Nouveau coronavirus (COVID-19)

La pandémie actuelle menace à la fois des vies et des moyens d’existence.

Si, dans certains pays, la circulation du virus ralentit et le nombre de cas diminue, dans d’autres, la covid-19 connaît une recrudescence ou continue de se propager rapidement. Cette épidémie demeure un problème mondial auquel il convient d’apporter une solution mondiale.

Nous devons prendre des mesures immédiates, sans quoi nous risquons d’être confrontés à une crise alimentaire mondiale qui pourrait avoir des conséquences à long terme pour des centaines de millions d’enfants et d’adultes.

En effet, la perte de revenus, la baisse des transferts de fonds et, dans certains contextes, la hausse des prix des denrées alimentaires entravent l’accès aux aliments. Dans les pays où l’insécurité alimentaire aiguë est déjà très présente, il ne s’agit plus seulement d’une question d’accès aux denrées alimentaires mais aussi, et ce de plus en plus, d’une question de production alimentaire.

La covid-19 a frappé à un moment où la faim et la malnutrition ne cessaient de progresser. Selon les dernières estimations des Nations Unies, au moins 83 millions de personnes supplémentaires, et peut-être même jusqu’à 132 millions, pourraient souffrir de la faim en 2020 du fait de la récession économique causée par la pandémie.

Elles viendraient s’ajouter aux 690 millions de personnes qui se trouvent déjà dans cette situation. En outre, 135 millions de personnes, en proie à l’insécurité alimentaire aiguë, ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence.

La faim et la sous-alimentation chronique découlent de l’impossibilité de satisfaire ses besoins alimentaires, autrement dit de consommer suffisamment de calories pour mener une vie normale et active, sur une période prolongée. Cette impossibilité a des répercussions à long terme pour ces personnes et continue de freiner les efforts mondiaux visant à réaliser l’objectif «Faim zéro». Lorsque l’insécurité alimentaire aiguë atteint un niveau de crise, cela signifie que des crises soudaines et sporadiques limitent l’accès aux aliments à court terme, ce qui peut mettre en péril la vie et les moyens d’existence des personnes concernées. Cependant, si ces personnes obtiennent l’aide dont elles ont besoin, elles n’iront pas gonfler les rangs de celles qui souffrent de la faim et leur situation ne deviendra pas chronique.

De toute évidence, il y a suffisamment de nourriture pour tous à l’échelle mondiale, mais de trop nombreuses personnes souffrent encore de la faim. Nos systèmes alimentaires sont défaillants, et la pandémie ne fait qu’aggraver la situation.

D’après la Banque mondiale, les retombées économiques de la covid-19 pourraient entraîner environ 100 millions de personnes dans la pauvreté extrême.

La montée en flèche du taux de chômage, la perte de revenus et la hausse du coût de la nourriture compromettent l’accès aux aliments, tant dans les pays développés que dans les pays en développement, et auront des effets à long terme sur la sécurité alimentaire.

De plus, la pandémie risque de plonger les économies nationales dans la récession. Par conséquent, les pays doivent prendre de toute urgence des mesures destinées à atténuer les répercussions à plus long terme sur les systèmes alimentaires et la sécurité alimentaire.

Cette année, il se peut que les producteurs soient obligés de renoncer à leurs activités de plantation habituelles, ou tout du moins qu’ils soient contraints de les réduire considérablement, ce qui suscite de vives inquiétudes. Si nous ne leur venons pas en aide, cela se traduira par un déficit alimentaire en 2020 mais aussi en 2021.

Il est tout aussi urgent de contrer l’effet aggravant de la pandémie sur les crises en cours – conflits, catastrophes naturelles, changement climatique, organismes nuisibles et maladies animales – qui placent déjà nos systèmes alimentaires en situation de stress et contribuent à l’insécurité alimentaire dans le monde.

De récentes analyses réalisées au moyen du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) mettent en évidence une accentuation inquiétante de l’insécurité alimentaire aiguë dans les pays qui sont également en proie à d’autres types de crises.

