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Chapitre 6

Le suivi des résultats

Ce chapitre insiste sur la nécessité d'un suivi
et propose des méthodes de gestion pour atteindre
les objectifs fixés par le contrat.
Il examine aussi les problèmes liés à l'environnement.


Suivi de la qualité et des rendements

  • La détérioration de la qualité peut avoir d'importantes conséquences pour toute entreprise alors que les quantités insufisantes peuvent réduire l'efficacité de la transformation et nuire aux marchés
  • Les contrôles de la qualité devront être effectués avant, pendant et immédiatement après la récolte
  • Des mesures de redressement devront éventuellement être prises avant la récolte si l'agriculteur n'applique pas les méthodes recommandées
  • La vente de la production hors contrat provenant d'autres agriculteurs doit être évitée
  • Les techniques d'estimation des rendements sont l'observation visuelle ou l'analyse statistique
  • On peut alors utiliser des estimations en vue de préparer les indicateurs de rendement calculés en vue d'identifier les produits infiltrés de l'extérieur
  • Les matrices de production sont une façon d'identifier les composantes clefs de la production et les résultats de l'après-récolte

Suivi des ressources humaines

  • Les ressources humaines utilisées en agriculture contractuelle, à savoir la direction, les vulgarisateurs travaillant pour le promoteur et les agriculteurs, doivent être suivies
  • Les vulgarisateurs devront être évalués par le biais de visites d'inspection des champs des agriculteurs, au moins deux fois par an, pour que la direction puisse constater par elle-même l'état des relations de l'agent de vulgarisation avec les agriculteurs et sa connaissance de la culture
  • Le suivi formel de la culture à toutes les étapes peut conduire à l'identification de facteurs susceptibles de causer une mauvaise production
  • Il est nécessaire que les vulgarisateurs fassent des visites de routine à toutes les exploitations; leur fréquence dépendra de la nature de la culture
  • On devra documenter, avec les dates, toutes les activités sur le terrain. Lorsque ce sera possible, on devra encourager les agriculteurs à tenir leurs propres registres

Protection de l'environnement

  • Il est essentiel qu'une consultation ait lieu entre les agriculteurs, les vulgarisateurs et la direction pour le choix des terres appropriées afin d'éviter la dégradation de l'environnement
  • La direction n'est en général intéressée que par une seule culture mais elle doit admettre que les agriculteurs se soucient de protéger l'ensemble de leur système agricole
  • La direction doit être disposée à tirer parti des expériences locales

Introduction

La plupart des projets agricoles sont en constante évolution à cause des nouvelles technologies, de l'évolution de la demande des consommateurs, de l'accroissement des connaissances et de la sophistication des agriculteurs. Aussi doit-on revoir régulièrement toutes les activités des projets d'agriculture contractuelle en vue de tenir compte de ces changements. Toutes anomalies trouvées peuvent entraîner des modifications du contrat, des modifications techniques ou la réorganisation des services de vulgarisation sur le terrain.

Toutes les entreprises en agriculture contractuelle doivent pouvoir compter sur des registres pour le suivi, l'évaluation et les fonctions de diagnostic des activités clefs qui déterminent la performance du produit. Des informations statistiques fiables sur la production passée et actuelle sont vitales pour donner à tous ceux qui sont concernés les faits sur lesquels baser les allocations de quotas, les estimations des rendements des cultures et faire avancer les stratégies de commercialisation. La direction doit accumuler, analyser et distribuer des informations non seulement pour la gestion du projet et la tenue des registres de l'agriculteur, mais aussi pour évaluer la performance de la production et calculer les indicateurs de rendement. Ce suivi est particulièrement nécessaire pour les grands projets auxquels participent des milliers d'agriculteurs, où il est difficile pour la direction d'avoir une interaction directe avec les agriculteurs indépendants.

Ce chapitre insiste sur la nécessité d'un suivi et propose des méthodes de gestion à utiliser pour garantir que les objectifs du contrat sont atteints. Les éléments de base du suivi, ou du «contrôle du processus»46, sont essentiellement les mêmes dans toutes les activités industrielles ou agricoles: la direction devra identifier chaque composante, mesurer sa performance, comparer les résultats à un point de référence et, si nécessaire, prendre des mesures pour rectifier tout problème dès le début.

