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8. Evaluation suivi des ressources: Les nouveaux outils

La réalisation de documents cartographiques devrait faire partie de toute opération d'aménagement. Ces outils permettent en effet de visualiser les informations utiles à l'aménagiste comme l'inventaire des formations ligneuses et leur caractérisation, leurs potentialités et leur dynamisme, leur état de dégradation, leurs conditions écologiques, etc. Autant d'informations indispensables qui, une fois cartographiées mettent en évidence certaines relations et permettent ainsi de mieux comprendre la situation.

Les moyens de la cartographie classique, en grande partie manuelle, ne répondent plus aux exigences actuelles qui sont, entre autres, la nécessité d'une actualisation permanente de phénomènes en rapide évolution et l'étendue importante des zones d'étude. Les techniques ont marque des progrès significatifs au cours des deux dernières décennies et leur développement ne cesse de s'accentuer. Dans ce domaine, les nouveaux outils développés concernent plus particulièrement l'acquisition, le traitement et la restitution des données.

a/ La télédétection

La télédétection non satellitaire utilisant les photographies aériennes (émulsions panchromatique et infra-rouge) reste un outil extrêmement efficace pour des travaux à très grande échelle, compte tenu de la qualité de l'information fournie, mais s'avère incompatible avec les contraintes de date (les missions aériennes disponibles sont souvent anciennes), de répétitivité et d'extension des zones d'étude.

Depuis 1972, les satellites d'observation de la terre permettent l'acquisition automatique d'énormes quantités de données, en particulier pour des zones difficiles d'accès (encadré n° 18).

L'échelle de vision, la répétitivité des observations, leurs caractéristiques multispectrales, leur forme numérique, la stéréoscopie pour certains instruments (SPOT depuis 1986), sont des caractéristiques particulièrement appréciées et qui ne cessent de s'améliorer.

Les capteurs des satellites enregistrent une partie du rayonnement électromagnétique émis, réfléchi ou diffusé par l'objet observé. Les capteurs utilisés dans le cadre des études sur les formations ligneuses des zones tropicales sèches sont de trois types, en fonction de leur résolution spatiale.

* Les capteurs haute et moyenne résolutions

Actuellement, les capteurs Landsat MSS (Multispectral Scanner), Landsat TM (Thematic Mapper) et SPOT sont les plus couramment utilisés pour la cartographie des formations végétales et pour le suivi de leur évolution à une échelle locale ou régionale. Les données provenant des satellites de la deuxième génération, Landsat TM et SPOT, ont des résolutions spatiales compatibles (30 à 10 mètres) avec des observations détaillées, particulièrement dans le cas de milieux hétérogènes. Ceci peut constituer un avantage ou un inconvénient, suivant les objectifs de l'étude et l'échelle d'intervention.

Encadré n° 18: Télédétection au Mali

Une nouvelle cartographie des ressources ligneuses et de l'occupation des sols du Mali par télédétection: le Projet P.I.R.L (Projet d'Inventaire des Ressources Ligneuses)

Ce projet, réalisé entre 1985 et 1991, s'est articulé en deux phases:

- étude de zones-tests représentatives des principaux milieux écologiques du Mali et production de cartes au l/50 000 à partir de photographies aériennes et inventaires forestiers;

- cartographie de la partie du pays située au sud du 17 ème parallèle en utilisant les images satellitaires SPOT et les résultats acquis au niveau des zones-tests.

L'étude a abouti à la fois à la constitution d'une importante base de données sur les formations végétales du Mali et à la production d'une cartographie de l'occupation du sol. Les cartes ont été éditées au 1/200 000 selon deux thèmes: cartes des formations végétales et cartes de l'occupation agricole

Une carte de synthèse générale reprend les principales données et les visualise au 1/1 000 000.

Ce projet, qui a allié les inventaires de terrain, les données satellitaires, les cartes, constitue actuellement une source d'informations indispensables pour l'évaluation et la gestion des ressources naturelles du Mali.

La quantité d'informations disponibles par image se trouve multipliée par dix par rapport à Landsat MSS (résolution au sol d'environ 80 mètres). Les programmes futurs prévoient des résolutions encore plus fines (10 mètres en multispectral et 5 mètres en panchromatique pour SPOT 5 dans les années 2000).

