L'abondante ressource forestière que regorge la République Démocratique du Congo devra contribuer, de façon durable, à son développement socio-économique. Pour ce faire, une volonté politique est à rechercher afin de traduire dans le fait les différents objectifs visés. Parmi les points clés à considérer, il y a :
L'appartenance coutumière de la terre peut constituer localement une contrainte majeure à la mise en œuvre des plans et programmes de développement et un véritable générateur des conflits fonciers entre d'une part l'État, les exploitants privés et les propriétaires terriers d'autre part. Ceci est particulièrement vrai dans les zones de fortes densités et les périphéries des aires protégées. Dans ces dernières notamment, les populations riveraines se considèrent expropriées de leurs terres et lésées dans leur droit qu'elles considèrent légitimes. Ainsi, l'on note de plus en plus l'émergence d'une mauvaise cohabitation entre l'autorité de gestion de ces aires et les populations autochtones. Ce problème peut être résolu par une contrepartie économique substantielle en faveur de ces populations, en soutien à des activités de développement et à la participation aux activités économiques générées par ces aires. Il faut également promouvoir l'éducation mésologique depuis le plus jeune âge par la démonstration des avantages qu'il y a à adapter son mode de vie au changement.
Ce point a été abordé dans la section précédente.
4.3. Mise en valeur des ressources nationales
La République Démocratique du Congo n'est pas simplement nantie en forêts, mais encore, elle regorge d'importantes ressources naturelles (eau, mines, faune, etc.). Leur exploitation devrait permettre de relever le niveau de vie de la population et ainsi endiguer la pauvreté, principale cause de l'exploitation à outrance des ressources. On note malheureusement une méconnaissance du potentiel réel, des taux optima d'exploitation en fonction de la nature de chaque ressource et de sa valeur économique. Les inventaires sont donc à développer en priorité en vue d'une planification à tous les niveaux (national, régional et local) tant au plan de stratégies nationales de développement qu'à celui d'aménagement d'aires bien définies.
A l'issue du premier symposium sur la forêt tenu en 1984, le pays s'était donné comme objectif de porter la production de bois d'œuvre à 6 millions de m3 à l'an 2000. Cet objectif s'est avéré irréaliste face aux nombreux obstacles financiers, administratifs et techniques (difficultés de transport, véstusté des équipements, faiblesse des investissements financiers, inadéquation des institutions de gestion). Actuellement, on mise plutôt sur une production annuelle de 1.200.000 m3.
Il n'importe pas seulement de fixer un chiffre à atteindre à une échéance donnée, mais plutôt de maîtriser les différents paramètres permettant d'obtenir une production optimale devant sensiblement contribuer au développement économique. Il s'agit notamment : de l'amélioration de voies d'évacuation, amélioration du système d'allocation forestière; établissement des mesures incitatives, amélioration du système de taxation, implantation d'une industrie forestière forte et performante, promotion des essences dites "secondaires", …
En matière de la promotion du bois, celle-ci est sous le mandat du Centre de Promotion du Bois (CPB). Il y a donc lieu que le Gouvernement profite de l'opportunité offerte par l'Organisation Internationale des Bois Tropicaux (OIBT) pour appuyer les projets développés par ce dernier dans le cadre de son mandat et diversifier ainsi les essences actuellement recherchées dans l'exploitation forestière.
En ce qui concerne l'implantation d'une industrie forestière performante, deux scénarios sont envisagés:
Le premier est que le Gouvernement dispose de tous les atouts lui permettant de réaliser avec succès cette ambition. En d'autres termes, il a suffisamment des moyens de sa politique pour stimuler la production nationale de bois et créer des unités de transformation pour satisfaire les besoins locaux de la population et contribuer aux volumes des exportations de bois transformé.
Le deuxième est celui où le Gouvernement ne disposant pas encore suffisamment des moyens, envisagerait une solution intermédiaire. Celle-ci consisterait à vendre, de façon rentable, les produits bruts de sa forêt, pour se doter suffisamment de moyens lui permettant de mettre en application la première option. Dans ce cas, une étude de faisabilité est requise et le concours des organisations internationales, tel l'OIBT pourrait être nécessaire. La mise en application de ce scénario permettrait de générer des revenus annuels de l'ordre de 75 millions de dollars US pour une production de 3 millions de m3. Ce scénario semble être appliqué avec succès au Cameroun.
Compte - tenu des contraintes multiformes que connaît le pays dans le développement de son secteur forestier, c'est le second scénario qui paraît le plus envisageable à court terme.
Le bois reste et restera encore pour longtemps la principale source d'énergie domestique pour de nombreuses familles urbaines et la presque totalité des familles rurales.
