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Chapitre 3 - Le recours aux mesures techniques dans la pêche responsable: restrictions géographiques et saisonnières par Stephen HALL


Australian Institute of Marine Science, Townsville, Australie

1 QUE SONT LES RESTRICTIONS GÉOGRAPHIQUES ET SAISONNIÈRES?

Le présent chapitre décrit les approches en matière de gestion des pêches qui, d'une certaine manière, imposent aux pêcheurs une limitation d'accès. Dans certains cas, les restrictions s'appliquent tout au long de l'année; dans d'autres, elles ne concernent qu'une période ou des périodes particulières, en général certaines saisons. Comme il est noté au chapitre 4, lorsqu'une restriction géographique ou saisonnière constitue une mesure technique de conservation, il s'agit d'une forme de maîtrise des moyens de production. Cependant, au-delà de la conservation des stocks, les restrictions peuvent servir à beaucoup d'autres objectifs, notamment lorsque les zones sont fermées de façon permanente, et ce sujet mérite donc d'être traité séparément.

Ces objectifs plus généraux sont clairement énoncés à l'article 2, paragraphe g) du Code de conduite de la FAO pour une pêche responsable, qui précise que les pêcheries devraient «promouvoir la protection des ressources bioaquatiques et de leurs environnements, ainsi que des zones côtières».

Les fermetures de zones (qu'elles soient temporaires, saisonnières ou permanentes) sont désignées par différents termes, chacun d'eux pouvant avoir une définition officielle particulière, selon le contexte législatif ou culturel. Cependant, parmi tous ces termes, l'appellation la plus répandue est peut-être «zone marine protégée» (ZMP). L'Union mondiale pour la nature (UICN) définit une ZMP comme «toute zone intertidale ou subtidale, avec les eaux dont elle est recouverte et la flore, la faune et les caractéristiques culturelles qui s'y rattachent, qui a été réservée par la loi ou d'autres moyens efficaces pour protéger une partie ou la totalité de l'environnement qu'elle comprend». (Kelleher et Kenchington, 1992)

De même, dans la loi sur les océans du Canada, une zone marine protégée est définie comme une zone de la mer destinée à recevoir une protection spéciale pour l'une ou plusieurs des raisons suivantes:

a) conservation et protection des ressources halieutiques ayant ou non une valeur commerciale, y compris les mammifères marins, et de leurs habitats;

b) conservation et protection des espèces marines en voie de disparition ou menacées d'extinction, et de leurs habitats;

c) conservation et protection des habitats très particuliers;

d) conservation et protection des zones marines présentant une grande diversité biologique ou productivité biologique;

e) conservation et protection de toute autre ressource ou habitat marins comme il convient pour répondre aux ordres du Ministre (des pêches et des océans). (Section 35 (1), Oceans Act, Canada)

Il faut noter que ces deux définitions laissent une très grande latitude en ce qui concerne la nature des restrictions imposées aux pêcheurs, et plusieurs programmes de classification ont été proposés pour ranger par catégorie les différents niveaux de restrictions géographiques s'appliquant aux ZMP. Toutefois, comme dans la plupart des programmes de ce genre, les limites entre les différentes catégories ne sont pas très claires, et il serait peut-être préférable de penser en termes de continuum entre, à un extrême, l'interdiction absolue d'accès et de prélèvement et, à l'autre, des restrictions relativement peu sévères, par exemple sur les engins qui semblent menacer les valeurs fondamentales de l'environnement ou de la conservation.

Il est toutefois important de faire une distinction entre, d'une part, les fermetures de zones qui ne s'appliquent qu'à l'activité halieutique et, d'autre part, les zones aménagées pour des usages multiples, où toute une gamme d'activités sont autorisées mais avec les restrictions qui s'imposent pour protéger les atouts de la zone. Sur les récifs coralliens, par exemple, les promoteurs touristiques pourraient être soumis à des restrictions concernant les emplacements de mouillage pour limiter les dégâts causés par l'ancre, et les pêcheurs pourraient être soumis à des restrictions visant les types d'engins qu'ils peuvent utiliser.

Il sera sans doute plus facile de créer ces zones à usages multiples s'il existe un schéma d'aménagement côtier qui cherche à concilier les besoins et les intérêts de toutes les parties légitimement intéressées. Ainsi, le cadre consultatif et législatif dans lequel les zones à usages multiples sont mises en place et gérées sera probablement très différent de celui qu'on a quand une zone est créée dans le seul cadre de la gestion des pêches. La plus grande partie de ce chapitre traite des questions propres aux pêcheries en ce qui concerne les fermetures de zones, mais le lecteur devra garder en mémoire l'ensemble plus vaste des aspects qu'il faut prendre en compte dans les zones aménagées pour des usages multiples.

2 POURQUOI POURRIEZ-VOUS INSTAURER DES RESTRICTIONS GÉOGRAPHIQUES OU SAISONNIÈRES?

Il ne faut pas trop insister sur le fait qu'il est important de définir clairement l'objectif ou les objectifs d'une restriction géographique ou saisonnière dans tel ou tel cas particulier (chapitres 1 et 5). A moins d'avoir des raisons bien précises, il sera difficile de prendre les bonnes décisions quant à la façon d'appliquer la mesure ou de communiquer et négocier de manière efficace avec les parties intéressées. Comme l'ont suggéré les définitions d'une zone marine protégée données ci-dessus, un gestionnaire des pêches peut choisir d'adopter une fermeture de zone ou de saison pour toutes sortes de raisons. Les justifications à la base de chacun des objectifs que l'on peut fixer sont décrites ci-dessous. Les objectifs possibles ont été répartis ici en trois grandes catégories: la première traite uniquement des questions d'aménagement des pêcheries, la deuxième des aspects plus généraux de conservation, et la troisième des questions liées à l'équité. En réalité, il est rare que ces catégories soient bien séparées, mais il est pratique de faire cette distinction.

2.1 A titre de mesure d'aménagement des pêcheries

Le paragraphe 6.3 du Code de conduite énonce clairement le principe général selon lequel «les Etats devraient empêcher la surexploitation et devraient mettre en œuvre des mesures d'aménagement, afin d'assurer que l'effort de pêche soit proportionnel à la capacité de production des ressources halieutiques et leur utilisation durable». Les restrictions géographiques et saisonnières peuvent aider les gestionnaires des pêcheries à atteindre ces objectifs des différentes façons exposées ci-après.

2.1.1 Limiter la capture de certains stades de développement

Il est souvent souhaitable d'empêcher la capture des espèces à certains stades de leur cycle biologique, quand elles sont particulièrement vulnérables ou essentielles à la production dans son ensemble. On peut citer le cas des espèces qui se regroupent dans certaines zones pour frayer; si la pêche est autorisée dans ces lieux de ponte, cela pourrait non seulement perturber l'activité reproductrice cette année-là, mais aussi réduire de façon excessive le nombre d'individus en âge de se reproduire, n'en laissant que trop peu pour les années suivantes. Si l'habitat de fraie présente des caractéristiques particulières qui risquent de souffrir de la pêche, une fermeture permanente de la zone peut s'imposer, mais il pourrait également suffire de fermer la zone pendant l'époque de fraie.

Il faut parfois aussi protéger les zones où les juvéniles sont particulièrement abondants. Si une zone donnée abrite une forte proportion de juvéniles en plus des adultes, le fait de permettre à une pêcherie d'exploiter les adultes pourrait entraîner une forte mortalité indésirable chez les juvéniles.

Alors que pour protéger certains stades de développement il faut parfois fermer une zone en permanence, il est souvent possible de limiter seulement l'accès à la pêcherie pendant une saison particulière. La mesure la plus appropriée dépendra des caractéristiques du cycle biologique de l'espèce en question, l'interdiction saisonnière s'appliquant souvent aux espèces à croissance rapide avec une brève période de recrutement, comme les crevettes roses ou les crevettes grises. Dans les pêcheries qui exploitent ces espèces, le fait de fermer la pêcherie au début de la saison permet aux individus d'atteindre une plus grande taille et donc d'avoir plus de valeur.

2.1.2 Protéger les stocks dépeuplés et leurs habitats pendant la phase de reconstitution d'une pêcherie

Si une pêcherie s'est effondrée ou risque de le faire, les mesures à prendre pour permettre au stock de se reconstituer seront vraisemblablement draconiennes mais indispensables (Code de conduite, paragraphe 7.2.2). On peut bien entendu envisager d'interdite totalement la pêche. Dans certains cas, cependant, il est parfois possible de protéger les stocks efficacement avec des mesures moins sévères, qui autorisent la pêche dans certaines zones mais l'interdisent dans celles dont l'importance est critique pour le processus de reconstitution.

2.1.3 Protéger les réserves génétiques

La valeur d'une population servant de ressource étant diverse sur le plan génétique, il est important de l'évaluer, même si les avantages sont souvent difficiles à quantifier.

