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CENTRE DE FORMATION PROFESSIONNELLE POUR LES MONITEURS DE PECHE DES EAUX CONTINENTALES AU MALI

par

P. Raimondo
responsable de la formation
Opération Pêche, Mopti
Service des Eaux et Forêts
Mali

1. BUT ET RECRUTEMENT DU CENTRE

Ce Centre est destiné à former des moniteurs de pêche fluviale qui seront chargés:

2. RENSEIGNEMENTS GENERAUX

2.1 Conditions d'admission

Le Centre est ouvert aux personnes âgées de 19 à 40 ans issues du milieu pêcheur et préalablement sélectionnées par l'équipe de Vulgarisation de l'Operation Pêche. Le nombre des places d'admission est limité à 30 personnes.

2.2 Présélection

Un examen de présélection est effectué pendant une durée d'une semaine, les meilleurs sont admis définitivement au Centre. Cet examen sert entre autre à assurer une certaine homogénéité du groupe des stagiaires admis au Centre.

Le jury d'examen est composé des responsables de la Direction de l'Opération Pêche. Le choix des futurs moniteurs est prononcé par le Directeur de l'Opération Pêche.

2.3 Durée et sanctions des études

Le stage a une durée de trois mois et quinze jours à temps complet (journée de travail de 6 heures: 8.00–12.00, 15.00–17.00) du lundi matin au samedi matin inclus. Il est sanctionné par un examen de fin d'étude. A la sortie de cet examen final les 21 meilleurs sont retenus pour être intégrés au sein de l'Opération Pêche au titre de moniteur de pêche.

3. LES MOYENS

3.1 Les moyens matériels

Le Centre dispose d'un petit équipement notamment:

3.2 Le personnel d'animation

Le personnel d'animation est composé de 10 animateurs dont 6 font partie de la Direction de l'Opération Pêche et 4 relèvent des services administratifs et techniques locaux, ceci dans le cadre d'une collaboration bénévole entre l'Opération Pêche et ces services.

3.3 Les moyens financiers

Logement et nourriture: Le régime du Centre est l'internat. Les stagiaires bénéficieront des sorties extérieures aux frais du Centre de Formation (voyages d'études).

Indemnités: Les stagiaires inscrits au Centre perçoivent une indemnité mensuelle pendant la durée du cycle de formation. Le montant de cette indemnité est fixé forfaitairement à Mal.F. 3 000/mois.

Salaire: Après leur formation, le salaire du moniteur au cours de son travail sur le terrain sera le suivant:

Primes: Des primes de rendement peuvent être accordées annuellement sur la base de 0 à 1 mois de salaire à chaque moniteur en fonction des résultats obtenus.

4. CONTENU ET ELABORATION DU PROGRAMME

L'apport de connaissances générales ou techniques acquises au cours du stage, doit permettre au futur moniteur de saisir les problèmes liés au développement de la zone où il aura à remplir ses fonctions.

Cet apport va se traduire par l'enseignement de certaines disciplines (pêche, mécanique, gestion, comptabilité, économie, hygiène, secourisme, administration, histoire, géographie), toutes ayant trait aux différents aspects de la vie du pêcheur. Ces disciplines sont regroupées en trois phases cohérentes suivant une certaine évolution chronologique:

première phase:La Pêche(1 mois et 15 jours)
deuxième phase:Le Village(1 mois)
troisième phase:La Région et l'Etat(20 jours)

Chaque phase est consacrée à l'étude des différentes matières à un même niveau de complexité.

La phase dont la durée est proportionnelle à son degré de complexité comporte normalement trois étapes:

  1. Une étape préparatoire en salle permettant de préciser les objectifs de la phase et de préparer les instruments, les notions et les connaissances nécessaires à l'étude.

  2. Une étape de découverte par enquête sur le terrain, permettant de rassembler les éléments concrets d'étude en même temps que d'expérimenter certaines techniques.

  3. Une étape de synthèse en salle, au cours de laquelle l'exploitation des résultats de la seconde étape facilitera l'approche des objectifs de la phase, en accédant à un certain degré de conceptualisation, à des notions assises sur des réalités et non pas seulement à un vocabulaire abstrait. Cette étape sera aussi l'occasion d'exercices d'expression écrite et orale.

On peut remarquer ainsi que chaque phase “englobe” les précédents; l'étude de la “Pêche” sera reprise à l'échelon “Village” sur le plan économique, démographique, sociologique, etc., comme les notions et techniques acquises au cours de la phase “Village” serviront de base à l'étude “Région et Etat”, etc. Mais ces fondements doivent être dépassés, englobés par l'étape suivante; les concepts et notions deviendront de plus en plus riches en même temps que plus généraux, et les techniques d'étude et d'expression seront à la fois plus perfectionnées et mieux assimilées.

5. REFLEXION PEDAGOGIQUE SUR LE CONTENU DU PROGRAMME

Au niveau du contenu de chaque phase du programme, trois types de démarche sont utilisés à des degrés divers:

5.1 Une première démarche réside surtout dans la conceptualisation des choses connues des stagiaires, vécues par eux tous les jours mais qui ne sont pas assez clarifiées et exprimées par des concepts bien élaborés (c'est le cas des notions économiques, démographiques, etc.).

