La création, l'actualisation et le renforcement ou toute autre modification des systèmes de contrôle alimentaire exigent des autorités nationales la prise en considération d'un certain nombre de principes et de valeurs indissociables des activités de contrôle alimentaire, et notamment les suivants:
réduction maximale des risques par l'application aussi stricte que possible du principe de prévention tout au long de la chaîne alimentaire;
prise en compte de la totalité de la chaîne alimentaire de la ferme à la table;
instauration de procédures d'urgence pour faire face à des risques particuliers (par exemple rappel des produits);
élaboration de stratégies de contrôle alimentaire scientifiquement fondées;
instauration de priorités fondées sur l'analyse des risques et sur l'efficacité de la gestion des risques;
lancement d'initiatives holistiques, intégrées, ciblant certains risques et leur impact sur la prospérité économique;
prise de conscience du fait que le contrôle alimentaire est une responsabilité largement partagée exigeant une réelle concertation de toutes les parties intéressées.
Certains des principes de base et des aspects connexes sont passés en revue ci-dessous.
L'application du principe de prévention tout au long de la chaîne de production, de transformation et de commercialisation est le moyen le plus efficace pour atteindre l'objectif visant à réduire les risques. Il est essentiel, pour obtenir une protection maximale du consommateur, que les préoccupations de sécurité sanitaire et de qualité soient indissociables des produits alimentaires, depuis le producteur jusqu'au consommateur. Cela impose une approche globale intégrée de la ferme à la table, selon laquelle producteur, transformateur, transporteur, vendeur et consommateur jouent chacun un rôle essentiel pour garantir la sécurité sanitaire et la qualité des aliments.
Le simple fait d'échantillonner et d'analyser le produit final ne permet pas de protéger efficacement le consommateur. Aussi, l'introduction de mesures préventives à tous les stades de la production et de la distribution, au lieu d'inspecter simplement les produits et les rejeter au stade final, s'avère économiquement avantageux, grâce à la possibilité de déceler des produits défectueux plus en amont de la chaîne. La stratégie la plus économique et la plus efficace consiste donc à confier aux producteurs et aux opérateurs de l'industrie alimentaire la responsabilité essentielle de la sécurité sanitaire et de la qualité des aliments. Les autorités publiques chargées de la réglementation sont alors responsables non seulement de la vérification du bon fonctionnement du système alimentaire, en menant à bien des activités de contrôle et de surveillance, mais aussi du respect des exigences légales et réglementaires.
Les risques alimentaires et la détérioration de la qualité peuvent intervenir en de nombreux points de la chaîne alimentaire, de telle sorte que leur occurrence s'avère difficile et coûteuse à vérifier. La méthode à privilégier pour améliorer la sécurité sanitaire et la qualité des aliments consiste à adopter une approche préventive rigoureusement conçue, ciblée sur le contrôle du processus. De fait, l'application de bonnes pratiques, par exemple de bonnes pratiques agricoles, de bonnes pratiques de fabrication et de bonnes pratiques d'hygiène, permet de maîtriser en grande partie, mais non en totalité, les dangers alimentaires potentiels tout au long de la chaîne de production.
Parmi les principales approches préventives susceptibles d'être appliquées à tous les stades de la production, de la transformation et de la manutention des produits alimentaires, figure celle reposant sur le système HACCP[1]. Les principes du système HACCP ont été formalisés par le Comité du Codex sur l'hygiène alimentaire; ils définissent une procédure systématique d'identification et de maîtrise des dangers d'origine alimentaire. Les gouvernements devraient prendre acte du fait que l'adoption par l'industrie alimentaire de l'approche HACCP est un instrument fondamental d'amélioration de la sécurité sanitaire des aliments.
La Commission du Codex Alimentarius définit l'analyse des risques comme un processus comportant trois composantes:
Évaluation des risques - processus fondé sur des données scientifiques comprenant les étapes suivantes: i) identification des dangers; ii) caractérisation des dangers; iii) évaluation de l'exposition et iv) caractérisation des risques.