Pour éviter une crise alimentaire, il faut, de toute urgence: protéger les plus vulnérables, maintenir en fonctionnement les chaînes d’approvisionnement alimentaire mondiales, atténuer les effets de la pandémie dans l’ensemble du système alimentaire, préserver et même accroître la production alimentaire autant que possible, et envisager l’avenir après la pandémie, afin de reconstruire des systèmes alimentaires plus efficaces et plus résilients.

La FAO est convaincue qu’il existe de nombreuses solutions permettant de faire en sorte que des personnes actuellement dans une situation critique ne soient plus sur la corde raide.

Selon les dernières estimations des Nations Unies (rapport sur L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2020), près de 690 millions de personnes ont souffert de la faim en 2019, soit une augmentation de 10 millions par rapport à 2018 et de près de 60 millions en cinq ans. En raison des coûts élevés et de la faiblesse de leurs moyens financiers, des milliards de personnes ne peuvent adopter une alimentation saine et nutritive.

Le rapport indique que, à l’échelle de la planète, la pandémie de covid-19 pourrait faire basculer jusqu’à 132 millions de personnes supplémentaires dans une situation de faim chronique d’ici à la fin de 2020.

Par ailleurs, à la fin de 2019, 135 millions de personnes dans 55 pays et territoires souffraient de l’insécurité alimentaire aiguë à un niveau de crise, d’après le Rapport mondial sur les crises alimentaires 2020, publié en avril. De plus, 75 millions d’enfants présentaient un retard de croissance et 17 millions une émaciation en 2019. Ces chiffres sont les plus hauts jamais atteints s’agissant de l’insécurité alimentaire aiguë et de la malnutrition à un niveau de crise depuis la première édition du rapport, en 2017.

Plus récemment, en juillet 2020, la FAO et le Programme alimentaire mondial (PAM) ont réalisé une analyse qui a mis en évidence 27 pays – aucune région du monde n’est épargnée – actuellement au bord d’une crise alimentaire due à la covid-19, qui s’explique par le fait que les répercussions de la pandémie aggravent les causes préexistantes de la faim.

Le rapport d’analyse indique que, pour ces pays «à risque», la probabilité est grande – et parfois déjà réelle – de subir une forte dégradation de la sécurité alimentaire dans les mois à venir, y compris une augmentation du nombre de personnes qui se trouveraient ainsi en situation d’insécurité alimentaire aiguë.

C’est la raison pour laquelle la FAO s’inquiète particulièrement des effets de la pandémie sur les populations vulnérables déjà aux prises avec la faim ou d’autres crises – l’invasion de criquets pèlerins dans la Corne de l’Afrique et au-delà, les chocs et l’insécurité économiques au Yémen et au Sahel, par exemple –, ainsi que dans les pays qui sont fortement tributaires des importations alimentaires, comme les petits États insulaires en développement, et dans ceux qui dépendent de leurs exportations de produits de base, tels que le pétrole.

Au Soudan, par exemple, le nombre de personnes souffrant de l’insécurité alimentaire aiguë à un niveau de crise ou pire a été estimé à 9,6 millions pour la période juillet-septembre 2020, ce qui correspond au chiffre le plus élevé jamais enregistré dans ce pays (prévisions IPC – juin-décembre 2020).

En Somalie, le nombre de personnes en situation de crise ou au-delà devrait tripler par rapport aux estimations réalisées avant l’apparition de la covid-19 (Groupe d’évaluation de la sécurité alimentaire et de la nutrition, mai 2020).

En Afghanistan, 13,2 millions de personnes souffrent de l’insécurité alimentaire aiguë (IPC 3 et 4), ce qui représente une hausse d’environ un million depuis le début de l’application des mesures prises pour faire face à la covid-19 (prévisions IPC – mai-novembre 2020).

En outre, les pays qui dépendent fortement de leurs exportations de produits de base (denrées alimentaires, matières premières, combustibles) sont confrontés à une réduction considérable de la demande émanant des pays développés, et continueront de l’être. Les pays d’Afrique, dans l’impossibilité d’exporter leurs produits (pétrole ou coton, par exemple), vont continuer de voir leurs recettes diminuer. Par ailleurs, la situation est particulièrement difficile pour les petits pays et territoires insulaires car les activités touristiques, qui constituent leur principale source de revenus, sont à l’arrêt et continueront de l’être, ou tout du moins seront considérablement ralenties tant qu’il n’existera pas de vaccin ni de traitement. À cela s’ajoute le fait que beaucoup de petits pays et territoires insulaires sont dépendants des exportations de pétrole. Ils sont également tributaires des transferts de fonds, qui ont été réduits de 20 pour cent, sont exposés à des chocs climatiques et ne peuvent se dispenser d’importer des denrées alimentaires.

