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Ecoulements caractéristiques des bassins-types


Région désertique
Région subdésertique
Région sahélienne
Régions tropicales sèches


La sécheresse récente, ou une forte activité anthropique, a pu modifier les conditions d'écoulement, et en particulier l'aptitude au ruissellement des bassins sélectionnés par Rodier. Les bassins-types, cités nommément, valent davantage par les caractéristiques liées à l'écoulement qu'ils représentaient au moment des études que par leur localisation géographique. Il faut néanmoins observer que, si ces modifications vont dans le sens d'une augmentation de l'écoulement, par suite de la diminution du couvert végétal et de l'extension des états de surface favorables au ruissellement (Albergel, 1988), elles agissent en opposition avec la diminution des pluies. Par ailleurs, l'application de la méthode Rodier aux bassins versants représentatifs de la Mare d'Oursi, étudiés en période d'apports déficitaires (Chevallier et al., 1985), a donné des résultats cohérents pour les sept bassins étudiés. Cette méthode reste donc utilisable à partir d'observations récentes.

Région désertique

Classe 1: bassins versants de quelques hectares au maximum

En régions désertiques, l'exploitation hydraulique de surfaces de très faibles dimensions n'a de sens que si elles sont suffisamment imperméables, c'est-à-dire formées généralement de terrains à forte proportion d'argile. Les diagrammes de la figure 36 ne s'appliquent donc qu'à ce type de surfaces.

Des corrections peuvent néanmoins être apportées:

• si l'aire de réception est absolument imperméable et ne dépasse pas un hectare, une majoration permettant d'atteindre Kmed = 80% pour Pmed = 10 mm, et Kmed = 90% pour Pmed = 100 mm, pourra être appliquée;

• si l'imperméabilité est moindre, ou l'aire de réception assez grande, une réduction, jusqu'à Kmed = 40% pour Pmed = 20 mm, sera utilisée.

Classe 2: petits bassins versants de 2 à 40 km2

Les diagrammes des figures 37 (bassin de 5 km2) et 38 (bassin de 25 km2) ne s'appliquent, également, qu'à des bassins versants dont les caractéristiques physiographiques sont favorables au ruissellement: pente forte ou assez forte (dénivelée spécifique Ds > 100 m), sol assez imperméable (densité de drainage Dd > 2,5 km/km2), sans dégradation hydrographique.

Des massifs rocheux très diaclasés doivent être considérés comme perméables, de même que des bassins dont plus de 15 à 20 % de la superficie sont occupés par des recouvrements sableux. De tels systèmes généreront peu de ruissellement, malgré un relief parfois significatif.

Si la superficie du bassin étudié est trop éloignée de celles correspondant aux diagrammes proposés (10 - 15 km2 ou quelques dizaines d'hectares, par exemple), des interpolations entre les résultats donnés par les courbes des figures 37 et 38 ou 36 et 37 seront nécessaires.

FIGURE 36: Ecoulement annuel sur une petite surface imperméable (moins de 4 à 5 ha). D'après J-RODIER

FIGURE 37: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 5 km2, région désertique, bonnes possibilités de ruissellement. D'après J-RODIER

FIGURE 38: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 25 km2, région désertique, bonnes possibilités de ruissellement. D'après J-RODIER

Classe 3: bassins versants de 40 à 1000 km2

Les écoulements observés sur les bassins de dimension moyenne variant assez fortement avec leur pente, leur superficie et la répartition temporelle des précipitations, Rodier ne donne que des ordres de grandeur des coefficients d'écoulement de fréquence médiane:

bassins de 30 à 100 km2, à forte pente (dénivelée spécifique Ds > 150 m) et sans dégradation hydrographique: Kmed = 6 à 15%;

bassins de 150 à 250 km2, également à forte pente et sans dégradation hydrographique: Kmed = 2 à 4%, pour des hauteurs de précipitations annuelles moyennes comprises entre 30 et 110 mm:

bassins de 500 km2, avec une dégradation hydrographique limitée: Kmed = 1 à 3%.

L'esquisse du tracé d'une courbe de distribution statistique des lames écoulées pourra s'appuyer sur les éléments suivants: estimation par enquête sur le terrain de la fréquence des années sans écoulement, estimation des lames écoulées de fréquence décennale que Rodier évalue, pour des bassins de 25 à 100 km2, entre 8 et 40 mm pour une valeur médiane de la hauteur annuelle de précipitations comprise entre 30 et 100 mm.

Classe 4: bassins versants de plus de 1.000 km2

Sur des superficies dépassant 1000 km2, la dégradation hydrographique est presque toujours importante. Seuls les cours d'eau dont le relief est notablement fort sur la majeure partie de leur bassin peuvent donc présenter un écoulement significatif. Pour cela, leur exutoire doit se situer à la sortie ou à l'intérieur d'un massif montagneux. Sinon, la fréquence de l'écoulement ne sera que d'une fois tous les dix ou vingt ans.

