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AQUACULTURE

Production

Selon les statistiques de la FAO, la contribution de l’aquaculture à l’offre mondiale de poisson, de crustacés et de mollusques a continué d’augmenter, passant de 3,9 pour cent de la production totale en poids en 1970 à 27,3 pour cent en 2000. L’essor a été plus rapide que dans tous les autres secteurs de production de chair animale. Au plan mondial, le secteur augmente d’un taux composite moyen de 9,2 pour cent par an depuis 1970, contre seulement 1,4 pour cent pour les pêches de capture et 2,8 pour cent pour les systèmes de production d’élevage de viande sur terre. La croissance de la production aquacole dans les eaux continentales a été particulièrement forte en Chine, où la moyenne a été de 11,5 pour cent par an entre 1970 et 2000, contre 7 pour cent par an dans le reste du monde pour la même période. La production de la mariculture en Chine a augmenté d’un taux annuel moyen de 14 pour cent, contre 5,4 pour cent pour le reste du monde. Toutefois, il est fort possible que la production aquacole de ce pays, en particulier les chiffres de sa croissance depuis le début des années 90, aient été surestimés dans les statistiques (voir l’encadré 2). La figure 18 présente les tendances de la production aquacole marine et continentale pour la Chine et le reste du monde.

Figure 18

Figure 19

En 2000, le total de la production aquacole (y compris les plantes aquatiques) communiqué a été de 45,7 millions de tonnes en poids et de 56,5 milliards de dollars EU en valeur. La Chine aurait produit 71 pour cent du volume total et 49,8 pour cent de la valeur totale de la production aquacole. Plus de la moitié du total de la production aquacole mondiale en 2000 était constituée de poissons téléostéens, et la croissance des principaux groupes d'espèces continue à être rapide et ne montre aucun signe de ralentissement à ce jour (figure 19). La production mondiale de plantes aquatiques a atteint 10,1 millions de tonnes (5,6 milliards de dollars EU), dont 7,9 millions de tonnes (4 milliards de dollars EU) provenant de la Chine.

Contrairement aux systèmes d’élevage sur terre, où l’essentiel de la production globale concerne un petit nombre d’espèces animales et végétales, il y aurait eu en 2000 plus de 210 différentes espèces animales et végétales aquatiques d’élevage. Cette grande diversité reflète le nombre important d'espèces aquatiques que l’on peut facilement adapter à toute une série de systèmes de production et de conditions présentes dans les différents pays et régions du monde. Il faut noter également que le nombre d'espèces d'élevage est probablement beaucoup plus élevé que le chiffre communiqué, étant donné qu’en 2000, plus de 9,7 millions de tonnes (21,2 pour cent) de la production aquacole mondiale n'ont pas été ventilés par espèce. Ce groupe «non spécifié» comporte vraisemblablement des espèces qui n’ont pas encore été inscrites individuellement comme espèces d’élevage.

En 2000, plus de la moitié de la production aquacole mondiale provenait d’eaux salées et d’eaux saumâtres. Le taux de croissance annuel moyen (pour la période 1970-2000) a toutefois été plus élevé pour la production aquacole en eau douce. Bien que la production en eau saumâtre en 2000 ne représentait que 4,6 pour cent du total de la production aquacole mondiale en poids, elle correspondait à 15,7 pour cent de la production totale en valeur. Les principaux groupes d’espèces élevées en eau douce ont été des poissons téléostéens. Les crustacés de valeur élevée et les téléostéens prédominent dans les eaux saumâtres, et les mollusques et plantes aquatiques dans les eaux salées (figure 20). La production en quantité et en valeur pour les principaux pays producteurs et les principaux groupes d'espèces est indiquée sur les figures 21 et 22.

Figure 20

Figure 21

Il est particulièrement significatif que la production aquacole dans les pays en développement et les pays à faible revenu et à déficit vivrier (PFRDV) augmente régulièrement d’un taux moyen d’environ 10 pour cent par an depuis 1970. Toutefois, la croissance de la production (tant en quantité qu’en valeur) dans les PFRDV, à l’exclusion de la Chine, a été plus lente que dans les pays n’appartenant pas à cette catégorie (figure 23). En revanche, la production aquacole dans les pays développés augmente d’un taux moyen de seulement 3,7 pour cent par an depuis 1970, et a même enregistré une diminution de 2,4 pour cent entre 1999 et 2000. En 2000, à l’exception des crevettes d’eau salée, l’essentiel de la production aquacole dans les pays en développement était constitué d’espèces de poissons omnivores/herbivores ou de poissons filtreurs. En revanche, les espèces carnivores représentaient 73,7 pour cent de la production aquacole de poissons téléostéens dans les pays en développement.

Au plan de l’offre de poisson à des fins alimentaires (c’est-à-dire produits d’espèces téléostéennes aquatiques et de coquillages destinés à la consommation humaine, sur la base du poids vif – à l’exclusion des plantes aquatiques), le secteur aquacole mondial, en dehors de la Chine, a produit en 2000 environ 11 millions de tonnes de produits aquatiques d’élevage, contre environ 52 millions de tonnes pour les pêches de capture. Les chiffres communiqués par la Chine étaient d’environ 20 millions de tonnes pour l’aquaculture et 7 millions de tonnes pour les pêches de capture, ce qui montre clairement la prédominance de l'aquaculture dans ce pays. En dehors de la Chine, l’offre de poisson pour l’alimentation par habitant provenant de l’aquaculture a quadruplé, passant de 0,6 kg en 1970 à 2,3 kg en 2000.

Durabilité

Au cours des 30 dernières années, l’aquaculture s’est développée, diversifiée, intensifiée et a progressé au plan technologique. Le potentiel de ce développement pour améliorer la sécurité alimentaire au plan local, réduire la pauvreté et améliorer les moyens d’existence ruraux est largement reconnu. La Déclaration et la Stratégie de Bangkok (Réseau de centres d’aquaculture pour la région Asie-Pacifique [RCAAP] et FAO, 2000) soulignent qu'il est nécessaire que le secteur aquacole continue de se développer pour mettre pleinement en valeur son potentiel, apportant ainsi une nette contribution à l’offre mondiale d’aliments, à la sécurité alimentaire des pays, à la croissance économique, aux échanges et à l’amélioration du niveau de vie.

UTILISATION DU POISSON

Sur les 89 millions de tonnes estimées de poisson produits en 2000 dans le monde, à l’exclusion de la Chine, près de 71 pour cent (63 millions de tonnes) ont été destinées à la consommation humaine directe. Le reste (environ 29 pour cent) a été utilisé pour divers produits non alimentaires, principalement pour la transformation en tourteaux et en huile. Les chiffres correspondants pour la Chine, établis sur la base de la production des pêches de capture, de l’aquaculture et de farine de poisson communiquée et des estimations de la FAO concernant les autres utilisations non alimentaires (voir l’encadré 2), ont été de près de 42 millions de tonnes pour la production totale et de près de 34 millions de tonnes (81 pour cent) pour la consommation humaine directe. Le reste a été utilisé pour la fabrication de farine et autres usages non alimentaires, y compris des aliments pour l’aquaculture.

Figure 22

Figure 23

En tant que produit très périssable, le poisson a besoin d’être transformé. En 2000, plus de 60 pour cent du total de la production des pêches mondiales ont été transformés d'une façon ou d'une autre. Quant au poisson destiné à la consommation humaine directe, le poisson frais a représenté une part importante (53,7 pour cent), suivi du poisson congelé (25,7 pour cent), du poisson en conserve (11 pour cent) et du poisson fumé (9,6 pour cent).

