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DOSSIER :
AQUACULTURE DE CREVETTES

DOSSIER

LA SITUATION MONDIALE DE LA CREVETTICULTUREPROBLEMES ET PERSPECTIVES

Production mondiale de la pêche et de l'aquaculture

De 1970 à 1989, la production mondiale de crevettes est passé de 1,08 millions de tonnes à 2,4 millions de tonnes (fig. 1). Les débarquements par pêches ont cependant atteint leur maximum depuis 1981 soit environ 1,75 millions de tonnes et le complément est venu ces dernières années du développement spectaculaire des crevettes tropicales d'élevage tant en Amérique latine que dans les pays du Sud-Est asiatique : 450.000 tonnes en 1988, 565.000 tonnes en 1989. En 1990, la production a atteint 663.000 tonnes représentant environ 25% du marché mondial alors qu'elles se situaient seulement aux environs de 2% en 1981.

FIGURE 1 - Production mondiale de crevettes de 1981 à 1990, en milliers de tonnes, poids vif (d'après LMR Shrimp Market Report)

FIGURE 1

Espèces d'élevage et principaux pays producteurs

Les crevettes se répartissent en trois groupes :

Seules les Penaeides et la crevette d'eau douce Macrobrachium rosembergii font l'objet d'élevage.

Sur les 663.000 tonnes (poids vif) de crevettes produites en 1990, la grande majorité venait de l'Asie (notamment de la région Asie-pacifique) :

Prévision sur l'évolution de la production mondiale de l'aquaculture de crevettes

Selon les experts, l'augmentation annuelle de 20–25%, constatée lors des dernières années est tombée à 17% en 1990 et devrait être de l'ordre de 10% en 1991 et ce, malgré les surfaces disponibles non encore aménagées. La pollution dans certains pays comme la Chine serait à l'origine de cette baisse.

La région Asie-Pacifique :

A l'horizon 1995–2000, la production de la région Asie-Pacifique pourrait dépasser les 600.000 tonnes par an. En effet, il existe de grandes surfaces non exploitées, notamment en Chine, en Inde, au Vietnam, aux Philippines et à moindre degré en Indonésie et au Sri-Lanka.

Le continent Américain :

Si l'aquaculture de crevettes en Amérique latine est récente, il n'en est pas moins vrai que l'Equateur représentait en 1990 le 4ème producteur mondial. Les surfaces disponibles y sont également assez importantes au Mexique, au Brésil, à Cuba et au Panama.

L'Europe :

Des élevages existent en France, en Italie et en Espagne. La production (P. japonicus) est à l'heure actuelle faible (de l'ordre d'une centaine de tonnes) et ne devrait guère se développer dans les années à venir.

L'Afrique :

La crevetticulture y est encore embryonnaire. Des potentialités se situent surtout en Afrique de l'Est et à Madagascar.

Le marché international de crevettes

Les U.S.A., le Japon et l'Europe de l'Quest constituent les trois principaux marchés internationaux de crevettes. Les U.S.A. et le Japon représentent les deux principaux marchés mondiaux, la consommation par tête d'habitant étant deux fois plus élevée au Japon (2,5 Kg/an) qu'aux USA (1,3 Kg/an) l'Europe de l'Ouest se place en 3ème position avec un taux d'accroissement très fort pendant la dernière décennie sur les crevettes tropicales.

Les crevettes se présentent sur le marché international sous de formes diverses vivantes, fraîches sur glace, congelées, en boîtes, cuites.

Elles peuvent être conditionnées :

La qualité du produit proposé et sa présentation sont déterminantes pour sa commercialisation.

Les crevettes sont vendues par catégories de tailles, nombre par livre ou par kilogramme, et plus elles sont grosses plus le prix est élevé. Sous forme congelée elles sont emballées en cartons de 5 livres ou de 2 kilos placés dans des “master cartons” pour l'expédition.

L'industrie distingue les crevettes selon leur couleur : blanche, brune et rose, et leur pays d'origine, les préférences varient d'un pays à l'autre. Sur le marché de détail, les crevettes sont vendues dans des paquets aux couleurs et dessins attractifs. En effet, la qualité du produit proposé et sa présentation sont déterminant pour sa commercialisation.

1. Le marché américain

En 1986, la consommation atteignait 270.000 tonnes dont 2/3 importées. En 1988, les USA ont importé 229.000 tonnes de la Chine, de l'Equateur et du Méxique, il est prévu que le marché continuera à augmenter parallèlement au taux d'accroissement de la population (1%) et à celui du revenu individuel (8,4% par an) - il n'y a pas de droit de douane sur les crevettes importées.

2. Le marché japonais

En 1988, le Japon a importé 260.000 tonnes de queues, soit 433.000 tonnes de produits frais fournis par l'Indonésie, la Chine, L'Inde, La Thaîlande, le Taiwam et les Philippines. C'est le plus grand pays importateur mondial de crevettes. Le marché japonais est très exigeant sur la qualité et la présentation et s'intéresse principalement aux calibres supérieurs. Fin 1989, la tendance du marché du P. monodon était à la hausse.

3. Le marché européen

La consommation qui atteint 150.000 tonnes/an est en augmentation. 30 à 40% de la consommation proviennent des crevettes tropicales et on s'attend à un taux d'accroissement de 5% par an. 45% de crevettes tropicales viennent d'Asie, 34% d'Afrique et 25% d'Amérique latine. Chaque pays d'Europe a ses propres habitudes et traditions. Pour les pénéides, les marchés des pays du Nord sont approvisionnés par les asiatiques, ceux de la France et de l'Espagne par les pays africains et ceux de l'Italie et de l'Espagne par les pays d'Amérique latine.

En conclusion, si les importations de crevettes d'élevage ont augmenté et augmenteront de 3% par an durant les prochaines années, elles ont entraîné une diminution des prix sur les tailles moyennes. Comme tout produit d'exportation, la crevette est en effet soumise aux variations de prix du marché mondial, surtout les crevettes de taille moyenne. Cependant, l'aquaculture offre certains avantages par rapport à la pêche crevettière :

CONTRAINTES MAJEURES ET EBAUCHE D'UNE STRATEGIE DE DEVELOPPEMENT DE LA CREVETTICULTURE A MADAGASCAR
M.AUTRAND, Consultant FAO

1. Le potentiel

L'évaluation du potentiel crevetticole de Madagascar a été réalisée à la suite de deux mission FAO (janvier 1988 et septembre 1990). Les sites étudiés concernent la côte Ouest de l'île et représente une surface totale utile de 55.000 ha.

Cette évaluation a été effectuée en prenant en compte des coefficients correcteurs dans les calculs de surface aménageables ainsi que certaines caractéristiques propres aux zones de sites (accessibilité, logistique, conditions d'environnement).

