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Recherches sur les sols forestiers en Finlande

Par V. T. AALTONEN
Professeur à l'Institut de recherches forestières de Finlande

Les recherches sur les sols forestiers ont pour principal objet les phénomènes qui, d'une façon ou d'une autre, affectent la fertilité du sol; quelles sont les propriétés du sol qui déterminent la fertilité, quel est le degré de permanence naturelle de cette fertilité et quelles sont les possibilités d'amélioration de la productivité des sols pauvres. On trouvera ci-dessous un exposé sommaire des travaux entrepris jusqu'ici dans ce domaine en Finlande, pays où les recherches sur les sols forestiers se poursuivent depuis un quart de siècle.

Afin de permettre une meilleure compréhension de la tendance générale et des objectifs de ces travaux de recherches, il convient d'expliquer au seuil du présent rapport certaines des conditions naturelles, ainsi que les caractéristiques de la sylviculture et de la recherche forestière actuellement effectuées en Finlande.

En premier lieu, un grand nombre de phénomènes qui, ailleurs, occupent ou ont occupé une place très importante dans les recherches sur les sols forestiers sont inconnus en Finlande. Prenons, par exemple, la compétition entre la forêt et la bruyère, qui constitue un véritable problème au Danemark et dans le nord-ouest de l'Allemagne; cette situation n'existe pas en Finlande, pas plus que la compétition entre la forêt et la steppe, ou entre la forêt et la prairie.

Les sols salins, comme ceux de Hongrie par exemple, qui se prêtent difficilement au boisement, n'existent pas ici et l'érosion y est inconnue. En outre, les sols forestiers de la Finlande sont riches en éléments nutritifs minéraux et n'ont pas été épuisés par des pratiques telles que l'extraction de la litière à laquelle on se livre en Europe centrale. De même, la couche d'humus ne constitue généralement Iras un obstacle sérieux à la régénération forestière comme dans certaines parties de l'Europe centrale. On ne pratique généralement aucune sorte d'amélioration du sol sur le parterre des coupes en Finlande.

Si l'on considère en outre que l'évaluation pratique de la qualité des sols forestiers en Finlande est basée exclusivement sur La végétation (types de sites forestiers de Cajander), il n'est pas surprenant qu'en pratique, comme en matière de recherches forestières, l'attention témoignée au sol lui-même ait été bien moins importante que dans un grand nombre d'autres pays. C'est ce qui explique que la pédologie forestière n'ait été inscrite au programme de l'enseignement supérieur forestier en Finlande que, depuis quatre années. L'auteur du présent rapport ne sait donc pas pour quelle raison à l'Institut de recherches forestières, les recherches pédologiques se sont vu attribuer une place si importante, au point que, lorsque l'Institut commença ses travaux en 1918, on créa, en plus des sections de sylviculture et de reconnaissance forestière, une section des recherches pédologiques, chacune des sections étant dirigée par un professeur (la section des recherches pédologiques a commencé ses travaux en 1923).

Recherches sur les propriétés et la fertilité du sol

De même que les autres recherches forestières effectuées en Finlande, la tendance générale des recherches sur les sols forestiers a été fondamentalement influencée par la théorie du type de forêt conçue par Cajander. Dans son vaste programme de recherche sur les sols forestiers en Finlande, Cajander a accordé la plus grande importance aux études ayant pour objet de déterminer la mesure dans laquelle les types forestiers correspondent à certaines catégories de sites naturels. La science ne peut se contenter, remarque-t-il, de constater simplement une certaine corrélation entre un type forestier et l'habitat, elle doit en outre analyser de plus près la valeur biologique de l'habitat. Ce n'est qu'en étudiant les facteurs qui déterminent la productivité d'un site qu'il sera possible d'établir un fondement solide pour l'établissement de mesures tendant à l'amélioration de la productivité des sols des forêts. Et Cajander n'a pas cru impossible d'arriver ainsi à une évaluation purement climatique et pédologique de la qualité du site.