5.2 Il y a ensuite les choses à savoir, les données, les chiffres, les faits qu'il faut apprendre et qui ne peuvent pas être découverts à partir d'une expérience antérieure.

5.3 Il y a enfin les techniques qu'il faut savoir utiliser pratiquement. Il s'agit moins d'une compréhension d'ordre intellectuel ou d'un effort de mémoire que d'un savoir-faire.

Il est évident que des méthodes pédagogiques différentes s'imposent pour chacune de ces trois catégories. Pour la première catégorie on utilisera essentiellement une méthode active (discussions dirigées, travaux de groupe) alors que pour la seconde on aura recours à une pédagogie de type plus traditionnel, c'est-à-dire un apport de connaissances. Pour la troisième catégorie, des exercices pratiques et un travail individuel ou par petites équipes s'imposent.

6. LES PRINCIPES PEDAGOGIQUES

Une méthode pédagogique implique des principes qu'il est bon de préciser, tant pour élaborer que pour appliquer une méthode convenant à une action pédagogique donnée. Ces principes pédagogiques auxquels on fera appel et qu'on présente ne constituent pas une innovation. Ils résultent d'expériences nombreuses et sont souvent cités ailleurs sous des formes diverses, particulièrement à propos de la pédagogie des adultes.

6.1 1er principe: Communication et participation

Le stage doit être dirigé, les stagiaires conduits vers les objectifs que l'on s'est fixés. Pour cela il est nécessaire d'obtenir certaines réactions des stagiaires à partir d'informations qui leur seront données concernant la direction à prendre, l'objet sur lequel doivent porter leurs efforts. En retour il est nécessaire que les enseignants reçoivent des stagiaires des informations concernant la direction qu'ils ont pris effectivement, l'objet réel de leurs efforts, de façon à pouvoir faire les corrections utiles et retrouver une ligne qui permette d'atteindre les objectifs.

En un mot, il s'agit d'établir un système de communication permanente entre enseignants et stagiaires, permettant de déterminer et mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour parvenir aux objectifs, ces derniers étant de mieux en mieux perçus et pris en charge par les stagiaires eux-mêmes. Ces moyens peuvent être des tests, des contrôles de connaissance et d'assimilation, des informations, des explications, des contrôles de motivations. L'application de ce principe dans la formation d'agents de Vulgarisation est particulièrement importante, car le rôle de ces agents sera d'établir des relations d'échange entre l'Opération Pêche et les collectivités des pêcheurs, d'assurer la participation de ces dernières à l'exécution du programme de développement.

6.2 2ème principe: Progression

Il s'agit là d'une règle pédagogique parmi les plus souvent citées, mais elle n'est que rarement appliquée, la tendance naturelle étant de suivre une démarche inverse.

Il faut suivre une démarche constructive qui permette progressivement une conceptualisation, une généralisation, faute de quoi les mots sont vides de sens et risquent de n'être que des jouets intellectuels. Progression du simple au complexe, du particulier au général, du “facile” au “difficile”. On ne construit pas en commençant par le sommet.

Si la démonstration déductive est souvent plus naturelle ou plus satisfaisante pour celui qui présente, elle peut faire illusion. La construction existe dans l'esprit de celui qui présente, mais ne peut passer en bloc, par la seule magie des mots, dans l'esprit de celui qui entend. Une démarche inductive est nécessaire chez ce dernier pour lui permettre de faire à son tour cette construction.

Le principe de la progression trouve également son application pour l'acquisition d'une technique, d'un savoir-faire.

6.3 3ème principe: Concrétisation

On ne peut apprendre à nager en chambre. Un contact avec l'“élément”, le milieu est nécessaire. Il faut pouvoir s'essayer, se familiariser avec le milieu. Il faudra donc s'efforcer de reconstituer le milieu, le contexte dans lequel les agents de Vulgarisation devront évoluer par la suite. Ces contacts avec le contexte réel de travail doivent permettre aux stagiaires non seulement d'essayer ce qu'ils ont appris, mais aussi de servir de points d'appui à la suite de leur formation. La référiences à des expériences vécues est en général indispensable.

6.4 4ème principe: Equilibre et alternance

On ne peut envisager une progression continue sur plusieurs mois sans que soient prévu des temps d'arrêt. Certains rythmes naturels doivent être respectés, et ceci est d'autant plus important qu'il s'agit d'adultes qui n'ont plus la faculté d'adaptation à n'importe quels rythmes.

Ces rythmes et ces arrêts pourront, soit, être prévus à l'avance, soit devront être déterminés en fonction des réactions du groupe, lequel doit pouvoir progresser de façon homogène.

Mais à cette notion de rythme il faut ajouter la notion d'alternance de modes de travail, travail en salle, travail sur le terrain, travail individuel/travail collectif.

A cela il faut inclure la notion de périodicité, avec une idée de recommencement, de renouvellement sans que cela doive nuire à la progression générale.

