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6. PERSPECTIVES DE LA DEMANDE ET DE L’OFFRE DE BOIS ENERGIE

Dans l’ensemble, la population tchadienne augmente au taux annuel moyen de 2,5% ; elle devrait atteindre 9,35 millions d’habitants en 2.010. La population urbaine, qui représentait environ 21% du total de 1993, devrait s’accroître à un taux plus élevé, d’environ 3,5% par an. A ce rythme, l’effectif de la population urbaine doublera d’ici 2.010. Si les tendances actuelles de la consommation d’énergie domestique se maintiennent, la demande du bois énergie atteindra plus du double du niveau actuel. En 1990, le bois transformé en charbon de bois ne représentait que 59% du volume total consommé à N’Djaména, il serait actuellement de l’ordre de 70% (selon les prévisions de consommations faites précédemment).

A l’égard de différentes données et aux tendances prévues de la demande, la production de bois, au plan national, restera supérieure à la demande (si l’on considère toutes les formations ligneuses estimées). Cependant dans les grands centres urbains, en particulier à N’Djaména, ces tendances indiquent d’éventuelles pénuries de bois. La population de la capitale devrait atteindre 1,5 millions d'habitants d'ici l’an 2.010, soit presque le double du niveau actuel. Des études menées dans d’autres pays africains font état d’une croissance rapide de la consommation de charbon de bois liée à l’urbanisation. Compte tenu de cette tendance, l’exploitation de bois dans la région de N’Djaména passera de 410.000 tonnes en 1995 à 730.000 tonnes en 2.010. De plus, dans la mesure où d’autres activités telles que l’agriculture nécessiteront également l’utilisation des zones forestières, la pression s’exerçant sur l’utilisation des terres pourrait compromettre la viabilité de l’équilibre entre l’offre et la demande de bois énergie.

 

 

Politique d’offre. Le Gouvernement tchadien n’a pas de politique concertée d’énergie domestique pour faire face aux pénuries attendues de l’offre de bois.

Le cadre général d’une telle politique existe cependant dans le Plan Directeur de Lutte Contre la Désertification (PNLCD) que le Tchad a adopté en 1989. Ce plan comprend trois volets. Le premier volet concerne la protection des ressources écologiques par le biais d’activités visant à exploiter les ressources forestières telles que l’amélioration de l’aménagement des cultures, la protection des sols, la rationalisation de l’abattage, les différents types de boisement et la sensibilisation de la population à la nécessité d’une utilisation efficace du bois. Le deuxième volet du plan a trait à la conception d’un plan d’aménagement à exécuter au niveau des villages. Le troisième volet concerne le renforcement institutionnel et fait valoir la nécessité de créer des structures adaptées aux programmes de développement rural intégré et d’améliorer les systèmes de production et de tarification favorables à la protection des ressources.

A la même année, 1989, le Gouvernement a élaborer un nouveau code forestier (adopté en conseil des Ministres mais pas promulgué) pour lui permettre de mieux contrôler l’utilisation des ressources forestières et octroyer des droits de propriété spécifiques aux particuliers qui régénèrent des zones boisées. L’étude ESMAP a analysé le projet du nouveau code pour constater que, d’une façon générale, il accordait trop d’importance au rôle de l’Etat par rapport à la population locale et que, de ce fait, il n’apporterait pas les changements nécessaires au niveau local pour préserver les ressources forestières disponibles. L’ESMAP propose de modifier le projet de code en s’appuyant sur trois principes. Le premier est le transfert de l’Etat à la population locale de la responsabilité de la gestion des forêts. Reposant sur l’organisation de marché villageois, ce transfert interviendrait dans le contexte d’un plan directeur d’aménagement et d’approvisionnement pour chaque ville importante. Le deuxième principe consiste pour l’Etat à se charger de contrôler les flux de bois, à augmenter les recettes fiscales et à superviser l’exécution des plans directeurs. Le troisième principe, concerne la professionnalisation de l’ensemble des activités, abattage, fabrication du charbon de bois, transport, etc. en fournissant une assistance technique destinée à améliorer les techniques et l’organisation de ces activités.