Propriétés chimiques du sol

Les premières recherches effectuées en Finlande sur les sols forestiers étaient concentrées principalement sur les éléments nutritifs des plantes et l'acidité du sol. Les analyses chimiques du sol (en utilisant comme solvant de l'acide chlorhydrique dilué et à froid) ont montré clairement que l'amélioration de la productivité du type forestier était en corrélation avec un accroissement de la teneur en chaux et en azote total. La corrélation avec le potassium n'a pas pu être établie de façon aussi nette et la teneur en acide phosphorique a présenté une diminution avec l'amélioration de l'habitat. Les recherches effectuées sur des composés azotés en particulier ont montré que la teneur en azote ammoniacal augmente avec l'amélioration du type, forestier; par contre, on trouve principalement l'azote nitrique dans les sols forestiers a couverture herbacée. Il a pu être démontré également que la teneur totale en bactéries et champignons microscopiques augmente avec l'amélioration du type forestier, et la présence de ce que l'on est convenu d'appeler des groupes physiologiques de bactéries (bactéries nitrifiantes, de décomposition de la cellulose, de fixation de l'azote et autres) varie, dans une certaine proportion avec le type forestier. Il a été démontré en outre que l'acidité de la couche d'humus diminue avec l'amélioration du type forestier.

En ce qui concerne les résultats déjà mentionnés, il convient de noter deux faits principaux: (1) on n'a tenu compte dans ces recherches ni des espèces arborescentes ni des caractéristiques physiques du sol, mais seulement du type forestier base sur la couverture vivante; (2) les résultats caractérisant les différents types forestiers sont des valeurs moyennes déterminées à l'aide d'un volume énorme de matériaux; les caractéristiques propres à des sols portant un seul et même type forestier peuvent présenter des variations considérables.

Propriétés physiques du sol

L'influence de la finesse des éléments et des dépôts superficiels sur la productivité du sol a été le sujet de recherches considérables dans divers pays. De façon générale, il a été prouvé que la corrélation entre les propriétés du sol à cet égard et sa productivité est beaucoup plus étroite que dans le cas des propriétés chimiques du sol.

Selon la théorie de Cajander, un type forestier n'est pas déterminé par la texture du sol (sable, terre végétale. etc.). ta même sorte de sol peut supporter des types forestiers d'une très grande variété, et le même type forestier peut se présenter sur des sols très différents. Le type forestier représente le résultat, intégré de la valeur biologique totale de la région, l'effet commun de tous les principaux facteurs climatiques et pédologiques sur la végétation. Bien que ce soit généralement le cas, les données statistiques obtenues en ce qui concerne les sols productifs de la Finlande à l'occasion du deuxième inventaire forestier national (couvrant environ 8.000 placettes échantillons) montrent une corrélation très nette entre la texture du sol et le type forestier.

Les résultats sont illustrés dans les Figures 1 et 2; les sols sont divisés en trois classes de texture selon leur degré de finesse: A = sols à éléments grossiers (sable, gravier, etc.). B = sols à éléments moyens (sols morainiques ordinaires). C = sots à éléments fins (sols argileux, etc.). Les zones de formation du sol (1,2, etc.), selon lesquelles les matériaux de recherche sont divisés, seront étudiées plus loin. Dans des zones 3 et 4, La répartition des sols est la suivante; sol A: 12-18 pour cent; sol B: 72-77 pour cent: sol C 10-11 pour cent.

En ce qui concerne la répartition des types forestiers selon les différents types de sols, on a remarqué que lorsque l'on passe des zones à sols de composition grossière aux zones de sols à éléments fins, les conditions climatiques demeurant les mêmes, ou bien lorsque l'on passe du nord au sud de la Finlande dans des zones ayant le même type de sol, le nombre de types forestiers diminue, c'est-à-dire qu'un petit nombre de types deviennent prédominants. Sur les trois espèces principales, le pin sylvestre (Pinus sylvestris) domine dans les sols à éléments grossiers, l'épicéa de Norvège (Picea abies) et le bouleau dans les sols à éléments plus fins.

