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Conclusions

Défis et réponses par des mesures de politiques

Les exploitants et les pays qui sont tributaires des exportations de produits de base doivent lutter contre la baisse à long terme et la volatilité à court terme des prix réels des produits de base sur les marchés internationaux. La baisse à long terme des prix réels traduit le fait que la productivité et la production croissent plus vite que la demande. La volatilité est due à l'impact de facteurs exogènes, telles les conditions météorologiques. Ces problèmes sont aggravés par les distorsions du marché causées par les droits de douane et les subventions appliquées dans les pays développés, les droits de douane en vigueur dans les pays en développement et le pouvoir économique de certaines chaînes de distribution des produits contrôlées par des grandes sociétés transnationales. Ces distorsions restreignent également l'accès aux marchés lucratifs et freinent toute tentative des producteurs et des pays exportateurs de capter une part plus grande du prix du produit final.

Les gains de production dépassent la demande

Les rendements moyens des principaux produits agricoles exportés ont augmenté de près d'un tiers au cours des deux dernières décennies. Parallèlement, de nouveaux producteurs importants sont entrés sur le marché pour commercialiser leurs produits, le Viet Nam en tant que producteur de café, par exemple.

Si la productivité accrue et l'entrée de nouveaux producteurs déclenchent une hausse rapide de l'offre, la demande de produits de base, elle, n'augmente que lentement, même dans un contexte de baisse des prix et de hausse du revenu des consommateurs. Dans les années 90, le commerce des produits primaires n'a augmenté que d'un tiers par rapport au rythme de croissance des produits manufacturés.

La volatilité des prix internationaux des produits de base peut estomper les baisses des prix à plus long terme qui devraient conduire à des ajustements de l'offre et de la demande. Par ailleurs, du côté de l'offre, les producteurs ne peuvent pas augmenter ou baisser rapidement leur production lorsque les prix changent, surtout lorsqu'il s'agit de cultures de plantes vivaces. Par conséquent, la production peut être maintenue même lorsque les prix baissent, ce qui aggrave les problèmes de déséquilibre du marché. Du côté de la demande, une baisse des prix n'incite pas, en général, les consommateurs des pays développés à acheter plus de produits alimentaires ou de produits de base. Beaucoup de produits de base sont considérés comme des produits indispensables qui doivent être achetés quelles que soient les variations de prix. Quoi qu'il en soit, les variations de prix des produits de base sont à peine perceptibles au niveau de la vente au détail, car le prix des produits de base ne représente généralement qu'une petite fraction du prix de détail des produits transformés. Dans les pays en développement, où le degré de transformation peut être moindre, la demande d'un produit de base peut augmenter plus rapidement en cas de baisse des prix mondiaux. Dans nombre de ces pays, cependant, la diversité des mesures prises en termes de politiques laisse supposer que les prix intérieurs ne traduisent pas les évolutions des prix mondiaux.

Affronter les problèmes de l'offre excédentaire

Dans les années 70 et 80, les gouvernements avaient essayé de trouver une solution aux problèmes des variations de prix des produits de base par le biais d'accords internationaux de produits destinés à stabiliser les prix. Ces accords s'appuyaient sur des accords portant sur les contingents d'exportation ou la régulation des stocks et visaient à maintenir des prix rémunérateurs et stables. Dans l'ensemble, on considère que leur mission a échoué. A la fin des années 80, la plupart avaient été dissous ou portaient sur l'échange d'information et l'amélioration de la transparence des marchés.

L'effondrement des produits de base à la fin des années 90 a relancé l'intérêt de contrôler l'offre par le biais d'«accords seulement destinés aux producteurs». Dans le cas du café, par exemple, les pays producteurs ont conclu une alliance visant à la rétention des exportations pour faire grimper les prix. Cependant, le maintien de la discipline entre les membres s'est révélé difficile, notamment face à la concurrence agressive des «resquilleurs» non-membres.

Les difficultés rencontrées dans la mise en place de mécanismes interventionnistes durables dans un cadre coopératif ont relancé l'intérêt pour des systèmes de prix garantis ou de prix prévisionnels, voire d'autres instruments permettant de gérer les risques liés à la volatilité des prix des produits de base. Bien que prometteurs, il reste à ces mécanismes institutionnels de faire la preuve qu'ils peuvent s'appliquer de manière généralisée.

