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9. Entretien de la plantation


9.1 Protection
9.2 Traitements culturaux


Une fois qu'une plantation est installée, il ne faut pas considérer que le travail est terminé. Il faudra par exemple protéger la plantation contre les intempéries, le feu, les insectes et les champignons ainsi que les bêtes. Il peut aussi falloir pratiquer une variété de traitements culturaux selon l'objet de la plantation.

9.1 Protection

Phénomènes météorologiques: l'apparition de phénomènes météorologiques nuisibles est généralement imprévisible. On ne peut pas faire grand chose pour protéger les plantations forestières contre les dommages provoqués par les intempéries, si ce n'est de faire pousser des essences d'arbres et arbustes connus pour être résistantes aux effets nuisibles des phénomènes météorologiques locaux, ou d'implanter les peuplements d'arbres ou d'arbustes dans des zones abritées. Certaines espèces sont plus résistantes au vent que d'autres, ou leurs frondaisons et leurs branches ont moins tendance à casser lorsque le vent est fort. D'autres espèces sont plus tolérantes au brouillard salin et peuvent par conséquent être utilisées en ceinture le long de pentes exposées à l'air marin de façon à protéger d'autres espèces moins tolérantes qui constitueront la plantation principale. Les espèces à écorce fine sont plus vulnérables et par conséquent plus sensibles aux attaques d'insectes ou de champignons que d'autres.

Feu: la détérioration par le feu constitue une grave menace pour les plantations. Le risque d'incendie est généralement élevé dans les régions au climat sec; mais, même dans des zones relativement humides ou à pluviométrie élevée, il peut se produire des périodes chaudes et sèches où le risque d'incendie est élevé. Ce risque doit être pris en considération dès le début du développement de la plantation.

Les incendies peuvent être provoqués par des causes naturelles, telles que la foudre, mais ils sont souvent dus aux activités de l'homme. Les incendies de plantations peuvent être dus à l'extension de feux allumés sur les terres agricoles situées autour, aux activités des chasseurs ou aux brûlis effectués par les pasteurs pour améliorer les pâturages. On a vu des cas de feux délibérément allumés pour créer des emplois (dans la lutte contre l'incendie et dans la replantation ultérieure) ou pour manifester un désaccord sur les politiques forestières. Il n'est pas possible d'empêcher que des conditions favorables aux incendies soient réunies pour des raisons climatiques, mais on peut faire beaucoup pour réduire au minimum le risque en éduquant le public et en faisant participer la population locale à la foresterie.

Un principe essentiel de la protection des plantations forestières contre le feu est que, lorsqu'il n'y a pas suffisamment de matériaux combustibles pour permettre à un feu de se développer sur le sol, il n'y a pas ou peu de risques d'incendie Les feux de plantations dangereux et néfastes ne peuvent se développer que lorsque le feu peut prendre au niveau du sol.

Dans de nombreuses parties du monde, on pratique couramment le brûlis annuel ou périodique de la végétation pour améliorer les conditions de pâturage, réduire l'accumulation de combustible ou améliorer la fertilité du sol par l'accumulation de cendres.

Insectes et champignons: la plupart des insectes et champignons ont leurs espèces hôtes privilégiées. Dans leur environnement naturel, les arbres et arbustes atteignent normalement un état d'équilibre avec les parasites indigènes. Cependant, lorsqu'on plante des espèces exotiques, on peut aussi introduire des parasites exotiques. Très souvent, ceux-ci s'adaptent facilement aux conditions de leur nouvel habitat. En général, le risque de détérioration par les parasites est plus élevé lorsque les plantes sont physiologiquement affaiblies parce qu'elles sont plantées sur des sites qui ne conviennent pas, parce que le site est mal préparé, parce que la plantation est mal faite, parce que les conditions climatiques sont adverses ou parce que l'on a négligé le désherbage et les autres opérations d'entretien. Mais il arrive parfois que même des arbres et arbustes sains soient attaqués. Pour de nombreux insectes et champignons, on ne dispose pas de mesures de lutte; lorsque c'est le cas, la meilleure précaution consiste à planter des espèces ou variétés d'arbres et arbustes connues pour leur résistance aux parasites.

Les principales précautions à prendre pour se prémunir contre des dommages qui pourraient être causés ultérieurement par les insectes et les champignons consiste à planter des espèces convenant aux conditions climatiques et pédologiques du site et à faire une étude des parasites indigènes de façon à s'assurer qu'aucun ne figure parmi les formes connues auxquelles l'espèce sélectionnée est sensible, mais ceci est rarement facile, du fait surtout du manque de connaissances sur les besoins du site et la sensibilité des espèces exotiques aux insectes et aux champignons. Pour obtenir cette information nécessaire, il conviendrait de procéder à des expériences contrôlées avant de se lancer dans des programmes de plantation à grande échelle.