Le fait de comprendre quelques idées fondamentales aide à saisir pourquoi la diversité génétique est importante. La première de ces idées est que la mortalité due à la pêche aboutit souvent à des différences dans la survie des poissons qui présentent des caractéristiques diverses. Par exemple, la pêche est en général sélective pour la taille; les gros poissons sont prélevés, alors que les petits sont laissés en liberté. Ainsi, les poissons d'une population qui commencent à se reproduire à une faible taille fourniront sans doute à la génération suivante une progéniture plus nombreuse que ceux dont la reproduction démarre quand ils sont plus gros, parce que les poissons de plus grande taille risquent davantage d'être capturés avant de pouvoir se reproduire. Si la caractéristique biologique de la taille lors de la première reproduction se transmet du couple parental à la progéniture (c'est-à-dire est héritée), la conséquence inévitable de la pêche sélective pour la taille sera qu'à long terme la taille moyenne lors de la première reproduction des individus de la population se réduira. Il s'agit là du processus de sélection naturelle. Qu'est-ce que cela signifie pour la pêcherie? En substance, que les poissons adultes seront en général plus petits, ce qui sera d'ordinaire préjudiciable pour la pêcherie. Conserver une réserve dans laquelle les adultes de grande taille ont la possibilité de subsister peut servir de réservoir génétique pour contrecarrer cette tendance.

Une autre idée importante est que la variation génétique fournit une assurance contre l'évolution du milieu naturel. Par exemple, certains individus d'une population peuvent mieux se développer les années où il fait plus chaud et d'autres quand il fait froid. Si la pêche réduit fortement la population, il est possible que les individus présentant une caractéristique génétique éventuellement importante pour la future population disparaissent et que la capacité de l'espèce à s'adapter à une nouvelle situation soit compromise. Prévoir des zones protégées pour aider à préserver les souspopulations génétiquement diverses peut, dans certains cas, servir d'assurance contre cette éventualité.

2.1.4 Protéger un habitat critique pour la durabilité des ressources exploitées

Certains types d'engins de pêche peuvent avoir des effets négatifs considérables sur l'habitat benthique qui est parfois important pour la durabilité des ressources exploitées. Ces habitats se trouvent souvent dans des zones côtières, où il est fréquent que les juvéniles se rassemblent dans des endroits qui leur offrent une structure physique élevée, par exemple les herbiers marins ou les mangroves. Dans ces zones, ils sont notamment protégés des prédateurs. Le paragraphe 6.8 du Code de conduite souligne l'importance de protéger ces habitats essentiels pour les pêcheries, en tant que principe directeur pour une pêche responsable.

Même s'il est plus facile de repérer ces habitats en eau peu profonde, certains environnements en eau plus profonde peuvent aussi être importants pour des raisons analogues. En particulier, un habitat structuré en eau profonde peut fournir un refuge aux juvéniles qui sont importants du point de vue commercial. Les habitats benthiques structurés sont particulièrement menacés par les engins de pêche qui se déplacent, tels que les chaluts et les dragues (voir chapitre 2); quelques passages de ces engins peuvent suffire à les détruire. Ainsi, il peut être souhaitable d'empêcher dans ces zones la pêche au chalut et à la drague, mais en revanche de permettre par exemple la pêche au casier et au piège.

2.1.5 Limiter la surcapacité de la flotte et optimiser la valeur des captures

Le Code de conduite précise que les mesures d'aménagement devraient entre autres permettre que «la constitution d'une capacité de pêche excédentaire soit évitée et que l'exploitation des stocks reste économiquement viable» (paragraphe 7.2.2 a). Quand la capacité de pêche est excédentaire, une courte saison de pêche choisie à bon escient peut permettre d'optimiser la valeur de la récolte, tout en empêchant la surexploitation des stocks. Bien que cette mesure ne soit absolument pas idéale d'un point de vue économique, elle aboutit parfois à des périodes de pêche de quelques jours seulement, lorsque «les derbys de la pêche» ou «la course au poisson» ont lieu. Dans ces cas-là, il convient d'examiner quelle est la meilleure façon d'optimiser le calendrier de la saison. Dans la pêcherie de lieu jaune de la mer de Bering, par exemple, l'ouverture de la saison est retardée jusqu'à la fin de janvier quand les œufs de lieu jaune atteignent les plus hauts prix sur le marché.

2.2 A titre de mesure plus vaste de conservation

Les eaux côtières sont souvent particulièrement riches en habitats très appréciés pour leur beauté ou d'autres valeurs liées à la conservation de la nature, et certaines formes d'activité halieutique risquent d'altérer de tels habitats en portant préjudice à ces valeurs. La fermeture permanente de zones fournit un mécanisme qui permet de protéger ces habitats, et on peut comprendre qu'il s'agit d'un objectif fondamental pour de nombreux secteurs de la conservation marine. Il est important de noter que les ZMP qui ont des objectifs plus vastes de conservation cherchent normalement à limiter d'autres activités, outre la pêche. Cependant, la pêche est souvent l'objectif premier de la restriction, en partie parce que c'est un moyen pratique d'imposer des restrictions, mais aussi parce que, par définition, elle exploite directement une ressource biologique. Il est plus difficile de tenir compte d'autres incidences moins directes, telles que la pollution émanant de sources diffuses situées à terre, à cause notamment de la nature ouverte des systèmes marins et des taux élevés d'échange.

Le fait que l'UICN et d'autres organismes aient demandé aux institutions nationales et intergouvernementales d'adopter un ensemble d'objectifs centrés sur les ZMP montrent la valeur et l'importance de ces zones en tant que mesure de conservation. Plus précisément, ces organismes ont demandé qu'un système mondial de zones marines protégées représentatif soit mis en place, conformément à un ensemble d'objectifs indicatifs (tableau 1) et que les gouvernements nationaux établissent aussi leurs propres systèmes de zones marines protégées. Un certain nombre de pays ont déjà pris de telles mesures, notamment l'Australie, le Canada et les Etats-Unis, et d'autres vont probablement le faire.

2.2.1 Protéger les habitats benthiques qui ont une grande valeur pour la conservation

Comme mentionné ci-dessus, les communautés épibenthiques structurelles peuvent être particulièrement vulnérables aux engins de pêche remorqués. Lorsqu'on estime que de telles zones présentent une grande valeur en matière de conservation, la seule mesure susceptible de les protéger est probablement la création d'une zone de fermeture permanente qui empêche de pêcher avec ces méthodes. Ce genre de protection est confirmé par le Code de conduite, qui précise au paragraphe 7.2.2 d) que les mesures d'aménagement devraient permettre que «la diversité biologique des habitats et écosystèmes aquatiques soit conservée et que les espèces menacées d'extinction soient protégées».

2.2.2 Limiter les prises accessoires

Dans certaines pêcheries de poissons de fond, par exemple au large de l'Alaska, on a établi des périodes de fermeture pour réduire les taux de prises accessoires ou les interactions éventuelles avec les mammifères marins.

TABLEAU 1 Objectifs indicatifs pour la mise en place d'un système représentatif de zones marines protégées (Extrait de la Résolution du 4e Congrès mondial sur la vie sauvage, Colorado, Etats-Unis, septembre 1987)

¬ Protéger et aménager d'importants systèmes marins et d'estuaires afin d'assurer leur viabilité à long terme et de préserver la diversité biologique.

¬ Protéger les espèces et populations épuisées, menacées d'extinction ou en voie de disparition, et préserver notamment les habitats jugés essentiels pour la survie de ces espèces.

¬ Protéger et aménager les zones qui présentent un grand intérêt pour le cycle biologique des espèces importantes sur le plan économique.

¬ Empêcher que des activités extérieures portent préjudice aux zones marines protégées.

¬ Assurer en permanence le bien-être des populations affectées par la création de zones marines protégées; préserver, protéger et aménager la beauté naturelle des zones marines et d'estuaires, ainsi que les sites historiques et culturels, pour les générations actuelles et futures.

¬ Faciliter l'interprétation des systèmes marins et d'estuaires à des fins de conservation, d'éducation et de tourisme.

¬ Installer au sein de régimes d'aménagement appropriés un vaste éventail d'activités humaines compatibles avec l'objectif premier des établissements marins ou d'estuaires.

¬ Assurer la recherche, la formation et le suivi quant à l'incidence des activités humaines sur l'environnement, notamment les effets directs et indirects de la mise en valeur et des modes d'exploitation des terres adjacentes.

2.2.3 Protéger les qualités de l'écosystème qui sont d'une importance critique pour le maintien des services de l'écosystème

L'idée que les écosystèmes fournissent des services à l'humanité n'est apparue que récemment (Costanza et al., 1997). En substance, l'expression «services des écosystèmes» implique l'idée que les écosystèmes remplissent des fonctions qui ont de la valeur pour l'humanité, et que préserver la structure de base du système garantira l'exercice de ces fonctions. En empêchant l'activité halieutique dans certaines zones, on allègue que les services de l'écosystème seront préservés. Ces services peuvent se répartir en deux catégories: les services extractifs (par exemple la fourniture de produits) et les services de l'existence (ce que l'on obtient seulement parce que quelque chose existe). Evidemment, les services extractifs de l'écosystème comprennent la fourniture de poisson ainsi que de ressources pétrolières et minérales, dont l'aménagement peut se faire en partie en limitant l'accès à certaines zones (voir ci-dessus en ce qui concerne l'aménagement des pêcheries). Toutefois, les services de l'existence, qui incluent notamment la purification de l'eau et la régénération des nutriments, intéressent plus directement notre propos. Malheureusement pour le responsable de l'aménagement des pêcheries, alors que la nécessité de protéger les services de l'écosystème est une question qui, souvent, peut être soulevée de concert avec d'autres parties intéressées, les cadres opérationnels appropriés pour définir de tels services et la protection nécessaire font fréquemment défaut. Cependant, malgré les difficultés mentionnées ci-dessus, certaines étendues d'eau (par exemple les lits de roseaux, les terres humides, les mangroves et les lagunes) pourraient se révéler importantes pour la protection des environnements côtiers en prélevant de fortes quantités d'éléments nutritifs des écoulements avant qu'ils ne rejoignent la mer. Dans ce cas, protéger de tels habitats des activités de pêche comme le chalutage pourrait être un argument valable, car une fonction importante de l'écosystème serait ainsi préservée.

