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I.2. SITUATION DES RESSOURCES FORESTIÈRES


I.2.1. Les formations végétales
I.2.2. Les superficies boisées
I.2.3. Les principales espèces forestières
I.2.4. Modes d’utilisation des arbres forestiers
I.2.5. Pressions exercées sur les ressources forestières et les ressources génétiques forestières


I.2.1. Les formations végétales

Le terme de forêt tropicale sèche, souvent employé par opposition à celui de forêt tropicale humide, peut être ambigu car il regroupe des formations extrêmement diverses. Les formations végétales concernées par l’étude comprennent:

· les forêts denses sèches
· les forêts claires
· les savanes
· les steppes boisées
· les steppes arborées
· les steppes arbustives

Selon la terminologie de la FAO, les «forêts» comprennent les formations végétales ayant un couvert arboré supérieur à 10% et une superficie supérieure à 0.5 ha11. Cette définition standardisée a été utilisée dans les tableaux de données générales des pays et les surfaces des couverts forestiers (annexes 4 et 5). Partout ailleurs, les données quantitatives sur les ressources génétiques, issues des rapports nationaux, se rapportent aux définitions propres à chaque pays.

11 FAO, Départment des forêts. FRA 2000 - Termes et définitions. Programme d’évaluation des ressources forestières 2000, document de travail 1, Rome, 18 novembre 1998.
<http://www.fao.org/FORESTRY/FOR/FRA/docs/FRA_WP1eng.PDF>

I.2.2. Les superficies boisées

La superficie de la couverture forestière est donnée par pays en annexe 5 (FAO, 1999). Les pays sahéliens de l’ouest totalisent environ 41 000 hectares de formations boisées (selon les critères FAO) et les pays sahéliens de l’est environ 59 000 hectares. La surface de forêts sèches dans les pays bordant le golfe de Guinée est estimée à environ 26 000 hectares.

La distribution des principales espèces forestières par zone éco-géographiques est donnée dans le paragraphe suivant.

I.2.3. Les principales espèces forestières

Dans le domaine sahélien, la flore est composée d’environ 1 200 espèces dont 40 sont strictement endémiques (Kigomo, 1998a). Le domaine sahélien est le domaine privilégié du genre Acacia. Les principales espèces ligneuses rencontrées sont12:

12 Voir aussi FAO. 1996.

Acacia nilotique, A. radina, A. Sénégal, A. sella, A. tortillais, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Boscia senegalensis, Calotropis procera, Combretum glutinosum, Commiphora africana, Dalbergia melanoxylon, Faidherbia albida, Hyphaene thebaica, Phoenix dactylifera.


Les espèces introduites incluent entre autres Azadirachta indica (neem), Eucalyptus camaldulensis, Prosopis juliflora, P. chilensis et Senna siamea.

Dans le domaine soudanien, on compte environ 2 750 espèces végétales dont le tiers est endémique. Les principales espèces ligneuses sont:

Adansonia digitata, Acacia sieberana, Anogeissus leiocarpus, Ceiba pentandra, Daniella oliveri, Ficus sycomorus, Isoberlinia doka, Khaya senegalensis, Parkia biglobosa, Piliostigma thonningii, Prosopis africana, Pterocarpus erinaceus, Sclerocarya birrea, Strichnos spinosa, Tamarindus indica, Vittelaria paradoxa, Ziziphus mauritiana, Ziziphus mucronata.


Les espèces exotiques les couramment utilisées dans les programmes de reboisement comprennent Anacardium occidentale, Azadirachta indica, Casuarina equisetifolia, Dalbergia sissoo, Eucalyptus camaldulensis, Jatropha cureras, Senna siamea et Thevetia nervifoli.

Dans le domaine oriental, la flore est composée d’environ 2 500 espèces dont la moitié environ est endémique. Les espèces ligneuses varient selon l’humidité du macro-climat:

- Dans les zones arides et semi-arides, les genres Acacia et Commiphora sont très représentés. Les principales espèces arborées comprennent:

Casipourea malosana, Combretum molle, Diospyros abyssinica, Juniperus procera, Lawsonia inermis, Olea africana, O. hochstetteri, Podocarpus gracilior et Teclea simplicifolia.

- dans les zones semi-humides, sont rencontrées les espèces suivantes:

Acacia mellifera, Acacia etbaica, A. reficiens, A. senegal, A. tortilis, Dodonaea angustifolia, Euphorbia sp., Faidherbia albida et Pappea capensis.