Pendant les années 90, on a enregistré une forte augmentation de la part de la production de poisson utilisé frais/ réfrigéré plutôt que sous forme d’autres produits (figure 24). La demande de poisson frais a augmenté mais a été partiellement compensée par une faible diminution des autres utilisations. Le poisson frais a augmenté en volume (équivalent poids vif) passant de 28 millions de tonnes en 1990 à 52 millions de tonnes en 2000. Le poisson transformé (congelé, fumé et en conserve) a augmenté en volume (équivalent poids vif) passant de 43 millions de tonnes en 1990 à 45 millions de tonnes en 2000. La congélation est la principale méthode de transformation du poisson destiné à la consommation humaine, et en 2000 la part de poisson congelé a représenté 55 pour cent. Dans les pays développés, cette part a augmenté régulièrement à tel point que le poisson congelé est devenu le produit le plus répandu avec une part représentant 40 pour cent de la production halieutique. En revanche, dans les pays en développement, la part est constante à environ 12 pour cent.

Figure 24

La presque totalité des produits utilisés à des fins non alimentaires en 2000 (33,7 millions de tonnes) venaient des stocks de petits pélagiques, qui ont représenté près du tiers du total des pêches de capture. La plupart de ces produits ont été utilisés comme matière première pour la production d’aliments pour animaux et à d’autres fins. Comme les captures de petits pélagiques destinés à la transformation ont atteint à nouveau les niveaux précédant le passage d’El Niño, la quantité destinée à des utilisations non alimentaires a été de 9 millions supérieure à 1998.

Consommation

Le total des disponibilités de poisson pour la consommation humaine dans le monde, à l’exception de la Chine, augmente à raison de 2,4 pour cent par an depuis 1961, tandis que la population s’accroît de 1,8 pour cent par an. Depuis la fin des années 80, toutefois, la croissance démographique, à l’exclusion de la Chine, a parfois été plus rapide que l’augmentation de l’offre totale de poisson, conduisant à une baisse de l’offre de poisson par habitant, qui est passée de 14,6 kg en 1987 à 13,1 kg en 2000 (figure 2). Pour la Chine, les augmentations annuelles correspondantes sont de 6,4 pour cent pour l’offre de poisson destiné à l’alimentation depuis 1961 et de 1,7 pour cent pour la population (figure 9). L’augmentation annuelle a été régulière jusqu’au milieu des années 80 (3,8 pour cent entre 1961 et 1985) et a ensuite brusquement triplé pendant les 15 années qui ont suivi (10,8 pour cent entre 1985 et 2000).

Pour l’ensemble de la population, la part de la consommation de protéines animales provenant du poisson, des crustacés et des mollusques est passée de 13,7 pour cent en 1961 à 16,1 pour cent en 1996 pour diminuer ensuite légèrement à 15,8 pour cent en 1999.

TABLEAU 8
Disponibilités totales et par habitant du poisson destiné à l’alimentation selon les continents et les groupements économiques en 1999

 

Disponibilités totales (million de tonnes en poids vif)

Disponibilités par habitant (kg par an)

Monde

95,5

16,0

Monde

   

à l’exclusionde la Chine

64,3

13,6

Afrique

6,2

8,0

Amérique du Nord et centrale

8,1

16,8

Amérique du Sud

2,9

8,5

Chine

31,2

25,1

Asie

   

(à l’exclusion de la Chine)

32,5

13,7

Europe

13,9

19,1

Océanie

0,7

22,5

Pays industrialisés

25,4

28,3

Economies en transition

3,7

12,7

PFRDV

   

(à l’exclusion de la Chine)

20,8

8,3

Pays en développement

   

à l’exclusion des PFRDV

13,7

14,8

Dans les pays industrialisés (tableau 8) où les régimes alimentaires contiennent une gamme plus diversifiée de protéines animales, les disponibilités ont augmenté passant de 13,2 millions de tonnes en 1961 à 25,4 millions de tonnes en 1999, soit une offre par habitant en progression de 19,9 à 28,3 kg. Le taux de croissance a été régulier jusqu’à la fin des années 80 et s’est stabilisé depuis. Dans ce groupe de pays, le poisson a contribué dans une proportion croissante à l'apport total en protéines jusqu'en 1989 (dont il constitue une proportion comprise entre 6,5 et 8,5 pour cent), mais son importance a commencé à diminuer graduellement depuis lors, de telle sorte qu'en 1999 sa contribution (7,7 pour cent) était revenue au niveau du milieu des années 80.

Au début des années 60, les disponibilités de poisson par habitant dans les PFRDV étaient en moyenne le cinquième de celles des pays riches; toutefois, l'écart s'est progressivement réduit et, en 1999, la consommation moyenne de poisson des PFRDV était proche de la moitié de celle des économies riches. A l'exception de la Chine, les disponibilités par habitant dans les PFRDV sont passées de 5 à 8,3 kg au cours de la période considérée – soit un taux de croissance annuel de 1,3 pour cent.


ENCADRÉ 6

La biodiversité aquatique des systèmes agricoles fondés sur le riz à l'appui des moyens d’existence ruraux

Champs rizicoles – plus que simplement du riz

Dans les plaines inondées des hautes et basses vallées du Mékong dans la Province de Yunnan, en Chine et dans la Province de Kampong Thom au Cambodge, on a tenté d’expliquer la présence des ressources aquatiques vivantes et la façon dont elles sont utilisées par les riziculteurs. Ces derniers se servent de leurs propres outils et techniques pour recueillir les espèces aquatiques dans les champs. Des approches participatives ont permis de connaître les modes de vie traditionnels des populations locales, notamment des nombreuses minorités ethniques1.

On a considérablement enrichi nos connaissances. Les écosystèmes rizicoles favorisent une riche biodiversité aquatique qui est importante, non seulement comme source d’aliments quotidiens et de revenus pour les ménages ruraux, mais également comme habitats pour des espèces rares et endémiques. Le poisson constitue le principal groupe du point de vue de la diversité des espèces et de l’importance pour les populations locales. Au total, 60 à 70 espèces de poissons différentes sont présentes dans les élevages rizicoles en Chine et au Cambodge respectivement. L'essentiel est consommé à l’état frais ou transformé en pâte de poisson fermenté. Les autres espèces sont transformées (soit en filets ou en morceaux), séchées, salées, fumées ou servent à préparer des sauces à base de poisson.

Le poisson frais ou transformé est la principale source de protéine pour les populations locales vivant dans ces régions et il est habituellement consommé à chaque repas. A Kampong Thom, une famille moyenne de cinq personnes consomme probablement 1 kg de poisson frais par jour pendant la campagne de pêche, c’est-à-dire lorsque les champs rizicoles sont inondés. La même famille a besoin d’environ 20 kg de pâte de poisson fermenté pendant la saison sèche. Le reste des captures est vendu sur les marchés. Selon les outils employés, un aquaculteur peut capturer entre 15 et 20 kg de poisson si la journée est bonne, même si la capture moyenne pendant la campagne de pêche est inférieure à 10 kg par jour. En Chine, divers poissons, crustacés, mollusques, amphibiens, insectes, reptiles et plantes aquatiques provenant de systèmes fondés sur la riziculture constituent une partie essentielle du régime alimentaire quotidien, en particulier pour la minorité Dai à Xishuangbanna. Le niveau de consommation d’organismes aquatiques est resté relativement constant; aujourd’hui, les captures de l’élevage fondé sur la riziculture fournissent entre un cinquième et un tiers environ de la consommation alors qu’elles fournissaient, il y a 10 ans, la moitié du poisson nécessaire dans le régime alimentaire. L’utilisation d’organismes aquatiques comme aliments pour animaux et appâts, ou à des fins médicinales, ne fait qu’augmenter leur valeur au plan de la consommation humaine.

L’offre de ressources aquatiques est en diminution. La croissance démographique conduit à la surexploitation de populations de poissons résidant de façon saisonnière. L’utilisation de pesticides, la destruction des lieux de reproduction et les méthodes de pêche illicite contribuent également au déclin. Il semble probable que dans d’autres régions rizicoles du monde, où les organismes aquatiques proviennent des champs rizicoles et contribuent aux besoins nutritionnels, l’évolution soit similaire2.