A long terme, la meilleure façon d'éliminer l'offre excédentaire de certains produits de base est de réduire la production dans des marchés très protégés, aux coûts élevés, et d'améliorer parallèlement la demande en atténuant la pauvreté et augmentant les revenus dans les pays les plus pauvres. Dans les pays développés, le défi consiste à soustraire de la main-d'œuvre et des superficies cultivées à la production de produits de base excessivement subventionnés et de permettre aux producteurs de s'orienter vers d'autres sources d'emploi et de revenu. Les premiers producteurs à sortir des marchés débarrassés des droits de douane, des subventions et d'autres distorsions devraient être ceux dont les coûts de production sont les plus élevés. Dans certains cas, tels le coton, le sucre, les produits laitiers et le riz, il pourrait s'agir des producteurs de l'Union européenne ou des Etats-Unis qui ont bénéficié de subventions généreuses, et non des producteurs des pays les moins avancés (PMA) qui luttent pour produire des produits de qualité élevée à moindre coût. Cependant, dans les pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'élimination du soutien à la production n'entraînera pas automatiquement une augmentation des exportations des PMA. Les principaux bénéficiaires immédiats pourraient être les exportateurs des pays développés non subventionnés et quelques-uns des pays en développement les plus avancés.

La diversification peut être un moyen pour les producteurs des pays en développement de ne plus être tributaires des produits de base pour lesquels l'offre excède la demande. Toutefois, elle n'est pertinente que si les exploitants ont de nombreuses autres possibilités, notamment une meilleure valorisation des cultures, la transformation de produits de base en produits à valeur ajoutée, et des activités non agricoles. En outre, la diversification exige l'accès au crédit, à la formation et à d'autres ressources dont ils auraient besoin pour tirer parti de ces possibilités.

Plusieurs pays en développement sont devenus des exportateurs performants de fruits, de légumes et d'autres produits non traditionnels. Dans une large mesure, les principaux bénéficiaires sont de grandes exploitations commerciales implantées dans des pays disposant d'infrastructures plus modernes. Les petits producteurs et les PMA ont été moins à même de mobiliser les investissements et la formation nécessaires pour s'orienter vers de nouvelles cultures et répondre aux normes de qualité élevées et aux délais de livraison rigoureux imposés par les supermarchés. La mise sur pied de structures institutionnelles permettant d'aider les petits exploitants à participer à ces évolutions reste un défi.

La transformation des produits de base en produits à valeur ajoutée est une autre façon pour les producteurs de se diversifier et de capter une part plus grande de la valeur du produit final. La différence de valeur entre les produits de base et les produits de consommation peut être très importante. Cependant, les possibilités d'une telle diversification verticale sont souvent bloquées par la progressivité des droits de douane, notamment dans les pays développés, et par les obstacles à l'accès au marché dressés par la concentration des structures économiques.

Des solutions du côté de la demande pour résoudre les problèmes d'offre excédentaire

Les problèmes de l'offre excédentaire peuvent également être traités à l'aide de so-lutions venant de l'autre côté du marché, visant à stimuler la demande dans les pays consommateurs.

Les campagnes de promotion générique ont prouvé qu'elles parvenaient à stimuler la demande de certains produits de base. Contrairement à la publicité favorisant des produits ou des marques particulières, la promotion générique a pour but d'augmenter la demande agrégée de produits de base comme la banane ou le thé. Une campagne de promotion prolongée montrant la valeur énergétique de la banane a contribué à tripler la consommation au Royaume-Uni, et fait de la banane le fruit le plus populaire dans le pays.

Des campagnes de promotion générique analogues pourraient stimuler la consommation d'autres produits de base. Cependant, sans une analyse et une planification sérieuse, ce seront les transformateurs et les distributeurs qui en tireront le plus grand profit, ne laissant rien ou pas grand-chose aux producteurs des pays en développement. Par ailleurs, il convient d'admettre qu'il n'est pas aisé de trouver un responsable institutionnel pour encadrer de tels programmes, ainsi que les moyens de les financer, et de réduire au minimum les problèmes d'effets d'aubaine.

Les inquiétudes des consommateurs à l'égard de la sécurité sanitaire des aliments, des questions liées à l'environnement et de la justice sociale ont créé un autre créneau. Les exploitants qui vendent des produits certifiés issus de l'agriculture biologique ou du commerce équitable semblent bénéficier d'un meilleur accès au marché et de prix plus élevés que les producteurs traditionnels. Bien que la part de marché des produits alimentaires certifiés soit encore réduite, les ventes de ces produits connaissent une croissance soutenue et rapide. La certification peut également apporter d'autres avantages aux exploitants car elle renforce leur position de négociation et leur accès au crédit.

Malgré ces avantages, les petits exploitants des pays en développement rencontrent beaucoup d'obstacles lorsqu'ils essaient de tirer parti d'une certification liée à l'agriculture biologique ou au commerce équitable. La conversion à l'agriculture biologique exige des investissements et de la formation. Par ailleurs, les investissements en amont peuvent augmenter les coûts de production et diminuer les rendements.