Gestion des risques - processus distinct de l'évaluation des risques, consistant à pondérer les stratégies envisageables, en concertation avec toutes les parties intéressées, compte tenu de l'évaluation des risques et de différents facteurs pertinents du point de vue de la protection de la santé des consommateurs et de la promotion de pratiques commerciales loyales et, s'il y a lieu, choisir des mesures appropriées de prévention et de lutte.
Communication des risques - il s'agit d'un échange interactif d'informations et de points de vue, tout au long du processus d'analyse des risques, en ce qui concerne les dangers et les risques en présence, les facteurs de risque et les perceptions correspondantes, entre les personnes chargées d'évaluer et de gérer les risques, les consommateurs, les industriels, les universitaires et les différentes parties intéressées; cette tâche comporte notamment la présentation des résultats des évaluations de risque et des éléments justifiant les décisions de gestion qui s'y rapportent.
L'analyse des risques est une pratique bien établie pour les dangers chimiques. La FAO et l'OMS étendent actuellement aux dangers microbiologiques l'expérience et les compétences acquises dans ce domaine.
La politique en matière de contrôle alimentaire ainsi que les mesures de protection des consommateurs doivent impérativement s'appuyer sur une analyse des risques. Bien que tous les pays ne disposent pas des moyens scientifiques, des capacités ou des données suffisantes pour mener à bien ce type d'évaluation, l'obtention de données locales à cet effet n'est pas forcément indispensable en toute circonstance. Les pays devraient donc plutôt mettre pleinement à profit les données et les compétences disponibles au niveau international, ainsi que les données provenant d'autres pays, recueillies conformément aux pratiques admises au niveau international. Les évaluations des risques réalisées au niveau international par la JECFA, la JMPR (voir Annexe 7) et différentes instances spécialisées sont particulièrement précieuses. Les pays en développement devraient adopter une approche pragmatique et créer un cadre institutionnel composé de scientifiques chargés d'interpréter ces données et ces évaluations et d'appliquer ces informations à l'élaboration de programmes nationaux de contrôle alimentaire.
Les normes du Codex prennent en considération les évaluations des risque réalisées au niveau international et sont considérées comme scientifiquement fondées en vertu de l'Accord SPS. Leur adoption et leur mise en uvre dans le cadre des systèmes nationaux de contrôle alimentaire sont par conséquent encouragées.
La gestion des risques doit également prendre en compte les conséquences économiques et la faisabilité des options de gestion des risques sans oublier la nécessité d'une souplesse compatible avec les exigences de protection du consommateur.
L'élaboration et la mise en place d'un système de contrôle alimentaire doivent se faire dans la transparence. En effet, la confiance des consommateurs, quant à la sécurité sanitaire et à la qualité de la nourriture, dépend de leur opinion concernant l'intégrité et l'efficacité des instances et des activités de contrôle alimentaire. Il importe donc que tous les processus décisionnels soient transparents, permettent à tous les acteurs de la chaîne alimentaire de participer effectivement, et comportent une explication du fondement de chaque décision. Cela favorisera la coopération de toutes les parties concernées, tout en renforçant l'efficacité des mesures et leur niveau d'observation.
Les autorités responsables du contrôle alimentaire doivent en outre étudier les modalités de communication au public des informations sur la sécurité sanitaire des aliments. Cette communication peut se faire sous la forme d'opinions scientifiques sur les questions de salubrité alimentaire, de suivi des activités d'inspection et de résultats d'observations concernant des aliments liés à des maladies d'origine alimentaire, des épisodes d'intoxication alimentaire ou des cas de simple adultération. Toutes ces mesures pourraient être considérées comme faisant partie de la communication des risques pour permettre aux consommateurs de mieux connaître les risques auxquels ils sont exposés et les responsabilités qui leur incombent, afin de réduire au minimum l'incidence des dangers d'origine alimentaire.