* Les capteurs basse résolution

Les données de type AVHRR (Advanced Very High Resolution Radiometer) provenant du satellite NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration) possèdent en fonction du mode d'enregistrement une résolution au sol d'environ 1 ou 4 km, ce qui en fait un instrument bien adapté pour l'étude et le suivi de la biomasse sur de grandes superficies.

Par ailleurs, la répétitivité des données (deux images par jour), ainsi que la largeur de la bande d'enregistrement (2700 km) sont des atouts importants pour la surveillance à un niveau global de certains phénomènes comme les feux.

L'interprétation et la validation des images basse résolution passent en général par l'association d'images haute résolution au cours de procédures d'échantillonnage. Cette approche sera encore facilitée dans le cas de Spot 4, prévu pour 1997, qui pourra acquérir simultanément des vues haute et basse résolutions grâce à ses instruments VEGETATION et SPOT.HRV.IR.

* Utilisation des indices de végétation

Ces indices constituent des outils fréquemment utilisés pour l'étude de la végétation. Construits à partir des réflectances des objets dans le rouge et le proche infrarouge, ils tentent d'isoler la végétation des autres facteurs qui se trouvent intégrés dans la réflectance enregistrée. Par: exemple, si la végétation est peu couvrante, la réponse captée par le satellite sera la résultante des réponses végétation - sol. Or l'expérience montre que, par rapport aux domaines du rouge et du, proche infrarouge, les sols nus ont tendance à se répartir le long d'un axé (droite des sols); par,. conséquent, la formule des indices est construite de façon à mesurer l'écart par rapport à cette, droite des sols. L'un d'entre-eux, couramment employé appelé NDVI (Normalized Difference Vegetation Index), donne des résultats satisfaisants pour cartographier le couvert végétal sur de' grandes étendues.

L'étude des variations saisonnières ou annuelles de cet indice reflète les changements de l'activité photosynthétique de la végétation. Les périodes de sécheresse se marquent ainsi par une diminution importante du NDVI.

* Les images radar

Lorsque la persistance de la couverture nuageuse ou des mauvaises conditions d'éclairement ne permettent pas d'acquérir, des images optiques (domaine du visible/proche infrarouge) de bonne qualité et dans des délais raisonnables, on fait de plus en plus souvent appel aux images radar. Outre sa capacité d'opérer en tout temps, la Radar à Synthèse d'Ouverture (Synthetic Aperture Radar ou SAR) assuré aussi une bonne résolution spatiale des données (de l'ordre de 25 mètres pour ERS-1 et JERS-1). Suivant la fréquence et la polarisation de l'onde radar utilisée, il est possible de pénétrer plus ou moins les couverts végétaux, accédant ainsi à une information sur la structure, la teneur en eau et la biomasse du couvert. Sur un sol nu ou sur une végétation très peu danse, le signal radar est surtout sensible à l'humidité et à la rugosité du sol. L'information fournie par le radar a donc une origine très différente et complémentaire de celle de données optiques. C'est pourquoi lorsque la disponibilité des images optiques le permet, l'utilisation en synergie des données optiques et radar peut s'avérer particulièrement intéressante.

Remarque: il est indéniable que les données satellitaires constituent un précieux "outil de travail" qui a entraîné des modifications dans les démarches concernant les études d'environnement. Néanmoins, ces données ne constituent qu'une partie de l'information nécessaire. Il est indispensable de savoir redescendre au niveau du sol (la "vérité terrain" est fondamentale) ou mieux de partir d'une problématique terrain pour mieux appréhender et comprendre ce que l'on cherche à observer.

b./ De la cartographie numérique aux Systèmes d'Information Géographique (SIG)

Les méthodes cartographiques, via le développement de l'informatique, ont connu depuis quelques années de profondes modifications Les cartes réalisées de manière traditionnelle ne sont plus adaptées aux besoins actuels. Elles sont souvent longues à réaliser, compliquées à archiver et à diffuser, et leur mise à jour est toujours une opération très lourde, d'où leur caractère figé.