1 FAO. 2002. Traditional use and availability of aquatic biodiversity in managed ecosystems, publié sous la direction de M. Halwart et D. Bartley. Rome
2 FAO. 2002. Recent FAO initiatives on the availability and use of aquatic organisms in rice-based farming, par M. Halwart. Rome.
Source: M. Halwart, Département des pêches de la FAO.

Figure 25

Figure 26

Malgré la consommation relativement faible en poids observée dans les PFRDV, la contribution du poisson à l'apport total en protéines animales est considérable (voisine de 20 pour cent) et pourrait être plus importante que les statistiques officielles ne le montrent en raison de la contribution non déclarée des pêches de subsistance à l’apport alimentaire. Toutefois, au cours des quatre dernières décennies, la part de protéines de poisson dans les protéines animales a légèrement baissé à cause d’une croissance plus rapide de la consommation d’autres produits d’origine animale.

Parallèlement aux variations constatées, il existe des différences marquées aux niveaux continental, régional et national quant à l'importance du poisson dans la nutrition (figures 25 et 26). Par exemple sur les 95,5 millions de tonnes disponibles pour la consommation dans le monde en 1999, seules 6,2 millions de tonnes ont été consommées en Afrique (offre par habitant de 8 kg), tandis que les deux tiers du total ont été consommés en Asie – 32,5 millions de tonnes en Asie à l'exclusion de la Chine (13,7 kg par habitant) et une quantité similaire en Chine uniquement (où les disponibilités apparentes ont atteint 25,1 kg par habitant).

Actuellement, les deux tiers du total de l’offre de poisson destiné à l’alimentation proviennent de la pêche dans les eaux marines et continentales et le tiers restant de l'aquaculture. La contribution des pêches de capture continentales et marines aux disponibilités alimentaires par habitant s'est stabilisée entre 10 à 11 kg par habitant au cours de la période 1970-2000. Les récentes augmentations des disponibilités par habitant sont donc le fait de la production aquacole, que ce soit l'aquaculture rurale traditionnelle ou l'aquaculture commerciale extensive d’espèces à valeur élevée. En moyenne, pour l'ensemble des pays du monde, à l'exception de la Chine, la contribution de l'aquaculture aux disponibilités alimentaires par habitant est passée de 0,5 kg en 1970 à 1,8 kg en 2000 – soit un taux annuel moyen de 4,5 pour cent. En Chine, où les pratiques aquacoles sont depuis longtemps une tradition, l'offre provenant de l'aquaculture serait passé de 1 kg par habitant à près de 19 kg pendant la même période, supposant un taux de croissance annuel de 11 pour cent.

La quantité totale de poisson consommée et la composition par espèce de l'offre alimentaire varient par région et par pays, ce qui correspond aux différents volumes des ressources aquatiques naturelles dans les eaux voisines ainsi qu’à la diversité des traditions alimentaires, des goûts, de la demande et des revenus. Les poissons démersaux sont largement préférés dans les pays d'Europe du Nord et d’Amérique du Nord, et les céphalopodes sont consommés dans plusieurs pays méditerranéens et asiatiques, mais beaucoup moins dans d'autres régions. Malgré une rapide augmentation de la contribution de l'aquaculture à la production, les crustacés restent des produits très coûteux dont la consommation est fortement concentrée dans les pays riches. Sur les 16 kg de poisson disponibles par habitant pour la consommation en 1999, la plus grande partie (75 pour cent) était constituée de poissons téléostéens. La part des coquillages était de 25 pour cent – soit 4 kg par habitant, répartis comme suit: 1,4 kg de crustacés, 2,2 kg de mollusques et 0,4 kg de céphalopodes.

Au niveau de l'offre totale, 27 millions de tonnes provenaient d'espèces d’eau douce et diadromes. Les espèces marines de poissons téléostéens ont fourni 44 millions de tonnes dont 17 millions de tonnes pour les espèces démersales, 19 millions de tonnes pour les espèces pélagiques et 8 millions de tonnes d'espèces marines diverses non identifiées. Les autres 20 pour cent correspondaient à des coquillages, dont 8,6 millions de tonnes de crustacés, 2,7 millions de tonnes de céphalopodes et 12,5 millions de tonnes de mollusques divers. Au fil des années, il n'y a pas eu de variation spectaculaire de la répartition de la consommation mondiale moyenne par grandes catégories: les espèces démersales se sont stabilisées à environ 2,9 kg par habitant et les poissons pélagiques à 3,2 kg. Deux groupes font exception dans la mesure où ils ont enregistré des hausses considérables entre 1961 et 1999: les crustacés dont l’offre par habitant a plus que triplé, passant de 0,4 à 1,4 kg, en raison principalement de la production de crevettes d’élevage et les mollusques dont l’offre a également augmenté, passant de 0,6 à 2,1 kg par habitant.

Le poisson contribue jusqu’à 180 calories par habitant et par jour, mais ces niveaux sont atteints seulement dans quelques pays où il n’y a pas d’autres aliments riches en protéines produits localement et où la préférence pour le poisson a été développée et entretenue (Japon, Islande et plusieurs petits pays insulaires, par exemple). En général, le poisson fournit environ entre 20 et 30 calories par jour. Les protéines de poisson sont essentielles et déterminantes dans le régime alimentaire dans certains pays à forte densité de population où l'apport total en protéines est parfois peu élevé, et très importantes dans le régime alimentaire de populations d’autres pays (par exemple, le poisson contribue à environ 50 pour cent du total des protéines en Gambie, au Ghana, en Guinée équatoriale, en Indonésie, en Sierra Leone, au Togo, en Guinée, au Bangladesh, en République du Congo et au Cambodge).

A l'échelle mondiale, plus d’un milliard de personnes sont tributaires du poisson comme principale source de protéines animales (c’est-à-dire que le poisson leur fournit au moins 30 pour cent de l’apport nécessaire) (figure 27). La dépendance à l'égard du poisson est généralement plus marquée dans les régions côtières que dans les régions continentales. Environ 56 pour cent de la population mondiale tire du poisson au moins 20 pour cent de son apport en protéines animales et, dans certains petits pays insulaires, cette dépendance est pratiquement totale.

COMMERCE DU POISSON

Outre leur rôle en tant que sources d'aliments et de moyens d’existence, les pêches sont également dans de nombreux pays une source importante de devises étrangères. Dans quelques cas, les exportations venant des pêches sont essentielles à l'économie. Par exemple, en 2000, elles ont représenté plus des deux tiers de la valeur totale des produits échangés au Groenland, aux Seychelles, dans les îles Féroé et en Islande. Entre de nombreux pays, il existe un commerce bilatéral important de produits halieutiques. L'excédent commercial est significatif pour l'Amérique du Sud, l'Afrique, la Chine et l'Océanie (figure 28). Les produits provenant de la production aquacole représentent une part de plus en plus importante du commerce international des produits halieutiques (voir l'encadré 7).

Figure 28

En 2000, l’ensemble du commerce mondial du poisson et des produits de la pêche a atteint une valeur d'exportation de 55,2 milliards de dollars EU, soit une augmentation de 8 pour cent depuis 1998, largement due à une hausse du volume des produits échangés (figure 29); par rapport à 1998, les prix des principaux produits alimentaires ont légèrement diminué et ceux des aliments pour animaux ont fortement baissé. La Thaïlande a continué d'être le principal pays exportateur avec 4,4 milliards de dollars EU. La Chine, qui a enregistré une forte hausse de ses résultats d'exportation à 3,7 milliards de dollars EU en 2000 – une augmentation énorme de 36 pour cent par rapport à 1998 – est désormais le deuxième plus gros exportateur. Outre les exportations de la production intérieure, la Chine retransforme des matières premières importées pour l’exportation, créant ainsi une forte valeur ajoutée au cours du processus. La Norvège, qui occupait habituellement le deuxième rang, a communiqué des chiffres d'exportation en baisse, partiellement dus à la diminution du prix du saumon, mais également à la faiblesse de l'euro – devise de la principale zone commerciale du poisson norvégien.