Malgré les observations ci-dessus, un responsable de l'aménagement devrait savoir que d'autres justifications pour la fermeture permanente de zones, s'appuyant sur des arguments concernant le fonctionnement des écosystèmes, peuvent être beaucoup plus difficiles à trouver. On prétend souvent, par exemple, que des niveaux élevés de diversité biologique sont importants pour le fonctionnement des écosystèmes. Alors qu'il existe maintes justifications très valables pour protéger la diversité biologique, la preuve d'un lien positif entre la qualité de la communauté écologique et le fonctionnement des écosystèmes reste un sujet largement débattu dans les milieux scientifiques. Un gestionnaire devrait donc se méfier de ne pas donner une importance indue aux justifications en faveur de la création d'une ZMP pour des raisons de diversité biologique-fonctionnement. Il peut y avoir d'autres facteurs beaucoup plus importants pour préserver ce fonctionnement que de protéger le nombre d'espèces qu'une zone fait vivre, et d'autres motifs beaucoup plus valables pour créer une ZMP qui ne dépendent pas de telles hypothèses scientifiques contestées.

2.3 Pour résoudre des problèmes d'équité

2.3.1 Fournir un dispositif permettant de résoudre les conflits sur les utilisations multiples des zones ou des ressources

La zone côtière, en particulier, est une zone où de très nombreux usagers demandent à avoir accès. Les usages sont toutefois souvent incompatibles entre eux. Par exemple, dans une zone où des pêcheurs utilisent des casiers, le chalutage peut entraîner de graves conflits quand les casiers sont détruits. De même, prévoir une activité sous-marine dans une zone où l'on pêche au chalut serait une bien mauvaise idée! Il existe beaucoup d'autres risques de conflits entre différents usages (par exemple, tourisme, transport maritime, pêche de loisir), où la seule solution négociable est de limiter les activités à certaines zones au moyen d'arrangements, sur une base permanente ou périodique.

2.3.2 Réserver aux résidents ou aux usagers traditionnels le choix d'utilisation des ressources marines ou côtières vitales sur le plan économique

Les cultures indigènes ont souvent des prétentions traditionnelles (et parfois exclusives) sur certaines terres ou ressources, auxquelles on peut répondre en instaurant une fermeture de zone ou une saison exclusive, sous une forme ou une autre. De même, les coopératives ou communautés locales de pêcheurs pourraient profiter d'une protection des droits s'appliquant à la zone. Dans certains cas, le gestionnaire des pêches devra aussi insérer dans l'équation des questions de gestion non gouvernementale et de mode de faire-valoir coutumier. Le Code de conduite (paragraphe 6.18) invite les Etats à «protéger de manière adéquate les droits des pêcheurs et des travailleurs du secteur de la pêche, particulièrement de ceux qui pratiquent une pêche de subsistance, artisanale ou aux petits métiers».

3 QUELS SONT LES AVANTAGES ET LES INCONVÉNIENTS DES RESTRICTIONS GÉOGRAPHIQUES ET SAISONNIÈRES?

3.1 Avantages

3.1.1 Simplicité du concept

Il est sans aucun doute assez facile d'expliquer à différents groupes de la communauté les raisons qui justifient la fermeture de zones ou de saisons, et les mécanismes permettant de le faire. Pour utiliser une comparaison avec ce qui se passe sur la terre, le fait de mettre une barrière autour d'un lopin de terre établit clairement un droit de propriété et détermine la base de son utilisation. Répartir la saison de pêche ou le lieu de pêche entre différents secteurs halieutiques constitue une solution évidente pour résoudre les problèmes d'accès. En principe au moins, il s'agit aussi d'une solution relativement simple pour spécifier la fermeture d'une zone ou d'une période en termes législatifs, une fois que les parties intéressées sont convenues que la mesure est appropriée. En ce qui concerne le respect de la mesure, un système de réserve ou une saison de pêche présentent aussi des avantages évidents lorsque l'ensemble des pêcheurs de la région sont favorables à l'initiative et veillent eux-mêmes au bon ordre. Par exemple, contrôler l'effort de pêche en fermant certaines zones ou saisons semble être l'une des rares options qui s'offrent aux gestionnaires des pêcheries marines communales des Philippines (voir ci-après).

3.1.2 Une bonne solution pour protéger les espèces pêchées accidentellement qu'on ne peut pas protéger par d'autres moyens

Quand les espèces pêchées accidentellement sont sérieusement menacées, la fermeture de zones ou de saisons offre un moyen de les protéger. Il est toutefois important de reconnaître que le bien-fondé de cette approche dépend largement d'une bonne connaissance du cycle biologique des espèces concernées. Par exemple, pour des espèces très mobiles qui se déplacent à travers toute une région, la fermeture d'une zone pourra être totalement inefficace, ou devra porter sur une étendue trop vaste pour être réalisable.

3.1.3 Une méthode souple de protection des stocks dans les pêcheries complexes ou faute de données

On reconnaît depuis déjà assez longtemps que la fermeture permanente de zones peut être un moyen rentable de gérer les pêcheries des systèmes de récifs coralliens, mais elle est aussi maintenant largement préconisée pour certaines pêcheries des zones tempérées. Dans les systèmes de récifs, le principal objectif de ces réserves est de protéger la biomasse féconde du stock, qui est d'une importance cruciale pour garantir dans les zones exploitées le recrutement par le biais de la dispersion des larves, et éventuellement pour maintenir ou améliorer les rendements dans les zones adjacentes aux réserves. Si ces réserves fonctionnent bien, elles présentent aussi l'avantage d'être plus faciles à mettre en place que les programmes plus classiques de gestion des pêcheries. Cet aspect les rend particulièrement intéressantes pour les pêcheries des récifs coralliens qui sont presque toujours multispécifiques, et où de nombreux pêcheurs pratiquent une pêche artisanale ou de subsistance avec toutes sortes d'engins et débarquent leurs captures en de nombreux points d'une vaste zone. Ces caractéristiques font qu'il est difficile de recueillir les informations même les plus élémentaires, telles que les données sur les captures ou l'effort, qui sont nécessaires pour un aménagement classique.

3.1.4 Une méthode rationnelle pour protéger les habitats benthiques vulnérables

Il est évident que si l'on souhaite protéger des communautés benthiques sessiles vulnérables, qui mettent souvent de 10 à 15 ans pour se reconstituer lorsqu'elles ont été fortement perturbées, la fermeture d'une zone sera souvent la seule solution quand l'activité halieutique représente une menace.

3.1.5 Une garantie contre l'incertitude

Le gestionnaire des pêcheries est souvent confronté au fait que l'information que les scientifiques peuvent collecter et les prévisions qu'ils sont en mesure de faire sont peu fiables. Il doit également être attentif à la nécessité d'adopter une approche de précaution, comme l'exprime clairement la FAO dans son Document technique sur l'approche de précaution appliquées aux pêches (FAO, 1996). En fait, les sciences halieutiques s'efforcent actuellement de trouver les moyens de quantifier et communiquer cette incertitude aux gestionnaires, de sorte qu'ils puissent prendre les décisions en connaissance de cause (voir chapitre 5).

L'incertitude s'accompagne d'un besoin de polices d'assurance qui garantissent une certaine protection au cas où les décisions seraient fondées sur des prévisions trop optimistes. On peut parfois considérer que la fermeture de zones constitue une telle assurance. Par exemple, un objectif raisonnable d'aménagement des ressources en poissons démersaux pourrait être que le stock se maintienne au-dessus de 60 pour cent de la biomasse non exploitée pendant une période de temps donnée, disons 20 ans. Maintenir ce taux permettrait au stock d'avoir une production équilibrée optimale, ce à quoi aspirent de nombreuses pêcheries. En se servant de cet objectif, de récentes analyses théoriques faites pour une grande pêcherie démersale du plateau continental indiquent que la création d'une ZMP pourrait être une stratégie importante pour répartir les risques et pourrait agir comme une police d'assurance efficace qui, à la fois, protégerait l'avenir à long terme des stocks et assurerait des captures moyennes plus importantes (Lauck et al., 1998). Il faut toutefois préciser que dans cet exercice théorique, la ZMP devait être très vaste pour être efficace. Cette dernière conclusion est épaulée par les travaux indépendants qu'a entrepris le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) afin d'examiner l'utilité d'une fermeture de zone dans la mer du Nord pour protéger les stocks de cabillaud. Compte tenu des connaissances actuelles sur les déplacements des poissons et le comportement des flottes de pêche, même l'interdiction de pêcher dans un quart de la mer du Nord ne servirait à rien ou à presque rien pour protéger les cabillauds qui sont très mobiles et dispersés. Il faut donc aussi préciser que, même si les ZMP servent théoriquement à protéger les stocks, il n'est absolument pas évident qu'elles le feront dans tous les cas (voir section 4 du présent chapitre).

