Table des matières
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PLANCHE 1 : EROSION EN NAPPE
Sur une prairie
plantée trop tardivement en Panicum maximum, les premiers orages de mai ont battu la
surface du sol mal couverte et séparé l'humus et l'argile des sables grossiers. Le
ruissellement en nappe a emporté particules légères humifères (colorées en gris
foncé) et a laissé sur place des nappes de sable roux, témoins du sol érodé. Station
ORSTOM d'Adiopodoumé en Côte d'Ivoire (pente 5 %).
En tombant sur le sol, la
pluie (simulée) provoque un ruissellement en nappe qui avance lentement. Si la surface du
sol est rugueuse, le ruissellement s'organise rapidement (ici au bout de 3 m) en minces
filets accélérés qui creusent de petites griffes temporaires où l'eau (colorée
artificiellement) circule comme dans les oueds. Station ORSTOM d'Adiopodoumé (pente 7%).
Sur cette parcelle nue, on
a laissé évoluer l'érosion en nappe: celle-ci a dégagé des petits monticules de terre
(h = 2 à 10 cm) protégés par un corps dur (croûte, racines, graines) appelés
"micro-demoiselles coiffées". Le ruissellement tente de les cisailler à la
base et forme des "micro-falaises". Il entraîne les particules fines humifères
(grises) et laisse en surface un manteau de grains de sable roux (ferrugineux).
Adiopodoumé, Côte d'Ivoire (pente 7%).
Un bon paillage, ou une
plante de couverture (ici une légumineuse semée entre les rangs de mais au 1er sarclage)
suffisent pour intercepter l'énergie des gouttes de pluies, bloquer complètement
l'érosion en nappe et le ruissellement. Station IITA: Ibadan, Nigeria.
PLANCHE 2 : ERODIBILITE DES
SOLS
Les vertisols argileux et
riches en Ca sont très résistants à l'érosion en nappe (K=0,01 à 0,10). Saturés en
eau, ils sont sensibles au ravinement. Hyderabad, station ICRISAT, Inde.
Les sols bruns rouges
subarides, limoneux et pauvres en matières organiques, sont très sensibles à la
battance des pluies. Il s'y développe un ruissellement abondant qui entraîne le
ravinement généralisé dès qu'on les cultive. Sabouna, Burkina Faso.
Les sols ferrallitiques
profonds sont très résistants (K = 0,10 à 0,20), mais dans la zone d'altération, le
ruissellement active le ravinement et les lavakas qui évoluent par éboulements
successifs. Ambatomainty, Madagascar.
Ces schistes, trop peu
profonds, n'auraient jamais dû être défrichés. Lors d'une averse de fréquence
décennale, le fossé a débordé et décapé toute la couverture pédologique. Le sol est
dégradé pour des siècles. Le Cap, Afrique du Sud.
Les andosols sont très
résistants à la battance, mais pulvérisés, l'horizon superficiel flotte dans les eaux
de ruissellement. Pour les protéger, il faut enserrer les agrégats dans un réseau de
racines : Honolulu Hawaï.
A l'avant plan le sol
ferrugineux sableux issu d'un grès calcaire est extrêmement fragile car il est riche en
sable fin et pauvre en MO. A l'arrière plan, les sols vertiques noirs argileux riches en
humus, issus de diorite, sont extrêmement résistants De plus, les cultures s'y
développent plus rapidement. East London, Afrique du Sud.
PLANCHE 3 : DEGRADATION DES
SOLS
Le feu et la culture
dégradent rapidement la matière organique de ces sols gravillonnaires très pauvres. Une
longue jachère est nécessaire pour rétablir la végétation initiale. Koutiala, Mali.
Les berges des marigots
sont souvent dégradées par le passage répété des troupeaux qui viennent s'abreuver et
brouter les derniers pâturages verts en saison sèche. Kaniko, Mali.
La culture du coton exige
l'arrachage de tous les résidus pour des raisons sanitaires: ceci entraîne le
déséquilibre organique du sol et la dégradation de son potentiel de production, malgré
le parc de karité. Kaniko, Mali.