Parmi les groupes vulnérables, citons les petits agriculteurs, les travailleurs migrants et les travailleurs informels, les pasteurs et les pêcheurs, que la pandémie peut empêcher de cultiver, de s’occuper des animaux ou de pêcher. Il leur sera également difficile d’accéder aux marchés pour vendre leurs produits ou acheter des intrants essentiels. De plus, la hausse des prix des denrées alimentaires et leur pouvoir d’achat limité ne feront qu’ajouter à leurs problèmes. Les ouvriers informels qui travaillaient dans les secteurs de la récolte et de la transformation ont été touchés de plein fouet: beaucoup ont perdu une partie de leurs revenus, voire leur emploi.

Par ailleurs, des millions d’enfants ne peuvent plus bénéficier des repas scolaires sur lesquels ils comptaient et beaucoup d’entre eux n’ont plus accès aux programmes publics de protection sociale, y compris l’assurance maladie.

Outre celles qui concernent l’agriculture, d’autres répercussions sectorielles sont attendues. Prenons l’exemple du poisson, qui fournit plus de 20 pour cent des apports moyens en protéines animales par personne à trois milliards de personnes, et même plus de 50 pour cent dans certains pays moins avancés. C’est l’un des produits alimentaires de base les plus échangés dans le monde. Par conséquent, l’incidence sur les moyens d’existence des communautés de pêcheurs, la sécurité alimentaire, la nutrition et le commerce, en particulier dans ces pays, qui sont fortement dépendants du secteur de la pêche, devrait être considérable.

Les pays en développement courent un risque particulièrement élevé étant donné que la covid-19 peut entraîner une réduction de la main-d’œuvre et avoir des conséquences sur les revenus et les moyens d’existence, ainsi que sur les activités de production à forte intensité de main-d’œuvre (agriculture, pêche/aquaculture). L’Afrique subsaharienne, en particulier, suscite des préoccupations. En effet, la plupart des pays en proie à une crise alimentaire se situent dans cette sous-région et la pandémie s’y propage à un moment crucial tant pour les agriculteurs que pour les éleveurs, où ceux-ci ont besoin de se procurer des semences et d’autres intrants et de se rendre sur leurs exploitations pour mener leurs activités de plantation.

Une filière d’approvisionnement alimentaire est un réseau complexe qui se compose de divers éléments: producteurs, consommateurs, intrants destinés à l’agriculture ou à la pêche, transformation et stockage, transport et commercialisation, etc.

Dès le début de la crise, les chaînes d’approvisionnement alimentaire se sont tendues car de nombreux pays ont imposé des restrictions quant aux entrées et sorties de biens et de personnes aux frontières nationales et à la circulation des biens et des personnes sur leur territoire. Par conséquent, l’enjeu n’était pas la disponibilité des aliments mais leur accessibilité.

Ensuite, face à toutes les incertitudes relatives aux approvisionnements alimentaires, certains pays ont limité les exportations de denrées alimentaires, ce qui n’a fait que rendre la situation encore plus difficile.

Ces mesures protectionnistes ont été prises en partie pour éviter une augmentation des prix intérieurs des denrées alimentaires. En effet, compte tenu de l’affaiblissement des monnaies nationales, il devenait plus avantageux pour les producteurs d’aliments d’exporter plutôt que de vendre sur le marché domestique. L’inflation des prix alimentaires qui en aurait découlé aurait pu avoir de lourdes conséquences, à savoir des troubles sociaux et politiques et l’aggravation de la pauvreté.

Heureusement, l’excès de protectionnisme a été évité et nombre des restrictions instaurées ont finalement été levées, les pays adoptant globalement une approche raisonnable et modérée.

Au niveau mondial, les approvisionnements alimentaires sont suffisants et les marchés s’avèrent stables pour le moment. Les stocks mondiaux de céréales, par exemple, se situent à un niveau confortable et les perspectives pour 2020 concernant le blé et les autres principales céréales de base sont positives.

