1990, Hammond et al., 1986b, Rajan et Marwaha, 1993, Chien et Menon, 1995a, Chien, 2003b) et la conclusion générale en est que les PNPA avec 40 à 50 pour cent d'acidulation avec H2SO4 ou 20-30 pour cent d'acidulation avec H3PO4 sont aussi efficaces que le superphosphate entièrement acidulé. Dans les sols à pH élevé (pH 6,5 à 8,0), les PNPA peuvent être aussi efficaces que le superphosphate, quoiqu'à un degré plus élevé d'acidulation avec H3PO4 jusqu'à 50 pour cent (environ 66 pour cent de phosphore total sous forme hydrosoluble) (McLay et al., 2000, Chien, 2003b). Des explications possibles de l'efficacité agronomique élevée des PNPA sont: (i) l'effet de démarrage précoce des racines induit par le phosphate monocalcique du PNPA et entraînant donc une meilleure exploitation par les racines du sol enrichi en phosphore et (ii) la dissolution du phosphate monocalcique amenant la formation de H3PO4 qui réagit sur le PN non encore attaqué (acidulation secondaire). Les études de croissance racinaire ont montré une augmentation marquée du développement des racines dans des échantillons de sol ayant reçu des PNPA par rapport à ceux ayant reçu des PN (Rajan et Watkinson, 1992). Le PN résiduel dans les PNPA est plus facilement solubilisé que le PN non attaqué, dans les conditions de serre et de champ (Rajan et Watkinson, 1992, Rajan et Ghani, 1997, McLay et al., 2000).

Fabrication de PNPA dans une usine de SSP

Des PNPA ont été fabriqués en Nouvelle-Zélande dans une usine de SSP en mélangeant le PN réactif à du SSP (rapport de 30/70 en poids) en sortie de réacteur, quand le SSP était encore humide. Le produit est commercialisé sous le nom de Longlife Super. Le niveau d'acidulation partielle du PN dépend du rapport acide/PN employé pour faire le SSP et, par conséquent, de la quantité d'acide libre disponible pour réagir avec le PN (Bolan et al., 1987, Hedley et al., 1988). Le phosphore hydrosoluble était principalement apporté par le SSP et accessoirement par l'acidulation partielle du PN.

L'efficacité agronomique du Longlife Super appliqué aux prairies permanentes a été déterminée dans six essais au champ sur trois ans (Ledgard et al., 1992). Les engrais contenaient 35 à 50 pour cent de leur phosphore total sous forme hydrosoluble et les valeurs de pH du sol étaient aux environs de 5,7. Les résultats ont montré que la réponse des pâturages à Longlife Super était généralement moindre que pour le superphosphate. Les études systématiques ont indiqué que la faible performance de Longlife Super était due au CaSO4 continuant à agglomérer les particules de PN dans les granules, et ce, pendant six semaines, diminuant de ce fait leur dissolution.

MOYENS PHYSIQUES

Compactage du PN avec des produits phosphatés hydrosolubles

Des engrais qui ont une composition chimique semblable à celle des PNPA peuvent être préparés indirectement en compactant du PN sec avec des engrais phosphatés solubles, comme le SSP ou TSP, (Chien et al., 1987a, Chien et Menon, 1995a, Menon et Chien, 1996). La teneur en phosphore hydrosoluble des produits dépendra du rapport du PN à l'engrais phosphaté soluble utilisé. La technologie de compactage offre l'avantage d'utiliser des PN qui ne sont pas adaptés à l'acidulation partielle directe avec H2SO4 en raison de leurs teneurs élevées en sesquioxydes d'aluminium et de fer. Evidemment l'efficacité des PN, même ceux de faible réactivité, est augmentée après le compactage avec du phosphore hydrosoluble (Chien et al., 1987a, Kpomblekou et al., 1991). Dans ces conditions, le compactage du PN avec des engrais phosphatés hydrosolubles avec un ratio de P d'environ 50:50 peut rendre l'utilisation des PN locaux agronomiquement et économiquement attrayante dans les pays en voie de développement. Cependant, l'efficacité agronomique d'engrais compactés par rapport à des engrais hydrosolubles dépendra d'un certain nombre de facteurs, comme pour les PNPA.

