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La sous-alimentation dans le monde

La gravité de la faim: que manque-t-il à ceux qui ont faim?

Pour lutter efficacement contre la faim, il faut savoir non seulement combien de personnes en souffrent dans le monde, mais aussi ce qui manque à chacune de ces personnes.

Déficit alimentaire moyen des personnes sous-alimentées, 1996-1998

La connaissance du déficit énergétique alimentaire complète le tableau de la faim dans un pays. Lorsque ce déficit est de 400 kilocalories par jour, la situation est plus grave que là où il n'est que de 100 kilocalories par jour. Plus le déficit est grand, plus les personnes sous-alimentées sont exposées à des problèmes de santé . Une personne faible et maladive ne peut pas s'épanouir, une nation dont le peuple est faible et maladif ne peut pas progresser.

L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde donne chaque année les estimations les plus récentes du nombre de personnes sous-alimentées et de la prévalence de la faim chronique. Cette année, nous allons plus loin et nous avons calculé le déficit alimentaire de ceux qui ont faim, c'est-à-dire le nombre de calories qui leur manque chaque jour pour couvrir leurs besoins minimaux.

Amélioration quantitative et qualitative de l'alimentation: l'exemple de la Chine

Lorsque l'apport alimentaire est suffisant, l'alimentation est généralement plus diversifiée et fournit davantage d'énergie et d'autres nutriments.

Source: Enquête nationale sur les revenus et les dépenses des ménages urbains, Gouvernement chinois, 1990.

La gravité de la faim, ou déficit alimentaire, est égale à la différence entre la quantité moyenne d'énergie alimentaire que les personnes sous-alimentées obtiennent de leurs repas et la quantité minimale d'énergie dont elles ont besoin pour préserver leur masse corporelle et avoir une activité légère (voir encadré page 6 pour plus de précisions).

Le déficit alimentaire de la plupart des 800 millions de personnes qui souffrent de faim chronique est de 100 à 400 kilocalories par jour. La plupart de ces personnes ne meurent pas de faim. Souvent, elles sont minces mais pas émaciées. La faim chronique n'est pas toujours apparente car l'organisme compense le déficit énergétique par un ralentissement de l'activité physique et, dans le cas des enfants, de la croissance. Les personnes qui ne mangent jamais à leur faim sont plus exposées aux maladies, les enfants sont souvent léthargiques et incapables de se concentrer à l'école, les mères donnent naissance à des bébés chétifs et les adultes n'ont pas toujours l'énergie nécessaire pour réaliser leur potentiel.

En chiffres bruts, il y a plus de personnes chroniquement sous-alimentées en Asie et dans le Pacifique, mais en termes de gravité de la faim, c'est manifestement en Afrique subsaharienne que le problème est le plus grave. Là, dans 46 pour cent des pays, le déficit alimentaire moyen des personnes sous-alimentées est de plus de 300 kilocalories par jour. On ne trouve un déficit alimentaire aussi grave que dans 16 pour cent des pays d'Asie et du Pacifique.

Lorsque le déficit énergétique alimentaire est très élevé, il concerne généralement tous les types d'aliments, y compris les aliments de base riches en glucides (maïs, pommes de terre, riz, blé et manioc) qui fournissent essentiellement de l'énergie. Par contre, lorsque le déficit est plus modéré, les personnes sous-alimentées ont généralement assez d'aliments de base mais ce qui leur manque ce sont les autres aliments nécessaires pour une bonne nutrition: légumineuses, viande, poisson, matières grasses, produits laitiers, fruits et légumes, qui fournissent protides, lipides et micronutriments. La diversification de l'alimentation est essentielle pour la sécurité alimentaire.

L'insuffisance du revenu monétaire est une des principales causes qui empêchent les populations tant urbaines que rurales d'avoir un régime suffisamment diversifié. Les familles rurales pauvres, même lorsqu'on les aide à produire des aliments plus diversifiés sur leur lopin familial, vont souvent les vendre plutôt que de les consommer car elles peuvent en tirer un bon prix. Par conséquent, la sécurité alimentaire ne s'améliore que lorsque le revenu global des ménages atteint un niveau qui leur permet de consommer les autres aliments nécessaires.

