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Chapitre 2. Les effets des changements dans le cycle hydrologique mondial sur la disponibilité des ressources en eau


2.1. Méthodes d'évaluation
2.2. Les modelés de circulation générale
2.3. Les modelés hydrologiques
2.4. Changements récents de la précipitation globale
2.5. Changements récents du ruissellement global
2.6. Conclusions
Références

Terry E. EVANS
Ancien Directeur, Mott MacDonald Co., UK

Le développement de grands systèmes de ressources en eau peut prendre de 10 à 20 ans à partir de l'initiation des premières études jusqu'à la réalisation des projets. Par conséquent, une évaluation de l'impact du réchauffement global sur les ressources en eau est requis d'urgence. Le but de ce chapitre est de mettre en évidence les changements hydrologiques qui ont déjà eu lieu et d'évaluer si, à présent, nos connaissances sont suffisantes pour prédire les changements dans le cycle de l'eau avec assez de précision pour être de quelque valeur dans la planification des ressources hydriques.

Des méthodes pour évaluer la disponibilité future de l'eau sont discutées et des exemples d'études d'impact sont donnés en utilisant les résultats des Modèles de Circulation Générale (GCMs). A cet égard, Beran (1986) insiste sur la distinction à faire entre l'hydrologie et les ressources en eau disponibles. La première traite de l'évaluation de la ressource totale (écoulement naturel des rivières) tandis que les secondes exigent la quantification du montant exploitable.

La production agricole mondiale dépend fortement de l'irrigation. 16% des 1.500 millions d'hectares de sols cultivés dans le monde sont irrigués. Le réchauffement global doit probablement avoir un impact majeur sur le cycle hydrologique et, par conséquent, sur l'agriculture irriguée. Cet impact peut être plus significatif que l'effet direct des températures plus élevées. Même si cela peut être le cas, il est essentiel de considérer l'impact du changement de climat dans le contexte des autres principaux changements globaux. Les besoins en eau sont multi-sectoriels et, déjà, l'irrigation est en compétition avec la production d'eau potable, industrielle et hydroélectrique ainsi qu'avec les usages environnementaux et pour la récréation, la plupart desquels impose un prix plus élevé. Dans beaucoup de pays du Moyen-Orient et d'Afrique, les ressources en eau sont presque complètement exploitées et les approvisionnements devront doubler dans les 20 à 30 prochaines années pour conserver le statu quo actuel aussi insatisfaisant soit-il. Lorsque le problème de l'accroissement des niveaux de pollution de l'eau est ajouté dans l'équation, une situation de "l'Eau en Crises" se présente (Gleick, 1993).

Malheureusement, dans la plupart des cas, l'hydrologie est traitée à une échelle nationale plutôt que régionale, continentale ou globale. Elle dépend très fort d'un ensemble de données précises. Avec des agences de ressources en eau qui sont généralement des petites unités ayant une faible priorité dans de gros ministères, le financement est tombé si bas que, dans la majorité des pays africains, on ne collecte plus de données fiables (Banque Mondiale/UNDP/ADB/EC/Gouvernement Français, 1993). La gravité du problème doit encore être abordée. Cependant, la Banque Mondiale pousse en avant une nouvelle "Approche Intégrée de Gestion des Ressources en Eau pour l'Afrique Sub-Saharienne et autres régions du monde", l'OMM tente d'établir un "Système Mondial d'Observation du Cycle Hydrologique (WHYCOS)" et la FAO met sur pied un programme pour développer une base de données mondiale sur l'eau capable de modélisation hydrologique utilisant le Système d'Information Géographique (SIG) et la télédétection.

Dans ce chapitre, sont discutés certains problèmes associés au changement de climat et au cycle de l'eau.

2.1. Méthodes d'évaluation

Des approches différentes peuvent être utilisées pour estimer l'effet du réchauffement global sur les ressources en eau, dont les principales sont:

· l'utilisation des enregistrements instrumentaux;
· les analogues paléoclimatiques;
· les résultats des Modèles de Circulation Générale (GCMs)

Dans la première approche, la variabilité naturelle du climat est utilisée pour prédire les tendances de précipitations pendant les séquences d'années extrêmement sèches ou humides. Des difficultés apparaissent à cause de la courte période d'enregistrements quoique les techniques de génération de données stochastiques peuvent être utilisées pour étendre la base de données. Cependant, sur des périodes de temps aussi limitées, des variations à long terme de la végétation, des températures de la surface des mers, des courants des océans, etc., auxquelles on pourrait s'attendre avec un doublement des contraintes atmosphériques tel que celui du CO2 ne sont pas prises en compte de façon adéquate. Indépendamment de cette limitation, des changements à long terme du ruissellement de surface ont eu lieu au cours des 30 dernières années dans un certain nombre de grands bassins versants, spécialement en Afrique. Récemment, une sérieuse évidence scientifique a aussi été produite pour suggérer que de tels changements sont directement liés au réchauffement global déclenché par l'augmentation de gaz anthropiques à effet de serre (Thomson, 1995; Hadley Centre, 1995). Alors que certaines tendances enregistrées dans l'écoulement des rivières sont du même ordre de grandeur que celui attendu dans un scénario de 2xCO2, un examen des changements récents dans le cycle hydrologique contribue à une compréhension des problèmes associés aux changements à long terme dans les ressources en eau en général (voir section 2.5. Changements récents dans le ruissellement global).

Les analogues paléoclimatiques rentrent dans la même catégorie que les enregistrements instrumentaux quoiqu'avec des inconvénients évidents: l'estimation des climats passés est extrêmement douteuse et fragmentaire. Leur principal avantage se trouve dans la possibilité de couvrir la gamme des températures probables pour le siècle prochain ou le suivant (Tableau 2.1).

Tableau 2.1. Températures globales historiques

Augmentation moyenne globale des températures par rapport au temps présent

Date

+ 1,5°C

6000 BP

+ 2,5°C

125000 BP

+ 4,0°C

4000000 BP

Des études récentes suggèrent que les températures globales pendant les âges glaciaires précédents variaient largement sur des périodes aussi courtes que des décennies ou des siècles (Heinrich, 1993) et les températures n'étaient relativement pas constantes comme on l'a généralement supposé (Maslin, 1993).

Il n'y a pas non plus de consensus parmi les scientifiques à propos de la cause première des changements passés des températures dans l'atmosphère terrestre ou du déclenchement des âges glaciaires; elle n'était certainement pas anthropogénique. Le point de vue généralement accepté est que les changements dans le rayonnement solaire reçu à la surface de la terre sont les premiers instigateurs (Milankovitch, 1930). Cependant, comme la recherche aujourd'hui couvre de nombreuses disciplines, il y a eu une prolifération de nouvelles théories relatives aux facteurs de contrôle responsables de la production d'optimums aux âges glaciaires et postglaciaires. Les théories actuelles concernent aussi bien la vitesse de formation de la croûte terrestre, l'étendue des tourbières, l'émanation de méthane des mers peu profondes suite à la formation de glace marine, le rythme de formation des montagnes et l'érosion qui en résulte ainsi que les dépôts sédimentaires dans les océans, les modifications cycliques de production des icebergs qui affectent la "bande transporteuse" océanique nord-sud, probablement due à l'instabilité de la chaleur piégée sous les glaciers, etc. Jusqu'à ce que les facteurs accidentels impliqués dans le changement passé du climat soient connus, il ne serait pas sage de supposer qu'ils n'auraient pas d'influence sur la détermination du climat résultant; une hypothèse inhérente à la méthode de l'analogue climatique. L'occupation actuelle du sol, la végétation, la couverture glaciaire, la composition atmosphérique, etc. sont vraisemblablement toutes trop différentes de celles des optimums postglaciaires précédents pour faire une comparaison de valeur seulement spéculative entre les climats passés et présents.

Les GCMs sont les seuls outils crédibles pour prédire le changement climatique et fournir les données d'entrée des modèles. Malheureusement, pour le moment, il n'est pas possible d'utiliser les sorties de précipitation obtenues par les GCMs comme entrées directes des modèles hydrologiques. Les données de sortie ne sont pas suffisamment précises pour simuler des séquences journalières et mensuelles (voir Tableau 2.2).

Cependant, l'usage des GCMs est le seul moyen d'avancer. Avec une meilleure compréhension et une meilleure modélisation des systèmes (particulièrement la circulation océanique et la phase terrestre du cycle hydrologique) et de plus grandes mémoires d'ordinateur, ce n'est qu'une question de temps avant de remédier à ces déficiences.