SUIVI DE LA QUALITÉ ET DES RENDEMENTS

On devra procéder à une analyse de routine pour garantir que la production actuelle et future respecte les paramètres de qualité et de quantité demandés. La détérioration de la qualité peut avoir des conséquences d'une portée considérable pour toute entreprise commerciale. Les contrôles de qualité sont particulièrement importants pour les cultures de grande valeur comme les fruits frais exotiques et de nombreuses variétés de légumes. Des quantités insuffisantes peuvent réduire l'efficacité de la transformation et compromettre les marchés. Comment les vulgarisateurs peuvent suivre la qualité et la quantité est traité ci-dessous.

Les contrôles de la qualité

Chaque projet doit mettre en place des systèmes de contrôle de la qualité et de suivi adaptés à son propre mode de fonctionnement. La direction doit donner la priorité aux procédures de contrôle et décider de leur fréquence, des endroits et des personnes qui devront être inspectés et évalués. La vérification de la qualité d'un produit peut avoir lieu avant, pendant et immédiatement après la récolte, tout comme au moment où les agriculteurs classent leur propre production, ou lorsque les produits atteignent les installations de transformation ou de conditionnement de la société.

Les spécifications d'un contrat écrit ou les explications des normes de qualité données lors des réunions entre les agriculteurs et la direction avant la saison et la récolte peuvent être considérées comme le début des contrôles de la qualité. La méthode la plus pratique pour la direction est peut-être d'illustrer par des exemples les critères à remplir pour la totalité de la production, ou le cas échéant, pour différents types de qualité. Lorsque les vulgarisateurs achètent les récoltes au départ de l'exploitation, ou les acheteurs dans les centres de transformation, ils devraient expliquer aux exploitants leurs critères de classement. Quand les agriculteurs ont mélangé les qualités, ils devraient, si cela est faisable, avoir la possibilité de refaire le classement par qualité.

Certains contrats contiennent des clauses spécifiant que les promoteurs peuvent effectuer des activités relatives à la production si l'agriculteur ne respecte pas les spécifications concernant la culture. Ces clauses permettent à la direction d'engager de la main d'œuvre extérieure pour enlever les mauvaises herbes, appliquer des insecticides ou récolter des produits agricoles arrivés à maturité. Ces pratiques sont peut-être une caractéristique frustrante, mais nécessaire de l'agriculture contractuelle car les quelques agriculteurs qui ne suivraient pas les pratiques recommandées pourraient compromettre la production de leurs voisins. La mauvaise qualité a pour principales causes: le non apport d'engrais, la lutte inefficace contre les mauvaises herbes et les insectes, les maladies, les récoltes immatures ainsi que le classement par qualité et le conditionnement faits sans sélection. La qualité peut aussi se dégrader pendant toute transformation sur place et après l'achat de la matière première à l'agriculteur.

Citons un cas où la qualité était manipulée: on vendait des produits agricoles de qualité inférieure, d'origine non contractuelle, pour profiter des prix élevés offerts par le contrat. En même temps, les produits de qualité supérieure étaient détournés et mis en vente libre pour bénéficier de prix encore plus élevés. La direction a admis que le contrôle des opérations d'achat lui avait échappé. L'infiltration de produits hors contrat, provenant de sources non réglementées, peut causer une détérioration des normes de qualité, amener des maladies et des problèmes d'excédents de l'offre. Afin de mettre un terme à ces pratiques, les clauses des contrats pourraient stipuler l'appellation d'origine de la culture sous contrat. Cependant, cette mesure pourrait être difficile à appliquer dans le cas du promoteur informel indépendant qui achète des produits agricoles à des exploitants dans une vaste zone où il est pratiquement impossible de faire appliquer des accords. En Ouganda, les égreneurs de coton confrontés à ce problème ont créé la Uganda Ginners and Exporters Association qui a mis des surveillants dans chaque usine d'égrenage pour tenter de lutter contre les ventes hors contrat qui abaissaient les normes de qualité47.