Néanmoins, les filières d’approvisionnement demeurent soumises à des perturbations, les situations sont contrastées et de nombreuses inconnues demeurent.

Production alimentaire:

Bien que la probabilité d’une réduction de la production de denrées de base à forte valeur (fruits et légumes) se dessine déjà nettement, cette diminution n’est pas encore perceptible en raison des mesures de confinement et des perturbations des chaînes de valeur.

Dans les pays déjà en proie à d’autres crises, la FAO mène actuellement des enquêtes sur le terrain qui semblent indiquer que les petits producteurs sont confrontés à des difficultés grandissantes pour ce qui est de l’accès aux intrants – semences et engrais, notamment – du fait de la hausse des prix de ces produits, de la chute des revenus des ménages et/ou de la disponibilité insuffisante de ces intrants sur les marchés.

Nous ne savons pas encore quelle sera l’ampleur de ces répercussions sur la production nationale. Néanmoins, en Afghanistan notamment, une enquête menée par la FAO en collaboration avec le gouvernement tend à prévoir une baisse de plus de 50 pour cent de la production de certaines denrées alimentaires (céréales, fruits, légumes et produits laitiers, entre autres) cette année. Plus de 1 300 personnes, dans 18 provinces d’Afghanistan, ont participé à l’enquête: agriculteurs, négociants, transformateurs/propriétaires d’usines et spécialistes de l’agriculture.

Le recul de la production alimentaire pourrait avoir de graves incidences sur les disponibilités alimentaires. Si la plantation est limitée, la récolte le sera aussi. Au bout du compte, les familles d’agriculteurs, qui font souvent partie des groupes de population qui souffrent le plus cruellement de l’insécurité alimentaire, et leurs communautés n’auront pas accès à des aliments nutritifs en quantité suffisante.

Pêche et aquaculture:

Dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture, les conséquences sont variables et peuvent être assez complexes. S’agissant de la pêche de capture sauvage, le fait que des navires de pêche soient à l’arrêt (en raison de la contraction ou de l’effondrement des marchés ainsi que des mesures sanitaires, difficiles à appliquer à bord d’un bateau) peut engendrer un effet domino qui se ferait sentir tout au long des chaînes de valeur, tant au niveau de l’offre en général que de la disponibilité de certaines espèces. En outre, dans le secteur de la pêche de capture sauvage et de l’aquaculture, des problèmes logistiques liés aux restrictions imposées aux transports, les fermetures de frontières et la demande moindre émanant des restaurants et des hôtels peuvent entraîner de profonds changements sur les marchés, qui se répercuteraient sur les prix.

Élevage:

Le secteur de l’élevage subit lui aussi les effets de la pandémie, étant donné que l’accès aux aliments pour animaux est réduit et que les capacités des abattoirs sont moindres (en raison de contraintes logistiques et de pénuries de main-d’œuvre). C’est ce qui s’est produit en Chine.

Dans les pays déjà en proie à d’autres crises, il ressort des évaluations réalisées par la FAO que le secteur de l’élevage est particulièrement vulnérable face aux effets de la pandémie.

Au Zimbabwe, par exemple, les mesures d’endiguement et l’impossibilité pour les fabricants de se procurer des matières premières et de la main-d’œuvre perturbent les approvisionnements en aliments pour animaux. En Afghanistan, les Kuchis, un groupe ethnique nomade, sont touchés de plein fouet: l’accès aux pâturages est restreint, il n’y a pas suffisamment d’aliments/de fourrage pour les animaux et les prix de ces produits ont augmenté, ce à quoi s’ajoute la difficulté de bénéficier de services vétérinaires de qualité. Près d’un tiers d’entre eux ont signalé que leur transhumance avait été limitée voire rendue impossible, ce qui avait donné lieu à des tensions localisées.

Transports:

Les obstacles qui entravent les circuits de transport sont particulièrement contraignants du point de vue des filières d’approvisionnement en aliments frais et entraînent une augmentation des pertes et du gaspillage de nourriture. Le poisson et les produits aquatiques frais, qui sont extrêmement périssables et doivent donc être vendus, transformés ou entreposés dans un court délai, sont concernés au plus haut point.