PROGRAMME DES COURS

Tableau résumé de répartition1

A.1ère phase: La Pêche (1 mois et 15 jours)  
(i)Le fleuve8heures 
(ii)Le poisson25"
(iii)La pêche40"
(iv)Les moteurs50"
(v)Comptabilité15"
(vi)Gestion23"
(vii)Economie12"
(viii)Hygiène et secourisme10"
 
B.2ème phase: Le Village (1 mois)  
(i)L'organisation du village4" 
(ii)Historique des ethnies de pêche6"
(iii)L'habitat et l'environnement4"
(iv)La vie économique du village20"
(v)Les techniques de conservation80"
(vi)Hygiène et santé du village10"

C.3ème phase: La Région et l'Etat (20 jours)  
(i)Les caractéristiques du Mali6heures 
(ii)Les royaumes4"
(iii)Depuis la colonisation6"
(iv)L'organisation administrative territoriale8"
(v)L'organisation administrative nationale6"
(vi)L'organisation de la santé3"
(vii)Le budget national5"
(viii)La pêche et l'économie de subsistance à l'économie du marché:  
(a)les circuits de distribution10"
(b)l'industrie de transformation de poisson frais25"
  TOTAL380heures

1 Les temps consacrés aux théories et pratiques d'animation, aux travaux pratiques engénéral, enquêtes, voyages d'études, etc., sont inclus dans ce tableau. Ils serontdéterminés par l'animateur suivant l'évolution d'une situation donnée

ETUDE DETAILLEE DU PROGRAMME

A.LA PECHE (première phase: 1 mois et 15 jours) 
ILES PLANS D'EAU 
(a)Définition- pluie
- vents
- amont
- aval
(b)Régime- débit
- crues
- décrues
IILE POISSON- le milieu
- nourriture du poisson
- reproduction
- migration
- classification
- fonction nutritionnelle du poisson
IIILA PECHE- les lieux de pêche
- choix des lieux
- les méthodes
- les limites de dépeuplement
- la législation de la pêche
- les pirogues
- les engins de pêche
IVLES MOTEURS- définition
- utilisation
- entretien
- montage
- démontage
VCOMPTABILITE- recettes
- dépenses
VIGESTION- notion d'amortissement
- notion de bénéfice
- le budget familial
VIIECONOMIE- revenu
- consommation
- épargne
VIIIHYGIENE ET SECOURISME- hygiène personnelle
- les maladies
- les soins
 
B.LE VILLAGE (deuxième phase: 1 mois) 
IL'ORGANISATION DU VILLAGE- la famille
- le conseil du village
IIHISTORIQUE DES ETHNIES DE PECHE- Bozo
- Somono
- Sonraï
IIIL'HABITAT ET L'ENVIRONNEMENT- forme de l'habitat
- localisation de l'habitat
IVLA VIE ECONOMIQUE DU VILLAGE- les activités
- la vente du poisson
- les échanges et la monnaie
- les relations avec les intermédiaires
- le crédit
- économie de subsistance et de marché
VLES TECHNIQUES DE CONSERVATION AU MALI- préparation
- séchage
- fumage
- désinsectisation
- stockage
- emballage
VIHYGIENE ET SANTE DU VILLAGE- hygiène alimentaire
- hygiène des maisons
- préventions
 
C.LA REGION ET L'ETAT (troisième phase: 20 jours) 
ILES CARACTERISTIQUES DU MALI- configuration
- étendue
- hydrographie
- population
- régions naturelles
- les pays limitrophes
IILES ROYAUMES- Ghana
- Bambara
- Sonraï
- Peulh
IIIDEPUIS LA COLONISATION- la période coloniale
- l'indépendance
- après l'indépendance
IVL'ORGANISATION ADMINISTRATIVE TERRITORIALE- région
- cercle
- arrondissement
- village
- fractions
VL'ORGANISATION ADMINISTRATIVE NATIONALE- l'état
- le gouvernement
- les ministères
- les opérations de développement
VIL'ORGANISATION DE LA SANTE- fonctions du service
- les structures nationales
- les structures régionales
VIILE BUDGET NATIONAL- les recettes publiques
- les dépenses publiques
VIIILA PECHE DE L'ECONOMIE DE SUBSISTANCE A L'ECONOMIE DU MARCHE
(a)Les circuits de distribution- séché
- fumé
- frais
(b)L'industrie de transformation de poisson frais 
- collecte
- stockage
- transformation
- vente

PEDAGOGIE DE LA FORMATION D'AGENTS DE VULGARISATION

par

P. Raimondo
responsable de la formation
Opération Pêche, Mopti
Service des Eaux et Forêts
Mali

1. INTRODUCTION

Problématiques et objectifs généraux de la formation

Il est relativement aisé de former des techniciens dans une branche précise, surtout lorsqu'il existe un milieu propre à aider; un enseignement de type classique sous forme d'apport de l'enseignant à l'enseigné peut à la rigeur suffire. Mais former des hommes en leur demandant parfois de renier leurs habitudes et leur coutumes apparaît comme beaucoup plus difficile. Ce n'est pas tant dans la fabrication d'un programme qui résident les difficultés, mais bien plutôt dans la définition des qualités à faire acquérir, c'est-a-dire dans l'explication des objectifs d'une véritable formation et dans la marche à accomplir.

Ces objectifs doivent être regroupés autour de deux exigences fondamentales:

2. SUSCITER L'ESPRIT DE CREATION ET D'INVENTION

L'Afrique étonne toujours par la puissance de son sens créateur dans bien des domaines et, en particulier, dans ceux des arts (musique, danse, sculpture, etc.) et des relations humaines; et si l'on parle actuellement de sous développement, c'est plutôt dans la vie économique et technique qu'il se situe.