Figure 1. Répartition des types forestiers entre sols A, B. et C, dans les zones de formation du sol 3 et 4. CT = type Calluna, VT = type Vaccinium, MT = type Myrtillus, OMT = type Oxalis-Myrtillus.

La croissance des arbres peut en outre varier considérablement pour le même type forestier selon la texture du sol et la finesse de ses éléments. Dans les forêts de type Myrtillus et Vaccinium par exemple, le rendement sur des sols morainiques très pierreux ne représente que 50 pour cent de celui d'un type forestier normal. Certaines recherches spéciales ont en outre démontré que la productivité des sols morainiques dépend étroitement de la quantité de terre fine contenue dans le sol superficiel, si cette quantité est calculée en tant que proportion de l'ensemble du sol (en comprenant également les roches, les pierres, etc.). Dans les dépôts fluvio-glaciaires, par contre, il faut également tenir compte des couches plus profondes du sol.

Processus de formation du sol. Les recherches déjà décrites ont trait à la composition chimique et à la texture du sol dans les forêts de différents types forestiers. Il faut mentionner également d'autres travaux de recherches se rapportant aux processus de formation du sol.

Parmi les principaux processus de formation du sol du globe, la podzolisation domine en Finlande où le climat est humide et le sol pauvre en chaux. En raison des variations climatiques qui se produisent même dans ce pays, les conditions présidant à la formation du sol ne sont pas uniformes dans toutes les régions. Les lessivage dépend en outre beaucoup de la texture du sol et du degré d'humidité.

Nous ne mentionnerons ici que quelques-uns des résultats des recherches effectuées sur la formation ´du sol, et principalement ceux qui méritent d'être examinés du point de vue pratique.

En premier lieu, si l'épaisseur de l'horizon-A (d'un sol minéral) est utilisé pour mesurer la puissance du lessivage, la Finlande peut être divisée en différentes régions de formation du sol, ainsi qu'il est indiqué dans la Figure 3. Sur ces différentes régions, celles marquées 1, 2, 3 et 4 représentent des sols géographiquement anciens, et 2a et 3a représentent des sols jeunes. Parmi les premières, le lessivage est faible dans la région 4, un peu plus fort dans la région 3, et très fort dans les régions 1 et 2. Le lessivage est très faible dans la région 3a. Les variations - en dehors de celles dues à l'âge du sol - s'expliquent par les variations d'humidité.

Au cours des recherches par placettes échantillons, qui ont été effectuées à l'occasion du Deuxième Inventaire forestier, l'épaisseur de la couche d'humus (sur les sols productifs) et de l'horizon-A ont également été mesurés. Les classes < 2 cm, 2-4 cm, et > 4 cm ont été utilisées pour mesurer la couche d'humus; pour l'horizon-A - (= néant ou très faible), < 3 cm et 3 + > cm. Les résultats pour les différents types forestiers dans les régions ayant donné les matériaux d'observation les plus abondants sont indiqués aux Figures 4 et 5. On remarquera que les sols productifs sur lesquels la couche d'humus est considérablement plus épaisse que 4 cm, ou l'horizon-A très au-dessus de 4-5 cm, sont assez rares.

On n'a pas encore pu démontrer de façon satisfaisante pourquoi le profil du sol varie avec le type forestier de la manière précédemment décrite, mais il s'agit très vraisemblablement là d'une question de l'influence de la texture du sol (et des conditions d'humidité).

Les espèces arborescentes sont généralement considérées, dans les traités de pédologie, comme constituant un facteur important, sinon décisif, pour la formation du sol. Ainsi qu'on le verra par les Figures 6 et 7, cependant, le développement du sol (l'épaisseur de la couche d'humus et l'horizon-A) en Finlande est assez indépendant de ces espèces.

Il existe d'autre part une corrélation très nette entre la texture et le profil du sol. Ainsi qu'il ressort des Figures 8 et 9, la couche d'humus devient plus épaisse et l'horizon-A diminue lorsque la texture du sol devient plus fine.