Tableau 2.2. Comparaison entre la pluie observée en Angleterre et celles estimées à partir de trois modèles de circulation globale (GCMs) (Arnell et al., 1990)

Source

Décembre-Février

Valeur observée

2,5 mm/jour

GCM du Service Météorologique Britanique (UKMO) (Bracknell)

1,2 mm/jour

GCM du centre national de recherches Atmosphériques (NCAR) (Boulder, Colorado)

3,4 - 4,5 mm/jour

GCM de l'Institut Goddard pour les Etudes Spaciales(GISS) (New York)

3,4 - 4,5 mm/jour

2.2. Les modelés de circulation générale

Un modèle GCM typique a quatre composantes: atmosphère, terre, océan et glace marine. Puisque les quatre modèles sont interactifs, ils doivent fonctionner tous les quatre pour faire tourner un GCM. Au début, le modèle atmosphérique a été développé à un haut degré de sophistication alors que la phase terrestre et les composantes océaniques étaient très simplistes.

Le ruissellement a deux entrées dans les simulations des GCMs (Rowntree, 1989). La première, à la frontière entre l'atmosphère et la surface du sol où les transferts de flux sont convertis en ruissellement de surface et, la seconde, entre l'océan et la terre où les hydrographes d'écoulement sont requis comme données d'entrée du modèle océanique. A présent, ni l'une ni l'autre ne sont simulées avec une précision suffisante. Kite et al. (1994) ont montré certains problèmes liés à la modélisation GCM du cycle hydrologique, particulièrement le manque de transfert latéral d'eau adéquat. Le problème du cheminement inadéquat du ruissellement de surface est mis en lumière par les études de Semtner (1984, 1987). Une réduction de l'écoulement d'eau douce dans l'Océan Arctique aurait un effet significatif sur le gradient de salinité et le calcul montre que l'écoulement des mers de Kara et de Barent serait divisé par deux si les rivières qui s'y écoulent en étaient totalement dérivées. Les océans sont donc très sensibles aux entrées d'eau douce.

Il a été démontré qu'un degré élevé de "recyclage" de la pluie a lieu au-dessus des terres et si, notamment, l'évaporation du sol est fortement réduite ou supprimée, il en résulte une diminution significative des précipitations (Shukla et Minz, 1982; Hall et Sarenije, 1993). Pour déterminer l'évapotranspiration réelle, il faut une évaluation précise du ruissellement de surface. Les GCMs actuels n'y arrivent pas. Par conséquent, il est probable que des raccourcis dans la modélisation du cycle de l'eau réduisent leur précision comme Rind et al. (1990) l'ont illustré. Le GCM du GISS et d'autres modèles semblent sous-estimer grandement l'évapotranspiration réelle (ET) en surestimant la diminution de la transpiration avec l'élévation du déficit de l'humidité du sol. Par exemple, le rapport ET réelle/ET potentielle aux USA dans les conditions climatiques présentes fut estimé par le GCM à 0,23 alors que ce rapport devrait être compris entre 0,6 et 0,9. Une différence aussi grande est due en partie à la mauvaise représentation de la couverture végétale dans la phase terrestre des GCMs. Rind (1995) en conclut que la perte en ET a été sérieusement sous-estimée par les GCMs et que la hausse de 9 à 15% de la précipitation globale n'est pas compatible avec un accroissement de 30% de la capacité atmosphérique de rétention de l'eau qui correspond à 4°C de réchauffement. Soit les estimations de pluie sont sous-estimées, soit des sécheresses beaucoup plus sérieuses auront lieu sur les continents.

Initialement, le changement de climat a été vu de façon très compréhensible comme un problème météorologique. L'importance de l'interface atmosphère-océan était connue de longue date mais c'est seulement maintenant que les résultats des modèles couplés deviennent disponibles. Des améliorations semblables sont nécessaires dans les composantes du cycle hydrologique. L'expérimentation énergie globale et cycle de l'eau (GEWEX) du programme de recherche sur le climat mondial de l'ICSU/OMM/IOC devrait fournir l'élan pour de telles améliorations. Cependant, jusqu'à ce que la phase terrestre soit modélisée adéquatement par les GCMs, il y a peu d'espoir de pouvoir utiliser les données avec confiance dans la planification des ressources en eau. En outre, les études d'impact de bassins versants faites jusqu'à présent ont été basées sur des résultats obtenus à partir de GCMs à régime permanent et où les océans sont modélisés comme des couches fixes. A cause de cette limitation majeure, ils n'ont été utilisés que pour simuler des états d'équilibre tel que 1x ou 2xCO2, alors qu'aucun de ces états n'est ou ne sera en équilibre. Tous les GCMs sont structurellement semblables, contiennent les mêmes algorithmes de base et incluront les mêmes erreurs. Par conséquent, il est assez surprenant que des différences aussi grandes soient produites dans les résultats (voir Tableau 2.2 et Figure 2.1). Les modèles à régime permanent sont relativement stables et ne souffrent pas aussi fortement de problèmes de démarrage à froid et de dérives que les modèles à régime transitoire. A cause des défauts des modèles à régime permanent, la fiabilité des résultats, surtout la précipitation, est sérieusement compromise. La gamme des résultats de différents modèles à régime permanent est en général si large qu'il est souvent impossible de déterminer le signe de la modification du ruissellement sur de vastes régions ou même sur certains continents. A cause de ce problème, certains chercheurs ont utilisé les résultats de plusieurs GCMs et calculé des niveaux de probabilité pour les diminutions (ou les accroissements) de températures et de précipitations (Howell et Allan, 1994). Bien que les résultats d'une telle approche par analyse de risque sont un guide utile pour la planification des ressources en eau lorsque toutes les autres incertitudes sont incluses, de telles études ont peu de valeur pratique dans la planification détaillée du développement futur des ressources en eau, à part pour rendre le planificateur conscient de l'incertitude accrue due au changement de climat.

Une amélioration significative des dernières années a été le développement en transitoire de GCMs couplés avec les océans. Cependant, le temps ordinateur utilisé et les coûts de fonctionnement de ces modèles sont pour le moment exorbitants. Comme mesure intermédiaire, des techniques ont été développées pour une remise à échelle des résultats des modèles à régime permanent et pour les intégrer à ceux des modèles individuels en transitoire pour obtenir une indication des modifications temporelles (Viner et Hulme, 1993). La Figure 2.1 montre la gamme des changements estimés des précipitations en utilisant les résultats de sept scénarios (Tableau 2.3) de GCMs sur la période de 1990 à 2050. Les changements de précipitation bas et hauts sont basés sur les limites de confiance inférieure et supérieure de 90%. Bien que cette approche permette de modifier les résultats des modèles en permanent pour fournir des données à différents horizons de temps, de sérieux inconvénients liés aux résultats de ces modèles demeurent.

Figure 2.1. Comparaison des pourcentages de variation entre les moyennes annuelles basses et élevées des précipitations estimées à partir de scénarios composite d'un modèle GCM (1990-2050) (d'après Hulme, 1994)

La première expérience avec un modèle en transitoire (UKTR) entreprise par le Hadley Centre (Hadley Centre, 1992) a déterminé la réponse du climat pour une augmentation de la concentration en CO2 de 1 % par an sur une période de 75 ans. L'hémisphère nord se réchauffait deux fois plus vite que l'hémisphère sud. L'élévation de température de l'Antarctique était de même grandeur que celle de l'hémisphère sud dans son ensemble, c'est-à-dire très différente des résultats antérieurs des modèles en permanent. De plus, à cause de la grande inertie des océans, l'élévation de température dans l'expérience du modèle en transitoire était seulement 60% de celle du modèle en permanent. Cependant, le changement de précipitation globale était semblable à celle produite par les premiers GCMs du Bureau Météorologique d'Angleterre. De récentes expériences (Hadley Centre, 1995) ont tenté de modéliser les changements historiques du climat de 1860 à 1990 en injectant pour la première fois les effets atténuants des émissions d'aérosols sulfatés. Les résultats sont encourageants et les renversements anormaux de l'élévation globale de température pendant le début des années 1940 ainsi que le réchauffement rapide à partir de la moitié des années 1970 sont reproduits par le modèle. Il devient évident que les changements climatiques enregistrés pendant ce siècle sont consistants avec ceux attendus du fait des émissions accrues de gaz à effet de serre.

Malheureusement, les GCMs couplés en transitoire ne sont pas encore capables de reproduire les configurations dynamiques régionales de la température de surface de la mer, ni les modifications associées de précipitation, avec la précision suffisante pour simuler les tendances de précipitation régionale qui ont eu lieu pendant ce siècle. Pour y arriver, il serait nécessaire de comprendre les mécanismes qui déclenchent l'Oscillation Sud et être capable de les simuler ainsi que ceux du système convoyeur de l'océan Atlantique Nord et des autres circulations océaniques significatives. Par conséquent, il n'est pas possible de confirmer à présent à partir des résultats des GCMs en transitoire que les changements globaux de précipitation enregistrés sont le résultat direct du réchauffement global. Jusqu'à ce que de telles calibrations soient effectuées, les résultats de précipitation des GCMs, en régimes permanent et transitoire, resteront spéculatifs et ne devraient pas être utilisés directement dans la planification de nouveaux projets de développement de l'eau.