Pour permettre le labour
mécanisé, il a été nécessaire d'arracher toutes les souches. Au bout d'une dizaine
d'années, l'horizon humifère sableux a été décapé, laissant apparaître une croûte
compacte et imperméable constituée du fond de labour. Le ruissellement est alors si fort
qu'il emporte les graines et les résidus organiques fertilisants et empêche toute
restauration du sol. Baramandougou, Mali.
PLANCHE 4 : EFFETS DU FEU
En Afrique, le feu peut
avoir cinq fonctions: le dé la chasse, la lutte contre les parasites, l'entretien des
pâturages et la manifestation du mécontentement de la population vis-à-vis de
l'Administration (forestière en particulier). Korhogo, Côte d'Ivoire.
Lorsque le feu est allumé
précocement, c'est-à-dire un mois après la dernière pluie utile, il court rapidement
à travers la savane et sélectionne les espèces arborées résistantes au feu: on
obtient une savane arbustive composée exclusivement d'espèces pyrophiles. Station de
Kokondekro, Côte d'Ivoire.
Lorsque cette même zone
est mise en défens depuis trente ans, la savane évolue en forêt sèche où les lianes
et les espèces forestières remplacent les graminées susceptibles de transmettre le feu.
Station de Kokondekro, Côte d'Ivoire.
Le feu est un instrument
essentiel pour l'élevage: il permet de régénérer les ressources fourragères durant la
saison sèche. On note ici la limite entre la zone brûlée tardivement depuis trente ans
et la savane arborée environnante. Station de Kokondekro, Côte d'Ivoire.
Une très large partie de
l'Afrique actuellement sous savane retournerait naturellement à la forêt si on la
protégeait des feux et du pâturage.
PLANCHE 5 : DEFRICHEMENT
MOTORISE
Après que le buttoir du
Caterpillar ait renversé les troncs des principaux arbres, le râteau passe pour arracher
le réseau racinaire et le séparer de l'horizon humifère. Le sous bois, les racines et
les troncs, tout est roulé dans un nuage de poussières jusqu'à l'andin, en bout de
parcelle où l'on entasse la biomasse et les nutriments accumulés pendant 20 à 150 ans.
Ibadan, Nigéria.
Après le passage du
buttoir et du râteau, la surface est plane mais la litière et l'humus ont disparu. Le
sol est dénudé, prêt à être battu. par les pluies et transformé en bourbier, puisque
le réseau racinaire a été arraché et le sol pulvérisé par les chenilles.
Quand on ne peut
défricher à la scie mécanique et débarder progressivement, on propose l'usage de la
lame KG formée d'un éperon pour éclater les souches et d'une lame qui va scier la
souche au ras du sol.
Après le passage de la
lame KG, la surface du sol est encore couverte par la litière, les souches restent dans
le sol tout comme le réseau racinaire. Le sol souffre beaucoup moins de ce mode de
défrichement.
S'il n'est pas possible de
laisser en place les branches (car le travail du sol est motorisé), mieux vaut brûler
sur place le menu bois pour y libérer la minéralomasse plutôt que de la pousser sur les
andins.
PLANCHE 6 : REFORESTATION EN
ZONE SOUDANO-SAHELIENNE
Pour créer un bois de
village, le chef de terre a donné le terrain le plus mauvais ! Après défrichement, et
récolte des piquets pour former la clôture contre la divagation du bétail, on ouvre les
potets. Comme le sol gravillonnaire est très pauvre et stocke très peu d'eau, finalement
rien ne pousse et la terre est encore plus dénudée qu'avant. Si par bonheur les jeunes
arbres se développent avant que les piquets, grignotés par les termites, ne
s'écroulent, personne n'assure l'entretien du massif, ni les éclaircies nécessaires car
on ignore qui est le propriétaire du bois: l'Etat ou les paysans ? Yatenga, Burkina Faso.
Reforestation sur demi
lune sur cuirasse gravillonnaire: dans cet exemple, les eaux ont surtout profité aux
graminés annuelles mais quelques arbres survivent encore au bout de six ans (acacia,
neem, eucalyptus). En dehors de la zone gravillonnaire, les demi-lunes disparaissent en un
ou deux ans sur ces sols sableux très fragiles. Gourga, Burkina Faso.