Figure 2. Répartition des sols entre divers types forestiers sur la zone 4 de formation du sol. Lh = forêts à couverture herbacée, PyT = type Pyrola. (Pour une explication plus détaillée des symboles, voir Figure 1).

Soulignons ici que ces résultats se rapportent aux forêts à couverture de bruyère, dont l'humus est un mor, mais que l'activité biologique de l'humus augmente dans la direction CT -> OMT. De façon générale, lorsque l'on étudie le rapport entre les espèces arborescentes et la couche d'humus, on remarquera qu'en Finlande le sol des forêts est presque partout garni d'une couverture vivante et que la couverture morte constituée par cette végétation joue un rôle très important dans la formation de la couche d'humus. Etant donné que la nature de cette végétation, ou couverture vivante, dépend étroitement de la nature du sol minéral et des conditions d'humidité les principales caractéristiques du sol minéral ont généralement une influence décisive sur la formation de l'humus.

Figure 3. Régions de formation du sol en Finlande

Il pourra être utile de mentionner en outre à cet égard que certaines études qui ont été effectuées en Finlande sur l'influence du mélèze de Sibérie (Larix sibirica), par comparaison avec d'autres espèces arborescentes, sur les caractéristiques chimiques, physiques et biologiques du sol, n'ont pas mis en lumière des différences très distinctes entre les différentes espèces. Le mélèze semble appauvrir le sol au lieu de l'améliorer.

Figure 4. Répartition des classes d'épaisseur (< 2 cm, etc.) de la couche d'humus selon les types forestiers dans les régions de formation du sol 3 et 4.

Les études effectuées sur la chimie et la physique de la formation du sol ont démontré en détail les transformations chimiques et physiques du sol minéral dans les forêts sèches, humides et les forêts humides à couverture de bruyère, aussi bien que dans les forêts à couverture herbacée. Ces recherches ont jeté une clarté nouvelle sur les phénomènes particuliers suivants:

1) Développement du profil podzolique au fuir et à mesure que le sol devient plus ancien;
2) Dépendance de la formation du sot sur la grosseur des éléments constituant le sol;
3) Composition minéralogique et chimique du sol;
4) Lessivage de la chaux et autres éléments nutritifs;
5) Types de formation du sol.

Le phénomène de soulèvement du sol qui, en Finlande, continue depuis la période glaciaire, permet de suivre le développement du profil du sol depuis son commencement pendant une période de plus de 10.000 ans. Ces recherches ont permis une analyse de l'importance spéciale du temps comme facteur de formation du sol; elles ont montré qu'à certains égards le développement du profil podzolique diffère de la conception primitive pour ce qui est du fait, tout au moins, que l'horizon-B se développe de bas en haut. Les transformations chimiques à l'intérieur du sol peuvent déjà être démontrées analytiquement dans les sols de 200 à 300 ans, maris les changements sont néanmoins si lents que dans les sols forestiers ordinaires, une période de 1.000 à 1.500 ans est nécessaire pour que le profil atteigne la maturité.

Figure 5. Répartition des classes d'épaisseurs (-, etc.) de l'horizon-A, selon les types forestiers dans les régions de formation du sol 3 et 4.

Ainsi qu'on l'a déjà mentionné, il existe une corrélation très nette entre le profil du sol et les dépôts géologiques superficiels. Les analyses mécaniques du sol ont mis en lumière cette corrélation de façon détaillée et ont démontré qu'elle est assez constante. Le lessivage est plus fort dans les sols assez grossiers pour que l'eau s'y insinue, mais cependant leurs éléments sont assez fins pour retenir le degré d'humidité', nécessaire à La décomposition. Le lessivage est faible ou nul dans les sols argileux, et très fort dans les sables humides. Il se forme une carapace imperméable, surtout calcaire, dans les sols «paludifiés» à éléments grossiers, et très rarement dans les sols productifs ordinaires. Les particules les plus fines ne sont entraînées à de grandes profondeurs que dans les sols argileux.