Dans un premier temps, les nouvelles techniques ont, pris en charge le travail du dessin: numérisation du tracé, mise en forme automatique, changements d'échelle instantanés, etc. Toutes ces opérations, devenues plus rapides et plus souples, ont rendu plus faciles les mises à jour et la restitution cartographique Les données acquises automatiquement sont stockées et alimentent ainsi une base de données cartographiques qui est réutilisable à tout moment.

La gamme des logiciels utilisés pour toutes ces opérations fait partie des systèmes dits de CAO (Cartographie Assistée par Ordinateur) Ces outils ne permettent pas, néanmoins, de gérer les informations associées aux dessins et celles-ci doivent donc être traitées par un logiciel indépendant, appelé SGBD (Système de Gestion de Base de Données). Les SIG réunissent toutes ces fonctionnalités et gèrent dans un même système les données cartographiques et les informations qui leur correspondent.

Les deux différences majeures entre un SIG et un logiciel de CAO sont l'articulation du SIG autour d'un SGBD et la possibilité d'un SIG à réaliser des opérations d'analyse spatiale.

Les SIG représentent, en quelque sorte, une synthèse de tous les progrès obtenus au cours de ces dernières années. Ils sont donc capables de réaliser quatre ensembles de tâches: la saisie, la gestion, l'analyse et la sortie d'informations cartographiques.

Les potentialités des SIG en font un outil privilégié pour la gestion des ressources naturelles. La possibilité de stocker les informations utiles à la connaissance de la région étudiée (les données satellitaires en font largement partie), la capacité de pouvoir les croiser pour mettre en évidence certains phénomènes, comme par exemple la dégradation de zones forestières et d'en expliquer le processus en prenant en compte les facteurs du milieu physique et humain, peuvent justifier l'utilisation de tels systèmes, à condition, bien sûr d'en connaître les limites.

De nombreux projets les utilisent tant dans le domaine de la recherche que du développement, mais leur utilisation pose encore des questions méthodologiques et stratégiques. Outre la qualité des données qui sont stockées et traitées, les résultats obtenus demandent à être analysés avec prudence en fonction des méthodes utilisées. De la même façon, l'abondance d'informations et la facilité de "superposer des cartes" ne doivent pas dériver vers un amalgame de relations qui, en fait, n'existent pas.

Enfin, la mise en place de ces systèmes représente un investissement assez lourd en achat de matériel mais également en saisie, récupération, mise à jour des données et bien sûr en formation du personnel.

c/ La localisation géographique, un système opérationnel: le GPS (Global Positioning System)

Un des mérites des SIG est de permettre le croisement d'informations. Par conséquent, il convient d'être rigoureux dans leur utilisation et, en particulier, la localisation géographique de ces données réclame une bonne précision.

Actuellement la saisie d'objets (carrefour, arbre, pont, etc.) sur le terrain se trouve grandement facilitée par l'emploi des GPS, également appelés "Navstar" (Navigation Satellite Timing and Ranging).

Un système GPS se compose de trois secteurs:

- un secteur spatial formé actuellement d'une constellation de 24 satellites situés sur des orbites à environ 20 000 km d'altitude;

- un secteur de contrôle avec cinq stations américaines;

- un secteur utilisateur sous forme d'un ensemble de récepteurs qui décriptent les signaux GPS (entièrement sous le contrôle des militaires américains).

Développé par le Département de la Défense des Etats Unis d'Amérique comme moyen de navigation et de positionnement pour des usages civils et militaires, ce matériel est capable à tout moment de fournir à son utilisateur sa position dans un système mondial tridimensionnel, WGS 84 (World Geodetic System, adopté en 1984) lié à l'ellipsoïde de l'UGGI, dit GRS 80. Les coordonnées enregistrées doivent ensuite être transformées dans un système de coordonnées bidimensionnel (Lambert, UTM, géographique, etc.) avant d'être intégrées dans un SIG. La précision des mesures peut atteindre 15-20 mètres dans le meilleur des cas, mais il faut y rajouter la dégradation du signal décidée par les militaires: la précision devient alors d'une centaine de mètres. Malgré ce handicap, le GPS constitue l'outil indispensable actuellement pour toutes les opérations de terrain et ses applications sont nombreuses. Pour en citer quelques unes:

- l'interprétation des données satellites requiert des vérifications sur le terrain parfaitement localisées et l'utilisation du GPS améliore de beaucoup la précision de celles-ci;