2.3. Les modelés hydrologiques

2.3.1. TYPES

Les modèles discutés ici concernent la phase terrestre du cycle hydrologique. Ils génèrent l'écoulement des rivières et la recharge des nappes d'eau souterraine. Le plus communément utilisé est le modèle déterministe. C'est un modèle de type "conceptuel" utilisé en hydrologie de bassins versants pour simuler, à divers niveaux de détail, les processus physiques impliqués dans le transfert des flux d'humidité: depuis l'interception, l'évapotranspiration, les variations de teneurs en eau dans le sol, le ruissellement de surface, l'infiltration, la percolation, le stockage de l'eau souterraine et le cheminement en rivière. On essaie d'en faire des processus groupés et ils sont le cheval de bataille de l'hydrologie appliquée des bassins versants. Un préalable essentiel à l'application de ces modèles est un haut niveau de calibration basé sur des données enregistrées.

Beaucoup de recherches en hydrologie pure visent à l'amélioration des processus pris séparément et à l'obtention d'une meilleure représentation spatiale des données d'entrée. Cela devrait éventuellement réduire l'importance de la calibration. Cependant, il y a des écueils à l'emploi d'une représentation sur-sophistiquée d'un ou deux processus du cycle de l'eau aux dépens d'une sur- simplification des autres, spécialement sans évaluation et vérification sur des bassins versants réels (Lockwood, 1985; Schnell, 1984). De même, les modèles statistiques et boîte noire, souvent basés sur des régressions, ont peu d'usage dans les études d'impact où beaucoup de paramètres affectant le ruissellement sont non-stationaires, par exemple, l'évapotranspiration, la végétation, l'occupation du sol, l'extraction d'eau souterraine, etc.

Les simples modèles de bilan en eau (Wigley et Jones, 1985), ou les modèles qui incorporent l'évapotranspiration en la basant seulement sur la température, ont aussi peu de valeur soit dans les études d'impact en matière de ressources en eau ou d'estimations générales des modifications régionales. Il n'y a pas de raccourcis pour évaluer les changements régionaux dans les ressources en eau sans impliquer toutes les composantes du cycle hydrologique à l'échelle d'un bassin ou d'un sous-bassin. Les échelles temporelles en hydrologie sont extrêmement importantes. Par exemple, dans les régions arides et semi-arides, le ruissellement annuel dépend des intensités horaires de la pluie tombant sur des superficies relativement petites ainsi que de la percolation dans le lit des rivières. Le temps pour atteindre le pic de crue dans des bassins de plusieurs milliers de kilomètres carrés peut n'être que d'une ou deux heures. Dans de tels bassins, l'intensité de la pluie est aussi cruciale pour le ruissellement que la quantité. De même, une évapotranspiration annuelle accrue de 25% dans un bassin où il ne pleut que quelques jours par an n'aurait que peu d'impact sur le volume ruisselé. Des modèles simples de bilan en eau annuel et mensuel fonctionneront de manière satisfaisante dans de telles conditions. Dans des bassins où le stockage de l'eau dans le sol est significatif, le ruissellement est gouverné par le stockage disponible et l'intensité de la pluie. Dans la simple équation du bilan:

Q = P - E

où Q = le ruissellement de surface, P = la précipitation, E = les pertes du bassin, Q n'est pas indépendant de E et, si traité comme tel, produira une distorsion significative lors du calcul des changements de Q relatifs à ceux de P et de E (Wigley et Jones, 1985).

Tableau 2.3. Caractéristiques des sept GCMs expérimentés (Hulme, 1994)

Sigle du modèle

Résolution

Transfert de chaleur par les Océans

D Teq (°C)

D Peq (%)

W (%)

Référence

Longitude

Latitude

1 GISS

10,0°

7,8°

Fixé

4,2

11

5

Hansen et al.(1984)

2 GFDL

7,5°

4,5°

Aucun

4,0

9

10

Wetherald et Manabe (1986)

3 LLNL LLNL)

5,0°

4,0°

Océan à 2 couches

3,8

11

5

W.L. Gates (pers. comm.,

4 ECHAMI-LSG

5,6°

5,6°

Océan à 11 couches

1,6

3

10

Cubasch et al. (1992a)

5 OSU

5,0°

4,0°

Aucun

2,8

8

20

Schlesinger et Zhao (1989)

6 UKLO

7,5°

5,0°

Fixé

5,2

15

15

Wilson et Mitchell (1987)

7 UKHI

3,75°

2,5°

Fixé

3,5

11

35

Mitchell et al.(1990)

Note: D Teq et D Peq indiquent la sensibilité des modèles pour le scénario 2 x CO2 (sauf pour le modèle 4). W = pondération pour tirer les précipitations moyennes du modèle, basée sur les tendances globales des coefficients de corrélation
GISS: Goddard Institute for Space Studies
GFDL: Geophysical Fluid Dynamics Laboratory
LLNL: Lawrence Livermore National Laboratory
ECHAM-LSG: European Centre Hamburg Model - Large Scale Geostrophic
OSU: Oregon State University
UKLO: United Kingdom Meteorological Office - Low
UKHI: United Kingdom Meteorological Office - High

Dans beaucoup de bassins versants, la géologie et le couvert végétal peuvent être aussi extrêmement variables. Ces paramètres à eux seuls produisent de fortes différences dans le ruissellement saisonnier et annuel. Par exemple, dans le bassin de la rivière Canje en Guyane, la moitié du bassin est couvert de forêts tropicales à voûte fermée et est constituée par des "Sables Blancs" perméables; le reste du bassin est largement couvert de savane et constitué de sédiments relativement imperméables. Le résultat en est que les rapports de ruissellement (Q/P) en saison humide sont environ 0,15 en région forestière et 0,85 dans la savane; les valeurs correspondantes en saison sèche sont 0,50 et 0,10 (MacDonald, 1965).

2.3.2. L'INTERFAÇAGE DES GCMS ET DES MODELES HYDROLOGIQUES

II y a de nombreuses façons d'utiliser les données de sortie des GCMs pour fournir les entrées des modèles hydrologiques. La plus évidente est de prendre les simulations GCM des pluies journalières, de la température et des autres variables météorologiques et d'en alimenter directement un modèle hydrologique calibré. Malheureusement, les sorties de précipitation des différents modèles en permanent sont extrêmement variables (voir Figure 2.1 et Tableau 2.2). En plus, à cause de la manière avec laquelle les nuages et la précipitation sont modélisés, les GCMs produisent des simulations non réalistes des pluies journalières. Une approche alternative est d'utiliser la "modification" des pluies, températures et autres variables climatiques pour produire soit directement des séries temporelles perturbées soit stochastiquement des séquences de situations humides ou sèches quantifiées sur base de distributions de probabilité conditionnelle. Cette dernière méthode est un compromis pour couvrir les inadéquations des sorties GCM et produire des séquences de données plus réalistes. De même, les configurations de pressions régionales générées par les GCMs peuvent être employées avec un modèle régional multivarié adéquat pour générer des séquences de précipitation et d'évapotranspiration (Mott MacDonald, 1992, 1993). Cependant, les configurations de pressions ne peuvent pas être utilisées directement pour produire des séquences climatiques. Aucune des méthodes utilisées ne donne plus de confiance aux résultats qu'à des approximations de valeur limitée dans la planification des ressources en eau.

2.3.3. ETUDES D'IMPACT DU CHANGEMENT DE CLIMAT

Jusqu'à aujourd'hui, la plupart des études d'impact entreprises n'ont pas employé de modèles hydrologiques qui simulent convenablement la nature transitoire des paramètres du cycle de l'eau. Peu d'entre elles ont même essayé d'y inclure des modifications dans la demande en eau.

De nombreuses études d'impact ont trouvé que les modifications dans les vitesses d'évapotranspiration liées au réchauffement global n'ont qu'un effet marginal sur le ruissellement par rapport aux modifications dans les précipitations. On s'est posé des questions sur ces conclusions. Rind et al. (1990) ont suggéré que la plupart des GCMs ne parviennent pas à simuler la phase terrestre de façon satisfaisante et sous-estiment les vitesses d'évapotranspiration réelle. L'effet d'une évapotranspiration potentielle accrue peut réduire considérablement le ruissellement de surface dans les tropiques (Rind, 1995). En outre, seuls des changements de température ont été souvent utilisés pour estimer des modifications dans l'évapotranspiration. A nouveau, ceci sous-estimera l'évapotranspiration réelle (Arnell et Reynard, 1993). Finalement, beaucoup d'études ont employé des modèles hydrologiques simplifiés, souvent du type bilan en eau, pour analyser les modifications du ruissellement (Wigley et Jones, 1985). On peut facilement démontrer que de telles méthodes sont inappropriées.

