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3. Les réformes fiscales dans le secteur des pêches au Kenya

par

Nancy K. Gitonga[11] et Robin Achoki[12]

1. Introduction

Le sous-secteur de la pêche du Kenya peut contribuer notablement à l'économie nationale par la création d'emplois, les recettes en devises, la réduction de la pauvreté et le soutien à la sécurité alimentaire. La production halieutique annuelle du Kenya s'élève à environ 200 000 tonnes, et permet aux pêcheurs de gagner plus de 7 milliards de Sh K (à peu près 90 millions de dollars EU). Le caractère communautaire des ressources halieutiques naturelles les rend vulnérables à la mauvaise gestion car elles sont libres et, dès lors, sans surveillance.

Le Département des pêches est chargé de faciliter le développement et la gestion du sous-secteur de la pêche. Le potentiel de ce sous-secteur n'a pas été pleinement réalisé en raison de la faible priorité que lui ont accordée les décideurs, du fait peut-être de la méconnaissance de son potentiel. Les systèmes actuels de prises de décisions du sommet à la base, qui n'engagent pas les parties prenantes, l'absence d'un plan de développement cohérent, et la faible priorité donnée au secteur en termes de budget ont nuit à sa croissance. Le déplacement fréquent du département entre les différents ministères montre bien la priorité limitée dont il jouit.

L'Institut kenyan des pêches et de la recherche maritime est chargé, par un acte du Parlement, de la recherche sur les ressources aquatiques, y compris la pêche. Le faible niveau des financements affectés à la recherche et le système quelque peu confus de collaboration pour le partage des résultats entre l'institut et les acteurs clés du secteur ont également freiné la croissance de la pêche. Les principales contraintes contribuant au faible développement du secteur, notamment de la pêche maritime et de la pisciculture, paraissent d'ordre institutionnel. Ces contraintes comprennent le manque d'informations en provenance des institutions de recherche sur la répartition, l'abondance et la durabilité des rendements des fonds de pêche, et l'absence de données adéquates sur des facteurs qui pourraient accélérer la croissance de la pisciculture. L'absence d'une politique détaillée et d'un plan-cadre pour la pêche exacerbe ultérieurement le problème.

1.1 Perspectives pour le sous-secteur

Améliorer la production halieutique en vue d'atteindre un rendement durable, afin d'améliorer les revenus des pêcheurs et des pisciculteurs, de contribuer à l'atténuation de la pauvreté, la diminution du chômage et le renforcement de la sécurité alimentaire aux niveaux tant du ménage que national.

1.2 Mandat

Le Département des pêches a pour mandat le développement et la gestion de la pêche. Le mandat juridique est énoncé dans la Loi sur la pêche (Cap 378) du Kenya.

1.3 Énoncé de mission

Faciliter la gestion et le développement durables des ressources halieutiques, afin d'assurer des disponibilités et une consommation croissantes de poisson et produits de la pêche et procurer des avantages socioéconomiques dans un milieu écologiquement viable.

1.4 Objectif stratégique

Faciliter l'utilisation et la conservation des ressources halieutiques naturelles et promouvoir le développement de la pisciculture et de la pêche récréative.

1.5 Objectifs/buts de la politique

1.5.1 Accroître au maximum la production de poisson sur une base durable afin d'améliorer les avantages socioéconomiques pour les pêcheurs et les pisciculteurs, et contribuer à la sécurité alimentaire.

1.5.2 Réduire les pertes après capture en diffusant des technologies appropriées à l'intention des pêcheurs, transformateurs, commerçants et pisciculteurs.

1.5.3 Assurer la salubrité du poisson et des produits de la pêche par l'amélioration et la stabilisation de ces produits.

1.5.4 Accroître la consommation par habitant.

1.5.5 Stimuler la commercialisation du poisson pour étendre et maintenir sa part du marché local et international.

1.6 Fonctions du Département

2. Importance de la pêche au Kenya

La pêche est un mode de vie pour les communautés de pêcheurs. Une importance sociale considérable est attribuée aux activités de pêche, comme la fabrication ou la réparation de filets, la construction de bateaux, les concours de pêche, etc. Les produits de la pêche assurent un régime alimentaire riche en protéines et permettent, dès lors, d'améliorer la nutrition et la santé des communautés vivant dans les zones de pêche.