Déficit 1996-1998

La gravité de la faim se mesure par le déficit énergétique moyen des personnes sous-alimentées, et non de l'ensemble de la population, exprimé en kilocalories par personne et par jour. Plus le chiffre est élevé, plus la faim est profonde.

Proche-Orient et Afrique du Nord

kcal

   

Afghanistan

480

Gabon

160

Yémen

290

Pays en transition

kcal

Iraq

210

Tadjikistan

250

Maroc

210

Azerbaïdjan

240

Algérie

190

Kirghizistan

230

Égypte

190

Bulgarie

220

Asie et Pacifique

kcal

Iran, Rép. islamique d'

190

Arménie

210

Bangladesh

340

Koweït

180

Géorgie

210

Corée, RPD de

340

Jordanie

170

Moldova, Rép. de

210

Mongolie

310

Turquie

170

Bosnie-Herzégovine

190

Inde

290

Liban

160

Turkménistan

190

RDP lao

280

Rép. arabe syrienne

160

Croatie

180

Viet Nam

280

Arabie saoudite

150

Estonie

180

Cambodge

270

Émirats arabes unis

140

Ouzbékistan

180

Pakistan

270

Jamahirya arabe libyenne

130

Macédoine, Ex-Rép. yougoslave de

170

Philippines

270

Tunisie

130

Fédération de Russie

170

Népal

260

Afrique subsaharienne

 

Kazakhstan

160

Papouasie-Nouvelle-Guinée

260

Somalie

490

Slovaquie

160

Sri Lanka

260

Mozambique

420

Ukraine

160

Thaïlande

260

Burundi

410

Albanie

150

Chine*

250

Libéria

390

Lettonie

150

Indonésie

200

Congo, Rép. dém. du

380

Yougoslavie**

150

Myanmar

200

Sierra Leone

380

Hongrie

140

Chine, RAS de Hong Kong

140

Érythrée

370

Lituanie

140

Malaisie

140

Niger

350

Bélarus

130

Corée, Rép. de

130

Éthiopie

340

République tchèque

130

Amérique latine et Caraïbes

Kcal

Zambie

340

Pologne

130

Haïti

460

Zimbabwe

340

Roumanie

130

Nicaragua

300

Tchad

330

Pays développés

 

Honduras

270

Rwanda

330

Afrique du Sud

160

Brésil

250

Angola

320

Suède

150

République dominicaine

250

Guinée

320

Finlande

140

Guatemala

250

Rép. centrafricaine

310

Grèce

140

Pérou

240

Madagascar

310

Italie

140

Bolivie

230

Malawi

310

Pays-Bas

140

Guyana

230

Tanzanie, Rép.-Unie de

300

Suisse

140

Panama

230

Burkina Faso

290

États-Unis

140

Trinité-et-Tobago

230

Congo, Rép. du

290

Australie

130

Colombie

220

Kenya

290

Autriche

130

Paraguay

220

Mali

290

Belgique

130

Cuba

210

Lesotho

280

Canada

130

Mexique

210

Ouganda

280

Danemark

130

Venezuela

210

Cameroun

260

France

130

El Salvador

200

Namibie

260

Allemagne

130

Jamaïque

200

Togo

260

Islande

130

Costa Rica

160

Botswana

240

Irlande

130

Équateur

160

Gambie

240

Japon

130

Chili

150

Mauritanie

240

Luxembourg

130

Uruguay

150

Sénégal

240

Nouvelle-Zélande

130

Argentine

140

Soudan

240

Norvège

130

   

Côte d'Ivoire

230

Espagne

130

   

Bénin

220

Royaume-Uni

130

   

Ghana

210

Israël

120

   

Nigéria

210

Malte

120

   

Swaziland

210

Portugal

110

       

* Y compris Taïwan Province de Chine
** Serbie et Monténégro

Estimations et projections

D'après les dernières estimations, en 1996-1998, il y avait encore 826 millions de personnes sous-alimentées, 792 millions dans les pays en développement et 34 millions dans les pays développés. Il n'y a donc eu aucun progrès par rapport à la période précédente (1995-1997). Les renseignements donnés dans les graphiques et les figures montrent que le tableau d'ensemble à l'échelon régional n'a lui non plus guère changé.