L'Institut d'Hydrologie (IH) a entrepris une étude d'impact pour 21 bassins versants en Angleterre et au pays de Galles (Arnell et Reynard, 1993). Le scénario le plus humide produit un accroissement général du ruissellement moyen à travers l'Angleterre et le pays de Galles tandis que le plus sec produit une réduction. Cependant, les résultats les plus intéressants concernent les changements en évapotranspiration. Trois scénarios différents d'évapotranspiration potentielle (ETP) ont été examinés: des changements d'ETP basés sur: Cas 1- des températures accrues seulement; Cas 2- des modifications de température, de rayonnement net, d'humidité relative et de vitesse du vent; Cas 3- Cas 2 plus des modifications dans la conductance stomatique et la surface foliaire. Les résultats sont donnés au Tableau 2.4.

Tableau 2.4. Scénarios de changement de l'équilibre climatique pour 2050 (Arnell et Reynard, 1993)

Paramètre Climatique

Changement annuel en Angleterre et au pays de Galles

Température

+ 2.2%

Pluie

+ 4%

ETPb 1

+ 10%

ETP 2

+ 35%

ETP 3

+ 24%

Un trait important de ces résultats est l'augmentation assez dramatique de l'ETP prédite en Angleterre et au pays de Galles du fait de l'inclusion d'éléments climatiques autres que la température. La modification de l'humidité produit l'augmentation la plus significative de l'ETP calculée avec la formule de Penman-Monteith.

Kite (1993) a reconnu l'importance des modifications de la couverture du sol dans les études d'impact sur les ressources en eau. Le bassin versant de la Kootenay au Canada fut divisé en 50 Unités de Réponse Groupée (GRUs) et 10 divisions de couverture du sol donnant un potentiel de subdivision de 500 unités. Les données de couverture du sol sont des données satellitaires. Une bonne calibration fut obtenue en utilisant un modèle hydrologique distribué (SLURP). Dans le scénario 2 x CO2 avec des changements de la couverture du sol, la fréquence de hautes eaux a plus que doublé et, de façon surprenante, l'évapotranspiration a diminué de 10%.

Au cours du siècle dernier, le cycle hydrologique de la plupart des bassins versants a été sujet à de vastes modifications humaines avec la construction de réservoirs, des changements d'occupation du sol, des pompages en rivière, des extractions d'eau souterraine, des diversions inter-bassins, etc. De telles modifications altèrent les écoulements en rivière et l'hydrologie du bassin de façon significative. Par exemple, le Nil perd 10% de son débit à cause de l'évaporation au-dessus du réservoir du barrage d'Assouan en même temps que le Zambèse perd l'équivalent de presque 20% de son débit aux Chutes Victoria par évaporation du réservoir Kariba. A une échelle globale, on a estimé qu'au cours de ce siècle, le niveau des mers aurait monté de 2 mm par an au lieu de 1 mm par an enregistré s'il n'y avait pas eu d'augmentations de stockage en réservoirs et de pompages en rivières, surtout pour l'irrigation (Newman et Fairbridge, 1986). Par conséquent, il est important, dans les études d'impact, d'évaluer les modifications existantes dans les écoulements naturels des cours d'eau ainsi que les changements futurs de la demande et de l'approvisionnement en eau.

Il est évident que les projections sur la future disponibilité en eau produites jusqu'ici par les études d'impact n'ont qu'une valeur limitée dans les avant-projets actuels détaillés du développement de l'eau. Leur principale valeur réside dans l'amélioration des techniques de modélisation des impacts. A coup sur, trop d'effort a été mis dans les études d'impact aux dépens de la recherche orientée. Les estimations de l'effet du changement de climat sur la précipitation et l'évapotranspiration ne sont pas suffisamment précises pour fournir des prédictions hydrologiques crédibles.

2.4. Changements récents de la précipitation globale

2.4.1. PLUIES ENREGISTREES, 1931-1960 ET 1961-1990

Hume et al. (1992) ont préparé des cartes (voir Figures 2.2 et 2.3) montrant la précipitation globale ainsi que les changements annuels et saisonniers des précipitations entre les périodes allant de 1931 à 1960 et de 1961 à 1990. Les deux traits les plus marquants sont la Russie septentrionale avec un accroissement de la précipitation allant jusqu'à 20% et le Sahel africain, entre les latitudes 10°N et 30°N, avec une réduction des précipitations entre 20 et 50%. Des changements significatifs ont eu lieu sur tous les continents. Ces enregistrements des 60 dernières années ont une grandeur semblable aux changements prédits par les GCMs pour le scénario 2 x CO2 (voir Figure 2.4). Savoir jusqu'où ces changements enregistrés sont-ils liés à une radiation forcée due à une augmentation des gaz à effet de serre fait l'objet de contreverse. La réponse classique est de dire que la variabilité du climat masquera tout renforcement pendant deux décennies ou plus. Ce point de vue est maintenant remis en question par les résultats de plusieurs recherches récentes, notamment celle de Thomson (1995). Dans une étude majeure des variations solaires annuelles à la surface de la terre, il a été démontré que, du fait des approximations en usage avec l'année tropicale (d'équinoxe à équinoxe) dans le calendrier Grégorien plutôt que l'année "anomalistique" (de périhélie à périhélie), les dates de début de saisons devraient arriver plus tard chaque année pendant ce siècle. Un renversement a eu lieu en 1923 qui ne peut être expliqué par des changements du rayonnement solaire incident ou par d'autres phénomènes tels que la fréquence d'éruptions volcaniques ou l'Oscillation Sud mais il concorde complètement avec les hausses d'émissions de gaz à effet de serre enregistrées. De plus, si les élévations de températures globales enregistrées étaient dues à une activité plus grande du rayonnement solaire, alors les amplitudes de température saisonnière devraient augmenter. Or, c'est le cas inverse qui est cohérent avec l'effet de serre. En outre, la modélisation des changements historiques de climat (1960-1990) par le GCM du Bureau Météorologique du Royaume-Uni (Hadley Centre, 1995) a reproduit aussi bien les renversements anormaux de la température globale que les élévations rapides enregistrées plus tard au cours de ce siècle. L'évidence se renforce donc que les changements de climat enregistrés ce siècle sont le résultat direct des émissions accrues de gaz à effet de serre. Si tel est le cas, alors les modifications du régime d'écoulement des rivières pendant ce siècle présentent la plus belle preuve disponible de l'effet transitoire du réchauffement global pour la planification des ressources en eau.

Quoiqu'il n'y ait pas de résultat de GCM en transitoire pour faire des comparaisons entre le changement observé des précipitations enregistrées de 1931 à 1960 et celui de 1961 à 1990 (Figure 2.3), une comparaison intéressante peut être faite entre les conditions actuelles et celles prédites dans 50 ans (Figure 2.4). A l'échelle globale, la même tendance de changement est modélisée. L'exception significative est celle de l'Afrique au nord de l'équateur qui montre une précipitation accrue. La sécheresse sahélienne va donc être "améliorée" à un certain degré. Ceci concorde avec un renversement prédit du réchauffement hémisphérique avec le nord qui se réchauffe plus vite que le sud; une situation opposée à celle vécue ces 30 dernières années. Il est prédit que l'aridité va augmenter en Australie, une tendance apparue ces dernières années. Quoique clairement associée avec l'Oscillation Sud, cette tendance n'apparaît pas à l'échelle décennale dans les données de sortie des modèles.

Les autres continents montrent la tendance des 30 années passées. Cependant, une grande réserve doit être émise sur de telles prédictions des GCMs jusqu'à ce que les configurations des changements pluie/ruissellement vécues ces 100 dernières années auront été simulées avec précision. Ceci exige une compréhension bien meilleure de la circulation océanique.

2.4.2. FACTEURS AFFECTANT L'HYDROLOGIE AFRICAINE

L'effet Hurst

Hurst (1965) a montré que les inondations annuelles du Nil ne suivent pas la théorie classique d'un processus stochastique stationnaire. Le stockage estimé pour maximiser le débit du Nil était beaucoup plus élevé que ne l'indiquait la théorie classique. Par exemple, pour une période de 500 ans, Hurst a calculé un écart cumulé pour l'écoulement du Nil de 48 déviations standard par rapport à la moyenne comparées aux 28 théoriques. Ce problème fut un élément dominant de la recherche hydrologique pendant les années 1970. Dans une revue d'ensemble de la recherche sur le phénomène de Hurst, Klemês (1974) nous avertit des dangers d'illusion que les modèles statistiques, tel que le bruit Brownien fractionné avec son acceptation implicite de mémoire infinie, puissent être utilisés pour expliquer le phénomène. Un modèle opérationnel très performant peut être totalement inacceptable d'un point de vue physique- le modèle planétaire de Ptolémée, par exemple. Klemês a aussi démontré que le phénomène de Hurst pouvait être produit avec une procédure à mémoire nulle et des moyennes non-stationnaires. Klemês a même suggéré que les modèles opérationnels du futur peuvent revenir à des extrapolations basées sur une saine connaissance à court terme plutôt que sur des données synthétiques à long terme basées sur "l'ignorance et des suppositions".