Lorsque l'on se heurte à des problèmes de qualité, il est nécessaire de procéder à une enquête détaillée pour en découvrir les raisons. On a procédé ainsi pour identifier les raisons pour lesquelles des agriculteurs récoltaient du tabac alors qu'il était très immature; cette pratique entraînait une grave détérioration de la qualité des feuilles. L'étude a mis en lumière un certain nombre de contraintes invoquées par les tabaculteurs et la direction qui, selon eux, influaient sur le fait que la récolte était prématurée. Les raisons invoquées pour la mauvaise récolte figurent à l'annexe 9 avec un résumé de l'évaluation de l'étude sur chacune des contraintes perçues.

Encadré 15
Le suivi de la production laitière en Croatie

Quelque 33 820 éleveurs fournissent du lait sous contrat à la plus grande centrale laitière de Croatie. La société tient des registres où figurent la taille de l'exploitation, le nombre de vaches laitières, les renseignements sur le matériel de l'exploitation et les données relatives à la production. C'est à partir de ces informations que seront prises des décisions qui permettront aux agriculteurs d'augmenter leur production.

Des membres du personnel de la société contrôlent régulièrement la qualité du lait outre toutes les obligations prévues par le contrat. Les normes de qualité de la société sont rigoureuses et englobent les paramètres suivants: matière grasse laitière, protéines et acidité. De plus, l'accord comprend des clauses sur l'absence de colostrum, d'arsenic, de mercure, d'antibiotiques, d'agents nettoyants et de désinfectants. D'autres stipulations concernent les niveaux de micro-organismes et la température du lait à la livraison. Les agriculteurs reçoivent un «feedback» sur la qualité du lait par le biais des 1 600 points de ramassage. Les techniciens de la société déterminent la qualité par échantillonnage soit à ces points, soit dans les laboratoires, les échantillons étant prélevés en présence des agriculteurs et des représentants de la société. La société n'est pas tenue d'accepter le lait qui ne respecte pas les normes de qualité spécifiées dans le contrat qui, par ailleurs, autorise le technicien à «punir» le producteur en lui interdisant de livrer son lait pendant 30 jours. Si on détecte des antibiotiques, le prix du lait est réduit de 15 pour cent et si cela se reproduit, on considère que le contrat est rompu. L'éleveur a le droit de consigner par écrit ses plaintes dans un registre situé à chaque point de ramassage s'il (elle) pense que les conditions de mesurage n'ont pas été respectées.

Les estimations des rendements

En agriculture, la prévision des rendements a pris une importance accrue dans les domaines de la transformation, de la commercialisation et de la budgétisation ainsi que dans celui du suivi de la production. Lorsque la production doit atteindre une quantité définie, tout manque important peut gravement nuire au promoteur car il ne sera pas en mesure d'assurer les commandes. La surproduction entraînera un dépassement du budget, des stocks inutiles et coûteux et des réductions de quotas les saisons suivantes. De nombreux agriculteurs subiront donc une perte de revenus. Tous les projets d'agriculture contractuelle ont pour objectif de maximiser la rentabilité. Il ne faut pas oublier que pour certaines cultures, rendement maximum ne signifie pas forcément revenu maximum car les rendements élevés ne peuvent être atteints qu'aux dépens de la qualité ou par le biais d'une utilisation peu économique d'intrants.

