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2. ELABORATION ET DIVERSITE DES POINTS DE REFERENCE


2.1 Les objectifs de gestion et le concept de "Point de Référence"
2.2 Les modèles de population sous-jacents
2.3 Les Points de Référence pris comme cibles ou limites
2.4 Points de Référence Cible (PRC)
2.5 Points de Référence Limite ou Seuils (PRL)
2.6 Les Points de Référence pour les pêcheries nouvelles ou en développement
2.7 Les Points de Référence pour la reconstitution des stocks
2.8 Points de Référence de précaution
2.9 Les Points de Référence pour les ressources en grands migrateurs
2.10 Considérations multispécifiques et écosystémiques dans l'établissement de Points de Référence
2.11 Une vue d'ensemble des Points de Référence


2.1 Les objectifs de gestion et le concept de "Point de Référence"

Les Points de Référence sont tout d'abord des critères conceptuels qui intègrent globalement l'objectif de gestion de la pêcherie. Afin de mettre en oeuvre une gestion des pêches il faut être capable de convertir le Point de Référence conceptuel en un Point de Référence technique, qui puisse être calculé ou quantifié sur la base des caractéristiques biologiques ou économiques de la pêcherie (Fig. 1). Ainsi, lorsque l'objectif est de maximiser la production, la MSY a fréquemment été utilisée comme Point de Référence conceptuel. Le concept de MSY a été interprété de diverses façons, depuis son strict sens technique de sommet de la courbe d'un modèle global, ou de point d'excédent maximal de reproduction sur une courbe stock-recrutement, jusqu'à son interprétation la plus littérale, celle de production maximale constante qui puisse être prélevée année après année, telle que décrite par Sissenwine (1978) et Annala (1993).

Figure 1: Elaboration progressive des Points de Référence techniques et conceptuels intégrant des modèles scientifiques et des objectifs de société pour l'aménagement des pêcheries.

Les objectifs d'aménagement des pêcheries ne se limitent généralement pas à une simple maximisation du rendement. Ils intègrent souvent des considérations relatives aux devises, à l'emploi, au soutien des zones rurales défavorisées, au profit, etc.. Le concept d'un objectif d'ensemble qui inclue tous les facteurs importants pour une pêcherie se retrouve dans la Convention des Nations Unies sur les océans, adoptée à Genève en 1958, où l'expression "Production Maximale Equilibrée" est apparue. La Production Optimale4 (PO) a depuis lors été définie de diverses façons, en intégrant par exemple les "valeurs économiques, sociales ou biologiques [...] plutôt que de se limiter à la maximisation des profits nets ou à la maximisation de la production équilibrée" (Wallace, 1975). Puisqu'il n'existe pas de définition technique unique, nous ne considérons pas la PO comme un Point de Référence technique, mais comme un état qui peut survenir lorsqu'une série de critères se trouve vérifiée, ce qui garantit effectivement que la pêcherie reste à l'intérieur d'une plage assurant une production sans danger.

4 Optimal Yield (OY)

Smith et al. (1993) estiment que le manque d'objectifs de gestion clairement définis est l'un des principaux obstacles à l'établissement et à la ratification de Points de Référence. Ainsi qu'on a pu le décrire ci-dessus, de nombreux objectifs de société peuvent intervenir dans l'aménagement d'une pêcherie, et chacun peut correspondre aux intérêts d'un groupe d'utilisateurs particulier. Aussi, les parties prenantes d'une pêcherie doivent-elles s'entendre sur les objectifs d'aménagement de cette pêcherie. Dans le but de s'accorder sur un Point de Référence conceptuel, les utilisateurs doivent comprendre les relations entre les objectifs et les caractéristiques de la pêcherie. Ils doivent être à même d'apprécier les compromis entre les divers Points de Référence possibles, exprimés en termes concrets même s'ils sont relatifs, tels que: taux de mortalité par pêche, taux de capture, taille moyenne des poissons, etc.). Divers moyens de simplification de ces relations doivent être recherchés, dans le but de faciliter la participation de tous les utilisateurs (exemple Fig. 2).

Figure 2: Divers taux de mortalité par pêche correspondant aux différents objectifs de société pour l'usage des ressources marines, dans le contexte d'un modèle global multispécifique appliqué à des pêcheries récifales (d'après Mahon, 1992).

Jusqu'à présent, il est rare que des objectifs multiples aient été formellement inclus dans une stratégie d'aménagement, et plus rare encore qu'un seul Point de Référence technique ait été pris en compte. Healey (1984) a proposé une méthode analytique pour déterminer la production optimale basée sur une analyse d'utilité à entrées multiples. La méthodologie, qui quantifie et pondère les objectifs des utilisateurs, paraît être une façon raisonnable de parvenir à des décisions consensuelles quand des objectifs multiples sont en jeu. Cependant, nous connaissons peu de cas où une approche multi-critères à la prise de décisions est formellement appliquée à l'aménagement des pêcheries: deux d'entre eux sont la pêcherie de poulpes du plateau continental du Yucatan (Diaz-de Leon et Seijo, 1992), et une pêcherie de saumon "chinook" en Alaska (Merrit et Criddle, 1993).

5 Minimum Biologically Acceptable Level (MBAL)

Un autre Point de Référence conceptuel est le point au-delà duquel on arrive à la "surpêche". Aux Etats-Unis, les plans de gestion imposent que soient donnés une définition ou un Point de Référence technique de la sur pêche pour chaque stock. Dans la zone CIEM, ce point conceptuel est dénommé Niveau Minimum Biologiquement Acceptable5 (NMBA) pour la pêcherie. Pour des applications pratiques, la "surpêche" et les NMBA doivent être définis techniquement, et ceci a été fait de diverses manières qui seront décrites plus loin.

Dans le cadre de ce document, un Point de Référence sera défini comme une valeur conventionnelle, issue d'analyses techniques, qui représente l'état d'une pêcherie ou d'une population, et dont les caractéristiques sont considérées comme utiles à la gestion du stock unitaire. Définir un Point de Référence comme une valeur conventionnelle reflète le fait que, pratiquement, il puisse souvent prendre des valeurs arbitraires et soit fréquemment donné sans expression de la variance. Il est important de remarquer ici que tous les Points de Référence basés sur des modèles, ainsi que les paramètres dont ils sont dérivés, ne sont connus qu'approximativement et que leur niveau d'erreur est souvent mal défini.

2.2 Les modèles de population sous-jacents

Les Points de Référence techniques utilisés en gestion des pêcheries sont largement basés sur des modèles biométriques et économétriques, et par conséquent sur une conceptualisation mathématique des populations de poissons, et peuvent être difficiles à assimiler pour le lecteur non-spécialiste. Par conséquent nous essaierons tout au long de ce document d'étayer autant que possible nos arguments par des résumés graphiques. L'Annexe 1 présente quelques concepts clés. Pour un exposé plus complet des méthodes de base, on se reportera aux ouvrages de référence sur l'évaluation biologique et économique des pêcheries (Ricker, 1975; Gulland, 1983; Clarke, 1985; Hilborn et Walters, 1992).

La relation entre mortalité par pêche (F), biomasse du stock (B) et production peut constituer le point de départ d'une discussion sur la plupart des Points de Référence (Fig. 3). F et B sont les Variables de Référence les plus fondamentales. Les Points de Référence relatifs à ces variables sont établis en utilisant divers critères discutés plus loin. On prendra pour exemples: la valeur de F qui, si elle est appliquée sur plusieurs années, conduira à une production moyenne équivalente à MSY; la valeur de F qui maximise le rendement moyen par recrue; la biomasse qui permettra un niveau requis de recrutement. La gestion conventionnelle des pêcheries cherche à contrôler F ou à maintenir B à des niveaux correspondant aux valeurs cibles, en utilisant diverses méthodes (Fig. 3). La mortalité par pêche et la mortalité naturelle (M) due à la prédation, aux maladies, etc., se combinent pour constituer le taux de mortalité total (Z = F + M) de la population.

Figure 3: Variables principales de population, de référence et de contrôle utilisées pour la définition des Points de Référence biologiques. Outre les trois mesures de base de l'état d'une population exploitée, le taux de mortalité par pêche (F), la biomasse (B) et la production (Y), dont les interrelations sont précisées dans une équation des captures, les autres mesures secondaires indiquées peuvent aussi être utilisées comme variables de référence.

On peut aussi utiliser comme autres Variables de Référence les autres variables qui influencent directement les Variables de Référence fondamentales, qui y sont reliées ou qui constituent des indicateurs de celles-ci. Ainsi, la mortalité par pêche et l'effort de pêche (f) sont liés par le coefficient de capturabilité (q) que l'on considère généralement constant, de telle sorte que F = q * f. Si cette présomption est vraie, le taux de capture, ou prise par unité d'effort (PUE), est un indicateur de la biomasse de la population (Fig. 3). Dans ce document, tous les Points de Référence seront exprimés en termes de variables primaires. L'état actuel du stock, quelle que soit la variable de référence, est désigné par l'indice act. (pour actuel); par exemple Fact.., Bact.., Yact...

Les modèles qui sous-tendent la MSY (et bien d'autres Points de Référence que nous décrirons plus loin) étaient à l'origine des modèles à l'équilibre, ce qui implique que la capture représentée par la courbe de production est celle obtenue lorsque l'effort standard correspondant a été maintenu durant le nombre d'années nécessaires pour atteindre l'équilibre, le "temps de retour" (Beddington et May, 1977). Cependant il est faux de considérer qu'un niveau donné d'effort de pêche/de mortalité permet de maintenir indéfiniment un certain excédent de production, quelles que soient les conditions de l'environnement (Hilborn, 1979).

Bien que les modèles analytiques incluant les taux de mortalité et de croissance, l'âge de première capture, etc. soient largement utilisés dans les pêcheries des pays "développés", les données nécessaires à l'estimation de la structure en âge actuelle de la population de poisson ne sont pas disponibles pour de nombreux stocks tropicaux ou de petite taille, ou bien sont exigeantes en main-d'oeuvre et en technologie. Là où des évaluations sont effectuées, la plupart d'entre elles dépendent encore d'approches peu précises utilisant des données éparses ou peu fiables, ce qui rend problématique la gestion basée sur les Points de Référence, et impératives les approches de précaution visant à éviter l'effondrement des stocks, même si cela implique dans l'immédiat un manque à gagner en termes de production.

En résumé il est nécessaire, pour gérer la pêcherie, de s'assurer que les Points de Référence Conceptuels à utiliser sont représentés par au moins un Point de Référence Technique dont le mode d'obtention et de mesure est clairement spécifié (Fig. 1). Pour emprunter la terminologie de l'analyse logique des réseaux (CEC, 1993), ces Points de Référence doivent également disposer d'un moyen de vérification (MDV), et un indicateur vérifiable objectivement (IVO). Ceux-ci doivent être clairement définis et acceptés par avance, de manière à ce qu'ils puissent être mis en application sans nécessiter une négociation. Si nous devons retenir quelque chose de l'expérience acquise en aménagement des pêcheries, c'est qu'il est plus important que les bases sur lesquelles se fonde l'aménagement soient claires et indiscutables, plutôt que cet aménagement soit proclamé précis et fiable.

2.3 Les Points de Référence pris comme cibles ou limites

Les nombreux Points de Référence qui ont été proposés pour une exploitation rationnelle des ressources halieutiques peuvent, pour ce qui est de leur utilisation, être classés en deux catégories: les Points de Référence Cible (PRC) et les Points de Référence Limite (PRL). Traditionnellement, les Points de Référence Cible sont considérés comme des indicateurs d'un état du stock que la gestion doit cibler. On considère qu'aménager une pêcherie revient à en ajuster les entrées et les sorties, jusqu'à ce qu'une au moins des variables primaires ou secondaires corresponde au PRC choisi (qui est, bien sûr, le PRC). La MSY, ainsi qu'on l'a évoquée ci-dessus, a le plus souvent été utilisée en ce sens. L'aménagement à l'aide des PRC nécessite une surveillance active et un réajustement continuel des mesures de gestion à une échelle temporelle appropriée (le plus souvent annuelle). Il faut également être attentif aux effets de nombreuses sources d'incertitude sur les estimations du PRC et de l'état du stock.

En 1987, le rapport du Comité consultatif sur l'aménagement des pêches du CIEM notait que "les Points de Référence biologiques ont pour but de fournir des orientations pour l'aménagement, et qu'aucun Point de Référence biologique ne peut servir d'objectif universel". Afin de protéger la ressource et l'industrie des pêches contre des dommages à long terme, il est important de définir et de s'accorder sur une "zone rouge" dans laquelle la continuité de la production de la ressource est en péril, nécessitant une action immédiate telle qu'une réduction substantielle de l'effort de pêche/de la mortalité par pêche ou, dans les cas extrêmes, une fermeture de l'exploitation pendant un certain temps (ICES, 1988). Les Points de Référence qui indiquent la proximité d'un tel danger peuvent être appelés les Points de Référence Seuil (par exemple dans Quinn et al. 1990) ou Points de Référence Limite (PRL).

Aux Etats-Unis, les pêcheries sont gérées par des plans d'aménagement "qui doivent spéficier dans toute la mesure possible, un objectif et une définition mesurable de la surpêche pour chaque stock ou assemblage de stock couvert par ces Plans d'Aménagement des Pêcheries (PAP), et fournir une analyse expliquant comment cette définition a été obtenue et quelle est sa relation avec le potentiel reproducteur" (Mace et Sissenwine, 1993).

Un PRL peut correspondre soit à une condition minimale (par exemple une biomasse de reproducteurs dangereusement faible), soit à une condition maximale (une taille de stock diminuant rapidement, ou un fort taux de mortalité) au seuil de laquelle est automatiquement déclenchée la mesure d'aménagement auparavant négociée avec les acteurs de la pêcherie. Pour les nouvelles pêcheries, ou pour celles des pays en développement où l'information requise pour l'usage des modèles halieutiques mathématiques n'est généralement pas disponible, des critères qualitatifs ou semi-quantitatifs peuvent aussi être utilisés directement en tant que PRL. Quand bien même l'information permettant la définition de PRL est disponible, il peut être souhaitable d'établir des PRL selon une approche de précaution s'il existe des inquiétudes écologiques plus larges quant à la pérennité des profits dans le cas d'un impact de l'exploitation sur l'écosystème (Garcia, 1994).