Les espèces suivantes ont été introduites: Azadirachta indica, Eucalyptus camaldulensis, E.tereticornis, Jatropha curcas, Leucaena leucocephala, Parkisonia aculeata, Pinus caribaea, Prosopis cineraria, Prosopis juliflora, Senna siamea.

I.2.4. Modes d’utilisation des arbres forestiers

Caractères généraux de l’utilisation des arbres sahéliens et nord-soudaniens

S’il est vrai que la plupart des forêts des terres arides n’offrent qu’un faible potentiel de production de bois œuvre, comparé à celui des forêts humides de basse altitude, elles n’en fournissent pas moins un large éventail de produits ligneux et non ligneux essentiels à la survie des populations locales sans parler de leurs nombreuses et importantes fonctions environnementales (figure 1). Ces produits sont collectés pour un usage domestique ou pour être vendus sur les marchés locaux. Leur importance est souvent sous-estimée dans les statistiques, les politiques et les programmes nationaux.

Les arbres et les forêts des terres arides fournissent du bois de feu ainsi que du bois rond de petit diamètre servant à faire des poteaux, des charpentes ou des manches d’outils, ainsi que toute une gamme de produits non ligneux incluant des aliments pour la consommation humaine, du gibier, du fourrage pour les animaux domestiques, des produits médicinaux ou des matières premières pour les artisans (huiles, tanins, gommes, etc.). Quant aux fonctions environnementales, la plus importante est sans conteste celle de conservation des sols contre l’érosion et la préservation de leur fertilité, sans parler de la protection contre le vent et le soleil.

Les arbres du Sahel ont des usages multiples. Les 310 espèces mentionnées dans les rapports nationaux ont toutes plus d’un type d’utilisation. Les 114 espèces ligneuses de la zone sahélienne recensées par von Maydell ont toutes de multiples usages13. Les utilisations des différentes parties des arbres forestiers varient d’un pays à l’autre (voir en particulier l’annexe 9). Dans un même pays, les espèces peuvent avoir différents types d’utilisation.

13 Von Maydell, H.J., 1983.

Les différents modes d’utilisation sont regroupés en 7 catégories:

(1) Espèces produisant du bois d’œuvre et de service

La majeure partie de la population du Sahel ne dispose que de peu de matières premières et de matériaux, et parmi ceux-ci, le bois occupe un rang privilégié. Les arbres, arbustes et buissons des terres arides fournissent des bois ronds de petit diamètre servant à faire des poteaux, des charpentes ou des manches d’outils:

Anogeissus leiocarpus, Azadirachta indica, Balanites aegyptiaca, Commiphora africana, Dalbergia melanoxylon, Daniella oliveri, Eucalyptus camaldulensis, Hyphaene thebaïca, Isoberlina doka, Khaya senegalensis, Melia volkensii, Prosopis africana, Prosopis juliflora, Pterocarpus erinaceus, Sclerocarya birrea, Terminalia brownii.


FIGURE 1: RÉPARTITION DES TYPES D’UTILISATION DES ESPÈCES DES ZONES SÈCHES MENTIONNÉES DANS LES RAPPORTS NATIONAUX

Source: rapports nationaux (1998)

Les types d’utilisation incluent le bois énergie, les poteaux, les piquets, le bois rond, les produits forestiers non ligneux (gommes, résines, huiles, tannins, médicaments, etc.), nourriture, bois d’œuvre, fourrage, ombrage, systèmes agroforestiers, conservation des sols et eaux, agrément, valeur esthétique, pâte et papier.

(2) Espèces fourragères

L’économie pastorale est une des principales ressources de la population du Sahel, en particulier dans la partie nord. Le fourrage provenant des arbres et arbustes sur les parcours des zones arides et semi-arides est vital pour le bétail, en particulier pendant la saison sèche. Les communautés pastorales en tirent également un avantage essentiel comme le lait qui représente l’un de leurs aliments de base les plus importants.

Acacia holosericea, Acacia senegal, Adansonia digitata, Anacardium occidentale, Annona senegalensis, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Boscia senegalensis, Bauhinia rufescens, Detarium senegalensis, Diospyros mespiliformis, Faidherbia albida, Ficus sp., Grewia bicolor, Hyphaene thebaica, Moringa oleifera, Parkia biglobosa, Prosopis juliflora, Sclerocarya birrea, Spondias mombin, Sterculia setigera, Tamarindus indica, Terminalia brownii, Vitellaria paradoxa, Ziziphus mauritiana.