Il y a essentiellement deux méthodes pour estimer les rendements: l'observation visuelle par des agents de vulgarisation expérimentés et, plus rarement, l'analyse statistique. Les indicateurs de rendement calculés (IRC) servent alors à identifier les agriculteurs, les villages ou les régions qui ont ajouté-ou soustrait-des produits agricoles dans le système d'achat. La production peut être excédentaire quand les agriculteurs ont dépassé les quotas qui leur étaient attribués. Les agents de vulgarisation doivent vérifier si l'on a planté exactement la quantité attribuée et estimer le rendement potentiel de chaque agriculteur. Normalement, le rendement d'une culture devra, pour un agriculteur, être estimé trois fois au cours d'une seule campagne. La première estimation, que l'on appelle estimation «cible», est fondée sur le quota donné au début de la saison; on procède à la seconde estimation peu de temps après l'ensemencement ou la transplantation, une fois que la culture a bien repris. La troisième estimation se fait lorsque la culture a atteint son développement maximum, normalement juste avant la première récolte. Si l'on constate d'importantes disparités entre l'estimation finale et la quantité effectivement fournie, on doit expliquer et justifier ces variations. Pour les projets établis, les estimations de production individuelle par unité de surface sont souvent basées sur la moyenne des trois saisons précédentes. Les estimations de rendement devront se baser sur ce que l'on sait de la production dans la zone ou sur des parcelles d'essai que le promoteur a plantées avant d'attribuer les quotas aux agriculteurs. Si un nouveau produit agricole est introduit dans une région, on devra baser les estimations de son rendement sur la culture de ce même produit dans des milieux physiques semblables.

Les indicateurs de rendement calculés

Un certain nombre de méthodes peuvent être employées pour prévoir les rendements des cultures. Parmi celles-ci, on trouve un modèle directif utilisant une hiérarchie de variables jusqu'au point où une performance optimale ne peut être améliorée, ainsi que le modèle «Baysian» qui utilise des variables catégorielles fondées sur l'expérience48. Il y a, en outre, un autre modèle de prévision des cultures: la méthode de simulation Monte Carlo, fondée sur les paramètres du sol et de la gestion49. Dans bien des cas, cependant, les méthodes visuelles fondées sur le savoir des vulgarisateurs expérimentés devraient suffire à estimer les rendements.

L'annexe 7 illustre l'utilisation des indicateurs de rendement calculés (IRC). Une production supérieure à celle prévue a justifié une enquête pour identifier les villages qui introduisaient des produits non prévus par le contrat. L'ampleur de la variation entre les rendements réels et calculés a confirmé ce que l'on pensait: une production hors contrat avait été infiltrée dans le projet. Les modèles d'indicateurs fournissent des renseignements à la direction pour qu'elle identifie les agriculteurs qui biaisent les procédures d'achat. L'établissement d'un modèle d'indicateur de rendement calculé dépend, cependant, de données fiables et de la capacité des vulgarisateurs à l'interpréter.

Les matrices de production

La modélisation simulée de la production de cultures sur une base scientifique est une discipline extrêmement complexe, en pleine expansion, mais généralement efficace50. Les modèles de décision analytiques tels que la matrice production-commercialisation-consommation (PMC)51 sont utiles dans les projets agricoles pour évaluer les facteurs relatifs à la gestion, à l'agronomie et à l'infrastructure dont dépend le succès de la culture. Le modèle a été utilisé pour la première fois en Californie en 1979 en vue de structurer la production et la commercialisation d'une nouvelle culture commerciale, le jojoba. Le concept de base de la matrice de production, un sous-système de la matrice globale PMC, est d'identifier formellement toutes les composantes clefs qui influent sur la production en fonction de leur importance, de leur rôle et des résultats. Les informations sur lesquelles se base l'évaluation des résultats proviennent des statistiques de production, des registres des agriculteurs et des observations sur le terrain.

La matrice de production (tableau 6) n'est pas seulement établie pour servir d'outil aux directeurs mais pour assurer les organismes publics, les agriculteurs et les agents de vulgarisation, que tous les aspects d'un projet sont régulièrement contrôlés et améliorés lorsque c'est nécessaire. Elle a été conçue pour un projet d'exportation de papayes du Pacifique Sud multipartite. Outre les agriculteurs, participaient une société multinationale, un organisme semi-public pour la commercialisation et le ministère de l`agriculture qui était responsable des services sanitaires et du traitement aux pesticides après la récolte.

La matrice a identifié toutes les composantes nécessaires à la production et à l'après-récolte et les a classées en fonction de l'importance qu'elles avaient pour que les objectifs du projet soient atteints. Les composantes capitales (C) devaient atteindre le maximum sinon le projet risquait d'échouer. Les composantes importantes (I) devaient en général atteindre le maximum possible bien que les résultats d'une ou de deux composantes puissent être marginaux sans nécessairement mettre le projet en danger. On considérait les composantes significatives (S) importantes mais pas vitales pour le succès du projet.

