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Conclusion et recommandations

L'évaluation des besoins en formation a été réalisée avec l'objectif global de contribuer à la gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique centrale. Nous l'avons abordé en privilégiant l'analyse des déficits de compétences en rapport avec l'évolution prévue des fonctions et des activités dans le secteur forestier.

Les changements majeurs ont été observés dans le secteur forestier; des nouveaux objectifs de développement de ce secteur ont été adoptés dans tous les pays de la sous-région. Une répartition de rôles entre tous les acteurs concernés par la gestion forestière a été établie pour les atteindre. Cependant, il a été constaté que les compétences requises pour assumer les nouvelles responsabilités ne sont pas toujours disponibles au niveau des principaux groupes d'acteurs, à savoir l'Administration forestière, le secteur privé, les ONG et les populations locales.

Les besoins globaux en formation ont été identifiés pour chaque groupe d'acteurs par domaine thématique prioritaire : la politique et l'Administration forestières, l'aménagement et la gestion durable des forêts, les techniques et opérations forestières, la gestion de la faune et des aires protégées, l'industrie du bois et le commerce du bois. Une tentative de priorisation des besoins en formation a permis de distinguer les besoins partagés des besoins par groupes d'acteurs. Le premier type se rapporte principalement à la position de partenaire que chaque acteur est dorénavant appelé à occuper dans la gestion des écosystèmes forestiers. Le second type de besoins est lié aux centres d'intérêts exprimés par chaque groupe d'acteurs. Au niveau du secteur privé par exemple, le centre d'intérêt est orienté vers la formation d'aménagistes. En définitive, les besoins en formation dans le secteur forestier sont importants. Le déficit de compétences qui a été mis en évidence peut compromettre les résultats attendus des initiatives de gestion durable, en particulier, et des nouvelles politiques forestières, en général.

Néanmoins, plusieurs structures de formation forestière sont opérationnelles dans les pays d'Afrique centrale. Nous avons vu que les établissements d'enseignement forestier sont fonctionnels dans chaque pays. Les centres de formation professionnels sont aussi actifs dans plusieurs pays. La formation "sur le tas" est importante. Au delà de la couverture de la sous-région en structures de formation forestière, de nombreuses lacunes qui les empêchent de faire face aux besoins en formation identifiés ont été répertoriées. Elles ont été observées à trois niveaux : les programmes de formation ne sont pas régulièrement adaptés aux évolutions générales dans le secteur forestier, les méthodes pédagogiques ne permettent pas toujours d'atteindre les objectifs d'apprentissage et l'infrastructure ne permet pas aux enseignants de réaliser la formation d'une manière convenable.

La situation est certes alarmante; mais il y a des moyens d'orienter la formation forestière dans un sens plus adéquat aux objectifs de la gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique centrale et de renforcer la formation continue. Ces moyens concernent les priorités suivantes :

A COURT TERME

Organiser des actions de formation continue au bénéfice des "aménagistes"

La mise sous aménagement des concessions forestières est une obligation contractuelle. Aussi, il faudrait un aménagiste (au moins) pour chaque concession forestière. Les compétences actuelles des aménagistes en activité sont surtout d'ordre technique (volet technique de l'aménagement forestier). Un déficit de compétences sur les composantes sociale et environnementale de la gestion des concessions forestières a été identifié. Il est donc urgent de renforcer les capacités des aménagistes en service dans les concessions forestières en initiant un processus d'apprentissage collectif.

Améliorer les capacités des agents de l'administration forestière dans le domaine du suivi et du contrôle des activités forestières

Le suivi et le contrôle des activités forestières par l'administration font souvent l'objet de critiques diverses (incompétences, corruption, mauvaise gouvernance, etc.). Il est par conséquent indispensable d'organiser des actions de formation en suivi des activités forestières et contrôle de la bonne exécution des sanctions au bénéfice des agents des Services provinciaux (les plus concernés par le sujet). Les actions de formation seront orientées d'une part, vers les questions d'éthiques et, d'autre part, sur les thèmes suivants : études d'impact environnemental, techniques de l'audit forestier, suivi et contrôle des normes et des règles de gestion des concessions forestières, suivi de la biodiversité, suivi des processus, etc.

Former les enseignants des écoles forestières en suivi et évaluation des programmes de formation

Les compétences des enseignants en suivi et évaluation des programmes de formation sont relativement faibles. C'est pourquoi beaucoup d'entre eux se soucient moins de l'amélioration des enseignements dispensés et de la qualité de ces enseignements. Les besoins en formation identifiés vont au delà des compétences requises pour mettre en œuvre un système de suivi et évaluation des programmes de formation. Ils concernent aussi les aspects liés à la conception d'un programme de formation, au choix et à l'usage des méthodes, techniques et outils pédagogiques appropriés pour atteindre les objectifs pédagogiques que l'on s'est fixé.