La planification et la mise en uvre des mesures de contrôle alimentaire doivent prendre en considération les coûts de mise en conformité (ressources, personnels et implications financières) pour l'industrie alimentaire, puisque ces coûts sont en définitive répercutés sur les consommateurs. Les questions à poser sont les suivantes: les avantages de la réglementation en justifient-ils les coûts? Quelle est l'option de gestion la plus efficace? Les systèmes d'inspection des exportations conçus pour garantir la sécurité sanitaire et la qualité des aliments exportés protègeront-ils les marchés internationaux, développeront-ils l'activité économique et assureront-ils des revenus? Les mesures phytosanitaires et celles concernant la santé des animaux améliorent la productivité agricole; en revanche, la sécurité sanitaire des aliments est un objectif essentiel de santé publique et risque d'imposer des coûts aux producteurs, alors que les investissements qui lui sont consacrés ne sont pas toujours immédiatement récompensés sur le marché.
Les évaluations de l'impact réglementaire contribuent de façon de plus en plus importante à la détermination des priorités, tout en aidant les organismes de contrôle alimentaire à adapter ou à revoir leurs stratégies, afin d'optimiser les résultats obtenus. Ces évaluations sont néanmoins difficiles à réaliser. Deux approches ont été proposées pour déterminer le rapport coût/bénéfice des mesures réglementaires en matière de sécurité sanitaire des aliments:
il est possible d'élaborer des modèles théoriques, permettant d'estimer le consentement à payer (CAP) pour un risque réduit de morbidité et de mortalité; et
l'évaluation du coût de la maladie, couvrant les coûts médicaux tout au long de l'existence et la perte de productivité.
Ces deux approches exigent l'interprétation d'une quantité de données considérable. Les estimations du coût de la maladie sont vraisemblablement plus faciles à interpréter pour les dirigeants politiques; aussi ont-elles été largement utilisées, afin de justifier des mesures de contrôle alimentaire, bien qu'elles ne déterminent pas intégralement la valeur de la réduction du risque. Il n'est pas étonnant qu'il soit plus facile de réaliser une évaluation de l'impact réglementaire pour une inspection à l'exportation que dans le cadre d'une initiative réglementaire axée sur un objectif de santé publique.
La réalisation des objectifs d'un système de contrôle alimentaire exige la connaissance de la situation actuelle et l'élaboration d'une stratégie nationale dans ce domaine. Les programmes permettant d'atteindre ces objectifs sont généralement propres à chaque pays. Ils dépendent non seulement de considérations socio-économiques, mais aussi de l'incidence des problèmes actuels ou émergents de sécurité sanitaire et de qualité des aliments. Les programmes en question doivent, en outre, prendre en considération la façon dont les risques alimentaires sont perçus au niveau international, les normes internationales, ainsi que les engagements éventuels internationaux dans le domaine de la protection alimentaire. Lors de l'instauration d'un système de contrôle alimentaire, il faut donc examiner systématiquement tous les facteurs susceptibles d'affecter les objectifs et le fonctionnement du système et mettre au point une stratégie nationale.
Cette tâche implique le traitement de données pertinentes sous la forme d'un profil de pays (voir Annexe 8). Ces données appuient l'élaboration d'une stratégie, dans la mesure où les différentes parties prenantes sont parvenues à un accord quant aux objectifs, aux priorités, aux politiques, au rôle des différents ministères/organismes, aux responsabilités de l'industrie et aux calendriers de mise en uvre. En particulier, les principaux problèmes liés au contrôle et à la prévention des maladies d'origine alimentaire doivent être mis en évidence de façon à pouvoir appliquer les stratégies efficaces de résolution de ces problèmes.
Le profil doit permettre de passer en revue les aspects sanitaires et socio-économiques ayant une incidence sur les dangers d'origine alimentaire, les préoccupations des consommateurs, et le développement de l'industrie et du commerce, et d'identifier, par ailleurs, dans chaque secteur les fonctions qui contribuent directement ou indirectement à garantir la sécurité sanitaire et la qualité des aliments, ainsi que la protection des consommateurs. La collecte de données épidémiologiques concernant les maladies d'origine alimentaire est une composante indispensable d'un profil de pays et doit être réalisée dans toute la mesure possible.