- pour la mise en place du dispositif d'échantillonnage des inventaires forestiers, l'usage de cet outil est parfaitement opérationnel en particulier pour l'installation des départs de layons;

- la délimitation des zones d'aménagement constitue également une application très intéressante qui peut ensuite être transférée sur carte avec une bonne précision;

- la localisation de points de repère: il faut, enfin, rajouter qu'en zones tropicales sèches, il est souvent difficile de trouver des points de repère remarquables et, là, les GPS sont indispensables pour pouvoir localiser rapidement les observations de terrain sans avoir recours à des méthodes lourdes réservées plutôt à des professionnels.

Chapitre VII - Bilan et outils: Sylviculture et sylvo-pastoralisme

1. Définition et évolution du régime
2. Opérations sylvicoles
3. Exploitation
4. Sylvo-pastoralisme


Dans ce chapitre, le bilan des acquis de ces dix à quinze dernières années, dans ces deux domaines, sera présenté. Dans la première partie de ce chapitre, les diverses opérations sylvicoles et les exploitations seront passées en revue, sauf l'émondage qui est abordé au chapitre VII, paragraphe 4.2. Pour le sylvo-pastoralisrne, science récente et en plein développement (car les forestiers, les pasteurs et les éleveurs ne connaissaient, jusqu'à un passé encore très récent, que des relations de force et d'exclusion), les grands principes d'exploitation et quelques interventions amélioratrices seront ébauchées.

1. Définition et évolution du régime

Le régime est l'ensemble des règles que l'on applique à un peuplement forestier pour en assurer le renouvellement.

Les trois régimes de base sont le taillis, le taillis-sous-futaie et la futaie. Le "taillis" est constitué de rejets et/ou de drageons, dont la perpétuation est obtenue par une coupe de rajeunissement, ce qui correspond à un renouvellement assuré par voie végétative. La "futaie" est issue d'un peuplement forestier composé d'arbres provenant directement de semis sur place. Le régime du "taillis-sous-futaie" est un régime mixte qui a pour objet de perpétuer des peuplements comportant des arbres dont certains sont nés de semences et d'autres obtenus par voie végétative; le traitement en taillis-sous-futaie, consiste à pratiquer à rotation fixe de durée relativement courte, une coupe du taillis, à l'exception de quelques brins appelés baliveaux qui participent à la constitution d'un étage de futaie, et une coupe partielle de la futaie constituée par les arbres sélectionnés et réservés (les "réserves") au cours des passages en coupe précédents. Le peuplement mixte ainsi obtenu est constitué par un taillis surmonté d'une futaie d'âge multiple. La "futaie jardinée" est une futaie où les arbres sont de tous âges et de toutes dimensions´ mêlés pied à pied ou par bouquets.

D'autres types de régime peuvent être envisagés, ainsi le "taillis fureté" résulte d'un traitement spécifique, où seuls des rejets choisis, de dimensions commercialisables, sont coupés à chaque passage en coupe, ce qui produit des peuplements de rejets non équiennes. On parle de "taillis simple", lorsqu'une coupe rase est pratiquée sur l'ensemble du peuplement pour obtenir un peuplement rajeuni équienne, constitué de rejets et de drageons. Par contraste, le traitement en "taillis composé" consiste à réserver certains rejets au moment des coupes pour participer à la révolution suivante, ceci afin de produire du bois de plus fortes dimensions (Métro, 1975).

En fait, dans les forêts denses sèches, le taillis peut être surmonté d'une futaie, en forêt claire et a fortiori dans les savanes et steppes arborées, ce n'est pas le cas. C'est pourquoi certains auteurs utilisent des expressions telles que "taillis fureté", "coupe par furetage" ou "coupe sélective", qui s'adaptent très bien à une récolte sélective, mais qui ne tient pas compte du mode de reproduction qui ne s'effectue pas exclusivement par voie végétative. Mazoyer (1992) préfère l'expression "prélèvement par furetage-jardinage".