Reforestation sur
alignement de pierres. Après aménagement en cordons pierreux continus disposés en demi
lune, les villageois ont planté sous grillage divers arbres autochtones (à peine visible
au premier plan) et des eucalyptus. Le sarclage est assuré par les femmes qui ont la
permission de faire une culture d'arachides: les eucalyptus ont bien profité des eaux de
ruissellement. Au premier plan les piquets soutenant le grillage sont détruits par les
termites au bout de 3 ans; coût du grillage: 10 000 FF/ha ou 2000$, ce qui empêche de
généraliser son usage. Ilonga, Burkina Faso.
PLANCHE 7 : REEFORESTATION EN
ZONE SOUDANO-SAHELIENNE
Protection des arbres
autours des habitations par un fagot d'épineux, un panier tressé ou un muret de briques
à claire voie. Yatenga, Burkina Faso.
Certains paysans ont
développé des variantes forestières de la méthode du Zaï (voir plus loin). Au
sarclage, ils préservent quelques tiges forestières provenant des graines contenues dans
la poudrette enfouie dans la cuvette du Zaï. Après cinq ans, lors d'une première
éclaircie, on choisit quelques tiges pour créer un parc d'acacias. Le reste est rabattu
pour produire du bois de feu. Cet aménagement a un effet très positif sur la
restauration de la fertilité des sols, sur le ruissellement, sur l'érosion hydrique et
éolienne car les arbres piègent les feuilles et les limons soufflés par le vent sec
(harmattan). Gourga près de Ouahigouya, Burkina Faso.
Bocage de haies
vives: Ziga, près de Ouahigouya, Burkina Faso. Dans une zone dénudée, un projet du
Centre Régional pour l'Agriculture (CRPA) a sélectionné différentes espèces capables
de former des haies vives. Acacia nigritiana s'est montré efficace non seulement pour
créer une haie résistante au bétail, mais aussi pour réduire l'érosion éolienne.
Sous sa protection, un tapis herbacé s'est développé naturellement qui ralentit le
ruissellement et l'érosion en nappe. Ailleurs, le Ziziphus mauritiana a été
préféré par les paysans car il est aussi résistant mais peut fournir du fourrage et
des fruits vendus sur les marchés.
PLANCHE 8 : DRS
La banquette algérienne
de diversion a été conçue pour évacuer les eaux de ruissellement du champs (fragilisé
par le travail du sol) vers un exutoire protégé. Pour tenir compte de l'augmentation des
apports d'eau, la pente du canal doit augmenter de 0,2 à 0,4 %, mais ici les eaux
s'accumulent en un point bas et risquent de déborder, de raviner le versant ou de
provoquer des glissements. La reforestation en Pins d'Alep par les forestiers sur les
terres communales n'est pas respectée: les plus beaux arbres sont prélevés avant
maturité et la litière de Pin n'améliore guère le sol ou très lentement. Milliana,
Algérie.
Des banquettes ont été
construites sur les versants d'un plateau calcaire pour favoriser l'infiltration et la
croissance d'arbres fruitiers. Aucune trace de ruissellement, ni sur le versant, ni dans
l'exutoire ! Le bon état de ces banquettes ne suffit pas pour justifier cet
investissement ! Y a-t-il des risques graves de ruissellement ? Bel-Mezioude, Algérie.
La croûte calcaire de ce
sol brun a été défoncée par un sous-solage profond. Les pierres ont été rangées en
cordons isohypses: à défaut d'arrêter le ruissellement, elles ont servi à construire
de nouvelles habitations. On peut se demander si les pierres sont plus efficaces
entassées sur des cordons ou étalées à la surface du sol où elles interceptent
l'énergie des pluies et du ruissellement ? Bel-Mezioude, Algérie.
PLANCHE 9 : DRS
Cette colline,
complètement ravinée, a été reforestée en Pins d'Alep voici quinze ans; à cause du
surpâturage, le sol est encore presque nu ! Cet investissement sur les plus mauvaises
terres est il rentable ? Pourquoi les paysans ne respectent pas ces efforts de l'Etat pour
sauvegarder leur environnement ? Probablement parce qu'ils considèrent que les
plantations d'arbres sont une tentative d'appropriation des terres par l'Etat. Oued Isser,
Algérie.