Faciliter aux enseignants l'accès aux connaissances et pratiques nouvelles en gestion forestière

Le contenu des cours de formation doit être mis à jour sur la base des connaissances et des pratiques nouvelles. Cela n'est possible que si les enseignants ont accès à ces connaissances et pratiques. Il est donc judicieux d'apporter un appui aux enseignants à travers des programmes de formation continue sur les thématiques prioritaires, l'usage des nouvelles technologies de l'information et de la communication pour profiter des enseignements offerts par les universités virtuelles et les informations disponibles sur certains sites Web.

Promouvoir la dynamique de réseau pour favoriser les échanges d'expériences entre les écoles forestières

Les écoles forestières sont restées, pendant longtemps, dans une situation d'isolement. L'expérience actuelle du Réseau des institutions de formation forestière et environnementale d'Afrique centrale (RIFFEAC) montre que l'impact d'une dynamique de réseau au niveau des écoles forestières est considérable. Il est opportun de poursuivre cette initiative en mettant l'accent sur l'apprentissage de groupe pour améliorer les compétences dans les thématiques prioritaires, le suivi et l'évaluation des programmes de formation, etc. Il est aussi indispensable de rechercher des synergies avec d'autres réseaux en Afrique (ANAFE, par exemple) et à travers le monde.

A MOYEN ET LONG TERME

Accorder plus d'attention à la formation dans les politiques et les programmes forestiers nationaux

Le développement des compétences du personnel dans le secteur forestier en Afrique centrale est une préoccupation partagée tant par le secteur public que par le secteur privé, les ONG et les populations locales. Cette préoccupation est prise en compte dans les politiques et les programmes forestiers nationaux, d'une manière générale. Le Programme Sectoriel Forêt et Environnement du Cameroun, par exemple, comprend plusieurs activités en faveur de l'amélioration de la formation (cf. résultat 6). Cependant, il a été constaté que cette volonté politique n'est pas manifeste dans plusieurs pays. Les activités prévues en matière de formation ne sont pas toujours réalisées. Il est donc opportun d'accorder à la formation autant d'attention pendant l'élaboration des programmes forestiers que pendant les phases d'exécution. Dans cette perspective, il peut être envisagé au niveau de chaque pays, d'élaborer et de mettre en œuvre des plans de formation du personnel pour chaque groupe d'acteurs. Pour garantir le succès d'un tel projet, il est souhaitable de donner un caractère légal à la formation continue dans le secteur forestier23.

Mettre en place un cadre général de référence pour l'enseignement forestier en Afrique centrale

L'élaboration d'un cadre général de référence pour l'enseignement forestier en Afrique centrale est recommandé pour promouvoir l'intégration sous-régionale par la mise en cohérence des programmes de formation, le développement des cursus que les étudiants peuvent commencer dans une école forestière et terminer dans une autre, etc. Ce cadre de référence incitera les pays à rompre avec le modèle national-étatique (chaque pays a ses institutions de formation, lesquelles favorisent les intérêts nationaux) et favorisera une utilisation efficiente des capacités de formation disponibles dans la sous-région.

Placer la formation forestière au centre d'initiatives croisées associant le monde professionnel (secteur public et secteur privé) et les écoles forestières

La révision des programmes de formation forestière devrait être fondée sur la participation de tous les acteurs concernés par la gestion forestière. En procédant ainsi, le monde professionnel va s'engager d'avantage dans la formation, se reconnaître dans les programmes de formation, accorder plus de crédibilités aux écoles forestières, recruter sans réserves les nouveaux diplômés, etc. La formation forestière sera ainsi plus proche du "terrain" et des passerelles seront posées pour faciliter les échanges, l'accueil des étudiants en milieu professionnel, la formation continue des agents en activité, le développement participatif des programmes de formation, etc.

Mettre à la disposition des structures de formation les ressources qui sont en adéquation avec les objectifs à atteindre

L'infrastructure dans la majorité des écoles forestières laisse à désirer. L'enseignement forestier n'est pas réalisé d'une manière convenable. Les raisons invoquées sont liées à l'insuffisance des budgets alloués par les Gouvernements aux écoles forestières. Face à cette situation, il convient de mettre en place des mécanismes de financements novateurs. Une étude approfondie sur le sujet est nécessaire avant de s'engager sur certaines pistes, comme les contrats de prestation de service avec le secteur privé et l'administration, l'inscription d'une subvention à l'enseignement forestier dans les Fonds de développement forestier en place dans chaque pays, etc.


23 Dans certains pays, comme la France, une législation pour la formation continue a été instaurée au cours des années soixante/soixante dix (Dubar, 1996).

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