Mélanges à sec de PN avec des engrais phosphatés hydrosolubles

Il est prouvé par des essais au champ que l'application de PN en mélange à sec avec des engrais phosphatés hydrosolubles peut augmenter l'efficacité du PN appliqué. La recherche conduite sur un sol calcaire indien a montré qu'une application d'une seule dose d'un mélange 1/1 de PN de Mussoorie et de SSP pouvait être aussi efficace que le SSP (Siddique et al., 1986). Dans une autre étude au champ, le PN et le SSP de Mussoorie ont été appliqués avec un rapport pour le phosphore de 2,2/1 en utilisant trois doses d'application d'engrais (Singaram et al., 1995). Les résultats ont montré que, dans un sol alcalin (pH 8,2), le mélange PN-SSP tend à être aussi efficace que le SSP. De plus, en se basant sur une série de trois cultures, le produit était économiquement égal au SSP. On a calculé que la dissolution du PN a augmenté de 55 pour cent quand il était appliqué en combinaison avec le SSP par rapport à la dissolution du PN appliqué seul.

Dans une étude en serre, Chien et al. (1996) ont fait des estimations quantitatives de l'influence du phosphore hydrosoluble (sous forme de TSP) sur l'efficacité agronomique d'un PN moyennement réactif de Floride centrale en employant des engrais marqués au phosphore radioactif (32P). Avec un rapport 1/1 pour le phosphore, le PN et le TSP ont été appliqués séparément au sol. Basée sur l'absorption de phosphore par les plantes, l'étude a montré que l'efficacité du PN en combinaison avec le TSP a augmenté de 165 pour cent pour le maïs et de 72 pour cent pour le niébé. Dans une autre étude en serre, Habib et al. (1999) ont constaté qu'un mélange physique de PN et de TSP était aussi efficace que le TSP pour le colza poussant dans un sol alcalin chaulé. Zapata et Zaharah (2002) ont également trouvé un effet d'amélioration de l'efficacité agronomique du PN de Floride et de la boue de station d'épuration une fois appliqués en mélange avec le TSP.

La plus grande efficacité du PN appliqué en mélange à sec peut être attribuée à l'effet de démarrage précoce des racines dû au phosphore soluble et, en conséquence, à une meilleure exploitation par les racines du PN apporté. Etant donné les intrants négligeables nécessités par ce traitement et l'amélioration de l'efficacité des PN en résultant, les résultats ci-dessus sont d'une importance économique significative. Une recherche complémentaire est nécessaire au champ afin d'évaluer l'utilité de ce processus.

Mélanges de soufre élémentaire et de phosphate naturel

De nombreuses études ont montré que l'efficacité agronomique des PN peut être améliorée quand ils sont appliqués après avoir été mélangés ou cogranulés avec du soufre (S). Parfois, les produits étaient inoculés avec des bactéries oxydant le soufre Thiobacillus spp. Ainsi, le produit était désigné sous le nom de «biosuper» (Swaby, 1975). Kucey et al. (1989) ont passé en revue le rôle des microbes dans l'augmentation de la disponibilité du phosphore pour la plante.

Le principe sous-jacent à l'utilisation des mélanges soufre élémentaire/phosphate naturel (PN/S) est que la population - inoculée ou indigène - des bactéries du sol oxyde le soufre en H2SO4 quand le produit est appliqué au sol. Cet acide réagit à son tour avec les particules de PN qui sont proches du soufre et forme des phosphates monocalciques et dicalciques. Ainsi, la dissolution des PN dans le sol est favorisée par l'acidulation localisée, en plus de celle provoquée par l'acidité ambiante du sol. Les plus importantes espèces bactériennes oxydant le soufre sont Thiobacillus thioxidans et Thiobacillus thioparus. L'inoculation d'un sol déjà riche en Thiobacillus spp. peut ne pas être essentielle (Rajan, 1982a) mais l'inoculation est préférée pour une multiplication rapide des bactéries et une dissolution des PN après application au sol.