Une classification par ordre d'intêret a été réalisée, d'où il ressort que les sites de la côte Nord-Ouest présente les conditions d'environnement les plus favorables.
Ces sites sont des “tannes” (ou “Sira sira”) localisés en limite supérieure de la zone intertidale. Ils sont favorables à la construction de bassins d'élevage car il s'agit des grandes surfaces planes, argileuses, mais pour lesquelles il sera cependant nécessaire de recourir au pompage.

Le développement crevetticole devra donc s'appuyer sur une stratégie d'élevage de type semi-intensif, (cf. article de M. AVALLE), basé sur l'espèce Penaeus monodon (Camaron).

2. Les contraintes majeures

On peut distinguer des contraintes liées :

Contraintes liées aux conditions d'environnement et aux sites

Si les conditions naturelles sont favorables dans l'ensemble à la crevetticulture, le développement rencontrera dans sa phase initiale un obstacle majeur lié à l'insuffisance d'infrastructure pour l'accès et la desserte terrestre ou maritime des sites sélectionnés. Cet obstacle est de loin le plus important car il impose aux promotteurs, assistés par le pouvoir public de mettre en place des moyens permettant le désenclavement de ces zones. De tels investissements ne se justifient que si le projet atteint une taille industrielle. Un certain nombre de sites, localisé dans des régions à fort potentiel, permet d'envisager la réalisation de fermes industrielles couvrant plusieurs centaines d'hectares.

Contraintes liées à l'espèce et au niveau de connaissance biotechnique

L'espèce retenue P. monodon possède un fort potentiel de croissance et les conditions biotechniques de son élevage sont bien connues et maîtrisées dans l'ensemble. Deux caractéristiques de cette espèce constituent cependant des contraintes :

  1. la croissance est optimum pour une température de l'eau comprise entre 28° et 30°C. Audessous de 24°C, la croissance est fortement ralentie et s'arrête vers 22°C.

  2. les besoins nutritionnels de P. monodon sont connus. Un aliment à teneur à protéine moyenne, de 40%, est nécessaire pour obtenir une croissance et un poids moyen acceptable.

Il conviendra donc :

Contraintes liées aux conditions économiques et juridiques

Le développement d'une crevetticulture semi-intensive passe également par la nécessité d'importer une technologie mais aussi certaines consommables (énergie, produits chimiques, aliments…). Néanmoins, il convient de “nuancer” ces contraintes en considérant les points suivants :

Il est clair que le gouvernement a choisi de favoriser le développement de ce type d'activité en mettant récemment en place des mesures spécifiques (Code des Investissements et Régime de Zone Franche Industrielle) particulièrement incitatives.

L'agrément en Régime de Zone Franche n'est pas expressément reconnu dans les textes pour les élevages aquacoles industriels. Cependant, on peut considérer que la crevetticulture peut être assimilée à une activite de transformation de produits halieutiques dont la totalité de la production est destinée à l'exportation, et par conséquent bénéficier du régime de la Zone Franche Industrielle.

Certaines applications de ce régime devront probablement être “adaptées” à l'activité aquacole afin de tenir compte des conditions d'implantation particulières de cette activité.

Il conviendra également de définir des mesures pour limiter le développement éventuel d'une crevetticulture extensive (basée sur une alimentation par la marée) s'effectuant au détriment de la mangrove. Il faut insister sur le fait que la filière d'élevage qui sera proposer se développera sur des zones d'arrière mangrove (Tanne ou Sira sira) et non pas au détriment de celle-ci. La mangrove doit être absolument conservée et protégée, car il s'agit d'un écosystème contribuant de manière significative à la richesse du milieu.

Une dernière contrainte d'importance concerne le “droit coutumier”. Un développement aquacole de cette envergure ne peut se faire qu'avec le plein accord du pouvoir coutumier. Ceci impliquant de la part des promoteurs comme du pouvoir public une certaine compréhension et la nécessité de procéder parfois par étape, à un rythme qui n'est pas toujours compatible avec les impératifs économiques.

Contraintes liées au marché

La crevette est un produit d'exportation, et soumis comme tel aux variations de prix du marché mondial. Quelques données très importantes doivent être prises en compte :

Cette augmentation récente de la production mondiale, due à l'apport de l'aquaculture, a entraîné un net tassement des cours depuis 1989. Les crevettes de taille moyenne (correspondant à la majorité des crevettes de pêche), sont les plus sensibles aux fluctuations de prix. Par contre, les crevettes de grosse taille (>à 30 g) constituent un créneau intéressant pour l'aquaculture.

Le marché n'est donc pas aussi favorable qu'il y a quelques années et la concurrence est forte. L'aquaculture doit, par conséquent, jouer sur les points faibles de la pêche (taille et qualité du produit) pour que le produit aquacole s'impose en “haut de gamme”.

3. Le choix d'un scénario de développement

Dès 1988, le gouvernement a choisi une approche progressive en suscitant d'abord la rélisation d'un projet pilote qui a impliqué à la fois le PNUD/FAO et une entreprise privé : les pêcheries de Nosy-Be. Cette collaboration a permis de réaliser très rapidement le projet et mettre en route cette ferme pilote dès 1989. Les résultats obtenus sont très encourageants et permettent clairement d'envisager la création de fermes industrielles.

Les Pêcheries de Nosy-Be, ont partagé le risque initial et ont donné, par leur dynamisme, l'impulsion nécessaire qui a conduit aux résultats que l'on connaît. Cette société a pris la décision de démarrer en 1991 la première phase d'un projet de ferme intégrée.

Cette approche du développement de l'activité a donc montré toute son efficacité. Les principaux verrous biotechniques ont déjà été levés. Le développement va maintenant entrer dans une phase de “vraie grandeur” qui devra transporter les techniques acquises et démontrer la rentabilité économique.

Mise en place de fermes intégrées

Les fermes sont dites “intégrées” car elles devront comporter toutes les unités indispensables au bon fonctionnement du projet. A savoir :

L'investissement “de base” est donc très important. Il est souhaitable que les promoteurs bénéficient de toute l'aide de l'Etat dans cette phase et qu'ils puissent avoir accès à des conditions de financement “douces”.

Cette unité ainsi créée, jouera le rôle d'un “nucleus” qui permettra la mise en place d'autres fermes qui n'auront pas à supporter ces investissements initiaux et pourront se développer en bénéficiant, dans certaines conditions, des outils mis en place.

Les fermes “satellites” (ou semiindustrielles

La ferme industrielle intégrée devra écessairement créer des infrastructures indispensables. A travers des contrats d'assistance, la ferme “nucleus” pourra aider au développement de fermes satellites en fournissant:

Elle pourra, par ailleurs, conditionner le produit des fermes satellites et éventuellement faire bénéficier ces dernières de sa connaissance du marché.

