3.1 - Les contraintes imposées par le profil du consommateur
3.2 - Les contraintes imposées par le système de production agricole
3.3 - Les caractéristiques du produit agricole et la technologie
3.4 - Les contraintes imposées par lenvironnement socio-économique
3.5 - Le rôle social des marchés: Lemploi et la distribution des revenus
3.6 - Le commerce informel et la sécurité alimentaire
Il est clair que le développement et la croissance de la structure des entreprises de commercialisation formelles et informelles ne se font pas au hasard. Au contraire, la structure est dominée par les contraintes du système. La compétitivité entre formel et informel détermine la structure du circuit. Les circuits formels et informels sont en concurrence permanente et la forme la plus compétitive, étant donné les contraintes, domine la filière.
Suite à la croissance de la population nationale denviron 3 % par an en Afrique subsaharienne durant les dernières décennies, la production des vivres doit nécessairement saccroître du même pourcentage. Lexode rural et la croissance des centres urbains de 5 à 7 % par an aboutissent à une pression énorme sur le système de commercialisation et de distribution des vivres: chaque année, 5 à 7 % de plus doivent être commercialisés afin de maintenir un statu quo. Chaque année, dautres marchés et infrastructures de commercialisation sont nécessaires.
Le profil du consommateur urbain en termes de pouvoir dachat détermine:
Ce profil est une contrainte majeure pour les commerçants et surtout pour chaque décideur politique voulant intervenir dans les chaînes de commercialisation et de transformation des vivres. Chaque intervention doit nécessairement respecter les contraintes de la demande. Il est évident que le profil du consommateur diffère selon le pays et que des écarts considérables sont également possibles dans un même pays. Dans ce document, on sintéresse surtout au consommateur urbain «moyen», cest-à-dire à la masse populaire des centres urbains. Dans chaque pays en développement, il existe de petits groupes de consommateurs à revenu élevé ayant des habitudes alimentaires plutôt européennes. Ceux-ci ne font pas lobjet de notre étude.
Certaines relations de base entre la structure du régime alimentaire et le revenu du ménage sont universelles:
Encadré 5 LALIMENT DE BASE EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE Les dépenses de consommation en Afrique subsaharienne
sont dominées par les aliments. Les ménages dépensent plus
de 50 % du budget pour la nourriture. Dans certains cas, il sagit
même de plus de 70 %. La consommation alimentaire est dominée par
les céréales et les tubercules (Goossens, 1994).
Traditionnellement, le mil, le sorgho et le maïs représentent plus
de 80 % de la consommation des céréales. Le sorgho et le mil sont
les principaux aliments de base dans les zones arides et semi-arides de
lAfrique occidentale, tandis que le maïs domine le régime
alimentaire du Kenya, de la Tanzanie et de la plupart des pays de lAfrique
australe. Les tubercules, surtout le manioc, sont les aliments de base dans les
forêts humides de lAfrique occidentale et de la plus grande partie
de lAfrique centrale, ligname dans les zones de transition en
Afrique occidentale. Depuis des décennies, on constate un glissement de
la consommation vers le riz et la farine de blé dans toute lAfrique
et surtout dans les régions urbaines. Comme il existe de nombreuses
régions où le blé et le riz ne peuvent pas être
cultivés de manière économique, la demande accrue de ces
denrées sest traduite par des hausses massives des importations
(Eicher & Baker, 1982). |
Les ménages urbains, ayant un revenu très bas, se concentrent dabord sur la survie (pays avec un PNB inférieur à $EU 100, 150). Ces ménages consacrent parfois plus de 70 % du revenu à lachat de la nourriture (voir encadré 5). En termes de consommation, ils désirent maximiser la quantité de calories consommées et éviter des risques. Ils choisissent la calorie la moins chère avec le minimum de valeur ajoutée. Ils organisent eux-mêmes la transformation dans la mesure du possible, ce qui empêche le développement de certaines transformations de façon industrielle. Laliment calorique local domine leur régime alimentaire. Dans des circonstances extrêmes, ces ménages ne mangent que laliment de base dont ils achètent un sac à la fin du mois lors du paiement du salaire. Hormis lachat mensuel du fameux sac de manioc, de maïs ou de riz, ils nachètent que de petites quantités, et ceci presque tous les jours: un peu de poisson, de légumes (surtout des légumes-feuilles), de lhuile de palme. Souvent, ils ont un revenu irrégulier et fractionné et ne possèdent pas de frigo. Etant donné le coût du transport par rapport à la valeur moyenne de la transaction, ils font leurs achats près de la maison au marché du quartier. Lassortiment de produits et les services demandés par ces consommateurs sont offerts par le secteur informel, et non par le secteur formel (voir encadré 6).