Il n'existe pas de terme forestier parfaitement adapté pour définir le régime de gestion multi-usages des formations de savanes arborées ou dé forêts claires à régénération sexuée et asexuée, d'autant qu'il s'agit de gérer un espace dit forestier pour le bénéfice de très nombreux acteurs (éleveurs, forestiers, agriculteurs, apiculteurs, chasseurs, gestionnaires de l'environnement et du

Du strict point de vue forestier, l'évolution du régime s'est réalisée progressivement: initialement, les aménagistes ont très souvent proposé le régime du taillis simple, plus rarement d'un pseudo taillis-sous-futaie dans les régions à pluviosité plus abondante pour passer plus récemment à un taillis fureté, spécialement. clans les forêts claires et savanes.

a/ Le taillis simple et le taillis-sous-futaie.

Longtemps, le. taillis simple a été le régime appliqué dans les formations ligneuses sèches tropicales, dont la principale production est le bois de feu. Ainsi, dans lés formations sahélo-soudaniennes d'Afrique de l'Ouest, la rotation du taillis simple était très souvent fixée entre huit et quinze, voire vingt ans.

Dans le cadre des miombos, Fanshawe (in CSA/CCTA, 1959) recommandait pour l'aménagement en taillis-sous-futaie, une coupe du taillis tous les quarante ans et une coupe des réserves, variable selon la qualité, entre soixante et cent ans. Dans les forêts claires du Zaïre (miombos), "on a cherché, en coupant les arbres au ras du sol, à produire des taillis de belle venue Lors des coupes rases on brûle les rémanents en petits tas, de façon à ne pas tuer les souches (...). Des feux très hâtifs sont ensuite allumés jusqu'à ce que le taillis soit assez dense pour entraver le développement des Graminées. Un éclaircissage ultérieur améliore la production des meilleures tiges. La croissance en épaisseur diminue à partir de la vingtième année" (Malaisse, 1979).

Les aménagements postérieurs ont conservé ces principes le sous-bois est généralement formé d'espèces de "moindre valeur", qui sont utilisées principalement pour le bois-énergie (Combretacées, Acacia, etc.). Dans les étages supérieurs, se trouvent les essences de bois de service ou de bois d'oeuvre (Bombax costatum, Pterocarpus erinaceus, Terminalia macroptera, Anogeissus leiocarpus, etc.) qui sont coupées après des rotations de plusieurs dizaines d'années (Catinot, 1985; Arbonnier et Faye, 1988).

En Côte d'Ivoire, la forêt de Badénou est actuellement aménagée en vue de la production de: bois d'oeuvre. Les savanes arborées et boisées sont parcourues par des coupes d'éclaircies; par contre, les savanes arbustives sont régénérées par coupes rases en vue de leur conversion en futaie (Quatrième Partie, étude de cas n° 2).

b/ Le taillis fureté et les coupes sélectives

Depuis le milieu des années 80, dans le cadre d'aménagements intégrés, les espèces fruitières, fourragères ou médicinales, que les systèmes traditionnels protégeaient, ont été prises en considération. Nouvellet (1993) souligne une idée de plus en plus admise depuis cinq à dix ans au Burkina Faso, à savoir que le régime de taillis en coupe rase est inadapté, car il :pose certains problèmes de régénération pour divers arbres utiles (comme le Butyrospermum paradoxum dont la fructification est abondante après seulement une vingtaine d'années). L'impact de passages répétés en, coupe sur la régénération par rejets de: souche ou de drageons est, de plus, très mal connu.

Peu à peu, en Afrique de l'Ouest, les forestiers passent progressivement du régime du taillis simple et du taillis-sous-futaie; avec coupe à blanc du taillis et coupe en longues rotations des réserves, à un taillis-sous-futaie fureté avec conservation de certaines réservés (Catinot, 1994) ou coupes sélectives ou à un taillis fureté (Kabore et Ouedraogo, 1995) encore appelé "coupes sélectives" ou "méthode Say" (Peltier et al., 1994). Ces dernières démarches relèvent des principes suivants:

* On constitue des groupes d'espèces caractérisés par un type d'usage dominant (bois de feu, bois d'oeuvre, fruitier, fourrager, etc.).

* Pour chaque groupe d'espèces, on retient un mode de gestion particulier caractérisé par des diamètres minima d'exploitabilité, des rotations plus ou moins longues, des régimes de protection et de conservation.