Dans des cas extrêmement favorables (très fortes pentes, sans dégradation hydrographique) tels qu'on peut en rencontrer dans le sud du Tibesti, le coefficient d'écoulement atteint peut-être 5 à 6% au maximum, pour des précipitations de 60 à 100 mm, en année médiane. Pour des hauteurs pluviométriques de quelques dizaines de millimètres, l'écoulement est presque toujours très faible et ne s'observe qu'une année sur deux, contre neuf ou dix années sur dix dans les cas précédents.

Si ces conditions extrêmes ne sont pas remplies et si, toutefois, la dégradation du réseau hydrographique n'est pas trop accentuée, le coefficient d'écoulement n'est que de 0,1 - 0,5% en année médiane, pour une hauteur pluviométrique annuelle médiane comprise entre 50 et 100 mm. Aucun écoulement ne s'observe une année sur cinq ou une année sur dix, selon les cas. Néanmoins, en année exceptionnellement abondante et s'il n'y a pas du tout de dégradation du lit, le coefficient d'écoulement peut atteindre ou dépasser les 10%.

Région subdésertique

Comme pour les régions plus sèches, les bassins situés en région subdésertique ne présentent jamais une perméabilité importante: des écoulements significatifs sont observés uniquement sur des bassins versants suffisamment imperméables. Les massifs rocheux tectonisés, ou sensiblement altérés, et les recouvrements dunaires ne seront pas pris en compte, lors de l'estimation des caractéristiques géomorphologiques (superficie et pente), s'ils représentent plus de 10% de la superficie totale.

Classe 1: bassins versants de quelques hectares au maximum

Pour des surfaces imperméables non artificielles, on adoptera des coefficients d'écoulement différents suivant la valeur de la hauteur pluviométrique annuelle correspondant à diverses probabilités:

• pour l'année centennale humide: Ke = 75%, quelle que soit la valeur médiane de la hauteur annuelle de précipitations, entre 100 et 300 mm;

• pour l'année médiane: Kmed = 60%;

• pour l'année centennale sèche:

- Ke = 15%, pour une hauteur annuelle de précipitations de 15 mm correspondant à une valeur médiane de 100 à 120 mm/an;

- Ke = 20%, pour une hauteur annuelle de précipitations de 20 à 50 mm correspondant à une valeur médiane de 120 à 220 mm/an;

- Ke = 30%, pour une hauteur annuelle de précipitations de 50 à 70 mm correspondant à une valeur médiane de 220 à 300 mm/an.

Il est aisé, à partir des trois points correspondant aux fréquences cumulées 0,01; 0,50; 0,99, de tracer les courbes de distributions qui, entre les fréquences 0,5 et 0,01 (valeurs médiane et centennale humide), peuvent être assimilées à des droites en coordonnées gausso-logarithmiques.

Pour des surfaces très légèrement perméables, on peut admettre un coefficient d'écoulement Ke de 60 à 70% pour l'année centennale humide, 40% pour l'année médiane et 5 à 10% pour l'année centennale sèche.

Classe 2: petits bassins versants de 2 à 40 km2

Contrairement à la plupart des petits bassins versants étudiés en zone désertique, les bassins des régions subdésertiques, sur lesquels se produit un écoulement, présentent généralement une couverture pédologique sur leur substratum rocheux. Pour une même superficie, il est donc nécessaire de différencier trois catégories d'ensembles:

• Catégorie I: bassins à forte pente (dénivelée spécifique Ds > 200 m) et imperméables (densité de drainage Dd > 4 km/km2);

Catégorie II: bassins à assez forte pente (dénivelée spécifique 100 < Ds < 200 m ), relativement imperméables, des recouvrements sableux ou des amas d'éboulis rocheux pouvant occuper une partie du bassin (densité de drainage Dd comprise entre 0,5 et 4 km/km2);

• Catégorie III: bassins à pente modérée (50 < Ds < 100 m), encore peu perméables, avec l'apparition d'une dégradation hydrographique sur une partie de leur surface.

Qualitativement, un bassin de Catégorie I ruisselle très bien, un bassin de Catégorie II ruisselle bien, un bassin de Catégorie III ruisselle assez bien.

Les distributions statistiques des lames écoulées annuelles, correspondant à chacune de ces catégories, sont données pour différentes valeurs de précipitations annuelles de fréquence médiane :

• figures 39 et 40, pour les bassins de 2 à 5 km2;

• figures 41 et 42, pour les bassins de 15 à 40 km2.