3.1.6 Un outil pour une amélioration permanente

La fermeture de zones ou de saisons a le grand avantage de fournir un lieu de recherche pour améliorer les connaissances sur le fonctionnement d'un système marin; on peut aussi la considérer comme une sorte d'expérience en matière de gestion pour obtenir des informations permettant un meilleur processus de décisions à long terme. On pourrait considérer de tels avantages comme un objectif essentiel pour la fermeture d'une zone ou d'une saison, mais le plus souvent il s'agira d'un avantage secondaire découlant de la mise en place d'une zone pour d'autres raisons. De telles approches peuvent parfois tomber dans le domaine de ce que l'on appelle l'aménagement adaptatif, où de nouvelles mesures sont expérimentées précisément pour tester les idées et apprendre davantage, de sorte que l'aménagement puisse être adapté compte tenu des résultats. La section 4 fournit un bon exemple de cette approche.

3.2 Inconvénients

3.2.1 Négociations interinstitutions

Quand les objectifs pour la fermeture d'une zone ou d'une saison requièrent des restrictions sur des activités autres que la pêche, des négociations avec d'autres institutions et parties intéressées seront nécessaires. Il s'agit souvent d'un processus extrêmement long qui exige une grande habileté dans la négociation et un bon jugement politique. Pour vaincre les difficultés inhérentes à ce processus, il est essentiel de définir clairement et de façon concertée les objectifs communs en faveur de la mesure.

3.2.2 Coût économique élevé dans certains cas

Bien que la fermeture d'une zone ou d'une saison puisse être efficace pour préserver un stock, d'autres mesures sont parfois préférables sur le plan économique. Déplacer l'effort de pêche hors de zones ou de périodes économiquement optimales peut être très coûteux pour l'économie de la flotte.

3.2.3 Moindre efficacité des restrictions au fil du temps en l'absence de mesures complémentaires

Si l'on impose une fermeture de zones ou de saisons pour limiter les captures en réduisant efficacement l'effort, et qu'on ne limite pas la capacité, l'effort ou les captures, cela encourage à renforcer la capacité au fil du temps, ce qui finalement compromet tous les avantages à court terme d'une réduction des captures. Cette réaction sert à souligner que la fermeture de zones ou de saisons devra normalement s'accompagner d'autres contrôles des moyens de production et de la production afin d'assurer que les stocks sont bien gérés.

3.2.4 Respect des restrictions

Mettre en place une restriction géographique ou saisonnière peut sembler théoriquement une bonne chose, mais en l'absence d'un mécanisme de coercition persuasif, la mesure est de toute évidence inutile (voir chapitre 8). Comme mentionné ci-dessus, quand les pêcheurs approuvent la mesure, il peut y avoir une forte incitation à l'autosurveillance, ce qui rend le contrôle de l'application relativement simple. Dans d'autres cas, cependant, en particulier quand les pêcheurs exercent leurs activités sur de vastes zones ou dans des zones reculées, faire appliquer les mesures est parfois impossible sur le plan pratique et d'un coût prohibitif. Toutefois, il semble que dans certains cas les techniques de surveillance par satellite puissent être utilisées avec de bons résultats (voir chapitre 8, section 3.2.6).

3.2.5 Enthousiasme ou pertinence

La création de zones protégées en permanence soulève un grand enthousiasme auprès de nombreux segments de la communauté, mais cet enthousiasme peut hélas conduire à un jugement irrationnel quant à la probable efficacité d'une telle mesure pour atteindre des objectifs précis. Cela peut être notamment le cas avec l'aménagement des pêcheries, où de grandes incertitudes demeurent souvent quant à l'efficacité de zones frappées d'une interdiction permanente. Une évaluation quantitative minutieuse des avantages qui découleront de la création d'une ZMP est éminemment souhaitable quand on s'est fixé pour objectif de protéger les stocks. Il est fort possible, par exemple, qu'il soit plus judicieux d'avoir recours à d'autres contrôles des moyens de production ou de la production pour aménager une pêcherie. Cependant, à des fins plus vastes de conservation, la fermeture permanente d'une zone peut être plus utile pour atteindre les objectifs. En fait, si l'on souhaite protéger des habitats vulnérables des engins de pêche mobiles, il est difficile d'envisager une autre solution. Cet exemple montre, une fois de plus, à quel point il est important de définir clairement les objectifs.

4 ÉTUDES DE CAS

4.1 Le golfe du Mexique: une combinaison de fermetures de zones et de saisons

De nombreuses pêcheries offrent de bons exemples de fermetures saisonnières, mais cette méthode semble particulièrement convenir aux pêcheries de crevettes grises, parce que les juvéniles se développent en général dans des environnements côtiers d'estuaires et se déplacent en haute mer à mesure que leur cycle biologique se poursuit, ce dernier s'achevant souvent au bout d'environ un an. Ainsi, pour empêcher la surpêche de croissance, quand des individus sont capturés à une taille inférieure à l'optimum, la pêcherie est fermée au début de la période de croissance. Les autorités du Texas, par exemple, ferment les eaux de l'Etat et les eaux fédérales de la mi-mai à la mi-juillet, mesure qui protège les crevettes juvéniles lorsqu'elles migrent des baies jusqu'au golfe du Mexique, ce qui leur permet d'atteindre une plus grande taille et donc d'avoir plus de valeur. Un exemple de bonne combinaison de fermetures de zones et de saisons pour limiter les conflits entre différents secteurs halieutiques se trouve là encore dans le golfe du Mexique, où dans l'Etat de Floride il existe une zone de fermeture qui limite la pêche des crevettes grises au chalut et la pêche du crabe caillou au piège (figure 1).

4.2 Les récifs coralliens

Il existe plusieurs exemples concrets de fermeture de zones dans les systèmes de récifs coralliens, où un certain nombre d'autorités imposent une fermeture temporaire ou permanente de la pêche dans certaines zones de récifs ou, dans certains cas, dans leur totalité. Cette approche a souvent été adoptée dans l'espoir d'empêcher le dépeuplement des stocks et de préserver, voire d'accroître, les rendements dans les zones adjacentes. Des avantages supplémentaires pourraient en découler si l'on prévoit de développer l'activité touristique dans une zone. Des coraux intacts et une abondance de poissons constituent une condition essentielle pour attirer les visiteurs. Il est évident que, compte tenu du caractère destructif de certaines formes de pêche ou d'activités touristiques (notamment la pêche au poison ou à la dynamite qui, bien qu'illégales, sont encore pratiquées), le fait de fermer certaines zones de récifs coralliens sert un objectif de conservation qui n'implique pas que la pêcherie doive en retirer des avantages. Dans certains cas, la conservation peut être une justification suffisante, sans que soient nécessaires d'autres profits pour les touristes ou les pêcheurs.

FIGURE 1
Zone Citrus-Hermando de fermeture de la pêche aux crevettes grises/crabes cailloux dans l'Etat de Floride, soit une zone de 144 000 acres, où l'accès à chaque pêcherie est limité à certaines zones de fonds marins pendant des périodes fixées chaque année.

  • Il est interdit à toute personne de pêcher au chalut dans les zones suivantes aux périodes indiquées:

    a) Zones I et III: 5 octobre-20 mai de l'année suivante
    b) Zone IV: 2 décembre-1er avril de l'année suivante
    c) Zone V: 2 décembre-15 mars de l'année suivante

  • Il est interdit à toute personne d'utiliser, caler ou placer des pièges à crabes cailloux dans les zones suivantes aux périodes indiquées:

    a) Zone II: 5 octobre-20 mai de l'année suivante

    b) Zones IV et V: 5 octobre-30 novembre de la même année, et 16 mars-20 mai de la même année

En ce qui concerne les récifs coralliens, des études ont monté que si l'on protège des zones, même relativement peu étendues, la densité et la biomasse des espèces cibles augmentent en général à l'intérieur de la réserve (voir Hall [1999] pour l'analyse). La meilleure démonstration de cet effet vient peut-être des Philippines. On a comparé les populations ichtyques de deux petites zones (Sumilon et Apo) où des mesures de protection contre la pêche ont été instaurées à des degrés divers, puis supprimées au bout de 10 ans. La figure 2 résume les résultats de cette étude. A Sumilon, les densités de gros poissons prédateurs ont diminué de façon notable quand la zone a été ouverte à la pêche en 1985 et 1993; elles ont augmenté sensiblement trois fois, à la suite des périodes de protection. A l'opposé, on a observé à Apo une hausse constante des densités tout au long d'une période de protection de 11 ans, tandis que dans les zones comparables non protégées on observait peu de changement.

Les résultats ci-dessus et des résultats analogues dans d'autres zones indiquent que les populations ichtyques, tant des régions tempérées que tropicales, réagissent si on les protège de la pêche, même dans les zones relativement petites. Au Kenya, par exemple, des études sur deux récifs - l'un dans un parc marin où la pêche n'était pas autorisée et l'autre dans une réserve qui n'autorisait que la pêche artisanale - ont révélé que l'abondance des espèces importantes sur le plan commercial était 10 fois supérieure dans les zones totalement protégées. Cependant, l'étude sur les Philippines décrite ci-dessus révèle le fait assez troublant qu'il n'a fallu que 1,5 et 2 années d'accès non réglementé à une zone pour faire disparaître les gains de densité et de biomasse accumulés pendant respectivement plus de 5 et 9 ans de protection des réserves marines.

On observe aussi une augmentation du nombre d'espèces dans les zones protégées. Par exemple, des études menées au Kenya ont montré que, sur les 110 espèces qui se trouvaient dans les récifs coralliens protégés du pays, 52 étaient absentes des récifs non protégés et, parmi ces dernières, 44 étaient spécifiques aux récifs coralliens protégés. Un certain nombre d'autres études ont donné des conclusions analogues. Si l'objectif est la conservation, il semblerait que les réserve marines soient très efficaces.