Reforestation d'un
"bad-land" après remodelage en banquettes d'un massif marneux. Au bout de douze
ans, les Pins d'Alep ont atteint 3 m sur les banquettes, mais couvrent moins de 50 % de la
surface du sol (trop peu pour maîtriser l'érosion) et sont attaqués par la chenille
processionnaire ! Il serait sage de diversifier les espèces plantées et introduire un
sous-étage herbacé. Seghouane, Algérie.
Reforestation d'une
colline semi-aride (pluie de 250 à 350 mm) après remodelage en gradins. Après 17 ans,
le taux de reprise des pins est satisfaisant, mais leur taille et le taux de recouvrement
du sol est très faible à cause du pâturage et de la sécheresse. L'intervention
musclée des forestiers sur ces terres communales de parcours dégradés n'est guère
appréciée par "les bénéficiaires": pour protéger le barrage il faut trouver
d'autres stratégies et des compensations pour les paysans pauvres dont l'élevage est la
seule ressource. Relizane, Algérie.
PLANCHE 10 : STRUCTURES
ANTIEROSIVES EN ZONE SOUDANO-SAHELIENNE
Pour ralentir le
ruissellement en nappe, étaler les crues, piéger les matières organiques et lés
sables, les paysans dressent des alignements de pierres, de branches, ou d'herbes qui
laissent passer les eaux excédentaires. Ces alignements peuvent aussi servir pour
délimiter les parcelles et montrer ainsi les limites de la propriété. Yatenga, Burkina
Faso.
Alignement de pierres
consolidées par une ligne d'herbes au Yatenga, Burkina Faso. Les paysans peuvent
consolider leurs cordons pierreux par un semis d'Andropogon. Ceci permet d'économiser 50
% des pierres nécessaires. On peut en profiter pour réduire l'espacement entre les
cordons sachant que leur action améliorante est limitée à 5 m sur les pentes de 2 %.
L'Andropogon remplit de multiples fonctions: fourrage vert en saison sèche, paille pour
les toits et différents usages pour l'artisanat.
Dans les ravines et là
où le ruissellement en nappe ravinante est trop rapide, on est obligé de construire avec
des gros blocs de latérite une digue perméable dont le sommet horizontal permet de
ralentir les crues, de recharger la nappe et de piéger les matières fertilisantes. Digue
filtrante au Yatenga, Burkina Faso.
Ces vingt dernières
années furent construites au Yatenga, des diguettes en terre sur 45 000 hectares.
Cependant, deux ans plus tard, rares sont celles qui sont encore fonctionnelles. En effet,
il s'agit de digues de diversion qui évacuent les eaux de ruissellement dans les parties
basses du paysage et en particulier dans les pistes ! Quand ils constatent que les digues
engorgent les parcelles à l'amont tout en dessèchant le sol à l'aval, les paysans
cassent ces diguettes pour rétablir l'irrigation de leur terre avec les eaux provenant du
sommet de la colline. Cette méthode de diversion est à éviter dans la zone
soudano-sahélienne où les micro-barrages perméables sont mieux adaptés. Ouahigouya,
Burkina Faso.
PLANCHE 11 : STRUCTURES
ANTIEROSIVES EN ZONE DE MONTAGNE
Terrasses ou gradins
méditerranéens construits au 14ème siècle par les Incas à Machu-Pichu, irrigables et
encore cultivées en céréales. Cette méthode exige un énorme investissement en travail
(600 à 1200 jours/ha) et en amendements (3 à 10 t/ha/3 ans de fumier + 2 à 5 t/ha/2 ans
de chaux). Elle n'est acceptable que si la terre est rare, la main-d'oeuvre abondante et
bon marché, et la culture rentable [photo De Jaegher].