L'Afrique n'a jamais inventé la roue, dit-on; et c'est constater par là-même que l'invention technique est toujours restée à un niveau extrêmement bas. Il semble surtout que les africains n'aient jamias su, ni peut-être voulu, dominer la nature environnante; d'où la faiblesse de leurs moyens pratiques et une mentalité plus tournée vers l'idée de survie, de défense, de tradition que vers celle de changement et de progrès.

L'ensemble des techniques pouvant permettre à un individu ou à un groupe de “s' en sortir” autrement qu'en survivant et en procréant pour perpétuer la race ou la tribu a surtout été un apport étranger plus ou moins bien assimilé, mais très peu intériorisé. Ce n'est pas seulement parce que les solutions européennes ne sont peut-être pas adaptées à la réalité africaine qu'on ne doit pas les donner toutes faites aux stagiaires, c'est surtout pour développer, dans toute la mesure du possible, le sens créateur, les facultés d'invention et d'imagination.

2.1 Créer

Faire des vulgarisateurs “des créateurs” apparaît l'objectif fondamental. Pour mener à bien cette tâche, il faut rechercher les méthodes pédagogiques adaptées, l'enseignement classique et magistral doit être écarté, l'intelligence, le sens de l'observation et l'imagination des stagiaires doivent être incessamment sollicités. Ces vulgarisateurs ayant à jouer un rôle précis et spécifique face à des populations, des instructions et des structures en mutation rapide, il faut essayer de les aider à s'adapter sans cesse.

Si l'on propose des techniques toutes faites pour résoudre toutes les questions, il apparaît tout naturel que les vulgarisateurs, prisonniers de schémas imposés (même excellents) sont incapables d'inventer les solutions qui correspondent véritablement aux situations qu'ils auraient à vivre.

A ce sujet la pédagogie dite “des tableaux enquêtes” pourrait être utilisée. Avant d'envoyer les stagiaires travailler sur le terrain et pour permettre de rapporter les meilleurs résultats on a le choix entre deux solutions:

Mais créer ne signifie pas forcément tout inventer. Cela peut aussi vouloir dire: adapter ce qui s'est fait ou se fait ailleurs. Il est bien évident que la construction d'instruments par les étudiants n'est pas seulement un but en soi, mais aussi un exercice. C'est en exigeant d'eux qu'ils découvrent ou redécouvrent, créent ou recréent sans cesse les choses qui sont parfois les plus évidentes pour les maîtres, qu'on les amènent peu à peu, non seulement à remettre en cause des opinions des faits, des solutions apportées par le “groupe” ou par les étrangers, mais encore à critiquer, à porter un jugement et enfin à proposer à leur tour des instruments et des idées capables de résoudre les problèmes posés par la nécessité du développement.

2.2 Observer et analyser

Pour amener les stagiaires à créer, il est important de commencer par les obliger à observer: les séjours sur les terrains doivent être orientés en priorité vers cet objectif. Les méthodes pédagogiques et les matières d'enseignement doivent être les moyens pour parvenir à l'observation objective et à l'analyse; réunion-discussion, enquête, construction de tableau avec critique mutuelle, appréciation permanente, évaluation, contrôle de connaissance, mathématiques et comptabilité, pêche, mécanique, etc.

L'emploi constant de ces méthodes et l'enseignement actif de matières à partir des réalités locales doit permettre peu à peu aux futurs vulgarisateurs de passer, par rapport à la nature et au milieu humain, de la position de dominés a celle de dominants. Ainsi graduellement on peut structurer des groupes nouveaux sur des fondements nouveaux outre que la famille, l'ethine ou la race.

2.3 Comparer

Ce n'est que lorsque le milieu est saisi et analysé dans sa totalité et sa globalité et quand sa compréhension est intériorisée par l'ensemble que l'on peut commencer a faire des comparaisons. En effet, la comparaison n'est possible que par rapport à ce que l'on connaît.

Or, l'enseignement a souvent tendance à considerer comme connues des choses qui en fait ne le sont pas. La comparaison se fait alors devant des spectateurs passifs qui n'ayant pas des points de repère puisqu'ils n'ont pas observé, ne participent en aucune manière au travail qui se fait et n'en profitent pas. Une fois assimilée la connaissance du milieu, l'enseignant peut apporter les termes de conservation du poisson locales sont bien observées, on peut montrer qu'il en existe d'autres et on les décrit de la façon la plus exacte possible. La comparaison alors se fait d'elle-même; et le jugement final, sur les possibilités d'adaptation au contexte local ou sur l'adoption pure et simple de méthodes nouvelles, appartient en propre aux intéressés.

2.4 La remise en cause des valeurs

Toutefois la comparaison comporte de grands risques. Si elle est mal conduite, elle peut se faire uniquement au détriment de ce qui existait antérieurement. Ceci est d'autant plus dangeureux que la plupart des intéressés sont pris dans une contradiction qu'ils vivent quotidiennement.

En face de cette contradiction, il est nécessaire de bien montrer que le développement appartient en propre aux intéressés et qu'il devra toujours leur appartenir, tant dans ses modes que dans ses objectifs. On doit pour cela, par une observation critique continuée leur faire découvrir les valeurs contenues dans les civilisations qui leur sont propres. C'est là un travail extrêmement délicat; mais s'il ne pouvait être mené à bien, on risquerait de créer des tensions graves chez des êtres qui n'auraient pas intériorisé les connaissances venant d'être acquises.