En 2000, les importations de poisson ont atteint un niveau record de 60 milliards de dollars EU. Les pays développés ont représenté plus de 80 pour cent de la valeur totale des importations de produits halieutiques. De nouveau, le Japon a été le plus gros importateur, avec 26 pour cent environ du total mondial, ses importations de poisson représentant 4 pour cent du total des marchandises qu'il a commercialisées. Après la récession économique, qui a entraîné une baisse en 1998, la valeur des importations japonaises de poisson et de produits halieutiques est revenue en 2000 au niveau de 1997. La CE a accru à nouveau sa dépendance à l'égard des importations de poisson. A l'exclusion de l'Espagne, qui est désormais le troisième plus gros importateur de produits halieutiques, tous les autres grands pays de la zone euro ont signalé une baisse des valeurs d'importation en 2000. Les Etats-Unis, tout en restant le quatrième plus gros exportateur du monde, se sont placés en seconde position pour les importations. Celles-ci ont augmenté en 2000, principalement en raison de la hausse des importations de crevettes.

Les recettes nettes en devises étrangères pour les pays en développement (c'est-à-dire, une fois la valeur de leurs importations déduite de la valeur totale de leurs exportations) ont augmenté de 3,7 milliards de dollars EU en 1980 pour s'établir à 18,0 millions de dollars EU en 2000 – soit une augmentation de 2,5 fois en termes réels (corrigée des variations dues à l'inflation). En 2000, elles ont augmenté de près de 10 pour cent en valeurs courantes par rapport à 1999, après plusieurs années de stabilité aux environs de 16 milliards de dollars EU. Ce chiffre est supérieur à celui des exportations nettes d'autres produits agricoles tels que le riz, le café et le thé (figure 30). Pour de nombreux pays en développement, le commerce du poisson représente une source importante de recettes en devises étrangères.

La production et le commerce halieutiques ont considérablement augmenté ces dernières décennies, à la faveur d'améliorations des technologies, des transports et des communications et d'une demande soutenue. Une large part de la production halieutique est commercialisée dans les réseaux internationaux, 37 pour cent environ ayant été exportés en 2000 (équivalent poids vif) sous diverses formes d'aliments et de produits alimentaires pour animaux. Les PFRDV jouent un rôle actif dans ce commerce et représentent actuellement près de 20 pour cent de la valeur des exportations de produits de la pêche. En 2000, l'ensemble des pays en développement ont fourni un peu plus de 50 pour cent du total des exportations en termes de valeur. Même s'il existe un commerce important du poisson et des produits de la pêche entre les économies plus développées, les échanges ont tendance à se faire à partir des pays les moins développés vers les pays les plus développés. Environ 76 pour cent de la valeur des importations sont concentrés dans trois grandes zones: Japon, CE et Etats-Unis. Le commerce entre pays développés augmente, mais il est encore peu important et n'a représenté que 20 pour cent environ du total des exportations de ces pays en 1998-2000.


ENCADRÉ 7

Commerce des produits aquacoles

Les principaux produits aquacoles commercialisés1 sont la crevette, le saumon et les mollusques. Les autres espèces enregistrant une forte croissance au niveau des échanges sont le tilapia, le bar et la dorade.

1 L'ampleur du commerce régional et international des produits aquacoles est difficile à évaluer étant donné que le commerce de bon nombre de ces produits n'est pas encore déclaré dans les principaux pays producteurs. Souvent, les statistiques du commerce international ne font pas de distinction entre produit naturel et produit d'élevage et la ventilation exacte est par conséquent laissée à l'interprétation. La situation va progressivement changer à mesure que des associations de producteurs se créent dans les pays producteurs et qu’elles commencent à enregistrer des données mais également parce que de nouvelles normes écologiques et d'étiquetage exigent de faire une distinction entre produit d'élevage et produit naturel. La nouvelle législation des Etats-Unis sur l’étiquetage constitue un avancement important; depuis le 1er janvier 2002, la plupart des produits de la pêche doivent avoir des étiquettes indiquant s’ils proviennent des pêches de capture ou de l’aquaculture.
Source: A. Lem, Service de la commercialisation et de l’utilisation du poisson de la FAO.

Crustacés

Dans le commerce international, le produit aquacole dominant est la crevette marine, et l'aquaculture a été le principal moteur de l'augmentation du commerce de la crevette au cours des 10 dernières années. La crevette est déjà le produit de la mer le plus commercialisé à l'échelon international et environ 26 pour cent de la production totale proviennent désormais de l'aquaculture (1,1 million de tonnes en 2000). Depuis la fin des années 80, la crevette d'élevage a eu tendance à jouer le rôle de stabilisateur pour l'industrie de la crevette. L'échec des principales récoltes agricoles en Asie et en Amérique latine au cours des années passées a donc eu une incidence sur l'ensemble de l'offre, de la demande, des prix et des habitudes de consommation. La crevette, considérée comme un produit de luxe sur la plupart des marchés, dépend largement, au niveau de la demande, du climat économique dans les pays, et la consommation et le commerce de la crevette peuvent fluctuer considérablement d'une année sur l'autre. Pour le moment, la demande japonaise reste faible tout comme le marché des Etats-Unis après septembre 2001.

Les principaux marchés sont le Japon, les Etats-Unis et la CE, et les plus gros exportateurs de crevettes d'élevage sont la Thaïlande, l'Equateur, l'Indonésie, l'Inde, le Mexique, le Bangladesh et le Viet Nam. La demande de crevettes devrait augmenter à moyen ou long termes. Les marchés asiatiques, tels que la Chine, la République de Corée, la Thaïlande et la Malaisie, se développeront à mesure que les économies locales évolueront et que les consommateurs demanderont davantage de fruits de mer. Cette tendance, qui est déjà en train de réduire les disponibilités de crevettes pour les importateurs traditionnels, conduira éventuellement à des pressions à la hausse sur les prix si l'offre n'augmente pas. Les augmentations de prix encourageront de nouveaux venus dans ce secteur et, si des méthodes durables de production sont adoptées, il y aura une plus grande stabilité des prix.

Le commerce du crabe a augmenté parallèlement à la production aquacole (140 300 tonnes en 2000). Le total des exportations de crabes frais, congelés et en conserve (naturel ou d’élevage) a atteint 240 000 tonnes et 1,5 milliard de dollars EU en 2000.

Poissons téléostéens

La production de poissons téléostéens s'est placée au premier rang en termes de production aquacole totale, avec 23 millions de tonnes en 2000, soit environ 65 pour cent de la production totale de l'aquaculture. La part principale de ce total revient à la carpe (68 pour cent du total de la production de poissons téléostéens en 2000) qui est consommée localement dans les pays producteurs (surtout en Chine et en Inde).

Le commerce international du saumon d'élevage est passé de pratiquement zéro à environ un million de tonnes (2001) en moins de 20 ans. Les espèces commercialisées sont principalement le saumon de l'Atlantique et, dans une moindre mesure, le saumon argenté, qui ont représenté entre 88 et 10 pour cent de la production en 2001, respectivement. L'augmentation des échanges a suivi la hausse de la production de saumon, étant donné que l'essentiel de cette production est concentré dans un petit nombre de pays au marché intérieur limité – Norvège, Chili et Royaume-Uni. La Norvège est le plus gros exportateur de saumon de l'Atlantique, et le Chili le plus gros exportateur de saumon argenté et le deuxième plus gros exportateur de saumon de l'Atlantique. Le principal marché pour la Norvège est la CE, qui absorbe quelque 70 pour cent des exportations norvégiennes, alors que les principaux débouchés du Chili sont le Japon et les Etats-Unis, vers lesquels sont acheminés quelque 55 et 30 pour cent des exportations chiliennes, respectivement.

La Norvège a identifié l'Asie comme étant le futur marché qui se développera (outre une pénétration plus accentuée du saumon sur les marchés européens), et l'industrie norvégienne du saumon d'élevage a dépensé ces dernières années près de 150 millions de dollars EU pour la promotion et la publicité à l’échelon international. Les producteurs chiliens prévoient une forte croissance des marchés des Etats-Unis, d'Amérique latine, d'Europe et d'Asie, à l'exclusion du Japon. Contrairement à la Norvège, le Chili produit une grande quantité de filets, qui sont expédiés frais par avion vers les Etats-Unis.