Il est probable que les mesures de quarantaine et les restrictions qui pèsent sur les transports limitent l’accès des agriculteurs et des pêcheurs aux marchés, ce qui réduirait leurs capacités de production et entraverait la vente de leurs produits.

Les pénuries de main-d’œuvre pourraient perturber la production et la transformation d’aliments, notamment dans les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre (cultures à forte valeur, viande et poisson, par exemple).

Marchés:

La fermeture des restaurants et des stands de vente d’aliments sur la voie publique prive de nombreux producteurs et transformateurs d’un marché vital, ce qui peut donner lieu de manière temporaire à une production excédentaire ou déclencher une réduction de la production en amont, comme on l’observe dans les secteurs du poisson et de la viande. Dans certains pays en développement, l’offre et la demande urbaines de produits frais sont en baisse du fait des restrictions en vigueur et des comportements d’aversion des négociants et des consommateurs.

Au début de l’épidémie de covid-19, la demande a fortement augmenté.

La production et la demande varient d’un aliment de base à l’autre. S’agissant des céréales, par exemple, les premières prévisions de la FAO pour la saison 2020-2021 laissent apparaître une situation confortable aux niveaux de l’offre et de la demande, en dépit des incertitudes liées à la pandémie.

La production mondiale de viande, en revanche, devrait baisser de 1,7 pour cent en 2020 à cause des maladies animales, des perturbations des marchés qui découlent de la covid-19 et des effets persistants des sécheresses.

Tout au long de l’année, la pandémie de covid-19 continuera d’avoir de lourdes conséquences sur les marchés des produits comestibles de la mer, en particulier les produits frais et les espèces prisées dans la restauration. Sur le plan de l’offre, les flottilles de pêche sont à l’arrêt et les aquaculteurs ont considérablement abaissé leurs cibles en matière d’empoissonnement.

La pandémie devrait, en particulier, frapper de plein fouet la production mondiale de crevettes et de saumon. En Inde, par exemple, la production de crevettes d’élevage devrait chuter de 30 à 40 pour cent.

En outre, la demande mondiale de crevettes fraîches et de crevettes surgelées a nettement diminué, et la demande de saumon devrait baisser de 15 pour cent au moins en 2020. La vente au détail, en particulier de saumon frais et de truite fraîche, connaît un recul marqué et aucune reprise n’est attendue dans un avenir proche.

Globalement, les marchés alimentaires seront encore confrontés à de nombreux mois d’incertitude dans le contexte de la covid-19. Toutefois, il est probable que le secteur agroalimentaire s’avère plus résilient que d’autres face à la crise provoquée par la pandémie.

Pour en savoir plus sur les dernières prévisions relatives à l’évolution de la production et des marchés des produits alimentaires de base les plus échangés pour la période 2020-2021.

À plus long terme, selon les Perspectives agricoles de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de la FAO 2020-2029 (juillet 2020), les effets de la pandémie devraient encore peser sur la demande dans les prochaines années et pourraient nuire encore davantage à la sécurité alimentaire.

En juillet (dernière analyse en date), les cours mondiaux des denrées alimentaires ont continué d’augmenter pour le deuxième mois consécutif, sous l’effet de la progression des prix des huiles végétales et des produits laitiers. Les cours de la viande et du riz, à l’inverse, ont diminué.

Pour en savoir plus sur les prix mondiaux des produits alimentaires de base les plus couramment échangés, cliquez ici.

Sur les marchés locaux, en particulier dans les pays déjà en proie à la faim ou à d’autres crises, les prix de certains produits alimentaires de base connaissent une hausse, qui s’explique essentiellement par des problèmes logistiques locaux ou des difficultés à l’importation.

En Afghanistan, par exemple, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 20 pour cent (estimations de juin). Au Yémen, une hausse de 35 pour cent des prix des denrées alimentaires depuis avril a été enregistrée dans certaines zones. En Sierra Leone, les prix des principaux produits alimentaires de base ont déjà largement dépassé leur moyenne à long terme. En Syrie, une flambée des prix (non moins de 40 à 50 pour cent en ce qui concerne les aliments de base) et des pénuries de biens essentiels ont été signalées depuis la mi-mars.