Les mélanges PN/S sont intéressants car: (i) leur production ne demande pas beaucoup de capital, (ii) ils permettent des combinaisons flexibles de PN et de soufre, (iii) des PN de qualité inférieure qui conviennent peu à la fabrication d'engrais solubles peuvent être utilisés et (iv) ils se comportent comme des engrais à libération contrôlée de phosphore et de soufre. Du côté négatif, pour une oxydation rapide, le soufre doit être présent en fines particules (95 pour cent en dessous de 0,15 millimètre), soit broyé directement avec le PN, soit broyé séparément puis mélangé. Le broyage du soufre sans le mélanger au PN ou à sec, sans addition d'humidité, présente des risques d'incendie et cette méthode n'est pas recommandée. En Nouvelle-Zélande, une usine pilote a récemment produit du PN/S contenant des bactéries Thiobacillus spp (EnviroPhosä) en employant une technique rentable.

Les facteurs qui influent sur l'efficacité des PN/S sont: (i) la réactivité du PN, (ii) le rapport PN/S, (iii) le type de culture et (iv) les conditions environnementales du sol. L'efficacité agronomique des PN appliqués sous forme de PN/S devrait croître avec l'augmentation de la réactivité des PN ou avec une plus grande finesse des particules de PN (Rajan, 1982b, Loganathan et al., 1994). La recherche montre que le PN/S préparé à partir d'un PN réactif finement broyé de Caroline du Nord, avec un rapport PN/S de 5 pour 1, était aussi efficace que le SSP, tandis que celui préparé à partir d'un PN non réactif de Floride était inférieur. Néanmoins, il y avait une augmentation de l'efficacité agronomique des deux PN quand ils étaient appliqués comme PN/S, les valeurs étant de 18 à 30 pour cent pour le PN de Caroline du Nord et de 50 à 70 pour cent pour le PN de Floride selon la dose d'application (Rajan, 1982b).

Comme H2SO4 produit par l'oxydation du soufre affecte la dissolution du PN du mélange PN/S, il est logique de conclure que l'augmentation de la teneur en soufre dans le PN/S améliorerait son efficacité agronomique. Cependant, une approche équilibrée est nécessaire vu que plus le produit est enrichi en soufre, plus grand sera son coût. Les résultats des premières études montrent que le PN/S pourrait être aussi efficace que le SSP quand les rapports PN/S se situent entre 1:1 et 5:1 (Kittams et Attoe, 1965, Attoe et Olson, 1966, Swaby, 1975). Le rapport 5:1 est semblable à la proportion dans laquelle le PN et le soufre sous forme de H2SO4 sont employés pour faire du SSP. Cependant, la plupart du temps, des PN non réactifs tels que le PN de Floride (Etats-Unis) et le PN du Queensland (Australie) ont été utilisés. Quand des PN réactifs finement broyés sont utilisés, ce rapport peut être passé jusqu'à 7:1 sans perdre d'efficacité agronomique (Rajan, 1983). Sur les cultures de longue durée telles que les pâturages permanents, les PN/S préparés avec un rapport de PN/S de 14:1 peuvent être agronomiquement aussi efficaces que le superphosphate (Rajan, 2002). Par ailleurs, pour les cultures à cycle court qui exigent un taux élevé d'approvisionnement en phosphore, le PN/S préparé à partir de PN réactifs avec un faible ratio PN/S peut être nécessaire. Quant à l'influence de l'environnement du sol, l'efficacité agronomique des PN/S sera plus grande dans les sites qui favorisent la solubilisation des PN. Dans de telles conditions, les PN/S préparés à partir de minerais moins réactifs, ou avec des gros ratios PN/S si les PN sont fortement réactifs, peuvent être employés aussi efficacement que des engrais phosphatés.

L'efficacité du soufre sera plus élevée si les particules de soufre sont en contact intime avec les PN car ceci facilitera l'attaque maximale du PN par le H2SO4 produit. Pour cette raison, des PN/S ont été fabriqués par cogranulation du PN avec du soufre élémentaire (Swaby, 1975, Rajan, 1982b). Du côté négatif, la granulation limite la surface extérieure pour que l'acide du sol réagisse sur le PN. Pour cette raison, des granules de moins de 2 millimètres sont préférés. Des mélanges physiques humides de PN/S contenant des Thiobacillus spp. se sont avérés aussi efficaces que le SSP pour la production de fourrage (Rajan, 2002).


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