L'industrie mondiale du saumon d'élevage fait à l’heure actuelle l’objet d’une restructuration rapide avec l’aide de quelques sociétés qui comptent pour une large part de la production et qui ont souvent des liens solides avec l'industrie des aliments pour animaux. Alors que les volumes de la production ont augmenté, les coûts et les prix ont été tirés à la baisse et, au niveau actuel (2,60 à 3,40 dollars EU/kg coût, assurance et fret [c.a.f.]), le saumon est devenu un produit au prix relativement médian sur les marchés internationaux des produits de la mer.

Le commerce international de la truite est beaucoup moins important que celui du saumon, les exportations ayant atteint en 2000 environ 140 600 tonnes sur une production totale de truites d'élevage de 511 000 tonnes. La consommation est concentrée dans les pays producteurs de ce poisson, mais la Norvège et le Chili ont été en mesure d'élever des qualités spécifiques de truites de grande taille à forte pigmentation pour le marché japonais (ce dernier en a importé 84 000 tonnes en 2001).

Une autre espèce dont la production augmente dans de fortes proportions est le tilapia (la production aquacole de tilapia et d'autres cyclidés a atteint environ 1 265 800 tonnes en 2000). Le commerce international est limité mais il se développe, en particulier entre les producteurs d'Amérique centrale (Costa Rica, Equateur et Colombie) et les Etats-Unis, et entre les producteurs asiatiques (Taïwan Province de Chine, Indonésie et Thaïlande) et les Etats-Unis et le Japon. Des échanges modestes s’effectuent également entre la Jamaïque et le Royaume-Uni. Le plus gros exportateur, Taïwan Province de Chine, fournit au Japon des filets de tilapia de très bonne qualité pour le marché du sashimi, et expédie du tilapia congelé vers les Etats-Unis
(40 000 tonnes en 2001). Taïwan Province de Chine exporte environ 70 pour cent de sa production nationale de tilapia. La Thaïlande et l'Indonésie exportent moins de 5 pour cent de la leur. Le Viet Nam a récemment fait son entrée sur le marché mondial du tilapia, alors que la Chine a exporté 12 500 tonnes vers les Etats-Unis en 2001. Le Zimbabwe produit désormais également des filets frais et congelés destinés au marché de la CE.

Aux Etats-Unis, le tilapia est désormais le troisième plus important produit aquacole en poids (56 300 tonnes en 2001), après la crevette et le saumon. Les importations américaines ont fortement augmenté et devraient continuer à le faire à l'avenir. Les prix à long terme du tilapia devraient diminuer et entraîner une hausse des exportations vers les Etats-Unis et vers l'Europe, qui reste un marché sous-développé pour ce produit.

En Europe, l'industrie de la dorade et du bar commun s'est fortement développée au cours des 10 dernières années. La production a atteint 120 000 tonnes en 2001, l'essentiel étant exporté principalement vers l'Italie et l'Espagne. Le principal exportateur a été la Grèce avec 70 pour cent de sa production intérieure. Il y a quelques années, l'Italie était pratiquement l’unique marché d'exportation de la production grecque mais, à la suite d'efforts de commercialisation, la Grèce a trouvé pour ses exportations de nouveaux débouchés, comme le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France, ainsi que l'Espagne pour certaines tailles de poisson. A l'autre bout de la chaîne, les alevins provenant d'Italie, d'Espagne et de France sont vendus aux installations aquacoles en Grèce, à Malte et en Croatie.

La production de bar/dorade a augmenté, les coûts ont été tirés à la baisse et les cours ont diminué de plus des deux tiers entre 1990 et 2002, passant de 16 dollars à environ 4 à 5 dollars EU/kg. La saturation rapide du marché et la chute rapide des prix qui a suivi (60 à 70 pour cent en 10 ans, par rapport à 50 pour cent pour le saumon de l'Atlantique) sont le fait du marché traditionnel beaucoup plus petit pour ces espèces (principalement l'Europe méridionale) comparé au marché du saumon de l'Atlantique, du manque de diversification des produits et d’un développement et d’une promotion limités des marchés. La forte baisse des prix de ces espèces permet toutefois de créer de nouveaux débouchés et d'élargir ceux qui existent, même si l'on ne pourra maintenir des marges de profit acceptables du côté de la production qu'en améliorant davantage la productivité et la diversification des produits. Comme pour le saumon d'élevage, l'industrie du bar/dorade est en phase de consolidation et plusieurs sociétés sont maintenant cotées sur les bourses en Grèce et en Norvège.

Le poisson-chat américain vient désormais au cinquième rang des poissons consommés aux Etats-Unis (0,5 kg par habitant en poids comestible en 2000), et la production intérieure a atteint 280 000 tonnes en 2000. Les exportations sont limitées car la production vise le marché intérieur, alors que les importations en provenance du Viet Nam se sont rapidement imposées sur le marché américain (7 700 tonnes) et sur les marchés européens. La raison du succès du poisson-chat est similaire à celui du tilapia: une forte demande de filets blancs, faciles à préparer de la part des consommateurs.

Algues marines

La production de goémon d'élevage s'est développée au cours des 10 dernières années (10 millions de tonnes en 2000) et représente désormais 88 pour cent du total des disponibilités. L'essentiel de la production est utilisé dans les pays pour l'alimentation, mais le commerce international est en train d'augmenter. Le principal producteur, la Chine, a commencé à exporter du goémon en tant que produit alimentaire vers la République de Corée et le Japon. La République de Corée exporte à son tour de petites quantités de Porphyra (algue marine rouge) et de Undaria (algues marines brunes) vers le Japon (23 500 tonnes en 2000).

Des quantités importantes d’Euchema (algue rouge) sont exportées par les Philippines, la République-Unie de Tanzanie et l'Indonésie vers les Etats-Unis, le Danemark et le Japon. En 2000, le total des importations de goémon de la CE s'est élevé à 61 000 tonnes. Le Chili est un important producteur, transformateur et exportateur d’agar-agar et de carraghénane.

Mollusques

Le commerce international des mollusques est relativement limité comparé à la production totale dont moins de 10 pour cent sont exportés. Les principaux importateurs sont le Japon, les Etats-Unis et la France, alors que les principaux exportateurs sont la Chine et la Thaïlande. La contribution des produits d'élevage au commerce est incertaine. Pour toutes les catégories, les échanges internationaux augmentent.

Le total des importations de coquilles Saint-Jacques fraîches et congelées est passé de 28 000 tonnes en 1985 à 78 100 tonnes en 2000, correspondant à une valeur de 563 millions de dollars EU. L'importation de praires est passée de 33 000 tonnes à 171 000 tonnes pendant la même période, pour une valeur de 301 millions de dollars EU. Les importations de moules ont enregistré une tendance à la baisse, après un record de
175 000 tonnes en 1992, et se sont établies à 137 000 tonnes en 1993 et à 151 000 tonnes en 1994. Toutefois, les importations se sont orientées à la hausse à nouveau les années suivantes: 200 000 tonnes pour une valeur de 310 millions de dollars EU en 2000. Les importations d'huîtres ont augmenté régulièrement passant de moins de 10 000 tonnes en 1985 à 47 000 tonnes en 2000, pour une valeur de 200 millions de dollars EU.

Organismes vivants

En Asie, la consommation de produits de la mer vivants augmente actuellement rapidement en raison de préférences culturelles et d'une richesse croissante. Le marché des produits de la mer vivants est limité à la restauration et aux consommateurs disposant d'un revenu relativement élevé. On prévoit un développement des principaux marchés dû à la demande en Chine, mais également en Malaisie, à Singapour et à Taïwan Province de Chine, ainsi que dans certaines régions d'Amérique du Nord et en Europe où vivent d'importantes communautés chinoises ou asiatiques. Le potentiel de l'aquaculture pour approvisionner le marché est prometteur. Le secteur fournit déjà d'importantes quantités de coquillages et de petites quantités de mérous, crabes et autres espèces. L'évolution des techniques d'élevage des espèces vivantes préférées pour l'alimentation ne fera qu'augmenter la contribution de l'aquaculture à l'offre globale.