Depuis les années 1970, l'intérêt s'est estompé d'essayer d'expliquer mathématiquement pourquoi tant de séries naturelles à long terme suivent des distributions qui ne sont pas gaussiennes. Avec le développement de la modélisation des processus physiques, les mécanismes qui peuvent conduire à une persistance de haute et de faible précipitation sont mieux compris.

Les processus physiques de feed-back

Le climat de l'Afrique est assez unique. Comparée aux autres continents, l'Afrique au sud des monts Atlas n'a pas de barrières montagneuses continues, soit longitudinales ou latitudinales, pour perturber la circulation. Par conséquent, ses climats et ses variations saisonnières sont peu compliqués et gouvernés dans une forte mesure par l'oscillation du front intertropical qui suit le soleil sur son passage entre les deux hémisphères.

Figure 2.2. Précipitations globales approximatives

Figure 2.3. Pourcentage de variation des précipitations annuelles de 1931-1960 à 1961-1990 (d'après Hulme et al., 1992)

Figure 2.4. Variation de précipitations moyennes annuelles (mm/j) (1995-2045) (d'après Hadley Centre, février 1995)

Dans une reconstitution des séquences des sécheresses historiques et des périodes humides d'Afrique, Nicholson (cité dans Tyson, 1987) a clairement démontré que le climat africain fait le pont entre les deux hémisphères. Les années de sécheresses extrêmes de 1972 et 1984 qui ont dévasté la région du Sahel de la côte atlantique à l'Éthiopie sont reflétées à l'évidence dans les écoulements du Nil, du Chari, du Zaire, du Niger, du Zambèse et de l'Orange au cours de ces années-là. Quoiqu'il y ait un degré élevé d'homogénéité entre les fluctuations climatiques dans le nord et le sud du continent, les influences de systèmes à aussi grande échelle que l'Oscillation Sud et l'Oscillation Atlantique, toutes deux guidées en partie par les variations de température de la mer et les moussons d'Asie, génèrent des anomalies spatiales au sein des extrêmes climatiques des différentes régions d'Afrique.

Il y a une tendance pour une bande équatoriale à travers l'Afrique de réagir dans une direction opposée au reste du continent en termes de précipitation. Ceci a été bien démontré par les récents hauts niveaux enregistrés aux lacs Victoria, Tanganyika et Malawi. Peut-être l'exemple le plus clair de cette anomalie est que les écoulements plus élevés du Nil Blanc, dont la source est en Afrique équatoriale, ont persisté depuis 1961 alors que le Nil Bleu a souffert des plus révères réductions de débits enregistrés au cours de ce siècle ou des 1.300 dernières années si on accepte les enregistrements du Nilomètre de Roda comme fiables (Howell et Allan, 1994). Il semble que, pendant les années très sèches et très humides, tout le continent peut être affecté seulement par de faibles déviations. Nicholson (1986) a isolé quatre modes préférentiels différents de climat au-dessus du continent africain. Ces modes sont:

· régions subtropicales nord et sud sèches; régions équatoriales humides;
· régions subtropicales nord et sud humides; régions équatoriales sèches;
· tout le continent sec;
· tout le continent humide.

Des modes, continent sec et région subtropicale humide, ont dominé le continent depuis 1970.

Du point de vue de la planification des ressources en eau, le souci majeur est de savoir si oui ou non la sécheresse qui a débuté à la fin des années 1960 au Sahel et qui a dominé en Afrique méridionale à travers les années 1980, va continuer. Un point de vue qui a été fortement soutenu dans le passé en Afrique du sud est l'existence d'un comportement cyclique (Tyson, 1987). De telles fluctuations, et particulièrement la persistance d'un climat où une année sèche semble être suivie par une autre et une année humide par une autre année humide, peuvent être expliquées par des processus de réaction biogéophysiques à court terme, appelés les effets "Joseph" et "Noah": une diminution de la végétation provoque une augmentation de l'albédo et des pertes de rayonnement, un refroidissement de la surface et une plus grande stabilité atmosphérique qui réduit les précipitations et encourage la persistance (Charney, 1975). Des persistances semblables sont obtenues en abaissant les niveaux d'humidité du sol lors de simulations avec des GCMs. Ceci indique l'importance de la pluie elle-même dans l'initiation d'un processus de feed-back significatif et par l'augmentation du nombre de particules atmosphériques dans les tempêtes de sable. De tels processus de feed-back ont toujours existé et expliquent l'effet de Hurst. Ils expliquent presque certainement une. bonne partie de la persistance naturelle des séquences d'années humides et d'années sèches existant dans la région du Sahel alors que les fluctuations de la température de surface de la mer jouent aussi un rôle.

Dans le passé, les ingénieurs en ressources en eau se sont appuyés sur des données statistiques, soit historiques ou générées stochastiquement, pour estimer les débits de façon fiable. Les tendances à long terme sont généralement ignorées à moins que des explications physiques puissent être avancées pour justifier leur inclusion. A cet égard, la sécheresse au Sahel se maintient depuis presque 30 ans. Ceci suggère qu'elle a été maintenue par des facteurs responsables autres que le processus de feed-back normal. Le réchauffement global est une explication évidente.

Les causes globales

La recherche d'une explication causale de la sécheresse en Afrique a reçu un élan de la part du Bureau Météorologique du Royaume-Uni (Folland, 1986) qui a démontré une forte corrélation entre les anomalies de température de surface de la mer à une échelle globale et les périodes humides et sèches au Sahel. Après la moitié des années 1960, un refroidissement marqué des océans de l'hémisphère nord et simultanément un réchauffement de l'hémisphère sud ont été observés. Un renversement eut lieu vers 1970 et, depuis lors, les températures dans les deux hémisphères ont augmenté. Un graphique de la série temporelle des différences de températures de surface de la mer (sst) entre les océans des hémisphères nord et sud avec les anomalies de précipitations au Sahel montre une forte corrélation négative. La corrélation entre les températures de surface des océans de juillet à septembre et les pluies au Sahel pendant la période de 1901 à 1984 était -0, 62 ce qui est significatif à un niveau de probabilité de 99, 9% (voir Figure 2.5). Des essais numériques avec des GCMs en permanent sur des températures de la mer imposées furent aussi entrepris par le Bureau Météorologique du Royaume-Uni (UKMO) et furent capables de dupliquer les réductions de précipitation au Sahel pendant les récentes années de sécheresse: 30% de réduction sur l'Ouest du Sahel, 20% sur l'Est et jusqu'à 50% sur les montagnes du Sud Soudan et le nord-est de l'Éthiopie.

Le réchauffement observé et inattendu des océans du sud à un rythme plus rapide est considéré comme étant dû à une réduction dans le transfert de chaleur de l'hémisphère sud vers celui du nord bien que les mécanismes détaillés du transfert font encore l'objet de beaucoup de recherche. Des scénarios alternatifs comprennent une circulation accrue des eaux profondes dans l'Atlantique de 1960 à 1970 et l'effet d'aérosols sulfatés qui dominent dans l'hémisphère nord. Cependant, si la réduction de transfert de chaleur est liée au système transporteur nord-sud combiné à un ralentissement de la formation d'eaux profondes dans l'Atlantique nord à hautes latitudes du fait de la réduction de l'extension des glaces (Street-Perrot et Perrot, 1990), alors la sécheresse au Sahel peut persister jusqu'à ce qu'une plus grande masse de terres puisse dominer les effets du ralentissement du transfert océanique et l'effet d'atténuation des aérosols sulfatés. La confirmation dépendra des développements de la recherche dans les modèles détaillés des GCMs couplés en transitoire qui peuvent être calibrés par rapport aux climats et températures de la mer récents. Il est vraisemblable que les résultats des GCMs en régime permanent permettront d'espérer une fois de plus que des modèles couplés soient développés.

Un scénario plausible du futur réchauffement global relie un appauvrissement des puits de carbone et de rayonnement dans les régions polaires avec une formation réduite d'eaux profondes à cause de transferts de chaleur moindres de l'hémisphère sud vers le nord. On postule que les réductions aux puits de rayonnement et de CO2 pourraient générer des réactions positives significatives menant à une augmentation du réchauffement global (Lewis, 1989).

2.5. Changements récents du ruissellement global

2.5.1. LE LAC TCHAD

Le lac Tchad est situé à la limite du Sahara entre les latitudes 12°N et 14°30'N et les longitudes 13°E et 15°30'E. Le lac n'a pas d'exutoire vers la mer et est le centre principal d'un bassin de drainage interne de 2.500.000 km2 qui collecte les eaux de l'Algérie, du Tchad, du Niger, du Nigéria, du Cameroun, du Soudan et de la République Centre Africaine. Plus de 90% de l'alimentation totale du lac vient du système de cours d'eau Chari-Logone qui commence à la partie sud du bassin et couvre de l'ordre de 570.000 km2. Le lac Tchad est localisé au centre du Sahel, défini par une bande de précipitations entre 250 et 500 mm qui traverse l'Afrique sous le désert du Sahara. Le lac Tchad est peu profond; ses profondeurs moyennes sont comprises entre 1, 5 et 5 m, c'est-à-dire que sa surface est très sujette aux variations des débits d'entrée. Le lac a de nombreuses particularités. Bien que le bassin soit fermé, l'eau du lac demeure douce. Sa superficie va de 100 km2 pour le "Grand Tchad" à 10 à 30 km2 pour le "Petit Tchad". Le renouvellement de l'eau a lieu tous les ans ou tous les deux ans avec un volume annuel moyen de 30 à 40 km3, En temps normal, l'eau salée est poussée vers le nord ouest du lac où sa salinité est concentrée et une percolation naturelle vers le nord maintient le bilan de sel en équilibre.