Évolution projetée de la sous-alimentation

 

1996-98

2015

2030

1996-98

2015

2030

 

Pourcentage de la population

Millions de personnes

Afrique subsaharienne

34

22

15

186

184

165

Proche-Orient/Afrique du Nord

10

8

6

36

38

35

Amérique latine et Caraïbes

11

7

5

55

45

32

Chine* et Inde

16

7

3

348

195

98

Autres pays d'Asie

19

10

5

166

114

70

Pays en développement

18

10

6

791

576

400

* Y compris Taïwan Province de Chine
Source: Agriculture: Horizon 2015-2030. FAO, Rapport technique intérimaire, avril 2000

Toutefois, les variations à court terme ne révèlent pas nécessairement les tendances à long terme, et les nouvelles projections à l'horizon 2015 et 2030 font apparaître une amélioration. Le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde en développement devrait tomber à quelque 580 millions en 2015, ce qui constitue un progrès, mais reste encore très loin de l'objectif adopté au Sommet mondial de l'alimentation, à savoir de réduire la population sous-alimentée de moitié pour la ramener à quelque 400 millions de personnes. D'après les projections, ce chiffre ne sera pas atteint avant 2030.

Population totale et nombre de personnes sous-alimentées, par région, 1996-1998 (millions)

En 2015, la proportion globale de la population des pays en développement encore sous-alimentée sera moitié moindre qu'en 1990-1992, période de base retenue pour définir l'objectif du Sommet mondial, mais le nombre de personnes sous-alimentées sera encore de quelque 70 pour cent de ce qu'il était en 1990-1992.

À l'échelon régional, l'Asie du Sud et de l'Est devrait approcher l'objectif d'ici à 2015, tandis que l'Afrique subsaharienne et le Proche-Orient en resteraient loin et l'Amérique latine se situerait entre les deux. Globalement, il y aurait donc une poursuite du déclin à long terme de la prévalence de la sous-alimentation en Asie, qui a commencé en 1969-1971 en Asie de l'Est et 10 ans plus tard en Asie du Sud. Dans les deux plus grands pays du monde, la Chine et l'Inde, le ralentissement de la croissance démographique et la vigueur de l'expansion économique devraient entraîner une amélioration notable de la disponibilité alimentaire par habitant d'ici à 2015.

Pour ces deux pays ensemble, la prévalence de la sous-alimentation devrait tomber de 16 pour cent en 1996-1998 à 7 pour cent en 2015. Comme leur population globale représente plus d'un tiers de la population mondiale, ces variations auront un effet important sur les moyennes mondiales.

Nombre et proportion de personnes sous-alimentées, par région et sous-région, 1996-1998

Les perspectives de l'Afrique subsaharienne sont plus sombres. Cette région est celle dans laquelle se trouvent la plupart des pays les plus pauvres du monde, où la prévalence de la sous-alimentation est élevée et les perspectives de croissance économique sont peu encourageantes.
Le centre, le sud et l'est du continent sont dans une situation particulièrement difficile.

La prévalence de la sous-alimentation en Afrique subsaharienne devrait tomber de 34 pour cent en 1996-1998 à 22 pour cent en 2015, mais comme la croissance démographique est très forte, le nombre de personnes sous-alimentées pourrait augmenter encore un peu d'ici à 2015 avant de commencer à diminuer. On retrouve une situation similaire dans quelques pays très pauvres d'Asie de l'Est, des Caraïbes et du Proche-Orient, qui ont aussi peu de chances d'atteindre l'objectif fixé au Sommet.

Nombre de personnes sous-alimentées, par région, 1996-1998 (millions)

Proportion de personnes sous-alimentées selon les catégories de prévalence et les régions, 1996-1998

Comme nous le verrons plus en détail tout au long du présent rapport, les pays et régions dans lesquels les progrès sont lents sont prisonniers d'un cercle vicieux de pauvreté et de disette et ont besoin d'une aide spécifique. Mais, comme le montrent les succès obtenus dans d'autres parties du monde, un effort concerté et concentré peut faire mentir les projections.

