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LA SITUATION DE LA FLOTTE DE PÊCHE

Après des années d’expansion de la flotte mondiale de pêche jusqu’aux dernières années 80 et les premières années 90, le nombre de navires pontés s’est relativement stabilisé autour de 1,3 million d’unités. En outre, la flotte mondiale qui se livre à la pêche dans les eaux marines et continentales comprenait environ 2,8 millions de navires non pontés, dont 65 pour cent n’étaient pas motorisés. Environ 85 pour cent des navires pontés, 50 pour cent des navires non pontés à moteur et 83 pour cent des embarcations non motorisées étaient concentrés en Asie. Les 15 pour cent restants de l’ensemble des navires de pêche pontés que compte le monde se répartissaient entre l’Europe (8,9 percent), l’Amérique du Nord et l’Amérique centrale (4,5 pour cent), l’Afrique (1 pour cent), l’Amérique du Sud (0,6 pour cent) et l’Océanie (0,2 percent) (figure 14). Vingt et un pour cent des navires de pêche non pontés et motorisés se trouvaient dans divers pays d’Amérique du Nord et d’Amérique centrale, 16 pour cent en Afrique, 6 pour cent en Amérique du Sud, et 3 pour cent en Océanie

La jauge brute globale des grands navires de pêche dans les eaux marines (définis comme ayant plus de 100 tonneaux de jauge brute) a atteint le chiffre record 15,6 millions en 1992 (24 074 navires) et a baissé depuis lors7. Cependant, le nombre de ces navires a peu à peu augmenté jusqu’en 2001 et s’est relativement stabilisé ces dernières années aux alentours de 24 000 unités (figure 15). En 2002, la flotte des grands navires a légèrement progressé pour atteindre 24 406 unités et a fluctué autour de ce chiffre jusqu’en 2004; toutefois, depuis 1992, sa jauge totale s’est contractée à la suite de l’adoption par de nombreux pays de programmes visant à limiter les capacités. En 2003, la Fédération de Russie avait la plus grande capacité mesurée en jauge brute (24 pour cent du total des tonneaux bruts), suivie du Japon et des États-Unis d’Amérique (7 pour cent chacun), de l’Espagne (6 pour cent), de la Norvège (3,5 percent) et de l’Ukraine (3 pour cent). Deux pays de libre immatriculation, le Panama et le Belize, comptaient pour 6 pour cent de la jauge brute mondiale dont 4,4 pour cent étaient attribuables à des navires battant pavillon inconnu.

L’âge moyen de la catégorie des grands navires de pêche qui opèrent dans les eaux marines a continué à augmenter au niveau mondial. En 1992, environ 30 pour cent de ces navires avaient moins de 10 ans et 6 pour cent avaient plus de 30 ans, alors qu’en 2003, ces pourcentages étaient respectivement de 13 pour cent et de 28 pour cent; la figure 16 montre le profil d’âge de la flotte mondiale en 2003. Parmi les flottes nationales qui ont plus de 200 000 tonneaux bruts, la flotte japonaise est la plus jeune (âge moyen de 16 ans), tandis que celle de la République de Corée est la plus vieille (âge moyen de 29 ans). La France et Vanuatu ont des flottes relativement jeunes (respectivement, 19 ans et huit ans en moyenne), alors que les flottes de l’Afrique du Sud, du Ghana, des Philippines et du Sénégal ont généralement toutes plus de 30 ans.

La pêche est considérée comme l’un des métiers les plus dangereux. Le vieillissement de la flotte de pêche suscite des préoccupations quant à la sécurité tant des navires que des équipages. En outre, les normes relatives au logement des équipages à bord de ces navires très vétustes et à leurs autres conditions de vie ne sont pas conformes aux critères minimaux actuels imposés aux unités nouvellement construites.

Le ralentissement des mises en chantier des grands navires donne à penser que la sécurité et les conditions de vie des équipages ne progressent peut-être pas rapidement. Il est évident que les plans visant à aménager les capacités risquent d’exiger une certaine réduction de la flotte des grands bâtiments, mais il est non moins évident qu’il faudra toujours des grands navires pour pêcher dans des eaux lointaines et par mauvais temps. En outre, la pêche d’espèces pélagiques en haute mer a bien souvent tendance à être plus rentable à bord des grands navires. On prévoit un rebond, au cours des 10 prochaines années, des mises en chantier des grands navires de pêche qui sont actuellement tombées à un niveau très bas. Dans ce contexte il est intéressant de noter que l’Organisation internationale du travail (OIT) procède actuellement à l’établissement, à l’intention des nouvelles flottes de pêche, d’une nouvelle Convention relative aux conditions de travail dans le secteur halieutique (laquelle comprend des normes relatives au logement des équipages) (Deuxième partie). La FAO, l’OIT et l’OMI sont également en train d’apporter des modifications importantes au Recueil de règles pour les pêcheurs et les navires de pêche ainsi qu’aux Directives facultatives pour la conception, la construction et l’équipement des navires de pêche de faibles dimensions.

On ne dispose pas d’indications détaillées sur l’ensemble de la flotte mondiale de pêche après 1998, mais la taille de la flotte de certains des principaux pays qui pratiquent la pêche a continué à diminuer. Ainsi, la flotte de pêche de la Union européenne (UE-15) est passée de 96 000 navires en 2000 à 88 701 en 2003. Le chiffre total des navires se répartissait ainsi: 13 percent de chalutiers, 6 pour cent de senneurs, 33 pour cent de trémailleurs, 16 pour cent de palangriers – le reste étant composé de navires dotés d’autres engins de pêche. Sur les 87 833 navires de longueur connue, un peu plus de 80 pour cent mesuraient moins de 12 mètres et appartenaient en majorité à l’Espagne, à la Grèce et à l’Italie. Environ 15 pour cent des navires de pêche de la UE avaient entre 12 et 24 mètres de longueur, et moins de 340 navires avaient plus de 45 mètres de long (une soixantaine d’unités de moins que cinq années auparavant). En décembre 2002, la Norvège avait une flotte de pêche inscrite au registre de 7 802 navires pontés à moteur et de 2 847 navires non pontés. Les statistiques comparatives indiquent que la flotte de navires pontés a encore perdu 628 unités (8 pour cent) depuis 2000, et que le nombre d’embarcations non pontées a encore diminué de près de 40 pour cent. À la fin de 2003, l’Islande comptait 1 872 navires inscrits sur un registre, dont 50 pour cent non pontés, soit 63 unités de moins qu’en 2002 et une baisse de l’ordre de 7 300 tonneaux bruts pour la jauge de l’ensemble de ces différentes catégories de navires. Près de 40 pour cent des chalutiers (environ 75 pour cent de tous les navires pontés) ont plus de 10 ans. En Nouvelle-Zélande, dont la zone économique exclusive est l’une des plus étendues du monde, il y avait en 2001 1 700 navires néo-zélandais de pêche à vocation commerciale, complétés par 36 navires étrangers affrétés; ces chiffres représentent 1 102 navires néo-zélandais et 43 navires affrétés de moins qu’en 1992.

Au Japon, plus de 90 pour cent des navires de la flotte ont une jauge inférieure à cinq tonneaux bruts. On a enregistré un recul pour toutes les catégories de la flotte entre 1997 et 2001, notamment pour les navires de plus de 50 tonneaux bruts (moins de 1 pour cent en 2001), soit une baisse de plus de 20 pour cent.

On relève des avancées importantes de plusieurs organisations régionales de gestion des pêches8 qui ont dressé des listes «positives» de navires (autorisés à pêcher dans la zone qui relève de telle ou telle organisation régionale de ce type) et des listes «négatives» de navires (non autorisés, ou «non coopérants») en vue d’améliorer le suivi et le contrôle des pêches hauturières et des stocks transfrontières. D’autres organismes analogues9 en sont à divers stades de l’élaboration de ces listes; en outre, certains pays et certaines organisations non gouvernementales (ONG) ont commencé à établir des listes de navires qui pêcheraient sans autorisation.

Au milieu de l’année 2004, 5 517 unités étaient inscrites sur le Registre des autorisations des navires en haute mer, tenu par la FAO. Sur les 30 pays parties à l’Accord visant à favoriser le respect par les navires de pêche en haute mer des mesures internationales de conservation et de gestion, 19 pays seulement10 sur 30 Parties à l’Accord d’application11 ont fourni à la FAO les informations requises sur les navires autorisés à pratiquer la pêche hauturière.

D’après les travaux en cours à la FAO, on a des raisons de croire qu’il y a une surcapacité, à l’échelle mondiale, des flottes de pêche au thon à usage industriel12. Dans ce contexte, on a envisagé un moratoire pour la construction de ces navires, conjointement à la mise au point de mécanismes destinés à assurer le transfert harmonieux des capacités des pays qui pratiquent la pêche dans des zones éloignées de haute mer vers des pays côtiers en développement.

Une analyse des navires de pêche qui ont changé de pavillon en 2003 (tableau 9) fait encore ressortir une très grande activité dans les pays qui offrent des «pavillons de complaisance», même s’il ressort de certains indices que le nombre de ces bateaux va en diminuant. Le Belize, la Guinée équatoriale ainsi que Saint-Vincent-et-les Grenadines ont beaucoup réduit leur flotte, tandis que la flotte du Honduras est restée relativement inchangée et que celle du Panama a augmenté de 14 unités, compte tenu de la construction de nouveaux navires et de la mise à la casse de vieux navires.

En 2003, il apparaît que plusieurs des principaux pays qui pratiquent la pêche ont beaucoup réduit le nombre de leurs navires de 100 tonneaux et plus, mais par le biais d’un transfert de pavillon (figure 17). Le Japon se classe en tête de ces pays, avec une diminution totale de 140 navires. Les États-Unis, l’Islande la Norvège et les Pays-Bas ont tous transféré plus de navires sous un autre pavillon qu’ils n’en ont immatriculé. On note une forte contraction de la flotte du Royaume-Uni qui a envoyé des vieux navires à la casse et qui a transféré le pavillon de certaines de ses unités. En revanche, l’Espagne a beaucoup augmenté sa flotte en construisant de nouveaux navires. Les navires qui ont changé de pavillon et qui figurent désormais dans la catégorie «pavillon inconnu» représentent plus de 25 pour cent des transferts de pavillon. Sur le registre de la Lloyd’s figurent 1 213 navires de plus de 100 tonneaux bruts battant «pavillon inconnu» et considérés comme poursuivant encore leurs opérations en 2003 (compte non tenu des données antérieures à 1970). Sur les navires pour lesquels on dispose de renseignements concernant leur pavillon antérieur, 51 pour cent étaient immatriculés dans l’un des pays suivants: Belize,Guinée équatoriale, Honduras, Panama, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Vanuatu, et 56 pour cent de ces unités avaient été construites soit au Japon soit à Taiwan Province de Chine.

Tableau 9
Navires de pêche de 100 tonneaux et plus: création, transfert de pavillon, inscriptions aux registres, mises à la ferraille et pertes en 2003

 

Création

Transfert de pavillon

Inscription

Mises à la ferraille et pertes

Variation

Registres nationaux de la navigation

Bélize

5

178

81

0

–92

Guinée équatoriale

0

17

4

0

–13

Honduras

0

16

15

0

–1

Islande

1

33

11

2

–23

Japon

0

138

1

3

–140

Namibie

1

10

16

0

7

Pays-Bas

9

22

1

13

–25

Norvège

28

29

11

31

–21

Panama

2

21

33

0

14

Fédération de Russie

7

50

82

3

36

Saint-Vincent-et-les-Grenadines

0

38

7

1

–32

Afrique du Sud

2

3

29

1

27

Espagne

64

13

1

25

27

Royaume-Uni

18

38

8

65

–77

États-Unis

21

59

3

12

–47

Non déterminé

2

0

242

0

244

Sous-total

160

665

545

156

–116

Total des registres nationaux

384

916

916

347

37

Note: Modifications apportées à la base de données des Services d’information maritime de la Lloyds (concernant les bateaux de pêche).

 

ÉTAT DES RESSOURCES HALIEUTIQUES

Ressources des pêches marines

Après une augmentation qui l’a portée de 79 millions de tonnes environ en 1998 à 87 millions de tonnes en 2000, la production mondiale de pêches de capture en mer a régressé, pour s’établir à près de 84 millions de tonnes en 2001 et se maintenir à ce niveau en 2002. Le recul d’environ 2,5 pour cent du volume mondial des prises s’explique principalement par le déclin, de 12 pour cent et 7 pour cent respectivement, des prises dans le Pacifique Sud-Est et le Pacifique Nord-Ouest.

Le Pacifique Nord-Ouest est la zone de pêche la plus productive de la planète, avec un volume nominal de captures (Chine comprise) oscillant entre 20 et 24 millions de tonnes depuis la fin des années 80 (figure 18). Les amples fluctuations des prises réalisées dans la région ont pour cause principale les pêches intéressant les stocks abondants de pilchards du Japon (ou sardines japonaises) et de lieu de l’Alaska. Les stocks de ces deux espèces ont décliné depuis la fin des années 80, sous l’effet conjugué de la surexploitation et de facteurs environnementaux affectant la productivité des stocks. Bien que l’on ait constaté une augmentation des captures d’autres espèces, y compris de l’anchois japonais, ce facteur n’a pas suffi à compenser le recul affectant la sardine et le lieu, ni à contrebalancer la baisse régulière des volumes débarqués dans cette zone, soit environ 3 pour cent par an depuis 1998.

Dans le Pacifique Sud-Est, trois espèces comptent pour près de 80 pour cent du volume total des captures, à savoir l’anchois du Pérou, le chinchard du Chili et le pilchard sud-américain (ou sardine). La région est coutumière d’importantes fluctuations des captures, sous l’effet de manifestations climatiques périodiques liées au phénomène d’oscillation australe El Niño, qui affecte les rendements de la pêche et la productivité des stocks. À titre d’exemple, les prises d’anchois du Pérou ont chuté de façon marquée en raison des conditions environnementales défavorables dues à El Niño qui ont prévalu en 1997-98, suivies de conditions climatiques plus propices qui ont permis un volume exceptionnel de captures d’environ 11 millions de tonnes en 2000; les prises d’anchois du Pérou sont néanmoins tombées à 9,7 millions de tonnes en 2002, entraînant un repli marqué du volume total des prises dans la région.

Les autres zones de pêche du Pacifique connaissent, depuis 2000, un regain des captures. Dans le Pacifique Nord-Est, par exemple, la production des pêches a enregistré un pic de 3,6 millions de tonnes en 1987, suivi d’un déclin régulier jusqu’à la légère reprise de 2001 et 2002, qui l’a portée à 2,7 millions de tonnes. Le lieu de l’Alaska est l’espèce de loin la plus importante du Pacifique Nord-Est, et représente le principal facteur de fluctuation du volume total des prises. Dans le Pacifique Centre-Ouest, la production des pêches a connu une progression régulière depuis 1950, atteignant près de 10 millions de tonnes en 2001. Dans le Pacifique Centre-Est, le volume total des prises a oscillé entre 1,2 et 1,8 million de tonnes depuis 1981. L’augmentation récente au niveau régional est influencée par le pilchard de Californie (ou sardine), dont on a débarqué 670 000 tonnes environ en 2001 et 2002, soit le volume le plus élevé de captures de cette espèce depuis 1950. Dans le Pacifique Sud-Ouest, les prises nominales ont atteint un maximum de 917 000 tonnes en 1992, pour subir un déclin graduel les portant à 714 000 tonnes en 2000, avec, depuis, une légère reprise.