Après la première saison de production des fruits, le personnel qualifié a rempli la matrice et estimé les résultats. Le classement des résultats des diverses composantes a montré que les résultats obtenus par les agriculteurs, la multinationale, l'autorité responsable de la commercialisation et l'organisme public chargé du contrôle sanitaire étaient négatifs. Il s'agissait de quatre composantes capitales. L'échec des activités concernant la récolte et le classement par qualité, des irrégularités dans les procédures sanitaires et des restrictions de fret aérien ont contribué à faire échouer le projet.

L'agriculture contractuelle qui amène normalement de nouvelles méthodes d'économie agricole et de gestion, nécessite un «feedback» constant en ce qui concerne l'acceptation des nouvelles techniques par les agriculteurs, la tolérance aux maladies des nouvelles variétés, le changement des méthodes de travail et des capacités de production des agriculteurs. L'utilisation d'une matrice pour la production permettra de fournir le plan de tous les facteurs qui devront être décrits, suivis et évalués52. On devra, chaque fois que ce sera possible, établir ces matrices après avoir consulté les agriculteurs, par exemple lors des réunions entre la direction et les exploitants.

Tableau 6
Matrice de production et d'après-récolte pour la papaye d'exportation sous contrat

Composante

Organe
responsable

Classement
selon l'importance

Classement
des résultats

Sélection des agriculteurs

SMN

I

2

Allocation des quotas

SMN

I

2

Fourniture de semences

SMN

I

3

Services de vulgarisation

SMN

I

2

Matériel agricole

A/ SMN

S

3

Fourniture d'intrants matériels

SMN

I

3

Recherche

SMN/M

S

2

Technologie off-shore

PP/SMN

S

3

Lutte contre les ravageurs

A

S

3

Irrigation

SMN

I

2

Besoins de main d'œuvre agricole

A

I

3

Transplantation

A

S

3

Culture des champs

A

I

2

Récolte

A

C

2

Classement par qualité

A/ SMN /C

C

1

Stockage

SMN

I

2

Conditionnement

C

I

1

Contrôle sanitaire et traitement

PP

C

1

par les pesticides

 

 

 

Fret aérien

PP

C

1


Source: D'après Eaton, C.S., 1990: 80.

Légende :

Agriculteurs (A)

1

=

Insuffisant

C

=

Capital

Société multinationale (SMN)

2

=

Suffisant

I

=

Important

Autorité responsable de (C) commercialisation

Pouvoirs publics (PP)

3

=

Objectif atteint

S

=

Significatifla

SUIVI DES RESSOURCES HUMAINES

Gérer, motiver et suivre les ressources humaines comprend le recrutement, la formation et le déploiement du personnel ainsi que l'évaluation de son travail. Il faut également enregistrer et évaluer les résultats de la production de chaque agriculteur pour déterminer s'il y a lieu de modifier les quotas et, parfois, annuler les contrats. Pour appuyer les décisions que doit prendre la direction et qui peuvent affecter la vie de milliers d'individus, il doit y avoir des procédures de suivi détaillées. Les deux domaines des ressources humaines dont sont directement responsables les administrateurs de projets sont les suivants:

L'évaluation des employés

Les employés qui ont réussi dans un contexte agro-alimentaire où l'agriculture contractuelle n'entrait pas en ligne de compte, peuvent en fait ne pas s'adapter facilement à un environnement où elle en fait partie. Cela peut s'appliquer aux cadres confirmés de la direction comme aux jeunes cadres. Certains membres très compétents et possédant beaucoup de diplômes n'ont pas donné satisfaction lorsqu'il leur a fallu travailler avec des agriculteurs.