La préparation d'une stratégie nationale de contrôle alimentaire permet aux pays de mettre au point un système de contrôle alimentaire intégré, cohérent, efficace et dynamique et de déterminer les priorités propres à garantir la protection du consommateur et à promouvoir le développement économique national. Une stratégie de ce type doit assurer une cohérence accrue dans les situations où plusieurs agences de contrôle alimentaire sont impliquées alors qu'il n'existe pas de politique nationale ou de mécanismes de coordination générale. En pareille circonstance, une telle stratégie éviterait une situation confuse, un double effort, une perte d'efficacité et un gaspillage des ressources.
Or, l'élaboration de stratégies de contrôle alimentaire comprenant des objectifs clairement définis n'est pas une tâche simple et l'identification des investissements publics prioritaires en matière de contrôle alimentaire peut s'avérer extrêmement délicate. La stratégie doit faire appel à des intrants multisectoriels; elle doit être fondée sur la nécessité d'assurer la sécurité sanitaire des aliments et la protection du consommateur contre les produits alimentaires insalubres, altérés, ou falsifiés. Elle doit conjointement prendre en considération les intérêts économiques du pays vis-à-vis des échanges à l'importation/exportation, le développement de l'industrie alimentaire, ainsi que les intérêts des exploitants agricoles et des producteurs alimentaires. La détermination des priorités d'action doit suivre une approche axée sur les risques. Par ailleurs, les domaines devant faire l'objet d'une observation spontanée et de mesures contraignantes doivent être clairement définis et les calendriers appropriés doivent être établis. Il convient de prendre également en considération les besoins en termes de valorisation des ressources humaines et de renforcement des infrastructures, notamment des laboratoires.
Certains types d'intervention de contrôle alimentaire exigent d'importants investissements tant en équipements qu'en matériel, ainsi qu'en ressources humaines. Tandis que ces coûts sont plus faciles à justifier dans le cas des grandes entreprises, il n'est pas toujours indiqué d'imposer de telles dépenses à des entreprises plus petites qui coexistent avec des firmes de plus grande taille. Il est souhaitable d'introduire des interventions de ce type progressivement. Par exemple, les pays peuvent donner plus de temps aux petites entreprises pour introduire des systèmes HACCP.
La stratégie adoptée dépendra du niveau de développement du pays, de l'échelle de son économie et du degré de complexité de son industrie alimentaire; elle doit, enfin, comprendre les éléments suivants:
une stratégie nationale de contrôle alimentaire avec des objectifs déterminés, un plan d'action pour sa mise en uvre, et des étapes intermédiaires;
l'élaboration d'une législation alimentaire appropriée ou la révision de la législation existante de façon à atteindre des objectifs définis par la stratégie nationale;
l'élaboration ou la révision des règlements, normes et directives alimentaires, et l'adaptation de ces textes aux exigences internationales;
des programmes de renforcement des systèmes de surveillance et de contrôle des aliments;
une action en faveur des systèmes visant à améliorer la qualité des aliments tout au long de la chaîne alimentaire; par exemple, l'introduction de programmes de contrôle des aliments fondés sur les systèmes HACCP;
la conception et l'organisation de programmes de formation à l'attention des manipulateurs et des transformateurs de produits alimentaires, des inspecteurs et des analystes;
le renforcement des moyens mis à la disposition des activités de recherche, de surveillance des maladies d'origine alimentaire et de collecte des données; et la création d'une capacité scientifique renforcée dans le cadre du système;
l'action en faveur de différentes initiatives d'information du public; notamment d'éducation du consommateur.
Compte tenu de l'étendue du domaine de responsabilité des systèmes de contrôle alimentaire, au moins trois types d'organisation peuvent convenir au niveau national:
système fondé sur plusieurs organismes responsables du contrôle alimentaire - système à organismes multiples;
système fondé sur un organisme intégré unique chargé du contrôle alimentaire - système à organisme unique;
système fondé sur une approche nationale intégrée - système intégré.
Tandis que la sécurité sanitaire des aliments constitue l'objectif premier, un objectif économique important des systèmes de contrôle alimentaire consiste également à créer et à maintenir des systèmes durables de production et de transformation des aliments. Dans ce contexte, les systèmes de contrôle alimentaire contribuent pour une part notable aux tâches suivantes:
garantir l'équité des pratiques commerciales;
développer le secteur alimentaire dans un cadre professionnel et scientifique;
prévenir les pertes possibles et préserver les ressources naturelles;
promouvoir les exportations nationales.