Le soin mis à l'exécution des opérations d'implantation et d'entretien pendant les premières années d'une plantation (qui permettront d'obtenir de jeunes arbres et arbustes sains et vigoureux) peut aider à rendre une plantation plus résistante aux insectes et aux champignons. Cependant, lorsque des signes d'attaque de parasites apparaissent, il faut les étudier sans délai et en identifier la cause. Diverses mesures de lutte existent: elles peuvent être d'ordre sylvivole, chimique, biologique ou mécanique.

Les mesures sylvicoles consistent notamment à éclaircir soigneusement et au bon moment après l'installation de la plantation forestière. Ceci permet d'éliminer les tiges peu vigoureuses ou étouffées de façon à permettre à la plantation de pousser de façon vigoureuse. Lorsque la plantation est jeune, l'élimination et la destruction rapides des arbres et arbustes infestés peut être efficace pour éviter que les parasites s'attaquent au reste de la plantation. Lorsqu'on sait qu'il y a menace d'infection, la plantation d'un mélange d'espèces d'arbres et arbustes peut aussi être considérée comme une mesure de lutte sylvicole.

Un inconvénient de ces plantations mixtes est que la gestion ultérieure de la forêt peut être compliquée; cependant, on peut éviter cette complication, au moins en partie, en plantant en blocs alternés ou en larges ceintures différentes essences d'arbres ou d'arbustes formant des barrières à l'invasion d'un parasite ou d'une maladie à partir du point initial d'infection.

On peut souvent stopper l'invasion d'insectes et de champignons en appliquant les insecticides ou fongicides chimiques appropriés. Ils se présentent généralement sous forme de liquide (ou de poudre mouillable), de poudre ou de fumée. La pulvérisation à l'aide de pulvérisateurs à main ou portables est souvent utilisée pour lutter contre les attaques dans les jeunes plantations; lorsque le couvert est fermé, il peut être plus efficace et moins onéreux de pulvériser du liquide ou de la poudre ou d'enfumer par voie aérienne. Seuls des insecticides préalablement testés et sans danger pour l'environnement peuvent être prescrits.

La lutte biologique contre les insectes a été utilisée avec succès dans certains cas; la plupart du temps, il faut pour cela introduire un parasite. La lutte biologique réussit généralement le mieux lorsque le problème a atteint des proportions épidémiques.

La lutte mécanique, soit par élimination et destruction physiques des parasites soit par élimination de leurs hôtes, peut être efficace.

Bêtes sauvages: les animaux sauvages endommagent les plantations forestières surtout en broutant les arbres ou en en enlevant l'écorce. En général, trois ordres d'animaux sauvages sont cause de dommages: les rongeurs (rats, souris, taupes et écureuils); les lagomorphes (lièvres et lapins); les artiodactyles (daims, antilopes, sangliers et buffles). Les principales méthodes de lutte contre les dommages causés par les animaux sauvages sont les clôtures, les haies ou les fossés, les pièges et les appâts empoisonnés.

Animaux domestiques: dans certains pays, les moutons, chèvres et bovins peuvent en broutant menacer les jeunes plantations. On utilise parfois des haies et des clôtures pour les empêcher de pénétrer. Lorsque des clôtures coûteraient trop cher, on peut employer des gardes.

Dans de nombreuses zones arides, il est traditionnel de faire paître les chèvres. De vastes enclos de plantations forestières peuvent imposer des changements radicaux dans les habitudes et l'économie des collectivités rurales. Dans ce cas, il ne serait pas sage de se lancer dans des programmes de plantation si l'on ne peut d'abord trouver pour la population d'autres moyens d'existence; en général, cela implique l'intégration de programmes de développement communautaire (par exemple, amélioration de l'agriculture ou de l'élevage, des communications, des écoles ou des soins de santé) et des possibilités nouvelles d'emploi grâce au développement d'industries rurales (telles que les programmes d'afforestation et les industries forestières rurales).

9.2 Traitements culturaux

Des opérations culturales sont nécessaires pour créer des conditions favorables à la survie puis à la croissance et au rendement des arbres ou arbustes de la plantation. Dans la plupart des plantations forestières, les opérations culturales consistent à empêcher les arbres et arbustes d'être étouffés par une végétation concurrente. Ce traitement est très souvent appelé désherbage. D'autres traitements culturaux sont l'éclaircissage, qui vise à réaliser un certain espacement entre les arbres ou arbustes, et l'arrosage périodique des plants.