Murets de pierres dans les
vallées: systemas andenes à Cuzco, Pérou. Pour valoriser les colluvions piégées dans
les vallées, les paysans ont construit des murettes en pierres permettant de gérer les
eaux de ruissellement et de protéger les terres cultivées [photo De Jaegher]
Au Népal, les versants
jusqu'à 60 % de pente sont aménagés de manière traditionnelle en petites terraces
progressives étroites. Les talus sont enherbés. Les pentes les plus vives sont couvertes
de prairies fauchées. Les fonds de vallées sont irrigués et cultivés intensément.
District de Gulmi, Népal [photo Ségala].
Sur les fortes pentes qui
entourent le lac Léman, Suisse, les vignerons ont construit des murets en pierres
cimentées ainsi qu'un réseau de routes stabilisées drainant tout le versant. Enfin, la
surface des champs est protégée par un lit de cailloux absorbant l'énergie des gouttes
de pluie. En principe, les vignes se développent rapidement à l'abri de ce mulch de
cailloux. La vigne permet d'amortir de tels investissements.
PLANCHE 12 : MOUVEMENTS DE
MASSE
Glissement en lave
torrentielle à Khef el Hamar, près de Médéa, Algérie. Un pan de colline s'est
effondré dans la ravine lors d'une pluie exceptionnelle formant une lave torrentielle
rouge de 1 km de long. Il s'agit de marnes gypseuses donnant lieu à la suffosion
(érosion en tunnel par dissolution du gypse).
En montagne, après des
pluies diluviennes saturantes, la gravité associée au ruissellement et aux alternances
gel-dégel provoque le mouvement d'énormes éboulis rocheux (pierriers). Equateur [photo
De Noni].
Glissement en coup de
cuillère: Biscuicuy, Venezuela. Les versants schisteux (ou marneux) donnent naissance sur
fortes pentes à des décrochements qui basculent en contre pente comme si l'on y avait
donné un coup de cuillère. Par la suite, il s'accumule de l'eau au pied de la contre
pente qui peut donner naissance à une ravine laquelle efface les traces du glissement.
Ces glissements en planche
de la couverture pédologique sur schiste illustrent les dangers d'exploitation des pentes
vives, déséquilibrées par les pistes et le surpâturage. District de Gulmi Népal
[photo Ségala].
PLANCHE 13 : RAVINEMENT
Profonde ravine en
"V" dans un massif marneux d'el Oued Isser, Algérie. La pente qui intercepte
les vents humides est en équilibre et couverte de végétation; la pente sèche est
raide, instable, sapée à la base et dénudée. Les versants reculent à mesure que la
marne s'altère et que le ruissellement chasse les sédiments accumulés au fond de la
ravine. Une simple seuil en grillage suffit parfois pour stabiliser les versants.
Ravine en "U".
Lorsque le matériau cisaillé par le ruissellement est hétérogène, la ravine
développe des lèvres verticales et évolue par éboulement suite à la pression de la
nappe phréatique à la base. C'est le cas des "lavakas" de Madagascar où le
ruissellement pénètre d'abord les horizons résistants, riches en argile et en fer, puis
les altérités ferrallitiques particulièrement peu cohérentes.
Les arbres n'arrêtent pas
le ravinement, une fois qu'il est déclenché. Les racines peuvent aider à armer les
berges, mais lors des crues les plus fortes, les eaux tourbillonnent autours des souches
et creusent les berges. Vénézuéla.
Ravinement en tunnel, Oued
Mina, Algérie. Dans les marnes gypseuses, les eaux s'infiltrent par des fissures,
dissolvent les sels solubles et creusent des tunnels à l'origine de ravinements
difficilement maîtrisables. On peut trouver des phénomènes semblables dans les
vertisols profondément fissurés et lorsque des animaux fouisseurs provoquent la
pénétration des eaux de surface dans leur tunnel.
PLANCHE 14 : TRAITEMENT DES
RAVINES
Pour traiter une ravine
sur marne située à faible distance d'un barrage (Oued Sikak, Algérie), l'ONTF a
construit de gros ouvrages en gabion. Or au bout de 5 ans, il n'y a toujours pas de
sédiments piégés ! Il semble que cet énorme investissement soit inutile: cependant, il
se pourrait que les seuils se remplissent lors d'une averse de fréquence rare.