Définitions:

Un Point de Référence Cible indique un état de la pêcherie et/ou de la ressource que l'on considère comme souhaitable et vers lequel les actions de gestion, au cours du développement ou de la reconstruction du stock, devraient tendre.

Un Point de Référence Limite indique un état de la pêcherie et/ou de la ressource que l'on considère non souhaitable, et que les actions de gestion devraient chercher à éviter.

2.4 Points de Référence Cible (PRC)


2.4.1 Critères de Production Maximale Equilibrée; ex: Fmsy et 2/3Fmsy
2.4.2 Critères de Production par Recrue; ex: Fmax; F0,1
2.4.3 PRC basés sur la taille des poissons capturés
2.4.4 Points de Référence basés sur le taux de mortalité naturelle M
2.4.5 Points de Référence basés sur le taux de mortalité totale, Zpbm, Z*
2.4.6 PRC tenant compte de considérations sur le recrutement
2.4.7 PRC tenant compte de considérations économiques - L'effort de pêche optimal
Fpem


2.4.1 Critères de Production Maximale Equilibrée; ex: Fmsy et 2/3Fmsy

La Convention de 1982 ne spécifie qu'un seul Point de Référence technique, la Production Maximale Equilibrée (MSY), terme descriptif correspondant au sommet d'une courbe décrivant la relation entre l'effort de pêche standard annuel appliqué par toutes les flottilles et la production qui en résulterait, si cet effort de pêche était maintenu jusqu'à ce que le point d'équilibre soit atteint. La MSY est à première vue un objectif évident pour la gestion d'une pêcherie monospécifique, et a été largement utilisée à cet effet par les commissions halieutiques dans les années 60 et 70. L'évolution de cette théorie, et peut-être davantage encore l'expérience pratique en aménagement des pêcheries, ont conduit à douter de l'utilité de la MSY en tant que PRC sans danger (Larkin, 1977). Ceci a stimulé la recherche d'autres Point de Référence, ainsi que résumé ci-dessous.

La Production Maximale Equilibrée, Point de Référence pour les questions de pêche dans la Convention de 1982, est la base qui a permis de définir le "surplus de production " comme étant la part de la MSY non exploitée par un Etat côtier. Selon les termes de la Convention de 1982, tout déficit de captures d'un Etat côtier par rapport à la MSY à l'intérieur de sa ZEE peut être considéré comme un "surplus par rapport aux besoins" de cet état côtier. Cette considération a contribué à l'usage continu de la MSY en tant qu'objectif pour de nombreux pays. Cependant, replacé dans un contexte plus vaste d'objectifs d'aménagement, de nombreux Etats riverains ont noté que cette interprétation du "surplus de production" était inappropriée, dans la mesure où la capture de ce surplus par d'autres nations exerçant la pêche aurait un impact négatif sur les taux de capture des pêcheries de l'Etat côtier. Plusieurs Etats ont conclu que les Points de

Référence basés sur des niveaux d'efforts de pêche significativement inférieurs à Fmsy sont économiquement et écologiquement plus favorables à leur industrie des pêches et à leurs ressources. Une interprétation plus judicieuse considère que prélever la MSY est une option à ne prendre que rarement: le stock est maintenu à un niveau de biomasse tel que la MSY puisse - mais pas nécessairement doive - être prélevée sans mettre en danger le stock, ce qui implique que les niveaux du stock soient maintenus suffisamment élevés pour que la MSY soit atteinte "au moins une fois". Cependant, il n'est pas garanti qu'ainsi conventionnellement définie, la MSY puisse être prélevée plusieurs années consécutives (comme l'a noté Doubleday, 1976).

LES ETATS COTIERS DEVRONT "MAINTENIR OU RETABLIR LES STOCKS DES ESPÈCES EXPLOITEES À DES NIVEAUX QUI ASSURENT LA PRODUCTION MAXIMALE EQUILIBREE, EU EGARD AUX FACTEURS ECOLOGIQUES ET ECONOMIQUES PERTINENTS, [...] ET COMPTE TENU [...] DE L'INTERDEPENDANCE DES STOCKS ET DE TOUTES NORMES MINIMALES INTERNATIONALES GENERALEMENT RECOMMANDEES"

Convention sur le droit de la mer de 1982

La MSY, et ses niveaux équivalents d'effort de pêche standardisé ou de mortalité par pêche (fmsy ou Fmsy) ont été pour la première fois formulés pour le modèle symétrique de Schaefer - ou modèle logistique - (Fig. 4). Le Point de Référence est basé sur le modèle et dépend de l'une des nombreuses formulations de modèles de production publiées (Pella et Tomlinson, 1969; Fox, 1970); il nécessite un ajustement statistique des captures rétrospectives et des données sur l'effort de pêche standardisé, lesquelles ont donné lieu à une bibliographie considérable (Hilborn et Walters, 1992; Polachek et al., 1993). Si le coefficient de capturabilité q est connu, le niveau d'effort fmsy correspondant à MSY peut être converti en mortalité par pêche Fmsy.

Figure 4: Modèle à l'équilibre de Schaefer, montrant la relation entre MSY, Z et le taux d'exploitation correspondant à la Production Biologique Maximale (PBM). Noter que Fpbm < Fmsy, et qu'il n'y a pas de production quand Z £ M.

Choisir un Point de Référence basé sur un modèle implique qu'il y ait accord sur le modèle mathématique sous-jacent qui reflète le plus fidèlement la dynamique de la population considérée. La question est toutefois de choisir un Point de Référence qui permette des conseils prudents en conditions d'incertitude, plutôt que le Point de Référence le mieux étayé théoriquement. De ce point de vue, la MSY n'a pas bien fonctionné en tant que PRC (Doubleday, 1976; Larkin, 1977; Sissenwine, 1978; Garcia, 1984). Des taux de capture initiaux élevés ont inévitablement conduit à un dépassement conséquent des conditions d'équilibre sous Fmsy. On a alors de sérieuses difficultés économiques pour réduire l'effort de pêche et/ou la taille des flottilles ou encore l'accès à la pêcherie, afin de revenir en quelques années à un niveau de MSY inférieur. Ceci a conduit à de sérieuses critiques des modèles de production qui présument l'équilibre lors des prédictions à court terme de la production (Hilborn et Walters, 1992).

Il existe peu d'estimations détaillées de la précision avec laquelle le niveau de la MSY a été atteint, mais l'examen de nombreux modèles de production suggère qu'une précision dépassant ± 20% de l'effort standard qui conduit à la MSY serait rare. L'estimation de la MSY par l'ajustement statistique du modèle aux données rétrospectives suppose que les conditions passées aient une probabilité équivalente de se reproduire dans le futur. Cependant, lors d'une série d'années à faible recrutement, une mortalité par pêche de Fmsy conduit à une production bien inférieure à celle indiquée par le modèle, ce modèle étant supposé ajusté à partir de données issues d'années à taux de recrutement plus "normal". La tentative d'exploiter la MSY statistiquement prédite durant ces années "faibles" supposerait un effort de pêche supérieur, et probablement bien supérieur, à Fmsy. Ainsi, l'utilisation du mot "durable6" pour la MSY obtenue selon des moyens conventionnels est impropre, car "en présence de fluctuations de production, les tentatives d'extraire chaque année, d'un stock, la production de MSY mènent au désastre" (Doubleday, 1976).

6 NDT: "durable" se réfère ici (comme antérieurement) au mot anglais "sustainable" du sigle MSY. En français on a contourné la difficulté ici mentionnée en utilisant le mot "équilibrée" lorsque l'on parle de MSY (Production Maximale Equilibrée)

Par suite de l'incertitude pesant sur l'état actuel du stock par rapport au PRC, il est évident qu'une pêcherie considérée comme opérant aux alentours de Fmsy surpêche ou sous-pêche toujours par rapport à cette référence, souvent de manière significative. Cependant, en termes de production, les réponses biologiques de la ressource vis-à-vis de la surexploitation, ou de la sous-exploitation, ne sont pas nécessairement symétriques. La surpêche engendre une diminution du nombre de classes d'âge dans la pêcherie, augmente ainsi la dépendance de la production globale envers quelques bonnes classes d'âge occasionnelles et conduit aussi à une diminution des tailles moyennes et des taux de capture. Un recrutement relativement constant d'une année à l'autre est plus une exception qu'une règle (Hennemuth et al., 1980), et un recrutement réduit, ou plus variable, du fait d'un plus faible stock de géniteurs s'accompagne d'une dépendance accrue de la pêcherie envers les cohortes déjeunes reproducteurs. Ceci entraînera en retour une augmentation des fluctuations de la biomasse du stock liée aux conditions environnementales. Partant de considérations théoriques, Beddington et May (1977) ont noté qu'une fois Fmsy dépassée, les stocks fluctuent plus sévèrement, et leur temps de retour à une situation d'équilibre augmente notablement.

Le type de modèle de production approprié pour une pêcherie donnée peut seulement être connu après que la surpêche se soit produite et que l'effort total qui procure MSY ait été dépassé, révélant alors la forme de la relation. La production totale peut alors chuter (impliquant un modèle en dôme), ou atteindre un plateau (ce qui est souvent le cas dans les pêcheries de crevettes tropicales). Des stratégies de surpêche contrôlée ont même été proposées de manière à mieux localiser les conditions de la MSY. Du reste, comme on l'a noté ci-dessus, la surpêche survient souvent en dépit d'une gestion dont l'objectif affiché est d'atteindre la MSY. Dans la mesure où le type de modèle à utiliser et le niveau d'effort de pêche (ou de mortalité par pêche) qui correspondent approximativement à la MSY ne peuvent être qu'approchés (dans le meilleur des cas), on a défini d'autres PRC plus modérés, basés sur des modèles de production.

Suivant le concept de Production Marginale de Gulland, Doubleday (1976) a postulé que pêcher à un niveau d'effort correspondant aux deux-tiers de l'effort nécessaire pour produire la MSY devrait permettre d'exploiter une très large fraction de la MSY (environ 80%) avec un risque d'effondrement du stock significativement réduit. Cet objectif, bien que plus sûr que la Fmsy, a été critiqué, à notre sens injustement, comme étant arbitraire, empirique et insensible aux variations de recrutement. Il peut être utile de remarquer que cette approche visant à établir des niveaux de référence pour F peut être généralisée à d'autres modèles de population couramment utilisés (Tableau 1), et peut être considérée comme une manière prudente d'utiliser les résultats de modélisation de la production. Ce tableau montre que la réduction des niveaux d'effort en deçà de ceux correspondant à la MSY n'entraîne pas dans les mêmes proportions une forte réduction de la production équilibrée à long terme, une fois que le stock a récupéré d'une intense exploitation antérieure.

Sissenwine (1978) a mis en évidence le fait que, pour les stocks peu étudiés, la MSY a souvent été confondue, à tort, avec la Production Moyenne Maximale7 (PMM). Cette dernière valeur a quelquefois été utilisée comme PRC, mais donne un poids dangereux aux premières années d'une pêcherie, lorsque les captures étaient élevées, du fait qu'on était en train d'entamer le stock vierge. Ici encore, il faut utiliser avec une certaine prudence les Points de Référence fondés sur la PMM, comme on l'a évoqué dans le paragraphe précédent.

7 PMM = Maximum Average Yield (MAY)

Une interprétation plus rationnelle de la MSY, pour un stock sujet à de fortes variations de recrutement, serait la production susceptible d'être perpétuellement prélevée sur la ressource avec une probabilité faible et acceptable de mettre celle-ci en péril (Sissenwine, 1978). Le CIEM (ICES, 1993a) a récemment envisagé cette interprétation comme une approche pour un aménagement, stable et à long terme, des pêcheries. Des interprétations de la MSY similaires sont actuellement en usage en gestion des pêches en Nouvelle-Zélande (Annala, 1993). La première est une interprétation statique appelée Production Constante Maximale8 (PCM) qui est définie comme "la prise constante maximale que l'on estime soutenable, avec un niveau de risque acceptable, à tous les futurs niveaux de biomasse". Cette interprétation est radicalement différente de la MSY classique car elle implique des taux de mortalité par pêche (Fpcm) et de captures bien inférieurs à ceux correspondant à Fmsy. La seconde est une interprétation dynamique appelée Production Annuelle Actualisée9 (PAA), qui est définie comme la prise d'une année calculée en appliquant un taux de mortalité de référence Fref à une estimation de la biomasse capturable présente durant l'année à venir. Fref est le taux de mortalité instantanée qui, s'il était appliqué chaque année et avec un niveau de risque acceptable, maximiserait la prise moyenne issue de la pêcherie (Fref est souvent choisi égal à F0,1). Dans le processus d'évaluation des pêcheries de Nouvelle-Zélande, la Production Moyenne Maximale (PMM) est la moyenne à long terme des PAA, et est supérieure à la PCM car les PAA suivent de près les variations de la biomasse "pêchable" (Annala, 1993).

8 PCM = Maximum Constant Yield (MCY)
9 PAA = Current Annual Yield (CAY)

En conclusion, il ressort maintenant clairement de la diversité des difficultés techniques, conceptuelles et pratiques associées à l'usage de Fmsy en tant que PRC, que celui-là devrait davantage être utilisé comme PRL, ainsi qu'on le détaille à la section suivante.

2.4.2 Critères de Production par Recrue; ex: Fmax; F0,1

Le fait que les modèles de production combinent tous les aspects de la productivité de la population, du recrutement, de la croissance et de la mortalité, mais ne tiennent pas compte de détails tels que l'âge/la taille au recrutement, a conduit à l'utilisation de modèles analytiques et structuraux, basés sur une dynamique de population plus fine. Ces modèles sont particulièrement utiles quand plusieurs composantes de la flottille exploitent différents groupes d'âge, et quand les régulations portant sur les engins qui jouent sur l'âge/la taille de première capture peuvent constituer un outil d'aménagement important.