La FAO s’inquiète des conséquences de la pandémie à moyen et long termes. Du fait du ralentissement de toutes les économies du monde, et surtout des plus vulnérables, il sera difficile pour les pays, en particulier ceux qui sont dépendants des importations de denrées alimentaires, de disposer des ressources nécessaires pour acheter des aliments – étant donné que le taux de chômage a progressé et que les effets économiques de la covid-19 se feront davantage sentir.

Ressources:

Plusieurs facteurs influent sur l’économie mondiale.

Premièrement, les marchés sont plus intégrés et plus interdépendants, et l’économie chinoise représente 16 pour cent du produit intérieur brut (PIB) mondial. De ce fait, tout choc se manifestant en Chine a des conséquences beaucoup plus marquées sur l’économie mondiale.

Deuxièmement, les chocs concernant l’offre, qui sont imputables non seulement à la morbidité et à la mortalité mais aussi aux mesures d’endiguement qui limitent la mobilité et aux coûts de transaction accrus qui découlent de la restriction des filières d’approvisionnement et du resserrement du crédit, auront une incidence sur l’économie qui entraînera une baisse de la croissance voire une récession.

En juin, l’OCDE a revu à la baisse ses prévisions relatives à la croissance économique mondiale pour 2020, qu’elle estime désormais à -6,0 pour cent. D’autre part, le taux de chômage est passé de 5,4 pour cent en 2019 à 9,2 pour cent. L’OCDE envisage un scénario à double impact, dans lequel la production économique chutera de 7,6 pour cent, avant de remonter de 2,8 pour cent en 2021. Selon la Banque mondiale, la croissance du PIB mondial devrait baisser pour s’établir à ‑5,2 pour cent. Dans ce cas de figure, 89 à 117 millions de personnes basculeraient dans une situation de pauvreté extrême en 2020. Enfin, d’après les informations actualisées publiées en juin par le Fonds monétaire international (FMI), la croissance du PIB mondial devrait être de ‑4,9 pour cent, ce qui correspondrait à une perte de production cumulée de 12 400 milliards d’USD.

Troisièmement, la demande baissera en raison de l’incertitude accrue, des comportements de précaution, des mesures d’endiguement et de la hausse des coûts financiers, qui réduisent le pouvoir d’achat.

Enfin, la dépréciation importante de certaines monnaies face au dollar des États-Unis d’Amérique ne sera pas sans conséquences pour les pays dépendants des importations.

Les marchés alimentaires mondiaux ne sont pas à l’abri de ces évolutions. Toutefois, il est probable qu’ils soient davantage épargnés que d’autres secteurs, plus exposés aux perturbations logistiques et à l’affaiblissement de la demande, comme les voyages, l’industrie manufacturière et l’énergie (source: Market Monitor, Système d’information sur les marchés agricoles, mars 2020). Il n’en demeure pas moins que, compte tenu de la complexité des chaînes de valeur alimentaires et de l’importance du commerce et des transports, ces facteurs pourraient les rendre extrêmement vulnérables.

Bien que la covid-19 soit un choc déflationniste du point de vue de l’économie mondiale, ce qui se reflète dans l’évolution initiale de l’indice FAO des prix des produits alimentaires, le coût réel d’un régime alimentaire sain pourrait augmenter à court terme en raison de la hausse des prix des produits de base périssables, ce qui serait particulièrement préjudiciable aux ménages à faible revenu et accroîtrait le coût de la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).

Afin de réduire au minimum les effets préjudiciables de la covid-19 sur la sécurité alimentaire et la nutrition, tout en transformant les systèmes alimentaires mondiaux afin qu’ils soient plus résilients, la FAO appelle à prendre des mesures immédiates dans sept grands domaines prioritaires :

  • Renforcer le plan mondial d’intervention humanitaire destiné à lutter contre la covid-19
  • Améliorer les données à l’appui de la prise de décisions
  • Assurer l’inclusion économique et la protection sociale afin de réduire la pauvreté
  • Soutenir le commerce et renforcer les normes relatives à la sécurité sanitaire des aliments
  • Accroître la résilience des petits exploitants en vue de faciliter la reprise
  • Prévenir la prochaine pandémie zoonotique en renforçant l’approche «Un monde, une santé»
  • Amorcer une transformation des systèmes alimentaires