Pour réussir dans cette entreprise, il apparaît d'abord nécessaire de faire éclater, puis d'éclairer au grand jour la “contradiction” (au cours des réunions-discussions par exemple). Mais il faut surtout reconnaître une vérité fondamentale: l'enseignant est lui aussi enseignable, lui aussi a à apprendre des élèves. Il ne s'agit pas là seulement d'une attitude extérieure ou simplement pédagogique qui serait d'ailleurs rapidement ressentie par les élèves et rejettée parce qu'hypocrite.

Il s'agit d'un comportement profond signifiant une attente réelle. Une foi faite cette découverte des valeurs authentiques, il est de nouveau possible de montrer que dans ce domaine aussi il existe d'autres échelles de valeur. La comparaison se faisant, l'enrichissement est mutuel. Les relations enseignées changement de nature. L'enseignement plus proprement technique peut passer.

3. DONNER DES MOYENS D'AGIR EFFICACEMENT

Cependant cet esprit de création et d'invention ne pourra s'exercer que si, en même temps, sont donnés des moyens d'agir efficacement. Or ces moyens ne sont pas qu'apprentissage de technique; ils ont aussi découvert de réalités profondes et entraînement à de nouvelles habitudes de pensée.

3.1 Sens des causalités

Enchaîner les phénomènes les uns aux autres, montrer les causes et les conséquences d'un événement, chiffrer, compter, calculer, mesurer sont autant de manières de parvenir à la découverte d'une certaine objectivité. Il faut obliger les intéressés à enchaîner les phénomènes les uns aux autres avant même de porter un jugement subjectif sur chacun d'eux.

Peu d'élèves voient, une quelconque relation entre production d'une part, et consommation d'autre part. Toutefois il faut se méfier particulièrement de l'explication abstraite. Les enseignants doivent se sentir obligés de “se référer” sans cesse aux réalités et à faire partir toutes leurs explications de faits concrètement observés durant les divers séjours sur le terrain, de plus, l'exposé de théories et de principes doit toujours trouver sa source dans la vie quotidienne.

3.2 Le sens des responsabilités

C'est probablement l'attente de solutions trouvées par d'autres et surtout par des gens hiérarchiquement supérieurs (la valeur “hiérarchie” est l'une des plus importantes) qui fait que la notion de responsabilité tant personnelle que collective est si peu développée. On ne peut pas dire pour autant qu'il n'existe pas une certaine ambition personnelle, mais celle-ci est le plus souvent liée à la possession des biens et des choses qu'à l'idée de gouverner des hommes et d'en être responsables.

On aurait beaucoup de difficultés si l'on voulait, dès le début du stage, faire prendre conscience aux intéressés de la notion de responsabilité. Plus sagement, il faudrait mettre l'accent sur elle vers la fin du stage.

Grâce à la réunion-discussion, une des méthodes privilégiées de la pédagogie active, on peut poser toute une série de questions pour y parvenir.

Ainsi on peut faire découvrir le problème de la conservation du poisson de l'hygiène, de la malnutrition, etc. et faire découvrir que d'importantes résolutions et réformes s'imposent dans ces domaines en demandant ce que chacun peut faire concrètement, soit personnellement, soit dans la famille pour résoudre les problèmes. Il est important que chacun se pose correctement le problème de sa responsabilité en attendant de pouvoir le résoudre. Ceci n'est qu'un exemple parmi d'autres, la fin du stage doit être consacrée, dans toutes les branches y compris les plus techniques, à des exercices de ce genre.

3.3 Le risque

L'idée de “prendre des responsabilités” est liée évidemment à celle de “prendre des risques”. Or, sécurisés par le groupe, les Africains doivent faire des efforts considérables pour oser en prendre. D'ailleurs accepter l'idée de risquer c'est déjà vouloir innover.

La rémunération du risque, les bénéfices tirés d'une innovation, ne sont pas seulement d'ordre économique, mais se situent aussi au niveau d'un “plus-être” social (épanouissement de la personne, amélioration sociale).

3.4 La technique

Les responsables du stage doivent s'efforcer de faire découvrir la technique à partir des choses vues et quotidiennement vécues, et en la replaçant il serait bon de la présenter comme créatrice de richesses nouvelles, comme moyen et non comme but en soi. En même temps il est utile d'en décrire les limites pour éviter qu'elle n'apparaisse comme la panacée universelle. La technique doit être comprise comme le résultat d'une volonté de progrès et comme le support de cette volonté.

3.5 Les formateurs (animateurs)

Définir une formation valable et un type d'hommes à former entraîne de faire la description du formateur, de sa silhouette. Deux qualités apparaissent essentielles.

Si le formateur est véritablement au service de ceux qu'il forme - et pas seulement au sens normal du terme - et s'il leur laisse une grande liberté créatrice, il peut alors être certain de leurs qualités humaines et techniques.