Le consommateur à revenu élevé ne se fait plus de soucis quant à la quantité de calories ou de protéines, mais seulement quant à la qualité, la valeur nutritionnelle et la diversité. Il désire une nutrition équilibrée, il évite la matière grasse, il abandonne de plus en plus les vivres traditionnels de sa région et préfère diversifier à lextrême. Il a remplacé partiellement la pomme de terre ou la pâte traditionnelle par la pomme nature, la pomme frite, le spaghetti, le maïs, le riz, la pâte de manioc, la semoule, le macaroni, le pain, la pizza, etc. Lors de ses achats de vivres, il a parfois dautres motivations: lenvironnement, la santé, le bien-être des animaux, des motivations politiques pour consommer ou refuser certains produits. Il préfère les produits ayant une valeur ajoutée élevée: de petits emballages adaptés à sa petite famille, des repas préparés. Les achats ne se font plus en fonction du paiement du salaire. Ils ont souvent lieu dans les supermarchés.
Il y a une relation entre le profil du consommateur et la structure du marché:
Encadré 6
LE CONSOMMATEUR URBAIN EN INSÉCURITÉ ALIMENTAIRE AU ZAÏRE Linsécurité a pour résultat direct que le consommateur achète ses vivres caloriques de base, tels que le manioc, le plus souvent au marché de demi-gros. Il préfère acheter un sac de cossettes de manioc (tubercules séchés), un produit avec une valeur ajoutée minimale et organiser le transport, le triage, la transformation lui-même afin de valoriser sa main-doeuvre. Les plus démunis sont obligés dacheter au fur et à mesure quils gagnent de largent. Ils sont obligés dacheter de petites quantités au marché de détail, souvent à un prix plus élevé. La demande de vivres des citadins en insécurité alimentaire a les caractéristiques suivantes:
|
Encadré 7
LES INDICATEURS DE LIMPACT DE LA DÉVALUATION DU FRANC CFA SUR LA CONSOMMATION Quelques exemples:
Durant la phase de croissance économique et daugmentation du
revenu, les consommateurs tendent à remplacer les céréales
brutes et les tubercules par des aliments tels que la viande bovine, le
poulet, le poisson, le lait, le riz et les repas préparés.
Ils remplacent la viande la moins chère par des formes plus chères.
Le consommateur remplace les légumes les moins chers par dautres,
par exemple, les légumes-feuilles par les carottes, les choux et
les tomates. Il nachète plus seulement son sac de tubercules,
de maïs ou de riz, mais préfère acheter de temps en temps
dautres vivres caloriques afin de diversifier. Il achète des
produits partiellement transformés au lieu de soccuper lui-même
de la transformation (triage et mouture des tubercules et du maïs,
lachat dattiéké); en dautres mots, il achète
des services du marché ou de la valeur ajoutée. Ces effets
se manifestent le plus en Côte dIvoire, au Sénégal,
au Cameroun, les pays ayant un PNB par personne relativement élevé.