Des études de faisabilité ont commencé en 1972 pour examiner l'irrigation des terres qui bordent le lac Tchad au Nigéria. Le résultat est que le Projet d'Irrigation du Tchad Sud (SCIP) fut conçu pour une réalisation en trois étapes dont deux ont été exécutées: l'Étape 1 en 1979 et l'Étape II en 1983. Une station de pompage d'une capacité totale de 103 m³s (la capacité actuelle est de 75m3/s) fut construite pour pomper l'eau du lac vers un canal. Le périmètre complet a une superficie de 66.000 ha et détournera à peu près 3% de l'entrée d'eau au lac Tchad. Le tracé du périmètre est basé sur des unités de 4 ha pour procurer une existence plus sûre à 16.000 foyers ou une population de 100.000 personnes. Il est prévu de produire deux récoltes par an en riz (50%), coton (20%) et blé (60%) avec une intensité de culture de 130%.

Figure 2.5. Tendances de la pluie au Sahel et les différences de la température de surface de la mer entre les deux hémisphères (d'après Folland et al, 1986). (a) tendances de la pluie au Sahel;

Figure 2.5. Tendances de la pluie au Sahel et les différences de la température de surface de la mer entre les deux hémisphères (d'après Folland et al, 1986). (b) différences de la température de surface de la mer (sst) (hémisphère sud, y compris l'océan Indien, moins l'hémisphère nord)

Vers la moitié des années 1960, le lac Tchad a atteint des records de niveau séculaire permettant de spéculer que le "Grand Tchad" serait rétabli comme les explorateurs l'avait observé au siècle dernier. Cependant, ceci ne se passa pas. Le niveau du lac s'abaissa pendant les années 1970 et, au moment où les études de faisabilité furent complétées, il était au même niveau qu'au cours de la première moitié du siècle. Personne n'avait anticipé la diminution drastique de la pluie qui a eu lieu depuis (Figure 2.6).

L'attaque soudaine de la sécheresse dans les années 1970 résulta en une sévère contraction de la taille du lac. Son caractère se transforma en un delta marécageux à l'embouchure du Chari avec de pénibles conséquences pour les communautés riveraines et le périmètre d'irrigation du SCIP.

En 1973, le lac Tchad se divisa en deux bassins nord et sud, et dès 1976, son niveau était descendu en dessous du lit du canal d'amenée. Quoique les niveaux d'eau d'octobre et novembre en ont fourni assez pour irriguer les cultures de blé planté en novembre, la pénurie d'eau de juin à septembre a empêché la culture principale, le maïs. Les deux bassins sont restés séparés et, depuis 1983, les niveaux ont continué à chuter empêchant même l'irrigation de la saison d'hiver. Le périmètre est maintenu en bonne condition en attendant la remontée du lac.

La raison de la baisse du niveau du lac est simplement que les écoulements dans le bassin des rivières Chari-Logone ont tari. Le débit total en 1984 n'était seulement qu'aux environs de 20% de la moyenne à long terme. Depuis 1971, les écoulements ont été réduits à 50% de la moyenne annuelle à long terme de plus de 40 km3, alors que la précipitation est estimée n'être tombée qu'à 25%. De tous les bassins majeurs du monde, le lac Tchad est probablement celui qui a été le plus affecté par le changement de climat. Le périmètre d'irrigation le plus ambitieux construit en Afrique depuis la moitié des années 1940 doit encore être mis en opération pour de bon (Tableau 2.5 et Figure 2.7).

La chute du niveau du lac Tchad démontre l'effet d'une réduction des pluies de 25% sur le débit d'une rivière dans une région semi-aride où les gradients de précipitation sont forts et où des petits déplacements dans la circulation atmosphérique peuvent causer de grandes modifications de précipitation. Il en résulte que des propositions ont été avancées pour un vaste transfert inter-bassins du fleuve Zaïre au bassin du Chari. Avec un écoulement annuel de 1250 km3, l'approvisionnement potentiel est disponible.

Figure 2.6. Niveaux mesurés et reconstitués du lac Tchad (1870-1992)

Tableau 2.5. Ecoulement annuel de la rivière Chari (km3) à N'Djamena (1971-1992) (débit moyen avant 1971 - 40 km³/an)

Année

Ecoulement

Année

Ecoulement

Année

Ecoulement

1971

31

1978

29

1986

15

1972

18

1979

21

1987

10

1973

18

1980

25

1988

27

1974

29

1981

19

1989

16

1975

35

1982

21

1990

12

1976

29

1983

17

1991

19

1977

25

1984

7,5

1992

21



1985

17

Débit annuel moyen

22

Figure 2.7. Tendances par rapport à l'écoulement annuel moyen de la rivière Chari à N'djamena

2.5.2. LE NIL

Dans une large mesure, l'Egypte est restée indemne de la sécheresse grâce à l'important stockage inter-annuel du lac Nasser. Cependant, d'autres facteurs ont contribué à la réduction de l'impact de la sécheresse. Un de ceux-ci est le niveau exceptionnellement haut du lac Victoria qui a aidé à maintenir des débits plus élevés du Nil Blanc. Ceux-ci sont dus aux pluies très fortes au Kenya et en Ouganda entre 1961 et 1963 et au-dessus de la moyenne depuis lors. Les débits plus élevés du Nil Blanc ont aidé à compenser ceux plus bas du Nil Bleu qui a été plus sévèrement affecté par la sécheresse sahélienne.

La construction du haut barrage d'Assouan en 1963 autorise la régulation complète de la crue annuelle du Nil et un stockage inter-annuel suffisant pour approvisionner la part de l'Egypte de 55, 5 km3, suivant l'Accord sur les Eaux du Nil (1959), avec un niveau de fiabilité très élevé (96%).

Figure 2.8. Stockage utile du lac Nasser

Suite à l'interruption des écoulements des eaux du Nil en 1984 (un apport naturel de 59 km3 fut enregistré au lac Nasser, compare à l'écoulement moyen de 84 km3), il y eut une préoccupation considérable de voir les ressources du lac Nasser descendre à un niveau où l'approvisionnement aurait dû être réduit provoquant des implications agricoles et politiques (Figure 2.8),

L'effet de la sécheresse au Sahel sur les écoulements du Nil

A l'exception de la période de forts débits de la fin du siècle dernier, un trait important de la série des écoulements du Nil est la chute abrupte des débits à partir de la moitié des années 1960. Une analyse des données du Nilomètre de Roda indique aussi que, durant les deux derniers siècles, la variabilité de l'inondation annuelle dépassait de loin celle observée depuis que les enregistrements ont commencé en 622 (Howell et Allan, 1994).

La plupart des études antérieures des débits du Nil ont analysé les écoulements du fleuve à Assouan. Cependant, les enregistrements des deux dernières décennies ont démontré l'importance des différents régimes de précipitation dans les bassins du Nil Bleu et du Nil Blanc. Leur influence sur les écoulements des deux Nils peut être clairement vue en comparant les Figures 2.9 et 2.10. Les écoulements du Nil Blanc entre 1962 et 1985 ont cru de 32% ou 8 km3 au-dessus de la moyenne de 1912 à 1961. Cela s'est passé à un moment où les écoulements du Nil Bleu ont diminué de 9 km3 entre 1965 et 1986 ou 16% en dessous de leur moyenne de 1912 à 1964. On pourrait en inférer que les deux régimes de précipitation sont négativement corrélés. Cependant, les enregistrements montrent que la relation entre les entrées annuelles au lac Victoria et les écoulements du Nil Bleu à Khartoum est aléatoire (MacDonald, 1988). Cela contredit les résultats des GCMs qui suggèrent que la pluie sur les bassins du Nil Blanc et du Nil Bleu peuvent être corrélés négativement (Howell et Allan, 1994).