A Madagascar (plateau
central), les paysans excellent à transformer les ravines en casiers rizicoles. A l'aide
de mottes d'herbes, ils réalisent des murettes en terre qui retiennent l'eau et les boues
apportées par l'érosion des berges et des collines soumises aux feux de brousse: ils y
consacrent ensuite tout le fumier disponible. Les collines ne portent que de maigres
cultures peu exigeantes (manioc et parcours extensifs).
Jardins de ravine: Petite
vallée de Nippe, Haïti. Comme les roches basaltiques s'altèrent rapidement, il est
possible de piéger des sédiments fins derrière des seuils en sacs plastiques remplis de
terre: ceux ci doivent être protégés du soleil. La terrasse formée est alors fumée et
plantée de cocotiers, bananiers, manguiers, canne à sucre et divers fourrages.
De la route de crête, le
ruissellement a creusé une jeune ravineau dans la couverture pédologique. Aussitôt, le
paysan l'a planté de bananiers, de bambous, de cannes à sucre et de diverses herbes
fourragères. L'énergie du ruissellement est dissipée sur les végétaux et la ravine
est stabilisée. Jacmel, Haïti.
PLANCHE 15 : TRAITEMENT DES
RAVINES
En tête de ravine, on a
implanté une série de seuils en gabion, en pierres sèches, ou en grillage. Dès la
deuxième année, les ouvrages se sont trouvés recouverts de sédiments et il a fallu les
rehausser pour atteindre la pende d'équilibre permettant au versant de se couvrir de
végétation naturelle. Souagui, Algérie.
Une ravine aménagée se
comporte comme un oasis linéaire. Trois ans après l'aménagement des seuils et la
plantation des arbres dans les sédiments, la ravine s'est couverte de végétation
naturelle qui contraste avec l'aridité du milieu environnant. Etant donné le coût
important de l'aménagement des ravines, il est intéressant de valoriser ces
aménagements et d'y intéresser les riverains. Souagui, Algérie.
Derrière les seuils en
pierres sèches s'est accumulée une masse de sédiments de quelques mètres cubes. Dans
les pores de ces sédiments s'est infiltrée l'eau qui représente 20 % en eau libre et
autant en eau absorbée utilisable par les plantes. Après deux ans d'aménagement, la
masse des sédiments a donné naissance à une source qui, une fois captée, a permis
d'irriguer quelques arbres. Souagui, Algérie.
Seuils légers constitués
de grillage de fer ou de plastique (à maille d'un cm) tendu sur des fers cornières de 2,
5 m enfoncés sur 50 cm dans le sol et stabilisés par des tendeurs en fil de fer
galvanisé. Leur efficacité s'est avérée au moins égale et même supérieure aux
gabions susceptibles de souffrir de renards, tunnels sous le seuil qui peuvent vider tous
les sédiments accumulés en une seule crue. Le prix de ce seuil varie de 30 à 20 % du
prix des gagions. Souagui, Algérie.
PLANCHE 16 : EROSION EOLIENNE
Nuage de poussières fines
(en suspension) soulevées à l'approche d'une "tornade" à Déou, NE du Burkina
Faso [photo Ségala].
Formation d'une petite
dune sur le fond d'une cuvette de débordement du fleuve Bani, Mali. Le sol est revêtu
d'une croûte de sédimentation, lacérée par les grains de sable qui circulent en nappe
à sa surface. Dès que des herbes arrivent à s'installer, le vent est ralenti, les
grains de sable sont piégés. Il se forme alors une petite dune (Nebkra) laquelle sera à
l'origine du redémarrage de la végétation (piégeage des graines et de l'eau).
Envahissement d'un paysage
texan par les dunes de sable: saltation à "Big Sprint" [photo Fryear].
Reg à la surface d'un sol
brun calcaire érodé: Darna, province de Cyrénaïque en Libye. Ces plateaux de sols
bruns calcaires semi-arides sont balayés par les vents et le ruissellement qui poussent
les particules fines jusqu'en bas de pente et dégagent la croûte calcaire: c'est ainsi
que se forme un "reg". L'olivette est un des derniers témoins de la forêt
primitive de cette région qui fut jadis le grenier à blé des romains.