Les systèmes qui visent expressément à atteindre ces objectifs peuvent être sectoriels, c'est-à-dire basés sur la nécessité de développer un secteur particulier comme les pêches, la viande et les produits carnés, les fruits et légumes, le lait et les produits laitiers; d'autre part, ils peuvent être contraignants ou facultatifs, et mis en uvre soit au moyen d'une législation alimentaire générale, soit par une réglementation sectorielle. On peut citer notamment à titre d'exemple:
Loi régissant les inspections à l'exportation, désignant les aliments devant faire l'objet d'inspections obligatoires préalablement à l'exportation; mise à la disposition des exportateurs de moyens pour procéder de façon facultative à des inspections et des certifications.
Règlements spécifiques d'inspection des produits, par exemple pour le poisson et les produits de la pêche, la viande et les produits carnés, ou encore les fruits et légumes, dont l'application incombe à différents organismes ou ministères chargés de cette mission en vertu de la législation appropriée.
Systèmes réglementés de classement et de marquage des produits agricoles frais vendus directement aux consommateurs ou utilisés comme matière première pour l'industrie. Ils se limitent essentiellement aux caractéristiques qualitatives de façon à ce que le producteur obtienne un revenu équitable pour la vente de son produit, sans porter préjudice à l'acheteur.
Lorsque les initiatives sectorielles ont conduit à la mise en place d'activités distinctes de contrôle, il en a résulté la création de plusieurs organismes exerçant des responsabilités de contrôle alimentaire. Généralement, lesdites responsabilités prévues aux termes de ces arrangements sont partagées entre des ministères comme celui de la santé, de l'agriculture, du commerce, de l'environnement, de l'industrie ou du tourisme, les rôles et les responsabilités de chacun des organismes étant spécifiés quoique très différents. Cela entraîne parfois certains problèmes, notamment de chevauchement des activités réglementaires, de développement de la bureaucratie, de morcellement et d'absence de coordination entre les diverses instances concernées par la politique alimentaire, la surveillance et le contrôle de la sécurité sanitaire des aliments. Par exemple, la réglementation et la surveillance des viandes et produits carnés peuvent être dissociées des tâches de contrôle alimentaire incombant au Ministère de la santé. L'inspection des viandes est souvent assurée par le Ministère de l'agriculture ou par le personnel des industries primaires chargé de toutes les activités vétérinaires; les données obtenues ne sont pas nécessairement en rapport avec les programmes de santé publique et de surveillance de la sécurité sanitaire des aliments.
Les systèmes de contrôle alimentaire peuvent également être scindés entre différents organismes nationaux, provinciaux et locaux, la rigueur de leur mise en uvre étant tributaire des moyens et de l'efficacité de l'organisme responsable à chaque niveau. Dans ces conditions les consommateurs sont susceptibles de ne pas bénéficier du même niveau de protection d'un point à l'autre du pays et il peut s'avérer alors difficile d'évaluer correctement l'efficacité des mesures prises par les autorités nationales, provinciales ou locales.
Bien que le contrôle alimentaire incombe couramment à plusieurs organismes, de graves inconvénients existent, notamment:
absence de coordination au niveau national;
confusion fréquente des domaines de compétence et perte correspondante d'efficacité;
disparité de niveaux de compétence et de moyens entraînant des inégalités d'application du système;
conflit entre les objectifs de santé publique et de promotion du développement du commerce et de l'industrie;
capacité limitée d'intégration de données scientifiques appropriées dans les processus décisionnels;
manque de cohérence entraînant une sur-réglementation ou affectant la synchronisation d'une activité réglementaire appropriée; et
diminution de la crédibilité du système, pour les consommateurs nationaux et pour les acheteurs étrangers.