La pêche contribue à l'économie du pays par la création d'emplois, la génération de revenus et les recettes en devises (Figure 1). Le secteur de la pêche promeut aussi d'autres industries apparentées comme la fabrication de filets et de matériel d'emballage, la construction de bateaux, etc. Plus de 500 000 personnes sont directement employées par le secteur, alors que plus d'un million en tire des avantages. La pêche en eau douce, notamment dans le lac Victoria, fournit un moyen d'existence à 35 000 pêcheurs environ et la pêche maritime assure la survie de plus de 8 000 autres. La majorité d'entre eux sont des artisans pêcheurs qui utilisent des bateaux de pêche non mécanisés. Le pays gagne environ 4 milliards de Sh K (près de 50 millions de dollars EU) en devises et les pêcheurs plus de 7 milliards, ce qui contribue à l'atténuation de la pauvreté dans le Kenya rural.

Figure 1: Production et valeur totales du poisson au Kenya en 1996-2002

Les ressources halieutiques sont une source de loisirs. La pêche sportive et la pêche à la ligne encouragent le tourisme au Kenya. La pêche sportive au gros contribue notablement au tourisme côtier, mais son importance dans le secteur de la pêche est limitée par le système inadéquat de permis et de suivi qui prévaut et devrait être révisé pour refléter correctement sa contribution à la pêche. Le processus de révision de la pêche sportive, qui devrait commencer par une consultation avec les parties prenantes, devrait établir un système permettant la gestion durable des stocks de poisson les plus recherchés pour le sport, et assurer qu'une rente proportionnelle soit tirée de ce type de pêche. Il faudrait développer la pêche sportive à la ligne dans les rivières et les lacs renfermant des truites jusqu'aux niveaux voulus. On devrait rétablir et intensifier le programme d'empoissonnement des rivières à truites par la modernisation des écloseries existantes et la création de nouvelles.

3. Pêche en eau douce

Il s'agit des ressources halieutiques présentes dans les lacs, les barrages et les rivières. Le lac Victoria est la principale source de production de poisson d'eau douce du pays, contribuant pour plus de 90 pour cent à l'ensemble des débarquements de poisson au Kenya (Figure. 2). Les principales espèces commerciales d'eau douce comprennent la perche du Nil (trouvée principalement dans le lac Victoria et en petite quantité dans le lac Turkana), le tilapia et les sardines d'eau douce connues localement sous le nom d'omena. Cependant, la perche du Nil contribue pour plus de 50 pour cent aux débarquements de poisson du lac Victoria (Figure 3). Trois états partenaires d'Afrique de l'Est, à savoir le Kenya, l'Ouganda et la Tanzanie, se partagent le lac Victoria, le Kenya détenant la part la plus faible (6 pour cent) et la Tanzanie la principale (49 pour cent). La part du Kenya est très productive en raison du grand nombre de cours d'eau qui se jettent dans le lac.

Figure 2: Contribution du lac Victoria à la production halieutique nationale

Figure 3: Contribution de la perche du Nil à la production halieutique nationale

4. Pêche maritime

Cette pêche intéresse 12 milles nautiques d'eaux territoriales et les 200 milles nautiques de la ZEE. Les ressources marines sont abondantes et il existe un large éventail de ressources côtières et hauturières ayant un bon potentiel de développement (Habib, 2003).

La zone maritime kenyane est bordée par une côte mesurant quelque 420 km de long en ligne droite et s'étendant sur environ 880 km si l'on tient compte des contours des côtes. Le pays s'étend au sud de l'équateur entre 0° 40' et 4° 40' de latitude S. Une grande partie de la côte est occupée par des mangroves et des marécages. La superficie totale de la ZEE du Kenya est d'environ 230 000 km2.

Les eaux de l'océan Indien du sud-ouest, notamment les eaux côtières d'Afrique de l'Est, sont soumises à deux milieux océaniques distincts. La saison des moussons du sud-est, de mai à septembre, se caractérise par des vents violents, des mers agitées et une faible productivité, alors que les moussons du nord-est, d'octobre à avril, se distinguent par un temps chaud et calme, des vents modérés et une meilleure productivité.