MEMENTO DE L'ANIMATEUR

par

P. Raimondo
responsable de la formation
Opération Pêche, Mopti
Service des Eaux et Forêts
Mali

1. LE CALENDRIER

Bien que certaines dates seront sujettes à modifications il est bon dès le départ de se fixer des points de repères:

(a)- ouverture officielle du stage:le 21 janvier 1974
- examens:du lundi 29 avril au samedi 4 mai 1974
- clôture:le 9 mai 1974
 
(b)- début de la 1ère phase:le 22 janvier 1974
- fin de la 1ère phase:le 8 mars 1974 (1ère Notation)
- début de la 2ème phase:le 11 mars 1974
- fin de la 2ème phase:le 6 avril 1974 (2ème Notation)
- début de la 3ème phase:le 8 avril 1974
- fin de la 3ème phase:le 27 avril 1974 (3ème Notation)
 
(c)stages des élèves sur le terrain auprès d'un moniteur:du samedi 9 au samedi 23/3/74

2. ORGANISATION DE L'EQUIPE D'ANIMATION

2.1 Méthodes d'enseignement

Trois méthodes d'enseignement seront utilisées pour la 2ème promotion des moniteurs:

  1. Cours didactiques

    Le cours est préparé par l'animateur et devra être diffusé à l'avance (polycopies) aux élèves. Ces derniers feront l'exposition du contenu du cours, l'animateur intervenant au besoin.

  2. Discussion dirigée

    Le cours se fait à partir des connaissances des élèves et construit par eux-mêmes avec l'aide de l'animateur.

  3. Exercices pratiques

    Les cours se feront sur la base de démonstrations pratiques tout en sollicitant en permanence l'intérêt des élèves.

La répartition des cours convenant aux différentes méthodes peut s'établir de la façon suivante:

PhasesCours didactiquesDiscussions dirigéesExercices pratiques
1èreLe fleuveLa pêcheLe moteur
Le poissonComptabilitéGestion
EconomieEconomie
Hygiène et Secourisme
2èmeHistoriques des ethnies de pêcheL'organisation du village
Techniques de pêche
 
L'habitat et l'environnement
Techn. conser.
 
La vie économique du village
Hygiène et santé du village
3èmeLes caractéristiques du Mali
Les circuits de distribution
L'Industrie de transformation de poisson frais
Les royaumes
Depuis la colonisation
L'Org. adm. terr.
L'Org. adm. nation
L'Org. adm. de la santé
Total/heures consacrées 80 heures 97 heures183 heures

2.2 Répartition des tâches

La répartition de responsabilités générales porte essentiellement sur certaines rubrique des matières à enseigner. Du tableau ci-dessous établi chaque animateur peut avoir une situation exacte de ses fonctions:

AnimateurSujet d'enseignementNombre heures/sujet
Dembele, OumarLe fleuve8heures 
Historique des ethnies de pêche6heures
L'habitat et l'environnement4heures
Les caractéristiques du Mali6heures
Les royaumes4heures
Depuis la colonisation6heures
  36heures
 
Guindo, AndioroHygiène personnelle - Maladies3heures 
Hygiène et santé du village6heures
L'organisation de la santé3heures
  12heures
 
Sanogo, MamadouSecourisme11heures 
 
Koreysi, MamadouL'organisation adm. territoriale8heures 
L'organisation adm. nationale6heures
  14heures
 
Desvignes, M.Les moteurs50heures 
 
Janin, P.Comptabilité15heures 
Gestion23heures
Economie12heures
  50heures
 
Raimondo, P.
(S. Dienepo)
Les techniques de conservation70heures 
La vie économique du village20heures
L'organisation du village4heures
  94heures
 
Traore, Bourema
Les techniques de conservation
(conditionnement)
10heures 
 
Konare, Alassane
(T. Coulibaly)
(B. Traore)
Le poisson25heures 
La pêche40heures
Le budget national5heures
  70heures
 
Poguy, J.
(A. Szabo)
Les circuits de distribution10heures 
L'industrie de transformation de poisson frais25heures
  35heures
 TOTAL GENERAL380heures
     

2.3 Réunions

Parallèlement à la répartition des tâches, il est utile de prévoir à l'avance certaines réunions de travail du corps enseignant. Ces réunions devront porter sur le contrôle des connaissances, sur le déroulement opérationnel et la préparation des opérations ultérieures.

Pour cela on peut prévoir les réunions suivantes:

- le 15 janvier 1974:ponctualisation des objectifs du stage
- le 9 février 1974:bilan de la 1ère étape
- le 24 février 1974:bilan de la 2ème étape
- le 7 mars 1974:résultats de la 1ère phase.Mise au point du carnet de stage
- le 5 avril 1974:résultats de la 2ème phase.Analyse du stage sur le terrain
- le 26 avril 1974:résultats de la 3ème phase.Synthèse finale. Préparation des examens

3. HORAIRES ET EMPLOI DU TEMPS

Compte tenu des méthodes à suivre et de la variété des techniques à mettre en oeuvre les horaires seront sujets à révision constante.

Il convient cependant de fixer pour la première phase de travail l'horaire précis de chaque journée, qui sera en général indiqué aux stagiaires la veille.

REFLEXIONS SUR L'ORGANISATION DE L'INDUSTRIE DE LA PECHE AU MALI

par

A. Szabo
Expert FAO

1. DONNEES DE BASE

Le développement de la pêche au Mali est décidée et trois tâches s'imposent à ce projet: recruter et entraîner le personnel, préparer le matériel et organiser le programme à suivre; il faut aussi retenir que les éléments suivants: collecte, conservation, commercialisation sont étroitement liés.