La première théorie de la dynamique des populations des stocks exploités a mis l'accent sur le calcul de Fmax, soit le taux de mortalité par pêche pour une taille donnée de première capture qui maximise la production moyenne issue de chaque recrue entrant dans la pêcherie. L'analyse du rendement par recrue utilise l'information relative à la croissance individuelle moyenne, à la mortalité naturelle et à la vulnérabilité. Ceci a été un des premiers points de référence en aménagement des pêcheries et a subi, comme la MSY, de nombreux échecs en tant que PRC.

L'usage du rendement par recrue comme variable de référence ne prend pas en compte les effets de la mortalité par pêche sur la proportion de poissons matures restant dans la population, et donc son potentiel reproducteur. Bien que toute généralisation sur la performance relative des Points de Référence élaborés à partir de modèles de production et de modèles analytiques soit hasardeuse, il y a peu de doute que Fmax soit généralement supérieur à Fmsy, et que l'exploitation à ce taux durant de nombreuses années risque d'épuiser le stock de reproducteurs et de réduire le recrutement futur (Clark, 1991). Bien qu'il y ait de bonnes raisons pour cesser d'utiliser Fmax comme un PRC, il peut être considéré comme une limite supérieure pour F, c'est-à-dire comme un PRL pour le stock.

Pour de nombreuses espèces, il n'y a pas de maximum évident à la courbe de rendement par recrue en fonction de F. Le taux de mortalité par pêche Foi, proposé comme un PRC prudent par Gulland et Boerema (1973), ne nécessite pas un maximum car il s'agit d'un critère arbitraire basé sur la pente de la courbe de rendement par recrue à l'origine. F0,1 est le taux de mortalité par pêche pour lequel la pente de la courbe de rendement par recrue en fonction de la mortalité par pêche vaut 10% de sa valeur à l'origine (Fig. 5). En Afrique du Sud, c'est un critère encore plus restrictif qui est utilisé, à savoir F0,2.

La grandeur F0,1, bien qu'arbitraire, est en un sens un critère bioéconomique dans la mesure où une production marginale inférieure à 10% a été perçue comme étant proche du point au-delà duquel la plupart des administrateurs de pêcherie considèrent qu'un accroissement de la mortalité par pêche, ou de l'effort, n'est plus économiquement rentable. Cette mesure a été largement utilisée dans de nombreuses pêcheries de l'Atlantique du Nord-Ouest (Rivard et Maguire, 1993; Hildén, 1993). Des stratégies basées sur F ont été appliquées au Canada oriental depuis plus de dix ans, et F0,1 est souvent utilisé pour l'établissement de quotas sur les captures.

Figure 5: Illustration de la méthode utilisée pour définir F0,1, connaissant la relation entre le taux de mortalité par pêche et le rendement par recrue. F0,1 est le point sur la courbe Y/R pour lequel la pente de (d'une tangente à) la courbe vaut 1/10 de la pente de (d'une tangente à) la courbe à l'origine.

Une connaissance de la prise réelle est essentielle à l'estimation des valeurs actuelles de F dans le cadre d'une réglementation par quotas, mais on sait qu'il existe de sérieux problèmes relatifs à l'exactitude des prises commerciales déclarées. Ceci a affecté les évaluations des stocks et a été particulièrement marqué là où existe un surarmement des flottilles. En cas de sous-déclaration, il est fort probable que seront dépassées les valeurs de F fixées comme objectif. Ceci peut être la principale explication au déclin de nombreux stocks gérés sur la base du critère F0,1, déclin qui n'est pas seulement dû aux variations de F0,1 survenant lorsque l'on change de schéma d'exploitation et de valeurs d'entrée de M (Jakobsen, 1992).

2.4.3 PRC basés sur la taille des poissons capturés

L'analyse du rendement par recrue fournit la taille/l'âge moyens des poissons capturés qui permet le rendement par recrue maximal pour un ensemble donné de paramètres de la population et pour un taux de mortalité par pêche donné. Lorsque les données nécessaires à l'estimation d'un niveau optimal de mortalité par pêche ne sont pas disponibles, la taille moyenne des poissons capturés peut être utilisée, conjointement à d'autres données, pour constituer un PRC "de substitution".

L'utilisation de la taille moyenne des poissons comme PRC peut être basée sur une analyse de rendement par recrue, ou peut considérer l'ogive de recrutement (recrutement partiel) en relation avec la taille à la première maturité. Un objectif rationnel serait de rechercher un taux d'exploitation tel que la taille moyenne des poissons capturés soit supérieure ou égale à la taille moyenne à maturité. Ainsi, au moins 50% des individus auraient la possibilité de se reproduire. Pour les espèces itéropares, la relation entre cet objectif et un objectif % BFS10 (voir plus bas) dépendrait de M, lequel détermine le nombre moyen d'années pendant lesquelles un poisson mature peut espérer se reproduire dans une population non exploitée, avant de mourir de causes naturelles. Caddy et Die (sous presse) substituent la longueur moyenne de première maturité dans une équation de Beverton et Holt reliant Z à la taille moyenne des captures pour estimer Z*, une valeur de référence de mortalité totale lui correspondant. Ceci peut être utile lorsque des données expérimentales permettant d'estimer Z existent, mais pas les données de capture permettant d'estimer la taille moyenne des individus.

10 BPS = Biomasse Féconde du Stock (Stock Spawning Biomass SSB)

2.4.4 Points de Référence basés sur le taux de mortalité naturelle M

Les pêcheries récentes se développent généralement en l'absence d'évaluation adéquate, et la gestion doit se faire sur la base des informations disponibles. Une approche prudente peut conduire à une sous-exploitation, mais ne conduira pas nécessairement à une perte de production à long terme. Au cours des années 60 et 70, de nombreuses pêcheries se sont développées en différents endroits du monde où les seules données sur l'état du stock étaient une ou plusieurs campagnes exploratoires d'estimation de la biomasse. Cherchant à fournir quelques bases au développement des flottilles de pêche et des pêcheries, Gulland (1973) a proposé une formule simple et empirique pour la MSY, exprimée en termes de biomasse vierge B0 et de taux de mortalité naturelle M, à savoir: MSY = 0,5.M.B0 (une reformulation de la seconde équation de production présentée dans l'annexe I). Ceci suit le modèle symétrique de production de Schaefer, en supposant que la MSY surviendra à la moitié du stock vierge B0 et qu'à la MSY les taux de mortalité par pêche et naturelle seront égaux. Plus tard, l'équation a été généralisée à: MSY = x.M.B0, la valeur de x étant liée aux caractéristiques du stock, et des variations ont été proposées pour l'adapter à des situations où il y avait déjà une mortalité par pêche (Gulland, 1983). Garcia et al. (1989) ont proposé plusieurs estimateurs de la MSY quand les séries de données historiques ne sont pas disponibles.

Pour de nombreux stocks, il y a peu d'arguments empiriques en faveur d'une égalité entre Fmsy et M. Beddington et Cooke (1983) suggèrent que x est généralement inférieure à 0,5, tandis que pour les crevettes pénéides tropicales les valeurs de x comprises entre 0,32 et 0,44 seraient plus appropriées, selon Garcia et Le Reste (1981). Sur un ensemble de onze stocks, Caddy et Csirke (1983) ont trouvé des valeurs de x comprises entre 0,33 et au moins 4. Les plus faibles valeurs étaient celles des stocks de crevettes et de sardines à courte durée de vie, et les plus élevées celles de deux poissons démersaux septentrionaux, prédateurs situés en haut de la pyramide trophique et à faibles taux de mortalité naturelle. Se basant sur une analyse de plusieurs stocks de petits pélagiques, Patterson (1992) a trouvé que seuls les faibles taux d'exploitation, correspondant à une valeur de x inférieure ou égale à 0,33, sont soutenables à long terme. Pour les nouvelles pêcheries de Nouvelle-Zélande, une approche prudente est retenue, où PCM = 0,25 F0,1 B0 (Annala, 1993). Ces bases de référence, bien que très approximatives, sont peut-être les seules immédiatement disponibles pour établir des Points de Référence de précaution pour de nombreux stocks situés au large des côtes des pays en développement.

2.4.5 Points de Référence basés sur le taux de mortalité totale, Zpbm, Z*

La ventilation de la mortalité totale en composantes dues à la pêche, à la prédation, etc. posant souvent des problèmes, il peut être intéressant d'exprimer les Points de Référence en termes de mortalité totale Z subie par le stock, quelles que soient les causes de mortalité. Les populations vierges sont dominées par de gros et vieux individus dont la contribution à la production biologique (croissance, production, et mort par suite de prédation) est plus faible que celle des jeunes individus qui dominent progressivement la population, à mesure que s'intensifie l'exploitation. Ainsi nous pouvons postuler qu'il existe un niveau de mortalité Zpbm pour lequel la Production Biologique Maximale du stock est atteinte (Caddy et Csirke, 1983).

Dans le modèle de Schaefer, Zpbm et Fpbm correspondent à une mortalité par pêche quasiment toujours inférieure à Fmsy, ce qui devient d'autant plus vrai lorsque l'on s'adresse à des espèces situées plus bas dans la chaîne trophique et présentant un fort taux de mortalité naturelle (Fig. 4). Des simulations montrent qu'il est difficile d'arriver à dès mortalités par pêche excessives en utilisant ce PRC (Caddy et Die, sous presse). Le risque d'un effondrement induit par les conditions environnementales est faible lorsque le stock est au maximum de sa capacité de production.

2.4.6 PRC tenant compte de considérations sur le recrutement

Outre les PRC basés sur la taille des poissons en reproduction (section 2.4.3), les PRC qui permettent de s'assurer que la capacité de reproduction des stocks sera conservée peuvent potentiellement jouer un rôle, du fait de la dépendance fréquemment démontrée entre recrutement et taille du stock de géniteurs. Les PRC basés sur des considérations de recrutement peuvent être dérivés de relations stock-recrutement (S-R), ou d'une extension de l'analyse du rendement par recrue qui inclut l'âge/la taille à première maturité dans le calcul de la biomasse féconde par recrue (BFR) à divers niveaux de F. Récemment, ces deux types d'analyse ont été reliés pour calculer les niveaux de biomasse du stock associés aux divers niveaux de BFR. Les objectifs peuvent être établis en termes de biomasse du stock ou de biomasse féconde du stock que l'on espère voir produire le recrutement souhaitable, ou encore en termes de niveau de mortalité par pêche aboutissant à ces niveaux de biomasse ou de BFR.

Les premières approches de l'analyse des relations stock-recrutement incluaient l'ajustement des divers types de courbes aux séries chronologiques de données sur le stock et le recrutement. Dans toutes les relations S-R, la biomasse féconde correspondant à l'Excédent Maximal de Reproduction11, Bemr, se situe à un niveau intermédiaire entre des tailles de stock importantes ou très faibles (Ricker 1975) (Fig. 6). En théorie, pour toute taille de stock supérieure à Bemr, il existe un niveau de mortalité par pêche Femr qui permettrait à la Bemr de survivre et de se reproduire durant l'année considérée. En pratique, étant donné les variations interannuelles naturelles de la taille du stock, ce niveau de mortalité par pêche devrait être modifié annuellement pour permettre un "échappement constant" égal à Bemr. Ainsi, l'effort de pêche permettant un échappement constant doit être recalculé chaque année. Ceci peut être une stratégie pratique pour gérer les saumons qui peuvent être dénombrés au cours de leur migration anadrome de reproduction, mais il est probable que cela dépasse le niveau d'information existant pour la plupart des stocks largement dispersés en milieu marin ouvert. Un problème supplémentaire dans l'utilisation directe de la relation stock-recrutement est la détermination du modèle S-R adapté aux conditions de forte variabilité du recrutement.

11 EMR = Maximum Surplus Reproduction (MSR)

Figure 6: Illustration (d'après Ricker, 1975) d'une relation généralisée entre la taille du stock de géniteurs et le nombre de recrues (progéniture). Dans cette relation spécifique, la droite EMR correspond à la taille du stock ou à la biomasse de reproducteurs, pour lequel l'excédent de progéniture par rapport à la taille du stock parental est maximal: c'est le point de l'Excédent Maximal de Reproduction.

La variabilité considérable des données sur le recrutement, ainsi que d'autres problèmes méthodologiques (Walters et Ludwig, 1981), est telle qu'il est difficile, pour de nombreux stocks, de décrire de manière statistiquement significative et biologiquement satisfaisante les relations entre taille du stock de géniteurs et nombre de recrues. Ce problème a conduit à d'autres modes d'utilisation des données S-R pour définir des Points de Référence. Evans et Rice (1988) ont proposé des méthodes de prédiction du recrutement issues directement de l'observation du stock et du recrutement, sans intervention d'une relation fonctionnelle. Getz et Swartzman (1981) proposent une approche dans laquelle le graphique S-R serait divisé en intervalles de biomasse et de recrutement. Une matrice de transition, indiquant la probabilité pour chaque intervalle de recrutement d'être issu d'un intervalle de biomasse du stock, peut être utilisée comme guide pour établir un intervalle de biomasses-cibles pour l'aménagement de la pêcherie, et indiquer également dans quelle mesure il peut être nécessaire d'éviter de faibles niveaux de biomasse. Un problème majeur dans les analyses S-R est la nécessité de disposer de longues séries chronologiques couvrant une large gamme de tailles de stock (Myers et al., 1994) pour fournir des courbes stock-recrutement fiables. Ceci est rarement le cas lors de la mise en place de PRC pour des stocks nouvellement exploités ou peu étudiés.

Le calcul d'une "Biomasse Féconde par Recrue12" (BFR) est une extension de l'analyse de rendement par recrue qui peut être menée en l'absence de données historiques, si l'information sur la maturité/la fécondité par classe de taille/d'âge est disponible (Gabriel et al., 1989). Mace et Sissenwine (1993) expliquent le calcul et l'application de Point de Référence basés sur les BFR. A la différence du rendement par recrue, qui atteint un maximum lorsque F augmente, la BFR décroît de façon continue. La BFR est habituellement exprimée en pourcentage de la BFR non exploitée (correspondant à la biomasse féconde vierge B0) et est dénommé soit %BFSR (Biomasse féconde du stock par Recrue13) soit %BFR. La mortalité par pêche F qui produit un %BFR donné est appelé F%bfr ou juste F%.