Figure 6. Epaisseur de la couche d'humus et espèces arborescentes dans la région de formation du sol 4; MV = peuplements où domine le pin; KV = peuplements où domine l'épicéa; LV = peuplements où dominent les feuillus. Type de sol, moraine argileuse.

En ce qui concerne la composition minéralogique et chimique, les sols forestiers de la Finlande sont riches en éléments nutritifs; on n'y trouve pas de sols sablonneux et pauvres comme dans le nord de l'Allemagne, dans le Jutland, au Danemark, et ailleurs. Quoi qu'il en soit, on ne trouve du carbonate de calcium que dans quelques endroits, en Finlande, et en petites quantités, et une portion considérable du silicate de chaux est lessivée. De façon générale, les recherches n'ont pas dépassé une profondeur de 50 à 60 centimètres, mais on peut conclure de certaines observations faites qu'une partie du calcium est lessivée d'une couche de surface ayant au moins 1 mètre d'épaisseur, ce qui démontre également que le sol est travaillé par les agents atmosphériques au moins à cette profondeur. En outre, les analyses totales ont démontré que la teneur en silice diminue au fur et à mesure que décroît la grosseur des particules du sol, alors que la teneur en calcium, en aluminium et en fer augmente.

Les types de formation du sol qui sont les plus importants en Finlande du point de vue de la sylviculture ont été divisés par l'auteur en deux classes principales, la couche d'humus de la première étant appelée mor et celle de la dernière mull. Les principaux types de la première classe sont les podzols, les sols bruns et les sols gris; ceux de la dernière classe sont les sols bruns et gris. Parmi les types secondaires de sol podzol, les plus importants sont le podzol ferreux et le podzol à humus, le premier dominant dans les sols forestiers productifs ordinaires, et le dernier dans les sols humides et imbibés d'eau. Du point de vue morphologique, ces types diffèrent les uns des autres en particulier en ce que l'horizon-B du podzol ferreux est rougeâtre ou brun, alors que celui du podzol à humus est marron-chocolat ou presque noir (cette couleur étant causée par une quantité abondante d'humus). Le sol gris est le type de formation du sol de l'argile le sol brun se trouve dans divers types de forêts le sol mull brun ne se trouve cependant que dans les forêts à couverture herbacée. Le dernier type mentionné peut être considéré comme une variété nordique du sol brun de l'Europe Centrale (Ramann).

Recherches sur la stabilité de la fertilité du sol

Une question d'importance vitale, non seulement du point de vue de la sylviculture, mais également en ce qui concerne l'utilisation des terres en général, est la variation régionale de la fertilité du sol et ses causes. En rapport étroit avec ce problème est la question de la stabilité de la fertilité du sol.

D'après les renseignements recueillis sur la présence des types forestiers (et marécageux) et des espèces végétales dites exigeantes, la Finlande est divisée en différentes régions de fertilité, ainsi qu'on le verra à la Figure 10. La moitié septentrionale du pays est beaucoup plus aride que la moitié méridionale, mais même dans cette dernière moitié, la fertilité présente des différences régionales notables. Les régions extrêmement fertiles sont très peu étendues et ne sont donc pas visibles sur la carte.

Les principales variations de fertilité, telles que la différence entre la moitié nord et la moitié sud du pays, sont dues à des différences de climat. Dans les régions de conditions climatiques similaires, les différences de fertilité sont causées surtout par des variations de la nature du sol et de la topographie, c'est-à-dire des facteurs géographiques. Dans une certaine mesure, en fait, on a démontré l'existence d'une plus grande abondance de sols fertiles dans les régions où la roche mère est constituée par une plus grande proportion de roches de type basique que la moyenne; quoiqu'il en soit, ces roches ne constituent qu'une faible proportion du sous-sol. En Finlande, la roche mère est constituée, pour la plus grande partie de roches granitiques primaires.

Figure 7. Epaisseur de l'horizont-A et espèces arborescentes dans la région de formation du sol 4. (Pour les symboles, voir Figure 6).