Pour les projets qui emploient seulement un petit nombre de personnes, les évaluations du personnel sont relativement simples, les interactions entre les directeurs et les membres de leur équipe étant pratiquement journalières. Lorsque des centaines d'employés travaillent pour un projet, le personnel est généralement noté au niveau du service ou de la section. Les vulgarisateurs peuvent être évalués à l'occasion des inspections des champs des agriculteurs, ce qui devra être fait au moins deux fois par an. Les époques les plus pratiques pour ces visites sont en général avant la première culture, peu de temps après la transplantation, et en pleine récolte. L'inspection donne au directeur et à l'employé la possibilité de discuter de manière informelle de l'état d'avancement de la culture et des résultats des agriculteurs conseillés par cet employé. Le directeur peut observer par lui-même les relations du vulgarisateur avec les cultivateurs, se faire une idée de ce qu'il sait de l'état de la culture et de sa compétence à organiser sa logistique. La deuxième méthode d'évaluation consiste à faire un compte-rendu sur tous les employés à la fin de chaque saison. Leur performance peut se mesurer en fonction de leurs responsabilités et des cibles de production qui avaient été estimées au début de la saison.

L'examen des résultats des agriculteurs

Le suivi formel de la culture à toutes les étapes de son développement peut permettre d'identifier les facteurs susceptibles d'avoir une incidence sur la production. Par exemple, le fait que les agriculteurs ne remarquent pas les signes précurseurs d'une maladie peut retarder l'application de fongicides, et influer sur la qualité comme sur le rendement. Les vulgarisateurs doivent donc effectuer des inspections de routine dans toutes les exploitations qu'ils supervisent. Pour certaines cultures telles que la canne à sucre et les fruits, les inspections peuvent avoir lieu à raison d'une fois par semaine ou par quinzaine. Pour les cultures légumières, plusieurs visites par semaine peuvent être nécessaires. On devra remplir de simples fiches sur lesquelles figureront le code de chaque agriculteur, la localité, le quota, l'unité terre, l'estimation de la production, et les intrants avancés. Les vulgarisateurs doivent justifier des dates d'ensemencement, de transplantation, d'irrigation, de récolte et de tout autre activité majeure telle que l'épandage d'engrais et l'utilisation de produits chimiques. Devront également figurer des observations sur les conditions climatiques, les niveaux atteints et les conseils donnés à l'agriculteur. Chaque fois que ce sera possible, on devra encourager les agriculteurs à établir un dossier sur l'utilisation des intrants agricoles et leur production. L'annexe 8 est un exemple de dossier où sont consignés en détail les résultats d'un exploitant.

A la fin de chaque campagne, on peut inscrire dans les dossiers la production finale, la qualité du produit et le revenu net des agriculteurs. L'examen de ces informations permet à la direction d'estimer les quotas que les agriculteurs sont susceptibles de remplir la saison suivante. Il est alors possible d'annoncer les futurs quotas au cours des réunions entre exploitants et direction et, si nécessaire, fournir des explications pour justifier toutes modifications concernant le quota dans son ensemble ou les quotas individuels.

PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT

Les considérations écologiques associées à de bonnes pratiques agricoles doivent jouer un rôle important en agriculture contractuelle, bien que le secteur de l'agro-alimentaire ou les gouvernements accordent en général peu d'attention à la durabilité du système agricole en fonction du milieu physique et social. Les problèmes d'environnement varient non seulement d'un pays à l'autre, mais aussi d'une région et d'une ferme à l'autre. Le déboisement, la diminution des ressources hydriques et la dégradation des sols sont des préoccupations majeures qui accompagnent tout développement agricole. Cependant, l'agro-alimentaire ne s'intéresse souvent qu'à une seule culture alors que les agriculteurs pratiquent d'habitude un système de polyculture permanent et doivent tenir compte de la durabilité de celui-ci lorsqu'ils évaluent l'apport de l'agriculture contractuelle.