Les simulations du lac Nasser

Les séquences d'écoulements du Nil furent utilisées pour examiner la capacité des systèmes du Nil à supporter la sécheresse (MacDonald, 1988) au cas où la sécheresse du Sahel devient un trait persistant du climat de la région dans les décennies à venir. On a préparé deux séquences pour des sécheresses sévères et modérées (basées sur des statistiques d'écoulements de 1968 à 1988) et les résultats sont montrés dans le Tableau 2.6. Ils indiquent que les lâchés du lac Nasser devraient être réduits sous les 55, 5 km3 (part allouée à l'Egypte dans l'Accord sur les Eaux du Nil en 1959) à 52 et 49 km3 respectivement et que ces écoulements devraient être fiables à 87% et 88%, c'est-à-dire que les pénuries d'eau auraient lieu en moyenne respectivement durant 13 et 12 ans tous les 100 ans. L'effet de la sécheresse sahélienne sur l'écoulement du Nil et l'irrigation en Egypte, quoique problématique, ne serait en aucun cas aussi sévère qu'au lac Tchad. Même dans les conditions de sécheresse les plus sévères, il est prédit, en avant-projet, que l'écoulement du lac Nasser tomberait seulement de 55, 5 km3 à 48, 4 km3 ou moins de 15% quoique la sécurité d'approvisionnement tomberait de 96 à 88% (Tableau 2.6).

Figure 2.9. Tendances par rapport à la moyenne annuelle des écoulements du Nil Blanc à Mogren (1912-1989)

Figure 2.10. Tendances par rapport à la moyenne des écoulements du Nil Bleu à Khartoum (1911-1989)

Tableau 2.6. Résumé des simulations du réservoir du Lac Nasser.

Type de Séquence

Nombre total d'années

Lâchers du lac Nasser (km3)

Nombre d'années avec lâchers plus réduits

Rendement attendu (%)

Lâchers annuels minimal (km3)

Rendement moyen obtenu (km3)

1ier plus faible

2ème plus faible

3ème plus faible

Séquence de sécheresse modérée

400

52

13

87

39,6

40,1

41,3

51,2

Séquence de sécheresse sévère

100

49

12

88

38,9

39,8

40,4

48,4

Cependant, il y a des possibilités d'accroître l'approvisionnement par une réduction du débit de sortie et des pertes opérationnelles en mer et ce sera bien nécessaire pour satisfaire la demande accrue des municipalités et de l'industrie. Dans une étude récente sur la disponibilité en eau future dans le bassin du Nil, Conway et al. (1996) utilisèrent les résultats de GCMs pour modéliser le ruissellement en prenant en compte des modifications de la couverture du sol. Les changements dans la précipitation s'étalaient de +18 mm à +39 mm et les écoulements calculés du Nil passaient d'une diminution de 3% à une augmentation de 10%. Ces changements sont beaucoup plus petits que ceux enregistrés pendant ces deux dernières décennies.

Le bassin du Nil est un système fermé qui est très efficient (70%) en termes d'irrigation. Des améliorations de l'efficience sont donc limitées. Vu que le système est fermé, à long terme, un pompage accru des eaux souterraines ne représente pas un apport supplémentaire d'eau et ne procure que des bénéfices temporaires à court terme. Une économie potentielle d'eau existe dans la sélection de plantes cultivées moins exigeantes en eau et de variétés à courte durée de croissance (5% d'économie). Cependant, des approvisionnements significatifs pourraient être obtenus à partir du Sudd et autres marais du Soudan mais des contraintes politiques ou écologiques majeures s'y opposent. Nonobstant ces implications politiques et écologiques, il y a encore des perspectives pour le développement de l'eau dans le bassin du Nil. Pourtant, quand elles sont confrontées à l'explosion démographique de la région et aux problèmes possibles du changement climatique, la perspective n'est pas optimiste.

2.5.3. LES NIVEAUX DE LA MER CASPIENNE

Les antécédents

Une autre région qui a subi un changement majeur de ses ressources en eau est la Russie. La Volga qui prend sa source près de la Baltique et se déverse dans la mer Caspienne est le plus grand fleuve d'Europe avec 3.500 km de longueur. Son bassin versant qui couvre 1,5 million de km2 en fait un des principaux fleuves du monde. Il dépasse celui du Zambèse, de l'Indus ou du Gange. Environ 60% de son écoulement provient de la fonte des neiges. Trois grands fleuves, la Volga, l'Oural et le Térek contribuent pour 88% des apports dans la Caspienne dont 50% de la Volga. Elle est connectée par canaux à Moscou, Volgograd, Saint Pétersbourg et l'océan Arctique pour le trafic fluvial et avec des stations hydroélectriques et des systèmes d'irrigation étendus sur la côte nord de la Caspienne et autour de la mer d'Azov. Le bassin de la mer Caspienne est crucial pour l'économie de la Russie, de l'Azerbadjan, du Kazakhstan et de l'Ukraine.

La mer Caspienne a été appelée le plus grand lac salé du monde quoique sa teneur en sel ne vaut qu'un tiers de celle des principaux océans.

Elle n'a pas d'exutoire naturel. Elle couvre une superficie de 372.000 km2. Son niveau se trouve à -28,5 m sous le niveau des mers et son bassin versant s'étend sur environ 3,7 millions de km2. Une vaste plaine entoure l'exutoire de la Volga où la profondeur de la mer n'est que de 4 à 6 mètres. La capacité totale de la mer est de 66.960 km3 comparée à un apport annuel de 310 km3. Ce volume annuel ne ferait monter le niveau que de 0,8 mètre si on ne tient pas compte de l'évaporation. L'évaporation nette (évaporation - pluie) est donc près de ce chiffre. Etant une mer fermée, ses niveaux fluctuent avec les débits d'entrée et ont montré historiquement une large variation. Les développements dans le bassin de la mer Caspienne ont aussi réduits sérieusement les écoulements de la Volga. Les niveaux ont chuté dramatiquement à partir de 1930 pour atteindre un minimum en 1977. D'une façon surprenante, à partir de cette date, les niveaux ont commencé à remonter au point que des plans sont prêts pour atténuer des dégâts d'inondations. Cependant, sans des prédictions des niveaux futurs de la mer et une connaissance des processus qui causent les fluctuations, les tentatives pour réduire les dommages dus à des niveaux trop hauts ou trop bas sont vraisemblablement, à la fois, inefficaces et non économiques.

Le développement de l'eau

La Volga joue un rôle vital dans la vie économique des états qu'elle traverse. Elle est utilisée pour:

· la navigation (151.000 km de voies d'eau connectent l'océan Arctique à la mer Caspienne dont les canaux de Moscou et du Volga-Don ainsi que la voie d'eau Volga-Baltique, tous avec une profondeur de navigation de 4, 5 mètres);

· la production d'électricité (une série de 11 stations hydroélectriques d'une capacité de 11.000 MW);

· l'irrigation (dans les bassins Caspienne-Azov, quelque 7,5 millions d'hectares d'irrigation ont été développés dont 4 millions utilisent des systèmes d'aspersion).

La consommation relative d'eau à venir a été compilée et les prévisions sont basées sur la construction des canaux d'irrigation Volga-Don et Volga-Chograi (Tableau 2.7, Berezner, 1987). Pour des prélèvements de 37 km3 et un débit résiduel de 266 km³/an, la mer Caspienne est en équilibre autour de -28,5 mètres sous le niveau des mers. Ce niveau est considéré comme à peu près optimum pour les pêcheries. Au cours du dernier millénaire, on pense que le niveau le plus élevé de -22 m a été atteint au 17ème siècle et les plus bas, -31 m au 15ème et -29 m en 1977, soit une gamme de 9 mètres (Figure 2.11).

A cause des développements de l'eau, vastes et dramatiques, réalisés par l'ex-URSS dans le bassin de la Volga depuis les années 1930, la première étape d'une évaluation quelconque est de rendre l'écoulement conforme aux conditions naturelles pour éliminer les influences des activités humaines (Vali-Khodjeni, 1991). Mais pour les développements massifs de l'eau, le niveau actuel de -27,7 m serait revenu à celui élevé de -26,2 m de 1929 (Figure 2.12). Les pompages dans la Volga contribuent donc à réduire le niveau de la Caspienne de manière significative, quoique imprévisible, en empêchant ainsi des dommages plus sérieux aux régions irriguées et au développement urbain proche de la mer (dont la plupart ont été développés dans les dernières années). Il y a donc un renversement dramatique de la situation depuis les problèmes de l'abaissement du niveau de la mer à ceux d'une montée de son niveau et des moyens de contenir l'élévation des eaux contre les inondations.

Entre les périodes 1931-1960 et 1961-1990, la pluie sur le bassin de la Volga a augmenté au-delà de 10% tandis que l'écoulement naturalisé à l'entrée de la mer Caspienne a crû d'une quantité semblable.

Le Comité Intergouvememental sur le Changement de Climat (IPCC, 1990) suggère des accroissements de précipitation entre 100 et 200 mm pendant l'hiver pour un doublement des gaz à effet de serre. Si cette prédiction s'avère correcte, il y aurait une augmentation très significative du ruissellement dans la Volga qui est alimentée de manière prépondérante à la fonte des neiges. La précipitation additionnelle tombera principalement sous forme de neige sur un sol gelé. En conséquence, il y aura peu de pertes et la plus grande partie de la neige supplémentaire sera convertie en ruissellement de surface et les débits de la Volga augmenteront substantiellement. Les écoulements dans la Volga pourraient croître entre 25 et 50%.