Au cours de l'élaboration d'une stratégie nationale de contrôle alimentaire, il importe de réfléchir à la nature et à la taille de l'organisation à mettre en place pour l'appliquer. Or, différentes raisons historiques et politiques empêchent souvent de prévoir une seule structure intégrée, ou un système intégré de contrôle alimentaire. Dans ce type de situation, la stratégie nationale de contrôle alimentaire doit clairement identifier le rôle de chaque organisme, afin d'éviter les doubles emplois et de façon à apporter plus de cohérence. Elle doit par ailleurs définir les parties ou les segments de la chaîne alimentaire qui doivent faire l'objet d'une interprétation spéciale, et bénéficier de moyens supplémentaires afin de renforcer le système de contrôle.
Le regroupement de toutes les responsabilités en matière de protection de la santé publique et de la sécurité sanitaire des aliments au sein d'un seul et unique organisme de contrôle alimentaire doté d'un mandat bien précis présente des avantages considérables. Cette solution traduit pleinement le caractère hautement prioritaire attribué par les pouvoirs publics aux initiatives en matière de sécurité sanitaire des aliments et l'engagement de leur part à réduire le risque de maladies d'origine alimentaire. Les avantages liés à l'option d'un organisme unique de contrôle alimentaire sont notamment les suivants:
application uniforme des mesures de protection;
capacité d'intervention rapide, afin de protéger les consommateurs;
amélioration du rapport coût/efficacité et utilisation plus judicieuse des ressources et des compétences;
harmonisation des normes alimentaires;
capacité de réagir rapidement en cas de circonstances critiques et des exigences des marchés nationaux et internationaux; et
fourniture de services améliorés et plus efficaces répondant aux besoins de l'industrie et favorisant le commerce.
Une stratégie nationale contribue certes à modifier la législation et la structure administrative dans le sens d'un renforcement, mais on ne saurait préconiser une organisation particulière adaptée dans tous les cas aux besoins et aux moyens définis par les différents contextes socio-économiques et politiques nationales. La décision incombe à chaque pays en propre et toutes les parties intéressées doivent avoir la possibilité de contribuer au processus d'élaboration du système. Malheureusement, les pays ont, en règle générale, rarement l'occasion de mettre sur pied un nouveau système de contrôle des aliments fondé sur un organisme unique.
Il est parfaitement justifié d'envisager la mise en place d'un système intégré de contrôle alimentaire en présence d'une volonté déterminée de collaboration et de coordination effectives des différents organismes, tout au long de la chaîne alimentaire allant de la ferme à la table. Généralement, le fonctionnement d'un système intégré de contrôle alimentaire doit comporter plusieurs niveaux d'organisation:
Niveau 1: Formulation des politiques, évaluation et gestion des risques et élaboration des normes et réglementations.
Niveau 2: Coordination des activités de contrôle alimentaire, surveillance et vérification.
Niveau 3: Inspection et mesures de mise en application.
Niveau 4: Éducation et formation.
L'examen et le remaniement des systèmes de contrôle alimentaire peuvent conduire les pouvoirs publics à envisager l'application d'un modèle comportant l'instauration d'un organisme national autonome de contrôle des aliments, responsable des activités prévues aux niveaux 1 et 2, les organismes multisectoriels existants conservant la responsabilité des activités aux niveaux 3 et 4. Un tel système comporte notamment les avantages suivants:
Cohérence du système national de contrôle des aliments;
Acceptabilité politique accrue: les tâches quotidiennes d'inspection et de mise en application assurées par les autres organismes restent inchangées;
Application plus uniforme des mesures de contrôle tout au long de la chaîne alimentaire et dans tout le pays;
Séparation des fonctions d'évaluation et de gestion des risques: d'où l'adoption de mesures de protection objective du consommateur assurant la confiance des consommateurs nationaux et renforçant la crédibilité pour les acheteurs étrangers;
Possibilité accrue de prise en compte des aspects internationaux du contrôle alimentaire, notamment la participation aux activités du Codex, au suivi des Accords SPS/OTC, etc.;
Transparence encouragée des processus décisionnels et responsabilisation au stade de la mise en uvre; et
Amélioration du rapport coût/efficacité à long terme.