Dans l’Atlantique, les captures ont augmenté dans les zones de pêche Nord-Ouest et Sud-Est. Dans l’Atlantique Nord-Ouest, la production des pêches, qui était tombée à son niveau le plus bas en 1994 avec l’effondrement des stocks de poisson de fond au large de la côte orientale du Canada, a connu une lente reprise, passant de quelque 2 millions de tonnes en 1994, et de nouveau en 1998, à 2,26 millions de tonnes en 2002. Dans l’Atlantique Sud-Est, les prises sont en progression depuis 1996, en grande partie grâce aux espèces pélagiques de petite taille, avec un volume débarqué de près de 1,7 million de tonnes en 2002. Dans cette région, les fluctuations du volume des prises sont fréquentes, par suite de la variabilité environnementale accentuée de l’écosystème du courant de Benguela. Dans les autres régions, comme l’Atlantique Sud-Ouest et l’Atlantique Centre-Est, on observe depuis 2000 un déclin notable de la production des pêches. Le recul de 7 pour cent du volume total des captures dans l’Atlantique Centre-Est s’inscrit dans les fluctuations des prises constatées depuis 1990 dans la région, avec une variation d’amplitude accentuée, allant de 2,9 à 4,1 millions de tonnes sous l’effet conjugué des activités de pêche dans les eaux éloignées et des modifications, liées à l’environnement, de la productivité des stocks abondants d’espèces pélagiques de petite taille. Dans l’Atlantique Sud-Ouest, le déclin a surtout été attribuable à une chute d’environ 45 pour cent des prises d’encornet rouge d’Argentine entre 2000 et 2002. Cette espèce, qui comptait pour 33 pour cent des captures totales dans l’Atlantique Sud-Ouest en 2001, est en déclin depuis 1999, année où les prises déclarées ont atteint 1,1 million de tonnes.

Le suivi de la situation des pêches dans l’océan Indien a été rendu difficile par le caractère généralement médiocre des systèmes de collecte des statistiques sur la pêche dans la région, si bien qu’une proportion relativement élevée des captures est tout au plus rapportée dans les statistiques officielles sous la rubrique «espèces non déclarées». Cette carence ne laisse pas de poser également un important problème dans d’autres régions, comme l’Atlantique Sud-Ouest, l’Atlantique Est et l’Atlantique Centre-Ouest ainsi que le Pacifique Nord-Ouest et le Pacifique Centre-Ouest. On enregistre cependant, tant dans la région occidentale que dans la région orientale de l’océan Indien, une augmentation des volumes déclarés de captures depuis 1950, et la production des pêches en 2002 a été la plus forte jamais enregistrée dans ces deux régions.

La production des pêches hauturières du Pacifique est de loin la plus importante, suivie de l’Atlantique et de l’océan Indien. Le thon représente la principale ressource exploitée en haute mer. Dans certaines régions de l’Atlantique et du Pacifique, des stocks chevauchants de chinchards et d’encornets ainsi que de poissons démersaux sur les reliefs marins contribuent de façon significative à la production. La part occupée par les requins dans le volume global déclaré reste mineure relativement aux autres ressources océaniques; de plus, la sous-déclaration des prises accessoires et des rejets touchant cette espèce constituent une source de préoccupation. Le volume mondial des prises concernant les sept principales espèces commercialisées de thon est passée de moins de 0,5 million de tonnes au début des années 50 à un maximum de 4 millions de tonnes en 2002, avec une tendance à la stabilisation depuis 1998. Le thon listao, ou bonite à ventre rayé, qui entre pour près de 50 pour cent dans ce total avec un volume déclaré de captures de 2 millions de tonnes, reste l’une des principales espèces contribuant à la production mondiale des pêches.

On observe par ailleurs un phénomène commun à certaines régions, à savoir une transformation à long terme de la composition des captures, suite à l’appauvrissement des stocks plus traditionnels et au ciblage d’autres espèces de moindre valeur et jusqu’ici peu ou pas exploitées (figure 18). À titre d’exemple, dans l’Atlantique Nord-Ouest, on a vu augmenter les captures d’invertébrés (mollusques et crustacés) parallèlement au déclin des prises de poissons démersaux. Dans l’Atlantique Nord-Est, l’amenuisement des prises de cabillaud depuis la fin des années 60 a été compensé par l’augmentation des captures d’espèces moins prisées auparavant, comme le merlan bleu et l’anguille de sable. Dans l’Atlantique Sud-Ouest, le recul du merlu d’Argentine s’est accompagné d’une augmentation des prises d’encornet rouge. Dans le Pacifique Nord-Ouest, la baisse des prises de pilchard (ou sardine) et de lieu a été quelque peu compensée par la hausse des volumes capturés d’anchois du Japon, de poisson-sabre commun et d’encornet. Ces modifications de l’éventail des espèces capturées peuvent s’expliquer de différentes façons, notamment par l’adaptation de l’industrie et des marchés à des ressources dont la valeur était jusqu’ici jugée inférieure, ainsi que par l’incidence des pêches sur la structure des communautés marines, ou encore par l’évolution des régimes environnementaux qui affectent la productivité des stocks. À noter que, bien souvent, ces différents effets sont difficiles à discerner, notamment dans les régions où les activités de recherche et de suivi portant sur les ressources et sur le processus environnementaux sont insuffisamment développées.

La FAO suit l’exploitation des principaux stocks piscicoles ou groupes de ressources pour lesquels on dispose d’informations destinées à l’évaluation. La situation actuelle au niveau mondial est conforme aux tendances générales observées ces dernières années. On estime qu’en 2003, près d’un quart des stocks soumis à observation étaient sous-exploités ou modérément exploités, à raison de 3 pour cent et 21 pour cent respectivement, et qu’ils pourraient peut-être rendre davantage. Environ la moitié des cheptels (52 pour cent) étaient pleinement exploités et donnaient par conséquent lieu à des captures dont le volume était proche du plafond durable, tandis que près d’un quart d’entre eux étaient surexploités, épuisés ou en cours de relèvement après épuisement (16 pour cent, 7 pour cent et 1 pour cent respectivement) et doivent donc être reconstitués. Entre 1974 et 2003, la proportion des stocks offrant un potentiel d’expansion n’a cessé de régresser, parallèlement à l’augmentation de celle des stocks surexploités ou épuisés, passée d’environ 10 pour cent au milieu des années 70 à près de 25 pour cent au début des années 2000 (figure 19).

Parmi les 10 espèces occupant la tête de la classification et qui comptent, au total, pour environ 30 pour cent de la production mondiale des pêches de capture exprimée en quantité (figure 6), sept appartiennent à des stocks considérés comme pleinement exploités ou surexploités (anchois du Pérou, chinchard du Chili, lieu de l’Alaska, anchois du Japon, merlan bleu/poutassou, capelan et hareng de l’Atlantique). On ne peut donc guère s’attendre à des augmentations marquées des captures de ces espèces. Deux espèces pourraient probablement être soumises à une pêche plus intensive dans certaines régions, à savoir le thon listao et le maquereau espagnol, et l’on ignore la situation de la dernière, à savoir le poisson-sabre commun. Dans le Pacifique Sud-Est, l’impact conjugué de la pêche intensive et des conditions environnementales défavorables, dont le grave phénomène climatique El Niño de 1997-98, a entraîné vers la fin des années 90 un effondrement des captures des deux espèces principales, à savoir l’anchois du Pérou et le chinchard du Chili. Alors que le stock d’anchois du Pérou a donné des signes de reprise, avec des captures de l’ordre de 10 millions de tonnes depuis 2000, les prises totales de chinchard du Chili n’ont guère dépassé 1,7 million de tonnes en 2002, soit moins de 50 pour cent de la production maximale jamais enregistrée, celle de 1994. Dans le Pacifique Nord, la configuration des captures a subi d’importantes modifications, par suite de la pêche intensive et des oscillations décennales naturelles de la productivité du pilchard, de l’anchois et du lieu. Après avoir atteint des captures records dans les années 80, les captures de pilchard (ou sardine) du Japon se sont effondrées au milieu des années 90; cependant, la vigoureuse reconstitution des cheptels d’anchois a permis, dès 1998, des captures atteignant près de 2 millions de tonnes. Cette alternance entre les stocks de sardine et d’anchois répond à un schéma observé dans bien d’autres régions du monde, et semble principalement déterminée par les régimes climatiques qui affectent la production. Ainsi, les stocks de lieu du Pacifique Nord-Ouest sont considérés comme surexploités, tandis que ceux du Pacifique Nord-Est seraient pleinement exploités. Les captures de lieu ont atteint leur niveau maximal à la fin des années 80 dans les deux régions, pour décliner depuis, avec toutefois, dernièrement, des signes de modeste reprise dans le Pacifique Nord-Est. Dans l’Atlantique Nord-Est, les captures de merlan bleu ont atteint des niveaux records, avec un 1,8 million de tonnes en 2001, et ont baissé légèrement en 2002. Ce stock, très lourdement exploité, nécessite la prise de mesures de gestion plus restrictives. Le capelan et le hareng, bien qu’exploités à plein potentiel, restent conformes aux limites de sécurité biologique. Les prises de thon listao n’ont cessé de progresser depuis 1950, pour atteindre en 2002 leur record de volume déclaré, soit près de 2 millions de tonnes, ce qui représente environ la moitié du total des captures commercialisées de cette espèce. La situation des stocks de thon listao est hautement incertaine; toutefois, selon certaines indications, il reste un potentiel d’augmentation pour les captures intéressant le Pacifique Est, Ouest et Centre ainsi que l’océan Indien, à condition que les nouvelles augmentations de prises de thon listao n’entraînent pas une intensification des ponctions sur les cheptels actuellement exploités à plein, voire de manière excessive, d’autres espèces telles que le thon obèse et l’albacore.

Le pourcentage des stocks exploités à leur niveau durable maximal, voire au-delà, connaît d’importantes variations selon les différentes régions du monde, depuis le Pacifique Centre-Est – où ne sont considérés comme pleinement exploités que 33 pour cent des stocks pour lesquels on dispose d’informations destinées à l’évaluation, le solde des stocks étant sous-exploité ou exploité modérément – jusqu’à l’Atlantique Centre-Ouest et Nord-Est, ou encore l’océan Indien occidental – où tous les stocks pour lesquels on dispose d’informations sont déclarés pleinement exploités (73 pour cent, 59 pour cent et 75 pour cent respectivement) ou exploités au-delà de ce niveau (figure 20). Dans 12 des 16 régions statistiques de la FAO, 70 pour cent au moins des stocks sont d’ores et déjà pleinement exploités ou surexploités, donnant à penser que le potentiel maximal des pêches y a été atteint et qu’une gestion plus prudente et plus restrictive s’impose. Cette observation est confortée par l’analyse des tendances de la production des pêches au niveau régional. Quatre des 16 régions se situent à leur niveau maximal historique de production, tandis que dans 12 d’entre elles, la production a légèrement décliné avec, pour quatre d’entre elles, un déclin plus accentué, dont l’Atlantique Nord-Ouest (50 pour cent de déclin après le pic atteint en 1968), l’Atlantique Sud-Est (47 pour cent de déclin depuis le maximum atteint en 1978) et le Pacifique Sud-Est (31 pour cent de déclin après le pic de 1994). Dans la plupart des cas, c’est à la surexploitation qu’il faut attribuer ce déclin, parfois associée à d’autres facteurs tels que les conditions environnementales défavorables ou trop variables. Dans l’ensemble, les informations dont on dispose tendent à confirmer les estimations avancées par la FAO au début des années 70, à savoir que le potentiel mondial des pêches de capture marine représentent un volume d’environ 100 millions de tonnes, dont 80 millions de tonnes sont probablement réalisables. Ces informations confirment également que, malgré les différences d’ordre local, ce plafond a été atteint dans l’ensemble. Les informations communiquées ci-dessus viennent également à l’appui de l’exhortation à adopter des plans de reconstitution plus rigoureux pour les stocks épuisés par la surexploitation, mais aussi pour empêcher le déclin de ceux actuellement exploités à plein potentiel ou proches d’un tel niveau.

En réponse aux préoccupations suscitées à l’échelle mondiale, les pays se sont employés, par le truchement de la FAO et du Sommet mondial pour le développement durable tenu à Johannesburg (Afrique du Sud), en 2002, à étendre aux écosystèmes les politiques et les méthodes de gestion appliqués aux stocks piscicoles considérés individuellement. Cette démarche comporte la nécessité d’une meilleure compréhension et d’un meilleur suivi pour un large éventail de processus qui interagissent avec les pêches. Certaines des principales préoccupations en matière de gestion ont pour objet l’incidence des pêches sur les habitats, sur les communautés marines et sur les interactions écologiques (par exemple, la relation entre les prédateurs et leurs proies), mais aussi les conséquences des activités terrestres et des modifications climatiques sur les pêches. Le manque de sélectivité de nombreuses pêches conduit à des prises accessoires et des rejets – à savoir la capture involontaire d’espèces non ciblées – et de leur rejet: c’est là une préoccupation ultérieure touchant à la gestion. En effet, les prises accessoires risquent d’intensifier la pression sur des ressources ciblées par d’autres pêches, aggravant parfois le risque de pêche excessive, et peuvent également avoir des effets indésirables pour les espèces menacées d’extinction et protégées, telles que les tortues de mer et certaines espèces de mammifères marins, de même que les oiseaux marins et les requins. Les rejets d’espèces ou de sujets impropres à la consommation ou non commercialisables, ou encore de trop petite taille, constituent un dommage collatéral pour l’écosystème, un gaspillage de ressources et un facteur supplémentaire de surexploitation.

La mise en valeur des régions littorales – y compris l’expansion urbaine et industrielle ou l’aquaculture – parallèlement aux activités industrielles dans l’arrière-pays, font également peser de nombreuses menaces sur la santé des écosystèmes marins, car elles sont autant de sources de pollution et de dégradation d’habitats côtiers d’importance critique. Ces altérations du contexte terrestre et côtier portent atteinte de bien des manières aux conditions de vie des communautés de pêcheurs et des industries piscicoles établies sur les côtes. Elles réduisent notamment le rendement durable des stocks de poisson en modifiant la composition, la santé et la diversité des espèces exploitées, en accentuant l’instabilité et la variabilité de l’écosystèmes et en réduisant la qualité et la sécurité sanitaire des produits de la mer. En outre, des phénomènes climatiques tels que El Niño risquent d’avoir des conséquences très négatives pour les populations piscicoles et d’entraîner l’effondrement des pêches, comme on l’a vu pour l’anchois du Pérou dans le Pacifique Sud-Est au début des années 70. À plus long terme, de nombreux stocks ichtyologiques répondent à des fluctuations décennales qui semblent épouser à leur tour des cycles climatiques naturels. Les effets du climat sur les pêches sont exacerbés en cas de surexploitation; tant les cheptels piscicoles que les activités qui en dépendent deviennent alors plus vulnérables à la dynamique naturelle de l’environnement. L’évaluation des interactions entre les écosystèmes et les pêches en est encore à ses débuts; c’est pourquoi il conviendra d’approfondir considérablement les connaissances à propos des effets de ces interactions sur les ressources piscicoles, sur les communautés de pêcheurs et sur l’industrie de la pêche; il faudra aussi discerner leurs causes et leurs au évolutions, et élaborer des méthodes permettant d’y faire face et de s’y adapter. Cependant, compte tenu de la situation des pêches, de leurs ressources et de leurs écosystèmes, on ne saurait tarder davantage à appliquer des mesures qui auraient déjà dû être prises au cours des trois dernières décennies. Dans de telles conditions, il importe de traduire effectivement dans les faits l’approche de précaution en matière de pêches recommandée par la CNUED, l’Entente des Nations Unies sur les pêches13 et le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO14.