Tableau 2.7. Prélèvements d'eau dans la rivière Volga/Mer Caspienne, post-1930 (km³/an) (d'après Berezner, 1987)

Consommation d'eau

1980

1990

2000

2010

Approvisionnement en eau

5,6

7,3

9

10,5

Irrigation

18,6

23

33

36

Evaporation du réservoir

6

7

8

9

Remplissage des réservoirs

3

2

0

0

Transfert vers Kara-Bogaz-Gol

0

2

2

2

Consommation d'eau en Iran

3,5

4

5

6

TOTAL

37

44

57

63

Si le changement actuel du climat avec une précipitation accrue sur la Russie continue dans les prochaines décennies, il y aura probablement de sérieux problèmes de drainage et d'inondation de basses terres irriguées. Cependant, à long terme, l'eau additionnelle pourrait être extrêmement bénéfique au développement agricole dans le bassin sédimentaire de la mer Caspienne où 100.000 km² de terre sont sous le niveau de la mer. Alternativement, le surplus d'eau pourrait être utilisé pour remplir à nouveau la mer d'Aral: un écoulement annuel de l'ordre de 50 km3 serait requis pour remettre la mer d'Aral dans sa condition antérieure à 1960. Un surplus de 100 km³/an d'eau douce pourrait certainement trouver des amateurs au Proche-Orient quoique son transfert serait une formidable tâche.

Figure 2.11. Variation des niveaux de la mer Caspienne (1839-1987) (d'après Vali-Khodjeni, 1991)

Figure 2.12. Niveaux enregistrés et niveaux ramenés aux conditions naturelles de la mer Caspienne (1930-1990) (d'après Vali-Khodjeni, 1991)

2.6. Conclusions

1. L'effet du changement de climat sur les ressources en eau disponibles dans la plupart des régions, aussi significatif soit-il, sera faible comparé à la demande générée par l'accroissement de la population, l'industrialisation, l'urbanisation, les changements dans l'occupation du sol et l'amélioration du niveau de vie. Dans beaucoup de pays, les ressources sont déjà complètement exploitées et l'eau deviendra une matière première rare.

2. Malgré le fait que l'agriculture soit l'utilisateur le plus prolifique des ressources en eau mondiales, elle est plus vulnérable à la pénurie d'eau à cause de la plus haute priorité donnée à l'approvisionnement en eau potable et aux autres utilisateurs de haute valeur.

3. Les GCMs représentent la seule méthode plausible pour prédire l'effet du réchauffement global sur le cycle de l'eau. Malheureusement, les GCMs existants ne sont pas capables de produire des résultats de précipitation réalistes qui sont requis dans la planification des ressources en eau. Ceci est dû en partie non seulement à la manière dont les nuages et la précipitation sont modélisés ainsi qu'à une résolution grossière mais aussi à la représentation inadéquate de la phase terrestre et des systèmes océaniques dans les GCMs en régime permanent actuels et dans les nouveaux GCMs en régime transitoire. Par exemple, le transfert latéral d'eau et les influences artificielles ne sont pas prises en compte. A cause des relations interactives entre l'atmosphère, les terres et les océans, de telles simplifications affectent probablement les données de sortie des GCMs existants. Il en résulte que même le signe du changement de ruissellement sur des régions entières et sur certains continents ne peut pas être prédit avec certitude.

4. Jusqu'à ce que les GCMs puissent simuler les configurations de température à la surface de la mer et les changements de précipitation régionaux observés au cours de ce siècle (et les changements sont significatifs), les modifications futures de précipitation ne peuvent pas être prédites avec certitude.

5. Les prédictions d'un grand nombre d'études d'impact entreprises jusqu'à présent pour évaluer l'effet du changement de climat sur le cycle hydrologique peuvent être largement écartées. Leur valeur présente se situe dans l'amélioration des techniques d'étude d'impact plutôt que dans l'assistance à la planification du développement de l'eau. Cependant, beaucoup de recherche ont été orientées pour essayer de convertir les données inadéquates de sortie des GCMs en valeurs plus réalistes pour leur usage dans les études d'impact plutôt que de tenter de cibler des régions à problèmes spécifiques.

6. Les modèles déterministes qui représentent adéquatement le cycle de l'eau et qui sont calibres devraient être utilisés dans les études d'impact. Les modèles "boîte noire", de simple bilan en eau et stochastiques jouent un rôle limité dans les bassins dont les caractéristiques changent rapidement avec le temps.

7. Tous les modèles de bassins utilisés dans les études d'impact devraient être convenablement calibrés. La recherche dans le développement de logiciels en télédétection pour les systèmes à données satellitaires et leur interfaçage avec les SIG ainsi que de meilleures méthodes d'application à plus grande échelle de techniques physiques à petite échelle, réduiront éventuellement leur dépendance à la calibration. L'exigence de calibration dans les études de bassins versants s'applique aussi à la phase terrestre des GCMs.

8. Dans les conditions d'élévation de température, le couvert végétal des bassins changera de manière significative et les modèles hydrologiques utilisés dans les études d'impact devraient en tenir compte,

9. La plupart des études d'impact démontrent que le ruissellement de surface est plus influencé par les changements de précipitation que ceux d'évapotranspiration. Ceci provient en partie du fait que l'on ignore d'autres paramètres que la température tels que la vitesse du vent, le rayonnement net et l'humidité dans le calcul de l'évapotranspiration; des valeurs réalistes de ceux-ci sont difficiles à obtenir à partir des résultats des GCMs. Des études récentes montrent qu'une évapotranspiration accrue peut être plus significative que pensé précédemment quoiqu'une conductance stomatique et une surface foliaire réduites limiteront partiellement son effet.

10. Parce que les relations entre la pluie et le ruissellement sont non-linéaires, la réponse de ruissellement généré par la pluie est amplifiée. En plus, la pluie sur un grand bassin est intégrée en une seule valeur de ruissellement. Comme telles, les données d'écoulement sont un moyen très valable d'évaluer le changement de climat.

11. Les augmentations de précipitation globale prédites par les GCMs pour des scénarios 2xCO2 varient de 8 à 15% tandis que la capacité de rétention d'eau de l'atmosphère pour une élévation globale de 4°C augmentera de 30%. Dans des conditions transitoires, la terre se réchauffera plus vite que les océans, ce qui garantit que l'évaporation océanique (la précipitation globale) ne tiendra pas le pas avec l'évapotranspiration potentielle au-dessus des continents. Cette situation est susceptible de persister pendant au moins un siècle. En termes généraux, le ruissellement décroîtrait vraisemblablement à cause d'une aridité plus grande et une fréquence plus élevée des sécheresses pendant le prochain siècle si les prévisions de précipitation sont correctes.

12. Une recherche récente prétend que les changements de climat enregistrés pendant ce siècle sont dus à l'augmentation des gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Si c'est le cas, alors des informations valables devraient être obtenues à partir des modifications du régime d'écoulement enregistrées dans les bassins versants importants. Il est essentiel que les GCMs en transitoire soient capables de simuler ces modifications.

13. Des cas d'études sur le Nil, le lac Tchad et la mer Caspienne démontrent la forte sensibilité de l'hydrologie au changement de climat.

14. La collecte de données hydrométriques est essentielle au fonctionnement des systèmes de ressources en eau. Elle est aussi essentielle à la planification du développement de l'eau. Il est malheureux que la collecte de données a été presque abandonnée dans beaucoup de pays en développement. Les agences d'évaluation des ressources en eau sont invariablement des petites unités au sein de gros ministères sectoriels et y sont considérées de peu de valeur. Il est essentiel de remédier d'urgence à cette situation.

15. L'hydrologie devrait être traitée de la même manière à une échelle régionale, continentale et globale et non isolément à l'échelle nationale. Tout comme les paramètres climatiques, les écoulements en rivières sont liés à une échelle régionale, continentale et globale. Toute mesure qui favorise cette façon de travailler devrait être supportée par les gouvernements et les agences internationales.

16. Dans les régions où l'eau est critique, un stockage accru est souhaitable pour le développement soutenable de l'agriculture. Un changement mondial du climat risque d'exacerber les différences entre les régions riches et pauvres en eau. Le transfert de l'eau prendra donc une urgence et une importance accrues.

17. Des critères spéciaux pour les avant-projets en ressources en eau, qui prennent en compte le changement et la variabilité du climat, devraient être développés particulièrement pour les régions vulnérables du monde. L'étude hydrologique des projets de développement de l'eau devrait continuer à être basée sur les enregistrements hydrologiques passés. Cependant, l'avant-projet devrait considérer à la fois les extrêmes du passé et les scénarios des GCMs afin d'atteindre la souplesse nécessaire pour accommoder les changements possibles dans le futur.

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