Désherbage: le désherbage est une opération culturale qui élimine la végétation indésirable qui, si l'on ne faisait rien, compromettrait la croissance des essences plantées. Cette végétation indésirable entre en concurrence avec les arbres et arbustes pour la lumière, l'eau et les nutriments; le désherbage augmente la quantité de tous ces éléments ou des plus essentiels d'entre eux dont peuvent disposer les arbres et arbustes. Un objectif premier du désherbage est de favoriser la croissance et le développement de la plantation tout en maintenant les coûts de l'opération dans des limites acceptables.

L'un des principaux facteurs qui déterminent l'intensité et la durée des traitements de désherbage est le rapport entre la plantation et les mauvaises herbes. Sur certains sites, la plantation finit par pousser à travers les mauvaises herbes, dominer le site et s'installer; dans ce cas, la fonction de désherbage vise à accroître l'uniformité de la plantation et à accélérer l'installation et la croissance. Dans d'autres cas, le type ou la densité des mauvaises herbes est tel qu'au début de la plantation forestière elles risquent d'éliminer ou de tuer une partie ou la totalité des arbres ou arbustes plantés; le but principal du désherbage est alors de réduire la mortalité et de maintenir en vie une quantité suffisante d'arbres ou d'arbustes.

Les méthodes de désherbage consistent à supprimer ou éliminer la végétation concurrente. La suppression consiste à écraser ou à couper les mauvaises herbes au niveau du sol ou au-dessus. L'élimination peut être réalisée en tuant les herbes, en détruisant toute la plante soit par des moyens mécaniques soit par des moyens chimiques. Le désherbage peut être total ou partiel.

Eclaircissage: l'éclaircissage des plantations forestières, en particulier celles destinées à la production de bois, peut être nécessaire pour obtenir l'espacement souhaité entre les arbres. En général, cet espacement constitue un compromis entre un espacement "large" pour réduire les coûts de plantation et l'interconcurrence des arbres en période de sécheresse et un espacement "étroit" pour réaliser rapidement la fermeture du couvert, l'élimination des mauvaises herbes, la réduction des coûts de désherbage et l'élagage naturel des branches qui sont à l'ombre.

Dans les plantations forestières "de première rotation", l'objectif de l'éclaircissage est souvent d'ajuster l'espacement initial entre les plants, de façon à atteindre en une courte rotation, sans éclaircissage secondaire, la taille et le type d'arbres ou d'arbustes voulu. Lorsqu'on veut obtenir un arbre ou un arbuste de plus haute taille et de meilleure qualité, il faut souvent lors du premier éclaircissage réaliser un espacement plus étroit que le définitif; en général, il faut ensuite procéder à un deuxième éclaircissage. Lors de ces opérations, il faut choisir les sujets à éclaircir de façon à concentrer sur les meilleures tiges la croissance de la plantation définitive.

Quel que soit le but de l'opération d'éclaircissage, elle doit suivre de façon stricte les normes de calendrier et d'espacement prescrites par le calendrier d'éclaircissage de la zone.

Arrosage: les plantations forestières en région aride ont souvent besoin d'un arrosage périodique pendant la première saison de pousse, si l'on veut obtenir un taux de survie satisfaisant. L'arrosage doit commencer après la cessation des pluies, lorsque la teneur en humidité du sol est descendue et proche du coefficient de dépérissement; l'arrosage doit alors être répété à intervalles réguliers jusqu'au commencement de la prochaine saison des pluies. Avant chaque arrosage, la zone qui entoure l'arbre doit être désherbée et une cuvette peu profonde pratiquée autour du tronc de façon à recueillir autant d'eau que possible.

L'arrosage peut être une opération coûteuse, surtout sur des terrains trop en pente ou trop accidentés pour le passage de véhicules citernes. On peut avoir besoin de recourir à des animaux de bât pour transporter des bidons d'eau jusqu'aux sites de plantation. L'arrosage peut être coûteux pour les grandes plantations forestières, surtout lorsque la source d'eau est loin de la plantation, mais il peut se justifier dans le cas de petites plantations ou pour l'installation de rangées d'arbres le long des routes.

Dans certains cas, un ameublissement de la terre et un désherbage réguliers, surtout pendant la première saison de pousse, sont suffisants pour conserver l'humidité du sol et permettre une survie satisfaisante des plants, éliminant la nécessité d'arrosages.

10. Opérations de récolte

Pour les plantations forestières destinées à la production de bois, les arbres et arbustes sont récoltés lorsqu'ils atteignent la "taille optimum" pour le produit du bois souhaité. D'un point de vue biologique, il ne faut pas abattre les arbres et arbustes tant qu'ils n'ont pas atteint au moins la taille minimum nécessaire pour l'utilisation de la production. Au-delà de la taille minimum cependant, il reste à déterminer quand récolter.