Pêches continentales

Contrairement au principaux stocks marins, les stocks ichtyologiques des pêches continentales sont moins bien définis; ils sont en outre implantés dans des zones géographiques beaucoup plus restreintes telles que les lacs, les rizières ou les cours d’eau, ou peuvent couvrir de vastes régions telles que les bassins fluviaux transfrontières, souvent situés dans des régions d’accès difficile. Ces facteurs rendent plus ardu le suivi de l’exploitation et l’appréciation de la situation des stocks de poisson. Rares sont les pays qui peuvent se le permettre, si bien que la majorité d’entre eux ne déclarent qu’une fraction infime de leurs captures dans les eaux continentales en précisant la ventilation par espèce. Cette situation rend encore plus complexe toute tentative d’évaluation précise, et la FAO n’est donc pas en mesure de proposer un tableau mondial de la situation de ces ressources.

Dans le rapport La situation mondiale des pêches et de l’aquaculture 2000, on peut lire que les ressources des eaux continentales sont sous-évaluées et menacées par les altérations et la dégradation des habitats ainsi que par les activités de pêche non durables. Il semble, malheureusement, que cette tendance persiste. En effet, les participants à LARS 2, symposium récemment consacré à la gestion des pêches des grands cours d’eau15, ont pris note de la médiocrité des informations de portée mondiale sur la pêche fluviale, parallèlement au fait que plus de 50 pour cent des espèces piscicoles des eaux continentales vivent dans des cours d’eau, lesquels abritent une proportion plus élevée d’organismes considérés comme en danger ou menacés que la plupart des autres écosystèmes. De nombreux bassins fluviaux, notamment lorsqu’ils sont situés dans les pays en développement, sont le théâtre de pêches intensives; bien souvent, le volume des prises y est en augmentation, alors même que l’on voit se modifier la composition de la faune piscicole, avec un déclin des espèces de grande taille et à maturation tardive. S’il est vrai qu’en dépit de l’exploitation intensive, la pêche en rivière continue de fournir un volume substantiel de captures dans les pays en développement, on voit par exemple apparaître pour la première fois dans le Mékong, des signes de surexploitation des stocks16; on observe, en outre, des manifestations analogues dans de nombreuses pêches lacustres: ainsi, dans le lac Victoria, les prises de perche du Nil sont tombées d’un volume record de 371 526 tonnes en 1990 à 241 130 tonnes en 2002. Parallèlement, les pêches d’esturgeon dans les pays riverains de la mer Caspienne ont chuté elles aussi, passant de 20 000 tonnes en 1988 à moins de 1 400 tonnes en 2002, sous l’effet combiné de la pêche illicite, de la surexploitation et de la dégradation des habitats. En règle générale, les stocks de poisson des eaux intérieures sont décrits comme constituant le plus menacé des groupes de vertébrés soumis à exploitation humaine17.

Cependant, dans de nombreuses régions, certaines ressources piscicoles des eaux intérieures ont bénéficié de programmes de repeuplement, de l’introduction d’espèces exotiques, voire d’opérations de reconfiguration ou d’amélioration de l’habitat. Dans les régions en développement, notamment en Asie, les rizières et les surfaces irriguées sont aménagées de manière à élargir la biodiversité aquatique en dehors du riz et pour améliorer la situation nutritionnelle des ménages ruraux18. De telles améliorations peuvent contribuer à stabiliser les ressources, à obtenir des récoltes plus précoces et à en augmenter la valeur.

UTILISATION DU POISSON

En 2002, près de 76 pour cent (soit 100,7 millions de tonnes) de la production estimative mondiale de poisson ont été utilisés pour la consommation humaine directe (tableau 1). Les 24 pour cent restants, soit 32 millions de tonnes, étaient destinés aux produits non alimentaires, en particulier la fabrication de farine et d’huile de poisson. Si l’on exclut la Chine, les proportions deviennent alors, respectivement, 74 pour cent (65,5 millions de tonnes), et 26 pour cent (23 millions de tonnes) (tableau 2 et figure 2). Il semble que plus de 79 pour cent (35 millions de tonnes) de la production piscicole déclarée de la Chine (44 millions de tonnes) ait été utilisés pour la consommation humaine directe, dont la majeure partie sous forme de poisson frais (75,5 pour cent). Le reliquat (un volume estimatif de 9,1 millions de tonnes) a été transformé en farine de poisson ou destiné à d’autres usages non alimentaires, y compris l’aquaculture.

En 2002, 70 pour cent (62 millions de tonnes) de la production mondiale de poisson, à l’exclusion de la Chine, ont été soumis à un processus de transformation. Ce poisson transformé a été utilisé à raison de 63 pour cent (39 millions de tonnes) pour la fabrication de produits de consommation humaine directe, le reste étant destiné à des usages non alimentaires. Les nombreuses options en matière de transformation du poisson se déclinent en un vaste éventail de goûts et de présentations, faisant du poisson l’une des denrées alimentaires les plus polyvalentes. Cependant, à l’inverse de nombreux autres produits alimentaires, la transformation du poisson n’augmente généralement pas le prix du produit final, et le poisson frais reste la forme la plus largement prisée du produit sur le marché. Au cours des années 90, relativement à d’autres produits, la proportion du poisson commercialisé encore vivant ou frais a augmenté dans le monde (figures 21 et 22). Si l’on exclut la Chine, le volume de poisson vivant ou frais a augmenté, passant d’un volume estimatif de 17 millions de tonnes en 1992 à 26 millions de tonnes en 2002, soit de 20 pour cent à 30 pour cent de la production totale. Quant au poisson transformé destiné à la consommation humaine (congelé, fumé et mis en boîte), la quantité en est restée relativement stable, à près de 39 millions de tonnes. La congélation, principale méthode de transformation du poisson à usage alimentaire, a constitué, en 2002, 53 pour cent du poisson transformé total en vue de la consommation humaine, suivi de la mise en conserve (27 pour cent) et de saurissage (20 pour cent). Dans les pays développés, la proportion du poisson soumis à congélation est en hausse constante et elle a compté pour 42 pour cent de la production en 2002. Par contre, la part des produits congelés constituait 13 pour cent de la production totale dans les pays en développement, où le poisson est largement vendu frais ou réfrigéré.

L’utilisation de la production piscicole présente d’importantes différences selon les continents, les régions et les pays. Ainsi, en 2002, la proportion de poisson fumé a été plus élevée en Afrique (16 pour cent) et en Asie (11 pour cent) que dans les autres continents. Toujours en 2002, plus des deux tiers du poisson utilisé pour la consommation humaine en Europe et en Amérique du Nord ont été congelés ou mis en conserve. En Afrique et en Asie, la proportion du poisson commercialisé sous forme vivante ou fraîche a été particulièrement élevée. Malheureusement, les statistiques dont on dispose ne permettent pas de déterminer avec exactitude la quantité de poisson vendu encore vivant. À noter que les ventes de poisson vivant aux consommateurs et aux restaurants est particulièrement importante en Asie du Sud-Est et en Extrême-Orient.

En 2002, la quasi-totalité de la production piscicole destinée à des usages non alimentaires provenait de stocks naturels de petites espèces pélagiques représentant 37 pour cent du total des pêches de capture. La majeure partie de ces produits de la pêche a servi de matière première pour la production d’aliments pour animaux et d’autres dérivés. Quatre-vingt-dix pour cent de la production mondiale de poisson (à l’exclusion de la Chine) destinée à des usages non alimentaires ont été transformés en farine ou en huile de poisson. Les 10 pour cent restants ont été en grande partie utilisés comme alimentation directe destinée à l’aquaculture et aux animaux à fourrure. La quantité des espèces pélagiques utilisées pour l’alimentation animale (21 millions de tonnes) a été légèrement supérieure (3 pour cent) à celle de 2001, année pour laquelle la production a été de 13 pour cent inférieure au niveau enregistré en 2000. Cependant, ce volume se situe encore très en-deçà des niveaux records – plus de 29 millions de tonnes – enregistrés au milieu des années 90.

Consommation de poisson

En 2002, à l’échelle mondiale, la consommation moyenne apparente, par personne, de poisson, crustacés et mollusques a été estimée à environ 16,2 kg, soit 21 pour cent de plus qu’en 1992 (13,1 kg). Cette croissance est principalement attribuable à la Chine, dont la part estimative de la production piscicole mondiale est passée de 16 pour cent en 1992 à 33 pour cent en 2002. Si l’on exclut la Chine, l’offre de poisson par habitant serait de 13,2 kg, pratiquement identique à celle de 1992. Après une crête de 14,6 kg en 1987, l’offre mondiale de poisson par habitant, toujours Chine exclue, a subi un déclin de la fin des années 80 jusqu’au début des années 90, pour se stabiliser depuis (figure 2). Ce recul s’explique principalement par une croissance démographique plus soutenue que celle de l’offre de poisson durant les années 1987 à 2002 (1,3 pour cent contre 0,6 pour cent par an respectivement). S’agissant de la Chine, l’augmentation annuelle correspondante depuis 1987 a été de 1,1 pour cent pour la progression démographique et de 8,9 pour cent pour celle de l’offre de poisson à usage alimentaire. En 2002, l’offre de poisson par habitant était, en Chine, d’environ 27,7 kg.

Le poisson représente une source précieuse de micronutriments, de minéraux, d’acides gras essentiels et de protéines entrant dans le régime alimentaire des populations de nombreux pays19. Selon les estimations, le poisson peut fournir jusqu’à 180 kilocalories par habitant et par jour; cependant, son apport n’est aussi élevé que dans quelques pays ne disposant pas d’alternative en matière d’aliments protéiques, et où la préférence pour le poisson est à la fois marquée et bien ancrée, comme l’Islande, le Japon, et certains petits États insulaires en développement. De façon plus générale, le poisson fournit entre 20 et 30 calories par habitant et par jour. Les protéines provenant du poisson sont cruciales pour le régime alimentaire de certains pays densément peuplés où la prise totale de protéines risque d’être faible, et elle joue un rôle très important dans un grand nombre d’autres pays. À titre d’exemple, le poisson contribue pour près de 50 pour cent, et parfois plus, à l’absorption totale de protéines d’origine animale dans certains petits pays insulaires en développement de même qu’au Bangladesh, au Cambodge, au Congo, en Gambie, au Ghana, en Guinée équatoriale, en Indonésie, au Japon, en Sierra Leone et à Sri Lanka. Dans l’ensemble, le poisson fournit à plus de 2,6 milliards de personnes au moins 20 pour cent de leur prise moyenne quotidienne de protéines d’origine animale. La part occupée par les protéines du poisson dans l’offre mondiale totale de protéines animales est passée de 14,9 pour cent en 1992 à un maximum de 16 pour cent en 1996, pour décliner ensuite légèrement et s’établir à 15,9 pour cent en 2001. Les chiffres correspondants pour l’ensemble du monde, à l’exclusion de la Chine, indiquent une augmentation allant de 14,3 pour cent à 14,7 pour cent en 2001 durant la même période. La figure 23 présente les contributions des principaux groupes d’aliments aux apports protéiques totaux.

Dans les pays industrialisés (tableau 10), la consommation effective de poisson a progressé, passant de 24 millions de tonnes (équivalent poids vif) en 1992 à 26 millions de tonnes en 2001, avec une augmentation de la consommation par habitant de 28 à 28,6 kg. La part du poisson dans la prise totale de protéines a marqué un léger recul, de 8 pour cent en 1992 à 7,7 pour cent en 2001. Dans ces pays, la part de poisson dans la prise totale de protéines a progressé de manière constante jusqu’à 1989 (entre 6,5 pour cent et 8,5 pour cent); lorsqu’elle a commencé à reculer du fait de l’augmentation de la consommation d’autres protéines animales; en 2001, sa part était retombée au niveau prévalant au milieu des années 80. Depuis le début des années 90, la consommation de protéines du poisson a été relativement stable, avec 8,1-8,3 g par habitant et par jour, parallèlement à une prise croissante de protéines animales d’autres origines.

Tableau 10
Approvisionnements totaux et par habitant en poissons de consommation, par continent et par groupement économique, 2001

 

Total des approvisionnements alimentaires

Approvisionnements alimentaires par habitant

(en millions de tonnes de poids vif)

(kg/an)

Total mondial

100,2

16,3

Total, monde sauf Chine

67,9

13,9

Afrique

6,3

7,8

Amérique du Nord et Amérique centrale

8,5

17,3

Amérique du Sud

3,1

8,8

Chine

32,3

25,6

Asie (sauf Chine)

34,8

14,1

Europe

14,4

19,8

Océanie

0,7

23,0

Pays industrialisés

26,0

28,6

Économies en transition

4,7

11,4

Pays à faible revenu et à déficit vivrier
(sauf Chine)

22,5

8,5

Pays en développement, sauf pays à faible revenu et à déficit vivrier

14,9

14,8

Note: Extrait des données parvenues à la FAO en décembre 2003. Il pourrait y avoir des divergences entre ces données et les données citées dans d’autres sections parvenues à la FAO plus récemment

 

En 1992, l’offre effective de poisson par habitant dans les pays à faible revenu et à déficit vivrier (PFRDV) a été de 9,7 kg, soit à peine un tiers de l’offre estimative dans les pays les plus riches. Cet écart a été progressivement comblé, si bien qu’en 2001, la consommation moyenne de poisson par habitant (14,0 kg) représentait plus de la moitié de celle des économies plus favorisées. Cependant, si on exclut la Chine, l’offre par habitant dans les autres PFRDV reste relativement faible, puisqu’elle est estimée à environ 8,5 kg en 2001, avec un taux de croissance de moins de 1 pour cent par an depuis 1992. En dépit de la consommation relativement faible de poisson, exprimée en poids, dans les PFRDV, la contribution de la production piscicole à la prise totale de protéines animales en 2001 a été importante, s’établissant à environ 20 pour cent, et pourrait être supérieure à celle indiquée par les statistiques officielles, étant donné la contribution non déclarée des pêches de subsistance. Cependant, la part occupée par les protéines du poisson dans les protéines animales est restée inchangée au cours des trois dernières décennies, en raison de la croissance rapide de la consommation de protéines animales d’autres origines.