12 BFR = Spawning biomass Per Recruit (SPR)
13 BFSR = Spawning Stock Biomass per Recruit (SSBR)

Les Points de Référence basés sur la BFR ou sur %BFR ont récemment été définis sur la base de la relation entre BFR et taux de survie (R/S) obtenus à partir de couples d'observations stock/recrutement (Fig. 7). Pour tout niveau de F, il existe une droite passant par l'origine du graphe R-S. La pente de cette droite est l'inverse de la BFR correspondant au F considéré. Les valeurs S-R et le graphe correspondant peuvent alors être utilisés pour choisir un taux de survie utilisé comme Point de Référence. Celui-ci, inversement, peut être converti en valeurs de BFR et projeté sur un axe F pour déterminer la mortalité par pêche correspondante. Le niveau de référence Fref (Sissenwine et Shepherd, 1987), aussi appelé Fmoy14 par le CIEM (ICES, 1993b) correspond à la droite représentant le taux de survie moyen R/S = 1 pour lequel le stock se maintient. A ce niveau de mortalité F, on s'attend à ce que R/S soit supérieur à 1 pour la moitié des années considérées, ou en d'autres termes qu'il corresponde à la mortalité F pour laquelle le recrutement contrebalance au moins les pertes dues à la mortalité, pour 50% des années considérées.

Les pêches intensives et l'épuisement des stocks de l'Atlantique Nord durant ces dernières années ont conduit les halieutes à accentuer la prise en compte du stock de géniteurs dans les conseils aux instances d'aménagement. Ainsi, l'utilisation de PRC basés sur le recrutement et dérivés de données sur les BFR et les données de S-R ont été lancées dans les zones relevant du CIEM (ICES, 1984). Le CIEM estime en routine trois niveaux de référence de F: Ffaible, Fmoy et Ffort. Ffaible et Ffort (auquel Fmoy peut être assimilé) sont définis de manière à laisser respectivement 90% et 10% des points correspondant au recrutement, au-dessus de la ligne joignant l'origine à ce même taux de mortalité par pêche (Fig. 7). Sous l'hypothèse que les relations S-R sont les mêmes que par le passé, elles ont les propriétés suivantes (ICES 1991; Jakobsen, 1992):

14 Fmoy = Fmed = Fmedium

Ffaible - faible probabilité de déclin du stock, et éventualité d'une croissance de ce stock,
Fmoy. - bonne probabilité que les niveaux actuels du stock se maintiennent,
Ffort - bonne probabilité qu'une exploitation à ce niveau entraîne un déclin du stock.

Figure 7: Illustration de la définition de Ffaible, Fmov et Ffort et de leur relation à la biomasse féconde par recrue (BFR) (Jakobsen, 1992).

Plus récemment, le CIEM a eu tendance à considérer Fmoy comme un Point de Référence Limite, dans la mesure où l'on peut s'attendre à un déclin du stock à des niveaux d'exploitation supérieurs à Fmoy (voir section 5.6).

Les conséquences d'une mésestimation de M apparaissent moindres avec ces mesures qu'avec Fmax ou F0,1 (Jakobsen, 1992). Fmoy est proche de Fmax et de Fmsy pour l'aiglefin du George Bank (Gabriel et al., 1989).

Des simulations ont montré que, pour les stocks démersaux septentrionaux, une production d'au moins 75% de MSY est possible tant que la biomasse féconde est maintenue dans la gamme de 20 à 60% des poissons non capturés, ceci sans tenir compte de la relation géniteurs-recrutement (Clark, 1991). Une biomasse féconde relative peut être maintenue dans cet intervalle en choisissant une valeur de F qui réduira le pourcentage de biomasse féconde par recrue à environ 35% du niveau non exploité. Cette valeur de F est généralement très proche de F0,1 (Clark, 1993). La variabilité du recrutement plaide en faveur d'un niveau-cible de BFR légèrement plus élevé, aux environs de 40%, particulièrement s'il existe une autocorrélation au niveau du recrutement (Clark, 1993). L'analyse de Thompson (1992) sur l'incertitude des relations stock-recrutement conforte ce résultat et suggère la conclusion intuitive selon laquelle F devrait être limité lorsque la relation S-R est incertaine.

Dans une étude comparative récente, il a été mis en évidence que %BFR est corrélé positivement avec la mortalité naturelle et négativement avec divers indices de taille. Ainsi, la morue et la plupart des poissons plats nécessitent de faibles niveaux de %BFR, mais certains pélagiques nécessitent des valeurs atteignant 40-60% pour que le recrutement se maintienne. Bien que ces conclusions soient en accord avec celles d'une section précédente relative aux Points de Référence basés sur M, il est probablement dangereux de les appliquer en dehors de leur région géographique d'origine, car les données sur lesquelles cette généralisation se fonde sont essentiellement relatives aux ressources halieutiques des hautes latitudes. Néanmoins, l'usage du critère %BFR n'exige pas autant d'information que celui d'autres critères reproductifs, et présente un vaste potentiel dans le contexte des pêcheries en développement.

Mace (1994) observe que les PRC et les PRL sont largement dépendants du degré de densité-dépendance dans les relations S-R. Elle recommande que F40% soit adopté comme mortalité par pêche cible lorsque la relation S-R n'est pas connue, mais qu'elle soit ajustée pour prendre en compte les degrés connus ou supposés de densité-dépendance dans la relation S-R. Ceci correspond à un recrutement d'environ 50% de celui attendu d'un stock vierge. Pour des PRC basés sur le recrutement où la biomasse courante est établie en utilisant la biomasse vierge, cette dernière est estimée à partir de l'intersection de la courbe S-R (ou recrutement moyen) et de la droite de remplacement correspondant à F=0 en condition de non-exploitation.

2.4.7 PRC tenant compte de considérations économiques - L'effort de pêche optimal Fpem

On considère que les contraintes habituelles du marché maximisent les bénéfices des acteurs (Gordon, 1954), mais, dans les pêcheries en accès libre, les efforts individuels des agents privés (les pêcheurs), oeuvrant chacun pour améliorer leur situation économique individuelle, "n'orientent pas la somme totale des activités privées vers le bien commun". En fait, les analyses récentes des tendances globales des pêcheries ont révélé que le haut niveau de surinvestissement dans les flottilles est la cause majeure de surpêche, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur des ZEE (FAO, 1992 a, b). Ceci, combiné aux restrictions sur les pêcheries à l'intérieur des ZEE, a initié un mouvement vers les pêcheries, généralement non régulées, situées au-delà des 200 milles. La somme totale des subventions à la pêche a été estimée à 54 milliards de dollars par an (FAO, 1992b). Le développement de critères efficaces de gestion devrait donc potentiellement dégager d'importantes ressources financières au niveau mondial, tout en réduisant les effets négatifs sur les stocks.

Il existe une littérature abondante sur la théorie économique des pêcheries, dans laquelle le modèle de production équilibrée de Gordon-Schaefer tient une place centrale (Gordon, 1954; Schaefer, 1957; Clark, 1983). Selon cette théorie, il existe un PRC économique, la Production Economique Maximale15 (PEM), qui correspond à l'effort produisant le plus fort revenu rapporté aux coûts d'exploitation (Fig. 8). Pour une courbe des coûts linéaire, ceci se produit inévitablement à gauche de la MSY sur l'axe de l'effort de pêche. Dans la mesure où Fpem survient à un niveau d'effort inférieur à Fmsy, l'utilisation de ce Point de Référence Cible économique est moins susceptible d'aboutir à une surpêche biologique que l'usage de Fmsy.

15 PEM = Maximal Economic Yield (MEY)

En tant que PRC, Fpem est sensible à toute variation de l'environnement économique affectant, soit la valeur du poisson, soit les coûts de la pêche. Il peut aussi dépendre de fluctuations de l'abondance du poisson si les prix du marché augmentent à mesure que l'abondance diminue, et est indépendant de la disponibilité de ressources similaires en d'autres lieux. Les subventions ou des considérations économiques externes, telles que les taxes sur le gas-oil, agiront également sur la localisation d'un Point de Référence Economique (Panayotou 1988).

Figure 8: Courbe de production équilibrée de Grahalm-Schaefer reliant la production ou le revenu à l'effort de pêche effectif, et montrant trois Points de Référence: PEM, MSY et le point d'équilibre bioéconomique E. Ces points correspondent à des niveaux d'effort de pêche croissants.

L'effet de l'offre sur le prix du poisson peut, dans certaines circonstances, conduire à un profit total ou à un profit par prise unitaire plus élevé, lorsque la capture totale est moindre. Cette caractéristique peut être à prendre en considération lors de l'établissement de niveaux cibles d'effort ou de prise, mais il est moins sûr qu'elle soit efficace dans les situations où le prix du poisson est fixé par des marchés mondiaux, par exemple dans le cas de la pêcherie thonière destinée à l'industrie de la conserve.

La valeur d'une unité de poids débarquée peut varier en fonction de la taille des poissons, et, dans le cas des pêcheries multispécifiques, en fonction de la composition en espèces. La taille des poissons et la composition spécifique sont toutes deux fonction de la mortalité par pêche, et, en se basant sur des critères purement économiques, peuvent être utilisées en tant que Points de Référence Cible. Même si la vraie valeur cible de F ne peut pas être estimé, en théorie F peut être ajustée pas à pas, jusqu'à ce que les caractéristiques de la prise ciblée soit atteintes.

En considérant les PRC basés sur des critères économiques, il est important d'être conscient des effets des pratiques de sous-évaluation sur les Points de Référence. Lors de l'évaluation de projets d'investissement, y compris la gestion des ressources, les économistes sous-estiment volontairement la valeur future de toute denrée. Les taux de sous-estimation peuvent être de l'ordre de 10%. Dans le cas d'une pêcherie où le taux de croissance de la population ne dépasse pas le taux d'abattement, la stricte application de la théorie économique voudrait alors (à l'exclusion de toute autre considération telle qu'une valeur économique attribuée à un usage de la ressource au titre des loisirs) que la totalité du stock soit exploitée sur le champ, et les produits de la vente réinvestis. Des espèces à vie longue et faible taux de croissance, telles que les baleines, figurent clairement dans cette catégorie. La contradiction flagrante entre cette approche économique classique et le concept de durabilité constitue un paradoxe non résolu (Hilborn et Walters, 1992).

2.5 Points de Référence Limite ou Seuils (PRL)


2.5.1 Fmsy pris comme Point de Référence Limite
2.5.2 PRL tenant compte de considérations sur le recrutement
2.5.3 Les autres PRL biologiques
2.5.4 PRL tenant compte de considérations économiques


LORSQUE LES NIVEAUX DE REFERENCE SONT PRES D'ETRE ATTEINTS, LES ETATS PRENNENT DES MESURES POUR QU'ILS NE SOIENT PAS DEPASSES. SI CES NIVEAUX SONT DEPASSES, LES ETATS PRENNENT IMMEDIATEMENT, POUR RECONSTITUER LES STOCKS, LES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION SUPPLEMENTAIRES DEFINIES AU PARAGRAPHE 3 B)

Article 6, Nations Unies, 1995 p.7

2.5.1 Fmsy pris comme Point de Référence Limite

L'usage de Fmsy comme PRL, plutôt que comme PRC, pourrait apporter de la souplesse dans le choix d'un PRC basé sur F qui soit plus prudent et qui ait des caractéristiques utiles à l'aménagement (McGarvey et Caddy, sous presse). Ceci est illustré à la Figure 9. Il est nécessaire de disposer d'informations sur la variabilité associée à l'estimation de la mortalité par pêche actuelle, Fact. Bien qu'une telle information ne figure pas souvent dans la bibliographie, il semble peu probable pour les pêcheries bien étudiées que le coefficient de variation de F soit inférieur à 15-30 %. Pour les pêcheries peu étudiées, il sera probablement bien supérieur. Dans l'exemple fictif pris à la Fig. 9, Fmsy = 0,6 est considéré comme un PRL. Le véritable taux de mortalité par pêche Fact qui sera exercé durant la saison en cours n'est pas connu avec précision, mais deux courbes cumulatives de probabilité sont représentées. L'une correspond à un haut niveau de précision (c.v. = variance/moyenne = 20%) et l'autre à un faible niveau (c.v. = 40 %). Les moyennes des deux distributions se placent l'une par rapport à l'autre sur l'axe des X de telle façon que coïncident les points pour lesquels il y a 10% de probabilité que Fact. > Fmsy = 0,6. Il est clair que, pour que cette situation prévale, le centre ou la moyenne de la distribution de Fact., qui est mal connu, doit être situé à un taux de mortalité plus faible que lorsqu'existe une information statistique plus précise.

Figure 9: Deux situations sont représentées: l'une (courbe du haut) où le taux de mortalité par pêche est prévu avec une bonne précision, comparée à l'autre où cette précision est faible (courbe du bas). Si la probabilité de dépasser Fmsy à Fact. = 0,6 et celle d'entrer dans la ZONE ROUGE est égale à 0,1 dans les deux cas, la mortalité par pêche ciblée avec la précision la plus faible doit être établie avec davantage de précaution que lorsque cette mortalité est mieux connue grâce à des statistiques améliorées.

En termes simples, cet exemple a pour but de montrer que la collecte de statistiques fiables et complètes permettant de calculer avec une précision accrue un taux de mortalité par pêche, autorise le maintien d'un taux de pêche plus élevé (avec le même risque de dépassement) que si la collecte de données n'avait pas été privilégiée. Ceci illustre clairement la valeur économique d'un bon système d'acquisition des données dans le cadre d'une approche de précaution.