La dégradation de l'environnement, que toute forme d'agriculture peut apporter, devient un problème majeur si elle n'est pas contrôlée. La culture de produits végétaux sur des sols légers, sur des terrasses très en pente, favorise une très forte érosion. En Chine, 25 pour cent des plantes cultivées dans le cadre d'un projet d'agriculture contractuelle poussaient sur des terres qui ne se prêtaient pas du tout à la culture intensive. Toutes les parties prenantes du contrat - les promoteurs, les directeurs locaux, et les comités villageois - autorisaient la production sur des pentes abruptes sans aucune réglementation, ni ne semblaient s'en soucier. A Fiji, une enquête récente a confirmé qu'au moins 30 pour cent de la canne à sucre sous contrat étaient cultivés sur des terres impropres à la culture. La pression exercée sur les terres agricoles force les planteurs de canne à sucre qui louent des terres, à cultiver des pentes plus abruptes. Ces pratiques ont été tacitement approuvées par le promoteur paraétatique, malgré la législation sur l'utilisation des sols et l'évidence qu'ils subissaient une érosion à un rythme deux ou trois fois supérieur à celui de leur reconstitution53. Cette situation n'est pas sans rappeler celle que l'on trouve en Tasmanie (Australie), où les agriculteurs qui cultivaient des produits agricoles sous contrat ne voulaient pas reconnaître les graves problèmes de dégradation des sols auxquels ils étaient confrontés54.

La législation sur le contrôle de l'utilisation des sols existe dans la plupart des pays mais est rarement appliquée. Dans un certain pays en développement, la législation qui régit l'environnement comprend «au moins 25 lois» liées à des politiques en matière d'écologie, et il existe au moins 14 organismes publics et semi-publics qui s'occupent de problèmes d'environnement, mais l'impact a été négligeable. Il est impératif, d'un point de vue économique et éthique, que les promoteurs et les gestionnaires s'engagent à s'occuper des problèmes d'environnement. La façon la plus pratique dont la direction peut contrôler la compatibilité écologique est d'assurer que tous les champs sous contrat sont choisis par les vulgarisateurs en consultation avec les agriculteurs. Le choix de la terre devra se baser sur des critères liés à la profondeur du sol et à sa qualité, à la pente et aux ressources hydriques. En outre, il est important de savoir et de comprendre comment la terre était utilisée auparavant et, si nécessaire, on doit convenir d'un régime de rotation des cultures avec les agriculteurs. Cependant, il est fréquent que la direction décide de l'utilisation de la terre au nom des agriculteurs contractuels et que les vulgarisateurs sélectionnent tous les terrains. L'expérience montre qu'au moment de choisir les terres, les opinons des agriculteurs et de la direction ne coïncident pas toujours.

En connaissant la région et ses agriculteurs, la direction peut évaluer la capacité de production de chaque exploitant et l'effet que la culture peut avoir sur l'environnement. Il est important que les gestionnaires veuillent bientirer parti des expériences locales, parfois accumulées depuis plusieurs générations, lorsqu'ils supervisent des agriculteurs sous contrat. Dans le Pacifique Sud, des agronomes expatriés n'ont pas tenu compte du savoir local. Un organisme public ayant introduit la culture de la banane sous contrat pour l'exportation, chez les petits agriculteurs migrants, les propriétaires coutumiers l'informèrent qu'il pourrait louer autant de terres qu'il le voudrait mais qu' «il ne ferait jamais pousser de bananes». Malgré la très bonne organisation et le financement adéquat de l'entreprise, l'infertilité inhérente aux sols, fait bien connu des propriétaires, finit par faire échouer le projet. A cause de pressions politiques pour établir des paysans sans terre qui provenaient de zones surpeuplées, et d'une technologie inappropriée, les agriculteurs furent démoralisés et les terres mal utilisées.

46 Stevenson, W.J., 1986: 763.

47 Goodland, A. et Gordon, A., 1999: 20.

48 Pour les détails, cf. Hammer, G.L. et Muchow, R.C., 1994: 222.

49 Bouman, B.A.M., 1994: 1.

50 Penning de Vries, F.W.T., van Laar, H.H. et Kropff, M.J., éd., 1991: ix.

51 Knox, E.G. et Thiesch, A.A., éd., 1981.

52 Knox, E.G. et Thiesch, A.A., éd., 1981:1-4.

53 Clarke, W. et Morrison, J., 1986: 10-14.

54 Miller, L., 1995: 4.

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