Bien que les producteurs puissent rentabiliser leurs investissements en vendant leurs produits sur des marchés spécifiques, la procédure de certification en elle-même peut être coûteuse, surtout pour les petits exploitants des pays en développement qui n'ont pas accès à des organismes locaux de certification et doivent faire appel à des agences étrangères. Un cahier des charges rigoureux, incluant la tenue d'une comptabilité et la traçabilité, peut également poser de sérieux problèmes aux petits producteurs. Il en résulte que certains programmes de certification favorisent les grandes exploitations commerciales. Le système de commerce équitable, qui a été créé spécialement pour favoriser les petits producteurs des pays en développement, ne concerne actuellement qu'un marché très étroit dans les pays développés.

Eliminer les distorsions du marché

Les problèmes d'offre excédentaire sur les marchés mondiaux des produits de base ont été aggravés par les politiques des gouvernements et la concentration du marché. Les droits de douane élevés sur les produits agricoles et les subventions internes à la production dans les pays développés limitent l'accès au marché et pèsent sur les prix des produits de base. Dans les pays en développement, les marchés des produits agricoles sont ceux qui croissent le plus rapidement tout en étant également les plus protégés.

Dans de nombreux cas, le soutien interne isole les producteurs des pays développés des forces du marché. En outre, il les encourage à augmenter leur production même lorsque les prix sont bas et leur permet d'exporter à des prix nettement inférieurs à leurs coûts de production. Les Etats-Unis et l'UE sont ainsi les plus grands exportateurs de coton, de blé, de maïs, de poudre de lait écrémé et de sucre. Ces produits de base sont exportés à des prix inférieurs à ceux qu'ils atteindraient dans un marché équilibré, et dans certains cas, à des prix inférieurs aux coûts de production.

Incapables de lutter contre des prix mondiaux maintenus artificiellement bas, les exploitants des pays en développement perdent des parts de marché et souffrent d'une concurrence inéquitable dans les marchés locaux. Les subventions déséquilibrent également les structures de coûts de plusieurs pays producteurs et donnent aux producteurs les moins efficients une prime à l'augmentation de la production. La charge de l'offre excédentaire est transférée aux producteurs des pays en développement, bien que ces derniers soient en mesure de produire à moindre coût. Parallèlement, la libéralisation pourrait avoir une incidence négative sur les pays en développement importateurs de produits alimentaires car la suppression des droits de douane et des subventions entraînerait une hausse des prix de ces produits et du coût de leur importation.

Le contrôle des chaînes de valeur des produits de base par un petit nombre de sociétés puissantes peut aussi faire baisser le prix des produits de base et réduire la part du prix du produit final qui revient au producteur. Lorsque les marchés mettent en présence un grand nombre de fournisseurs en concurrence et une poignée d'acheteurs aux moyens financiers énormes, ce sont les acheteurs qui ont le plus de marge de manœuvre pour fixer les prix. Si les acheteurs sont également liés aux entreprises de transformation et aux entreprises de vente au détail qui interviennent dans les chaînes de produits intégrés verticalement, ce sont encore eux qui peuvent capter la plus grande part de la valeur du produit final. En revanche, il convient d'admettre que, compte tenu des économies d'échelle importantes qui existent dans la plupart des segments de l'industrie alimentaire, les liens tissés entre les sociétés transnationales et les petits producteurs peuvent contribuer à sortir les producteurs ruraux appauvris des PMA de leur marginalisation.

Des études montrent que lorsque les prix des produits de base augmentent, le prix le plus élevé est rapidement transféré aux consommateurs. Mais lorsque les prix des produits de base baissent, les prix de détail suivent rarement la tendance. Depuis le début des années 90, par exemple, alors que les prix du café ont chuté, la valeur des ventes mondiales de café au détail a plus que doublé. La part de ces ventes reçue par les pays exportateurs de café est passée d'environ 35 pour cent à moins de 10 pour cent.

Programme d'action

La résolution des problèmes de l'offre excédentaire et l'élimination des distorsions du marché exigeront de prendre des mesures diverses aux niveaux national et international.

Dans le cadre des négociations de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), la priorité doit être placée sur la réduction des droits de douane sur les produits agricoles, du soutien à la production et des subventions aux exportations dans les pays développés, et sur l'élimination de la progressivité des droits de douane, qui pénalise les exportations de produits transformés des pays en développement. Parallèlement, les pays en développement devraient réduire leurs droits de douane afin d'encourager le commerce entre les pays de ce groupe et de permettre aux consommateurs de bénéficier de la baisse des prix mondiaux. Une attention accrue doit être accordée aux PMA, car beaucoup sont lourdement tributaires des exportations de produits de base et des importations de produits alimentaires. Les mesures qui pourraient être prises pour aider les pays en développement à tirer profit des marchés des produits de base sont les suivantes:

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