* Généralement, les individus dépérissants ou morts sont systématiquement exploités.

* On protège les zones sensibles dont le déboisement peut favoriser la dégradation ou la pollution (marigots, pentes, etc.).

* On encourage les sylvicultures d'accompagnement.

Ces approches commencent tout juste à voir le jour au Burkina Faso, au Niger, au Mali. Elles s'inscrivent dans le souci d'assurer la durabilité du système, de valoriser les multiples capacités de la forêt et d'augmenter sa productivité. Mais nos connaissances sont si fragmentaires qu'il est normal que d'aucuns s'inquiètent. Le choix entre ces régimes d'exploitation a-t-il ou non une action négative sur là diversité génétique? Les récentes expériences au Burkina Faso montrent qu'après une coupe à blanc, le nombre de souches et surtout le nombre de brins augmentent. Nouvellet (1993) affirme ainsi que de 1985 à 1991, l'augmentation du nombre de souches est de 5% et celui de brins (tiges) est de. 98%, alors que la fréquence de certaines espèces (Butyrospermum paradoxum) régresse nettement. L'augmentation du nombre de certaines d'entre elles (Guiera senegalensis, Anogeissus leiocarpus, Grewia bicolor) est-elle liée au mode d'exploitation ou tout simplement au fait que la parcelle a été protégée des feux et du bétail? Le nombre de tiges supérieures à 10 cm de circonférence passe de 496 tiges par hectare en 1986 à 2 945 en 1991, soit 493% d'augmentation. Il reste un vaste champ de recherches à prospecter; principalement pour le régime du "taillis fureté", qui est actuellement retenu dans le cadre de l'aménagement durable des formations forestières du domaine sahélien.

Notons que ces nouvelles orientations permettent de maintenir un couvert minimum dans les parcelles exploitées réduisant ainsi l'érosion et la diminution de la fertilité. De plus, la prise en compte de certains arbres pour la production non ligneuse implique les populations dans l'aménagement en fonction de leurs intérêts.

Mazoyer (1992) fait cependant remarquer que ce mode d'exploitation par ramassage des bois morts, par furetage des petits bois, par jardinage des gros bois et par élagage des arbres de parc, était courant au Niger et tout-à-fait approprié tant que les prélèvements de bois ne dépassaient pas la production. Il estime ainsi que "ce mode d'exploitation a déjà fait son temps dans toutes les zones surexplotées" autour de Niamey. Mais que dans les zones sous-exploitées, ce mode de prélèvement par furetage-jardinage peut et doit être préservé.

Le tableau n° 16 compare les propositions d'aménagement de Nouvellet (1992), de Catinot (1994) et de Peltier et al. (1994) dans les zones soudano-sahéliennes.

Tableau n° 16: Comparaison de trois propositions d'aménagement sous 600-800 mm de précipitations annuelles (DME = diamètre minimum d'exploitabilité)


Nouvellet (1992)

Catinot (1994)

Peltier et al. (1994)

Taillis

* Taillis simple
* 8 < DME < 15 cm
* Courte rotation(7 ans ± 2 ans) pour le bois de feu, le fourrage et les usages divers.
* Moyenne rotation(14 ans ± 2 ans): bois d'oeuvre et de service.

* Taillis fureté
* Rotation de 7-8 ans en sélectionnant dans les cépées les tiges de bois de service pour une rotation de 14 à16 ans.

* Taillis fureté ou écrémage selon:
- DME de 6 cm à la base pour Guiera senegalensis et Combretum micranthum
- DME de 8 cm à la base pour Combretum nigricans et C. glutinosum

Futaie

* Longue révolution(plus de 21 ans): bois d'oeuvre

* Révolution liée à l'âge d'exploitabilité de 50 ans(bois d'oeuvre)

* DME de 35 cm pour Pterocarpus lucens etc. (écrémage)
* Coupe des arbres dépérissants

Espèces fruitières

* Protection intégrale avec éclaircies sélectives des arbres dépérissants

* Protection
* Pas d'exploitation
* Droit de récolte lors de la fructification.

* Protection jusqu'à la mort sur pied.

Espèces fourragères

* Arbres de haute tige protégés
* Elagage contrôlé

-

* Emondage toléré à plus de 2 mètres.

 


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