Proportion de la population sous-alimentée dans les pays en développement, par catégorie de prévalence, 1990-1992 et 1996-1998

Prévalence et gravité de la faim: la pénurie alimentaire

Pour obtenir un tableau aussi précis que possible de la faim dans le monde, la FAO a combiné les estimations de la prévalence et de la gravité de la faim (présentées aux pages 1 à 4) pour calculer le degré de pénurie alimentaire et répartir ainsi les pays en cinq groupes (carte ci-contre), allant des pays dans lesquels la prévalence globale de la sous-alimentation et le déficit énergétique alimentaire de la population sous-alimentée sont très faibles (catégorie 1) à ceux où la disette est la plus grave (catégorie 5, prévalence de la sous-alimentation et déficit énergétique très élevés).

Les 23 pays du groupe 5 sont ceux qui ont le plus de mal à nourrir leur population. L'instabilité chronique, les conflits, la mauvaise gestion des affaires publiques, les intempéries, la pauvreté endémique, les pertes de récolte, la pression démographique et la fragilité des écosystèmes

Degré de pénurie alimentaire: carte de la faim dans le monde, 1996-1998 s'accompagnent d'une disette profonde, généralisée et persistante.

Dix-huit pays d'Afrique subsaharienne, soit près de la moitié des pays africains étudiés dans le présent rapport, appartiennent à cette catégorie, de même que l'Afghanistan, la Bangladesh, Haïti, la Mongolie et la République démocratique populaire de Corée.

À l'autre extrême, on trouve les 52 pays du groupe 1, soit l'ensemble des pays industrialisés, 11 pays en transition et 15 pays en développement relativement riches. La paix et la prospérité caractérisent tous ces pays.

Prévalence et gravité de la faim, 1996-1998

L'objectif adopté au Sommet mondial de l'alimentation est de réduire le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde. Toutefois, on pourrait aussi obtenir des améliorations très importantes en commençant par se concentrer sur la réduction de la gravité de la faim.

Dans un tel scénario, les pays dans lesquels la prévalence de la sous-alimentation est élevée et le déficit supérieur à 300 kilocalories par personne et par jour devraient faire de la réduction de la gravité de la faim leur priorité. Cette stratégie ne leur permettrait peut-être pas d'obtenir une diminution immédiate du nombre de personnes sous-alimentées, mais ces personnes auraient moins faim qu'auparavant. En conséquence, la morbidité liée à la sous-alimentation diminuerait et les pays concernés seraient en bonne voie pour obtenir un recul durable de la prévalence de la faim.

Calcul des besoins énergétiques alimentaires

La quantité de nourriture dont les gens ont besoin chaque jour - c'est-à-dire leurs besoins énergétiques alimentaires quotidiens - dépend de leur poids, de leur taille, de leur âge, de leur sexe et de leur niveau d'activité.
Le tableau ci-contre donne des exemples de différents niveaux d'activité (légère, moyenne ou intense) et la quantité des calories que nécessite cette activité pour les hommes et les femmes en fonction de leur masse corporelle. Les personnes âgées ont besoin d'un peu moins d'énergie alimentaire et les enfants de beaucoup moins.
On calcule la prévalence et la gravité de la faim en utilisant les besoins énergétiques alimentaires minimaux des différents groupes de sexe et d'âge de la population. Pour chaque groupe, le besoin minimal est fondé sur le poids minimal acceptable compte tenu de la stature moyenne du groupe dans le pays considéré et sur une activité légère.

Niveau d'activité physique des adultes

Activité légère: niveau d'activité correspondant à une occupation sédentaire (bureau ou travail derrière un comptoir avec des machines).
Activité modérée: activité physique légère permanente telle que le travail dans l'industrie légère ou le travail agricole hors saison.
Activité intense: travail intense et occasionnellement épuisant (production agricole, industries extractives et sidérurgie par exemple).