Pour venir en aide aux agriculteurs et à leurs organisations dans les prochains mois, il sera important d’autoriser les travailleurs saisonniers et les transporteurs à circuler sur le territoire national et à franchir les frontières. Une autre bonne pratique consisterait à trouver des centres de collecte plus proches des producteurs. Il s’agirait, par exemple, de mettre en place des installations de stockage, comme des plateformes reposant sur un système de récépissés d’entrepôt, où les agriculteurs pourraient livrer leurs produits sans avoir à se rendre sur les marchés. Il faudrait permettre, si possible, aux marchés locaux de rester ouverts, tout en instaurant des règles strictes de distanciation physique sur les marchés et à leurs abords. Si cela est réalisable, il convient de réinstaller les marchés dans des lieux plus vastes et de veiller, dans le même temps, à ce que les infrastructures adéquates soient en place pour préserver la qualité et la sécurité sanitaire des aliments.

Pour en savoir plus et consulter les stratégies d’action adoptées face à la pandémie, cliquez ici.

Au début de la pandémie, la FAO a appelé les pays à: rester ouverts aux échanges commerciaux internationaux; accroître le commerce intrarégional; renforcer les programmes de protection sociale; maintenir les chaînes d’approvisionnement agricole en fonctionnement et préserver les activités agricoles, de façon à éviter les erreurs commises au moment de la crise financière et alimentaire de 2007-2008.

Cela a grandement contribué à éviter tout excès de protectionnisme et nombre des restrictions instaurées ont finalement été levées, les pays adoptant globalement une approche raisonnable et modérée.

Afin que les pays puissent prendre des décisions en connaissance de cause et atténuer l’impact de la covid-19, la FAO leur fournit des informations sur les chaînes de valeur alimentaires, les marchés et les prix des produits alimentaires, et leur propose des analyses et des solutions.

En outre, l’Organisation a intensifié ses activités dans les pays déjà en proie à une crise alimentaire ou à d’autres crises, où la covid-19 pourrait avoir des effets dévastateurs. Elle a notamment: étendu ses programmes de transferts monétaires et de bons; amélioré la collecte et l’analyse de données relatives à la faim, de sorte que les organisations soient à même de mener des interventions plus efficaces; contribué à maintenir la production alimentaire, y compris en transposant des activités à plus grande échelle afin que les agriculteurs puissent tirer parti des prochaines saisons de plantation; renforcé son appui aux activités postproduction, comme la récolte, le stockage, la transformation d’aliments à petite échelle et la conservation, établi un lien entre les producteurs et les marchés pour que les chaînes d’approvisionnement alimentaire continuent de fonctionner, et fait œuvre de sensibilisation afin que les personnes assurant la survie de ces filières ne courent pas le risque de contracter la covid-19.

Afin de mener à bien ces activités, la FAO transpose actuellement à plus grande échelle des interventions novatrices, comme le versement d’aides financières, grâce aux téléphones portables, à des populations rurales vulnérables pour surmonter les restrictions à la circulation et contribuer à prévenir la propagation du virus.

La FAO continue de mettre à disposition des données de qualité, dont la nécessité s’est fait sentir dès le début de la pandémie. Ainsi, l’Organisation, l’Alliance mondiale pour l’amélioration de la nutrition et l’Alliance Johns Hopkins ont mis en place un tableau de bord de l’alimentation, qui fournit des données sur les systèmes alimentaires de plus de 230 pays et territoires. En juillet 2020, la FAO a lancé la plateforme de données géospatiales de l’initiative Main dans la main afin d’aider à reconstruire plus solidement les secteurs de l’alimentation et de l’agriculture après la covid-19. Cette plateforme contient plus d’un million de couches géospatiales et des milliers de statistiques concernant plus d’une dizaine de domaines liés à l’alimentation et à l’agriculture.

En juillet 2020, la FAO a lancé un programme complet d’intervention et de relèvement face à la covid-19, dont l’idée sous-jacente est d’empêcher le déclenchement d’une catastrophe alimentaire mondiale pendant et après la pandémie, tout en œuvrant en faveur du développement à long terme pour améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition.