(3) Espèces à usage alimentaire

Les produits forestiers, issus de végétaux ou d’animaux, jouent un rôle crucial dans la sécurité alimentaire en Afrique de façon directe et indirecte. En plus des produits utilisés couramment dans l’alimentation et contribuant directement au bien être nutritionnel, les forêts et les arbres hors forêt sont une source de revenus servant à l’achat de denrées et procurent également aux ménages du bois de feu pour la cuisson des aliments. Ils fournissent aussi des produits parfois moins appétissants mais qui, en période de mauvaises récoltes, peuvent être des compléments alimentaires indispensables14.

14 Voir aussi FAO. 1984.

Acacia holosericea, Acacia senegal, Adansonia digitata, Anacardium occidentale, Annona senegalensis, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Boscia senegalensis, Cordia pinnata, Detarium microcarpum, Detarium senegalensis, Diospyros mespiliformis, Faidherbia albida, Ficus sp, Grewia bicolor, Hyphaene thebaica, Lannea microcarpa, Maerua crassifolia, Mangifera indica, Moringa oleifera, Parinari macrophylla, Parkia biglobosa, Phoenix dactilifera, Prosopis juliflora, Saba senegalensis, Sclerocarya birrea, Tamarindus indica, Vitellaria paradoxa, Vitex doniana, Ximenia americana, Ziziphus mauritiana.


(4) Espèces fournissant des produits forestiers non ligneux

La dépendance des populations de l’Afrique sèche à l’égard des produits forestiers non ligneux (médicaments, matières premières, matériaux divers) est forte. Ainsi, les produits médicinaux en provenance des forêts sont extrêmement importants, en particulier pour les communautés villageoises, et jouent un rôle fondamental dans les systèmes de production ruraux.

Acacia holosericea, Acacia laeta, Acacia nilotica, Acacia raddiana, Acacia senegal, Acacia seyal, Adansonia digitata, Anacardium occidentale, Anogeissus leiocarpus, Azadirachta indica, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Cassia singueana, Ceiba pentandra, Combretum micrantum, Combretum microcarpum, Commiphora africana, Diospyros mespiliformis, Faidherbia albida, Guiera senegalensis, Hyphaene thebaica, Hyphaene compressa, Khaya senegalensis, Lannea microcarpa, Lannea acida, Lawsonia inermis, Mangifera indica, Moringa oleifera, Moringa stenopetala, Moringa volkensii, Parinari macrophylla, Parkia biglobosa, Piliostigma thoningii, Pistia strastiotes, Pterocarpus erinaceus, Rottbellia exaltata, Salvadora perica, Sterculia setigera, Tamarindus indica, Vitellaria paradoxa, Vitex doniana, Ziziphus mauritiana.


(5) Source énergétique (bois de feu et charbon de bois)

Le taux élevé de la croissance démographique des pays de la zone sahélienne conjugué à celui relativement faible des revenus a contribué à une augmentation importante de la consommation de bois de feu et de charbon de bois. La dépendance des populations vis-à-vis de ce combustible menace dans certains cas la durabilité des ressources et donc celle des approvisionnements. En milieu rural, les difficultés d’approvisionnement sont limitées à des cas exceptionnels, alors que dans certaines grandes agglomérations ou métropoles elles atteignent déjà des proportions catastrophiques. En principe, presque tous les arbres et arbustes peuvent être employés comme combustible à condition être assez secs. Néanmoins, leurs propriétés calorifiques varient considérablement. Les plus appréciés brûlent sans fumée désagréable ni étincelles ou fournissent un excellent charbon de bois (certains Acacia, Anogeissus, Balanites, Eucalyptus, Prosopis), alors que d’autres ne sont utilisés qu’en derniers recours.