La place occupée par le poisson dans la nutrition varie beaucoup selon le continent, la région ou le pays, de même qu’en fonction de la tranche de revenus (figures 24 et 25). Ainsi, l’offre mondiale totale pour la consommation était de 100 millions de tonnes en 2001; cependant, l’Afrique n’en a absorbé que 6,3 millions de tonnes (avec une offre par habitant de 7,8 kg); les deux tiers du total étaient consommés en Asie, dont 34,8 millions de tonnes à l’extérieur de la Chine (14,1 kg par habitant) et 32,3 millions de tonnes rien qu’en Chine (25,6 kg par habitant). En Océanie, la consommation a atteint 23 kg par habitant, tandis qu’en Amérique du Nord elle a été de 21,6 kg, en Europe de 19,8 kg, en Amérique centrale et dans les Caraibes de 9,3 kg et en Amérique du Sud de 8,7 kg

En 2002, la production des pêches de capture est entrée pour 60,5 pour cent dans l’offre mondiale de poisson destiné à la consommation alimentaire, tandis que le solde provenait de l’aquaculture (figure 26). La contribution des pêches de capture en eaux continentales et en mer à l’offre alimentaire par habitant a légèrement reculé au cours de la dernière décennie, en particulier depuis 1997, avec un déclin de l’offre par habitant faisant passer cette dernière de près de 10,8 kg par habitant en 1997 à 9,8 kg en 2002. À l’échelle mondiale, si l’on exclut la Chine, l’offre de nourriture à base de poisson par habitant provenant des pêches de capture à reculé, passant de 11,5 kg en 1997 à 10,8 kg en 2002. En revanche, si l’on exclut la Chine, la contribution moyenne de l’aquaculture à l’offre par habitant a progressé, des 13 pour cent enregistrés en 1992 à 18,4 pour cent en 2002, passant ainsi de 1,7 kg par habitant en 1992 à 2,4 kg en 2002, à savoir une croissance annuelle moyenne de 3,5 pour cent. Les chiffres correspondants pour la Chine indiquent une augmentation de 55,5 pour cent en 1992 à 79,8 pour cent en 2002, soit une offre aquacole par habitant, exprimée en poids, passée de 7,1 kg en 1992 à 21,8 kg en 2002, ce qui correspond à une croissance annuelle moyenne de 11,9 pour cent.

La consommation de poisson est répartie de façon inégale à travers la planète, avec des différences très marquées d’un pays à l’autre et une consommation effective par habitant pouvant allait de moins de 1 kg à plus de 100 kg. On observe également des différences géographiques très nettes dans la consommation de poisson à l’intérieur même d’un pays, avec, en général, des chiffres supérieurs dans les régions littorales. Par ailleurs, les schémas de consommation alimentaire sont influencés par les interactions complexes de différents facteurs, tels que la disponibilité, le revenu, les prix, la tradition, le goût, ainsi que l’évolution démographique et les modes de vie. Au cours des dernières années, la consommation de poisson et produits dérivés a été fortement influencée par les améliorations en matière de transport et de commercialisation, mais aussi par les progrès de la science et de la technologie diététique qui ont entraîné une forte rationalisation associée à un abaissement des coûts, à un élargissement des choix et à une offre de produits plus sûrs et de meilleure qualité, avec toutefois des variations selon les régions. En règle générale, la commercialisation de poisson et de produits dérivés sous forme fraîche a progressé, de même que la diffusion de produits prêts à cuisiner ou à consommer, notamment dans les économies riches.

Les différences dans les schémas de consommation sont encore plus marquées en fonction des espèces. Ainsi, les poissons démersaux sont les plus prisés en Europe et en Amérique du Nord, tandis que les céphalopodes, qui font l’objet d’une grande consommation dans plusieurs pays méditerranéens et asiatiques, sont beaucoup moins recherchés dans d’autres régions. En dépit de la contribution en progression rapide de l’aquaculture à l’offre alimentaire de poisson, et de la réduction connexe des cours des denrées soumises à échange, le prix des crustacés reste élevé et leur consommation est principalement concentrée dans les économies riches. Une part très importante des 16,3 kg de poisson par habitant offerts à la consommation en 2001, soit 74 pour cent, était composée de poissons à nageoires, tandis que les crustacés et mollusques en représentaient 25 pour cent, soit près de 4 kg par habitant, ainsi ventilés: 1,5 kg de crustacés, 2 kg de mollusques et 0,5 kg de céphalopodes.

Encadré 3

Intégrer les pêches aux stratégies nationales de développement et de réduction de la pauvreté

Le secteur des pêches joue un rôle important dans la réduction de la pauvreté et dans la conquête de la sécurité alimentaire de nombreuses régions du monde. Les exportations de poissons et de produits dérivés génèrent davantage de devises étrangères (sous forme de recettes d’exportation ou de redevances d’exploitation de licences) que les revenus provenant du commerce d’autres denrées de base telles que le riz, le cacao, le café ou le thé; à l’échelle planétaire, plus de 38 millions de personnes sont directement engagées dans des activités de pêche ou d’aquaculture, à temps plein ou, plus fréquemment, à temps partiel; les produits des pêches entrent pour 15 à 16 pour cent dans la prise totale de protéines animales, et les pays en développement fournissent 70 pour cent du poisson servant à la consommation humaine. Le secteur des pêches est particulièrement important pour 44 pays (à savoir 15 petits États insulaires en développement, 12 pays d’Afrique, 12 pays d’Asie, trois économies en transition et deux États d’Amérique latine) dans lesquels ce secteur apporte une contribution importante tant aux exportations qu’en termes nutritionnels à l’échelon national1. Cependant, cette contribution ne se reflète que rarement dans les politiques nationales des pays en question.

Une étude récente2 a démontré que le secteur des pêches n’est pris en compte que de façon marginale dans le cadre d’initiatives telles que les Plans nationaux de développement, les Documents de stratégie de réduction de la pauvreté, les Stratégies d’assistance aux pays de la Banque mondiale et les Documents de stratégie par pays de l’UE. En règle générale, le secteur des pêches n’y tient pas une grande place; en outre, le rapport de cause à effet entre les pêches et la pauvreté n’est guère reconnu dans les documents traitant des politiques nationales. Il semble que le secteur ait été intégré de la façon la plus efficace aux Documents de stratégie de réduction de la pauvreté et aux Plans nationaux de développement en Asie, suivie de près par les économies africaines et celles des petits États insulaires en développement. En revanche, l’Amérique latine, où l’on trouve deux des six premiers pays du monde pour la pêche, à savoir le Chili et le Pérou, n’obtient que des résultats très médiocres en matière d’intégration du secteur des pêches aux Documents de stratégie de réduction de la pauvreté et aux Plans nationaux de développement.

De plus, en dépit d’une démarcation très marquée des rôles des hommes et de ceux des femmes dans le secteur, il est rare de voir un document de politique nationale adopter une approche qui tient compte du rôle des hommes et des femmes. De plus, malgré les efforts déployés sur une grande échelle par la FAO, par le truchement du Code de conduite pour une pêche responsable, afin de promouvoir une exploitation des ressources aquatiques vivantes qui soit durable et en harmonie avec l’environnement, un seul pays, à savoir la Malaisie, y fait référence de façon explicite dans son Plan national de développement.

Il convient par conséquent de multiplier les efforts pour obtenir l’intégration effective des pêches aux principales politiques nationales de réduction de la pauvreté et aux documents consacrés au développement rural, en accordant une attention particulière à la parité hommes-femmes de même qu’aux instruments de développement des pêches reconnus à l’échelle internationale, comme le Code de conduite pour une pêche responsable.

1 Le secteur est considéré comme important dans les cas où la contribution des pêches au commerce d’exportation du secteur agricole et à la prise journalière de protéines animales est supérieure à 10 pour cent.
2FAO, 2004. Mainstreaming fisheries into national development and poverty reduction strategies: current situation and opportunities, par A. Thorpe. Circulaire des pêches n997. Rome.

 

Les espèces d’eau douce et diadromes entraient pour 29 millions de tonnes, (environ 4,7 kg par habitant), dans l’offre totale. Les poissons à nageoires marins totalisaient plus de 45 millions de tonnes, dont près de 18 millions de tonnes pour les espèces démersales, 19 millions de tonnes pour les espèces pélagiques et 9 millions de tonnes pour les poissons marins non identifiés. La portion restante de l’offre alimentaire totale se composait de crustacés et mollusques, dont 9,2 millions de tonnes pour les crustacés, 3,3 millions de tonnes pour les céphalopodes et 12,7 millions de tonnes pour les autres mollusques. Une observation rétrospective révèle qu’il n’y a pas eu de modification spectaculaire dans la répartition des principaux groupes pour ce qui est de la consommation mondiale moyenne: les espèces démersales se sont stabilisées à environ 2,9 kg par habitant et les poissons pélagiques à 3 kg. Les crustacés et mollusques représentent une exception, puisqu’ils ont connu une augmentation considérable entre 1961 et 2001: la disponibilité de crustacés par habitant a plus que triplé, passant de 0,4 kg à 1,5 kg, du fait principalement de l’augmentation de la production de crevettes et de crevettes bouquet provenant de l’aquaculture; par ailleurs, les mollusques (à l’exclusion des céphalopodes) sont passés de 0,6 kg à 2,1 kg par habitant.

COMMERCE DU POISSON

En 2002, la valeur totale des échanges commerciaux portant sur le poisson et ses dérivés a augmenté pour s’établir à 58,2 milliards de dollars EU (valeur à l’exportation), soit une progression de 5 pour cent sur l’an 2000 et de 45 pour cent depuis 1992 (figure 27). Exprimées en quantité, les exportations déclarées ont été de 50 millions de tonnes (équivalent poids vif), avec une augmentation de 40,7 pour cent depuis 1992, toutefois en léger déclin (1 pour cent) par rapport à 2000. La quantité de poisson échangé est demeurée relativement stagnante au cours des dernières années, après plusieurs décennies de forte augmentation. En effet, de nombreux facteurs économiques qui avaient stimulé la forte croissance du commerce mondial des pêches au cours de la décennie précédente se sont à présent atténués, ou ne sont pas suffisamment vigoureux pour soutenir les niveaux précédents de performance. Alors que les estimations préliminaires pour 2003 font état d’une légère augmentation de la valeur des exportations de poisson, il est peu probable que l’on puisse répéter à brève échéance les tendances des années précédant l’an 2000, notamment compte tenu des reculs découlant des tensions géopolitiques.

En 2002, la Chine, dépassant la Thailande pour la première fois, a occupé le premier rang mondial pour l’exportation de poisson et de produits dérivés, avec un chiffre de 4,5 milliards de dollars EU. En dépit de ce succès, les exportations de poisson de la Chine n’ont représenté que 1,4 pour cent du total de ses exportations de produits commerciaux, et 25 pour cent de ses exportations agricoles (à l’exclusion des produits forestiers). Depuis le début des années 90, la Chine a vu progresser de façon remarquable ses exportations de poisson, avec une croissance moyenne de 11 pour cent par an au cours de la période 1992-2002 et en particulier depuis 1999, avec une croissance moyenne de 24 pour cent entre 1999 et 2002. Ces progressions sont liées à celle de sa production, de même qu’au développement de son industrie de transformation du poisson. Cette dernière offre des coûts compétitifs de main-d’œuvre et de production. Outre la production provenant de ses propres pêches, la Chine exporte des matières premières retransformées, obtenant ainsi une forte valeur ajoutée. Les importations de poisson et de produits dérivés ont considérablement augmenté au cours de la dernière décennie, passant de 0,7 milliard de dollars EU en 1992 à 2,2 milliards de dollars EU en 2002, la Chine devenant ainsi le huitième importateur mondial de poisson. Cette progression a été particulièrement marquée au cours des dernières années, avec une augmentation de 94 pour cent des importations depuis 1999. Suite à son accession à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) fin 2001, la Chine a dû s’engager à abaisser ses droits d’importation; ces derniers sont ainsi passés d’un barème d’importation tarifaire moyen atteignant parfois 15,3 pour cent en 2001, à 11 pour cent en 2003 et 10,4 pour cent en 2004.

En 2002, la Thailande, qui avait été le principal exportateur de poisson et de produits dérivés depuis 1993, a déclaré des exportations pour une valeur de 3,7 milliards de dollars EU, soit 9 pour cent de moins qu’en 2001 et 16 pour cent de moins qu’en 2000. La Norvège, troisième exportateur mondial avec 3,6 milliards de dollars EU, était suivie des États-Unis (3,3 milliards de dollars EU), du Canada (3,0 milliards de dollars EU), du Danemark (2,9 milliards de dollars EU) et du Viet Nam (2,0 milliards de dollars EU). Ce dernier, grâce à la croissance de sa production aquacole, a nettement augmenté ses exportations de poisson et de produits dérivés au cours de la dernière décennie, passant de 0,3 milliard de dollars EU en 1992 à 2,0 milliards de dollars EU en 2002, avec une croissance plus accélérée (29 pour cent par an) depuis 1999. En 2002, les principaux marchés ciblés par les exportations vietnamiennes étaient la Chine, les États-Unis, et le Japon, avec une proportion de 48 pour cent de crevettes, principalement sous forme congelée.

En 2002, les importations mondiales de poisson et produits dérivés ont atteint de nouveaux records, soit plus de 61 milliards de dollars EU, les pays développés absorbant près de 82 pour cent de leur valeur totale. En dépit de la réduction de 12 pour cent de ses importations à partir des niveaux de 2000, le Japon a été, une fois de plus, le principal importateur de poisson et de produits dérivés, avec près de 22 pour cent de la part des importations mondiales en 2002. Les importations japonaises, d’un montant de 13,6 milliards de dollars EU, ont représenté 4 pour cent de son commerce total de marchandises. Quant aux États-Unis, outre le fait qu’ils sont le quatrième exportateur mondial, ils ont également occupé le deuxième rang pour les importations, avec un montant relativement stable de 10 milliards de dollars EU depuis 2000. En 2002, l’UE a encore augmenté – de 10 pour cent depuis 2000 – sa dépendance à l’égard des importations pour ses approvisionnements en poisson. L’Espagne, avec 3,9 milliards de dollars EU, a été le troisième importateur du monde de poisson et de produits dérivés, suivie de la France (3,2 milliards de dollars EU), de l’Italie (2,9 milliards de dollars EU), de l’Allemagne (2,4 milliards de dollars EU) et du Royaume-Uni (2,3 milliards de dollars EU). Selon les données préliminaires, en 2003, les principaux marchés importateurs ont augmenté d’environ 10 pour cent leurs importations de poisson et de produits dérivés.

 

Encadré 4

Les substances contaminantes du poisson

Introduction

Plusieurs composés organiques et inorganiques sont capables de coloniser le poisson et les fruits de mer. Ces composés peuvent être divisés en trois groupes principaux :

les produits chimiques inorganiques: arsenic, cadmium, plomb, mercure, sélénium, cuivre, zinc, fer;

les composés organiques: diphenyle polychlore (PCB), dioxines, insecticides (hydrocarbures chlorés). Il s’agit d’un groupe de produits extrêmement diversifiés, se prêtant à une vaste gamme d’utilisations industrielles et présentant une stabilité chimique qui leur permet de s’accumuler de façon persistante dans l’environnement;

les composés dérivés de la transformation: sulfites (utilisés pour le traitement des crevettes), polyphosphates, nitrosamines et résidus de drogues utilisées en aquaculture (antibiotiques, hormones).

À de faibles concentrations, un grand nombre de d’éléments chimiques inorganiques sont essentiels à la préservation de la vie; toutefois, ils deviennent toxiques à des concentrations élevées. Alors que des minéraux tels que le cuivre, le sélénium, le fer et le zinc sont des micronutriments essentiels pour le poisson et les mollusques et crustacés, d’autres éléments, comme le mercure, le cadmium et le plomb, n’ont aucune fonction connue qui soit essentielle à la vie et produisent des effets toxiques, même à de faibles concentrations, lorsqu’ils sont absorbés pendant une période prolongée. Ces composés, présents dans le milieu aquatique par suite de phénomènes naturels tels que le volcanisme marin, les phénomènes géologiques et géothermiques, mais également du fait de la pollution anthropogénique résultant d’activités métallurgiques et d’extraction minière intensives, d’opérations de rejet et d’incinération de déchets, ou encore de pluies acides provoquées par la pollution industrielle, sont à distinguer des composés organiques, dont la plupart sont d’origine anthropogénique et introduits dans le milieu aquatique par l’être humain.