Très souvent, les taux annuels de croissance moyens d'une plantation forestière peuvent servir de guide pour savoir quand récolter le bois. En général, la croissance annuelle moyenne des arbres et arbustes augmente lentement pendant les premières années d'installation de la plantation, atteint un maximum, puis diminue plus progressivement, comme le montre la Figure 4.11. Il ne faut généralement pas laisser les arbres et arbustes dépasser le point de croissance annuelle moyenne maximum, qui est l'âge de productivité maximum; les forestiers appellent cela l'âge "de rotation" de la plantation forestière.

Figure 4.11 Rapport entre l'âge des arbres et leur croissance indiquant l'âge de rotation.

Pour déterminer le taux annuel moyen de croissance d'une plantation forestière à un certain moment, il faut estimer le volume et l'âge des arbres et arbustes; on calcule alors la croissance annuelle moyenne (à ce moment précis) en divisant le volume sur pied par l'âge correspondant. Là encore, cette détermination exige des mesures soigneuses des volumes et la connaissance des âges.

Des considérations économiques aident également à déterminer le moment où il faut récolter les arbres et arbustes pour obtenir les produits du bois. Si l'on se base uniquement sur les facteurs du marché, le moment de récolter est celui où le profit est maximum. C'est le cas lorsque les recettes de la récolte et de la vente du bois, une fois déduits les coûts de la récolte et (le cas échéant) de sa transformation dans les produits souhaités, sont les plus élevées.

Les méthodes d'abattage, de coupe des troncs et des branches aux longueurs souhaitées et d'enlèvement du bois du site de la plantation doivent être choisis de façon à réduire au minimum la dégradation du site. Il peut suffire, pour l'abattage et la coupe, de haches, de scies, de coins et de traîneaux. On utilise souvent des scies à moteur qui, si elles facilitent la récolte, peuvent la rendre peu économique, compte tenu de leur coût élevé de fonctionnement.

Une fois que les arbres et arbustes sont abattus et découpés, il faut les transporter ou les traîner jusqu'au point de chargement pour le transport jusqu'aux lieux de transformation ou directement à un marché. Lorsque les grumes sont trop lourdes à transporter, on peut employer un simple traîneau pour les tirer à l'aide soit d'un animal domestique soit d'un tracteur. Lorsqu'on laisse dans la plantation forestière des arbres et des arbustes, il faut procéder à l'opération de récolte de façon à leur éviter tout dommage.

Il est important de choisir les méthodes de récolte en fonction des compétences du personnel qui va les appliquer. Là encore, une planification sera nécessaire pour s'assurer que la main-d'oeuvre et l'équipement nécessaire seront disponibles au moment voulu.

11. Points marquants de ce chapitre

Lorsqu'on sélectionne les essences appropriées pour les plantations forestières en zone aride, il faut connaître les différents facteurs du site (climat, sol, topographie, facteurs biotiques, végétation et niveaux de la nappe phréatique) ainsi que les facteurs socio-économiques. Une fois que l'on a sélectionné le site et les essences de plantation, il faut, le cas échéant, ériger des clôtures qui marquent les limites et protègent les arbres et arbustes. Pour que la culture réussisse, le site doit souvent être préparé; cette opération peut comprendre l'élimination de la végétation concurrente, l'amélioration du captage de l'eau, la réduction du ruissellement, l'amélioration des conditions du sol, l'élimination des risques d'incendie et la préparation du sol.

La plantation coïncide en général avec la saison des pluies. Après cette opération, l'utilisation de film plastique opaque peut empêcher l'évaporation et la croissance de mauvaises herbes autour du plant. L'espacement des plantations doit être suffisamment large pour empêcher l'interconcurrence pour l'humidité du sol ou, le cas échéant, pour faire passer les machines utilisées pour l'irrigation.

L'entretien des plantations forestières comporte la protection des plants contre les conditions climatiques néfastes, les incendies, les insectes et les champignons ainsi que les animaux. Il peut comprendre des mesures sylvicoles (telles que l'élimination soigneuse en temps voulu des arbres et arbustes endommagés), chimiques (avec des insecticides ou des fongicides), biologiques (avec des parasites) ou mécaniques (élimination ou destruction des parasites ou ravageurs, construction de clôtures, etc.). Les intrusions de l'homme pouvant menacer la réussite d'un programme de plantation, le planning doit aussi comprendre des méthodes pour éliminer ce risque.

Les traitements culturaux visant à promouvoir des conditions de croissance favorables comprennent le désherbage, l'éclaircissage et l'arrosage. Les opérations éventuelles de récolte doivent se faire selon des méthodes correspondant aux compétences des personnes qui les exécuteront.


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