Les espèces mentionnées dans les rapports nationaux comprennent:

Acacia holosericea, Acacia laeta, Acacia nilotica, Acacia raddiana, Acacia senegal, Acacia seyal, Acacia tortilis, Afzelia africana, Annona senegalensis, Anogeissus leiocarpus, Azadirachta indica, Balanites aegyptiaca, Bauhinia rufesens, Boscia senegalensis, Cassia sieberiana, Combretum microcarpum, Dalbergia melanoxylon, Daniella oliveri, Detarium microcarpum, Diospyros mespiliformis, Eucalyptus camaldulensis, Eucalyptus tereticornis, Faidherbia albida, Ficus sp., Grewia bicolor, Grewia tenax, Isoberlinia doka, Khaya senegalensis, Lannea acida, Leptadenia pyrotechnica, Leucaena leucocephalla, Moringa oleifera, Mangifera indica, Parinari macrophylla, Parkia biglobosa, Piliostigma thonningii, Prosopis africana, Prosopis juliflora, Pterocarpus erinaceus, Sclerocarya birrea, Sterculia setigera, Tamarindus brownii, Tamarindus indica, Vitex doniana, Ziziphus mauritiana.


(6) Espèces utilisées dans systèmes agroforestiers

La contribution primordiale des forêts et des arbres à la sécurité alimentaire est indirecte. En effet, elle réside dans leur rôle de protection des ressources naturelles indispensables pour la production agricole15. Les espèces suivantes sont strictement associées aux systèmes agroforestiers, ce qui confirme leur importance économique:

15 Pour plus d’information, voir également Boffa, J.M. 1999.

Acacia mellifera, Acacia nilotica, Acacia senegal, Acacia sieberiana, Acacia tortilis, Adansonia digitata, Anogeissus leiocarpus, Azadirachta indica, Anacardium occidentale, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Ceiba pentandra, Combretum microcarpum, Cordyla pinnata, Diospyros mespiliformis, Faidherbia albida, Gmelina arborea, Guiera senegalensis, Hyphaene thebaica, Lannea acida, Lawsonia inermis, Leucaena leucocephala, Moringa oleifera, Mangifera indica, Moringa volkensii, Parkia biglobosa, Pinus spp, Pterocarpus erinaceus, Salvadora perica, Tamarindus indica, Thevetia nervifolia, Vitellaria paradoxa, Vitex doniana, Ziziphus mauritiana.


(7) Espèces à valeur protectrice, culturelle ou ornementale

L’effet protecteur le plus évident est l’ombrage produit par les arbres. De nombreuses espèces sont appréciées et plantées près des habitations rurales, dans les localités, le long des routes et des rives.

Dans une région où la végétation arborescente est généralement de petite taille, les arbres géants sont d’autant plus remarqués et sont souvent le sujet de vénération et de manifestations religieuses ou artistiques. Il n’est pas étonnant que le baobab, qui compte parmi les représentants les plus grands et les plus âgés du règne végétal au Sahel, bénéficie d’un grand respect. Peu d’espèces rivalisent de taille avec lui, mais dans des conditions favorables les espèces suivantes sont reconnues pour leurs valeurs protectrices, culturelles ou ornementales:

Acacia macrostachya, Acacia nilotica, Acacia senegal, Adansonia digitata, Anacardium occidentale Anogeissus leiocarpus Azadirachta indica, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Casuarina equisetifolia, Ceiba pentandra, Combretum microcarpum, Diospyros mespiliformis Eucalyptus camaldulensis, Faidherbia albida, Gmelina arborea, Lawsonia inermis, Leptadenia pyrotechnica, Khaya senegalensis, Mangifera indica, Moringa oleifera, Parkia biglobosa, Parkinsonia aculeata, Prosopis africana, Prosopis juliflora, Piliostigma thonningii, Senna siamea, Pterocarpus erinaceus, Vitellaria paradoxa.


I.2.5. Pressions exercées sur les ressources forestières et les ressources génétiques forestières


I.2.5.1. Les pressions d’origine climatique
I.2.5.2. Les pressions d’origine anthropique
I.2.5.3. Espèces et populations considérées comme menacées


Les ressources forestières de la zone sahélienne et nord-soudanienne sont soumises à de fortes pressions qui contribuent à leur fragilisation et, progressivement, à leur réduction et à leur marginalisation. L’origine de ces pressions peut être d’ordre climatique ou anthropique.

I.2.5.1. Les pressions d’origine climatique

La courbe de variations inter-annuelles de la pluviométrie (Catinot, 1988) montre que la zone a connu depuis 1965 des déficits pluviométriques répétés. Les sécheresses du début des années 70 et surtout des années 80 sont restées tristement célèbres. D’un point de vue floristique, le résultat à long terme le plus visible de ces sécheresses a consisté en une modification de la flore graminéenne. Dans certaines régions, des espèces pérennes comme Andropogon gayanus ont été remplacées par une flore de composition mixte avec des espèces annuelles telles que Cenchrus biflorus et Sida cordifolia.