Une utilisation plus élaborée de la MSY en tant que PRL a été intégrée à la Nouvelle Procédure d'Aménagement élaborée par la Commission baleinière internationale (Garrod et Horwood, 1979) qui a retenu une exploitation maximale de 90% de la MSY (établie à 60 % du niveau du stock vierge). Cet objectif devait progressivement être réduit de 10 % chaque fois que le stock se réduisait de 1% en deçà du niveau requis pour atteindre la MSY. Ainsi, dès que la taille du stock passait en deçà de 90% du niveau de la MSY, il y avait un seuil pour lequel le stock bénéficiait d'un statut de protection totale. Cet exemple illustre également une autre particularité essentielle d'un système d'aménagement basé sur les PRL: la pré-négociation de futures mesures de gestion automatiques une fois que le système atteint un état reconnu de danger.

2.5.2 PRL tenant compte de considérations sur le recrutement

Les lignes directrices des plans d'aménagement des pêcheries des Etat-Unis stipulent que l'aménagement doit prévenir toute surpêche liée au recrutement, bien que d'autres types de surpêche puissent être permises (surpêches par rapport à la croissance, surpêches localisées ou par à-coups). Mace et Sissenwine (1993) notent qu'à ce jour 60% des définitions de la surpêche sont basées sur des analyses de biomasse féconde par recrue (BFR), avec des valeurs caractéristiques comprises entre 20 et 35% des niveaux du stock vierge. En réponse aux lignes directrices évoquées ci-dessus et aux Niveaux Minima Biologiquement Acceptables (NMBA) résultant des évaluations du CIEM, une activité considérable s'est récemment mise en place. Celle-ci vise à établir diverses méthodes de calcul de PRL basées sur le recrutement, et à évaluer leurs relations avec les différents PRC (Mace et Sissenwine, 1993; Clark, 1993; Goodyear, 1993; ICES, 1993 b; Mace, 1994; Myers, et al.; 1994). La plupart de ces PRL sont des variantes des PRC évoqués dans la précédente section, et sont établies d'une manière similaire.

LES ETATS FONT PREUVE D'UNE PRUDENCE D'AUTANT PLUS GRANDE QUE LES DONNEES SONT INCERTAINES, PEU FIABLES ET INADEQUATES. LE MANQUE DE DONNEES SCIENTIFIQUES ADEQUATES NE SAURAIT ÊTRE INVOQUE POUR NE PAS PRENDRE DE MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION OU POUR EN DIFFERER L'ADOPTION.

Article 6, Nations Unies, 1995

Un PRL extrême pour la biomasse féconde du stock est FT, qui est basé sur la pente de la relation S-R à l'origine (Mace et Sissenwine, 1993). Lorsque F > FT, l'extinction effective du stock est assurée. Une des méthodes proposées pour estimer FT est d'utiliser la valeur à 90 % des taux de survie observés (S/R); équivalent au Ffort du CIEM. Cependant, les auteurs ont noté que si le recrutement est hautement variable et que la majorité des observations S-R sont faites à de faibles tailles de stock, cette approche conduira probablement à une surestimation de FT. En fait, si le graphique S-R est seulement constitué de points situés sur la partie linéaire ascendante de la courbe, FT sera plus finement approché par l'intermédiaire de la valeur à 50% des taux de survie observés, ce qui correspond au Fmoy du CIEM. Même dans le cas d'un stock pour lequel les données stock-recrutement incluent toute la gamme des tailles du stock, il apparaît que pour la plupart des stocks Fmoy peut être le plus rationnel des PRL basés sur le recrutement, étant donné que le déclin du stock est attendu pour des niveaux de F maintenus au dessus de Fmoy.

Partant d'une analyse théorique des Points de Référence biologiques pour des stocks caractérisés par une large gamme de stratégies vitales, Mace (1994) recommande que les PRC soient estimés directement lorsque la relation S-R est connue. Elle souligne le fait que, ni la pente à l'origine de la relation S-R, ni la biomasse féconde supposée fournir 50% du recrutement maximal (Rmax), ne sont probablement pas des PRL conservatoires, et "...devraient probablement être considérées comme des barrières absolues à ne pas franchir". En application de ceci, elle recommande un F cible qui soit le plus proche possible de Fmsy, à condition que la probabilité que la biomasse du stock tombe au dessous de 100.T.B0 ne dépasse pas 0,05.

De même, Myers et al. (1994) ont cherché à définir des PRL basés sur la conservation de la biomasse féconde en utilisant les données S-R de 74 stocks pour lesquels on disposait de plus de vingt années d'observations. Ils ont évalué huit méthodes d'estimation de la biomasse féconde critique du stock (%BFS)16. Sur six méthodes basées sur des courbes S-R ajustées, deux ont placé ce point là où le recrutement attendu serait à 50 % de sa valeur maximale. Les quatre autres méthodes ont estimé le point critique à 20 % de la biomasse vierge estimée. Ils ont conclu qu'il n'existait pas une méthode unique pour estimer les niveaux critiques de stock reproducteur, applicable à tous les stocks. Cependant, ils ont proposé plusieurs critères simples pour déterminer si un PRL estimé à partir de données S-R utilisant l'un des critères ci-dessus est raisonnable. Ces critères sont basés sur les pentes relatives des nuages de points S-R log-transformés, au-dessus et en dessous des PRL estimés.

16 BPS = Spawning Stock Biomass (SSB)

- Si les deux pentes sont positives et que celle au-dessus des PRL est plus faible que celle située en dessous, le PRL est raisonnable;

- Si les deux pentes sont positives et que celle au-dessus du PRL est supérieure à celle en dessous, le PRL est probablement établi à une biomasse trop faible,

- Si les deux pentes sont négatives, le PRL est probablement conservatoire,

- Si la pente au-dessus du PRL est positive et que celle en dessous est négative, les données doivent être considérées comme in interprétables.

Une autre règle simple est que les recrutements ayant lieu au-dessous du PRL soient en moyenne inférieurs à ceux ayant lieu au dessus-du PRL (ICES, 1993b).

Les méthodes ci-dessus dépendent de la disponibilité de données S-R. En l'absence d'informations sur le stock et sur le recrutement, un conseil pratique d'aménagement a été établi, partant de généralisations issues de l'étude d'un grand nombre de stocks exploités. Une étude sur 91 jeux de données relatifs aux stocks et au recrutement en Europe et en Amérique du Nord suggère que, pour les stocks considérés comme ayant une résilience moyenne, un niveau de biomasse correspondant à 20% du stock vierge devrait être considéré comme un PRL basé sur le recrutement. Dans le cas de stocks peu étudiés, le PRL devrait être fixé à 30% de la biomasse vierge. L'analyse théorique de Mace (1994) confirme ces recommandations et suggère que ces résultats seraient applicables aux stocks situés hors de l'Atlantique Nord.

2.5.3 Les autres PRL biologiques

Si l'âge de première capture tombe plus bas que l'âge de première maturité, il y a un risque de surpêche liée au recrutement. Si le contrôle de l'effort de pêche est peu fiable, un Point de Référence utilisable serait d'exiger que soient péchés uniquement les individus de taille supérieure ou égale à la taille de première maturité, sans rejeter ni blesser les individus trop petits.

Die et Caddy (sous presse) ont suggéré d'autres signaux d'alarme possibles qui pourraient être adoptés comme PRL en l'absence d'informations adéquates ou d'analyses plus précises, comme c'est souvent le cas dans les pêcheries des pays en développement. Ceux-ci incluent les cas où: (a) la mortalité totale Z passe au-dessus d'une valeur préétablie, telle que celle correspondant à Zpbm ou Z' (voir section 2.4); (b) la proportion d'individus matures dans le stock tombe en dessous d'un pourcentage pré-établi relatif au stock vierge; et (c) le recrutement annuel reste faible durant un nombre prédéterminé d'années consécutives. D'autres indices robustes, qui sont souvent associés à de faibles tailles de stock et ainsi à une compétition intraspécifique réduite, sont l'augmentation du poids à un âge donné et la diminution de la taille à la première maturité. Cependant, le temps que ces indicateurs biologiques aient évolué significativement, la surpêche peut déjà être grave. La figure 10 illustre l'usage de données de campagnes scientifiques pour suivre l'état du stock en relation avec un PRL préétabli. Ceci peut être particulièrement utile lorsqu'il est difficile d'obtenir des échantillons représentatifs de la pêcherie.

Figure 10: Illustration de l'usage d'enquêtes de la PUE ou des valeurs de Z comme PRL préétabli. Les enquêtes peuvent être le seul moyen pour suivre l'état de la pêcherie par rapport à un Point de Référence, lorsqu'il n'y a guère de données disponibles sur cette pêcherie.

Zheng et al., (1993) comparent et évaluent les méthodes d'estimation de seuils pour le lieu jaune et le hareng dans la mer de Bering. La plupart de ces méthodes sont des variations de PRL évoqués plus haut, mais leur traitement inclut quelques approches différentes dans l'estimation des PRC, y compris l'incorporation de seuils de production nulle et de production dépensatoire au modèle de production globale traditionnel.

2.5.4 PRL tenant compte de considérations économiques

II est généralement admis (Panayotou, 1988), dans le cas d'une pêcherie en accès libre où les profits sont égaux aux coûts de pêche, que le point d'"équilibre économique" sur la courbe des revenus en fonction de l'effort de pêche est un "facteur indicatif, bien qu'il soit extrêmement indésirable (Gordon, 1954). Au-delà de ce niveau d'effort, l'ensemble de la pêcherie opère à perte. Ceci est aussi le point pour lequel le coût de gestion du taux de mortalité dans la pêcherie sera théoriquement nul. L'effort correspondant à ce point (E dans la Fig. 8) est artificiellement augmenté lorsque des subventions diminuent le coût de pêche (FAO, 1993a).

Dans les situations où l'aménagement est impossible, ou bien lorsque les Etats en question ne peuvent s'offrir aucune forme d'aménagement, le point d'équilibre économique non subventionné pourrait être adopté comme PRL. Il serait atteint par l'arrêt de tout subside au secteur de la pêche.

Dans la mesure où la prise par unité d'effort est souvent considérée proportionnelle à la biomasse (PUE = q.B), et le revenu proportionnel à la PUE, le Revenu par Unité d'Effort17 (RUE) est une variable économique de référence potentielle. Ceci peut être particulièrement utile pour quelques pêcheries de grands migrateurs où les méthodes de suivi des stocks sont difficiles à mettre en 'uvre. Le point auquel le RUE est égal au coût de pêche par unité d'effort est une variante du PRL suggéré ci-dessus. Il est évident qu'une opération de pêche qui ne génère pas d'entrées d'argent, mais contribue à mettre en péril le stock, est difficile à justifier. Cependant, il sera nécessaire de distinguer les faibles PUE liées à la disponibilité (par exemple au début ou à la fin d'une saison de pêche locale pour une ressource migratoire) de celle due à une faible taille du stock.

17 RUE = Revenue per Unit Effort (RPUE)

2.6 Les Points de Référence pour les pêcheries nouvelles ou en développement

Etablir des Points de Référence pour les pêcheries nouvelles ou en développement nécessite certaines précautions si l'on veut éviter la surcapitalisation. Les Points de Référence seront généralement basés sur des campagnes exploratoires ou sur des estimations de la biomasse (voir section 2.4.4), malgré une incertitude considérable quant à la valeur de x à utiliser. On suggère alors des stratégies de précaution ou de sondage, mais celles-ci limitent les pêcheries à des intensités de pêche bien inférieures aux niveaux de MSY attendus d'après les pêches exploratoires (Annala, 1993). La collecte intensive de données devrait être un objectif dans les pêcheries en développement, et la fourniture de données devrait être une condition requise pour l'octroi de licences de pêche pilote. Bien qu'il soit nécessaire d'acquérir de bonnes données sur la pêcherie pour de faibles tailles de stock en vue d'un futur ajustement de modèles halieutiques, il faut reconnaître que lorsque l'exploitation s'intensifie, les données correspondant à la période de faible exploitation peuvent ne plus décrire convenablement le comportement de la population, y compris la relation S-R.

2.7 Les Points de Référence pour la reconstitution des stocks

Considérant la surexploitation de nombreux stocks marins (FAO, 1993), la reconstitution de ces stocks en vue d'atteindre des Points de Référence Cible à long terme doit constituer une priorité pour l'aménagement. La reconstitution nécessite que l'effort soit réduit afin de permettre l'accumulation d'un surplus de production. Cela signifie que l'industrie des pêches accepte une perte de revenu à court terme, en échange d'un espoir de rendements supérieurs à long terme (Overholtz et al., 1993). Les niveaux cible de F qui permettent une telle reconstitution dépendront du niveau de surexploitation et de l'impact économique de l'action entreprise, mais peuvent nécessiter d'être établis bien au-dessous de ceux qui pourrait être soutenus pour des tailles cibles de stock établies sur le long terme.

Dans la mesure où la reconstitution des stocks nécessite généralement plusieurs années, l'intensité de pêche doit être régulièrement réduite durant la période requise. Pour des espèces à durée de vie relativement longue, telles que le la morue et l'aiglefin, Rosenberg et Brault (1991) ont montré qu'une reconstitution d'une durée modérée (disons 5 ans) était économiquement moins dévastatrice que de courtes réductions brutales du taux de mortalité par pêche (scénarios de reconstitution en 2 ans), mais que des périodes de reconstitution plus étendues seraient probablement trop longues pour percevoir les signes d'un rétablissement patent. Cependant, pour les stocks à courte durée de vie, le temps de reconstitution risque d'être proportionnellement plus court. Pour de nombreux stocks actuellement très exploités, des cohortes surabondantes contribuent de façon progressivement croissante à la production annuelle, mais il se pourrait qu'elles ne surviennent pas très fréquemment. Se focaliser sur la protection de ces cohortes surabondantes pourrait être la façon la plus rapide de reconstituer un stock.