En assurant la continuité régulière de la collecte, on renforce le ravitaillement en matières premières de l'industrie de transformation et on donne une chance de survie et de progrès pour le projet et pour les hommes qui poursuivent le travail de développement et de sécurité financière de l'usine de transformation. Et si l'industrie de transformation est assurée tout au long de l'année grâce à une activité continue, les problèmes liés à la discipline et aux connaissances techniques du personnel travaillant dans ce domaine se résoudront aisément.

En assurant un approvisionnement régulier des marchés par la production ininterrompue de l'industrie de transformation, on peut gagner la confiance de la clientèle locale ou étrangère, et assurer ainsi l'insertion des produits maliens de la pêche dans le circuit international du commerce.

En ce qui concerne la collecte, il faut implanter en différents endroits du fleuve, des points de ramassage et de préparation des produits de base frais, salés, pour leur acheminement vers l'usine de Mopti. De même convient-il d'effectuer des études pour l'implantation d'une section de fabrication d'autolysat de poisson (genre Nuoc-Mam) pour valoriser les poissons de moindre valeur. Pour ce qui est de la conservation et de la transformation, étant donné les difficultés rencontrées dans la commercialisation des produits de la pêche et le temps assez long que nécessite l'organisation d'un bon système de commercialisation qui mette les produits à la portée du pouvoir d'achat de la population, les propositions suivantes sont formulées:

  1. la première phase d'activité de l'usine doit être réorientée vers l'exportation, étant donné que les produits réalisés jusqu'à ce jour sont appréciés et de qualité; en conséquence les possibilités immédiates de leur valorisation seront assurées.

  2. la première condition de la réussite est l'implantation d'une chaîne de froid, comportant une installation de congélation, pour pouvoir arriver à un travail soutenu, systématique et continu de l'usine.

  3. parallèlement à l'exportation, il sera nécessaire d'organiser la distribution des poissons congelés bon marché, par camion boutique frigorifique entre Mopti et Bamako.

Il est impératif que le prix de détail de ce poisson soit inférieur à celui de la viande pour pouvoir atteindre une clientèle à faibles revenus. Dans les villes d'importance majeure, un magasin disposant d'un minimum d'équipement compatible avec le chiffre d'affaire devra être créé suivant les critères d'une poissonnerie moderne.

Il convient de remarquer que la commercialisation des produits alimentaires se fait par petites unités, que le peu d'élasticité entre l'offre et la demande se trouve faussé par la multiciplité des intermédiaires depuis le milieu rural jusqu'à la vente en ville. Il se produit des fluctuations des prix et un coût de l'alimentation traditionnelle en milieu urbain sans aucune commune mesure avec les prix payés au producteur. Quant au poisson, cette compression de prix est encore accentuée par la compétition avec la viande, relativement abondante et bon marché.

2. CONSERVATION

Pour essayer d'équilibrer les carences alimentaires des populations et d'augmenter l'apport protéique à la ville, comme à la campagne, l'Opération pêche, en collaboration avec l'expert du projet FAO, a créé à Mopti une station de traitement et de transformation du poisson et a comme but ultérieur d'organiser la commercialisation des produits en provenance de la station.

Cette dernière est nécessaire comme moyen d'éducation, de formation du personnel et pour l'étude du développement de l'industrie nationale de la pêche malienne. Il faut encourager par tous les moyens le développement de la petite industrie dans le pays parce que:

  1. elle est un moyen efficace de stimuler l'esprit d'entreprise local;

  2. elle permet de former les artisans traditionnels à des techniques nouvelles, qui répondent aux besoins de l'économie moderne;

  3. elle aide à résoudre le problème du chômage;

  4. elle lutte pour résoudre la pénurie de ressources financières et de main-d'oeuvre qualifiée, le manque de connaissances techniques et administratives et l'étroitesse des débouchés.

On a choisi comme siège de l'industrie de la pêche la ville de Mopti, en raison:

  1. de la présence de l'Opération Pêche avec son personnel et des installations;

  2. de la situation de la pêche qui présente beaucoup d'analogies avec celle des autres régions;

  3. l'abondance locale de nombreuses espèces de poisson;

  4. de ce que Mopti est un centre important pour la consommation et l'exportation, qui possède des moyens de communication vers l'extérieur et l'intérieur du pays: routes, navigation, voie aérienne.

Dans la station d'industrialisation on procède à des essais de diversification des produits à base de poisson:

Fumage:

filets fumés entiers à la manière “Delicatessen”
tranches de Lates niloticus “faux saumon” en sachets plastiques
saucisses à base de poissons non commercialisables

Conserverie:

mise en boîte et stérilisés à la manière du thon ou de la sardine, au naturel, à l'huile ou en sauce.

Soupes:

des essais de production des concentrés pour la fabrication de soupes de poissons et bisque en boîte seront faits pour expédition en boîte ou congelé. Ce concentré, dont le débouché à l'exportation est sûr, peut être écoulé dans les usines pour la fabrication de soupes (cubes et en boîtes stérilisées).

Autolysats:

en collaboration avec l'usine FINUMA d'Abidjan, on procédera à des essais de transformation des poissons non utilisables dans le cadre de la commercialisation classique des produits de la pêche; par conséquent les pêcheurs seront habitués à livrer toute leur pêche à l'usine de Mopti.