TABLEAU 17 : Effet du feu de
brousse sur le ruissellement d'une parcelle (Gonse: 1967-1973) (d'après Roose, 1979;
Roose et Piot, 1984)
| | Protection intégrale | Feux précoces | Feux tardifs |
Précipitations (mm) | | 674 et 799 | 759 et 810 | 553 à 691 |
KRAM | % | 0,2 | 2,5 | 15 |
KRMAX | % | 1 | 10 | 50 à 70 % |
Erosion | kg/ha/an | 40 | 140 | 400 |
Couvert végétal | % | 85 à 95 | 50 à 85 | 10 à 55 |
L EFFET DES FEUX DE BROUSSE [planche
photographique 4]
Sous savanes ou vieilles jachères
protégées, depuis quelques années, les ruissellements moyens (KRAM = 0,02 à 5 %) et
les ruissellements maxima ne sont guère plus élevés que sous forêt (Saria, 1971-74,
Korhogo, 1967-75: Roose, 1979 et 80).
Par contre, la situation est
radicalement différente si des feux interviennent chaque année. L'exemple de
Gonsé est significatif à cet égard (tableau 17). Il apparaît en effet une différence
très nette de couverture du sol au cas où le feu traverse une parcelle.
Si le feu est précoce (un
mois après la dernière pluie utile), il passe vite, brûle les parties aériennes
desséchées, mais ne détruit ni les souches d'herbe ni les grosses branches d'arbres. Il
élimine par contre les jeunes semis, la litière de feuilles mortes et bon nombre
d'insectes et de ravageurs.
Les feux tardifs comme on
peut en voir dans les savanes soudaniennes et soudano-sahéliennes au mois de mai juste
avant les pluies, sont catastrophiques. En effet, les herbes étant très sèches à cette
époque, le feu s'attarde sur chaque souche d'herbe, détruit la moindre paille, les
parties aériennes des buissons et parfois même les grands arbres. Le sol est
pratiquement nu et restera très mal protégé pendant au moins un an. Les averses
orageuses battent alors la surface du sol et forment une pellicule de battance très peu
perméable qui donne naissance à d'abondantes nappes de ruissellement.
Par contre, si la parcelle est
totalement protégée du pâturage et des feux, les hautes herbes et les buissons
prospèrent, les jeunes semis d'arbres se multiplient, couvrent entièrement le terrain en
deux à quatre ans, produisent une abondante litière qui absorbe totalement l'énergie
des gouttes de pluie et favorise l'activité de la faune, laquelle perfore les horizons
superficiels.
Les essais sur les jachères de
Saria au Centre du plateau Mossi, mettent bien en lumière l'influence des pailles
résiduelles laissées sur le sol depuis fin 1971 (tableau 18). En 1971, le ruissellement
est très élevé; il atteint 40 et 50 % car la jeune jachère est encore peu couverte et
la plus ancienne est pâturée de façon extensive. Au cours des deux années de
protection intégrale, le ruissellement et l'érosion se sont maintenus à un niveau très
bas; à peine quelques pour-cent de ruissellement. En avril 1974, avant les premiers
orages, toutes les herbes et les feuilles sèches couvrant la surface des parcelles ont
été ramassées. Les coefficients de ruissellement moyens et surtout maxima sont
aussitôt remontés de plusieurs pour-cent sans pour autant retrouver le niveau initial
car les souches d'herbes sont reparties vigoureusement dès les premières pluies et la
mésofaune n'a pas trop souffert.
TABLEAU 18 : Influence de la
protection intégrale sur le ruissellement mesuré sous deux jachères* (Saria, Burkina
Faso) (d'après Roose, Arrivets et Poulain, 1979)
Années | 1971 | 1972 | 1973 | 1974 |
Précipitations mm | 602 | 724 | ,672 | 714 |
Ruissellement: | | | | |
| - sur jeune jachère | KRAM % | 20 | 5 | 6 | 8 |
| | KRMAX % | 51 | 29 | 22 | 30 |
| - sur vieille jachère | KRAM % | 10 | 0,4 | 0,3 | 3 |
| | KRMAX % | 41 | 2 | 1 | 8 |
Erosion kg/ha: | | | | |
| - sur jeune jachère | 700 | 43 | 19 | 720 * |
| - sur vieille jachère | 17 | 9 | 10 | 35 * |
* En 1974, avant les premiers
orages, exportation de la litière et de toutes les pailles.