Dans le cadre de ce programme, elle appelle à intervenir immédiatement dans sept grands domaines prioritaires:

  • Renforcer le plan mondial d’intervention humanitaire destiné à lutter contre la covid-19
  • Améliorer les données à l’appui de la prise de décision
  • Assurer l’inclusion économique et la protection sociale afin de réduire la pauvreté
  • Soutenir le commerce et renforcer les normes relatives à la sécurité sanitaire des aliments
  • Accroître la résilience des petits exploitants en vue de faciliter la reprise
  • Prévenir la prochaine pandémie zoonotique en renforçant l’approche Un monde, une santé
  • Amorcer une transformation des systèmes alimentaires

Par ailleurs, la FAO appelle les gouvernements et de multiples parties prenantes à agir, fournit des avis techniques et renforce les capacités dans un large éventail de disciplines, et propose un appui aux investissements qui permet de tirer parti de toutes les formes de partenariat et de financement.

Pour faire face aux effets de la pandémie, il est nécessaire de planifier minutieusement les activités, étant donné que la situation sur le terrain est susceptible d’évoluer rapidement. La FAO concentrera principalement son attention sur les populations rurales et côtières vulnérables dont les moyens d’existence reposant sur l’agriculture et la pêche sont touchés, ainsi que sur le renforcement de la sécurité alimentaire là où la faim est déjà fortement présente.

L’Organisation devra prendre en considération les différents scénarios ayant trait à la continuité des activités et veiller à la sécurité et au bien-être du personnel et des bénéficiaires. À cet effet, la planification des points critiques du Programme est en cours au niveau des pays. La FAO a planifié ses activités avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et les autorités de santé publique à l’échelon des pays, de sorte qu’elles soient en accord avec les mesures d’endiguement et les renforcent, et qu’elles permettent d’assurer la sécurité et le bien-être du personnel et des bénéficiaires.

Notre travail qui consiste à aider les pays et les populations à vaincre la faim se poursuit. Si le virus empêche certains d’entre nous de se rendre sur le lieu de travail, il n’a pas pour autant porté un coup d’arrêt à nos activités. 

Cette crise a mis en évidence des inégalités au sein des systèmes alimentaires et nous devons repartir sur de nouvelles bases. Le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA) travaille actuellement à l’élaboration des Directives volontaires sur les systèmes alimentaires et la nutrition, qui contribueront à réorienter et à transformer les systèmes alimentaires de façon à les rendre plus résilients et plus durables. Par ailleurs, il a publié un document de synthèse provisoire sur les conséquences de la pandémie de covid-19 pour la sécurité alimentaire et la nutrition, qui alimente la réflexion sur ce thème. La FAO s’emploie aussi activement à résoudre la question de savoir comment transformer les systèmes alimentaires pour pouvoir faire face à des pandémies comme celle de la covid-19 et accélérer la réalisation des ODD 1 et 2, tout en veillant à réduire au minimum les compromis qui sont consentis au détriment de la nature.

La FAO a suggéré que les pays créent un comité de crise, composé notamment des ministres de l’agriculture, de l’élevage et de l’approvisionnement alimentaire, des transports, de l’économie et du commerce, qui serait chargé de trouver des solutions pour gérer les effets de la pandémie de covid-19. Pour veiller à ce que les acteurs des marchés appliquent correctement et pleinement les stratégies adoptées, il est crucial que le comité de crise travaille avec le secteur privé, dans le cadre d’un comité consultatif plus large à parties prenantes multiples qui réunirait des représentants de tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Pour en savoir plus, veuillez consulter ce document de la FAO.

Nous nous attendons à ce que la production de légumes prenne une dimension beaucoup plus locale mais nous ne prévoyons pas d’évolution de la circulation des aliments de base (riz, maïs), des fruits et de la viande, qui sont déjà les denrées alimentaires les plus échangées au niveau mondial. L’un des domaines dans lesquels nous espérons voir des améliorations est le commerce intrarégional. En effet, cela permettrait de raccourcir les filières alimentaires, de créer de nouveaux marchés pour les agriculteurs et d’améliorer l’accès à la fois aux intrants (semences, engrais) et aux extrants (produits alimentaires).