Rôle du secteur public

Ainsi qu'on l'a vu, le secteur public a participé en tant que promoteur à la première étape du développement (ferme pilote) en associant étroitement, dès cette phase, le secteur privé (les Pêcheries de Nosy-Be).

Les objectifs du pilote out en grande partie déjà été atteints ; les expériences et la formation se poursuivront encore au cours de l'année 1991.

Le secteur public peut encore jouer un grand rôle en facilitant le développement par des mesures appropriées et en “allégeant” autant que possible les contraintes administratives.

Dans certains cas, il serait également souhaitable que l'Etat puisse aider au désenclavement des zones aquacoles, car les projets d'aquaculture peuvent aussi servir de catalyseur à un développement agricole régional.

Les clefs de la réussite d'un grand projet de ferme industrielle, reposent sur quelques facteurs déterminants et sur une volonté réelle de l'Etat de faciliter les conditions de ce développement qui sera l'oeuvre du secteur privé national ou étranger. Il conviendrait surtout :

Localisation des sites aquacoles aménageables.

LA FERME PILOTE D'AQUACULTURE DE CREVETTES DE NOSY - BE

O. AVALLE, CTP, FAO/MAG/88/006

La production de la pêche crevettière malgache est estimée à 9.000 tonnes environ. Cette production est proche du maximum admissible sans nuire au stock naturel situé dans sa majorité sur la côte Ouest. L'expansion de ce secteur d'activité ne pourra donc se faire que par le biais de l'aquaculture.

Une étude de faisabilité réalisée en 1986 a précisé les potentialités en matière d'élevages de crevettes pour la zone nord-ouest de Madagascar. Cette étude a permis de :

Cette ferme pilote située à Nosy-Be a été financée par le Gouvernement malgache à 40%, le PNUD/FAO à 40% et les Pêcheries de Nosy-Be à 20%.

Outre les conditions générales d'environnement favorables dans l'ensemble à la réalisation d'un tel projet, le choix de Nosy-Be a été également guidé par des considérations logistiques. Ce pilote a fait l'objet d'une étude détaillée reposant sur une étude topographique et des analyses de sol.

La construction de la ferme a commencé en septembre 1988, les travaux ont été terminés en janvier 1989. Les opérations de reproduction et d'élevage ont demarré en mai 1989.

Les installations comprennent :

Les objectifs de cette ferme sont les suivants :

1. Choix d'une espèce

Le choix d'une espèce est guidé par de très nombreux critères, certains purement biologiques : mode de reproduction et nombre d'oeufs pondus, poids final atteint, etc…, d'autres sont essentiellement des données propres à l'espèce dans des conditions spécifiques d'élevages : vitesse de croissance, survie, besoins nutritionnel. Enfin, l'état du savoir faire biotechnique pour l'espèce retenue doit avoir atteint un niveau de fiabilité suffisant.

Pour Madagascar, les espèces les plus répandues et les plus pêchées par les pêcheries industrielles et artisanales sont : P. indicus, P. monoceros, P. semi-sulcatus et P. monodon.

Les espèces P. indicus et P. monodon ont été retenues car les techniques de reproduction et de grossissement sont bien maitrisées et donnent des résultats satisfaisants en élevage.

Le critère définitif pour le choix d'une espèce est celui de sa rentabilité au niveau de la production et du marché. A l'heure actuelle, la demande se porte surtout sur les crevettes de grosses tailles d'un poids compris entre 30 et 40 gr.

Sur l'ensemble des résultats acquis par la ferme pilote au cours des 33 élevages, on peut dire que P. monodon reste l'espèce la plus intéressante dans le contexte de Madagascar car elle garantit le meilleur compromis entre sécurité de production, productivité acceptable, taille marchande élevée et coût de production réduit.

2. Ecloserie

La mise en place de fermes industrielles et artisanales passent par la maîtrise de l'ensemencement des bassins en post-larves.

Plusieurs solutions sont possibles :

La collecte dans le milieu naturel de post-larves ou de juvéniles est possible pour certaines espèces comme P. indicus. Par contre, pour le P. monodon, espèce peu répandues dans la zone nord-ouest, la collecte ne peut être envisagée car, à ce jour, les prélèvements effectués dans les estuaires n'ont donné que des pourcentages infimes de postlarves de P. monodon par rapport aux autres espèces. Le risque est donc d'ensemencer avec un mélange d'espèces et d'obtenir des résultats de croissance très faibles.

L'écloserie de la ferme pilote a démontré la fiabilité du système en produisant plus 6 millions de postlarves en un an. Les géniteurs utilisés pour la reproduction provenaient pour les 2 premières productions, du milieu naturel. A la suite des différentes récoltes obtenues sur la ferme, les gros animaux mâles et femelles furent sélectionnés et grossis dans un bassin de géniteurs afin d'atteindre la taille suffisante (120gr pour les femelles de P. monodon). Actuellement, l'écloserie se fournit essentiellement sur son propre stock de géniteurs pour la production.

Les résultats obtenus avec les 2 espèces locales retenues sont excellents. En captivité, les femelles P. monodon pondent plus d'un million d'oeufs par ponte et environ 300.000 oeufs pour P. indicus.

La durée du cycle d'élevage larvaire est de 15 jours, ensuite les postlarves passent par une phase de prégrossivement avant d'être ensemencées dans les bassins.

3. Grossissement

Depuis le mois de juillet 1989, date des premiers ensemencements, la ferme de Nosy-Be a réalisé 33 élevages représentant une production de 20 tonnes de crevettes. Les crevettes ont été livrés et traités par les pêcheries de Nosy-Be qui en échange ont fourni à la ferme les aliments importés et des équipements pour une valeur équivalente.

Les élevages ont permis de tester les 2 espèces retenues, P. monodon et P. indicus a des densités différentes et avec des aliments différents.

Les élevages pratiqués sur la ferme à différentes densités (extensif semi-intensif et intensif) ont donné les résultats suivants :

Les rendements sont faibles et aléatoires, de 60Kg à 300Kg/ha/an.

Pour résumer, on peut dire que P. indicus présente un fort ralentissement de croissance à partir de 10 gr de poids moyen quelque soit l'aliment utilisé et la densité d'élevage, la survie à la pêche reste par contre toujours très élevée, proche de 90%.

Pour P.monodon, les élevages ont confirmé ses bonnes possibilités de croissance quelque soient la densité intensif d'élevages et les conditions de salinité. Par contre, en mode semi-intensif et intensif, cette espèce nécessite l'utilisation d'un aliment composé de très bonne qualité à taux de protéines élevé.

Les derniers élevages effectués sur la ferme ont permis d'obtenir avec P. monodon à des densités de 7,9/m2 des crevettes de 30–35gr de poids moyen en 150 jours d'élevage donnant des productions de 4,5 à 6t/ha/an. Pour arriver à ces résultats, deux aliments importés : le Président de TAIWAN et le Monocal de FRANCE ont été utilisés.