Les exportations internationales annuelles de poissons ornementaux sont d'environ 200 millions de dollars EU, soit moins de 1 pour cent de l’ensemble du commerce mondial du poisson. Toutefois, la valeur totale du commerce de gros des poissons ornementaux est estimée à près de 1 milliard de dollars EU et le commerce de détail à environ 3 milliards de dollars EU, et ce, rien qu’aux Etats-Unis.

Le commerce des poissons ornementaux est non seulement important au niveau des échanges internationaux, mais il constitue également une source importante de revenus pour les communautés rurales, côtières et insulaires dans les pays en développement et, souvent, une source bienvenue de possibilités d'emplois et de recettes d'exportations.

L'Asie représente plus de 50 pour cent de l'offre mondiale de poissons ornementaux. Les nouveaux arrivés, tels que la République tchèque et la Malaisie, concurrencent désormais les fournisseurs traditionnels dominants. Les principaux importateurs sont les Etats-Unis (24 pour cent), le Japon (14 pour cent) et l'Europe, en particulier l'Allemagne (9 pour cent), la France (8 pour cent) et le Royaume-Uni (8 pour cent). Au plan des échanges internationaux, les espèces d'eau douce représentent environ 90 pour cent en valeur, contre 10 pour cent pour les espèces marines. Les espèces d'eau douce sont la plupart du temps élevées alors que les espèces marines sont naturelles. Toutefois, l'aquaculture marine est en forte croissance car les problèmes liés à l'environnement et l'absence de pratiques de capture durables rendent cette possibilité beaucoup plus viable à long terme.

Le commerce régional et international de semences d'organismes aquatiques d'élevage, provenant principalement de l'aquaculture, semblerait important. Dans la plupart des cas toutefois, on dispose de peu d'informations. En dehors du commerce régional des alevins de bar et de dorade en Méditerranée, il existe également un commerce de la pibale (par exemple, les récents gros achats de civelles européennes par la Chine), de populations postlarvaires de diverses crevettes d'élevage, de carpes indiennes et chinoises et autres. Il y a également un commerce limité (au point de vue quantité) de géniteurs. La documentation sur le commerce des semences va s’améliorer à mesure que les inquiétudes se multiplient à propos de la propagation de maladies et des mouvements de matériel génétique.

Source: A.Lem, Département des pêches de la FAO

Figure 29

Figure 30

En raison du caractère périssable du poisson, le commerce du poisson et des produits de la pêche consiste à plus de 90 pour cent de produits qui ont déjà été transformés d'une manière ou d'une autre. Le poisson vivant, frais ou réfrigéré ne représente qu'une petite part, certes en augmentation, du commerce mondial du poisson, laquelle s'explique par une meilleure logistique et une plus forte demande. La crevette est le principal produit commercialisé en valeur, suivi des espèces démersales (merlu, cabillaud, églefin et lieu de l'Alaska), du thon, du saumon, des petits pélagiques, des céphalopodes et des farines de poisson.

Les produits halieutiques échangés entre pays industrialisés sont essentiellement des espèces démersales, vendues fraîches, congelées entières ou en filets; des espèces pélagiques de moindre valeur telles que hareng et maquereau, commercialisés frais et congelés; et du saumon frais et congelé. Les pays en développement exportent surtout des thons, des petits pélagiques, des crevettes, des langoustes et des céphalopodes (poulpes, calmars et seiches). Dans le passé, ces pays participaient principalement aux exportations de matières premières destinées aux industries de transformation des pays développés mais, ces dernières années, ils cherchent de plus en plus à ajouter de la valeur aux produits avant de les exporter. En outre, une grande part du commerce mondial des farines est le fait des pays en développement d’Amérique latine. Les pays en développement importent essentiellement des petits pélagiques congelés et du poisson séché ou fumé. On note également quelques importations de matières premières (thon congelé) pour la transformation (par exemple, thon en conserve) et les réexportations. Les nouveaux marchés (Région administrative spéciale de Hong-Kong, Taïwan Province de Chine, République de Corée, Malaisie et Singapour) importent de plus en plus de produits de haute valeur marchande (langouste, calmar, etc.) pour la consommation intérieure.

Il est intéressant de noter que l’image globale présentée sur les cartes de la figure 31 n'est pas complète. Même si les pays qui ont communiqué les chiffres de leurs importations (environ 137 pour la période 1998-2000) représentent 98 pour cent du total mondial estimé, les chiffres sont très incomplets pour plusieurs groupes continentaux (par exemple, seuls 40 pour cent des pays africains ont communiqué des données sur leurs importations). En pareil cas, les données présentées ne doivent pas être considérées comme représentant l'ensemble des échanges commerciaux des groupes continentaux qu'elles concernent.

Ces dernières années, le commerce international des produits de la pêche a dû faire face aux principaux problèmes suivants: évolution des mesures de contrôle de la qualité dans les principaux pays importateurs en faveur d’une stratégie préventive fondée sur le Système d'analyse des risques – points critiques pour leur maîtrise (HACCP); principe de l'évaluation des risques; sensibilisation du public en général à la surexploitation des ressources; questions environnementales concernant l'aquaculture; traçabilité et étiquetage. La CE et les Etats-Unis ont rendu les plans du HACCP obligatoires pour toutes les installations produisant des produits à base de poisson destinés à leurs marchés. Si les Etats-Unis imposent l'application de telles mesures par l'intermédiaire des importateurs dans le pays, la CE surveille les autorités compétentes dans les pays exportateurs. De nombreux pays sont encore en train de mettre au point une procédure d'évaluation des risques (c'est-à-dire l'analyse du risque que le consommateur tombe malade après avoir consommé du poisson). Le commerce durable du poisson – qu'il soit d'origine naturelle ou provienne de l'aquaculture – est un problème qui préoccupe le consommateur, en particulier dans le monde développé. Des informations concernant les antibiotiques dangereux utilisés pour certaines espèces de poissons d’élevage, ou la surexploitation des ressources font peur à certains consommateurs qui se détournent des produits halieutiques. De même, l'appauvrissement de la mangrove à cause de l'aquaculture de la crevette a fait récemment l'objet d'articles peu favorables dans la presse. Le 1er janvier 2002, la CE a mis en place une loi sur la traçabilité du poisson, qui oblige les producteurs à indiquer sur l’étiquette du produit: le nom commercial de l'espèce et le nom latin; l'origine du poisson, naturelle ou aquacole; le pays d'origine du poisson d'eau douce naturel et d’élevage, et l'océan d'origine pour les espèces marines naturelles. Divers types d'étiquetage, tels qu’étiquetage écologique ou étiquetage des produits biologiques, sont actuellement utilisés pour différents produits de la pêche, ce qui entraîne une grande confusion chez les consommateurs.

Crevettes

La crise économique au Japon a entraîné une baisse de la demande de ce produit. Les principaux pays fournisseurs ont été tenus de baisser leurs prix et de trouver d’autres débouchés pour leur production. En 2000, le marché américain a fait preuve d'un dynamisme particulier mais a brusquement chuté en 2001. Les événements dramatiques du 11 septembre ont accéléré la chute du marché. La demande de crevettes en Europe s'est améliorée parallèlement à la situation globale de l'économie; toutefois, la faiblesse de l'euro a éliminé toute croissance substantielle sur ce continent. Le 29 janvier 2002, la CE a interrompu les importations de crevettes en provenance de la Chine en raison de la présence de fortes doses d’antibiotiques dans les crevettes élevées dans ce pays. Dans d’autres pays d'Asie, la CE a effectué des contrôles rigoureux de ces substances. Ces pays préfèrent vendre sur d'autres marchés, plutôt que de voir leurs expéditions détruites aux frontières de la CE. Cette situation a perturbé le marché international de la crevette au début de 2002, et les prix ont été extrêmement bas (figure 32).