Sensibles à ces avantages, plusieurs pays ont établi ou sont en train de créer au niveau national ce type de mécanisme de décision et de coordination. L'Annexe 9 présente des études de cas illustrant des systèmes nationaux de contrôle alimentaire mis en place dans plusieurs pays.
Le fait de confier la gestion de la chaîne d'approvisionnement alimentaire à un organisme autonome compétent permet une réforme radicale des modalités d'organisation des systèmes de contrôle des aliments. Le rôle d'un tel organisme consiste à définir des objectifs nationaux de contrôle alimentaire et de mettre en place les activités stratégiques et opérationnelles nécessaires pour atteindre les objectifs en question. Cet organisme national pourrait notamment exercer les autres fonctions suivantes:
Révision et actualisation de la stratégie nationale de contrôle alimentaire en cas de besoin;
Conseil auprès des responsables ministériels en ce qui concerne les orientations, et plus particulièrement la détermination des priorités et l'utilisation des ressources;
Élaboration des règlements, normes et codes de pratique, et action en faveur de leur mise en application;
Coordination de l'activité des différents organismes d'inspection et suivi de leurs résultats;
Mise au point d'initiatives d'information communautaire et d'éducation du consommateur et action en faveur de leur mise en uvre;
Soutien aux activités de recherche et de développement; et
Définition de programmes d'assurance qualité à l'intention de l'industrie et aide à leur mise en oeuvre.
Un organisme national intégré de contrôle alimentaire doit prendre en compte l'intégralité de la chaîne alimentaire, de la ferme à la table, il doit avoir pour mission d'affecter les moyens nécessaires aux domaines hautement prioritaires et de faire face conjointement aux principaux risques. La création de cet organisme ne doit pas impliquer la prise en charge des responsabilités quotidiennes d'inspection des aliments, lesquelles doivent toujours incomber aux organismes existant aux niveaux national, infranational et local. L'organisme national doit par ailleurs envisager le concours éventuel de services privés d'analyse, d'inspection et de certification, en particulier pour le commerce à l'exportation.
Des indications plus détaillées concernant certaines composantes d'un organisme national de contrôle alimentaire figurent à l'Annexe 10.
Enfin, les activités envisageables au cours de la mise en place et du fonctionnement initial d'un organisme national de contrôle alimentaire sont présentées en détail à l'Annexe 11.
Les fonds et les ressources nécessaires à la réorganisation et au renforcement des systèmes de contrôle alimentaire devraient normalement être fournis par le gouvernement national. Dans les pays où les responsabilités dans ce domaine sont réparties entre de nombreux organismes publics, il peut s'avérer nécessaire de négocier une modification du mode de financement et d'établir des arrangements provisoires, afin de garantir la disponibilité continue de fonds et de ressources. À cet effet, il est essentiel que le gouvernement s'engage sans réserve à mettre en place des structures appropriées et à élaborer des politiques propres à assurer le niveau optimal de protection du consommateur.
L'obtention de ressources suffisantes peut s'avérer difficile. En effet, la tendance à réduire les dépenses publiques incite les gouvernements à revoir leurs priorités et leurs programmes de financement. Ainsi, le principe du recouvrement des coûts est appliqué dans de nombreux pays. Toutefois, cette politique doit être gérée soigneusement, car les coûts répercutés directement sur l'industrie alimentaire le seront en définitive sur les consommateurs et constitueront une taxation indirecte de la nourriture. De plus, ce fardeau incombe de façon disproportionnée aux secteurs les plus pauvres de la société. Parmi les options de recouvrement des coûts, figure l'application de taxes pour l'octroi de licence, pour les inspections et pour les analyses d'aliments. Dans certains pays, la tendance à la réduction des effectifs de l'administration publique a conduit à sous-traiter les services de contrôle alimentaire au secteur privé. Cette solution implique donc la sous-traitance d'activités spécifiques de contrôle alimentaire telles que l'inspection et la surveillance auprès de prestataires privés.
[1] Codex Alimentarius (1997).
Système HACCP et directives pour son application. Annexe à CAC/RCP
1-1969 Rev.3 (1997). |