Entre temps, pour rationaliser le secteur bois énergie, le Gouvernement a entrepris de modifier la législation relative aux combustibles ligneux. Une loi portant organisation de la commercialisation et du transport de bois dans les grandes agglomérations et de la fiscalité qui est applicable a été promulgué le 3 décembre 1994 sous le n°36/PR/94 (décret d’application n°107/MTE/DG/97 du 14 mars 1997). Cette loi déclare :

Droits de propriété sur les forêts : la concession des forêts publiques aux communautés rurales ou aux villages ruraux est autorisée dans le cas des forêts domaniales qui ont été régénérées ou préservées de la disparition ; et les personnes qui ont planté des arbres ou aménagé des forêts sur leurs propres terrains bénéficient sans restriction de tous les droits de propriété.

Transport des produits ligneux : seuls les transporteurs sont autorisés à transporter les produits ligneux dans les villes ; ces transporteurs doivent avoir une licence renouvelable chaque année.

Marchés ruraux du bois : des marchés du bois peuvent être crées dans les villages ruraux et les prix des produits ligneux doivent y être librement déterminés par les vendeurs ; les organisations locales rurales d’abattage de bois sont les seules à se livrer à cette activité aux fins d’approvisionnement des marchés ruraux ; pour l’exploitation des forêts privées, une autorisation peut être obtenue auprès des représentants locaux de la DFPE ; et l’exploitation du bois ne doit pas excéder la capacité annuelle de régénération des ressources approvisionnant le marché local du bois ; des quotas seront établis en fonction des programmes d’utilisation locale des terres et de gestion du bois.

Taxes : la redevance d’utilisation perçue sous forme de taxe sur le transport de bois est dénommée «taxe forestière ». Elle est versée par le transporteur de bois à une personne désignée à cet effet sur le marché rural, en fonction de la nature du produit et de la catégorie de la zone de production ; la structure de la taxe sera périodiquement revue, compte tenu de l’inflation, du prix des combustibles de substitution, etc. ; la loi fait également allusion au système de contrôle qui sera mis en place et prévoit des pénalités en cas de fraude, ainsi qu’à la rémunération des agents de contrôle.

Cette liste non exhaustive des questions sur lesquelles porte la loi (on compte 50 articles au total) montre clairement que le Gouvernement à l’intention d’améliorer la gestion des combustibles ligneux. Le décret d’application a été promulgué le 14 mars 1997.

Il n’existe presque pas de projets tendant à améliorer l’exploitation forestière, à l’exception de ceux de la FAO financés autrefois par le PNUD et par les Pays Bas, et de celui financé par le FED. Ces projets ont obtenu des résultats prometteurs mais la suspension de ceux de la FAO n’a pas permis de faire mieux.

Politique de la demande. Au Tchad, la diffusion des foyers améliorés au bois ou charbon de bois est encore embryonnaire en regard de ce qu’elle est dans d’autres pays du Sahel : moins 4% des ménages de N’Djaména les utilisent.La pénétration marginale des foyers améliorés témoigne de la faible portée des actions de leur promotion entreprise jusqu’alors.

Les ménages ruraux tchadiens utilisent quasi exclusivement le foyer «trois pierres à bois pour cuisiner. Les habitudes des urbains sont un peu plus diversifiées et reflètent un choix entre un certain nombre de combustibles. L’enquête énergie domestique ESMAP de 1991 a montré que les repas à N’Djaména, dans la grande majorité des cas, sont préparés sur deux types de foyers, l’un à bois, le «trois pierres » (76%) pour la boule ou le riz, et l’autre à charbon, le foyer ganoune pour la sauce. En moyenne, un ménage dispose d’un seul foyer «trois pierres » et de deux foyers ganoune ou de deux foyers en argile (traditionnel ou amélioré). Ainsi bien que vivant en ville, les consommatrices de la capitale, même les plus aisées d’entre elles, semblent être restées attachées à la tradition rurale du «trois pierres », qui est considéré comme étant le foyer principal du ménage par plus de deux ménages sur trois, distançant de très loin le ganoune (16%).

Cependant le foyer «trois pierres » et le ganoune ont des rendements énergétiques faibles. Et les actions menées dans d’autres pays sahéliens permettent de penser que l’on pourrait obtenir des économies de combustibles allant de 10 à 30% par l’utilisation de foyers plus performants. Les tests réalisés depuis 1991 par le volet foyers améliorés du projet GCP/CHD/020/NET de la FAO, et par ceux entre autres de SECADEV et ESMAP l’ont d’ailleurs conformé pour certains des modèles introduits au Tchad.

Une politique allant dans le sens de leur diffusion et d’une substitution des combustibles ligneux par le gaz butane et le pétrole lampant est recommandable.

 

 

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