Les pêcheries côtières connues du Kenya comprennent les riches zones entourant l'archipel Lamu, la baie d'Ungwana, la North Kenya Bank et la rive de Malindi. Le gros de la pêche maritime est réalisé dans les petits fonds côtiers par des artisans pêcheurs qui utilisent de simples bateaux et engins comprenant des filets maillants, des filets à requins, la ligne et l'hameçon ainsi que les nasses. Ces pêcheurs opèrent quelque 4 800 bateaux en grande partie non motorisés pour produire de 6 à 7 000 tonnes de poisson par an, d'une valeur de plus de 500 millions de Sh K. Les prises annuelles ont oscillé entre 4 000 et 10 000 tonnes sur une période de plus de 20 ans. La pêche à la crevette, dont ont tire environ 400 tonnes par an, est réalisée par des chalutiers commerciaux à partir de deux pêcheries d'eau saumâtre, ce qui cause souvent des conflits entre eux et les artisans pêcheurs, lorsque les filets de ces derniers sont détruits.

Dans les années 70, deux enquêtes ont été menées pour estimer le potentiel de pêche maritime. D'après les résultats des enquêtes, le rendement potentiel en poisson démersal hors du récif serait de 5 à 7 000 tonnes. Cependant, les enquêtes avaient apparemment des limitations et n'étaient pas conçues pour identifier la répartition et l'abondance des ressources aquatiques tropicales; en outre elles faisaient partie de grandes enquêtes régionales qui ne tenaient pas compte de façon détaillée des ressources halieutiques marines du Kenya.

La zone de pêche en haute mer est exploitée par des bateaux venant de pays pratiquant la pêche hauturière sans aucun élément local dans l'effort et la prise. Les principales espèces recherchées sont les thons grands migrateurs, y compris la bonite à ventre rayé, l'albacore et le thon obèse. Certains de ces poissons sont débarqués au Kenya et transbordés à des fins d'exportation. D'autres sont débarqués directement dans les pays pratiquant la pêche hauturière. Une fabrique de thon à Mombasa transforme partiellement les prises venant de navires étrangers et le produit est exporté sous forme de filets. Environ 38 bateaux de pêche étrangers ont obtenu des licences d'exploitation dans la ZEE du Kenya. Les droits pour l'octroi des licences rapportent au gouvernement 30 millions de Sh K en moyenne par an (environ 400 000 dollars EU). Les frais s'élèvent à 20 000 dollars EU par bateau pour tous les navires de pêche étrangers, mais seuls les bateaux senneurs les paient. Les palangriers pourraient trouver ces droits exorbitants car ils estiment que le poisson n'est seulement exploitable dans les eaux kenyanes qu'environ trois mois par an. Il faudra redresser cette situation par la révision des droits. Rares ont été les enquêtes menées jusqu'à présent relativement aux ressources halieutiques au large de la zone kenyane pour établir la composition, la répartition, le comportement et la migration des espèces. La zone kenyane fait partie de la côte d'Afrique de l'Est où le manque d'informations sur les ressources halieutiques et la limitation des moyens financiers, matériels et humains nécessaires pour entreprendre une recherche plus approfondie constituent une contrainte grave pour le développement du secteur. Malgré l'absence de données, la pêche hauturière a connu un développement marqué dans la région depuis le début des années 90.

5. Le sud-ouest de l'océan Indien

L'océan qui borde la côte orientale de l'Afrique est l'une des dernières zones du monde où la pêche est, dans une large mesure, non réglementée. Bien que les pays de la région, qui comprennent le Kenya, la Tanzanie, le Mozambique, les Comores, Madagascar et l'Afrique du Sud, aient déclaré des zones économiques exclusives (ZEE) de 200 milles, la plupart d'entre eux (à l'exception de l'Afrique du Sud) n'ont pas les capacités institutionnelles et financières nécessaires pour exercer leur juridiction. Alors que les pêcheries dans les étroites bandes côtières sont exploitées par les Etats côtiers, les pêcheries hauturières, beaucoup plus lucratives et étendues, le sont principalement par les flottilles de pêche hauturière venant d'Europe et d'Asie de l'Est et, dans la plupart des cas, les prises sont débarquées et transformées hors de la région. Le manque d'organisation des accords d'accès encouragent les pêcheurs hauturiers à négliger de signaler leurs prises aux autorités nationales de la région. Il en résulte que seules de rares informations parviennent sur la composition et la quantité des espèces prises au cours de la pêche commerciale, pour ne pas mentionner les sources et le moment des captures (Habib, 2003).