Dans dautres pays, comme le Zaïre et le Rwanda, il y a une évolution
inverse. A mesure que le revenu augmente, la proportion des dépenses
consacrées aux aliments ne diminue pas aussi vite quon pourrait
sy attendre. Lélasticité-revenu de la demande
daliments de base, qui fournissent la plus grande partie des calories,
est faible et tombe à mesure que le revenu augmente, tandis que celle
de la viande, du lait, des aliments importés et des produits non
alimentaires est supérieure à lunité, quel que
soit le niveau du revenu. |
Encadré 8 DE VRAIES BOUILLIES AFRICAINES La dévaluation du franc CFA a multiplié par deux le prix des produits dimportation. Les bébés africains risquent de consommer beaucoup moins de bouillies importées, telles que Cérélac, Blédine et autres. Revenir aux bouillies de sevrage traditionnelles peut être une bonne solution. Des recherches effectuées récemment au Congo et au Sénégal ont permis de mettre au point des aliments dexcellente qualité à des prix abordables. Mamadou Mamadou Sow a mis au point une farine infantile à base de farine de mil, maïs ou sorgho, huile darachide et de palme, fruit du baobab, oeufs et sucre. Seuls le lait en poudre et larôme sont importés. Lentreprise qui fabrique cet aliment déclare une vente journalière de 2 500 sachets, soit une ration moyenne de 15 000 bébés. Source: Spore n°57. |
Le secteur agricole en Afrique subsaharienne comprend, dune part, des millions de petites exploitations agricoles et, dautre part, des plantations et un nombre limité de fermes modernes. La production des produits vivriers est presque entièrement entre les mains de petites exploitations familiales. Le manioc, le maïs, le riz, le mil, les bananes, les fruits et légumes sont souvent produits pour lautoconsommation, le surplus familial étant mis en vente. La superficie moyenne cultivée par ménage agricole varie entre 0,8 et 10 ha dans toute lAfrique subsaharienne, selon le degré de mécanisation et de fertilité du sol. Les investissements dans le logement, lentreposage et les cultures pérennes sont principalement créés par la main-doeuvre familiale à laide de matériaux locaux. Les petits agriculteurs cultivent avec des instruments manuels. La traction animale et la mécanisation sont très rares en Afrique centrale, mais plus fréquentes dans certains pays de lAfrique de lOuest (le Sénégal, la Côte dIvoire). Loutillage classique du paysan comprend principalement des houes et des machettes. Les terres retrouvent leur fertilité dans le système de la jachère. Lutilisation dengrais chimiques diffère selon le pays. Lagriculteur traditionnel nachète pas beaucoup de facteurs de production comme des semences, des engrais et des pesticides. Mais au Sénégal, en Côte dIvoire et au Nigéria, lutilisation des engrais est déjà plus répandue. Les boutures de manioc et les semences de maïs, darachides, de riz et de haricots proviennent principalement de la propre production. Les crédits et lépargne formels sont souvent inexistants auprès du paysan. La plupart du temps, il vend une partie de la récolte quand il a besoin dargent.
La vente se fait souvent au bord du champ, à la maison ou au marché rural. La plupart des marchés ruraux ont lieu une fois par semaine, ou tous les quinze jours. Plusieurs commerçants-camionneurs-collecteurs achètent sur ces marchés. Ils peuvent également rendre visite aux cultivateurs individuels quand le marché ne se tient pas le jour prévu. La plupart des aliments de première nécessité vendus en ville sont achetés par des collecteurs. Ces marchés ruraux périodiques servent souvent de premier centre de rassemblement des aliments destinés aux villes et aux centres urbains. Le commerce des aliments de base destinés aux centres urbains est souvent différent du commerce local et se déroule dans des lieux différents. Il ne faut pas surestimer limportance de ces marchés. Les femmes y portent des produits pour les vendre et elles y achètent des biens manufacturés.
Le secteur formel sintéresse uniquement aux produits qui peuvent être achetés en quantités suffisantes avec une norme fixe de qualité. Il nest plus intéressé lorsque chaque transaction de vente nécessite un contrôle personnel et approfondi de la quantité. Dans un marché atomisé, il est intéressant pour lagriculteur traditionnel de tromper le commerçant. Pour un commerçant, il est presque impossible de récupérer sont argent. En outre, les montants concernés sont généralement trop petits pour faire des démarches. Lagriculteur ne doit pas avoir peur pour sa réputation. Il y aura toujours dautres commerçants. Un système de production traditionnel impose certaines contraintes au système de collecte des vivres (voir étude de cas 4):
Il est évident que dans un système de production traditionnel, la collecte rurale des vivres exige beaucoup de main-doeuvre par unité de produit et de prises de décision au moment de la transaction. La collecte des céréales est plus facile que celle des tubercules; la collecte des légumes et des fruits est la plus problématique. Le résultat est que le secteur formel, à fort emploi de personnel et avec une gestion centrale, perd de sa compétitivité. Au fur et à mesure que la taille des entreprises agricoles augmente et que la mécanisation et lachat dintrants deviennent plus importants, il y a une standardisation de loffre, la valeur de la transaction moyenne augmente et le secteur formel devient plus compétitif.