De plus, on trouve des quantités croissantes de produits chimiques dans l’organisme des espèces prédatrices, par suite de la bioamplification, à savoir la concentration de substances chimiques aux niveaux supérieurs de la chaîne alimentaire. La présence de ces substances peut également résulter de la bioaccumulation, qui se produit lorsque des concentrations de plus en plus fortes de substances chimiques s’accumulent dans le tissu organique d’un sujet tout au long de sa vie. Dans ce cas, un poisson de grande taille (c’est-à-dire déjà plus âgé) présentera une teneur plus élevée de la substance chimique concernée qu’un poisson de petite taille (donc encore jeune) de la même espèce. La présence de substances contaminantes chimiques dans les produits de la mer est donc étroitement tributaire de la localisation géographique, de l’espèce et de la taille du poisson, de ses modes d’alimentation, de la solubilité des produits chimiques et de leur persistance dans l’environnement.

Risques liés aux substances contaminantes du poisson

Quelles sont, dans ces circonstances, les risques réels présentés par ces substances contaminantes pour la santé des êtres humains consommateurs de poisson et de produits de la mer?

Selon plusieurs études, dans les mers ouvertes, qui restent à ce jour presque exemptes de pollution, les poissons ne transportent qu’une teneur naturelle de ces composés chimiques inorganiques. En revanche, dans les régions fortement polluées, notamment dans les eaux dont les échanges avec les grands océans sont insuffisants, comme la mer Baltique ou la mer Méditerranée, mais aussi dans les estuaires, les fleuves et autres cours d’eau et notamment à proximité de sites abritant des activités industrielles, ces substances sont présentes dans des concentrations qui dépassent la teneur naturelle.

Plusieurs études concluent également que les poissons destinés à la consommation humaine ne contiennent de telles substances chimiques qu’à de faibles niveaux, probablement en deçà des seuils susceptibles d’affecter la santé. Toutefois, ils pourraient représenter une préoccupation pour les populations dont le poisson constitue une part importante de l’alimentation, les femmes enceintes et les nouveau-nés, de même que les enfants en bas âge qui consomment des quantités substantielles de poisson à chair grasse. La seule façon de dissiper ces préoccupations consiste à conduire et à tenir à jour des évaluations très précises du risque.

Alors que des scientifiques et autres experts considèrent comme naturelle la présence de certains de ces éléments dans le poisson et les produits de la mer, certains consommateurs, eux, y voient un risque pour la santé, quelle que soit la teneur observée. C’est ainsi que se déclenchent facilement les alertes alimentaires, encore amplifiées par les dérapages de la communication. Ce phénomène est accentué aujourd’hui par l’Internet, qui permet de diffuser des informations de façon quasi instantanée, avec des répercussions négatives importantes pour le commerce du poisson, comme l’ont illustré certains exemples récents d’alertes à la contamination du poisson.

Exemple 1: La présence de mercure dans le poisson

En 2003, le Comité mixte FAO/OMS d’experts des additifs alimentaires (JECFA), administré par la FAO et par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), a révisé les lignes directrices régissant la présence de mercure dans le poisson et a ramené le plafond admissible établi par la directive initiale, à savoir 3,3 microgrammes de methyl mercure par kilogramme de poids, à près de la moitié de cette teneur, soit 1,6 microgramme de methyl mercure par jour et par kilogramme de poids1. Parallèlement, le rapport du JECFA soulignait que les populations devaient continuer à consommer du poisson de façon normale et mettait en relief ses nombreux avantages pour la santé. Le rapport s’appuyait sur une étude de publication récente concernant les îles Seychelles, dans laquelle était analysée la consommation de poisson de couples mère-enfant sur une période décennale. Cette étude établissait que la consommation élevée de poisson n’entraînait pas d’effets négatifs pour le fœtus ni pour le développement neurologique de l’enfant.

Afin de traduire la prise hebdomadaire recommandée de mercure en une norme nationale de teneur maximale de mercure dans le poisson, il faut trouver une formule qui prenne en considération les modes de consommation, les autres sources d’absorption de mercure ainsi que d’autres informations pertinentes. Or, les pressions exercées sur l’opinion publique créent souvent, chez le consommateur, une confusion entre les niveaux maximums permissibles pour la protection de la santé humaine et les limites recommandées pour la protection de l’environnement. Dans ce dernier cas, il convient de prendre des mesures appropriées, d’application homogène pendant une période suffisamment prolongée, pour obtenir une réduction du fardeau imposé à l’environnement par un agent contaminant. À titre d’exemple, s’agissant du mercure, ces mesures pourraient comprendre l’application exécutoire de politiques énergétiques visant à réduire la dépendance à l’égard des centrales thermiques alimentées au charbon ainsi que la réduction de l’enfouissement des déchets, ces deux causes représentant 70 pour cent des nouvelles émissions de mercure dans l’atmosphère attribuables à l’être humain.

Il faut cependant déplorer que l’action conjuguée de plusieurs articles publiés dans les médias et des alertes lancées à propos de la santé publique ait porté à son paroxysme la confusion des consommateurs. On a ainsi propagé des messages contradictoires à propos, d’une part, des avantages que présente la consommation de poisson et de produits de la mer pour la santé, et d’autre part des risques dus à la présence de mercure dans le poisson; à telle enseigne que des autorités locales en Californie (États-Unis) ont menacé les commerces de produits alimentaires de poursuites judiciaires s’ils n’apposaient pas des pancartes avertissant les consommateurs du danger lié à la présence de mercure dans le poisson.

Depuis, la Food and Drug Administration (FDA) et l’Environmental Protection Agency (EPA) ont diffusé des conseils aux consommateurs en s’inspirant des récentes lignes directrices du JECFA, mais en soulignant par la même occasion que le poisson et les produits de la mer entrent pour une part importante dans un régime alimentaire sain. Toujours est-il que, selon les représentants de l’industrie du thon, il sera difficile de remédier au préjudice causé.

Exemple 2: Les polluants organiques présents dans le saumon

La revue Science a récemment publié une étude intitulée «Global assessment of organic contaminants in farmed salmon»2 (Évaluation mondiale des contaminants organiques contenus dans le saumon d’élevage) portant sur 14 composés de chlore organique présents dans le saumon d’élevage et dans le saumon sauvage et tous considérés comme cancérigènes. L’étude révèle que toutes les substances testées étaient présentes à des teneurs plus élevées dans le saumon d’élevage que dans le saumon sauvage. Cette observation s’appliquait en particulier aux poissons d’élevages européens. Alors même que les niveaux relevés correspondaient aux résultats d’autres études et de contrôles officiels, les chercheurs en ont conclu quelque peu hâtivement que les consommateurs devaient limiter de façon très stricte leur consommation de saumon d’élevage et ont suggéré que toute personne ne souhaitant pas aggraver le risque de contracter un cancer devra limiter sa consommation à une portion de saumon d’élevage tous les deux mois.

S’appuyant sur les concentrations observées de substances toxiques, les auteurs de l’étude entreprirent ensuite de calculer les tailles des portions de saumon sauvage et d’élevage pouvant être consommées sans augmenter le risque de cancer. Les quantités recommandées fluctuent considérablement en fonction des origines du saumon. Ainsi, l’étude autorise la consommation de 8 portions (227 g) de saumon de Kodiak (Alaska) par mois, alors que la consommation de saumon d’élevage du Chili ne devrait pas dépasser une portion par mois, et qu’elle se réduit à une portion tous les deux mois pour le saumon d’élevage norvégien, et enfin à une portion congrue tous les quatre ou cinq mois seulement pour le saumon d’élevage provenant d’Écosse ou des îles Féroé.

De tels calculs ne manquèrent pas de susciter une grande émotion. La formule utilisée pour y parvenir, vigoureusement contestée parmis les scientifiques, n’est pas censée servir aux calculs appliqués au poisson de production commerciale. L’EPA l’a élaborée afin d’estimer la quantité de leur capture que pouvaient consommer les pêcheurs à la ligne se livrant à leur sport dans des eaux intérieures contaminées. En revanche, les produits commerciaux doivent être évalués en appliquant les critères de la FDA. Afin de réfuter ce modèle, les chercheurs ont calculé que, sur la base de la contamination par les PCB indiquée dans l’étude, après 70 ans de consommation régulière de 200 g de saumon par semaine pour le groupe à haut risque (femmes enceintes, enfants, mères en période d’allaitement) le risque de contracter un cancer serait plus élevé de un cent-millième, soit une augmentation de 0,001 pour cent. Par comparaison, le risque de mourir d’une maladie cardiovasculaire en éliminant complètement le poisson pourrait atteindre jusqu’à 30 pour cent!3

Par conséquent, il ne faut guère s’étonner que les recommandations émanant des auteurs de cette étude et visant à limiter de façon draconienne la consommation de saumon se soit heurtée à de vigoureuses objections en Europe, aux États-Unis et ailleurs; les autorités chargées du contrôle alimentaire et de la protection de la santé y ont aussitôt annoncé que l’étude n’apportait rien de nouveau à propos de la sécurité sanitaire des aliments étant donné que les niveaux constatés étaient conformes aux résultats d’autres études et de contrôles officiels. Ces mêmes autorités ont encouragé les consommateurs à continuer de consommer du poisson, y compris du saumon, dont les avantages pour la santé ont été démontrés de façon incontestable dans plus de 5 000 rapports scientifiques. Malheureusement, l’étude avait déjà alarmé au plus haut point la population, si bien que les achats au détail de poissons d’élevage ont chuté de 20 à 30 pour cent dans des pays comme l’Irlande, l’Écosse et la Norvège, et qu’il a fallu beaucoup de temps et d’efforts pour recouvrer la confiance des consommateurs.

Conclusion

La mondialisation et la poursuite de la libéralisation du commerce mondial du poisson, tout en offrant de nombreux avantages et en ouvrant de nouvelles perspectives, ne manquent pas de susciter de nouvelles difficultés en matière de sécurité sanitaire et de qualité. Les autorités réglementaires ont dû mettre en œuvre, avec des succès variables, tout un faisceau de mesures de contrôle, depuis les ordonnances d’application du Système d’analyse des risques – points critiques pour leur maîtrise (HACCP)4 jusqu’à l’intensification des essais. Il importe d’améliorer les instruments scientifiques d’analyse du risque afin que les normes de sécurité sanitaire du poisson s’appuient sur les méthodes scientifiques les plus modernes et les plus efficaces de protection de la santé publique.

En fixant des niveaux maximums de présence de substances polluantes dans le poisson, les autorités réglementaires doivent garantir un niveau optimal de protection de la santé des consommateurs; toutefois, elles doivent également prendre en compte la réalité de la contamination au niveau de l’ensemble de l’environnement, de manière à ne pas compromettre les approvisionnements alimentaires. Parallèlement, il convient d’adopter des stratégies afin de réduire graduellement la contamination de fond de l’environnement et d’abaisser progressivement les niveaux maximums de contaminants dans l’alimentation animale et humaine, afin d’accompagner cette tendance à la réduction. Il faudra en outre lancer des campagnes d’information et de sensibilisation afin d’assurer la transparence tout en renseignant les consommateurs.

Une telle entreprise nécessitera un renforcement de la coopération internationale visant à promouvoir la collaboration scientifique, l’harmonisation, l’adoption de tableaux d’équivalence et de mécanismes de fixation de normes à valeur scientifique. Les accords sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires/ sur les barrières techniques au commerce de l’Organisation mondiale du commerce5, ainsi que le rôle de référence de la Commission du Codex Alimentarius fournissent un tremplin pour une telle action à l’échelle internationale. Cette dernière revêt une importance capitale pour le commerce du poisson, dans les pays développés comme dans les pays en développement, ces derniers contribuant pour plus de 50 pour cent (en valeur) à ce commerce.

1 FAO/OMS. 2003. Summary and conclusions. Joint Expert Committee on Food Additives, Sixty-first Meeting, Rome, 10-19 juin (disponible à: http://www.who.int/ipcs/food/jecfa/summaries/en/summary_61.pdf; adresse valable en septembre 2004).
2 R.A. Hites, J.A. Foran, D.O. Carpenter, M.C. Hamilton, B.A. Knuth and S.J. Schwager. 2004. Global assessment of organic contaminants in farmed salmon. Science, 303(5665): 226-229.
3 Does farmed salmon cause cancer? Eurofish, 2004/1: 62-65.
4 FAO. 1997. Hazard Analysis and Critical Control Point (HACCP) System and Guidelines for its Application. Annex to CAC/RCP 1-1969. Rev. 3 (disponible à http://www.fao.org/DOCREP/005/Y1579E/y1579e03.htm#bm3; adresse disponible en septembre 2004).
5 Pour de plus amples informations, voir http://www.wto.org/english/docs_e/legal_e/legal_e.htm#agreements; adresse disponible en septembre 2004.

 

En 2002, une part importante de la production piscicole a été traitée par les circuits internationaux de commercialisation, avec environ 38 pour cent (équivalent poids vif) exportés en vue de l’alimentation humaine ou animale (figure 28). Les pays développés ont exporté plus de 22 millions de tonnes de poisson (équivalent poids vif) en 2002; même si pour une partie de ce commerce il s’agit de réexportations, ce montant correspond à environ 70 pour cent de leur production; les exportations des pays en développement (28 millions de tonnes) se montaient à environ un quart de leur production combinée. La part de ces derniers dans les exportations totales de poisson a été de 49 pour cent en valeur et de 55 pour cent en quantité, dont une part importante sous forme de farine de poisson. En 2002, les pays en développement ont représenté près de 66 pour cent, en quantité, des exportations mondiales de produits des pêches non destinés à l’alimentation. Parallèlement, les pays en développement ont nettement augmenté leur part en quantité des exportations de poisson destiné à la consommation humaine, passant de 43 pour cent en 1992 à 49 pour cent en 2002.

Dans de nombreux pays, les quantités de poissons et produits dérivés échangés tant à l’importation qu’à l’exportation sont considérables. Les excédents commerciaux sont importants en Afrique, en Amérique latine et les Caraibes, en Chine et en Océanie (figure 29). En 2002, 95 pays figuraient parmi les exportateurs nets de poisson et de produits dérivés; le Canada, le Chili, la Norvège, la Thailande et le Viet Nam déclaraient individuellement un montant net d’exportations supérieur à 1,5 milliard de dollars EU, tandis que le Danemark, l’Inde, l’Indonésie, l’Islande, le Pérou et Taiwan Province de Chine faisaient état d’exportations d’une valeur supérieure à 1 milliard de dollars EU. Bien qu’il existe un fort volume d’échanges portant sur le poisson et produits dérivés entre les économies plus développées – échanges qui intéressent principalement les espèces démersales, le hareng, le maquereau et le saumon –, les courants commerciaux tendent plutôt à aller des pays moins développés vers les pays plus développés, et portent principalement sur le thon, les petites espèces pélagiques, les crevettes et les crevettes bouquet, les langoustes et les céphalopodes. En 2002, près de 74 pour cent de la valeur des importations étaient concentrés dans trois régions principales: l’UE, les États-Unis et le Japon. En termes de quantité, les pays développés ont importé plus de 32 millions de tonnes (équivalent poids vif), dont 68 pour cent de poisson destiné à la consommation humaine, tandis que les pays en développement importaient 19 millions de tonnes (équivalent poids vif), dont 47 pour cent étaient destinés à l’alimentation.