Bien qu'un relèvement des taux d'abondance (et peut-être une plus grande variété des espèces) à l'intérieur des réserves soit la règle générale, la création d'une ZMP à des fins d'aménagement des pêcheries devra d'ordinaire être justifiée au motif qu'une plus grande biomasse du stock reproducteur, à l'intérieur de la réserve, contribuera à fournir des recrues à la pêcherie adjacente. Comme les poissons adultes qui habitent les systèmes de récifs ont tendance à peu se déplacer, cette propositions sera souvent réaliste.

4.3 Les pêcheries des zones de brisants

La réserve marine De Hoop, sur la côte méridionale de l'Afrique, fournit elle aussi la preuve qu'une réserve marine permet d'accroître les rendements dans les zones de pêche adjacentes (Attwood et Bennett, 1994). L'étude du marquage des poissons, pendant une période de cinq ans, a indiqué que le galjoin (Coracinus capensis), une espèce exploitée par les pêcheurs à la ligne, avait deux types distincts de comportement. Une partie de la population était relativement sédentaire, se déplaçant à l'intérieur de la réserve, alors que l'autre était nomade. Les estimations sur le nombre d'individus se dispersant fortement ont montré que la réserve, qui s'étend sur 50 km le long de la côte, permettait d'améliorer le secteur halieutique en fournissant des poissons matures aux zones exploitées, aussi bien proches que lointaines.

FIGURE 2
Densités de gros poissons prédateurs à différentes distances de la limite de la réserve d'Apo pendant les huit premières années de protection et entre la neuvième et la onzième année. Les données sont des moyennes ± 1 écart type de la moyenne. (Redessiné à partir de la figure 3 de Russ et Alcala [1996] et repris de la figure 9.1 de Hall [1999])

4.4 La Georges Bank

Sur la Geoges Bank, au large de la côte nord-est des Etats-Unis, comme dans bon nombre d'autres systèmes démersaux tempérés, les mesures de contrôle sur le maillage et la taille minimale des poissons, ainsi que des fermetures saisonnières de zones, n'ont pas suffi à assurer la conservation des stocks car l'effort de pêche n'était soumis à aucun contrôle direct. Les changements qui se sont produits dans la structure de la communauté de poissons ont été en grande partie la conséquences de modes d'exploitation visant des espèces très précises sous l'effet de considérations commerciales. Face à cette situation, les autorités ont fixé en 1994 des fermetures de zones à long terme, afin d'essayer d'améliorer les pêcheries de la région (Fogarty et Murawski, 1998). Ces zones englobent des secteurs où les captures par unité d'effort sont traditionnellement élevées (autrement dit de bons fonds de pêche), notamment une partie des lieux de pêche aux peignes de la région, et d'importants emplacements de fraie pour le cabillaud, l'églefin et la limande. Des zones couvertes de sable et/ou de gravier qui peuvent être importantes entre autres pour la survie des juvéniles sont également protégées. Murawski et al. (2000) ont décrit l'incidence de la fermeture de cette zone, signalant que, malgré un accroissement des stocks de poissons à chair blanche pendant la période de clôture, il était difficile d'établir la cause de cette augmentation car d'autres mesures d'aménagement avaient aussi évolué au cours de cette même période. Pour les peignes, toutefois, la taille du stock s'était considérablement accrue, ce qui était dû presque certainement à la fermeture.

4.5 La Plaice Box

La Plaice Box est une zone d'environ 38 000 km2, le long des côtes danoises, allemandes et hollandaises, qui a été instaurée en 1989 pour protéger les poissons plats juvéniles (plies et soles) en empêchant les gros navires de pêcher dans la région pendant le deuxième et le troisième trimestre de l'année. En 1994, une analyse de la Plaice Box a été entreprise; elle étudiait les avantages des différentes options d'aménagement, en comparant le volume de poisson débarqué et la biomasse du stock reproducteur de plies et de soles escomptés à longue échéance par rapport à une situation de statu quo. Cette analyse a indiqué que, si la Plaice Box était supprimée, le volume de poisson débarqué et la biomasse du stock reproducteur baisseraient à long terme respectivement de 8 et 9 pour cent, mais que si l'on faisait porter l'interdiction sur toute l'année le volume débarqué et la biomasse du stock augmenteraient respectivement de 24 et 29 pour cent (tableau 2). Ces bons résultats tenaient surtout au fait que le taux moyen des quantités rejetées à l'intérieur de la Plaice Box était auparavant de 83 pour cent. A la lumière de cette analyse, de nouvelles réglementations ont été adoptées; elles étendaient les restrictions à l'année tout entière, mais autorisaient certains navires à continuer de pêcher, notamment ceux qui exploitaient les crevettes grises.

TABLEAU 2 Pourcentage d'augmentation à long terme du volume de poisson débarqué par la flotte de la mer du Nord et de la biomasse du stock reproducteur, par rapport au maintien du statu quo de 1994 avec fermeture de la pêche dans la Plaice Box au deuxième et au troisième trimestre (tiré de Horwood, 2000)

Option d’aménagement

Volume de poisson débarqué (%)

Biomasse du stock reproducteur (%)

Supprimer la Plaice Box

-8

- 9

La prolonger pendant le 4e trimestre

+ 11

+ 14

L’élargir à l’année tout entière

+ 14

+ 17

Toute l’année + pas de rejets

+ 24

+ 29

4.6 Aménagement adaptatif utilisant l'approche de la fermeture de zones: l'exemple du nord-ouest de l'Australie

Comme mentionné à la section 3.1.6, l'un des avantages de la fermeture de zones est qu'elle donne l'occasion d'en savoir davantage sur le milieu marin et d'améliorer progressivement les décisions en matière de gestion. Le meilleur exemple d'une telle approche vient peut-être du plateau nord-ouest de l'Australie, qui illustre aussi à quel point il est important de tenir compte des effets potentiels de la pêche sur les habitats de poissons lors de la prise de décisions.

Des résultats d'enquête disponibles à partir de 1960 indiquaient que la biomasse totale de poissons était restée stable pendant la mise en valeur des pêcheries de la région, mais que la composition de la communauté de poissons s'était modifiée; les taux de Lethrinus et de Lutjanus avaient diminué, et ceux Saurida et de Nemipterus s'étaient accrus (figure 3).

FIGURE 3
Tendances de l'abondance des quatre principaux taxons de poissons exploités sur le plateau nord-ouest de l'Australie. (Adapté de la figure 14.2 de Sainsbury [1988] et reproduit de la figure 3.7 de Hall [1999])

Les données disponibles indiquaient aussi que l'environnement benthique s'était modifié au cours de la même période. En particulier, la quantité de faune épibenthique capturée par les chaluts (surtout des éponges, des alcyonides et des gorgonides) était désormais bien inférieure à ce qu'elle était avant le développement de la pêche au chalut (Sainsbury, 1987). Des données vidéo sous-marines indiquaient qu'il y avait quatre types d'habitats dans la région selon la faune benthique dominante, et les données sur les captures de poissons montraient que les Lethrinus et les Lutjanus étaient presque exclusivement associés à des habitats favorables à de vastes épibenthos. A l'opposé, les Saurida et les Nemipterus ne se trouvaient que sur des étendues de sable ouvertes.

Cette information a soulevé d'importantes questions à propos de l'aménagement de la région. Premièrement, l'évolution de la composition de la communauté piscicole et benthique pouvait-elle être inversée? Deuxièmement, si les changements étaient réversibles, valait-il la peine de les tenter, étant donné l'incertitude des résultats et le délai pendant lequel le changement pourrait se produire? Troisièmement, si on envisageait de le faire, quelles étaient les mesures de gestion les plus appropriées pour atteindre ce but?

Pour répondre à ces questions, il faut avant tout comprendre les mécanismes responsables des changements. Quatre hypothèses différentes ont été formulées:

1. La dynamique intraspécifique: les changements observés sont le résultat de réactions propres à chaque espèce.

2. La levée de la concurrence sous l'effet de la pêche: les Lethrinus et les Lutjanus ont une influence négative sur le taux d'accroissement de la population des Saurida et des Nemipterus. Ainsi, lorsque les Lethrinus et les Lutjanus étaient pêchés, les

Saurida et les Nemipterus ne se heurtaient plus à la concurrence, et leur nombre augmentait.

3. La diminution due à la concurrence: les Saurida et les Nemipterus ont une influence négative sur le taux d'accroissement de la population des Lethrinus et des

Lutjanus, et l'abondance de ces dernières espèces déclinait parce que l'abondance des premières augmentait pour des raisons qui ne dépendaient pas de la pêcherie.

4. La modification de l'habitat: les caractéristiques de l'habitat déterminent la capacité de charge de chaque genre pris séparément, de sorte que la modification de l'abondance du type d'habitat induite par la pêche au chalut modifie la capacité de charge des différents genres.

Ces quatre hypothèses sont toutes raisonnables du point de vue écologique et concordaient avec les données disponibles. Il est toutefois important de reconnaître que chacune d'elles a des incidences très différentes en matière d'aménagement. Les hypothèses 1 et 2 supposent une productivité relativement faible des Lethrinus et des Lutjanus, la réduction de la biomasse de ces taxons étant considérée comme une conséquence de la pêche. En conséquence, même si les stocks pouvaient se reconstituer, la production équilibrée de la pêcherie devrait être faible pour empêcher que la même baisse se reproduise. En revanche, les hypothèses 3 et 4 supposent une productivité relativement forte pour les Lethrinus et les Lutjanus dans certaines situations. Une exploitation sélective de ces taxons dans l'hypothèse 3 et une exploitation sans préjudice pour l'habitat benthique dans l'hypothèse 4 aboutiraient à des captures durables comparativement abondantes. Ces différentes incidences font que le choix du mécanisme opérationnel ne se réduit pas à un exercice théorique.