4. Aliments

La production industrielle des crevettes d'élevages passe nécessairement par l'utilisation d'un aliment composé fabriqué à l'échelle industrielle. Dans le cadre du projet pilote, les aliments sont importés de TAIWAN (aliment Président), de MAURICE (aliment Livestock) et de FRANCE (aliment MONOCAL).

Ces aliments à pourcentage de protéines élevé (40 à 45% sous forme de farine de poisson) sont des aliments chers mais nécessires pour obtenir des croissances satisfaisantes pour l'éspèce P. monodon. Par contre, pour P. indicus, la qualité de l'aliment importe moins mais on a vu que, quelque soit la densité, sauf en extensif pur, cette crevette ne dépasse pas 12 gr de poids final.

Sur la ferme de Nosy-Be, il y a également un atelier de production d'aliments composés destinés aux crevettes. Cet atelier permet d'enseigner les bases de production d'un aliment composé réalisé à partir d'ingrédients locaux (soja, maîs, tourteaux de coton et d'arachide, brisure de riz, manioc, etc…) et d'ingrédients importés : farine de poisson et premix.

Les élevages en cours utilisant cet aliment a donné pour l'instant des croissances équivalentes à ceux pratiqués uniquement avec l'aliment importé. Il faut toutefois attendre les prochaines récoltes pour confirmer l'efficacité de cet aliment qui doit permettre d'obtenir des crevettes d'un poids moyen de 30 gr au minimum.

5. Formation

Avant de terminer cet article nous voulons rappeler qu'un des objectifs de ce projet est celui de la formation et de la vulgarisation des techniques et du résultats acquis sur cette ferme.

Les 20 personnes composant l'équipe de la ferme, cadres biologistes issus de l'USFH, techniciens et ouvriers ont pu, au cours de ces 3 années, acquérir une formation complète en aquaculture, intégrant écloserie, grossissement, alimentation, gestion, organisation du travail, etc…

Toutes ces personnes pourront participer aux lancements des futures fermes crevettières.

INVESTISSEMENTS ET RENTABILITE D'UNE FERME INDUSTRIELLE DE CREVETTES

(Extrait du Plan directeur d'aquaculture de crevettes)

Cette étude ne prétend pas être une véritable étude de faisabilité dans la mesure où aucune hypothèse de financement n'a été prise en compte à ce stade. Il s'agit donc d'une analyse sommaire des comptes d'exploitation jusqu'à l'année standard, réalisée sur un site “théorique”, représentatif des “tannes” de Madagascar. Le but de cette analyse est de donner à d'éventuels promoteurs une image de la rentabilité d'un tel projet.

Les investissements de base pour une ferme industrielle d'aquaculture de crevettes sont très importants car la mise en place d'une telle ferme doit comporter toutes les unités indispensables au bon fonctionnement du projet. A savoir, une écloserie, une unité de préconditionnement ou de conditionnement, une unité de stockage (ou de fabrication) d'aliments composés, des bassins de prégrossissement et de grossissement, des locaux d'exploitation et d'habitation et bien entendu une infrastructure permettant l'accès permanent au site.

Ces investissements de base ont été estimés pour un projet théorique de 300 ha de bassin de grossissement avec écloserie/nurserie à 25.323.000 FF1 auquel devront s'ajouter traitement d'une tonne de crevette/heure.

L'analyse des résultats financiers préliminaires (hors frais financiers) est globalement satisfaisante : taux de rentabilité simple de 40%, investissement récupéré au cours de la 5ème année du projet, rapport chiffre d'affaire/investissement supérieur à 1 (1,1). Plus la ferme industrielle sera grande, plus la rentabilité économique sera élevée, le projet type de 300 ha ayant été fixé de manière théorique sans tenir compte des frais d'infrastructures pouvant être éventuellement élevés en fonction des problèmes d'accessibilité de certains sites.

Pour de tels investissements, il existe des conditions de financement particulières.

Cette unité ainsi créée, jouera le rôle d'un “nucleus” qui permettra la mise en place d'autres fermes qui n'auront pas à supporter ces investissements initiaux et pourront se développer en bénéficiant, dans certaines conditions, des outils mis en place par la ferme industrielle.

Note :

  1. La présente évaluation est faite en FF sur la base des taux de change d'octobre 1990 au moment de la réalisation de l'étude soit 1 FF = 280 FMG. Actuellement le taux de change (avril 1990) se situe autour de 320 FMG pour 1 FF.

1. PROJET TYPE DE FERME INDUSTRIELLE

Le projet de ferme industrielle proposé ci-après a été défini comme un cas type représentatif des surfaces moyennes disponibles à Madagascar. Sa taille (300 ha) a été déterminée par analogie avec d'autres pays. S'agissant d'une ferme intégrée, supportant des coûts d'investissements élevés liés aux infrastructures initiales, le schéma proposé est basé sur un planning de réalisation et de montée en puissance rapide. Le schéma ne doit pas être considéré comme définitif, même s'il s'appuie sur des standards de production réalistes issus de résultats obtenus au niveau de la ferme pilote. En fonction des solutions qui seront apportées au problème de l'aliment, une intensification de la production pourrait être envisageable. L'objectif final est de produire des crevettes de gros calibre, produit de “haut de gamme”, moins sensible aux variations de prix que les crevettes de taille moyenne.

On notera cependant que ce “cas type” ne prend pas en compte des dépenses éventuelles d'investissement “extraordinaires” liées à la localisation particulière d'un site. Seule une étude de faisabilité précise concernant un site donné, pourrait permettre une approche du niveau d'investissement réel et des charges supplémentaires crées par ces problèmes logistiques. Il convient donc d'examiner cette analyse avec la prudence qui s'impose.

a) Schéma du projet

b) Résumé des données de bases

- EspèceP. monodon
- Ecloserie/nurserie 
• capacité annuelle50–106 (PL15)
- pré-grossissement 
• densité de stockage40/m2
• durée de la phase45 jours
• survie moyenne75 %
• Surface totale en eau nécessaire16.7 ha
- grossissement 
• surface totale en eau300 ha
• surface moyenne des bassins10 ha
• nombre de bassins30
• densité de stockage/bassin500.000
• indice de conversion2.2
• durée de l'élevage150 jours
• nombre de cycles d'élevage/an2.2
• survie80 %
• poids moyen final30 g
• nombre de récoltes/an66
• rendement par récolte/hectare1.200 kg
• rendement annuel/bassin26.4 T
• production annuelle totale de la ferme792 T
• prix de vente ex-farm35 FF/Kg
(avant conditionnement) 

On peut donc estimer le chiffre d'affaire annuel en année de routine d'une ferme de 300 ha de surface utile à :

792.000 Kg × 35 FF = 27.720.000 FF

c) Bases de dimensionnement

Calcul de la surface en grossissement nécessaire

• Nombre de cycle/an :

• Nombre de bassins= 30 bassins (de 10 ha)
• Nombre de récoltes : 30 × 2.2= 66 / an

Calcul de la surface en prégrossissement nécessaire :

• Densité de stockage en bassin de grossissement :
    5 juvéniles/m2 × 10 ha= 500.000
• Besoins en PL15 (sur base 75% de survie)
    500.000/0.75= 667.000 PL

• Surface d'un bassin de prégrossissement (PG) sur la base de 400.000 PL15/ha.