Pour la reconstitution des stocks, F doit être inférieur à Fmoy, niveau auquel le stock se remplace de lui-même (Mace et Sissenwine, 1993). Pour des stocks fortement épuisés, la stratégie la plus appropriée pourrait être le choix de Ffaible, niveau auquel le recrutement doit dépasser le niveau de remplacement dans 90% des années. Dans tous les cas, le niveau cible de F en vue d'une reconstitution sera un niveau arbitraire qui dépendra de la vitesse de reconstitution souhaitée. Comme pour les autres Points de Référence, il doit avoir été accepté avant d'être mis en oeuvre et maintenu face aux exigences du marché à court terme. En matière de reconstitution il peut être raisonnable de permettre à F de s'approcher progressivement du F cible à mesure que la biomasse du stock augmente. Etant donné que l'industrie des pêches exercera inévitablement des pressions pour augmenter les taux de capture, et que la plupart des systèmes d'aménagement dépendent de prises de décisions à court terme, le programme d'augmentation de F vers un niveau-cible à long terme en relation avec les Points de Référence choisis doit, lui aussi, être accepté à l'avance par les participants.

On peut envisager des Points de Référence pour des stocks qui, en cours de reconstitution, révéleraient diverses étapes dans le processus de rétablissement et indiqueraient que le plan d'amélioration fonctionne. Ces Points de Référence de rétablissement peuvent s'exprimer en termes des différents états de la population. Exemples: une biomasse exprimée en pourcentage de la biomasse à recouvrer; pour les stocks multi-cohortes, une structure en âge qui inclue un nombre croissant de classes d'âge; l'expansion de l'aire ou du nombre de sites occupés par l'espèce; le point à partir duquel les besoins des espèces prédatrices ont été satisfaits.

2.8 Points de Référence de précaution

Dans quelques forums on a mentionné des "Points de Référence de Précaution" où apparaît l'intention d'indiquer que de tels Points de Référence, qu'ils soient Cible ou Limite, sont à utiliser avec prudence.

ARTICLE 6: L'APPLICATION DE L'APPROCHE DE PRUDENCE

LES ETATS APPLIQUENT LARGEMENT L'APPROCHE DE PRUDENCE A LA CONSERVATION, A LA GESTION ET A L'EXPLOITATION DES STOCKS DE POISSONS CHEVAUCHANTS ET DES STOCKS DE POISSONS GRANDS MIGRATEURS AFIN DE PROTEGER LES RESSOURCES BIOLOGIQUES MARINES ET DE PRESERVER LE MILIEU MARIN.

Nations Unies, 1995

Garcia (1994) discute les questions liées à l'application aux pêcheries du Principe de précaution. Sa définition de ce Principe est:

"Reconnaître la nécessité d'une approche de précaution, qui peut exiger une mesure de contrôle des activités de pêche avant même qu'un lien de cause à effet ait été établi de façon scientifique claire et indiscutable, dans le but de protéger une zone marine des éventuels effets néfastes des pratiques et engins de pêche les plus dangereux.

Les Etats acceptent le principe de sauvegarde de l'écosystème marin en limitant les pratiques de pêche dangereuses, par l'usage de la meilleure technologie disponible et d'autres moyens appropriés. Ceci s'applique particulièrement lorsqu'il y a de bonnes raisons de supposer que certains dommages ou effets néfastes sur les ressources biologiques sont susceptibles d'être causés par de telles pratiques ou technologies de pêche, même lorsqu'il n'y a pas de preuve scientifique d'un lien de cause à effet entre les pratiques et les effets (principe d'action de précaution)."

Ces concepts, et les lignes directrices pour leur mise en oeuvre, ont été élaborés par la Consultation Technique sur l'approche de précaution appliquée aux pêches (FAO, 1995). Leurs réflexions étaient basées sur la définition de la précaution en tant que: "prudence manifestée par avance pour éviter tout dommage et s'assurer de bons résultats - une prévoyance prudente. "

Le terme de Point de Référence de Précaution ne se réfère pas à la manière dont a été élaboré le Point de Référence, ni à ses fondements techniques, mais à la manière dont il est utilisé comme composante de la stratégie de gestion prudente. Ceci semble être l'acception du terme dans la "Conférence des Nations Unies sur les Stocks Chevauchants et les Stocks de Poissons Grands Migrateurs" (Nations Unies, 1995).

POUR METTRE EN OEUVRE L'APPROCHE DE PRUDENCE, LES ETATS:

(A) AMELIORENT LA PRISE DE DECISIONS EN MATIERE DE CONSERVATION ET DE GESTION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES EN SE PROCURANT ET EN METTANT EN COMMUN LES INFORMATIONS SCIENTIFIQUES LES PLUS FIABLES DONT ILS DISPOSENT ET EN APPLIQUANT DES TECHNIQUES PERFECTIONNEES POUR FAIRE FACE AUX RISQUES ET A L'INCERTITUDE;

(B) APPLIQUENT LES DIRECTIVES ENONCEES A L'ANNEXE II ET DETERMINENT, SUR LA BASE DES INFORMATIONS SCIENTIFIQUES LES PLUS FIABLES DONT ILS DISPOSENT, DES NIVEAUX DE REFERENCE POUR CHAQUE STOCK, AINSI QUE LES MESURES A PRENDRE SI CEUX-CI SONT DEPASSES;

(C) TIENNENT COMPTE NOTAMMENT DES INCERTITUDES CONCERNANT L'IMPORTANCE NUMERIQUE DES STOCKS ET LE RYTHME DE REPRODUCTION, DES NIVEAUX DE REFERENCE, DE L'ETAT DES STOCKS PAR RAPPORT A CES NIVEAUX, DE L'ETENDUE ET DE LA REPARTITION DE LA MORTALITE DUE A LA PECHE ET DE L'IMPACT DES ACTIVITES DE PECHE SUR LES ESPECES NON CIBLEES ET LES ESPECES ASSOCIEES OU DEPENDANTES, AINSI QUE DES CONDITIONS OCEANIQUES, ECOLOGIQUES ET SOCIO-ECONOMIQUES EXISTANTES ET PREVUES; ET

(D) METTENT AU POINT DES PROGRAMMES DE COLLECTE DE DONNEES ET DE RECHERCHE AFIN D'EVALUER L'IMPACT DE LA PECHE SUR LES ESPECES NON CIBLEES ET LES ESPECES ASSOCIEES OU DEPENDANTES ET SUR LEUR ENVIRONNEMENT, ET ADOPTENT LES PLANS NECESSAIRES POUR ASSURER LA CONSERVATION DE CES ESPECES ET PROTEGER LES HABITATS PARTICULIEREMENT MENACES.

ARTICLE 6, Nations Unies, 1995

L'Annexe II du rapport sus-mentionné, "Directives pour l'application des niveaux de référence à respecter à titre de prévention dans la conservation et la gestion des stocks chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs" est particulièrement pertinente et est reproduite ci-dessous in extenso:

ANNEXE 2

1. LE NIVEAU DE REFERENCE EST UNE VALEUR ESTIMATIVE CALCULÉE SELON UN PROCÉDÉ SCIENTIFIQUE CONVENU, QUI CORRESPOND À L'ÉTAT DE LA RESSOURCE OU DE LA PÊCHERIE ET PEUT SERVIR DE GUIDE AUX FINS DE LA GESTION DES PÊCHERIES.

2. DEUX TYPES DE NIVEAUX DE RÉFÉRENCE DOIVENT ÊTRE RETENUS: LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE DE CONSERVATION (LIMITES) ET LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE DE GESTION (CIBLES). LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE (LIMITES) ÉTABLISSENT DES FRONTIÈRES DESTINÉES À CIRCONSCRIRE L'EXPLOITATION DANS DES LIMITES BIOLOGIQUES SÛRES QUI PERMETTENT D'ASSURER LE RENDEMENT MAXIMUM VIABLE DES STOCKS. LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE (CIBLES) OBÉISSENT À DES OBJECTIFS DE GESTION.

3. IL FAUDRAIT FIXER DES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE POUR CHAQUE STOCK DE MANIÈRE À TENIR COMPTE NOTAMMENT DE LA CAPACITÉ DE REPRODUCTION, DE LA RÉSISTANCE DE CHAQUE STOCK ET DES CARACTÉRISTIQUES DE L'EXPLOITATION DU STOCK EN QUESTION, AINSI QUE D'AUTRES SOURCES DE MORTALITÉ ET DES PRINCIPALES SOURCES D'INCERTITUDE.

4. LES STRATÉGIES DE GESTION DEVRAIENT VISER À MAINTENIR OU À RAMENER LES POPULATIONS DES STOCKS EXPLOITÉS ET, LE CAS ÉCHÉANT, DES ESPÈCES ASSOCIÉES OU DÉPENDANTES AUX NIVEAUX DE RÉFÉRENCE PRÉALABLEMENT CONVENUS A TITRE DE PRÉVENTION. CES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE DOIVENT DÉCLENCHER LES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION PRÉALABLEMENT CONVENUES. LES STRATÉGIES EN QUESTION DEVRAIENT COMPORTER DES MESURES POUVANT ÊTRE APPLIQUÉES LORSQUE LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE SONT PRÈS D'ÊTRE ATTEINTS.

5. LES STRATÉGIES DE GESTION DES PÊCHERIES DOIVENT ÊTRE CONÇUES DE SORTE QUE LE RISQUE DE DÉPASSER LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE (LIMITES) SOIT FAIBLE. SI LA POPULATION D'UN STOCK DÉPASSE LE NIVEAU DE RÉFÉRENCE OU EST SUR LE POINT DE LE DÉPASSER, DES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION DOIVENT ÊTRE MISES EN OEUVRE EN VUE DE FACILITER LA RECONSTITUTION DU STOCK. LES STRATÉGIES DE GESTION DES PÊCHERIES DOIVENT GARANTIR QUE, D'UNE MANIÈRE GÉNÉRALE, LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE CIBLE NE SOIENT PAS DÉPASSÉS.

6. EN L'ABSENCE DE DONNÉES PERMETTANT DE DÉTERMINER LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE CORRESPONDANT À UNE PÊCHERIE - OU EN CAS DE DONNÉES INSUFFISANTES - IL EST FIXÉ DES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE PROVISOIRES. EN PAREIL CAS IL FAUDRAIT SOUMETTRE LA PÊCHERIE À UN CONTRÔLE RENFORCÉ DE FAÇON À RÉVISER LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE DÈS QUE L'ON DISPOSERAIT DE DONNÉES SUFFISANTES.

7. LE TAUX DE MORTALITÉ DUE À LA PÊCHE QUI PERMET D'ASSURER LE RENDEMENT MAXIMUM VIABLE DEVRAIT ÊTRE CONSIDÉRÉ COMME LA NORME MINIMALE POUR LES NIVEAUX DE RÉFÉRENCE (LIMITES). POUR LES STOCKS QUI NE SONT PAS SUR EXPLOITÉS, LES STRATÉGIES DE GESTION DES PÊCHERIES DOIVENT GARANTIR QUE LA MORTALITÉ DUE À LA PÊCHE NE DÉPASSE PAS CELLE QUI PERMET D'ASSURER LE RENDEMENT MAXIMUM VIABLE, ET QUE LA BIOMASSE NE DÉPASSE PAS UN SEUIL PRÉÉTABLI. POUR LES ESPÈCES SUR EXPLOITÉES, LA BIOMASSE QUI PERMET D'ASSURER LE RENDEMENT MAXIMUM VIABLE PEUT ÊTRE CONSIDÉRÉE COMME OBJECTIF DE RECONSTITUTION.

Nations Unies, 1995

2.9 Les Points de Référence pour les ressources en grands migrateurs

D'un point de vue technique, les Points de Référence pour les stocks chevauchants et les stocks de grands migrateurs ne sont pas différents de ceux valables pour les stocks partagés (Gulland, 1980; Caddy, 1982), ou pour ceux intégralement localisés à l'intérieur d'une ZEE. Cependant, la possibilité d'appliquer des Points de Référence individuels peut différer, en raison de la nature multijuridictionnelle des ressources, plutôt que du fait de leurs caractéristiques biologiques. La diversité des types de ressources partagées/migratoires est décrite par Caddy (1982). Ici, nous considérerons la situation la plus difficile, celle d'une exploitation séquentielle le long d'un trajet migratoire.

Ce cas particulier a été le sujet de vives négociations internationales à la Conférence des Nations Unies sur les Stocks Chevauchants et les Stocks de Poissons Grands Migrateurs en 1994-95. Un extrait de l'article 7 du rapport du Président de séance est donné dans l'encadré ci-dessous:

ARTICLE 7

COMPATIBILITÉ DES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION

(B) S 'AGISSANT DES STOCKS DE POISSONS GRANDS MIGRATEURS, LES ÉTATS CÔTIERS CONCERNÉS ET LES AUTRES ÉTATS DONT LES RESSORTISSANTS EXPLOITENT CES STOCKS DANS LA RÉGION COOPÈRENT, SOIT DIRECTEMENT SOIT PAR L'INTERMÉDIAIRE DES MÉCANISMES DE COOPÉRATION APPROPRIÉS PRÉVUS DANS LA PARTIE III, AFIN D'ASSURER LA CONSERVATION ET DE FAVORISER L'EXPLOITATION OPTIMALE DE CES STOCKS DANS L'ENSEMBLE DE LA RÉGION, AUSSI BIEN DANS LES ZONES RELEVANT DE LA JURIDICTION NATIONALE QU'AU DELÀ DE CELLES-CI.

