La probabilité de contracter la listériose
à la suite de l'ingestion d'un nombre précis de L. monocytogenes est expliquée de manière appropriée par le
triangle de la maladie, où la matrice alimentaire, la virulence de la souche et
la sensibilité du consommateur sont tous des facteurs importants. Il y a peu
d'informations sur les effets de la matrice de l'aliment pour L. monocytogenes. Des études sur
les animaux ont montré que la variation des souches dans la virulence est
importante mais il est impossible pour le moment de déterminer la virulence
chez l'homme pour n'importe quelle souche individuelle et de l'inclure
explicitement dans le modèle. Toutefois, les modèles fondés sur des données
épidémiologiques utilisés dans l'évaluation des risques examinent implicitement
la variation dans la virulence parmi les souches. On a créé des modèles fondés
sur les populations qui estiment la probabilité de maladie pour divers groupes
de population immunodéprimés après la consommation de nombres précis de L. monocytogenes. Bien que les
niveaux maximaux de contamination au point de consommation soient incertains,
différents modèles fondés sur diverses valeurs conduisent tous aux mêmes
conclusions générales.
Les modèles mis au point prévoient que
presque tous les cas de listériose sont dus à la consommation d'un grand nombre
de pathogènes. Inversement, les modèles prévoient qu'il est peu probable que la
consommation d'un petit nombre de L. monocytogenes
cause la maladie. Personnes âgées et femmes enceintes augmentent la sensibilité
et donc le risque de contracter la listériose par exposition. Les maladies et
les interventions médicales qui compromettent gravement le système immunitaire
augmentent aussi beaucoup les risques. Le risque de contracter la listériose en
consommant des aliments contaminés semble être bien décrit par le type de
« déclaration probabiliste » qui sous‑tend la relation
dose-réponse exponentielle utilisée dans l'évaluation des risques, à savoir,
qu'il s'agit d'une probabilité précise, bien qu'infiniment réduite, qu'un cas
puisse se produire si un consommateur anormalement sensible a ingéré un petit
nombre d'une souche exceptionnellement virulente.
Rien ne permet de penser que le risque
présenté par l'ingestion d'un nombre précis de L. monocytogenes varie d'un pays à l'autre pour la population
équivalente. Des différences dans les pratiques de fabrication et de
manipulation dans divers pays peuvent influer sur le mode de contamination et
donc sur le risque par portion pour un aliment. L'impact d'un aliment sur la
santé publique peut être évalué à la fois par le risque par portion et par le
nombre de cas par population et par an. Le premier est une fonction de la
fréquence de la contamination et de la répartition des niveaux de contamination
dans cette classe d'aliments. Le second porte sur le nombre de portions de
l'aliment consommé par la population et les effectifs de cette population. Un
aliment peut présenter un risque relativement élevé par portion mais, s'il
n'occupe qu'une petite place dans le régime alimentaire national, il peut avoir
un impact relativement limité sur la santé publique tel qu'il est défini par le
nombre de cas par an attribuables à cet aliment. Inversement, un aliment qui
présente un risque relativement limité par portion mais qui est consommé
fréquemment et en grandes quantités peut représenter une grande partie du
nombre de cas dans une population.
Des mesures de maîtrise capables de
réduire les fréquences de la contamination impliquent des réductions proportionnelles
dans les taux de maladie, à condition que les pourcentages de fortes
contaminations soient réduits d'autant.
Des mesures de maîtrise empêchant une
forte contamination au point de consommation devraient avoir le plus gros
impact sur la réduction des taux de listériose. La contamination par de grands
nombres de L. monocytogenes sur le site de fabrication
et au point de vente au détail est rare et des aliments comme les crèmes
glacées et les produits carnés fermentés qui ne permettent pas la croissance du
pathogène durant le stockage présentent des risques relativement faibles par
portion et de faibles risques par an et par population. Dans les aliments où le
pathogène peut se développer durant le stockage, en particulier s'ils sont
conservés à des températures élevées ou pour une longue durée, les petits
nombres de L. monocytogenes sur
le site de fabrication et au point de vente au détail peuvent croître durant le
stockage pour atteindre des niveaux qui représentent substantiellement des
risques relatifs élevés de causer la listériose.
Bien qu'il soit assez rare qu'un aliment
soit très contaminé au point de vente, la santé publique pourrait être
améliorée si l'on réduisait la présence du pathogène sur le site de fabrication
et au point de vente dans les aliments qui ne favorisent pas sa croissance.
Dans ceux qui la favorisent, des mesures de maîtrise, telles qu'un meilleur
contrôle de la température ou la réduction de la durée du stockage, atténueront
l'augmentation du risque due au développement de L. monocytogenes. La reformulation des aliments de manière à
ce qu'ils ne favorisent pas le développement du pathogène devrait réduire la
présence de fortes concentrations et, ce faisant, réduire le risque de
listériose.
Les cas de
listériose sont dans leur grande majorité associés à la consommation d'aliments
qui ne répondent pas aux normes en vigueur pour L. monocytogenes dans les aliments, que la norme indique une
tolérance zéro ou 100 UFC/g. Relever la norme de tolérance zéro jusqu'à une
valeur plus élevée (par exemple, 1 UFC/25 g à 100/g) devrait se
traduire par une incidence accrue de la listériose à moins qu'un assouplissement de la norme ne conduise à l'adoption
générale de mesures de maîtrise qui diminueraient sensiblement l'incidence des
portions d'aliments prêts à consommer qui dépassaient la norme,
particulièrement le nombre de portions contenant de fortes concentrations de L. monocytogenes.