Pour traiter de ces questions, on a mis en place un processus d'évaluation formelle en indiquant que les hypothèses ci-dessus constituaient des modèles mathématiques explicites. Il est très utile d'établir de tels modèles parce qu'ils permettent d'évaluer formellement quelle est l'hypothèse la plus susceptible de se révéler exacte, compte tenu des données disponibles.

L'analyse statistique a montré que la valeur actuelle escomptée était relativement faible si l'on maintenait la pêche au chalut actuellement autorisée, et que le complément d'information qui pouvait être obtenu en surveillant les résultats d'une pêche au chalut continue n'aiderait pas à prendre les futures décisions sur ce qu'il y aurait de mieux à faire. En fait, alors que les probabilités qui pouvaient être attribuées aux différents modèles à l'époque étaient relativement faibles, il est apparu qu'il y avait de réels avantages à choisir immédiatement la pêche au piège. Cependant, on a également vu qu'avec certains régimes d'aménagement expérimentaux, consistant à cesser le chalutage dans certaines zones et à introduire la pêche au piège dans quelques-unes des zones fermées au chalutage, on pouvait obtenir de la ressource un profit actuel escompté plus élevé.

En se fondant en partie sur ces travaux, les instances chargées de l'aménagement du plateau nord-ouest sont convenues de mener une expérience en divisant la zone en trois. La première partie restait ouverte aux chalutiers, la deuxième a été fermée aux chalutiers en 1985, et la troisième a été fermée en 1987. La pêche au piège était autorisée partout. On espérait qu'en fermant une partie de la zone aux chaluts cela permettrait à cette pêcherie de développer l'exploitation d'espèces qui vivent dans des habitats moins perturbés.

Malgré quelques difficultés, une expérience adaptée se poursuit encore actuellement, et on a recueilli suffisamment de données pour pouvoir évaluer les quatre hypothèses (Sainsbury et al., 1997). La figure 4 montre que dans la zone fermée au chalutage la densité des Lethrinus et des Lutjanus a augmenté, de même que l'abondance du benthos de petite taille. L'abondance d'épibenthos de grande taille est restée stable ou a parfois légèrement augmenté. Dans la zone ouverte au chalutage, la densité de poissons a diminué, ainsi que celle de l'épibenthos de petite ou grande taille.

Ces résultats fournissent une indication très utile sur les effets de la pêche. Cependant, c'est dans l'évaluation formelle des quatre hypothèses mentionnées cidessus que réside tout l'intérêt de cette étude, car les données obtenues pendant la période expérimentale ont permis d'actualiser les probabilités attribuées à chacune des quatre hypothèses. Ces résultats mis à jour indiquent qu'on pouvait mettre en place une pêcherie d'une valeur élevée de Lethrinus et de Lutjanus sur le plateau nord-ouest s'il était possible de protéger l'habitat et qu'on pouvait probablement attribuer en grande partie l'évolution de la structure de la communauté piscicole à la modification des habitats due au chalutage. Les gestionnaires qui sont en mesure de faire appel à des évaluations scientifiques quantitatives et systématiques de ce genre seront en bien meilleure posture pour prendre des décisions avisées.

L'exemple que représente le plateau nord-ouest montre bien que l'interaction entre les pêcheries et la structure des communautés benthiques peut conduire à la fois à une amélioration de la pêcherie et à une moindre perturbation de la communauté benthique. De tels mécanismes peuvent ne pas fonctionner partout. En fait, les habitats dans lesquels ils fonctionnent peuvent être très limités, mais il faut savoir que cette possibilité existe. On doit tenir compte de ces incidences au moment de décider quelles mesures techniques il convient d'adopter dans une stratégie d'aménagement (voir chapitre 2).

Malheureusement, il apparaît toutefois dans le cas du plateau nord-ouest que les échelles de temps pour la reconstitution de l'épifaune benthique sont plus lentes que prévu. Alors qu'on pensait qu'il fallait aux éponges de 6 à 10 ans pour croître de 25 cm, il semble maintenant qu'il en faille au moins 15. En outre, l'analyse vidéo des effets qu'ont les bourrelets des chaluts a montré qu'environ 89 pour cent des rencontres avec les éponges avaient pour effet de les déloger, ce qui le plus souvent les faisait mourir par la suite. Cette lente dynamique de reconstitution et la probabilité apparemment forte que le benthos de grande taille soit soulevé par un chalut signifie que l'on devra prendre des mesures très efficaces pour protéger l'habitat, afin de conserver à ce dernier la structure qui soutient cette pêcherie de grande valeur.

FIGURE 4
a) Evolution de l'abondance de poissons (Lethrinus et Lutjanus); b) Modification de la proportion d'épibenthos de petite et grande taille dans les zones fermées à la pêche. (Adapté de la figure 2 de Sainsbury et al. [1997] et reproduit de la figure 3.8 de Hall [1999])

5 QUELLES SONT LES ÉTAPES À SUIVRE POUR INSTAURER DES RESTRICTIONS GÉOGRAPHIQUES ET SAISONNIÈRES?

La figure 5 présente un bref résumé des étapes que suppose le processus de mise en œuvre aux fins de l'aménagement des pêcheries ou de la conservation. Ces étapes sont décrites plus en détail ci-après.

5.1 Fixer votre objectif

L'importance d'être explicite quant aux buts des restrictions géographiques ou saisonnières est soulignée tout au long de ce chapitre et dans le guide tout entier. Une fois de plus, il est essentiel que le gestionnaire fasse un choix parmi les justifications présentées à la section 2 ou qu'il détermine un autre but. Bien entendu, il peut y avoir de nombreuses justifications pour une mesure, auquel cas il est important d'essayer de les préciser par ordre de priorité. Même s'il peut ne pas y avoir de règles strictes et rapides à propos des détails que devrait comporter la détermination des objectifs pour une mesure, la mise en place de cette dernière sera grandement facilitée si un maximum de détails sont donnés sur ce qu'on cherche à réaliser à la première occasion. Il faudra pour cela traduire les buts généraux en objectifs opérationnels détaillés (voir chapitre 5).

5.2 Préciser les critères de sélection

5.2.1 Critères pour la gestion des stocks

Une fois que les objectifs pour la mise en place d'une restriction géographique ou saisonnière ont été fixés, il convient logiquement de préciser les critères pour le choix des sites ou des périodes possibles. Très souvent, ce choix sera conditionné par le cycle biologique des espèces concernées et la dynamique des différents secteurs halieutiques que vise la mesure. On disposera fréquemment de données biologiques suffisantes pour faciliter la décision, car on connaît en général assez bien les lieux d'alevinage ainsi que les époques et lieux de fraie. De même, les pêcheurs savent parfaitement où et quand se produisent les conflits entre les différents secteurs. Toutefois, en ce qui concerne la justification de zones d'interdiction permanente de la pêche dans les habitats des adultes, les données seront souvent moins complètes, et les avantages potentiels prêteront davantage à discussion. Lauck et al. (1998) indiquent comme «désirables» les caractéristiques ci-après pour une réserve d'interdiction totale de la pêche, en vue de réaliser les objectifs de l'aménagement des pêcheries.

1. La réserve devrait être assez vaste pour protéger la ressource en cas de surexploitation dans la zone non protégée.

2. La réserve devrait servir à reconstituer le stock exploité, au cas où ce dernier serait épuisé. En particulier, les réserves devraient permettre de protéger les frayères et tous les autres emplacements critiques pour la viabilité de la population.

3. Il faudrait protéger totalement la réserve, car le développement presque certain de la biomasse à l'intérieur de la réserve incitera fortement au braconnage.

A mon avis, ces caractéristiques ne sont pas seulement désirables; elles sont essentielles si l'on veut qu'une ZMP assure véritablement la protection des stocks.

FIGURE 5
Les différentes étapes que supposent la détermination et la création d'une ZMP, que ce soit pour l'aménagement de pêcheries ou à des fins de conservation. (Adapté en partie de Kelleher et Kenchington, 1992)

En ce qui concerne le point 3, il ne devrait pas être trop difficile de déterminer ce qu'il faut faire; il s'agit simplement de préciser la volonté politique pour assurer le financement. En revanche, les points 1 et 2 représentent un défi majeur pour les écologistes. Pour déterminer la dimension et l'emplacement appropriés de zones fermées, il faut prendre en compte les proportions relatives des populations et communautés concernées à l'intérieur de la zone protégée, leur rôle potentiel en tant que populations sources pour les zones non protégées, ainsi que l'emplacement de tous les types d'habitats vulnérables qui ont besoin d'être inclus dans la zone protégée pour maximiser les avantages de l'approche.