• Nombre de cycles de PG/an :

• Nombre de bassins de PG nécessaires :

Sur la base de 300 ha de grossissement (surface en eau) 2.2 récoltes par an à une densité de grossissement de 5/m2, le projet nécessitera 10 bassins de prégrossissement de 1.67 hectares chacun, soit une surface totale de :

10 × 1,64= 16,7 hectares (net)

Détermination de la capacité de production de l'écloserie/nurserie

• Surface de chaque bassin=1.67 ha
• Besoin en PL15 par bassin/cycle=667.000
• Nombre total de PL15 en bassin de PG=6.670.000
• Mortalité liée au transfert nurserie/ferme=15%
• Besoins glocaux  
  (6.670.000 + 15%) × 6.6 cycles=50.000.000 PL15

Evaluation de la surface totale requise

La surface totale nécessaire est bien entendu supérieure à la surface en eau. Il convient de prendre en compte les surfaces “non productives”, occupées par les digues, canaux, zone d'habitation ; ainsi que les zones difficilement aménageables sur le site même.

Cette surface supplémentaire peut être évaluée à environ 25% de la surface nette en eau soit :

(300 + 16.7) × 1.25 400 hectares

2. EVALUATION SOMMAIRE DES INVESTISSEMENTS NECESSAIRES

a) La ferme

La technique de construction habituelle est celle de l'équilibrage des déblais/remblais afin de minimiser les transports de matériaux.

La forme des digues est trapézoidales avec une largeur en tête de 3.50 m à 4.50 m selon le trafic qu'elles supporteront. La pente des talus est de 2/1 à 3/1 selon le type de sol.

Le fond est réglé avec une forme de pente générale d'environ 1. La hauteur d'eau moyenne est de 1.20 m (avec une revanche maximum digue/niveau d'eau de 50 cm).

Chaque bassin est pourvu d'ouvrage hydrauliques (moines d'alimentation et d'évacuation réalisée en béton. L'ensemble est alimenté par une station de pompage approvisionnant un canal d'adduction d'eau. L'alimentation de chaque bassin est donc réalisée gravitairement à partir de ce canal.

Une ferme de ce type comprend également d'autres infrastructures (bâtiment de services, habitation) qu'il convient de prendre en compte.

Evaluation de l'investissement

- Frais préliminaires d'études:500.000 FF
- Volume de terrassement:600.000 m3
• prix unitaire moyen (m3):14 FF
• coût total terrassement:8.400.000 FF
- Ouvrages hydrauliques: 
• Moines d'adduction pour bassin de 10 ha:60
• Moines d'adduction pour basin de PG:10
• Moines d'évacuation:70
Sur la base d'ouvrages standardisés à un prix moyen de 15.000 FF:
140 × 15.000 = 2.100.000 FF  

- Station de pompage

Sur la base d'un renouvellement d'eau moyen de 10% par jour, effectué en 12 ha, les besoins moyens sont les suivants:

317 × 10.000 × 10%=317.000m3
317.000/12 h26.000m3/h

Ces basoins nécessitent 4 pompes de 6.500 m3/h soit (y compris travaux de génie civil et installation) un coût de 1.500.000 FF.

- Bâtiments:

Une ferme de ce type comprend un bâtiment d'exploitation (360 m2), un bâtiment de stockage pour l'aliment (150 m2), des bureaux (100 m2), des habitations d'astreinte (300 m2), un local pour la station d'énergie (50 m2).

Soit 960 m2 à 1.500 FF/m2 (en moyenne)

Soit 1.440.000 FF

- Frais d'études et d'ingéniérie 8% du total précédent (17.940.000 FF), soit : 1.435.000 FF.

TOTAL GENERAL : 19.375.000 FF

b) L'écloserie/nurserie

Cette unité sera rarement réalisée sur le site de la ferme pour des raisons d'exigence de qualité d'eau.

Les travaux de génie civil nécessaires concernent la construction de plusieurs bâtiments et nécessitent une surface totale de terrain comprise entre 1 et 2 hectares.

Le bâtiment écloserie peut être conçu de façon modulaire afin de permettre une extension éventuelle de la capacité de production (vente des post-larves à des fermes satellites). Les modules sont réalisées en structure industrielle (ossature béton armé avec maçonnerie au bardage, couverture tôle galvanisée).

L'écloserie proprement dite comprend :

Outre ces unités, l'ensemble comprendra également :

NOTE:

Dans de nombreux cas, compte tenu des difficultés d'accès, il conviendra de rajouter des frais supplémentaires liés à la nécessité de créer des infrastructures importantes et d'acquérir les moyens logistiques nécessaires (route, ponton, aérodrome sommaire, avion léger, bateau type caboteur…).

Il est certain que dans le cas d'un projet très isolé nécessitant la mise en place d'infrastuctures lourdes ; un “grand projet” (supérieur à 500 hectares) permettra un meilleur amortissement de ces coûts d'investissement “fixes” quelle que soit la taille de la ferme.

Evaluation de l'investissemnt (Hors taxes)

- Terrassement et voirie : 200.000 FF
- Electrification eau douce et réseaux externes : 100.000 FF
- Bâtiment écloserie 500 m2 × 2.200 FF/m2 : 1.100.000 FF
- Unité de nurserie 450 m3 × 1.500 FF/m3 : 675.000 FF
- Unité d'acclimatation 50 m2 × 2.200 FF/m2 : 110.000 FF
- Bâtiment d'exploitation 100 m2 × 2.200 FF/m2 : 220.000 FF
- Bâtiment énergie 25 m2 × 2.200 FF/m2 : 55.000 FF
- Station de pompage et prise d'eau : 150.000 FF
Les équipements nécessaires sont les suivants :  
- Equipements de filtration : 130.000 FF
- Pompes : 300.000 FF
- Surpresseurs d'air : 135.000 FF
- Réseaux : 400.000 FF
- Bacs : 850.000 FF
- Equipement scientifique : 200.000 FF
- Matériel divers : 100.000 FF
- Equipements du bâtiment d'exploitation : 150.000 FF
- Equipements du bâtiment d'énergie    
(2 groupes électrogènes de 75 KVA plus pose) : 250.000 FF
- Véhicules (2 pick up) : 200.000 FF
- Frais d'études et ingéniérie (12%) du total précédent (5.195.000 FF) soit : 623.000 FF
TOTAL GENERAL : 5.984.000 FF

c) L'unité de conditionnement

L'unité de conditionnement prévue a été dimensionnée sur la base d'une capacité de production d'une tonne de crevette/heure. La capacité de traitement (environ 2.000 t/an) est supérieure au besoin réel du projet (792 t/an) mais elle permettra de conditionner une récolte de bassin (12 t/bassin de 10 ha) par jour, ceci étant la condition nécessaire au dimensionnement.