Besoins énergétiques quotidiens approximatifs des adultes

 

Activité légère (kcal)

Activité modérée (kcal)

Activité intense (kcal)

Hommes (stature 1,71 m)*

     

Masse corporelle minimum (54 kg)

2 335

2 682

3 164

Masse corporelle maximum (73 kg)

2 786

3 199

3 775

Femmes (stature 1,59 m)*

     

Masse corporelle minimum (47 kg)

1 846

1 941

2 154

Masse corporelle maximum (63 kg)

2 223

2 337

2 594

* Les besoins alimentaires seraient plus élevés pour des personnes plus grandes et moins élevés pour des personnes plus petites.
Normes fondées sur les rapports du Comité spécial mixte FAO/OMS/UNU d'experts sur les besoins en énergie et en protéines, 1985.

Estimation de la prévalence et de la gravité de la faim

La méthode employée par la FAO pour estimer la prévalence et la gravité de la sous-alimentation peut être résumée comme suit:

Oú se trouvent les victimes de la faim dans les pays en transition?

Communauté des États indépendants

Moins de 10 ans après la démantèlement de l'Union soviétique, en 1991, la sous-alimentation reste un problème persistant dans de nombreux pays qui ont succédé à l'URSS et qui font aujourd'hui partie de la Communauté des États indépendants (CEI). En revanche, les pays d'Europe orientale et les pays baltes ont pour l'essentiel réussi à éviter ce problème.

Telles sont les conclusions des premières estimations faites par la FAO du nombre et de la proportion de personnes sous-alimentées dans les pays en transition (pour plus de précisions).

Dans neuf des 12 pays de la CEI, au moins 5 pour cent de la population souffrent de sous-alimentation. Dans quatre de ces pays (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie et Tadjikistan),
le taux dépasse 20 pour cent. Seul le Bélarus a un niveau de sous-alimentation comparable aux niveaux que l'on observe dans les pays industrialisés (moins de 2,5 pour cent de la population).

Vulnérabilité des pays de la CEI en matière de sécurité alimentaire

Très vulnérables
Azerbaïdjan
Tadjikistan

Moyennement vulnérables
République de Moldova
Turkménistan
Ouzbékistan

Relativement peu vulnérables
Kazakhstan
Fédération de Russie
Ukraine

Relativement vulnérables
Arménie
Géorgie
Kirghizistan

Très peu vulnérables
Bélarus

Sept pays de la CEI (Arménie, Azerbaïdjan, Géorgie, Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan), comptant au total 53 millions d'habitants, sont maintenant considérés par l'ONU comme des pays à faible revenu et à déficit vivrier, et leur produit national brut est de moins de 1 505 dollars EU par habitant.

Toutefois, les données relatives à l'Europe orientale et aux pays baltes, qui ont subi des perturbations similaires, montrent que la transition économique n'entraîne pas nécessairement une diminution de la sécurité alimentaire.

Note sur les estimations

La FAO estime le nombre de personnes sous-alimentées à partir des données disponibles relatives à la population, à la production vivrière, au commerce et à la distribution des produits alimentaires ou à la distribution des revenus.
Pour de nombreux pays, ces données sont lacunaires. Dans les pays de la CEI, le problème est aggravé par les difficultés dues à la transformation des systèmes de collecte des données.
À l'époque de la planification centralisée, les données provenaient principalement des dossiers administratifs. Pour remplacer ces données, il faut faire des enquêtes, mais ce travail ne fait que démarrer. C'est pourquoi il faut prendre avec beaucoup de précaution les estimations relatives au nombre et à la proportion de personnes sous-alimentées dans la CEI.
Vu le manque de fiabilité des données actuelles dans de nombreux pays de la CEI, les experts complètent les données quantitatives par des évaluations qualitatives. Les observations sur le terrain confirment les statistiques et montrent qu'une grande proportion de la population vit dans des conditions très difficiles: le pouvoir d'achat est faible, il n'y a pas assez d'emplois, l'alimentation est insuffisante et beaucoup de gens manquent de combustible, de logement, de moyens de transport et de soins de santé.

En 1996-1998, seuls cinq de ces 12 pays d'Europe orientale et trois pays baltes avaient un taux de sous-alimentation supérieur à 5 pour cent de la population et dans aucun de ces pays le taux ne dépassait 20 pour cent.