Théoriquement les besoins en bois - énergie de l'ordre de 50 millions de m3 actuellement peuvent être largement et totalement satisfaits à partir des forêts naturelles ou encore par récupération des déchets de défrichements agricoles. En effet:
Avec les 125 millions d'hectare de forêts pour un accroissement moyen annuel de 2 m3/ha, le volume de bois disponible se chiffrerait à 250 millions de m3, de quoi couvrir tous les besoins en bois - énergie, de service et d'industrie.
On estime que 3,5 à 4 millions de familles rurales défrichent en moyenne chacune 0,5 ha/an couvrait une superficie totale de 2 millions d'hectare capable de fournir une production annuelle de 30 millions m3 (productivité de 15 m3/ha).
Dans la pratique cependant, il n'est pas possible d'envisager ces sources pour résoudre les problèmes de l'approvisionnement en bois des villes compte - tenu d'une part, de l'éloignement des principaux massifs forestiers par rapport aux principaux axes de peuplement et d'autre part, du fait que la récupération des déchets de friches agricoles est difficile à cause de l'éparpillement des champs de paysans.
La production d'énergie - bois est largement artisanale et pratiquement incontrôlée. Elle constitue une des causes de la destruction des forêts, particulièrement celles les plus accessibles situées autour des centres urbains et le long des voies de communication.
Bien que le potentiel énergétique du pays soit énorme, il n'existe pas à court terme des sources alternatives d'énergie qui permettent de réduire la pression sur les forêts. En effet, même l'utilisation accrue de l'électricité issue des barrages hydroélectriques implique des coûts importants de développement du réseau et d'électrification des habitations (lignes, appareils) qui restent sans commune mesure avec les possibilités du Congolais moyen.
Les efforts devront plutôt être orientés dans le sens d'une gestion plus rationnelle et d'une utilisation plus efficiente de la ressource ligneuse : aménagement des forêts naturelles, plantations, utilisation des méthodes efficaces de production de charbon de bois et des foyers améliorés, …
Compte - tenu de l'hétérogénéité des pressions dues à la récolte de bois de feu dans le pays, il sera nécessaire de concentrer, dans un premier temps, les actions autour de la ville de Kinshasa et des villes du Bas-Congo, du Kivu, du Katanga ainsi que celles situées hors de la zone des forêts denses.
L'objectif national en matière agricole est le développement de l'agriculture en vue de parvenir à l'autosuffisance alimentaire. Ce développement bien que nécessaire induit des effets négatifs se traduisant par une déforestation accélérée s'il est mal contrôlé.
La pratique courante d'agriculture itinérante sur brûlis, adaptée certes à l'exploitation des sols par une population de faible densité, devient destructrice aussitôt que la population augmente : la pénurie des terres apparaît et la durée de mise en jachère diminue de façon excessive. Il est donc primordial de promouvoir une amélioration des systèmes culturaux et de favoriser l'acquisition des intrants améliorés et de pratiques agricoles durables.
Bien que les régions prioritaires pour l'intensification de la vulgarisation agricole soient les mêmes que celles évoquées au point précédent, il est nécessaire d'agir également dans les zones forestières afin de faire rentrer progressivement dans les mœurs, de nouvelles techniques agricoles.
4.7. Gestion des aires protégées
Le problème crucial des aires protégées concerne l'intrusion des populations riveraines en quête des terres pour l'agriculture, de bois comme source d'énergie, et du gibier pour la consommation. Le braconnage est souvent aggravé à la suite d'un développement commercial de plus en plus important, en particulier autour des centres urbains et est souvent commandité à partir des villes. Le braconnage professionnel commercial orienté vers le trafic des trophées prend de plus en plus des proportions inquiétantes et menace la survie de quelques espèces animales notamment le Rhinocéros blanc (Parc de la Garamba) et l'éléphant.
Afin d'améliorer la cohabitation entre les gestionnaires de ces aires et les populations riveraines et obtenir ainsi leur coopération dans la gestion durable de celles-ci, il est important d'établir des projets pilotes de gestion de la faune sauvage en développant le tourisme cynégétique et la chasse contrôlée du gibier. Ceux-ci sont à même de procurer, directement ou indirectement, des revenus substantiels aux communautés locales et autochtones qui pourront constituer des mesures incitatives de la conservation des ressources.
La législation nationale en matière de la gestion des ressources forestières paraît non adaptée au contexte actuel car s'appuyant encore sur des textes datant de l'époque coloniale. Un séminaire sur la politique forestière a eu lieu au courant du mois de mai 2000.
La mise en place d'un cadre juridique adaptée devient ainsi une des conditions préalables au renforcement des capacités de gestion de l'environnement. Celui devrait tenir également compte des conventions internationales auxquelles le pays a adhéré et aussi considérer l'approche participative et intégrée que devra revêtir dans le futur le secteur forestier.