La pêche au thon a procuré un bon revenu au pays au cours des cinq ou six dernières années sous forme de recettes tirées de l'octroi de licences aux thoniers, en particulier les bateaux senneurs venant d'Europe. Si le Kenya veut conserver cette forme particulière de revenu, voire en améliorer la valeur, il devra en savoir davantage qu'il n'en sait actuellement sur la pêche au thon en haute mer. Pour ce faire, il pourrait adhérer à la Commission du thon de l'océan Indien, un organisme de gestion des pêches spécialisé dans la collecte d'informations sur la pêche au thon dans la région. Une autre solution serait de proposer que le Projet de l'océan Indien du sud-ouest inclue le thon dans les groupes de poisson à rechercher. Enfin, le Kenya doit s'efforcer de promouvoir la participation de ses propres bateaux à la pêche au thon, et l'utilisation de petits bateaux plus économiques pour la pêche aux grands thons.

6. Accords d'accès à la pêche

Le Kenya n'a signé aucun accord d'accès avec les pays pratiquant la pêche hauturière mais il serait disposé à négocier avec eux des droits d'accès à la pêche, conformément aux dispositions de l'UNCLOS. Cependant, avant d'entamer de telles négociations, une meilleure connaissance des stocks existants serait opportune. Pour ce faire, le gouvernement a sollicité l'assistance technique du Secrétariat du Commonwealth et un consultant a été chargé d'effectuer une enquête sur dossier sur les stocks et de formuler des recommandations ainsi que d'estimer les coûts d'un projet d'évaluation de ces stocks. Avant de négocier, le Département demandera donc des avis sur la forme et la teneur d'un accord d'accès potentiel qui contraindrait les pays pratiquant la pêche hauturière à établir des liens officiels avec le Kenya concernant les matières suivantes:

7. Commercialisation du poisson

Le gouvernement s'efforce d'observer les normes internationales de qualité et salubrité du poisson mais il devra créer des compétences en matière d'accords commerciaux afin de maintenir et d'accroître la part du marché international pour les produits de la pêche. La commercialisation de ces produits souffre de l'application injuste d'obstacles commerciaux non tarifaires, comme les mesures sanitaires et phytosanitaires imposées par les pays importateurs. Il est donc important que le pays participe activement aux protocoles d'accord de l'OMC et crée des capacités en matière commerciale, afin de décourager l'application injuste de barrières commerciales aux produits de la pêche du Kenya.

Le Kenya a pu pénétrer sur le marché international des produits de la pêche et jouer un rôle compétitif dans une économie libéralisée, grâce aux progrès accomplis dans l'application des normes de qualité et salubrité du poisson. Les exportations, qui se composent principalement de produits de la perche du Nil, rapportent au pays quelque 4 milliards de Sh K en devises. Toutefois un énorme potentiel existe dans la zone économique exclusive du Kenya dont les ressources sont actuellement exploitées par les pays pratiquant la pêche hauturière, sans que le pays dégage des revenus proportionnels de la ressource. Il faudrait donc mettre en place un système efficace de contrôle et surveillance pour faire en sorte que les pays pêchant dans la ZEE du Kenya versent au gouvernement les sommes dues, soit par le biais de droits et accords de pêche soit sous forme de taxes sur les licences de pêche. Les Kenyans sont aussi encouragés à investir dans la ZEE par l'achat de flottilles de pêche et l'établissement d'usines de transformation du poisson le long de la côte.

Le commerce de la perche du Nil a subi trois interdictions d'exportation imposées par l'Union européenne depuis 1996, ce qui a déterminé une baisse des prix du poisson pendant la recherche d'autres marchés (Figure 4). Le Département a appliqué des mesures correctives pour remédier à la situation et pour assurer que le pays observe les normes de salubrité et qualité de l'UE, afin d'accéder pleinement au marché de cette dernière. Le commerce du poisson avec l'UE, le principal importateur du poisson kenyan, se réalise par le biais d'accords bilatéraux avec des Etats membres individuels de l'Union.