Les grosses exploitations remontent souvent à la période coloniale et à la création de plantations et de grosses fermes produisant pour lexportation. Selon Eicher et Baker (1982), les complexes alimentaires à grande échelle avec une main-duvre importante ne peuvent pas faire concurrence aux petites exploitations africaines pour satisfaire les besoins alimentaires de base. Néanmoins, il existe un champ daction limité pour quelques sociétés multinationales produisant des fruits et légumes frais et des fleurs coupées pour les marchés dexportation (par exemple les haricots verts, expédiés par avion du Burkina Faso, les fleurs du Kenya, etc). Dans ces cas, toute la chaîne est contrôlée et la société prévoit les intrants, les semences, la technologie et la vulgarisation. Ceci permet dorganiser une collecte efficace. La même approche est utilisée dans les secteurs du coton, de la canne à sucre et dautres agro-industries.
Dans beaucoup de pays africains, il y a également des fermes modernes qui produisent des légumes pour les supermarchés locaux. La compétitivité de ces fermes vis-à-vis de lhorticulteur informel nest pas basée sur la qualité même des légumes, mais sur lorganisation de la vente. Un supermarché ne peut pas acheter des légumes auprès de petits paysans aussi longtemps quun contrôle extensif de chaque transaction ainsi quune discussion sur le prix sont nécessaires.
Labsence dun système de collecte dynamique et ordonné a comme effet de maintenir un statu quo de la production à petite échelle, et une compétition déséquilibrée, dominée par de bas niveaux de productivité et vice versa. Les petites transactions sont des contraintes qui mènent à une utilisation inefficace des camions en raison du nombre élevé de commerçants impliqués. Cette inefficacité a des implications sur la chaîne de commerce. Afin de réaliser une collecte plus efficace, les agriculteurs devraient centraliser les transactions de vente dans le temps et à moindre mesure dans lespace. La collecte optimale se situerait au niveau du village ou dun groupe de villages, avec un calendrier de vente fixe. Une transaction de vente de trois à quatre sacs par ménage au lieu du nombre actuel de un ou moins, mènerait de manière significative à de moindre coûts de collecte et de transport. Lintroduction déquipements de transport bon marché dans les régions rurales permettrait aux agriculteurs de transporter leurs produits aux marchés sans perdre leur pouvoir de négociation.
Dans les pays industrialisés, le problème de la collecte des légumes et des fruits a été résolu par lorganisation des criées, souvent par les coopératives des paysans. Ces organisations peuvent être considérées comme les successeurs des marchés semi-permanents. La grande différence avec les pays en développement est que:
La figure 4 présente la manipulation dun produit dans un marché de gros typique. Ce système nest souvent pas compatible avec les systèmes traditionnels de production et de collecte pour plusieurs raisons:
Aussi longtemps quune standardisation des vivres avec un système de contrôle et de pénalisation nest pas réalisée, il est presque impossible pour le secteur formel dorganiser la collecte en commun dune façon durable en raison du problème de confiance. Ceci implique que pour certains produits, un vrai commerce de gros nest pas possible en Afrique subsaharienne. Il ne suffit pas de construire les installations et les infrastructures nécessaires pour obtenir un marché de gros efficace. Des exemples où le secteur informel est traditionellement plus efficace que le secteur formel sont la collecte des tubercules de manioc et de la banane, le circuit du lait local, des légumes et des fruits. Des exemples où le secteur formel a des avantages comparatifs sont la mouture du maïs et les importations de riz.
Les facteurs mentionnés ci-dessus démontrent comment lévolution dun système informel de commercialisation vers un système formel est liée au développement économique dun pays; en effet, le profil du consommateur et la structure de lagriculture dépendent du niveau de développement du pays. Cette évolution se passe à une vitesse différente selon le produit. La technologie de commercialisation et de transformation y joue un rôle crucial. Selon Braudel (1979, p. 58), «le colportage stimule et entretient léchange. Mais là où il a priorité, la preuve est faite, à lordinaire, dun certain retard économique. Cette forme de commerce séteint delle-même, chaque fois quun pays atteint un certain stade de développement.»