Pour les superficies comprises entre 5 et 15 km2, une interpolation sera faite entre les courbes des figures 39 ou 40 et celles des figures 41 ou 42. Pour les surfaces inférieures à 2 km2, elle se fera entre les courbes des figures 39 ou 40 et les estimations faites pour des bassins de quelques hectares.

Classe 3: bassins versants de 40 à 1000 km2

La valeur de la médiane des précipitations annuelles ne joue pas, pour ces bassins, un rôle prépondérant. En revanche, leur superficie a une grande importance, surtout lorsque leurs caractéristiques physiques favorisent la dégradation hydrographique. Par ailleurs, la présence, à proximité de l'exutoire, d'un petit bassin ruisselant bien (Catégorie I ou II de la classe précédente), peut majorer notablement les coefficients d'écoulement. Son impact devra donc être, dans ce cas, évalué.

Trois catégories de bassins versants peuvent schématiquement être différenciées:

• Catégorie 1: bassins sans ou avec une faible dégradation hydrographique et une pente assez forte (Ds > 100 m).

Les coefficients d'écoulement caractéristiques se situent:

- en année médiane, entre 10 et 20%, pour des superficies variant entre 40 et 300 km2, pouvant atteindre 1.000 km2 en l'absence de dégradation hydrographique;

- en année décennale sèche, entre 3% (hauteur pluviométrique annuelle médiane Pmed voisine de 150 mm) et 10% (Pmed proche de 300 mm);

- en année décennale humide, entre 18 et 25%.

• Catégorie II: bassins à pentes modérées (50 < Ds < 100 m), présentant des traces de dégradation hydrographique, avec des sols légèrement perméables et, parfois, des recouvrements sableux partiels et des zones d'éboulis.

L'estimation des coefficients d'écoulement donne:

- en année médiane, entre 3% (Pmed entre 100 et 200 mm) et 10% (Pmed de 300 mm);

- en année décennale sèche, entre 0% (Pmed entre 100 et 150 mm) et 5% (Pmed de l'ordre de 300 mm);

- en année décennale humide, entre 15 et 20%.

• Catégorie III: bassins passablement dégradés.

FIGURE 39: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 2 à 5 km2. Régions subdésertiques (Catégorie I et III). (D'après J-RODIER)

FIGURE 40: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 2 à 5 km2. Régions subdésertiques. Bonnes possibilités de ruissellement (Catégorie II). (D'après J. RODIER)

FIGURE 41: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 15 à 40 km2. Régions subdésertiques (Catégorie I et III). (D'après J-RODIER)

FIGURE 42: Ecoulement annuel pour un bassin versant de 15 à 40 km2. Régions subdésertiques. Bonnes possibilités de ruissellement (Catégorie II). (D'après J-RODIER)

Ne donnent lieu à écoulement qu'en année humide.

En écartant les bassins de Catégorie III qui présentent peu d'intérêt, tous les autres bassins, et particulièrement ceux de la Catégorie II, ont un régime passablement irrégulier. Le tracé de la courbe de distribution des lames écoulées s'appuiera sur l'évaluation des trois valeurs de Ke correspondant aux fréquences médiane, décennale sèche et décennale humide, ainsi qu'éventuellement sur les hauteurs de précipitations annuelles déduites de la figure 33.

Classe 4: bassins de plus de 1000 km2

Plus que pour les bassins de la classe précédente, la dégradation du réseau hydrographique, ou la présence, à proximité de l'exutoire, d'un petit bassin versant ruisselant bien ou assez bien, doit être prise en considération. Si ce petit bassin fournit l'essentiel des apports (ce qui est fréquemment le cas), l'évaluation des volumes écoulés se fera à partir de ses seules caractéristiques. L'absence de zones de pertes, à l'amont du site étudié, devra également être vérifiée.

Bien que chaque cours d'eau soit un cas d'espèce, certains regroupements peuvent être faits:

Catégorie I: bassins à fortes ou assez fortes pentes (Ds > 150 m), sans dégradation hydrographique. Les coefficients d'écoulement ne sont pas sensiblement différents de ceux de la Catégorie I de la classe précédente (bassins de 40 à 300 - 500 km2).

Catégorie II: bassins à pentes modérées (50 < Ds < 150 m), peu perméables, mais toujours dégradés et ne présentant jamais un écoulement généralisé sur toute leur superficie.

Les coefficients d'écoulement annuel caractéristiques sont difficiles à évaluer:

- en année médiane, 2 à 5% dans les cas les plus favorables (ruissellement sur une grande partie du bassin, Pmed > 200 mm), 0,5 à 1% dans les cas moins propices, lorsque le lit est sensiblement dégradé;

- en année décennale sèche, entre 1 et 2% dans les meilleurs des cas;

- en année décennale humide, 4 à 10%.


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