Concentrés de protéines:

des granulés de poisson, contenant 67 pourcent de protéine animale, seront utilisés pour les sauces ou de soupe pour les régions où le poisson pénètre avec difficulté, ainsi que pour la lutte contre la malnutrition des enfants et des vieillards.

Il est à présumer que la fabrication des conserves en boîte, destinées au marché intérieur, n'occupera qu'une place assez secondaire dans l'industrie du pays tant que l'on ne parviendra pas à exploiter et à commercialiser certaines catégories de poissons de faible valeur unitaire. Si dans l'ensemble du monde, le poisson n'apporte qu'une contribution relativement modeste aux régimes alimentaires, il constitue au Mali, une source importante de protéines animales et occupe une place considérable dans le régime alimentaire de la population.

3. PROBLEMES DE PERSONNEL

L'insuffisance des compétences constitue un problème sérieux qui présente deux aspects: la difficulté de trouver des employés ayant la formation et l'expérience exigées pour une tâche déterminée et le manque de formation et d'expérience du chef d'entreprise.

L'habilité, le sens commun et “une tête solide pour les affaires” peuvent souvent suppléer le manque d'instruction ou de formation officielle, en matière de techniques de gestion et de méthode de traitement des affaires.

Néanmoins, il reste toujours vrai que les qualifications directoriales insuffisantes sont la cause d'une grande part d'inefficacité et de gaspillage dans les activités économiques.

4. COMMERCIALISATION

L'importance de la forme d'entreprise coopérative est reconnue. Si l'on veut utiliser de la manière la plus efficace cette forme d'activité économique très appropriée aux valeurs et besoins de l'Afrique, il est nécessaire de consacrer des efforts à développer et améliorer les coopératives. L'une des questions fondamentales qui détermine la politique à suivre pour améliorer la commercialisation est celle de savoir dans quelle mesure l'Etat doit intervenir directement dans ce domaine et dans quelle mesure il devrait chercher à encourager la constitution de coopératives, de sociétés privées ou d'entreprises mixtes.

Généralement le choix reste ouvert entre les formes très diverses d'organisation, les facteurs essentiels étant l'efficience et la contribution au développement.

Pour les denrées périssables, difficiles à classer ou qui nécessitent un effort particulier de promotion sur les marchés mondiaux où elles rencontrent une vive concurrence, l'initiative reste principalement à l'entreprise privée.

L'expansion future des exportations dépendra beaucoup de la capacité du pays à mettre sur pied des types d'entreprises adaptées aux exigences de ce secteur.

Un problème important qui se pose avec persistance à propos du développement de la pêche au Mali consiste à établir une liasion effective entre le petit producteur et les grands circuits de commercialisation. Le développement des coopératives est l'un des moyens logique d'améliorer la situation. Certes, il faut du temps pour qu'une coopérative puisse acquérir l'expérience voulue, parce que le développement harmonieux de ces organismes exclut la précipitation; le mouvement doit progressivement s'intégrer dans la structure sociale et acquérir peu à peu du dynamisme et des traditions.

Les pouvoirs publics peuvent désirer renforcer le contrôle central sur l'économie nationale pour que les ressources puissent être plus efficacement orientées vers des programmes de développement accéléré. Un office de commercialisation pourrait réduire les difficultés de mise en oeuvre de la politique gouvernementale et d'administration qui se poseraient si le commerce était laissé entièrement aux mains de l'entreprise privée. Cette solution comporterait en effet l'avantage de faciliter l'application des politiques des prix, la perception des recettes fiscales, le contrôle de change et des bénéfices commerciaux. Dans le domaine du commerce extérieur, une autre considération économique peut entrer en jeu, à savoir une offre nationale unifiée sur les marchés étrangers qui peut écouler chaque année un volume important des produits intérieurs.

Le but principal d'un tel office serait essentiellement d'améliorer la situation économique des producteurs, de développer la production dans son ensemble, de protéger le consommateur et d'accroître les revenus dans l'exportation.

Les autres objectifs pourraient être:

de se procurer des fonds pour la promotion des ventes, la recherche et la vulgarisation;

d'améliorer l'organisation et les méthodes de la commercialisation en normalisant les qualités et les emballages;

d'augmenter le volume des opérations en fournissant toutes les installations nécessaires à la commercialisation et à la transformation;

de protéger les producteurs et les consommateurs des conséquences des brusques fluctuations des prix intérieurs ou extérieurs.

5. CONCLUSION

Dans le contexte de l'économie du Mali, prise dans son ensemble, le rôle joué par le secteur pêche va grandissant.

On ne peut négliger ni ne pas encourager un secteur représentant un chiffre d'affaires annuel de centaines de millions de francs maliens. Il ne convient donc ni aux pouvoirs publics ni aux intéressés d'abandonner la voie suivie jusqu'ici. Ce secteur ne pourrait que ressentir mortellement, matériellement et psychologiquement parlant, une politique qui ne constituerait pas un encouragement. On a pris toute une série d'initiatives collatérales telles que chantiers navals, atelier de mécanique et entretien, centre de formation, aménagements, équipement. Tout cela transforme au fur et à mesure en zones d'expansion commerciales et de progrès social de petits et moyens centres de pêcheurs qui, jusque là, stagnaient souvent dans des conditions d'extrême pauvreté.

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