Figure 31

Figure 31

Les maladies qui ont touché l'Equateur et l'Amérique centrale en 1999 ont conduit à une baisse de la production de crevettes d'élevage en 2000 et également en 2001. La Thaïlande reste le premier producteur de ce produit avec 250 000 tonnes, et la production a recommencé à augmenter après les problèmes de maladie rencontrés en 1996 et 1997.

Figure 32

Figure 33

Thon

En 1999, les captures de thon ont été élevées et les prix de l’albacore ont chuté à un niveau jamais atteint, faisant de la pêche une activité non rentable. Au milieu de l'année 2000, les propriétaires de gros thoniers ont créé une organisation dans le but de normaliser le marché. Cette organisation a mis en place des programmes rigoureux de réduction des captures qui ont eu un effet immédiat sur les prix. En 2001, les membres de l'organisation se sont réunis régulièrement pour veiller à ce que ces réductions de capture continuent. Les prix de l’albacore qui étaient tombés à 350 dollars EU la tonne au milieu de l'année 2000, se sont quelque peu raffermis pour atteindre 700 à 750 dollars EU la tonne en mai 2002 (figure 33).

La Thaïlande est restée le principal exportateur de thon en conserve vers les Etats-Unis mais a enregistré une baisse de ses exportations en 2001. Les Philippines sont restées en deuxième position. L'utilisation de parties du thon par les conserveurs italiens continue de se développer. Cette matière première représente désormais environ 70 pour cent du total de la production italienne de thon en conserve. L'Equateur et la Colombie ont profité de leur statut spécial de zone franche en leur qualité de pays de la Communauté andine pour augmenter leurs expéditions vers la CE.

Poissons de fond

Les disponibilités de poissons de fond ont été peu importantes au premier semestre 2001. L'offre de lieu de l'Alaska a diminué sur tous les grands marchés tandis que les captures de cabillauds et de merlus ont enregistré également une baisse. Les prix n'ont pas augmenté comme prévu (figure 34) car d'autres espèces (saumon et tilapia) remplacent désormais les poissons de fond sur de nombreux marchés.

Céphalopodes

Les pêches de céphalopodes ont été peu abondantes en 2001, en particulier pour les captures d'Illex de l'Atlantique Sud-Est. Les captures d'encornets de l'Atlantique Centre-Est ont été bonnes au début 2001, entraînant une hausse des exportations vers le Japon. Pour protéger son industrie de l'encornet, le Gouvernement marocain a fixé un prix minimum. Les négociants japonais ont toutefois considéré que ce prix était trop élevé et, en 2001, les ventes sur ce marché ont baissé de 40 pour cent par rapport à 2000 (figure 35).

Figure 34

Figure 1

Farines de poisson

L'essentiel de la production de farines de poisson – environ 60 pour cent – est exporté chaque année. En 2001, la production a été estimée à 5,4 millions de tonnes, soit une baisse de 12 pour cent par rapport à 2000. Diverses interdictions de pêches et problèmes liés aux ressources de chinchards dans les eaux chiliennes ont été la principale raison. La production péruvienne a été également relativement faible. En 2001, la menace de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) a éclipsé le marché des farines de poisson en Europe car, au début de l'année 2001, la CE avait interdit l'utilisation de farines dans le régime alimentaire des ruminants. Dans la plupart des installations de la CE, les aliments destinés aux non-ruminants sont préparés dans les mêmes chaînes de production que ceux destinés aux ruminants; la nouvelle législation a donc entraîné une baisse de l'utilisation de farines de poisson en tant qu’aliments pour les porcins et la volaille également. Le Pérou et le Chili ont déposé une plainte auprès du Comité sanitaire et phytosanitaire de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (octobre 2001) visant à persuader la CE de lever les restrictions imposées actuellement à l'utilisation des farines de poisson. Les prix (figure 36) devraient donc augmenter en raison d'un raffermissement de la demande, en particulier de la Chine et d'autres pays asiatiques.

Huile de poisson

En 2001, le climat global sur le marché de l'huile de poisson a été bon et les prix se sont nettement améliorés. La production a été légèrement inférieure à celle de 2000 et les disponibilités d'huiles de poisson sur les marchés étaient peu élevées au début de 2002. Les huiles végétales concurrentielles semblent être moins abondantes que prévu initialement et leurs prix devraient s'orienter à la hausse. En conséquence, une nouvelle augmentation des prix de l'huile de poisson est possible.

POLITIQUES ET GOUVERNANCE DES PêCHES INTERNATIONALES

Evolution des facteurs influençant l’aménagement des pêches

Partout dans le monde, les politiques et les stratégies d’aménagement des pêches sont en pleine mutation. Les décideurs et les administrateurs des pêches reconnaissent de plus en plus que les ressources halieutiques doivent être développées et utilisées de manière durable. Cependant, les tentatives continues d’utiliser les pêches comme le moyen de résoudre un imbroglio de problèmes sociaux et économiques risquent d’occulter l’élément essentiel, à savoir que si ces ressources sont surexploitées, elles ne pourront favoriser le développement ni social ni économique.

Surtout en l’absence de gestion intégrée des zones, l’incidence de nombreuses autres activités – telles que l’urbanisation, les transports maritimes, le tourisme, la déforestation et le rejet de déchets industriels – sur les éléments fortement interdépendants de l’environnement aquatique compliquent encore davantage les initiatives d’aménagement des pêches. On admet plus volontiers qu’il faut concevoir des principes, des politiques et des mécanismes permettant d’identifier et de classer par ordre de priorité les diverses utilisations des zones aquatiques de façon à pouvoir maîtriser les incidences des activités d’autres secteurs sur les pêches. Il est également nécessaire de mettre en place une stratégie d’aménagement des pêches qui tienne compte des écosystèmes (voir Application de l’approche écosystémique à la gestion des pêches de capture, Deuxième partie).

Figure 36

Tant dans les pêches continentales que marines, les pressions résultant d’une exploitation intense, associées à l’utilisation accrue des zones de pêche par d’autres secteurs d’activité, conduisent lentement mais sûrement vers une réorientation des stratégies d’aménagement axée sur des solutions permettant de répartir des ressources halieutiques limitées entre un nombre croissant de parties prenantes. On admet de plus en plus que des ressources surexploitées ne peuvent servir ni de dispositifs de protection so-ciale ou de sources de nourriture sans provoquer des conflits internes sur la question de savoir qui peut avoir accès aux ressources halieutiques restantes et les consommer, ni de moyens d’encourager le soutien actuel des flottes industrielles rentables. Tandis que les objectifs de la gestion des pêches et de la législation en la matière tendent à intégrer de plus en plus des considérations sociales, économiques et environnementales, les conflits et leur gestion commencent à occuper une place prépondérante dans les efforts d’aménagement des pêches.

En résumé, l’aménagement des pêches, qui se limitait à résoudre des problèmes d’ordre purement biologique, doit désormais traiter toute une série de préoccupations sociales et de questions touchant à l’usage multiple des zones de pêche et tenter de trouver une solution. Il est donc urgent de réexaminer la plupart des méthodes d’aménagement qui ont été utilisées jusqu’à maintenant.

Situation actuelle en matière d’aménagement des pêches

Il existe une volonté collective de plus en plus forte au sein de la communauté politique internatio-nale et de la société civile de reconnaître et de soutenir le rôle indispensable que jouent les pêches dans le développement économique, la sécurité alimentaire, la réduction de la pauvreté et la santé humaine.

Les pays en développement continuent de s’efforcer de clarifier les liens entre activités de développement et utilisation durable des ressources. La croissance économique et démographique exerce des pressions supplémentaires sur les ressources halieutiques continentales et marines en tant que ressources contribuant à la sécurité alimentaire et offrant un filet de protection sociale. Par ailleurs, l’utilisation des pêches nationales comme sources de devises ne fait qu’aggraver les problèmes de répartition entre flottes artisanales et industrielles. Les défis lancés aux pays en développement, et la nécessité de renforcer leurs capacités, rendent l’aménagement (et, en particulier, la répartition) diffi-cile, mais il semble que leurs efforts auront un effet positif durable sur le développement économique et civil.