La résistance des espèces ligneuses aux sécheresses successives varie d’une essence à l’autre. Ainsi le Tchad a supporté des pertes considérables dans ses peuplements d’Acacia senegal, d’Anogeissus leiocarpus et de Khaya senegalensis.

Les menaces qui résultent de ces variations climatiques proviennent non pas tant de la sécheresse en elle-même que de l’intervention humaine incontrôlée dans des milieux extrêmement fragilisés. Les conséquences, pour une espèce donnée, peuvent consister en une disparition localisée de quelques individus, voire d’une population entière. L’écosystème forestier fonctionnel peut dans les cas extrêmes être menacé d’extinction. Dans des pays tels que le Cameroun et le Sénégal, la disparition annuelle des savanes sèches est estimée à près de 100 000 ha. Les espèces les plus sensibles sont Acacia nilotica, Acacia senegal, Pterocarpus lucens, Sclerocarya birrea, Prosopis africana, Lannea microcarpa et Dalbergia melanoxylon.

A la sécheresse climatique peut s’ajouter la sécheresse édaphique due à l’augmentation de la teneur en sel du sol. C’est le cas des «tannes» ou sols salés au Sénégal. C’est aussi le cas des sols «hardés» ou sols stériles au Cameroun. La sécheresse combinée à la salinité du sol a entraîné au Sénégal la disparition de certaines rôneraies (Cayor) et celle de palmeraies en Casamance.

I.2.5.2. Les pressions d’origine anthropique

Elles sont liées aux multiples interventions humaines incontrôlées sur les forêts et les arbres. L’exploitation non aménagée des ressources du sol, des forêts, des réserves en eau se manifeste par l’extension incontrôlée de l’agriculture, le développement excessif du pâturage aérien, la multiplication sporadique des feux de brousse, l’exploitation anarchique du bois d’œuvre, de service et d’énergie et enfin l’utilisation non durable des produits non ligneux.

L’agriculture: deux types d’agriculture sont distingués: (i) l’agriculture itinérante particulièrement pratiquée durant la saison des pluies et souvent sur sols sableux pauvres en réserves minérales; et (ii) l’agriculture de contre saison. Cette dernière, moins itinérante, est conduite à la fin de la saison des pluies dans les zones temporairement inondées et sur des sols plus ou moins hydromorphes.

L’agriculture itinérante a des répercussions sur Acacia senegal, Cordyla pinnata, Faidherbia albida, Parkia biglobosa, Sterculia setigera et Tamarindus indica. Ces espèces vivent surtout sur des sols légers (sablo-argileux à sableux) et par conséquent ne disposant que d’une faible réserve hydrique. L’action combinée de la sécheresse et du défrichement répété contribue alors à leur disparition.

Sur les sols plus lourds (vertiques) où l’on pratique des cultures de contre saison (sorgho repiqué), les espèces ligneuses inféodées à ce type de sol, telles que Acacia nilotica et Acacia seyal, sont les plus menacées. Les cultures de contre saison poussent quand la réserve hydrique du sol est très faible et ne peuvent résister à la compétition des végétaux ligneux laissés sur place. Les arbres sont alors abattus de manière systématique dans les champs de cultures de décrues.

Le pâturage: certaines espèces produisent l’essentiel du pâturage aérien pour le bétail. Il s’agit d’Acacia raddiana, Acacia senegal, Commiphora africana et de nombreux Ficus. Les arbres subissent chaque année des mutilations répétées qui portent sur les feuilles, les branches, voire l’arbre tout entier.

La récolte de bois d’œuvre et de bois de service: les espèces les plus recherchées pour les constructions des maisons, pour la fabrication des pirogues, des mortiers et autres ustensiles de cuisine sont Khaya senegalensis, Pterocarpus erinaceus, Daniella olliveri, Borassus aethiopum, Diospyros mespiliformis, Eucalyptus camaldulensis, Azadirachta indica et Dalbergia sissoo.