Il est clair qu'une unité de ce type est surdimensionnée par rapport au projet. Ainsi son installation ne se justifiera que si le projet est très éloigné d'un centre de conditionnement et surtout si une extension de la ferme et des possibilités de rachat des productions de crevette venant de fermes “satellites” est possible. Une solution intermédiaire consisterait a ne réaliser sur le site de la ferme de 300 ha qu'une unité de “pré-processing” (triage et congélation en vrac) pour acheminement ultérieur du produit vers un centre de conditionnement définitif.

Pour les raisons invoquées précédemment, dans la présentation des comptes d'exploitation, seules les charges inhérentes au process aquacole (écloserie et ferme) seront prises en compte. La valeur de la production sera alors évaluée sur une base “ex-farm” (sortie bassin) et non sur un prix de produit conditionné.

Cependant il convient d'indiquer ici un descriptif sommaire d'une telle unité de conditionnement, des investissements nécessaires ainsi qu'une évaluation des coûts de “process”.

Les principales étapes successives d'un processus de conditionnement de crevette sont les suivantes :

L'usine de conditionnement comprend 3 édifices et nécessite un terrain d'une superficie de l'ordre de 4.000 m2 :

L'investissement peut être évalué comme suit:

- nivellation et terrassement du terrain 25.000 FF
- bâtiments : 800 m2 × 2.800 FF/m2 2.240.000 FF
    190 m2 × 1.400 FF/m2 285.000 FF
  2.525.000 FF
- électricité, eau, réseaux et air conditionné 710.000 FF
- équipement de froid (machine à glace, silo de stockage, congélateur de plaques, chambres froides, systèmes de réfrigération et containers réfrigérés 3.020.000 FF
- équipements divers (de process, scientifiques, de bureaux) et véhicules 1.625.000 FF
- ingénierie (10% du total) 790.500 FF
  INVESTISSEMENT TOTAL 8.695.500 FF

Les coûts de “process”, par analogie avec des projets similaires, sont habituellement les suivants:

- crevettes entières (“head-on”):3,70 FF/Kg
- crevettes étêtées (“head-less”):2,60 FF/Kg

d) Trésorerie et fonds de roulement

La trésorerie nécessaire au financement du stock est un élément essentiel du plan de financement et reste trop souvent sous-estimée dans l'élaboration du projet. Elle représente la somme totale d'argent qui sera effectivement dépensée entre la mise en élevage de l'exploitation et les premières ventes. Elle comprend donc :

Cette somme ne prend pas en compte les recettes et dépenses fictives comme valeur des stocks et les dotations aux amortissements qui servent au calcul de l'impôt sur le bénéfice de l'entreprise. Elle doit par contre prendre en compte les frais financiers (intérêt des emprunts qui sont des dépenses réelle. Ceci amène à considérer deux trésoreries :

L'importance de la trésorerie nécessaire au financement du stock dépend d'une part de la taille de l'exploitation et d'autre part de la durée du cycle d'élevage. Une écloserie de crevettes, qui assure et vend une production dès le premier mois d'exploitation, a des besoins beaucoup plus faibles que ceux d'une ferme de grossissement où le stock se forme en plusieurs mois. Dans ce cas, la trésorerie nécessaire représente pratiquement une année pleine de charges d'exploitation, ce qui est considérable.

Les problèmes liés au financement de la trésorerie sont importants. En effet, si pour les immobilisations la banque peut toujours garantir son prêt par une caution sur les immobilisations, pour la trésorerie, la garantie équivalente est le stock lui-même. Or, un stock vivant est fragile et difficile à négocier par la banque en cas d'appel de garantie. Ce risque peut se traduire par des taux d'intérêt plus élevés ou la nécessité de fournir une caution équivalente à l'ensemble des prêts sur la trésorerie, et parfois les deux.

Il n'existe pas de solution miracle pour résoudre ce problème. Celle qui paraît aujourd'hui la mieux adaptée consiste à mettre en place un fonds de garantie (régional ou national) qui pourrait se porter caution pour le prêt consenti pour la trésorerie.

Le fonds de roulement permanent est différent de la trésorerie nécessaire au financement du stock. Il représente la valeur des liquidités qu'il faut maintenir dans la caisse de la société pour en assurer le bon fonctionnement. Ce montant dépend bien sûr de l'activité : il est généralement estimé à 3 mois de charges d'exploitation.

Il convient de noter que cette étude sommaire ne prend pas en compte le plan de financement et par conséquent les frais financiers. Pour ce type de projet le minimum de capital propre exigé par les organismes prêteurs se situe à 30%.

3. TABLEAU D'AMORTISSEMENT

L'amortissement est linéaire en considérant que tout l'investissement est réalisé dès la première année. (Seules les charges d'exploitation des 4 premières années seront présentées, par conséquent aucun renouvellement des immobilisations ne sera pris en compte pendant cette période).

Nature de l'investissementDurée (année)Montant de l'investissement (FF)Montant de l'amortissement (FF)
Frais préliminaires   
(études de faisabilité, topographie, montage de la société…)
Ferme et écloserie
20500.00025.000
Ferme   
• Terrassements208.400.000420.000
• Génie civil (hydraulique)152.100.000140.000
• Station de pompage101.500.000150.000
• Bâtiments151.440.00096.000
• Equipements et matériel d'exploitation74.000.000572.000
• Ingénierie (ferme)131.435.000110.400
Ecloserie/nurserie:   
• Terrassements20200.00010.000
• Réseaux10100.00010.000
• Bâtiment divers et génie civil151.525.000101.700
Nurserie/acclimatation15785.00052.300
• Equipements72.715.000387.900
• Ingénierie  (écloserie/nurserie)10623.00062.300
T O T A L1225.323.0002.137.600

4. LES CHARGES ET PRODUITS D'EXPLOITATION

Les charges d'exploitation présentées sommairement ci-après concernent séparement la ferme et l'écloserie/nurserie. Les coûts sont exprimés en FF et établis sur une base hors taxe. Ces charges sont présentées jusqu'à l'année 4 du projet, considérée comme année de routine.

a) Les charges de l'écloserie/nurserie

Compte tenu de l'étalement des ensemencements de la ferme, la montée en production de l'écloserie sera progressive. On peut considérer qu'au cours de l'année 2, l'écloserie produira environ 70% de sa capacité soit 35 millions. Dès la seconde année de production (année 3 du projet), elle atteindra son niveau de routine soit 50 millions.