Le modèle préféré de restrictions géographiques et saisonnières à des fins plus générales de conservation est celui d'une législation fondée sur des zones aménagées pour des usages multiples. De petits secteurs isolés fortement protégés dans une zone par ailleurs non protégée, ou soumise à une réglementation fragmentaire, sont beaucoup moins souhaitables, car une protection fragmentaire de petites zones marines parallèlement à un aménagement classique des pêcheries conduit souvent à la surexploitation des stocks ichtyologiques et à la détérioration progressive de la zone protégée. Ainsi, la plupart des protecteurs de la nature sont partisans de vastes zones protégées à usages multiples, qui prévoient un certain nombre de niveaux d'accès ainsi que de niveaux de pêche et de prélèvement dans différentes zones, avec une récolte constante et équilibrée de ressources alimentaires dans la plus grande partie de la zone marine du pays. Le tableau 3 résume les critères de l'UICN en ce qui concerne l'inclusion d'une zone parmi les zones marines protégées.

TABLEAU 3 Facteurs ou critères qui ont été proposés pour décider si une zone devrait être incluse parmi les ZMP ou pour fixer les limites d'une ZMP. (Adapté de Kelleher et Kenchington, 1992)

Critère

Description

Caractère naturel

Mesure dans laquelle la zone a été protégée des changements d’origine humaine ou non exposée à ces changements.

Importance biogéographique

Possède de rares qualités biogéographiques ou représente un ou plusieurs types biogéographiques. A des caractéristiques géologiques très particulières ou inhabituelles.

Importance écologique

Contribue au maintien des processus écologiques essentiels ou des systèmes de soutien de la vie.
Mesure dans laquelle la zone, seule ou en association avec d’autres zones protégées, englobe un écosystème complet.
Contient certains ou la totalité des aspects suivants:
· divers types d’ habitats;
· habitat pour des espèces rares ou menacées d’extinction;
· zones d’alevinage ou de jeunes poissons;
· zones d’alimentation, de reproduction ou de repos;
· habitat rare ou particulier pour toute espèce;
· grande diversité génétique (c’est-à-dire espèces variées ou abondantes).

Importance économique

Contribution actuelle ou potentielle à la valeur économique du fait de sa protection. La contribution économique pourrait se faire par:
· les loisirs;
· la subsistance;
· l’exploitation par des utilisateurs traditionnels;
· l’appréciation des touristes;
· l’importance de l’habitat pour des espèces ayant une valeur économique.

Importance sociale

A une valeur actuelle ou potentielle pour la communauté locale, nationale ou internationale, en raison du patrimoine ou de son intérêt historique, culturel, traditionnel, esthétique, éducatif ou récréatif.

Importance scientifique

A une valeur pour la recherche et le suivi.

Portée internationale ou nationale

A le potentiel voulu pour figurer sur la Liste du patrimoine mondial ou national ou être déclarée Réserve de la biosphère, ou avoir toute autre importance nationale ou internationale, ou faire l’objet d’un accord national ou international de conservation.

Aspects pratiques/faisabilité

· Degré de protection des influences destructives extérieures.
· Acceptabilité sociale et politique, soutien fourni par la communauté.
· Accessibilité pour l’éducation, le tourisme et les loisirs.
· Compatibilité avec les utilisations actuelles, notamment par la population locale.
· Facilité d’aménagement, compatibilité avec les régimes d’aménagement existants.

5.3 Réunir les informations et procéder à une évaluation préliminaire

De toute évidence, pour tenir compte des critères décrits dans la section précédente, il faut disposer d'énormément d'informations d'ordre économique, social, biologique et écologique, avant de pouvoir prendre des décisions avisées. Comme noté cidessus, on disposera de suffisamment de données sur la biologie et sur la pêcherie pour bon nombre des objectifs qu'on peut se fixer en ce qui concerne les restrictions géographiques et saisonnières. Pour certaines formes de restrictions, en particulier les fermetures permanentes de zones dans l'habitat de poissons adultes, l'information servant à étayer une décision sur la fermeture d'une zone sera souvent insuffisante, voire inexistante. Quelles que soient les données disponibles, un gestionnaire doit chercher à tirer les leçons de l'expérience acquise dans d'autres systèmes et, si possible, des modèles quantitatifs scientifiquement défendables qui prévoient les conséquences probables de différents scénarios d'aménagement (voir chapitre 5). Il est notamment important de se poser les questions ci-après.

5.3.1 Mes restrictions protégeront-elles les stocks de poissons?

Dans la mesure, évidemment, où la plus grande partie d'une zone est fermée à la pêche, la réponse doit être affirmative (à moins que le petit secteur resté ouvert soit le seul lieu de fraie pour la ressource). Une question plus pertinente, toutefois, est la suivante: dans quelle gamme de situations la restriction géographique ou saisonnière a-t-elle le plus de chances de réaliser cet objectif, et avec quels mécanismes? Il s'agit là d'une question complexe et difficile, à laquelle il n'y a pas de réponse simple, en particulier pour les fermetures géographiques permanentes dans les habitats de poissons adultes. Il faut peut-être noter, par exemple, que l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a récemment examiné les avantages que représentaient, pour les pêcheries, 52 zones soumises à des restrictions; dans 32 cas, les stocks déclinaient ou montraient de grandes variations et, dans 16 cas seulement, ils s'étaient accrus ou étaient restés stables (Anon., 1997). A noter également que, dans tous les cas de bons résultats, une limitation de l'accès ou du total admissible de capture allait de pair avec d'autres contrôles des moyens de production, tels que la sélectivité par taille ou par sexe, de sorte qu'il était impossible de déterminer la part de résultats qui revenait aux seules fermetures de zones.

Malgré cette analyse quelque peu pessimiste de l'OCDE, il existe de bonnes preuves que dans de nombreux domaines les restrictions géographiques et saisonnières ont souvent été très efficaces. En effet, comme mentionné ci-dessus, il y a de plus en plus de preuves de l'efficacité des ZMP dans les habitats de poissons adultes, aux fins de la conservation des stocks ichtyologiques dans les récifs coralliens et autres systèmes tropicaux, où la biologie des poissons est favorable et où l'aménagement se fait en recourant au contrôle de l'effort. On pourrait s'attendre à des avantages semblables dans les systèmes tempérés où les espèces de poissons qui présentent un intérêt particulier ont des caractéristiques biologiques analogues à celles de leurs homologues tropicaux.

A l'heure actuelle, cependant, les arguments en faveur des fermetures permanentes sont plutôt moins convaincants en ce qui concerne les pêcheries tempérées du plateau continental, même si les fermetures saisonnières, par exemple la Plaice Box décrite cidessus, semblent conférer des avantages certains.

5.3.2 Quelle devra être la dimension de ma ZMP et combien de temps les restrictions devraient-elles durer?

Comme mentionné auparavant, pour l'aménagement des pêches dans les systèmes démersaux tempérés, il faut parfois que les zones de fermeture dans les habitats de poissons adultes soient particulièrement vastes pour être efficaces, ce qui n'est pas toujours réalisable. Cela peut être vrai en particulier dans les pêcheries qui sont aménagées par le biais de contrôles sur le total admissible de capture, où l'effort peut se porter sur d'autres zones et annuler les avantages potentiels (Horwood, 2000). Horwood avance par exemple l'argument convaincant que les prétendus avantages pour les stocks ichtyologiques de la fermeture d'environ 10 à 20 pour cent des fonds de pêche sont beaucoup trop optimistes pour de tels systèmes en Europe. Cependant, les fermetures saisonnières ou autres visant à protéger les juvéniles se montrent certainement efficaces. En ce qui concerne les systèmes de récifs coralliens,

McClanahan et Kaunda-Arara (1996) estiment que de nombreuses petites réserves peuvent être préférables en matière de pêches. D'après ces auteurs, les petites réserves ont permis d'accroître les captures totales dans les zones adjacentes, ce qu'une réserve plus grande ne faisait pas. On ne dispose pas de données ou de résultats d'expérience pour les pêcheries démersales tropicales au chalut, et il n'existe que peu d'analyses disponibles pour guider les décisions.

En ce qui concerne la conservation marine en général, le concept de parc ou de réserve dans un système marin est quelque peu différent de celui que l'on a sur la terre ferme. Dans les systèmes terrestres, on se représente généralement une zone protégée comme étant séparée du reste du système, avec autour des zones non protégées qui ont peu d'influence sur l'intérieur de la réserve. A l'opposé, les systèmes marins sont en général extrêmement ouverts, et il y a beaucoup d'échanges à travers les limites législatives tracées sur la carte. Il s'ensuit que la dimension minimale nécessaire pour réaliser les objectifs fixés pour une ZMP risque d'être plusieurs fois supérieure à celle qui est nécessaire pour un système terrestre. Il existe en particulier un consensus selon lequel, pour protéger des écosystèmes marins productifs et des zones présentant une grande diversité biologique, une ZMP doit englober le plus grand nombre possible de composantes de l'écosystème et tenir pleinement compte des nombreux facteurs et influences qui ont une incidence sur la productivité et la diversité.

5.3.3 Quelles sont les parties intéressées qui seront affectées par les mesures et quelles questions législatives la création d'une ZMP soulève-t-elle?