L'évaluation de la qualité du sol forestier est étroitement liée à la mesure dans laquelle les classes de qualité sont statiques ou dynamiques. Par exemple, plus les classes de qualité sont constantes par nature, moins grandes sont les possibilités de changer la productivité du sol au moyen d'opérations sylvicoles. Du point de vue de la stabilité de la fertilité du sol en Finlande, le lessivage mérite une attention particulière. Le lessivage général des éléments nutritifs à une plus grande profondeur signifie un épuisement continu du sol. Simultanément, l'acidité du sol augmente et la décomposition de la couverture morte se trouve retardée. Ces changements sont cependant si lents qu'il n'est pas nécessaire d'en tenir compte dans les classifications pratiques de qualité et dans les calculs de rendement.

Figure 8. Epaisseur de la couche d'humus et texture du sol dans les régions de formation du sol 1 + 2, 3 et 4. A = sols à éléments grossiers; C = sols à éléments fins.

Dans un pays comme la Finlande, où la plupart des sols forestiers ont été exposés au cours des temps à plusieurs incendies, l'effet du feu sur la productivité présente pour la pédologie forestière un problème supplémentaire. Bien qu'aucune recherche n'ait encore été effectuée sur ce problème, l'impression générale semble être que, tout au moins dans les forêts sèches à couverture de bruyère, les incendies ont pour effet d'épuiser le sol. Cajander, par exemple, mentionne qu'un type Vaccinium, et même un type Myrtillus, peuvent porter pendant un certain temps une couverture, vivante qui ne paraît pas très différente de celle du type Calluna, et que dans certains cas un type Vaccinium peut changer de façon permanente en type Calluna. Malgré ces modifications de la végétation et certains autres changements, les incendies ne portent probablement que très rarement atteinte d'une manière permanente à la qualité générale du sol. La capacité du sol pour la régénération naturelle est dans la plupart des cas améliorée par les incendies, mais, là, également, l'effet est de courte durée. Il semble que, sur des terrains sablonneux extrêmement secs, l'incendie peut; causer une détérioration plus durable de la capacité de régénération.

Figure 9. Epaisseur de l'horizont-A et texture du sol (mêmes symboles que pour la Figure 8).

Un effet qui, à beaucoup d'égards, ressemble a celui des incendies de forêts, a été déterminé par une forme primitive de culture, autrefois très courante en. Finlande, et à laquelle on a donné le nom de «défrichement par le feu». Etant donné dans ce cas que le sol était également cultivé dans une certaine mesure et que l'on en retirait une ou plu sieurs récoltes, les changements ainsi causés dans le sol étaient plus grands et plus durables que les modifications provoquées par les incendies de forêts. Jusqu'à présent tout au moins, rien ne prouve que les cultures pratiquées en incendiant le terrain aient causé un changement pratiquement notable et durable des conditions de fertilité des sols forestiers finlandais.

Somme toute, la qualité des sols forestiers de Finlande peut être considérée comme. assez constante et pratiquement statique. Ceci n'exclut pas la, possibilité de changements de la qualité du site, causés par des facteurs climatiques.

On remarquera que les recherches dont il est, fait mention dans le présent rapport ne s'appliquent pas à la paludification les sols forestiers. On peut se faire une idée de l'importance de ce processus par le fait que les marais constituent environ le tiers de l'ensemble de la superficie des terres en Finlande, et que la plus grande partie des marais actuels étaient autrefois des terres forestières fermes ou sèches. Quoiqu'il en soit, la paludification des sols forestiers est également un processus relativement dent et, de nos jours, il est probablement encore plus lent qu'auparavant.

Autres recherches

Parmi les autres recherches entreprises, les plus importantes sont; celles relatives à la composition chimique des aiguilles et des feuilles, à la formation de la couverture morte, et à ce que l'on appelle la compétition des racines. Ces recherches ne sont pas encore terminées, mais il a été possible de démontrer que la composition de la cendre en la teneur en éléments azotés des aiguilles et des feuilles dépend du type forestier aussi bien que de l'espèce de l'arbre.