Les charges hors personnel sont donc les suivantes :

Produits chimiques (antibiotiques, Tréflan, chlore, Kit diagnostic…

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-20.00030.00030.000

Les aliments

Il s'agit des Artemia, microparticules et autres aliments et granulés géniteurs soit :

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-125.000180.000180.000

Energie

Cette dépense comprend la consommation des véhicules et des groupes électrogènes. (1 groupe de 75 KVA consommant 120.000 litres de gas oil par an, le coût de gas oil est de 1.5 FF/1)

La dépense est la suivante:

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-130.000190.000200.000

Maintenance

Ces frais sont calculés sur la base de :

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-148.000148.000148.000

Personnel

Les besoins en personnel pour une écloserie nurserie de 50 millions PL15 sont évalués en considérant que tout le personnel est embauché dès l'année 2. On considèrera également l'affectation d'une partie du personnel administratif (Direction Générale du projet global) sur le budget du personnel écloserie.

Soit pour l'année 2 et suivantes:

DESIGNATIONNOMBRETEMPS OCCUPESALAIRE MENSUEL (FF)SALAIRE ANNUEL (TTC)
Directeur général125%40.000120.000
Secrétaire administratif125%1.4004.200
Comptable150%1.0006.000
Secrétaire1100%8009.600
Ingénieur de maintenance150%4.00024.000
Mécanicien et chaffeur2100%1.20028.000
Ouvriers de maintenance2100%60014.400
Gardiens2100%2004.800
Directeur technique1100%(1) 30.000360.000
Biologiste3100%3.600129.000
Technicien2100%3.00072.000
Ouvrier aquacole8100%60057.600
TOTAL25  831.000

(1) Hors frais éventuels d'assistance technique et de transfert de technologie.

Les assurances correspondent à 0,5% de l'investissement.

Les frais généraux sont évalués à 5% des charges d'exploitation hors amortissement.

ANNEE1234
Assurances-29.00029.00029.000
Frais généraux-63.00069.00070.000
T O T A L 92.00098.00099.000

b) Les produits de l'écloserie/ nurserie :

Ils ne concernent que la vente de crevettes entières ex-farm (non conditionnées). A ce stade, aucune vente de post-larves à des tiers n'a été considérée. Néanmoins il est possible d'établir le coût de production du millier de post-larves produites en année de routine (Hors impôts et taxes, hors frais financiers, hors frais liés à un transfert de technologie).

Soit une incidence sur le prix de revient du Kg de crevettes produite de :

c) Les charges d'exploitation de la ferme

Il convient en premier lieu d'évaluer les productions envisageables sur la base d'une montée en production de l'écloserie et d'une augmentation progressive des rendements (phase de formation de personnel).

En année 2, la production peut être évaluée à 50% du rendement annuel prévisible en année de routine, soit 396 T.

En année 3, la production atteindra 75% du rendement prévu soit à 594 T.

En année 4, la production sera à son niveau normal (stock courant) évalué à 792 T.

Les charges seront les suivantes :

Produits chimiques

Ce poste comprend les engrais et les produits de traitement (chlore, roténone, chaux, métalisulfite de sodium, etc…)

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-55.50091.600122.100

Les aliments

On ne fera pas de différence entre l'aliment prégrossissement et l'aliment grossissement. Cependant on prendra l'hypothèse d'un aliment importé en année 2 et 3 à 6,3 FF/Kg (rendu site), puis fabriqué localement en année 4 à 4,8 FF/Kg.

D'autre part avec la montée en production et la formation progressive du personnel, on peut imaginer que la ration alimentaire sera mieux ajustée et que l'indice de conversion baissera sensiblement.

A N N E E 1 2 3 4
Production Crevettes (T) - 396 594 792
Indice de Conversion - 2,4 2,3 2,2
Besoins en aliments   950,4 1.366,2 1.742,4
Coût (FF)   5.987.500 8.607.000 8.363.500

L'Energie

La production d'énergie sur une ferme de ce type a été établie sur la base d'une hypothèse simple d'approvisionnement de toute l'énergie nécessaire par deux groupes électrogènes de forte puissance (2 × 500 KVA). Les calculs sont basés sur un prix du gas oil rendu ferme de 1.06 F/1.

Les autres dépenses d'énergie concernant les véhicules et les bateaux.

La dépense est la suivante :

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
15.0001.000.0001.520.0002.000.000

Maintenance

Les frais sont évalués comme suit :

ANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
-361.600361.600361.000

Le personnel

On considèrera qu'une partie du personnel est embauchée en année 1 et que la totalité est embauchée en année 2.

Comme pour l'écloserie, une partie du personnel administratif sera affectée à la ferme, soit pour l'année 2 et suivantes :

DESIGNATIONNOMBRETEMPS OCCUPESALAIRE MENSUEL (FF)SALAIRE ANNUEL (TTC)
Directeur général175%40.000360.000
Secrétaire administratif175%1.40012.600
Comptable150%1.0006.000
Secrétaire1100%8009.600
Responsable logistique2100%4.00096.000
Employés logistique12100%800115.200
Directeur technique1100%(1) 30.000360.000
Ingénieur de maintenance150%4.00024.000
Mécanicien et chaffeur4100%1.20057.600
Ouvriers de maintenance6100%60043.200
Gardiens8100%20019.200
Biologiste4100%3.600172.800
Technicien8100%3.000288.000
Contremaître8100%1.500144.000
Ouvrier aquacole50100%600360.000
Ouvrier pêcheur20100%800192.000
TOTAL128  2.260.200

(1) Hors frais éventuels d'assistance technique et de transfert detechnologie.

Assurances et frais généraux

Le coût des assurances est évalué à 0,50% du montant de l'investissement.

Les frais généraux sont évalués à 5% des charges hors amortissement, (ceci comprend les frais liés à la “logistique” du projet).