2. LES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION INSTITUÉES POUR LA HAUTE MER ET CELLES ADOPTÉES POUR LES ZONES RELEVANT DE LA JURIDICTION NATIONALE DOIVENT ÊTRE COMPATIBLES AFIN D'ASSURER LA CONSERVATION ET LA GESTION DE L'ENSEMBLE DES STOCKS DE POISSONS CHEVAUCHANTS ET DES STOCKS DE POISSONS GRANDS MIGRATEURS. À CETTE FIN, LES ÉTATS CÔTIERS ET LES ÉTATS QUI SE LIVRENT À LA PÊCHE EN HAUTE MER ONT L'OBLIGATION DE COOPÉRER EN VUE DE PARVENIR À DES MESURES COMPATIBLES EN CE QUI CONCERNE CES STOCKS. POUR ARRÊTER DES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION COMPATIBLES, LES ÉTATS:

(A) TIENNENT COMPTE DES MESURES DE CONSERVATION ET DE GESTION ADOPTÉES ET APPLIQUÉES, CONFORMÉMENT À L'ARTICLE 61 DE LA CONVENTION, PAR LES ÉTATS CÔTIERS POUR LES MÊMES STOCKS DANS LES ZONES RELEVANT DE LEUR JURIDICTION NATIONALE ET VEILLENT À CE QUE LES MESURES INSTITUÉES EN HAUTE MER POUR CES STOCKS NE NUISENT PAS À LEUR EFFICACITÉ;

(B) TIENNENT COMPTE DES MESURES PRÉALABLEMENT ARRÊTÉES D'UN COMMUN ACCORD ET I APPLIQUÉES POUR LA HAUTE MER, CONFORMÉMENT À LA CONVENTION, PAR LES ÉTATS CÔTIERS CONCERNÉS ET LES ÉTATS QUI SE LIVRENT À LA PÊCHE EN HAUTE MER EN CE QUI CONCERNE LES MÊMES STOCKS;

(C) TIENNENT COMPTE DE L'UNITÉ BIOLOGIQUE ET DES AUTRES CARACTÉRISTIQUES DES STOCKS ET DES RAPPORTS ENTRE LA RÉPARTITION DES STOCKS, LES PÊCHERIES ET LES PARTICULARITÉS GÉOGRAPHIQUES DE LA RÉGION CONCERNÉE, Y COMPRIS DE L'IMPORTANCE QUANTITATIVE DE CES STOCKS ET DE LEUR DEGRÉ D'EXPLOITATION DANS LES ZONES RELEVANT DE LA JURIDICTION NATIONALE;

(D) TIENNENT COMPTE DE LA MESURE DANS LAQUELLE LES ÉTATS CÔTIERS ET LES ÉTATS QUI SE LIVRENT À LA PÊCHE EN HAUTE MER SONT TRIBUTAIRES DES STOCKS CONCERNÉS; ET

(E) VEILLENT À CE QUE CES MESURES N'AIENT PAS D'EFFETS NUISIBLES SUR L'ENSEMBLE DES RESSOURCES BIOLOGIQUES MARINES

Extrait des Nations Unies, 1995

LES ÉTATS CÔTIERS "...COOPÈRENT DIRECTEMENT OU PAR L'INTERMÉDIAIRE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES APPROPRIÉES, AFIN D'ASSURER LA CONSERVATION DES ESPÈCES EN CAUSE ET DE PROMOUVOIR L'EXPLOITATION OPTIMALE DE CES ESPÈCES [DE GRANDS MIGRATEURS] DANS L'ENSEMBLE DE LA RÉGION, AUSSI BIEN DANS LA ZONE ÉCONOMIQUE EXCLUSIVE QU'AU DELÀ DE CELLE-CI."

"...COOPÈRENT À LA CONSERVATION ET À LA GESTION DES RESSOURCES BIOLOGIQUES EN HAUTE MER, [...]. NÉGOCIENT EN VUE DE PRENDRE LES MESURES NÉCESSAIRES À LA CONSERVATION DES RESSOURCES CONCERNÉES [ET] COOPÈRENT, SI BESOIN EST, POUR CRÉER DES ORGANISATIONS DE PÊCHE SOUS-RÉGIONALES OU RÉGIONALES.

Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982

Des dispositions de gestion complexes peuvent être nécessaires pour traiter les ressources en grands migrateurs pour lesquelles de multiples pêcheries interviennent séquentiellement en différents endroits tout au long du trajet migratoire (Fig. 11). De telles pêcheries locales sont habituellement saisonnières, et souvent de durée trop courte pour permettre d'attribuer sans ambiguïté un déclin du taux de capture et/ou de la taille des captures à l'exploitation plutôt qu'à l'évolution de la disponibilité régionale ou à la migration. En chaque localité, l'accessibilité et la composition en âge des captures est susceptible de varier. Dans ces conditions, il n'y a pas d'autre solution que de rassembler toutes les données sur les captures et réaliser une évaluation globale. Une possibilité d'aménagement est d'utiliser un modèle d'échappement ou en gantelet (Paulik et Greenough, 1966).

Pour les pêcheries séquentielles sur un stock commun, une considération pratique à prendre en compte est le fait que, si l'on prend un Point de Référence basé sur la taille (par exemple la taille optimale de première capture Ic reposant sur des analyses de rendement par recrue ou de biomasse féconde par recrue pour la totalité du stock (Fig. 11)), les lieux de pêche peuvent s'avérer plus ou moins pertinents. En conséquence, les sacrifices nécessaires soit à l'obtention d'une production par recrue optimale, soit à la prévention de la surpêche du stock de géniteurs comme de juvéniles, ne sont pas également répartis entre tous les intervenants. Leur succès dépend souvent des actions entreprises par un ou plusieurs Etats côtiers où surviennent ces stades critiques du cycle vital. Dans de telles circonstances, la production globale de la population sera suboptimale si tous les Etats concernés sont contraints d'exploiter le stock exclusivement au sein de leur ZEE, et si seulement quelques classes d'âge (par exemple les juvéniles) sont accessibles dans une ZEE donnée (Caddy, 1982). Dans une perspective de rendement par recrue, la solution optimale serait de convenir de limiter l'exploitation à des saisons ou zones pour lesquelles la fréquence des tailles, les taux de capture et les prix du marché sont optimaux. Ceci supposerait l'accès de toutes les parties à ces zones, ou des compensations pour les parties ayant accepté de renoncer à pêcher les tailles suboptimales à l'intérieur de leurs propres ZEE.

Dans une pêcherie séquentielle d'espèces de grands migrateurs, le meilleur Point de Référence global est celui qui permet à une biomasse féconde cible de passer au travers de toutes les pêcheries pour assurer le renouvellement du stock. A partir d'un exemple simple, il est clair que ceci peut être réalisé par différentes combinaisons d'allocations nationales qui se soldent toutes par un même risque cumulatif de mortalité avant reproduction (Tableau II). Si le mécanisme proposé dans le paragraphe ci-dessus est rejeté en faveur d'une exploitation suboptimale à l'intérieur de chaque juridiction, alors le vecteur des mortalités par âge donné - et les allocations correspondantes - devrait de toute façon être négocié par les intervenants en fonction des Points de Référence du stock global présentés précédemment.

Figure 11: Une pêcherie en gantelet idéale pour une espèce de grand migrateur traversant trois juridictions durant son cycle vital. La taille au recrutement pour la pêcherie Ir est atteinte dans la juridiction 1; la taille optimale à la première capture (Icopt permettant un rendement Y/R maximal est atteinte dans la juridiction 2, et la reproduction survient dans la juridiction 3.

Les Points de Référence Economiques ne sont pas toujours pratiques pour la gestion des stocks chevauchants, et moins encore pour celle des ressources en grands migrateurs, car l'optimum économique peut être différent en chaque flottille nationale, en fonction de ses coûts, de ses gains et des prix sur le marché national. En général, Fmsy, n'est pas facile à définir dans les pêcheries comprenant plusieurs flottilles ayant différents engins et techniques de pêche.

De même, pour les stocks chevauchants et les stocks de grands migrateurs, il peut être extrêmement difficile d'estimer un Point de Référence Cible basé sur le rendement par recrue si les vecteurs de F par classe d'âge, caractéristiques de la flottille pour une ressource exploitée donnée, diffèrent d'une juridiction à l'autre, et si l'effort relatif des flottilles varie d'une année à l'autre.

2.10 Considérations multispécifiques et écosystémiques dans l'établissement de Points de Référence


2.10.1 Interactions techniques
2.10.2 Interactions spécifiques
2.10.3 Interactions au sein de l'écosystème


La nécessité de perspectives multispécifiques et écosystémiques en aménagement des pêcheries a été fréquemment soulignée (Mercer, 1982; Sugihara et al., 1984). On peut distinguer dans ces considérations les catégories suivantes:

Les interactions techniques - Le problème technique de gestion d'un ensemble d'espèces exploitées conjointement, sans souci de leurs possibles interactions biologiques;

Les interactions spécifiques - Surtout les effets de la prédation et de la compétition sur les réponses des populations d'espèces ayant fait l'objet de recommandations d'aménagement;

Les interactions écosystémiques18 - L'effet qu'une réduction de la biomasse des espèces exploitées peut avoir sur les autres organismes de l'écosystème dont ils font partie.

18 En clair, les interactions spécifiques jouent un rôle majeur dans les réponses des écosystèmes à l'exploitation. Toutefois, les deux dernières catégories sont destinées à faire la distinction entre les phénomènes au niveau de la population et à celui de l'écosystème

Les halieutes ont admis les impacts potentiels de toutes ces relations sur la probabilité de succès d'un aménagement basé sur des modèles monospécifiques, et ont consacré un effort considérable durant les deux dernières décennies à mettre au point des solutions concrètes à ces problèmes. Il a cependant été difficile de parvenir à l'intégration formelle de ces considérations dans les recommandations relatives à l'aménagement.

LES ETATS CÔTIERS DOIVENT "...PRENDRE EN CONSIDERATION LEURS EFFETS SUR LES ESPÈCES ASSOCIEES AUX ESPÈCES EXPLOITEES OU DEPENDANT DE CELLES-CI AFIN DE MAINTENIR OU DE RETABLIR LES STOCKS DE CES ESPÈCES ASSOCIEES OU DEPENDANTES À UN NIVEAU TEL QUE LEUR REPRODUCTION NE RISQUE PAS D'ETRE SERIEUSEMENT COMPROMISE

Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982

2.10.1 Interactions techniques

Le problème majeur dans l'exploitation de plusieurs espèces d'un peuplement par un engin non sélectif, tel qu'un chalut ou une nasse, est que chaque espèce aura des caractéristiques bioécologiques différentes en matière de cycle vital, et par conséquent des réponses différentes à l'exploitation. Ainsi, un Point de Référence global basé sur F surexploitera certaines espèces et en sous-exploitera d'autres. Caler les valeurs spécifiques des Points de Référence Limite basés sur F, pour différents niveaux trophiques, en fonction des taux de mortalité naturelle respectifs, reste une possibilité théorique (Caddy et Sharp 1986). Toutefois elle serait trop difficile à mettre en oeuvre pour des engins, tels que les chaluts pélagiques ou les nasses, qui ont une sélectivité spécifique relativement faible. Pour un tel type d'engins peu sélectifs, une approche de précaution envers toutes les espèces exploitées risque de voir l'exploitation de l'écosystème définie en fonction des espèces de moindre résistance à l'exploitation. Ainsi, si l'on doit optimiser l'exploitation de chaque espèce au sein de l'écosystème, le développement de modes d'exploitation plus sélectifs doit être une priorité majeure. Ceci peut être abordé par l'utilisation d'engins plus sélectifs, ou par une connaissance de la distribution spatiale de la ressource, et le déploiement de l'effort de pêche en conséquence.

Lorsque des évaluations distinctes existent pour les différentes espèces, comme dans le cas des pêcheries au chalut de fond de l'Atlantique Nord, les quotas spécifiques sont rarement proportionnels aux taux de capture relatifs dans les chaluts. L'optimisation de l'exploitation simultanée par les pêcheries au chalut d'espèces démersales co-occurentes a été abordée par l'utilisation de l'information disponible sur la variabilité spatiale de la composition des captures. Ceci permet de déployer un effort de pêche parmi les différentes zones de peuplement de telle sorte qu'il optimise la capture des quotas additionnés (Murawski et al. ,1983; Murawski et Finn, 1988). Dans ce cas, ce Point de Référence Cible est la somme des quotas de toutes les espèces. En théorie, l'objectif ne peut être atteint que si tous les quotas sont atteints exactement en même temps; sinon la pêcherie ferme lorsque le premier quota est atteint, et la fraction restante des autres quotas demeure inexploitée. En réalité les pêcheurs compensent ceci en rejetant les espèces dont le quota est atteint, et un objectif majeur de la gestion par les quotas est de viser surtout à minimiser cet effet indésirable dans les pêcheries multispécifiques.

On prend de plus en plus conscience des effets physiques directs des activités de pêche sur les habitats marins (ICES, 1993b; EEC, 1994). Ces effets physiques étant de mieux en mieux connus, cette inquiétude devrait donner naissance à d'autres Points de Référence susceptibles de définir et de limiter les dommages physiques admissibles. Par exemple, le chalutage et le dragage affectent directement les habitats benthiques et leurs communautés. Ainsi, la pêche peut être limitée à un niveau tel que la surface totale chalutée par an n'excède pas une certaine fraction de la surface chalutable totale, en se basant par exemple sur le taux observé de régénération de l'habitat ou de la communauté. Actuellement, il existe des exemples extrêmes où sont interdits l'usage d'un engin et des pratiques de pêche qui endommagent des habitats, tels que les récifs coralliens, c'est-à-dire qui sont intégrés dans un ensemble de règlements de gestion.

Les effets directs de la pêche sur les espèces non ciblées sont aussi source d'inquiétude (CEE, 1994). Les oiseaux de mer, les tortues et les mammifères marins sont les premiers exemples qui ont conduit à imposer des limites à la pêche. Dans le cas des prises accessoires de tortues par les chalutiers crevettiers, il est recommandé d'utiliser des dispositifs anti-tortues19 qui augmentent les coûts de pêche et réduisent les captures de crevettes (Gibbons-Fly et al., 1994) mais qui constituent la seule option écologiquement acceptable. L'exemple le plus frappant est celui de l'interaction senne tournante thonière - dauphins dans le Pacifique centre-oriental, où les captures sont limitées par le nombre permissible de dauphins tués annuellement. Ceci a considérablement affecté les pratiques de pêche thonière et les procédures d'aménagement (voir Annexe 3).

19 Turtle excluder devices (TEDs)

2.10.2 Interactions spécifiques

La Convention de 1982 (ONU, 1983) prend en considération l'impact potentiel que l'exploitation d'une ressource peut avoir sur les autres. Ces types d'impacts sont susceptibles d'être plus prononcés pour les espèces compétitrices, prédatrices ou proies des espèces cibles, ou qui sont des prises accessoires. Les Points de Référence qui reconnaissent explicitement et quantifient ces types d'interactions spécifiques n'ont pas été appliqués en routine dans bien des pêcheries. Il faut en général bien plus de connaissances que celles actuellement disponibles dans la plupart des écosystèmes marins. Cependant il existe divers exemples où les interactions entre espèces co-occurentes sont prises en considération lors de l'établissement de Points de Référence Cible.