La récolte de bois d’énergie: lorsque l’on a commencé à se préoccuper des forêts des terres arides, au début des années 70, le souci principal était le bois de feu. La crainte de pénuries frappant tant les ruraux que les urbains a incité nombre de pays à créer des plantations pour le bois de feu, notamment à partir d’espèces introduites ou sub-spontanées. Pendant ce temps, les ressources locales continuaient à être largement exploitées pour satisfaire les besoins énergétiques des populations toujours plus nombreuses. Malgré les énormes efforts entrepris par les pays pour accroître la production de bois de feu et réduire la consommation (notamment grâce à des fourneaux à bois améliorés), les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes. Les statistiques montrent d’autre part que la demande, tant rurale qu’urbaine, d’énergie à partir du bois a augmenté et devrait continuer à augmenter en raison de l’accroissement démographique (voir annexe 6) et de l’évolution macro-économique (comme résultat indirect des programmes d’ajustement structurel). Les progrès accomplis en matière de réduction de la pression exercée sur les forêts naturelles et les ressources génétiques locales ont ainsi été annulés. Aujourd’hui, les espèces Acacia nilotica, Anogeissus leiocarpus, Diospyros mespiliformis et Vitellaria paradoxa ainsi que certaines Combretacées sont particulièrement recherchées.

La récolte de produits forestiers non ligneux: l’impact sur la ressource génétique peut être direct ou indirect.

- L’impact direct se produit lors du prélèvement d’organes participant à la reproduction (fleurs, fruits ou graines), comme c’est le cas de la plupart des Acacia dont les fleurs et les gousses sont consommées par le bétail. Signalons également les graines de Khaya senegalensis, Parkia biglobosa, Vitellaria paradoxa utilisées pour la production d’huiles à usages multiples. Les fruits de Sclerocarya birrea, Ximenia americana, Balanites aegyptiaca sont consommés par l’homme. Les extraits de la gousse d’Acacia nilotica servent à la fabrication de tanins.

- L’impact indirect est la conséquence de mutilations subies par l’arbre lors de l’extraction de certains organes (écorce, cambium, racines, feuilles, etc.). Ces blessures peuvent modifier la floraison ou la fructification d’individus affaiblis, voire réduire le nombre d’individus participant aux croisements.

Dans les deux cas, l’exploitation de la ressource, combinée trop souvent à l’action des feux de brousse, contribue à diminuer le nombre d’individus reproducteurs, à réduire les possibilités de régénération naturelle et ainsi augmenter le risque d’érosion génétique.

I.2.5.3. Espèces et populations considérées comme menacées

Les experts nationaux ont fourni des listes d’espèces importantes au niveau national avec mention de leur degré de sécurité et des menaces présumées. Le résultat de la compilation de ces listes est présenté dans le tableau 1 et dans les figures 2 et 3. Plus de détails sur la nature, l’intensité et la localisation des menaces pesant sur les 16 espèces considérées prioritaires par pays et zone écologique sont fournis en Annexe 11.

TABLEAU 1: LES POPULATIONS ET LES ESPÈCES CONSIDÉRÉES COMME MENACÉES

Pays

Menaces à l’échelle de l’espèce

Menaces à l’échelle des populations

Bénin

Afzelia africana, Khaya senegalensis, Pterocarpus erinaceus


Burkina Faso


Acacia senegal, A. seyal, Anogeissus leiocarpus, Adansonia digitata, Bombax costatum, Faidherbia albida, Khaya senegalensis, Parkia biglobosa, Vitellaria paradoxa, Pterocarpus erinaceus, P. lucens

Cameroun

Azadirachta indica, Dalbergia melanoxylon

Acacia nilotica, Acacia seyal, Anogeissus leiocarpus, Khaya senegalensis

Côte d’Ivoire

Cassia sieberiana, Ceiba pentandra, Diospyros mespiliformis, Ficus capensis, Khaya senegalensis, Pterocarpus erinaceus

Anogeissus leiocarpus

Erythrée

Acacia etbaica, Adansonia digitata, Boswellia papyrifera

Balanites aegyptiaca, Dodonaea angustifolia, Juniperus procera, Olea africana, Tamarindus indica, Ximenia americana

Gambie

Bombax buonopozence, Khaya senegalensis, Oxytenanttera abyssinica, Parkia biglobosa, Prosopis africana, Pterocarpus erinaceus, Raphia spp

Afzelia africana, Borassus aethiopum, Diospyros mespiliformis, Erythrophleum guineense, Mitragyna inermis, Parinari macrophylla, Rhizophora racemosa, Vitex doniana