Les cartes de la figure 30 illustrent les flux commerciaux de poisson et produits dérivés, par continent pour la période 2000-02; cependant, le tableau d’ensemble présenté par ces cartes est incomplet. En effet, bien que les pays qui ont déclaré leurs importations (quelque 158 pays) pour cette période entrent pour 98 pour cent dans le total estimatif mondial, certains groupes continentaux ne sont pas complètement pris en compte (à titre d’exemple, près d’un tiers des pays d’Afrique n’ont pas déclaré leur commerce de produits piscicoles en précisant la ventilation par pays d’origine/destination). Dans ce cas, les données communiquées ne doivent pas être considérées comme représentant le volume total des échanges à l’actif des groupes continentaux concernés.

Compte tenu du caractère hautement périssable du poisson, plus de 90 pour cent du commerce international du poisson et produits dérivés portent sur les produits transformés. Exprimée en quantité, la part de poisson vivant, frais ou réfrigéré a augmenté au cours de la dernière décennie, passant de 9 pour cent en 1992 à 10 pour cent en 2002. Cette croissance est le fruit d’une amélioration tant logistique que technologique, ainsi que d’une augmentation de la demande. Le poisson vivant est particulièrement apprécié en Asie et dans certains créneaux de marché d’autres pays, principalement au sein des communautés d’immigrants asiatiques. Dans ces pays, il est fréquent de voir des aquariums ou des réservoirs dans lesquels sont exposés des poissons vivants, dans les restaurants spécialisés mais aussi dans les supermarchés et dans les magasins de détail. Grâce aux progrès technologiques, le commerce de poissons vivants est en expansion ces dernières années, et il s’appuie sur un réseau perfectionné de manutention, de transport, de distribution, d’exposition et d’entreposage mis sur pied à cet effet. Ces innovations technologiques consistent en des réservoirs ou récipients spécialement conçus ou modifiés, et sont complétées par des camions et autres véhicules de transport équipés de systèmes d’aération ou d’oxygénation afin de maintenir le poisson en vie durant le transport, l’entreposage ou l’exposition.

Au cours de la dernière décennie, les exportations de poisson congelé ont augmenté, passant d’une proportion de 28 pour cent de la quantité totale de poisson exporté en 1992, à 35 pour cent en 2002. S’agissant du poisson traité et mis en conserve, les exportations ont totalisé 6,2 millions de tonnes (équivalent poids vif) en 2002, soit une part de 12 pour cent du total des exportations – contre 10 pour cent en 1992. Toujours en 2002, les exportations de poisson fumé ont constitué 5 pour cent du total; cependant, cette part a légèrement décliné au cours de la dernière décennie. En 2002, les exportations de produits non destinés à l’alimentation ont représenté 36 pour cent du total des exportations en termes de quantité, dont une part importante en provenance des pays d’Amérique latine.

En dépit d’un léger déclin des exportations, la crevette continue d’occuper la première place pour la valeur des volumes échangés, avec environ 18 pour cent de la valeur totale des produits piscicoles ayant donné lieu à commerce international en 2002. Les autres grands groupes d’espèces soumises à exportation ont été les poissons de fond (10 pour cent, avec notamment le merlu, le cabillaud, l’églefin et le lieu de l’Alaska, le thon (9 pour cent) et le saumon (8 pour cent). En 2002, la farine de poisson est entrée pour environ 4 pour cent dans la valeur des exportations, et l’huile de poisson dans moins de 1 pour cent. Les produits dérivés de la production aquacole ont occupé une part croissante du volume total du commerce international des produits de la pêche, avec, selon les estimations, 22 pour cent du volume des exportations. Il n’est pas possible, actuellement, d’évaluer avec exactitude le montant des échanges découlant de l’aquaculture, étant donné que la plupart des pays ne précisent pas si le poisson est issu de l’élevage dans leurs statistiques de commerce piscicole.

Pour de nombreuses économies, et en particulier pour les pays en développement, le commerce du poisson constitue une source importante de devises étrangères, outre le rôle important qu’il joue dans la création de revenus et d’emplois comme dans le renforcement de la sécurité alimentaire. Pour un petit nombre de pays, les exportations de produits de la pêche sont cruciales pour l’économie. Elles ont ainsi représenté, en 2002, plus de la moitié de la valeur totale des produits exportés par les États fédérés de Micronésie, le Groenland, les Îles Féroé, l’Islande, les Maldives et Saint-Pierre-et-Miquelon. Les recettes nettes de devises étrangères réalisées par les pays en développement – à savoir la valeur totale de leurs exportations moins la valeur totale de leurs importations – ont augmenté, passant de 11,6 milliards de dollars EU en 1992 à 17 milliards de dollars EU en 2002 (figure 31), malgré le déclin de 3 pour cent enregistré dans les recettes nettes depuis 2000. Ces chiffres sont supérieurs à ceux concernant des denrées agricoles telles que le riz, le café et le thé. Les PFRDV prennent une part active au commerce de poisson et de produits dérivés; en 2002, ils ont figuré pour plus de 20 pour cent dans la valeur totale des exportations de produits de la pêche, avec des recettes nettes d’exportation estimées à 8,2 milliards de dollars EU.

Les échanges commerciaux dans les pays en développement connaissent une évolution graduelle, qui les fait passer d’exportateurs de matières premières destinées à l’industrie de transformation des pays développés, à exportateurs de poissons vivants à valeur élevée ou de produits à valeur ajoutée. Certains pays importent aussi des matières premières afin d’en poursuivre la transformation et de les réexporter. Pour se prévaloir des coûts moins élevés, de nombreux pays développés ont investi dans des usines de transformation situées dans les pays en développement. Par ailleurs, dans un certain nombre de ces derniers, de nombreux projets viennent en aide aux entreprises de transformation du poisson afin d’en intensifier le stade d’élaboration, de manière à augmenter la rentabilité de ces entreprises et, partant, la contribution du secteur des pêche au produit national brut (PNB). Cependant, les résultats obtenus par ces projets ont souvent été décevants en grande partie à cause de: l’inefficacité des relations entre les importateurs et leurs clients; l’insuffisance des avantages présentés au plan de la qualité et du prix; l’inadéquation des produits aux besoins des consommateurs – toutes carences découlant d’une prospection inadéquate des marchés. L’expérience a démontré que la clé du succès, dans ce domaine, est la qualité de la relation avec les clients, associée à une bonne prospection des marchés, à la qualité irréprochable des produits, à la fiabilité des approvisionnements, à la recherche continuelle d’améliorations, à la compétitivité des prix et à la sélection d’un conditionnement attrayant.

Il faut citer, outre les questions liées à l’adjonction de valeur et à la transformation effectuée par des pays tiers dans les pays en développement, celles, de ces dernières années et de premier plan, touchant le commerce international des produits piscicoles: l’évolution des mesures de contrôle de la qualité et de la sécurité sanitaire dans les principaux pays importateurs; l’introduction de nouvelles normes d’étiquetage et de la notion de traçabilité dans les principaux marchés des pays développés; les résidus chimiques présents dans les produits de l’aquaculture; la préoccupation de l’opinion publique à propos de la surexploitation de certains cheptels piscicoles, en particulier les poissons de fond; le développement durable de l’aquaculture, notamment sous l’angle de ses besoins futurs en alimentation animale; la pêche illicite, non déclarée et non réglementée; les négociations dans le cadre de l’OMC sur le commerce international; l’expansion des zones de commerce régionales et le nombre croissant d’accords commerciaux bilatéraux. Avec l’admission de la Chine à l’OMC en 2001, tous les acteurs importants du commerce du poisson sont aujourd’hui membres de l’organisation, à l’exception de la fédération de Russie et du Viet Nam – qui ont toutefois amorcé des négociations en vue de leur accession. Parallèlement à l’augmentation du nombre des membres de l’OMC, un certain nombre d’accords commerciaux bilatéraux touchant très directement le commerce du poisson ont été signés. Il reste donc à déterminer quel véritable impact et quels effets à long terme auront de ces accords, qui viennent s’ajouter aux accords multilatéraux de plus grande portée, voire s’y substituer.

Le saumon

L’année 2003 a été positive dans le monde entier pour les producteurs comme pour les distributeurs de saumon. L’augmentation des prix a particulièrement bénéficié aux producteurs européens d’Irlande et du Royaume-Uni. Le Chili et la Norvège, tirant parti de coûts relativement moins élevés, réussissent à réaliser des bénéfices malgré des prix inférieurs. Leurs industries sont donc restées rentables au cours des années précédentes, durant lesquelles l’industrie européenne a généralement subi une véritable décimation. Quant au Chili, il a quelque peu pâti de l’affaiblissement du dollar sur le marché des États-Unis, principal débouché de ses produits frais.

Le thon

Le Japon est le principal marché mondial pour le thon de qualité sashimi. Cependant, comme pour la crevette, la demande a reculé ces dernières années, ou s’est reportée sur des espèces plus abordables. L’élevage du thon rouge a eu un profond impact sur le marché du sashimi au Japon, entraînant un déclin généralisé des prix. La réduction, de 24 pour cent à 12 pour cent, du barème tarifaire appliqué par l’UE aux importations de thon en conserve, pour une quantité de 25 000 tonnes de thon provenant de pays tels que l’Indonésie, les Philippines et la Thailande, n’a pas été bien accueillie par les principales conserveries de thon européennes. Par ailleurs, les conserveries espagnoles ont recours à l’externalisation et l’on trouve aujourd’hui, en Amérique centrale (El Salvador et Guatemala), de nouvelles usines de mise en conserve implantées par des sociétés espagnoles. La concentration de l’industrie mondiale du thon entre quelques mains se poursuit. La consommation de thon en conserve progresse dans les pays européens, qui constituent le principal débouché pour ce produit. En revanche, le marché des États-Unis du thon en boîte accuse un déclin, tandis que celui des conditionnements en plastique souple (contrairement à celui en plastique rigide) est en expansion. On trouvera, à la figure 32, les prix du thon listao en Afrique, aux États-Unis et en Thailande.

Autres poissons à nageoires

Sous l’effet conjugué d’approvisionnements relativement abondants de certaines espèces de poissons de fond – lieu de l’Alaska et colin d’Argentine – et de la reprise des exportations de la Chine vers les marchés de l’UE parallèlement à la stagnation de la demande, les cours du poisson de fond congelé se sont tassés au cours de l’année 2003. On trouvera à la figure 33 les prix des espèces de poissons de fond aux États-Unis. Avec la réduction relative de l’offre de lieu de l’Alaska, alors que la demande russe et chinoise est restée soutenue pendant le premier semestre de 2004, cette tendance négative s’est résorbée et les prix de certains produits à base de poissons de fond ont commencé à augmenter au cours du premier trimestre de l’année. La poursuite de la pénurie relative de lieu de l’Alaska au cours du deuxième semestre de 2004 devrait, selon les prévisions, alimenter l’augmentation générale des cours des poissons de fond sur les marchés internationaux, en dépit de la stagnation de la demande sur plusieurs marchés importants.

Les exportations de poisson de fond en provenance d’Asie ont souffert de la faiblesse persistante des cours, des problèmes non résolus relatifs aux antibiotiques ainsi que des allégations de dumping. L’industrie vietnamienne du basa (poisson-chat) en a particulièrement été affectée, puisque les exportations du Viet Nam en direction des États-Unis ont chuté de 50 pour cent par suite de l’application de taxes antidumping allant de 37 à 64 pour cent, appliquées depuis juin 2003. En conséquence, les livraisons de poisson-chat ont été massivement détournées vers les marchés de l’Asie du Sud-Est et d’Australie, créant un engorgement au détriment des autres poissons d’eau douce.

La crevette

Au cours de l’année 2003, les importations de crevettes sur plusieurs des principaux marchés ont atteint de nouveaux sommets. Les ventes destinées au premier marché mondial de la crevette, à savoir les États-Unis, ont dépassé pour la première fois 500 000 tonnes – 17 pour cent de plus que les importations de 2002. Toujours en 2003, les importations annuelles de crevettes au Japon ont reculé de 6 pour cent relativement à l’année précédente, poursuivant ainsi une longue tendance déclinante due à la persistance des difficultés économiques que connaît le pays. En Europe, les importations de crevettes ont augmenté en 2003 grâce à la vigueur de l’euro et à la compétitivité des cours internationaux. Le Brésil, la Chine, l’Équateur, l’Inde, la Thailande, et le Viet Nam font l’objet d’enquêtes pour allégations de dumping aux États-Unis, ce qui entravera quelque peu leurs ventes dans ce pays à brève échéance. Le cours des crevettes est resté faible pendant la majeure partie de 2003, et on n’observe pas de signe de redressement en 2004. On trouvera à la figure 34 les prix des crevettes aux États-Unis et au Japon.

Les céphalopodes

Sur le marché des céphalopodes, la baisse des prises de calmar Illex a été compensée par l’augmentation de la production de poulpe Loligo, tandis que les prises de poulpe restaient assez faibles. Le début de l’année 2004 a été marqué par une réduction des débarquements de calmar, notamment dans l’Atlantique Sud-Ouest. L’Espagne demeure le principal marché européen pour le calmar. Au cours de l’année 2003, les importations de produits congelés (Loligo et Illex) ont augmenté de 7 pour cent par rapport au niveau de 2002, pour atteindre près de 160 000 tonnes. Cette augmentation est due à un bond de 22 pour cent des importations de Loligo, qui a plus que compensé la chute de 6 pour cent des importations d’Illex congelé. En 2003, le marché italien du calmar a suivi le marché espagnol, avec une augmentation des importations de produits congelés et un report des achats d’Illex au profit du Loligo. Au total, l’Italie a importé 85 000 tonnes, soit 8 pour cent de plus qu’en 2002. Le Japon est demeuré le principal débouché mondial pour les céphalopodes; cependant, ses importations ont été affectées par la faiblesse des livraisons de poulpe en provenance du Maroc en 2003, année au cours de laquelle il n’a importé que 56 000 tonnes, contre 72 000 tonnes en 2002. Les ressources en poulpe de l’Atlantique Centre-Est sont en crise, et l’on ne prévoit pas d’amélioration de l’offre dans le court terme. Les cours de tous les céphalopodes ont augmenté au cours de l’année 2004. Les prix des céphalopodes au Japon sont présentés à la figure 35.

La farine de poisson

Chaque année, la majeure partie de la production de farine de poisson – près de 60 pour cent – est soumise à exportation. En 2003, dans les cinq principaux pays exportateurs elle a été de 4,5 millions de tonnes, soit un recul de 12 pour cent par rapport à 2002. Les prises de poisson de réduction ont été faibles dans tous les grands pays producteurs de farine de poisson. Cependant, au cours des premiers six mois de 2004, elle a augmenté de 40 pour cent, et il est probable que la production totale retrouvera son niveau normal. Quant aux cours de la farine de poisson, qui ont connu une augmentation marquée en 2003, ils devraient se tasser quelque peu; cependant, la demande vigoureuse émanant notamment de la Chine et d’autres pays d’Asie les maintiendra à un niveau attrayant pour les pays producteurs. Les prix pour l’Allemagne et les Pays-Bas sont présentés à la figure 36.