ANNEE1234
Assurances-96.90096.90096.900
Frais généraux24.200483.200642.000655.300
T O T A L24.200580.100738.900752.200

Coût de production du Kg de crevettes entières sortie bassin

CHARGESANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
Produits chimiques-55.50091.600122.100
Aliments-5.987.5008.607.0008.363.500
Energie15.0001.000.0001.520.0002.000.000
Maintenance-361.200361.200361.200
Personnel468.6002.260.2002.260.2002.260.200
Assurances et frais généraux24.200580.100738.900752.200
TOTAL (hors amortissement)507.80010.244.50013.578.90013.859.200
Amortissements-1.513.4001.513.4001.513.400
TOTAL (amortissements inclus)507.80011.757.90015.092.30015.372.600
Production escomptée (tonnes)0396594792
Incidence du prix de revient des post-larves par Kg de crevettes produits-4,98 FF/Kg3,54 FF/Kg2,67 FF/Kg
Prix de revient du Kg ex-farm (hors amortissement)(-)30,8 FF26,4 FF20,2 FF
Coût de production total (ferme + écloserie)
Amortissements inclus
-13.728.10017.193.50017.484.800
Prix de revient du Kg ex-farm Amortissements inclus-34,7 FF28,9 FF22,1 FF

c) Les produits

Le prix des crevettes présenté ci-après correspond à un prix moyen ex-farm de crevettes P. monodon de 30g de poids (moyenne des prix Asie du Sud-Est en 1990).

Ce prix a été fixé à 35 FF/Kg (crevettes entières, non conditionnées).

d) Résultats d'exploitation globalisés ferme et écloserie

CHARGESANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4
Prix de revient au Kg (1) (FF)-34,728,922,1
Prix de vente au Kg (FF)-353535
Marge au Kg (FF)-(-0,3)6,112,9
Coût de production total (ferme + écloserie) (FF) (1)-13.728.10017.193.50017.484.800
Ventes totales (FF)013.860.00020.790.00027.720.000
Bénéfice d'exploitation (FF)(-)131.9003.596.50010.235.200

(1) amortissements inclus mais hors frais financiers.

5. ANALYSE DES RESULTATS FINANCIERS PRELIMINAIRES

Quelques idicateurs simples permettent de mesurer l'intérêt financier du projet. Toutefois il ne peut s'agir que d'indications préliminaires de la valeur du projet.

Taux de rentabilité simple

Cette mesure compare le capital total investi aux bénéfices nets, après amortissement, du projet en année standard. Elle ne tient pas compte des incidences et de la chronologie des dépenses de capital et des recettes, néanmoins dans le cas présent où la mise de fonds initiale est supposée effectuée en année 1, cette mesure est intéressante.

a) Investissement total (ferme + écloserie)= 25.323.000 FF
b) Bénéfice (hors impôts et frais financiers) en année de routine= 10.235.200 FF
     b/a # 40% 

Si l'on prend l'hypothèse d'un capital propre égal à 30% de l'investissement total, nous aurons alors le ratio suivant :

Période de remboursement de l'investissement

Cet indicateur mesure le nombre d'années nécessaires pour que le projet, à partir des recettes annuelles, rentre dans les fonds investis. Il donne donc également une idée intéressante de la rentabilité du projet.

CHARGESANNEE 1ANNEE 2ANNEE 3ANNEE 4ANNEE 5
Investissement25.323.000----
Cash flow annuel d'exploitation (1)(-)2.269.5005.734.10012.372.800 12.372.800
Balance cumulée(-)2.269.5008.003.60020.376.40032.749.200

(1) : Cash flow d'exploitation : résultat d'exploitation + dotation auxamortissements (hors : impôts, taxes et frais financiers)

On constate que les fonds investis sont récupérés au cours de l'année 5 du projet.

Enfin, le dernier indicateur intéressant est celui du rapport chiffre d'affaire/investissement, soit :

27.720.000/25.193.000 # 1,1

L'ensemble de ces indicateurs tend à montrer que le projet, tel qu'il a été défini ici, présente une rentabilité satisfaisante.

LES AUTRES AQUACULTURES D'EAU MARINE

S'il est vrai que l'élevage des crevettes de mer peut être considéré comme une activité prometteuse à Madagascar, il existe problablement d'autres filières aquacoles susceptibles à plus long terme de connaître un certain développement.

Parmi les espèces de poisson susceptibles d'être intéressantes pour l'aquaculture marine, on peut citer le poisson lait (Chanos Chanos) et les mulets pour une activité plutôt artisanale et un marché de consommation locale. D'autres espèces pourraient être envisageables à plus long terme pour une production plus massive et éventuellement un marché d'exportation. Il s'agit par exemple, du Tilapia rouge, mais aussi de certains mérous ou encore du “Loup Tropical” le Lates calcarifer. Cette dernière espèce, malheureusement non présente à Madagascar, possède des potentialités d'élevage très intéressantes puisqu'il est possible dans certaines conditions d'exploitation, particulièrement en cages flottantes, d'obtenir des rendements très élevés (supérieurs à 40Kg/m3/an).

Des techniques sont actuellement pratiquement au point et ces élevages seront envisageables à plus ou moins long terme. Là aussi, s'agissant d'éspèces “nobles” et relativement coûteuses à produire, les marchés d'exportation possibles doivent être soigneusement étudiés.

Madagascar possède très certainement un grand potentiel en matière de conchyliculture, c'est à dire d'élevage d'huître ou de moules. Cependant, les essais réalisés depuis de nombreuses années sur des espèces locales, en particulier dans la région de Toliara, semblent démontrer qu'il conviendrait de se tourner vers des espèces élevées dans d'autres régions du monde, dont les techniques de production de masse sont bien maîtrisées et qui possèdent un fort potentiel de croissance. Des essais pourraient être menés (avec toutes les précautions liées à l'introduction d'espèces) sur l'huître japonaise (Crassostrea gigas) et la moule verte des Philippines (Pernaviridis).

Il faut citer également les algues qui apparaissent de plus en plus comme un produit aquacole d'avenir du fait de la part importante qu'elles prennent dans l'industrie agroalimentaire et les cosmétiques. Des essais, actuellement entrepris dans la région de Toliara sur l'algue EUCHEMA semblent, selon les experts, prometteurs.

Puisque ce numéro de cahier d'information est consacré à l'aquaculture des crevettes il convient de signaler qu'il existe à Madagascar de forte potentialité pour l'élevage des crevettes d'eau douce et plus particulièrement de l'espèce Macrobrachium rosenbergii. Cette espèce pourrait très certainement trouver dans plusieurs régions et notamment sur la côte Est des conditions bio-techniques favorables.

Sous réserve, là aussi, de résoudre les problèmes d'accessibilité aux sites, d'aliments et surtout de marché, il s'agit d'une activité qui peut être envisagée à une échelle plus artisanale que la crevette de mer. Les conditions d'élevage sont maintenant techniquement bien maîtrisées et le transport des technologies d'écloserie et de grossissement parfaitement envisageables.

Les investissements nécessaires sont proportionnellement un peu plus importants que pour l'élevage des crevettes de mer, mais les charges d'exploitation moins lourdes surtout si les sites de production permettent une alimentation d'eau des bassins par gravité à partir d'une rivière.

Le problème de marché doit être cependant examiné avec attention car il s'agit d'un produit moins connu et de valeur marchande moindre que la crevette de mer.


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