Les décisions concernant la fermeture de saisons relèvent en général exclusivement du gestionnaire des pêcheries; il est peu nécessaire d'y associer des institutions ou des parties intéressées autres que celles qui sont directement concernées par la pêche. En revanche, pour créer une ZMP permanente, il faudra presque certainement des accords entre institutions et des négociations. Un but important pour le gestionnaire des pêcheries sera d'acquérir les connaissances nécessaires au soutien du processus de planification et d'aménagement. En effet, les principes généraux qui figurent au paragraphe 6 du Code de conduite mentionnent à plusieurs reprises l'importance de la consultation et de la négociation. En particulier, la création d'une ZMP aura plus de chances d'avoir de bons résultats si:

En ce qui concerne la législation, le succès de l'aménagement est de toute évidence plus probable quand la zone prise en considération pour être protégée (et de préférence la zone adjacente dans les eaux côtières) relève de la juridiction du même organisme, ce qui est d'ailleurs rarement le cas. Lorsque cette situation n'a pas cours, on a soutenu avec vigueur que la législation et les arrangements de gestion devraient provenir des institutions existantes, à moins qu'il n'y ait un appui public ou politique massif en faveur d'organismes administratifs complètement nouveaux. Il est évident que le cadre législatif précis dans lequel une ZMP doit être établie variera d'un pays à l'autre. Ainsi, ce manuel ne peut fournir aucune orientation générale, mais il insiste sur le fait qu'il est important qu'un responsable de l'aménagement soit parfaitement au courant des lois en ce qui le concerne.

5.3.4 Comment la mesure sera-t-elle appliquée?

Comme pour toutes les mesures d'aménagement des pêcheries, la facilité avec laquelle on pourra surveiller et faire respecter l'application d'une mesure sera vraisemblablement une condition de faisabilité extrêmement importante. Malheureusement, en ce qui concerne les restrictions géographiques et saisonnières, il n'existe pas de réponse toute faite à ce sujet. Une analyse de l'OCDE (Anon., 1997) a indiqué, par exemple, que le coût des mesures de coercition ou les problèmes s'étaient accrus dans six pêcheries, tandis que cinq autres n'avaient signalé aucune difficulté. On peut supposer par exemple qu'il est facile de maintenir l'ordre lorsque la saison de pêche est courte et que les bateaux proviennent d'un nombre de ports limité. En revanche, la fermeture permanente d'une vaste zone reculée serait presque impossible à contrôler sans l'aide de la technologie, par exemple l'observation par satellite des navires ou la surveillance aérienne. Sans aucun doute, les fermetures de zones ou de saisons seront probablement plus efficaces si les pêcheurs eux-mêmes approuvent sans réserve la mesure et sont prêts à en assurer le respect (voir chapitres 7 et 8).

5.3.5 Faudra-t-il financer l'adaptation?

Quand l'accès aux fonds de pêche doit être limité, il est important d'examiner dans quelle mesure l'effort risque d'être déplacé ailleurs et quelles seront les conséquences probables de ce déplacement. Si déplacer l'effort suscite de l'inquiétude, il faut envisager la possibilité de verser des fonds destinés à des ajustements structurels pour réduire la capacité de pêche et compenser les pêcheurs de la perte d'accès.

5.4 Mettre en œuvre le processus de négociation

Après avoir procédé à une évaluation complète des options et s'être familiarisé avec l'étendue des problèmes pour une situation donnée, le gestionnaire des pêcheries doit pouvoir décider si une restriction géographique ou saisonnière est susceptible de convenir. En supposant que ce soit le cas, il faut toutefois tenir compte du fait qu'il n'existe pas de méthode standard simple pour instaurer des restrictions. Ce qui fonctionne bien dans un pays ou groupe de pays peut rarement être adopté sans modification dans une autre situation. Cependant, il existe une vérité universelle: la population locale doit être directement associée au choix, à la mise en place et à l'adaptation des mesures si l'on veut avoir un maximum de chances de succès (voir chapitre 7). Le Code de conduite insiste également sur ce point (paragraphes 10.1.2 et 10.1.3).

5.5 Evaluer les besoins de recherche d'appui

Il est difficile de ne pas être sceptique face à certaines déclarations hardies faites à propos du succès des restrictions géographiques et saisonnières. En ce qui concerne notamment les fermetures permanentes de zones dans l'habitat de poissons adultes, il n'est certainement pas évident qu'elles devront automatiquement améliorer les pêcheries. Mais l'incertitude quant à leur valeur en tant qu'outil d'aménagement ne doit cependant pas servir de prétexte pour les écarter. Au contraire, essayer l'approche de la réserve permanente est presque un passage obligé. Toutefois, un gestionnaire doit s'assurer que nous en tirons une leçon, en nous efforçant de comprendre les mécanismes fondamentaux qui dictent le succès ou l'échec. Un programme de recherche étroitement associé à l'application de la mesure d'aménagement est une condition essentielle pour le faire. Il peut également y avoir des raisons plus impérieuses sur le plan politique pour organiser des programmes de recherche allant de pair avec des restrictions géographiques. Il convient d'examiner le scénario ci-après.

On met en place une réserve marine en donnant comme arguments que les habitats benthiques seront préservés et les stocks ichtyologiques améliorés. La réserve est créée, malgré une forte opposition de la part des pêcheurs, qui considèrent que la mesure constitue un obstacle inutile à leurs échanges commerciaux. Finalement, le secteur halieutique accepte la mesure, bien que de mauvaise grâce. Supposons maintenant qu'il n'y ait pas eu d'amélioration perceptible des captures au bout de cinq ans. On peut imaginer au moins quatre raisons à cet état de fait:

1. la réserve n'était pas assez grande;
2. la zone n'est pas restée fermée assez longtemps;
3. la réserve n'était pas située au bon endroit;
4. les réserves ne donnent pas de bons résultats dans ce type de système.

Les tenants des deux premiers motifs plaident en faveur de contraintes encore plus fortes, et il sera probablement très difficile sur le plan politique d'entreprendre une action en ce qui concerne le troisième motif. Les pêcheurs, bien entendu, vont probablement plaider en faveur du quatrième motif et demander la réouverture de la zone. Le problème est qu'en l'absence d'information sur les mécanismes qui fonctionnent dans la région on ne dispose d'aucune base pour affirmer laquelle de ces explications est la plus probable. Ainsi, personne n'est en mesure de décider s'il faut agrandir la réserve, la laisser telle quelle, la déplacer, ou abandonner toute idée de réserve. Bien entendu, même avec un programme de recherche orienté, l'information ne sera pas parfaite, mais adopter une méthode du type des approches de Bayesian décrites plus haut (section 4.3) semble être une démarche sensée en faveur d'une sage décision. Faute d'efforts pour contrôler l'efficacité de toute restriction géographique ou saisonnière ou pour comprendre pourquoi une restriction réussit ou échoue, je crains que l'objectif de protéger les stocks de poissons et le système marin en général ne soit compromis.

Malgré les observations ci-dessus, il faut tenir compte du fait qu'il sera souvent difficile de mettre en évidence les avantages que présente une fermeture de zone ou de saison pour l'aménagement d'une pêcherie sur des échelles de temps raisonnables. On a calculé, par exemple, qu'en utilisant le niveau de signification statistique normalisé de 5 pour cent il faudrait plus de 30 ans pour obtenir une probabilité à 90 pour cent de noter une amélioration de 20 pour cent dans le recrutement moyen des poissons plats, après la mise en place de la Plaice Box décrite plus haut. Ainsi, dans de nombreux cas, il est peu probable que l'avantage de la fermeture d'une zone soit clairement démontré en moins d'une dizaine d'années (Horwood, 2000).

6 OBSERVATIONS FINALES

Il existe de nombreuses raisons impérieuses qui devraient pousser un gestionnaire des pêcheries à prendre sérieusement en compte la fermeture de zones ou/et les restrictions saisonnières, soit pour compléter d'autres mesures, soit comme aspect essentiel de la stratégie d'aménagement.

Les restrictions saisonnières se sont révélées efficaces dans de nombreuses pêcheries et représentent un outil important dans l'arsenal de l'aménagement. A de nombreux égards, les raisons qui justifient qu'on y ait recours (par exemple, les avantages qui en découleront pour les pêcheurs) et le processus d'application seront probablement assez simples, comparés aux fermetures permanentes de zones. L'abîme politique qui existe entre une perte temporaire d'accès chaque année et une perte à perpétuité est énorme.

Du point de vue de l'aménagement des pêcheries, les avantages qui découlent des fermetures permanentes de zones sont habituellement moins faciles à prévoir que pour les fermetures saisonnières. En outre, même si on accepte l'idée que la création d'une réserve permanente permettra des taux de production plus élevés dans les zones de pêche adjacentes, les avantages potentiels risquent souvent d'être en grande partie dissipés. Si, par exemple, l'accès d'une pêcherie reste libre, une augmentation de la production attirera probablement de nouveaux arrivants dans la pêcherie, ce qui affectera son équilibre bioéconomique. Cependant, du point de vue plus large de la conservation, les zones de fermeture ont un rôle important et clairement défendable à jouer, et un arrangement relatif aux zones servira souvent efficacement les intérêts de la conservation. En raison d'une tendance croissante à créer des réseaux nationaux de zones marines protégées, il semble probable que les gestionnaires des pêcheries dans le monde entier devront garantir qu'ils connaissent bien les questions concernant ces approches.

7 RÉFÉRENCES

Anon. 1997. Towards Sustainable Fisheries. Economic Aspects of the Management of Living Marine Resources. OCDE, Paris.

Attwood, C.G. & Bennett, B.A. 1994. Variation in dispersal of Galjoen (Coracinus capensis) (Teleostei: Coracinidae) from a marine reserve. Canadian Journal of Fisheries and Aquatic Science, 5: 1247-1257.

Costanza, R., d'Arge, R., de Groot, R., Farber, S., Grasso, M., Hannon, B., Limburg, K., Naeem, S., O'Neill, R., Paruelo, J., Raskin, R., Sutton, P. & van den Belt, M. 1997. The value of the world's ecosystem services and natural capital. Nature (Londres), 38: 253-260.

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