Kenya

Acacia tortilis, Balanites aegyptiaca, Faidherbia albida

Tamarindus indica, Ziziphus mauritiana

Mali


Gilbertiodendron glaudolosum, Guibourtia copallifera

Mauritanie


Acacia nilotica, Acacia senegal, Adansonia digitata, Ziziphus mauritiana, Boscia senegalensis, Borassus flabelifer, Combretum micrantum, Commiphora africana, Faidherbia albida, Grewia bicolor, Hyphaene thebaica, Khaya senegalensis, Pterocarpus erinaceus, Raphia soudannica, Tamarindus indica

Niger

Acacia senegal, Diospyros mespiliformis, Lannea microcarpa, Prosopis africana, Sclerocarya birrea

Acacia nilotica, Acacia seyal, Acacia raddiana, Commiphora africana, Pterocarpus lucens

Nigeria

Bombax costatum, Guiera senegalensis, Pterocarpus erinaceus

Acacia nilotica, Acacia senegal, Annona senegalensis, Anogeissus leiocarpus, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Carrisa edulis, Hyphaene thebaica, Lannea bacteri, Phoenix dactylifera, Piliostigma thonningii, Ximenia americana, Ziziphus spina christii

Sénégal

Faidherbia albida, Pterocarpus erinaceus

Acacia nilotica, Acacia senegal, Borassus aethiopum, Cordyla pinnata, Dalbergia melanoxylon, Parkia biglobosa, Pterocarpus lucens, Saba senegalensis, Sclerocarya birrea, Sterculia setigera, Tamarindus indica

Soudan


Acacia mellifera, Acacia seyal, Acacia tortilis, Adansonia digitata, Albizia amara, Albizia aylmeri, Anogeissus leiocarpus, Balanites aegyptiaca, Borassus aethiopum, Dalbergia melanoxylon, Diospyros mespiliformis, Faidherbia albida, Hyphaene thebaica, Lannea fructicosa, Sclerocarya birrea

Tchad

Azadirachta indica

Acacia senegal, Anogeissus leiocarpus, Balanites aegyptiaca, Khaya senegalensis, Parkia biglobosa, Vittelaria paradoxa, Ziziphus mauritiana

Togo

Anogeissus leiocarpus, Botrichium chamaeconium, Daniellia oliveri, Dorstenia walleri, Faidherbia albida, Garcinia afzelia, Garcinia Kola, Khaya senegalensis, Parinari sp, Polyscia pulva, Prosopis africana, Pterocarpus erinaceus

Borassus aethiopum, Diospyros mespiliformis

Source: rapports nationaux (1998, voir liste en annexe 13)

FIGURE 2: NIVEAUX ESTIMÉS DE SÉCURITÉ POUR LES 16 ESPÈCES CONSIDÉRÉES PRIORITAIRES*

Nombre total de populations considérées: 159, représentant les 16 espèces considérées comme prioritaires dans 18 pays. Le degré de sécurité de chaque population a été établi selon le schéma suivant

1. mise en place/suivi probable de règles de protection/conservation fondées scientifiquement ou menace légère/occasionnelle; 5. mise en œuvre des règles peu probables; risques élevés d’érosion et de pertes génétiques; 2 à 3. niveaux intermédiaires entres 1 et 5.

Les 16 espèces considérées comme prioritaires dans la région par les experts nationaux sont Faidherbia albida, Tamarindus indica, Khaya senegalensis, Acacia nilotica, Adansonia digitata, Anogeissus leiocarpus, Parkia biglobosa, Acacia senegal, Azadirachta indica, Borassus aethiopum, Diospyros mespiliformis, Pterocarpus erinaceus, Balanites aegyptiaca, Eucalyptus camaldulensis, Vitellaria paradoxa et Ziziphus mauritiana.

Voir le paragraphe II 2.3. pour plus de détails.

FIGURE 3: NATURE ET IMPORTANCE DES MENACES RELATIVES AUX 16 ESPÈCES CONSIDÉRÉES PRIORITAIRES

Les informations ont été fournies par les rapports nationaux pour les populations de chaque espèce en ce qui concerne leur niveau de sécurité et la nature des menaces possibles. Nombre d’espèces étudiées: 16; nombre de populations: 159. “Autres” comprennent les pestes végétales, insectes, maladies et les feux. L’importance mineure accordée aux feux de brousse peut être liée au fait que ceux-ci ne sont pas considérés comme une menace majeure, mais plutôt associés aux activités humaines telles que l’expansion agricole et le surpâturage. Voir la figure 2 pour la liste d’espèces.


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