On a déja démontré que les caractéristiques dun produit vivrier ont un impact significatif sur la structure du commerce. La théorie économique suppose quun système de marchés est efficace dans le cas dune situation de «participants rationnels», «dinformation parfaite», de «concurrence parfaite» avec des «produits homogènes». Un produit homogène, parfaitement divisible et standardisé, a donc subi un triage ou une transformation parfaite. Ce produit ne correspond pas à la réalité et lécart entre théorie et réalité diffère fortement selon le produit. Les observations et les études empiriques démontrent que les entreprises formelles à forte main-duvre sintéressent surtout aux produits dont les caractéristiques sapprochent de ceux du produit optimal:
Figure 4: Manipulation du produit dans un marché de gros typique
Source: FAO (1994).Certaines transformations sont adaptées aux petites échelles. Il existe des techniques qui ne réclament que peu dinvestissements pour le séchage des fruits, des noix et des légumes, pour lextraction de lhuile ou la préparation de produits alimentaires. Dautres le sont moins, comme la mise en conserve des fruits ou la production de lait en poudre, qui nécessitent de gros investissements (Spore, n° 60). Le résultat technique de ces transformations à petite échelle est souvent bonne. Les problèmes concernent la rentabilité économique et le prix de vente.
Afin de commercialiser ces produits «non homogènes» à grande échelle et de résoudre le problème de compétitivité du secteur formel, il est nécessaire de traiter les vivres semi-périssables, ce qui implique une technologie de triage et de transformation. Il faut donc les transformer en «produits homogènes». Le développement et ladoption dinnovations adaptées sont une contrainte majeure. Les innovations concernent aussi bien ladoption et le développement de la technologie que la gestion et lorganisation des filières. Le niveau dinstruction des petits entrepreneurs et agriculteurs constitue un frein fondamental. La taille des entreprises agricoles constitue un problème de rentabilité des innovations. Le résultat est une multiplication des activités de commerce informelles et non une augmentation de la taille moyenne des transactions.
Le PNB par personne englobe, à lexception de la consommation de vivres, une quantité dautres services offerts au consommateur: routes, enseignement, soins de santé, système judiciaire, sécurité, système financier, moyens de télécommunications, etc. La quantité et la qualité de ces facteurs, ou leur absence, ont un impact considérable sur le type de commerce dans un pays. En absence de ces services, le secteur formel perd beaucoup de sa compétitivité vis-à-vis du secteur informel. Ensuite, il ne faut pas seulement compter en termes monétaires, mais également en termes de risques. Un cadre macroéconomique sain et stable pourrait davantage améliorer la performance du secteur vivrier par une croissance économique durable, une stimulation de lépargne et de linvestissement, et par la maintenance et lextension des infrastructures économiques essentielles. En termes dynamiques, la croissance économique causera une évolution dans le commerce du secteur informel vers le secteur formel.
Dans plusieurs pays, les entreprises commerciales sont étouffées par le manque dinvestissements, souvent parasitées et paralysées par des politiques inappropriées, des infrastructures inadéquates et une gestion inefficace (Spore, n° 61). Le cadre socio-économique est en relation étroite avec la structure et le fonctionnement dun système de commercialisation:
Il est donc normal que lagriculture moderne et lagro-industrie se développent dabord dans les pays ayant un PNB élevé. Quelques exemples:
Le Zaïre est actuellement un exemple dune situation extrême où le secteur formel est remplacé par le secteur informel. Il est évident quavec une évolution macroéconomique pareille, le nombre de familles qui se trouvent dans une situation dinsécurité alimentaire a augmenté de façon exponentielle. Les soins de santé, lenseignement, la nourriture de base ne sont plus une certitude, les risques généraux de survie ont augmenté. Dans la situation actuelle, les ménages ont changé leur comportement en tant que consommateur, employeur, entrepreneur, membre de la société civile, etc. Partout dans le monde, il y a eu une croissance rapide du secteur informel lors dune période dinstabilitité macroéconomique. Pour le système de commercialisation et de distribution des vivres, il existe plusieurs implications:
A lexception du rôle économique, le rôle social des circuits de distribution des vivres en Afrique subsaharienne est important. Dans chaque ville, le système fournit un emploi à des milliers dhabitants dans le commerce, la transformation et la préparation domestique des aliments. Le système contribue à une distribution des revenus, permet lorganisation de systèmes de solidarité entre participants et peut être utilisé pour protéger le revenu contre linflation. Il contribue donc à une certaine forme de protection sociale, comme le démontre lexemple suivant.