LE RÔLE GRANDISSANT DES ORGANES RÉGIONAUX DES PÊCHES DANS LA PRISE DE DÉCISION

La situation avant la CNUED

Au cours des 50 dernières années, le rôle des organes régionaux des pêches a nettement évolué. Cette tendance s’est accentuée depuis l’adoption d’instruments de portée internationale et d’importance déterminante destinés à régir les pêches, dans le sillage de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement (CNUED, 1992). Avant le début des années 80, un grand nombre de ces organismes exerçaient un mandat de consultation et de recherche, sans autorité décisionnelle exécutoire. Pour la plupart d’entre eux, le processus décisionnel avait pour but de faciliter leur rôle comme instances de concertation plutôt que de gestion. La Convention de 1982 des Nations Unies sur le droit de la mer20 a mis en évidence le rôle naissant des organes régionaux des pêches. Elle envisageait pour eux un élargissement considérable de leur mandat. Tout en conservant leurs fonctions essentielles de plates-formes de coopération internationale, de véhicules de recherche, d’analyse, d’archivage et d’échange de données, et tout en confirmant leur rôle consultatif en matière de gestion des pêches, les organes régionaux des pêches s’acquitteraient de nouvelles tâches telles que:

En réponse à ces changements, de nombreux organes régionaux des pêches ont réaménagé ou amendé les accords ou conventions les régissant. Cependant, la Convention des Nations Unies de 1982 peut être considérée en soi inadéquate en tant que mécanisme pour la promotion d’une gestion efficace des pêches, et cela pour trois principales raisons interdépendantes:

La situation après la CNUED

Au cours des années 90, l’absence d’accord international de large portée sur le pouvoir de gestion revenant aux organes régionaux des pêches a commencé à susciter une attention croissante, accentuée par la prise de conscience de plus en plus aiguë de la pénurie des ressources. La nécessité d’une gouvernance renforcée des pêches par le biais des organes régionaux est devenue de plus en plus impérieuse; on reconnut également que, pour être efficaces, ces instances devaient être munies d’un mandat précis, de manière à pouvoir gérer les ressources halieutiques du secteur régi par leur convention en pleine conformité du droit international. À ce propos, la communauté internationale a adopté, à la suite de la CNUED, un certain nombre d’instruments d’administration des pêches tels que: l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poisson de 1995, l’Accord de 1993 de la FAO concernant le respect des mesures et le Code de conduite de 1995 pour une pêche responsable de la FAO.

Le renforcement des attributions des organes régionaux des pêches en matière de conservation et de gestion, que laissaient présager les instruments adoptés après la tenue de la CNUED et les revendications de l’opinion publique en matière de responsabilité et de transparence, s’accompagnait de la nécessité d’adopter un processus et des pouvoirs décisionnels efficaces. En 1998, un Groupe de haut niveau d’experts des pêches de la FAO concluait dans son rapport que «... les trente dernières années ont été essentielles pour la collecte d’informations et l’enrichissement de l’expérience sur le fonctionnement des organes régionaux des pêches…», ajoutant que «… les dix prochaines années seront consacrées à la mise en œuvre et à l’exécution de décisions devant permettre une exploitation et une utilisation responsables des ressources halieutiques du monde»21. Quelques mois plus tard, en février 1999, les organes régionaux des pêches de la FAO et leurs homologues appartenant à d’autres organisations, réunis pour la première fois, soulignaient dans une déclaration que «... les organes régionaux des pêches doivent mesurer leur succès sur la base des résultats obtenus sous la forme de tendance ou de situation favorable pour les stocks et pour l’espèce humaine»22.

De manière générale, on a pu observer que les organes régionaux des pêches prennent des mesures novatrices et basées sur la coopération afin d’appliquer les instruments internationaux adoptés après la CNUED, dont un grand nombre visent à reconstituer les stocks épuisés, à empêcher la poursuite de leur déclin et à combattre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. De plus, les organes régionaux des pêches ne cessent de prendre de l’envergure, comme le démontre, entre autres, l’obligation de plus en plus marquée faite aux États de coopérer par leur truchement, le grand nombre de nouveaux organes régionaux des pêches créés au cours des dernières années, et les réformes institutionnelles et constitutionnelles que sont parvenus à réaliser nombre d’entre eux pour répondre aux besoins actuels et futurs. Ainsi, ces instances ont grandement contribué à la gouvernance des pêches, notamment dans les domaines suivants:

Il faut toutefois déplorer que, selon les évaluations effectuées, le renforcement de la gouvernance par les organes régionaux des pêches ne se traduise pas toujours par une gestion plus efficace. L’une des principales contraintes auxquelles ils doivent faire face est la réticence des pays membres à leur déléguer suffisamment de pouvoir décisionnel et de responsabilité, réticence qui se conjugue dans certains cas à une incapacité, voire à un refus implicite d’appliquer les décisions prises par les organes régionaux des pêches.

L’importance accrue de la prise de décision

L’Article 10 de l’Accord sur les stocks de poisson prévoit que les États «conviennent de procédures de prise de décisions qui facilitent l’adoption de mesures de conservation et de gestion en temps opportun et de manière efficace23». Dans ce contexte, les procédures décisionnelles ne sont pas limitées à une formule de vote, mais pourraient comporter la prise en considération de toute une gamme d’éléments, notamment: s’agissant des instances centrales, l’adoption de procédures claires et opportunes pour un certain nombre d’actions, l’entrée en vigueur en temps utile des recommandations/décisions et l’incorporation de procédures de réclamation conformes aux critères d’opportunité et d’efficacité; enfin, pour les instances subsidiaires, l’adoption de mécanismes permettant de présenter en temps utile des recommandations ou de formuler des avis.

Plusieurs organes régionaux des pêches ont adopté des mesures concrètes se rapportant à un large éventail d’objectifs, de fonctions et de processus relatifs à la prise de décision (la CITT, par exemple, voir encadré 5, Parmi les domaines spécifiques se trouvent:

Il importe toutefois de noter qu’en l’absence d’indicateurs de performance agréés pour les autoévaluations, lesquelles devraient en principe englober l’évaluation des pouvoirs et des processus décisionnels, il est difficile d’établir une corrélation entre le renforcement de la gouvernance observée sous l’angle de la prise de décision et la gestion efficace des pêches. Cette difficulté est accentuée par le fait que la prise de décision n’est que l’un des nombreux éléments interdépendants de la gouvernance exercée par les organes régionaux des pêches24. Les trois principaux éléments de la prise de décision sont: la volonté politique, les obligations juridiques et les mécanismes institutionnels.

Le fait que des exigences accrues en termes de processus décisionnel soient imposées aux organes régionaux des pêches à mesure que ceux-ci deviennent des instances ayant des fonctions de gestion des pêches est démontré par les critères édictés par les instruments internationaux adoptés après la tenue de la CNUED. Alors que, dans l’ensemble, les organes régionaux des pêches n’ont pas activement révisé ce domaine de gouvernance, la décennie en cours, qui constitue une période de consolidation qui a suivi l’adoption des instruments «post-CNUED», pourrait favoriser une élaboration plus poussée de leurs procédures décisionnelles.

POLITIQUE ET GOUVERNANCE EN AQUACULTURE

Développement durable

Les forces du marché influencent de manière marquée le développement de l’aquaculture, en particulier de l’aquaculture industrielle et commerciale. Dans de nombreux pays développés et en développement, les consommateurs des classes moyennes, de plus en plus influents, se préoccupent davantage de leur alimentation et de ses coûts de production, notamment dans le cas des produits soumis à commerce international. Les principales régions et les principaux pays importateurs ont commencé à appliquer des normes et des règlements sévères visant à garantir la qualité et la sécurité sanitaire, tout en réduisant l’impact social et environnemental de la production. Ces normes portent, entre autres, sur le commerce des espèces menacées d’extinction, l’étiquetage indiquant l’origine, la traçabilité, la chaîne de possession, ou encore la tolérance zéro pour certains résidus de drogues vétérinaires. En 2002, le poisson et produits dérivés représentaient la principale catégorie (plus de 25 pour cent) ayant donné lieu, dans l’UE, à des alertes concernant la sécurité sanitaire et la qualité de aliments. Au sein de cette catégorie, les produits de l’aquaculture ont été particulièrement visés sous l’angle des résidus de drogues vétérinaires, et ont fait l’objet d’interdictions d’importations en provenance de plusieurs pays. Parallèlement, afin d’améliorer l’image du secteur public et de gagner la confiance des consommateurs, différentes stratégies de marché ont été élaborées et adoptées, comme la certification des produits, l’écoétiquetage, le commerce éthique ou équitable, et la production biologique visant à améliorer l’image du secteur public et à gagner la confiance du consommateur.

Des progrès ont également été réalisés à l’égard des problèmes de durabilité grâce à une technologie améliorée, et cette évolution positive devrait se poursuivre. Par exemple, des pratiques de gestion améliorées ont permis de limiter considérablement la contamination des stocks sauvages par les agents pathogènes provenant des stocks d’élevage et de diminuer les quantités de drogues vétérinaires utilisées en aquaculture. Cependant, dans de nombreux pays en développement, il y a encore lieu de réglementer l’accès aux drogues vétérinaires. Certaines améliorations ont également été obtenues dans l’établissement de normes d’effluents, le perfectionnement de l’alimentation animale, ainsi que la réduction des nutriments produits dans les fermes d’élevage. Depuis les années 70, la recherche tente de réduire la dépendance de l’alimentation piscicole à l’égard de la farine de poisson, et les tests actuellement en cours témoignent de succès variables. On envisage également des solutions à long terme telles que l’ingénierie génétique afin de favoriser la propagation de plantes présentant des profils plus adéquats en matière d’acides aminés et d’acides gras.

Encadré 5

La Convention d’Antigua de 2003 et le renforcement de la Commission interaméricaine du thon tropical

Le 27 juin 2003, à l’occasion de sa 70e réunion tenue à Antigua (Guatemala) et au terme de cinq années de négociations, la Commission interaméricaine du thon tropical (CITT) a adopté la Convention dite «Convention d’Antigua» pour le renforcement de la Commission interaméricaine du thon tropical créée par la Convention de 1949 entre les États-Unis d’Amérique et la République du Costa Rica . Les négociations avaient été ouvertes cinq ans auparavant1, non seulement aux parties à la Convention2 de 1949, mais également à toutes les entités susceptibles d’adhérer à la Convention ou de devenir membres de la Commission aux termes de la convention existante ou d’une convention révisée3. Les organisations intergouvernementales et non gouvernementales intéressées étaient également invitées à participer et à contribuer, avec le statut d’observateur.

S’appuyant sur la technique du «texte de la présidence», le processus de négociations visait, dans un premier temps, à amender la Convention de 1949 afin de l’harmoniser avec les principes du droit international tels que reflétés dans la Convention des Nations Unies de 1982 sur le droit de la mer et les dispositions des autres instruments internationaux comme l’Action21 de 1992, l’Accord de la FAO de 1993 sur le respect des mesures, le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO (1995) et l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poisson (1995)4. Cependant, l’écart était tel entre ces instruments et la lettre de la Convention de 1949 qu’il ne fut pas possible de préserver grand-chose du texte original.

La continuité institutionnelle de la CITT est mise en relief tant dans le titre que dans le corps du texte de la Convention d’Antigua; toutefois, le nouvel instrument n’a pas seulement éliminé un certain nombre de lacunes et d’incertitudes, il a transformé la Commission en un véritable organisme de gestion. Le territoire couvert par la Convention d’Antigua dans le Pacifique oriental est aujourd’hui défini avec précision. Très vaste, il est circonscrit à l’est par un littoral se déroulant du Canada au Chili entre le 50e parallèle nord et le 50e parallèle sud, et à l’ouest par le 50e méridien ouest, englobant ainsi une partie de la Polynésie française et s’étendant jusqu’aux eaux de Kiribati et de Hawai. Au plan institutionnel, la Commission a été renforcée par la création d’un Comité pour l’examen de l’application des mesures adoptées par la Commission et d’un Comité scientifique consultatif. Les fonctions de la Commission ont été actualisées et élargies de manière à lui permettre de s’acquitter de ses tâches et d’adopter des mesures de conservation et de gestion, «en donnant la priorité au thon et aux espèces analogues». Ces tâches et ces mesures couvrent un grand éventail de régions et de questions: recherche scientifique, collecte des données, détermination des quantités de captures autorisées, capacité ou effort des activités de pêche, entités nouvellement admises, espèces appartenant aux mêmes écosystèmes, déchets et rejets, engins, allocations de contingents, application de l’approche de précaution, et mise en œuvre du Code de conduite pour une pêche responsable et ses plans d’action internationaux. Les décisions de la Commission, qui peuvent être adoptées par consensus, sont contraignantes. Lors de ses prises de décisions et de ses autres activités, la Commission doit s’efforcer de promouvoir la transparence. Des dispositions ont également été incorporées à propos du règlement des différends. Les droits et les obligations des membres de la Commission en matière de mise en œuvre, de respect des mesures et d’application exécutoire ont été précisés, de même que les obligations des membres à titre d’États du pavillon.

Le statut de «Partie» à la Convention d’Antigua, soit par le biais de la signature suivie de ratification soit par le biais de l’accession, est inspiré par le même esprit d’ouverture qui avait caractérisé le processus de négociations; ce statut doit être acquis par les parties à la Convention de 1949, par les États riverains de la région (États dont le littoral borde la zone couverte par la Convention) ainsi que par les États et les organisations régionales d’intégration économique dont les navires exploitent des stocks de poissons visés par la Convention. De plus, et c’est là une disposition particulièrement innovante, la Convention d’Antigua exploite pleinement le concept d’entité de pêche introduit dans l’Accord de 1995 des Nations Unies sur les stocks de poissons, de manière à permettre à Taiwan Province de Chine de participer pleinement aux travaux de la CITT. À cette fin, dans toutes les provisions de la Convention, on distingue deux catégories: d’un côté on a les «membres» de la Commission et, de l’autre, les Parties à la Convention d’Antigua. Les membres de la Commission sont définis comme comprenant les Parties et «toute entité de pêche» qui a exprimé son «engagement déterminé» de respecter les termes de la Convention5.

Cela implique que les États et les organismes économiques régionaux (comme l’UE), sont forcément à la fois Parties et membres, alors que l’entité de pêche ne peut être que membre. Les compétences spécifiques de chacune de ces deux catégories sont également énoncées de manière claire et précise (par exemple, tous les membres sont en droit de prendre des décisions conformément à l’Article IX, mais dans le cas des décisions concernant l’adoption des amendements à la Convention, cela rentre dans la compétence exclusive des Parties).

La Convention d’Antigua a été ouverte à la signature à Washington le 14 novembre 2003. À la fin de mai 2004, elle avait été signée par 11 États et l’entité de pêche avait également signé son instrument respectif. La Convention d’Antigua entrera en vigueur une fois que sept des Parties à la Convention de 1949 auront déposé leurs instruments de ratification, d’approbation, d’acceptation ou d’accession.

1 En juin 1998, la CITT a adopté une résolution créant un groupe de travail chargé de réviser la Convention de 1949. Le groupe de travail s’est réuni à 11 reprises entre octobre 1998 et juin 2003. Le texte intégral de la Convention est disponible à: http://www.iattc.org/PDFFiles2/Antigua%20Convention%20Jun%202003.pdf; adresse valable en septembre 2004.
2 Toutes les parties ont participé au processus de négociations, au cours duquel leur nombre a augmenté. En juin 2003, il était de 13: Costa Rica, El Salvador, Équateur, États-Unis, France, Guatemala, Japon, Mexique, Nicaragua, Panama, Pérou, Vanuatu et Venezuela.
3 Canada, Chine, Colombie, République de Corée ainsi que l’entité de pêche désignée qui aura la possibilité de devenir un membre de la Commission (mais pas une Partie à la Covention d’Antigua) sous le nom de «Taipei chinois».
4 Op. cit., voir notes 20-23, p. 61-64; pour Action 21, voir http://www.un.org/esa/sustdev/documents/agenda21/index.htm; adresse valable en septembre 2004.
5 Les Parties sont elles-mêmes «soumises» à la Convention; elles ne s’engagent pas à s’en tenir uniquement à ses conditions.