Résultats actuels des recherches sur les sols forestiers

Les principaux résultats à ce jour des recherches entreprises sur les sols forestiers en Finlande, aussi bien que leur importance pratique, peuvent, être résumés de la façon suivante:

Dans ces conditions climatiques, topographiques, et autres similaires. il existe une corrélation plus ou moins nette entre les types forestiers et les propriétés du sol les plus importantes du point de vue de la fertilité du sol. Cette corrélation, à son tour, prouve que les types forestiers représentent des classes naturelles de sites. Elle ne décide cependant pas à elle seule de la possibilité d'adopter le type forestier comme moyen d'évaluation pratique de la qualité du site.

En ce qui concerne leur composition minéralogique, les sols forestiers de la Finlande sont relativement riches en éléments nutritifs. Bien qu'il se soit produit, et qu'il se produise toujours un certain lessivage, les changements dus à ce processus et à d'autres causes sont lents. Le lessivage est plus faible dans les sols argileux et plus intense dans les sables humides.

A l'heure actuelle, au moins, les possibilités d'amélioration de la fertilité générale des sols forestiers ne sont pas très grandes. Même les opérations sylvicoles, telles que les éclaircies, les coupes de régénération, etc., n'ont pas un effet considérable à cet égard. Il est possible, par contre, de contribuer à la régénération naturelle de la forêt par un traitement approprié de la surface du sol (hersage, brûlage, traitement à l'aide de produits chimiques ou autres moyens).

Tâches a entreprendre en matière de recherches sur les sols forestiers

En ce qui concerne les tâches à entreprendre en matière de recherches sur les sols forestiers, nous avons déjà mentionné plus haut les différentes questions qui font actuellement l'objet de recherches. Parmi ces dernières, les recherches relatives à la compétition entre les arbres pour l'espace vital dans le sol sont tout particulièrement indiquées pour constituer une base théorique à la sylviculture appliquée, c'est-à-dire selon l'habitat. Parmi les autres problèmes particuliers, ceux ayant trait au lessivage et à l'amélioration de la capacité de régénération du sol en particulier devront faire l'objet de recherches supplémentaires. Des expérimentations à l'aide du «lysimètre» devront être effectuées pour élucider ce premier problème et, en procédant à l'analyse de l'eau des rivières, on devra estimer la quantité d'éléments nutritifs qui sont entraînés dans la mer.

Par-dessus tout, il conviendra de se livrer à des recherches plus approfondies pour déterminer dans quelle mesure la productivité du sol forestier dépend des caractéristiques du sol; ces recherches devront porter en particulier sur les propriétés et les processus microbiologiques du sol qui' jusqu'ici, ont été très peu étudiés en Finlande. Une question importante est celle de la classification des qualités de site sur les dépôts fluvio-glaciaires, notamment dans les forêts sèches à couverture de bruyère du nord de la Finlande. L'objectif de toutes les recherches appartenant à ce groupe est de mettre au point, par les types forestiers, une méthode d'évaluation de la qualité du site en se basant sur les caractéristiques du sol.

Figure 10. Variations régionales de la fertilité en Finlande. Les régions les plus fertiles sont représentées en noir, les moins fertiles en blanc.

L'objet des recherches sur les sols forestiers varie d'un pays à l'autre suivant les différences qui existent entre les conditions naturelles et économiques des divers pays. Il existe cependant des problèmes communs à tous les pays dans lesquels la sylviculture occupe une place importante, et il sera profitable aux sylviculteurs de ces différents pays de travailler en commun à leur solution. Parmi les sujets précédemment mentionnés pour les recherches sur les sols forestiers en Finlande, certaines questions que nous indiquons ci-après semblent appartenir tout particulièrement à cette catégorie:

1) Evaluation de la qualité du site au moyen de recherches sur le sol;
2) Stabilité de la fertilité du sol;
3) Compétition parmi les arbres d'un peuplement pour l'espace vital dans le sol.


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