Les investissements se font généralement dans le petit commerce de distribution des vivres pour les femmes, et de collecte et de transport des produits agricoles pour les hommes, en raison des barrières dentrée extrêmement basses. Pour la plupart de ces femmes, qui sont souvent nées en milieu rural, qui ne connaissent que lagriculture et le commerce de vivres, qui ont un niveau déducation limité et ne parlent souvent que les langues vernaculaires, il ny a pas dautres sources demploi dans une métropole urbaine. Ces femmes ne font presque jamais appel aux caisses dépargne pour des crédits de démarrage et les fonds de fonctionnement dune petite entreprise familiale. Généralement, elles trouvent les fonds nécessaires dans la famille ou reçoivent des produits à crédit des semi-grossistes. Le conjoint constitue la principale source des fonds investis: le mari prélève de son salaire un montant quil met à la disposition de son épouse pour sinstaller au marché de détail ou organiser la vente des biens de première nécessité sur une table devant la maison.
Le premier souci dun ménage qui reçoit le salaire mensuel du mari est dacheter un sac de manioc, digname, de riz, de millet, etc.. Dès que le sac est acheté, la survie de la famille jusquau mois prochain est en principe garantie. Ce qui reste de largent est investi dans la marchandise qui est vendue au marché de détail par lépouse ou la fille. Cette activité commerciale aide les ménages à réaliser un bénéfice direct et à réduire les risques généraux:
Il est clair que «gagner un revenu supplémentaire» nest quune des motivations pour faire du commerce. Les marchés de détail jouent également un rôle social dans une situation de crise. Une implication cruciale est que ce rôle pour les marchés de détail peut empêcher une compétition saine et efficace. En fait, les commerçants sur le marché évitent de se concurrencer sur les prix, cest-à-dire de «casser les prix».
Lutilisation de ces différentes formes de personnel (personnel social, physique, humain), dans une combinaison bien définie, donne à la personne en insécurité alimentaire accès à la nourriture. Dans le cas dune population urbaine pauvre, ce personnel nest souvent quune main-doeuvre ayant une connaissance technique limitée dans lagriculture urbaine et périurbaine et le petit commerce. Limpact de la situation dinsécurité alimentaire massive sur le circuit de commercialisation des vivres est analysé par Goossens (1996). Il y a une explosion dactivités informelles, à basses barrières à lentrée, telles que le commerce de détail et de micro-détail des vivres et le commerce par les colporteurs. Les marchés de détail sapprochent du modèle du marché libre tel que décrit dans la littérature économique: un grand nombre de vendeurs et dacheteurs, de latomicité, labsence de barrières à lentrée, une certaine transparence, labsence de monopoles, etc. Le problème, par contre, est quil ny a que peu de compétition entre les commerçants qui évitent les risques et préfèrent la solidarité entre eux, doù il résulte une hausse des marges de distribution. Le rôle social des marchés, cest-à-dire la création demplois à basses barrières à lentrée, la distribution des revenus, la création des systèmes dassurance, de solidarité et de crédits entre les petits commerçants, etc., devient relativement plus important que le rôle économique du marché, à savoir la distribution efficace des vivres. Les marges de distribution augmentent au fur et à mesure que le rôle social dun système devient plus important. Les plus pauvres, pour qui la barrière à lentrée au commerce de détail est encore trop élevée, en sont les victimes. Ceux-ci ne profitent pas des avantages, mais paient souvent un prix plus élevé pour la nourriture.
En ce qui concerne la structure des marchés, limpact de la demande actuelle du consommateur est la suivante:
Actuellement, les activités horticoles dans les centres urbains saccroissent en raison de la détérioration des infrastructures de transport et des citadins essaient de valoriser leur personnel humain (la main-doeuvre et une connaissance de lagriculture).