Le ministère donne la priorité à l'amélioration de l'infrastructure de certains points de débarquement et des entrepôts pour garantir la qualité et la salubrité du poisson, afin d'intensifier sa commercialisation et réduire les pertes après capture. La modernisation des entrepôts de poisson, l'amélioration des routes, la fourniture d'électricité, l'accès à la télécommunication, la disponibilité d'eau propre, l'établissement de chambres froides et de fabriques de glace figurent parmi les initiatives envisagées dans le moyen terme. D'autres améliorations visent la construction de trois laboratoires accrédités pour l'évaluation de la qualité du poisson et d'un laboratoire de référence. L'amélioration des normes de qualité et salubrité du poisson garantira les marchés du poisson qui, à leur tour, procureront des revenus pour le gouvernement et des gains pour les pêcheurs.

Figure 4: Effet des interdictions de pêche sur les pêcheries du Kenya en 1996-1999

8. Développement de la pisciculture

La pisciculture au Kenya comprend l'exploitation en eau douce (froide ou tiède) et la mariculture. Le Ministère de l'élevage et du développement des pêches a reconnu l'importance de la contribution des ressources halieutiques aux moyens de subsistance ruraux et urbains. Malgré ce rôle crucial, les disponibilités de poisson par habitant vont en décroissant en raison de l'augmentation de la population et de la demande de poisson. Les ressources naturelles existantes ne sont pas à même de satisfaire cette demande. Le ministère prend donc des mesures pour combler cette lacune en favorisant le développement de la pisciculture. Elles contribueront aussi à alléger la pression exercée par la pêche sur les ressources halieutiques naturelles.

Au cours de la formulation de la stratégie de réduction de la pauvreté dans le secteur agricole, la pisciculture a été définie comme l'une des activités clés pouvant aider à atténuer la pauvreté dans le Kenya rural. C'est pourquoi le ministère vise à renforcer la pisciculture commerciale par l'application sur le terrain des résultats de la recherche de concert avec des agriculteurs de liaison. Il est attendu que ces agriculteurs partageront leurs connaissances avec d'autres agriculteurs. Le succès de cette approche de collaboration adoptée par le Département avec les agriculteurs a été démontré au cours de journées de démonstration au Kenya central et occidental. Le ministère continuera à promouvoir la pisciculture en multipliant les centres de démonstration piscicole, en améliorant les réseaux de prestation de services et en développant et introduisant des budgets d'entreprise et des plans industriels pour faciliter l'accès au crédit pour les pisciculteurs.

En raison du rôle important que peut jouer la pisciculture dans la réduction de la pauvreté, le ministère s'emploie à accélérer la commercialisation des produits par le transfert de technologies sur le terrain en faisant collaborer les agriculteurs de liaison et les vulgarisateurs du gouvernement. La recherche sur la dynamique des étangs a montré que la petite pisciculture peut être commercialisée grâce à une bonne gestion des étangs. Le ministère encourage et facilite le partage et l'échange d'informations entre les pisciculteurs, les chercheurs et les vulgarisateurs par des journées de démonstration et des cours de formation à l'intention des agriculteurs. L'effet de multiplication de ces journées sur le progrès de la pisciculture commerciale est très encourageant et a été considéré comme un moyen approprié de diffuser des technologies nouvelles et performantes. Le ministère stimulera aussi la commercialisation de la petite et moyenne pisciculture en revitalisant la recherche piscicole au niveau du département et les centres de démonstration dans l'ensemble du pays pour renforcer les réseaux de prestation de services.

9. Le potentiel de pêche

Le potentiel de pêche du Kenya ne s'est pas encore réalisé pour diverses raisons. Le gouvernement reconnaît désormais ce potentiel et a commencé à élaborer des mesures visant à le réaliser à court et moyen terme. Le premier engagement à cet égard a consisté dans la scission récente et délibérée du Ministère de l'agriculture et du développement de l'élevage en deux ministères distincts, afin de mettre en évidence le potentiel de la pêche et de l'élevage. Le ministère nouvellement créé se nomme actuellement Ministère du développement de l'élevage et de la pêche et, pour la première fois dans l'histoire du Kenya, la «pêche» apparaît dans le nom d'un ministère connexe, ce qui est un pas important vers la réalisation du potentiel de la pêche.