Le risque de sous-alimentation dans les pays de la CEI a aussi diminué depuis 1995, mais pas autant qu'en Europe orientale et dans les pays baltes. La libéralisation du marché des produits agricoles et la privatisation de l'agriculture ont entraîné une amélioration de la distribution des aliments dans la plupart de ces pays. Le contrôle du prix des céréales et du pain a en grande partie été supprimé, le commerce privé joue un rôle beaucoup plus important et les pénuries ont presque disparu. En conséquence, les programmes d'aide alimentaire d'urgence ont été suspendus dans la plupart des pays de la CEI. En 1997, la majorité des produits agricoles, dans presque tous les pays de la CEI, étaient produits par le secteur privé. Les producteurs privés vendaient jusqu'à 30 ou 40 pour cent de leur production, en général directement aux consommateurs contre paiement en espèces.

Pour expliquer ces problèmes, on évoque généralement plusieurs raisons: la transition économique dans les pays de la CEI s'est accompagnée de mutations politiques et administratives profondes qui ont perturbé les anciennes relations commerciales et provoqué de graves pénuries de devises. En outre, les systèmes de production agricole et de commercialisation des produits agricoles se sont complètement déréglés, plusieurs pays ont subi une inflation galopante, il y a eu des pénuries temporaires de pain et, dans plusieurs cas, des conflits déclarés. Le produit intérieur brut a chuté, parallèlement au pouvoir d'achat d'une grande partie de la population. Dans la plupart des pays de la CEI, le niveau de la production n'atteint aujourd'hui qu'une fraction de ce qu'il était en 1991, et le chômage et le sous-emploi sont très importants, même s'ils sont souvent atténués du fait que beaucoup de gens travaillent dans le secteur informel.

L'insécurité alimentaire en Azerbaïdjan

L'insécurité alimentaire en Géorgie

En Azerbaïdjan, l'offre de produits alimentaires est suffisante sur les marchés urbains et ruraux, mais le pouvoir d'achat de l'essentiel de la population (7,6 millions d'habitants) reste très bas. La nourriture coûte en moyenne 60 dollars par mois pour une famille de cinq personnes et représente environ 70 pour cent du budget des ménages les plus vulnérables sur le plan économique.

L'Azerbaïdjan reçoit une aide humanitaire depuis le début des années 90. Près de 500 000 personnes (dont la moitié ont fui les zones touchées par le conflit avec l'Arménie) ont encore besoin de cette aide. Aujourd'hui, la plupart d'entre elles ont vendu tous leurs biens de valeur et leur marge de sécurité est presque nulle.

Une enquête sur les familles déplacées à l'intérieur du pays, réalisée en 1998, a montré que 30 pour cent d'entre elles présentaient des signes de sous-alimentation.

En Géorgie, les revenus ruraux n'ont quasiment pas augmenté malgré l'expansion rapide du secteur agricole depuis 1995. Les inégalités de revenu se sont beaucoup aggravées et une grande partie des 5,1 millions d'habitants du pays sont pauvres. Les dépenses alimentaires absorbent 60 à 70 pour cent du budget familial moyen.

Le régime de sécurité sociale est assez peu efficace: les retraites et les autres prestations sont très faibles et souvent versées avec beaucoup de retard. Les personnes âgées, les handicapés, les chômeurs et les communautés isolées restent très exposés à l'insécurité alimentaire.

Officiellement, il n'y a pas de sous-alimentation aiguë; toutefois, on observe une aggravation lente, mais indéniable, de la sous-alimentation chez les enfants, en dépit des distributions ciblées d'aide alimentaire supplémentaire.

Source: Rapport spécial: Mission FAO/Programme alimentaire mondial d'évaluation des disponibilités alimentaires en Azerbaïdjan, décembre 1999.

Source: Évaluation des récoltes et des approvisionnements alimentaires en Géorgie, FAO, Système mondial d'information et d'alerte rapide sur l'alimentation et l'agriculture, décembre 1999.

Proportion de personnes sous-alimentées dans les pays en transition, par catégorie de prévalence, 1996-1998

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