 

On voit par ailleurs l’aquaculture se développer dans des zones maritimes extracôtières de plusieurs régions du monde. Certains pays se sont montrés très actifs dans l’élaboration de politiques applicables à l’aquaculture extracôtière et à l’exploitation des océans, y compris pour atténuer les conséquences des rejets d’effluents et de déchets solides pour les sites périphériques, de même que celles des échappées, avant même de se lancer dans un développement sur grande échelle de telles activités. Des projets pilotes ont été amorcés afin de recueillir des informations permettant d’encadrer les politiques et le développement. Dans les pays en développement en particulier, l’avenir de l’aquaculture dépend d’une exploitation responsable des entreprises au plan social et environnemental, et de leur contribution tangible au développement rural et à la réduction de la pauvreté dans les régions littorales. De nombreux systèmes de production industrielle sur grande échelle évoluent vers une meilleure durabilité, tandis que les micropratiques et les systèmes intégrés s’adaptent de façon constante à l’évolution des perceptions et de la demande.

L’évolution vers des pratiques et des stratégies de développement durable reste à l’ordre du jour pour l’ensemble des intéressés. Elle nécessite le soutien concerté du secteur public, à qui il incombe d’offrir un contexte propice afin d’attirer les investissements orientés vers un développement responsable et d’encourager l’innovation. La lenteur des progrès accomplis dans l’établissement d’un contexte porteur pour une pratique aquacole responsable dans de nombreux pays en développement s’explique peut-être par l’insuffisance des ressources allouées, mais aussi par l’importance très secondaire accordée à l’aquaculture relativement à d’autres secteurs dans les plans nationaux de développement. À cela viennent s’ajouter les conflits entre le développement d’une aquaculture durable et les efforts visant à améliorer la sécurité alimentaire et à réduire la pauvreté, parallèlement aux coûts élevés de l’observation des normes pour les petites entreprises.

Politiques et gouvernance

Le secteur de l’aquaculture, qui poursuit son expansion, sa diversification, son intensification et ses progrès technologiques, continue de jouir d’un taux de croissance supérieur à tous les autres secteurs de production animale. La profonde évolution des perceptions et des objectifs est probablement l’un des principaux moteurs de cette croissance. L’aquaculture est aujourd’hui perçue non seulement comme une activité visant à répondre aux besoins alimentaires des producteurs, mais également comme un facteur de croissance économique et de progrès vers des objectifs divers en matière de société et d’environnement. À mesure qu’avance la réflexion et que le développement de l’aquaculture a cédé la place à l’aquaculture pour le développement, le cadre législatif et politique a évolué en conséquence.

Dans le passé les politiques de développement étaient principalement axées sur la production; par contre, les récentes mesures de gouvernance et d’encadrement politique de l’aquaculture adoptées au niveau mondial tendent à cibler davantage les notions d’offre et de demande, avec comme résultat escompté un développement durable aux plans économique, social, environnemental, juridique et institutionnel. Côté offre, il est aujourd’hui admis que le développement d’une aquaculture durable doit être adéquatement réglementé et protégé par la mise en place de cadres juridiques et administratifs intégrés et efficaces, et que la priorité doit aller à l’adoption de politiques et d’une législation accordant notamment aux investisseurs des droits sur les terres où sont installées les exploitations aquacoles ainsi que la garantie d’une eau de bonne qualité.

Les nouvelles réglementations en matière d’aquaculture ont en commun de soumettre la création d’entreprises aquacoles à l’obtention préalable de permis ou de licences. Les éleveurs obtiennent ainsi le droit de mettre sur pied et d’exploiter leur entreprise, tout en permettant aux autorités gouvernementales de surveller la qualité du développement de l’aquaculture sous l’angle de l’environnement et de la durabilité, et d’imposer des conditions contraignant les exploitations à opérer en fonction de tels critères. De nombreux pays, notamment les pays développés, s’efforcent de simplifier les procédures d’obtention de ces permis, notamment lorsqu’elles font entrer en jeu plusieurs organismes. Alors que l’octroi préalable d’un permis constitue souvent la règle dans les pays développés, cette pratique est encore récente dans les pays en développement, correspondant sans doute à l’avènement de l’élevage industriel.

Le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO, bien que d’application volontaire, a une influence déterminante sur la gouvernance et sur les politiques d’encadrement de l’aquaculture. Plusieurs instruments internationaux d’application obligatoire ont également une incidence sur l’aquaculture à l’échelon national, notamment pour ce qui est des produits de l’aquaculture soumis à échanges commerciaux et aux mouvements d’organismes vivants et de matériel génétique. À titre d’exemple, la Convention internationale sur la diversité biologique (CIDB) pourrait restreindre les échanges de matériel génétique ainsi que les mouvements d’organismes génétiquement modifiés25. Par ailleurs, une partie du programme de travail de la CIDB vise à évaluer les conséquences de la mariculture pour la diversité marine côtière et s’efforce de promouvoir des techniques qui en atténuent les effets négatifs. L’OMC a conclu un certain nombre d’accords contraignants qui ont notamment pour objet de fixer des normes minimales de qualité et de sécurité sanitaire pour les organismes aquatiques soumis à échanges commerciaux, et d’établir une liste des maladies à déclaration obligatoire (Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires)26. Dans le cadre de l’Accord de l’OMC sur les aspects des droits intellectuels qui touchent au commerce, certaines dispositions visant l’aquaculture fixent des critères pour l’autorisation de transferts de technologies respectueuses de l’environnement et pour le brevetage d’organismes vivants. Enfin, la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) exige la présentation préalable de certificats d’origine émis par les autorités nationales compétentes pour les transactions sur les espèces cultivées figurant sur la liste des espèces menacées d’extinction27.

Au niveau national, des politiques concernant l’aquaculture sont mises en place pour stimuler le développement. De nombreux gouvernements sont intervenus au niveau macro en désignant l’aquaculture comme un domaine prioritaire d’activité économique auquel ils ont attribué des objectifs assortis de stratégies d’encadrement et de réalisation. Ces mêmes gouvernements ont également facilité l’accès raisonnable au crédit, en offrant des incitations fiscales et en éliminant certaines barrières institutionnelles (notamment par la création de cadres administratifs efficaces pour l’aquaculture) (voir encadré 6). À noter toutefois que l’aquaculture relève fréquemment de plusieurs administrations, ce qui entrave parfois les opérations. Au niveau micro ou de l’exploitation, les gouvernements sont intervenus au moyen de politiques de démarrage telles que le financement de la recherche, la fourniture de matériel de reproduction, l’offre services de vulgarisation et de consultation et, dans certains cas, l’octroi de prêts. On invoque fréquemment, pour justifier l’intervention gouvernementale au niveau de l’exploitation, le manque de fonds propres des entrepreneurs potentiels ou leur incapacité à obtenir un financement privé de démarrage, de même que l’absence d’avantages absolus ou concurrentiels. Une fois que l’aquaculture a décollé, les exploitants ont souvent eu du mal à étendre leur entreprise, ce qui oblige les gouvernements à intervenir par le biais de politiques d’expansion et de promotion des exportations, lesquelles visent souvent à remédier à la non-disponibilité et/ou au coût élevé d’intrants essentiels tels que les aliments pour animaux, les semences et les capitaux.

Afin d’encourager l’aquaculture, les gouvernements ont également mis en œuvre des politiques de promotion du marché, de mise au point de nouveaux produits à valeur ajoutée et de réglementation de la sécurité sanitaire de la production aquacole. Outre les règlements régissant les drogues et l’alimentation animale utilisées en aquaculture, des dispositions particulières ont été édictées concernant la transformation et l’emballage des produits d’aquaculture, afin de prévenir les dangers pour la santé et de protéger les consommateurs.

Encadré 6

Le microfinancement des pêches et de l’aquaculture

Le microfinancement se définit comme la fourniture d’un large éventail de services comprenant les prêts, l’épargne et l’assurance à des segments de la population qui n’ont pas forcément accès aux services financiers traditionnels. La majorité des programmes de microfinancement visent à promouvoir et à protéger les revenus tout en mettant des moyens à la disposition de segments spécifiques de la population. De façon plus précise, l’objectif de développement du microfinancement orienté vers les communautés pauvres de pêcheurs consiste à permettre aux ménages de pêcheurs d’améliorer leurs revenus, de régulariser la consommation, de développer des microentreprises, de mieux gérer les risques et de renforcer les capacités de gain, réduisant ainsi leur vulnérabilité économique et sociale. Du fait que les femmes sont fortement représentées dans les ménages de pêcheurs pauvres, le microfinancement peut aussi être un outil efficace pour venir en aide aux femmes des communautés de pêcheurs et améliorer leur autonomie.

La demande de services financiers dans le secteur des pêches prend des formes diverses et nécessite, de ce fait, une offre différenciée de produits et de services. Le microfinancement n’est que l’un des maillons de la chaîne des services financiers visant à répondre à tous les aspects de cette demande. Le microfinancement, qui se caractérise par des prêts d’envergure modeste, présente des limites intrinsèques lorsqu’il s’agit de financer les immobilisations en capital requises par l’industrie de la pêche. C’est pourquoi le microfinancement ne doit pas remplacer les produits traditionnels proposés par les institutions financières classiques, produits qui demeurent nécessaires pour alimenter les investissements de portée moyenne ou sur grande échelle et répondre aux priorités des pêches en matière de croissance et de développement.

Les programmes de microfinancement peuvent aussi constituer un moyen puissant d’atténuation de la pauvreté. S’agissant des communautés de pêcheurs et d’aquaculteurs, la réduction de la pauvreté constitue un préalable important à leur participation aux efforts visant à restaurer et à conserver le milieu aquatique et les ressources des pêches.

Au plan pratique, les opérations de microfinancement se déroulent pour l’essentiel sur trois niveaux :

1. la clientère d’emprunteurs qui souhaitent investir dans leur microentreprise;

2. le système d’allocation et de recouvrement des prêts;

3. l’institution ou l’organisation qui gère le système d’allocation.

Le bon fonctionnement de ces trois niveaux opérationnels suppose le respect de deux principes: celui de la discipline de la clientèle, en vertu duquel les emprunteurs assument la responsabilité de leurs décisions et des accords passés avec l’institut bailleur de fonds; et la discipline institutionnelle, en vertu de laquelle l’établissement de prêt propose et fournit des produits et des services de bonne qualité, efficaces et bien suivis.

L’application réussie de programmes de microfinancement a démontré un principe cardinal, à savoir que les catégories pauvres sont capables de rembourser des prêts, d’en supporter le coût réel et de réaliser des économies.

Source: FAO. 2003. Microfinance in fisheries and aquaculture: guidelines and case studies, par U. Tietze et L.V. Villareal. Document technique sur les pêches no 440.

7 Les indicateurs des tendances de la flotte des grands navires de pêche dans les eaux marines (de plus de 100 tonneaux) sont fondés sur les données du Service d’information maritime de la Lloyd’s (Lloyd’s Maritime Information System – LMIS). Il est à noter que le LMIS ne prend en compte qu’une petite proportion (443 navires) de la flotte chinoise qui compte environ 15 000 navires dont la longueur totale est supérieure à 24 m et que la Chine a notifiés à l’Organisation maritime internationale (OMI) conformément à l’Accord de Torremolinos. Il convient également de relever que les modifications intervenues dans la méthode de calcul de la capacité des navires (passage du système TjB au système tb) exigent de la prudence lors de l’interprétation des tendances de la jauge de la flotte.
8 Entre autres, les organisations suivantes: Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), Organisme des pêches du Forum (FFA), Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA), Commission des thons de l’océan Indien (CTOI), Commission interaméricaine du thon tropical (CITT), Northwest Atlantic Fisheries Organization (NAFO) et Commission des pêches de l’Atlantique Nord-Est (CPANE).
9
Commission sous-régionale des pêches (Afrique de l’Ouest), Commission des pêches du Pacifique Centre-Ouest, Commission pour la conservation du thon rouge du Sud.
10
Bénin, Canada, États-Unis, Japon, Namibie et Norvège et 13 pays de l’UE (Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni et Suède).
11
l’Accord de 1993 de la FAO visant à favoriser le respect par les navires hauturiers des mesures internationales de conservation et de gestion a été adopté lors de la Conférence de la FAO en novembre 1993 et est entré en vigueur en 2003. Pour de plus amples informations, voir http://www.fao.org/Legal/treaties/012t-3.htm; adresse valable en septembre 2004.
12
Gestion de la capacité de pêche au thon: conservation et aspects socioéconomiques. Projet FAO GCP/INT/851/JPN.
13 L’Accord pour l’application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons chevauchants ou grands migrateurs a été adopté et ouvert à la signature en 1995. Pour se plus amples informations, voir http://www.un.org/Depts/los/convention_agreements/convention_overview_fish_stocks.htm; adresse valable en septembre 2004.
14
Adopté par la vingt-huitième Session de la Conférence de la FAO en octobre 1995. Pour se plus amples informations, voir http://www.fao.org/DOCREP/005/v9878e/v9878e00.htm; adresse valable en septembre 2004.
15
Second International Symposium on the Management of Large Rivers for Fisheries: Sustaining Livelihoods and Biodiversity for the New Millennium, Phnom Penh, Cambodge, 11-14 frévrier 2003. Pour de plus amples informations, voir http://www.lars2.org; adresse valable en septembre 2004.
17 M.N. Bruton. 1995. Have fishes had their chips? The dilemma of threatened fishes. Environmental Biology of Fishes, 43: 1-27.
18
M. Halwart. 2003. Traditional use of aquatic biodiversity in rice-based ecosystems. FAO Aquaculture Newsletter, 29: 9-15.
16
C. Barlow, Fisheries Unit, Mekong River Commission, communication personnelle, avril 2004.
19 Le terme «poisson» couvre les poissons, les crustacés et les mollusques, à l’exclusion des mammifères et des plantes aquatiques.
20 La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a été adoptée et ouverte à la signature le 10 décembre 1982. Pour de plus amples informations, voir http://www.un.org/Depts/los/convention_agreements/convention_overview_convention.htm.
21 FAO. 1998. Rapport du Groupe de haut niveau d’experts extérieurs des pêches Rome, 26-27 janvier (disponible à:
http://www.fao.org/docrep/meeting/w9887f.htm.; adresse valable en septembre 2004).
22
FAO. 1999. Report of the Meeting of FAO and Non-FAO Regional Fishery Bodies or Arrangements. Rome, 11-12 February.
FAO, Rapport sur les Pêches no 597. Rome.
23 Op. cit., note 13, p. 37.
24
Parmi ces autres éléments, on peut citer les mécanismes institutionnels, les mandats et fonctions, la composition des organismes, la communication de données par les membres, les aspects budgétaires et financiers, la capacité, les mécanismes exécutoires, les mesures à effet contraire prises par les non-membres, la gestion en coopération, la participation des partenaires/ayants droit, la collaboration avec les autres organes régionaux des pêches, la volonté politique d’appliquer les décisions, l’acceptation des instruments internationaux et les mécanismes de règlement des différends.
25 Pour de plus amples informations voir http://www.biodiv.org/convention/articles.asp; adresse valable en Septembre 2004.
26 Les résumés ainsi que les textes juridiques des Accords de l’OMC sont disponibles à: http://www.wto.org/english/docs_e/legal_e/legal_e.htm#agreements; adresse valable en septembre 2004.
27 Pour de plus amples informations, voir http://www.cites.org; adresse valable en septembre 2004.

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