Le gouvernement se concentre actuellement sur le développement de la pisciculture et l'exploitation de la ZEE pour une mise en valeur rapide de la pêche, en vue d'atténuer la pauvreté rurale et d'accélérer la croissance économique. La démarcation de la ZEE conformément aux dispositions de la Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) se poursuit et des stratégies sont formulées pour une exploitation rentable de la zone. La commercialisation de la petite pisciculture et le transfert de technologies appropriées pour l'utilisation durable des barrages et des petits lacs font partie des plans à court terme envisagés pour accélérer la croissance du secteur.

Les enquêtes sur les eaux territoriales entreprises dans les années 70 ont montré que la pêche au thon à la palangre utilisant de petits bateaux est réalisable à partir de Mombasa. Une flottille de 10 petits bateaux pourrait opérer aisément à la sortie de Mombasa et pêcher des stocks locaux d'albacore et de thons obèses adultes pour le marché sashimi aux prix forts (Habib, 2003). Une publication de la FAO a établi la prise potentielle à environ 3 125 tonnes par an avec une flottille semblable. Une autre publication de la FAO a prédit qu'une flottille de 10 bateaux pêchant pendant 100 jours par an pourrait capturer 5 000 tonnes par an, soit environ 500 tonnes par bateau.

Le Ministère du développement de l'élevage et de la pêche reconnaît l'importance de la pêche, notamment dans l'atténuation de la pauvreté de la population rurale, en raison justement de ses activités à caractère rural. Il appuie, dès lors, le Département pour que le vaste potentiel de la pêche du pays puisse se réaliser à moyen terme.

9.1 Les contraintes relatives au sous-secteur de la pêche

Le sous-secteur ne peut réaliser pleinement son potentiel en raison notamment des facteurs suivants:

Certains de ces goulets d'étranglement sont dus à l'incapacité des parties prenantes de créer un milieu porteur pour la programmation des politiques et la création d'incitations. Il faudrait plus d'investissements dans l'infrastructure de pêche, comme les routes, l'électricité, les plages de débarquement, les soutes, ainsi que des réformes fiscales dans le domaine de l'imposition et de l'exemption de droits pour les engins de pêche, les usines de transformation et les carburants. Un appui vigoureux à la commercialisation des produits de la pêche sur les marchés extérieurs est également important. En vue de ces contraintes, il est estimé que le sous-secteur ne s'accroîtra que de 0,8 pour cent par an entre 2002 et 2007.

10. Les réformes fiscales au Kenya

10.1 La stratégie de reprise économique (SRE)

Le gouvernement vient d'achever la préparation de son document de stratégie de reprise économique visant la réalisation de la richesse et la création d'emplois pour la période 2003-2007. Cette stratégie est la feuille de route claire pour l'avenir, et souligne les actions prioritaires spécifiques à mettre en œuvre pour concrétiser cette conversion économique.

Pour réaliser les objectifs de croissance et la création d'emplois, le Kenya devra accroître le rapport entre la formation brute de capital fixe et le PIB, et de 16,8 pour cent en 2002 arriver à environ 23 pour cent en 2007. Les investissements notamment du secteur privé devront augmenter, à la suite de la mise en œuvre des vastes réformes envisagées, par l'amélioration de la gouvernance. Une large part de l'augmentation des investissements sera financée moyennant des épargnes intérieures qui devraient prendre de l'ampleur, premettant ainsi de passer de 10,7 pour cent du PIB en 2002 à 15,8 pour cent en 2007. Pour financer l'écart, des ressources extérieures d'au moins 2,2 milliards de dollars EU seront nécessaires au secteur public et 1,1 milliard de dollars au secteur privé au cours des cinq prochaines années.

Le gouvernement prépare également un code d'investissement pour réunir les incitations à investir, la protection et le cadre institutionnel en une seule législation, afin d'établir un bureau de service unique pour les activités de promotion de l'investissement. La création d'un milieu porteur est orientée par la politique du pays qui vise le maintien d'un cadre macroéconomique stable dans le contexte de réformes structurelles, lesquelles devraient aboutir à la richesse et la création d'emplois visant la réduction de la pauvreté.