Les systèmes prédateur-proie sont depuis longtemps un centre d'intérêt pour les halieutes (Clepper, 1979). Pauly (1979) met l'accent sur les compromis liés aux tentatives d'exploitation simultanée du prédateur et de la proie. Dans certaines situations, l'aménagement a conduit à assurer les besoins alimentaires des prédateurs lors de l'exploitation d'une proie. Pour le capelan du Canada oriental, on a utilisé un Point de Référence Limite des captures pas plus élevé que 10% de la biomasse féconde. Ce taux relativement faible a été choisi arbitrairement sur la base de la position que le capelan, espèce proie, occupe dans la chaîne alimentaire, en supposant que le taux de mortalité naturelle M était assez élevé du fait de la prédation par les mammifères marins et la morue. En particulier, on craignait qu'une exploitation excessive puisse avoir un impact négatif sur la production de morue (Shelton et al., 1993). La gestion du capelan en Norvège intègre explicitement une estimation de la quantité de capelan nécessaire aux morues (Anon., 1993). Même dans des systèmes bi-spécifiques apparemment simples, la complexité des interactions entre espèces peut diminuer l'efficacité des approches plurispécifiques. Ainsi, l'aménagement peut assurer à la morue une importante biomasse d'un petit pélagique, le sprat, mais ne pas tenir compte du fait que les grands sprats se nourrissent d'oeufs de morue! Néanmoins, il est clair que la mise en place de Points de Référence pour l'exploitation des espèces proies devrait, si possible, prendre en considération les prédateurs, que ceux-ci soient ou non exploités.

Par des approches plus formelles, basées sur des modèles visant à prendre en compte les interactions spécifiques, on a tenté de relier plusieurs modèles monospécifiques en intégrant des termes relatifs aux interactions, notamment la prédation. Le modèle multispécifique pour la Mer du Nord, et les APV20 multispécifiques qui en découlent en sont des exemples remarquables. Une APV multispécifique modélise les compromis entre les exploitants des différents composants de l'écosystème, mais requiert énormément de données. Actuellement, il existe peu de systèmes pour lesquels soient disponibles les données permettant ce type d'approche potentielle. Même dans l'Atlantique Nord-Est (une zone bien étudiée), les participants à un atelier de travail sur "La prise en compte des interactions des pêcheries dans les conseils à l'aménagement" sont convenus que "les gros modèles multispécifiques étaient au-delà du champ de ressources techniques et humaines des équipes [d'halieutique]" (Mahon, 1985). Rien n'indique que la situation ait changé, et la plupart des tentatives pour intégrer des approches multispécifiques dans l'évaluation des pêcheries se sont concentrées sur les interactions entre deux ou quelques composantes d'un écosystème, et sur les flottilles qui les exploitent.

20 APV = Analyse des Populations Virtuelles (VPA en anglais)

Une autre approche applicable aux effets des interactions spécifiques sur la production d'un ensemble d'espèces coexistantes est de toutes les combiner en une analyse unique. Cela suppose que le comportement de la biomasse totale sera similaire à celui d'une seule espèce. Cette approche a été utilisée pour estimer la MSY de pêcheries en milieu récifal, dans lequel il y a bien trop d'espèces pour envisager des analyses monospécifiques (Medley et al., 1993). Ceci a également été utilisé en aménagement monospécifique en tant que seconde étape limitante, car lorsque les peuplements exploités comprennent à la fois des espèces prédatrices et proies, on peut s'attendre à ce que la somme des productions mono-spécifiques surestime la production totale. Ainsi une analyse combinée a également été utilisée par l'ICNAF21 pour une approche de gestion en deux étapes, dans laquelle la somme des quotas monospécifiques a été limitée par la production estimée à partir des stocks regroupés (Mahon, 1985).

21 ICNAF = Commission internationale pour les pêcheries de l'Atlantique nord-ouest (International Commission for Northwest Atlantic Fisheries)

2.10.3 Interactions au sein de l'écosystème

Un sujet de préoccupation supplémentaire, concernant la pérennité de la production des pêcheries, est que la réduction significative de la biomasse de plusieurs espèces, éventuellement à la clé de voûte d'un écosystème, n'entraîne des modifications peut-être abruptes et irréversibles au sein de celui-ci. Des modifications significatives ont eu lieu dans de nombreux écosystèmes suite à leur exploitation, bien que ceci ait souvent été confondu avec les modifications environnementales et la pollution. Des exemples notables sont les peuplements démersaux au large du nord-est des Etats-Unis et dans le Golfe de Thaïlande (Saila, 1993). De même plusieurs études ont signalé les effets de la pêche sur la composition spécifique des peuplements de poissons coralliens (Medley et al., 1993). L'observation selon laquelle la composition spécifique des communautés exploitées tend à dériver vers une prédominance d'espèces plus petites, plus résistantes mais souvent de moindre valeur, pourrait constituer la base d'un Point de Référence basé sur la diversité pour l'aménagement des pêcheries multispécifiques.

Des descripteurs quantitatifs des tendances induites par la pêche dans les communautés exploitées pourraient être utilisés comme variables de référence. Saila (1993) propose des méthodes multivariées d'analyse de tendance qui peuvent être utilisées pour détecter de telles tendances. Les participants pourraient convenir d'une combinaison souhaitable d'espèces sur la base de leur valeur et de leur taille, et ajuster l'effort de pêche en vue d'atteindre cette combinaison souhaitée. Ceci constituerait un Point de Référence Cible multispécifique. La proportion d'une ou plusieurs espèces souhaitables ou indésirables dans les captures pourrait être utilisée pour établir des Points de Référence Limite en termes de leur proportion minimale [ou maximale] dans les captures.

Le problème des changements brusques (quelquefois considérés comme catastrophiques) dans les écosystèmes a fréquemment été soulevé. Une question capitale est de savoir si un écosystème peut connaître de multiples états stables, de telle sorte qu'il passe d'un état stable à un autre lorsqu'il est exploité, mais n'y retourne pas lorsque cesse l'exploitation. Un tel exemple, pour les lacs d'eau chaude du Nord, est le passage de communautés dominées par les percidés à des communautés dominées par d'autres espèces plus petites, moins appréciées, en fonction de la productivité du lac et de son exploitation (Kerr, 1976). Sur la base des informations fournies par Kerr, il devrait être possible de proposer un Point de Référence Limite pour l'exploitation de tels lacs. Le grand nombre de lacs nordiques permet un échantillon de taille suffisante pour localiser ce point de transition. L'environnement marin n'offre généralement pas de telles possibilités de réplication. On devra ainsi soit inférer à partir d'autres systèmes, soit tirer les conclusions de l'expérience acquise, à l'issue de laquelle il sera peut-être trop tard. Cependant, si l'on s'attend à ce que le système à aménager puisse connaître un changement d'état, des Points de Référence Limite de précaution devront être adoptés.

Une autre approche à l'intégration de principes écologiques en aménagement des pêcheries implique l'usage du spectre de taille d'organismes vivants comme un indicateur de l'effet de l'exploitation (Platt et Denman, 1978; Caddy et Sharp, 1986; Dickie et al., 1987). Les caractéristiques de l'écosystème d'intérêt immédiat pour les gestionnaires de la pêcherie sont directement reliées au spectre de tailles à cause de la mise à l'échelle inter et intra spécifique des processus physiologiques. Les Points de Référence pourraient être basés sur cette caractéristique de l'écosystème, et, bien qu'ils soient moins précis que les Points de Référence conventionnels basés sur F, seraient plus facilement contrôlés que ceux-ci.

QUE L'AMENAGEMENT DES PECHERIES AUSTRALIENNES SOIT ENTREPRIS DANS LE CADRE DUNE GESTION ECOSYSTEMIQUE

Anon., 1991

Dans la pratique, il y a peu d'expériences d'aménagement prévoyant une manipulation délibérée des biomasses relatives des composantes de l'écosystème. De tels changements affectent l'équité du partage des différentes ressources entre les flottilles de pêche, et nécessitent une négociation entre les utilisateurs des différentes composantes du réseau trophique (Brander et Bennett, 1989) avant de choisir des Points de Référence spécifiques pour la composante en question dans l'écosystème. Un exemple récent de point de désaccord non résolu est l'interaction senne tournante coulissante thonière - dauphin dans le Pacifique centre-oriental, où il y a eu désaccord entre les "utilisateurs" de ces deux ressources interactives quant aux taux de prélèvement global idéal (voir Annexe III).

Les préoccupations quant aux réponses de l'écosystème à l'exploitation vont bien au-delà des effets sur la production des pêcheries, pour inclure des aspects globaux de santé, de stabilité et de biodiversité de l'écosystème (Organisation des Nations Unies, 1992, Chapitre 17; Norse, 1993; Gimbel, 1994). Dans une tentative d'intégrer toutes ces préoccupations, Sherman (1994) adopte un mode de vision écologique très large de la pérennité des productions provenant des écosystèmes marins. Il encourage l'usage du concept de Grands Écosystèmes Marins22 (GEM) comme contexte à la gestion des ressources renouvelables. Dans ce contexte, les décisions d'aménagement devraient être considérées à la lumière de leurs impacts attendus sur l'écosystème entier. Il cite plusieurs GEM pour lesquels une approche holistique de l'aménagement a été tentée (Mer Jaune, Courant du Benguela, Grande Barrière de Corail, plateau continental au nord-ouest de l'Australie et écosystèmes marins de l'Antarctique) ou est actuellement appliquée (Mer Noire, Mer de Barents, Mer du Nord et écosystèmes du Courant Nord-Californien) (voir Sherman et al., 1993 pour une description générale de ces écosystèmes). Une tentative louable d'aménagement de l'ensemble d'un écosystème figure dans la Convention sur la conservation des ressources vivantes de l'Antarctique (CCAMLR, 1993), mais en dépit des clauses de cette Convention, de nombreuses ressources en poisson de l'Antarctique sont largement épuisées, essentiellement à cause du manque de moyens de contrôle des accès.

22 Large Marine Ecosystems (LME)

La convention CCAMLR (Article IIc) demande explicitement que l'aménagement réponde aux "modifications potentiellement irréversibles de l'écosystème considéré dans son ensemble" qui peuvent résulter d'un large spectre de facteurs. Ceci conduit à envisager quelles actions sont irréversibles, comment exprimer qu'un changement irréversible s'est produit, quels éléments de l'écosystème sont contrôlables et dans quelle mesure.

En général, les initiatives qui tendent vers un aménagement au niveau écosystémique en sont au stade d'élaborer des Points de Référence conceptuels ou des lignes directrices, et/ou de définir les recherches et le suivi nécessaires pour affronter les questions majeures (Holling, 1993; Appolonio, 1994; Sherman, 1994). En effet, un défi important est de fournir des descripteurs de la santé de l'écosystème, même sans faire référence à l'impact de l'exploitation (GESAMP, 1994). Il faudra du temps et des négociations pour convertir ces approches conceptuelles en Points de Référence, cible ou limite, qui puissent être utilisés régulièrement pour les décisions d'aménagement (Norse, 1993). Nombre de questions institutionnelles doivent également être prises en compte. Aux niveaux tant nationaux qu'internationaux, plusieurs des composantes importantes de l'écosystème recoupent, entre autres, les domaines de la santé, du commerce, du tourisme et des transports, et dépassent les termes actuels de référence des institutions uniquement chargées de la gestion des ressources marines. Néanmoins, du fait que ces concepts deviennent de plus en plus concrets, ils constituent encore un contexte au sein duquel les gestionnaires des pêcheries peuvent tenter de comprendre les effets de leurs décisions sur les systèmes qu'ils gèrent (Appolonio 1994).

2.11 Une vue d'ensemble des Points de Référence

Au moment où ils ont proposé F0,1 comme Point de Référence Cible, Gulland et Boerema (1973) ont noté qu'il n'existait pas de modèle théorique pour établir des quotas de prises annuels qui combinent toutes les qualités désirées: être facilement compréhensibles aux décideurs; décrire et prédire de manière réaliste et avec un degré de précision acceptable les événements au sein du stock de poissons; être applicables à une pêcherie spécifique sans grands besoins en données et analyses. Il n'est pas certain que la situation se soit notablement améliorée aujourd'hui.

Les Points de Référence basés sur des modèles de population sont techniquement complexes et nécessitent des quantités de données considérables, généralement collectées sur plusieurs années (Tableau 3). D'autres Points de Référence moins complexes ont aussi été considérés. La plupart d'entre eux sont basés sur des modèles de population, ou sur des généralisations issues de l'application de ces modèles à des types de populations nombreux et variés. Certains, tels que les tailles moyennes dans les captures rapportées à la taille à la maturité, peuvent être aisément observés et nécessitent des connaissances techniques et des coûts minimes. D'autres doivent être basés sur l'information la plus fiable dont on dispose sur des stocks de poissons similaires en d'autres zones. En l'absence de données et d'analyses plus sophistiquées, de tels Points de Référence de Précaution devraient être adoptés, au moins en tant que mesures provisoires, jusqu'à ce que les évaluations nécessaires aient été faites et permettent l'établissement de Points de Référence plus précis.

Les Points de Référence limite ou seuils indiquent qu'un état du stock indésirable est sur le point d'être atteint et qu'il faut de toute urgence prendre des mesures d'aménagement. Pour incorporer un Point de Référence Limite dans une stratégie de gestion, il faut convenir à l'avance, lors de négociations entre les participants à la pêcherie, des mesures à prendre, et les déclencher dès que l'on estime que le PRL a été atteint, selon des critères pré-établis.

Les Points de Référence liés aux considérations multispécifiques ou écosystémiques en sont encore à leurs premiers stades, mais peuvent fournir des bases valables pour l'aménagement. Il s'agit de formuler certains de ces concepts en termes de Points de Référence, de façon à ce qu'ils puissent être largement acceptés et adoptés comme conventions.


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