L'EFFET DU MODE DE GESTION DU FEU
SUR LA NATURE DU COUVERT VEGETAL
A quelques kilomètres de Bouaké
(centre Côte d'Ivoire), le CTFT a installé dans les années 1950, un essai très
démonstratif sur l'effet du feu sur la savane guinéenne (pluie 1 200 mm en quatre
saisons) de la station forestière de Kokondekro.
Sur un sol ferrallitique de versant,
trois parcelles d'un hectare furent isolées par des coupe-feux et soumises chaque année
soit au feu tardif, soit au feu courant précoce, soit à la protection intégrale. Au
bout de trente ans, on pouvait faire les observations suivantes:
- sur la parcelle soumise aux feux (annuel, tardif), la végétation arborescente a pratiquement disparu pour laisser la place à une savane herbacée;
- sur la parcelle soumise aux feux courants précoces, un mois après la dernière pluie utile, de hautes herbes partagent la surface avec une végétation arbustive, pyrophile, rabougrie, difforme, mais assez abondante;
- sur la parcelle protégée intégralement (à peine deux feux accidentels en 30 ans !), les herbes ont pratiquement disparu: elles ont été étouffées par une forêt secondaire très dense, riche en lianes et en sous-bois, beaucoup plus vigoureuse que la savane environnante brûlée presque chaque année, composée de grands arbres dominants (10 à 30 arbres/ha) et d'un mélange de hautes herbes et de nombreux arbustes.
Bien qu'on n'ait malheureusement
aucune donnée sur l'évolution du sol ni sur le ruissellement, on peut observer que le
feu a une influence déterminante sur le développement des graminées et des arbres et
sur la diversité des espèces en présence.
L'EFFET DES TOUFFES D'HERBE
En l'absence de feu et de pâturage,
l'infiltration sur une vieille jachère mise en protection intégrale redevient bonne
après quelques années. En effet, si les tests d'infiltration au double anneau (Müntz)
ont montré que l'infiltration est très faible entre les touffes d'herbes, sur les plages
dénudées (infiltration = 1 à 20 mm/heure), elle est cinq à dix fois supérieure sous
les touffes d'herbes (infiltration supérieure à 100 mm/h). Les termites et autres petits
animaux y trouvent en effet un abri qui leur convient, y construisent des édifices très
temporaires et creusent des galeries qui, jointes aux canalisations laissées par les
racines pourries, favorisent l'infiltration (Roose, 1979). On conçoit dès lors, que plus
les jeunes herbes croissent, plus elles couvrent la surface du sol et dévient les gouttes
de pluie de leur trajectoire pour les guider vers la base des touffes où elles peuvent
s'infiltrer facilement. Il faut encore ajouter le rôle de frein, joué par les tiges des
plantes, par les racines subaériennes et surtout par la litière sur les nappes
ruisselantes. En diminuant la vitesse du ruissellement, on augmente le temps et le volume
d'infiltration. Ce freinage par les tiges des herbes est cependant plus efficace pour le
piégeage de la charge solide que pour la réduction du volume ruisselé.
CONCLUSION Quelle que soit la pente, les techniques culturales, la fragilité du sol et l'agressivité climatique, un couvert végétal complet (peu importe son architecture et sa composition botanique pourvu qu'il atteigne 80 %) assure une excellente conservation de l'eau et du sol. Son influence prime celle de tous les autres facteurs. C'est donc aux méthodes biologiques favorisant le couvert végétal qu'il faut s'adresser en priorité pour améliorer l'économie de l'eau, l'infiltration, la production de biomasse et la conservation du sol. Elwell (1981 ) a trouvé qu'il suffisait de couvrir 40 % du sol par les cultures pour réduire l'érosion de 80 % sur des oxisols au Zimbabwé, sols plus résistants que ceux que nous avons testés. Ceci montre bien les interactions qui peuvent exister entre le couvert végétal et le type de sol sur l'érosion. |
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