10.2 La réforme fiscale et la pêche

Le Kenya s'est engagé à mettre en œuvre une politique de développement durable par l'exploitation et l'utilisation judicieuses de ses ressources naturelles. Cet engagement est clairement démontré par la présence au Kenya d'un Ministère de l'environnement, des ressources naturelles ainsi que de la faune et la flore sauvages et la transformation récente du Département des pêches en ministère de plein droit. Le nouveau Ministère du développement de l'élevage et de la pêche est responsable de la formulation des politiques en matière de développement et utilisation durable de la pêche dans le pays.

Le sous-secteur de la pêche contribue au produit intérieur brut. La contribution de la pêche aux revenus, à la subsistance et à la nutrition de la population est d'autant plus importante qu'elle se concrétise dans les zones où l'incidence de la pauvreté est très élevée. La SRE est prévue dans la stratégie de réduction de la pauvreté qui cherche à lancer des initiatives à cette fin, par le biais du plan d'action du gouvernement visant le développement durable de l'immense potentiel du sous-secteur de la pêche.

10.3 Les réformes des politiques dans le sous-secteur de la pêche

Pour identifier et réaliser le potentiel du secteur, les institutions de pêche devront pouvoir accomplir au mieux toutes leurs tâches et, dès lors, jouir d'un certain degré d'indépendance vis-à-vis des grandes institutions comme les ministères. Le Kenya doit tenir compte de cette réalité et donner la priorité au secteur de la pêche, soit en accordant la qualité de mandataire et l'autorité au Département des pêches soit en lui permettant de réinvestir dans la recherche et le développement un pourcentage des revenus dégagés. Cela consentirait à l'institution des pêches du pays de promouvoir le secteur de la pêche de façon qu'il puisse réaliser au fil du temps le plein potentiel de ses ressources.

Pour éliminer les goulets d'étranglement et exploiter l'immense potentiel du sous-secteur et favoriser son développement durable, le gouvernement s'engage à mettre en œuvre les réformes suivantes:

10.4 Recommandations

Pour renforcer la croissance du secteur de la pêche, il est urgent d'établir des incitations sectorielles spécifiques dans le cadre des réformes fiscales pour affronter les coûts d'exploitation, de transformation, de préservation des ressources halieutiques et l'exportation des produits.

Toutes ces recommandations devraient créer une situation où seraient garantis des avantages pour les personnes travaillant dans le secteur et des revenus accrus pour le Trésor et la sécurité alimentaire.

12. Conclusion

Il est reconnu et admis que les ressources naturelles du monde sont menacées de surexploitation et compromises par le traitement impropre de l'environnement. Cependant, à l'aide d'une gestion responsable, les récoltes aquatiques, que les calamités naturelles comme la sécheresse ou les inondations épargnent largement, pourront durer pendant de nombreuses années encore. Il conviendrait donc à tous les pays du monde ayant des ressources halieutiques naturelles de les utiliser de façon durable par des méthodes de pêche responsable, afin qu'elles puissent avantager les générations présentes et futures. Il est aussi nécessaire que les pays exploitant ces ressources établissent des mécanismes de garantie de la qualité qui assureront la salubrité et la qualité des produits de la pêche pour les consommateurs, et réduiront les pertes après capture. Pour ce faire, on pourra créer des bases de connaissances nationales, régionales et internationales sur les ressources halieutiques et les systèmes de garantie de la qualité pour renforcer l'échange et le transfert du savoir et des technologies. Le monde développé peut jouer un rôle de chef de file dans cette initiative et est tenu, de ce fait, d'aider de manière transparente les pays en développement à gérer leurs ressources halieutiques et à garantir de façon efficace la qualité du poisson.

RÉFÉRENCES

Ababouch, L. 2001. Fish Safety and Quality: A global perspective (inédit). Rapport présenté à l'atelier FAO/COMESA aux Seychelles.

CFFA-CAPE. 2000. "Who benefits at what costs from EU-ACP Fisheries Relations".

Habib, G. 2003. The Kenya marine fisheries. A final report of the Commonwealth Secretariat consultant on Stock Assessment. A desk study.


[11] Directeur des pêches, Ministry of Livestock & Fisheries Development, P.O. Box 58187, Nairobi, Kenya, [email protected]
[12] Economiste principal, Ministry of Finance, P.O. Box 30009, Nairobi, Kenya, [email protected]

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