Dans les pays développés, les principes de durabilité reconnus par la législation encouragent les efforts d’aménagement des pêches visant à inverser les conséquences de la surexploitation passée, et les tentatives de faire face à la surcapacité sont l’objet d’une grande attention, bien que les progrès soient lents. Cependant, tandis que les pays développés se concentrent sur la réduction de la surcapacité, des problèmes sociaux et techniques de plus en plus complexes viennent compliquer les initiatives des responsables de l’aménagement des pêches. Les incidences du déplacement et du redéploiement – des personnes et des navires – deviennent les éléments les plus importants, les plus difficiles et les plus conflictuels de l’aménagement des pêches.

Des mesures techniques (telles que les restrictions applicables aux engins, aux zones et aux périodes de pêche) continuent de dominer les efforts d’aménagement des pêches en tant que moyens d’assurer la conservation des stocks de poissons. Il est admis partout dans le monde que ces mesures sont potentiellement efficaces, en particulier pour les pêches qui ne connaissent pas de problème de surcapitalisation. Cependant, on est également de plus en plus conscient de l’existence de problèmes de surcapitalisation dans de nombreuses pêcheries et du fait que, en pareils cas, ce type de mesures n’a pas toujours abouti à la conservation ou à l’utilisation durable des stocks de poissons, ou n’y est parvenu qu’à un coût considérable pour la société.

En outre, à mesure que les ressources se raréfient et qu’elles sont partagées par un nombre croissant d’utilisateurs, on se rend compte encore davantage qu’il faudra compenser l’augmentation des coûts sociaux et économiques résultant de l’application de mesures techniques. Et, comme la société civile exige non seulement que les stocks soient durables mais aussi que les responsables rendent compte des coûts sociaux et économiques liés à l’aménagement des ressources halieutiques, il est inévitable que des pressions plus fortes s’exerceront sur les responsables pour les inciter à étudier des solutions nouvelles ou du moins différentes.

L’utilisation d’incitations qui influencent le comportement des pêcheurs et créent des conditions favorables à la conservation et à l’efficience économique suscite de plus en plus d’intérêt. Malgré les avantages inhérents à des stratégies de gestion fondées sur des mesures incitatives telles que quotas basés sur les communautés, droits d’utilisation territoriale et systèmes de quotas transférables, leur adoption et leur application dans le domaine des pêches se font lentement. L’alternative à l’utilisation de démarches profitant à tout le monde est le développement continu et cohérent de stratégies commerciales fondées sur les marchés, telles que les systèmes d'étiquetage écologique qui visent à mobiliser les forces du marché et à créer des récompenses financières pour les personnes qui travaillent dans le secteur des pêches et qui respectent les critères de durabilité ainsi que différents autres critères sociaux.

Souvent, les débats portant sur l’adoption de systèmes fondés sur des mesures incitatives sont généralement dominés par les préoccupations concernant les formules de répartition initiale, la consolidation, et l’entrée et la sortie des participants – éléments qui peuvent tous être pris en compte dans le processus de conception. Ces préoccupations sont légitimes car les stratégies d’aménagement de ce type créent de très fortes incitations commerciales et sont généralement utilisées en dernier ressort, lorsque les stocks de poissons sont soumis à de fortes pressions, en cas de surcapitalisation et lorsqu’il est peu probable que les participants soient en mesure de modifier leurs stratégies d’investissement. Malheureusement, les débats ont tendance à ignorer les nombreux enseignements à tirer des diverses solutions adoptées à travers le monde pour faire face aux problèmes de conception de ce type2.

Pour le moment, les efforts d’aménagement des pêches concernant la surcapacité consistent essentiellement à évaluer, gérer et réduire cette surcapacité, en partie parce que les incitations générées par de nombreux contrôles réglementaires ne sont pas envisagées. Bien que de tels efforts soient indispensables, il faudrait insister davantage sur des stratégies d’aménagement qui empêchent le développement initial d’une surcapacité, ce qui permettrait d’éviter les conséquences pénibles et socialement perturbatrices qui vont de pair avec les tentatives de réduction des capacités.

Nouveaux besoins

Plusieurs méthodes d’aménagement différentes sont en train de s’imposer comme moyens de faire front aux pressions liées à l’aménagement des pêches. Les responsables cherchent de plus en plus à optimiser l’utilisation des ressources halieutiques publiques en déléguant la gestion aux niveaux locaux, où le sens de la propriété est plus développé, et en définissant plus clairement la collectivité qui pourrait exploiter une ressource donnée.

Des initiatives visant à élargir la participation des groupes de parties prenantes et à rendre le processus décisionnel de l’aménagement des pêches plus global et plus représentatif sont prises à tous les échelons, du niveau international jusqu’au niveau local. Cependant, comme elles ne sont pas accompagnées d’un transfert de compétences législatives, financières, administratives et de gestion, et en l’absence de la volonté politique indispensable, la plupart de ces initiatives ne parviennent malheureusement pas à faire fond sur les connaissances et les compétences locales. De ce fait, elles on tendance à simplement transmettre les responsabilités en matière d’aménagement sans forcément offrir les outils et les bonnes conditions nécessaires au succès (voir, par exemple, Gouvernance des pêches, régionales, p. 48).

Dans d’autres cas (en particulier lorsque des conflits ont éclaté à propos du partage et de la répartition de facto, si ce n’est explicite, de ressources halieutiques limitées ou spécifiques), les parties prenantes ont commencé à se tourner vers d’autres solutions, tels que des accords contractuels privés pour résoudre les problèmes d’aménagement et d’administration des pêches. De tels accords ont déjà été conclus entre sociétés de pêche privées et collectivités locales, entre pêcheurs et entreprises de transformation et entre les membres d’organisations de pêche. Les initiatives non gouvernementales prises par le secteur de la conservation, le secteur privé et les partenariats entre l’industrie et la conservation sont peut-être les exemples les plus extrêmes des efforts visant à améliorer la durabilité, l’efficacité et l’efficience des résultats. En remettant en question ou en supplantant les processus administratifs par l’utilisation accrue de solutions juridiques et/ou politiques pour atteindre leurs résultats, ces accords contournent les processus existants mis en place par les responsables de l’aménagement des pêches pour parvenir à des solutions plus rapides.

La base de compétences habituelles nécessaires pour s’occuper de l’aménagement des pêches doit être revue dans les plus brefs délais. Les exigences de plus en plus nombreuses imposées aux administrateurs, ainsi que les réductions budgétaires, mettent à l’épreuve les compétences et les ressources des administrations des pêches partout dans le monde. Avec l’adoption des principes de développement durable, les administrateurs doivent de plus en plus rendre compte des problèmes sociaux, économiques, financiers, juridiques et des questions de gouvernance, outre les questions de conservation habituelles qui s’appuient sur les informations fournies par les sciences naturelles.

Les demandes de plus en plus nombreuses des consommateurs et des exploitants pêcheurs, et la capacité relativement limitée des ressources halieutiques provoquent des conflits à propos du partage des ressources. De ce fait, tant les administrateurs que les parties prenantes doivent apprendre et utiliser toute une série de techniques de gestion des conflits, de règlement des différends et de médiation.

Dans les pays développés, les écarts qui se creusent entre normes internationales et dispositions législatives régionales et nationales, ainsi que les restrictions inévitables des budgets et de l’information scientifique, font qu’il est urgent de renforcer les capacités. Le développement de démarches différentes, y compris des démarches de précaution et fondées sur l’évaluation des risques, commence à combler l’absence d’informations précises sur les stocks par des mesures rentables et pratiques. Par ailleurs, au plan pratique, l’élargissement de l’aménagement des pêches de façon à intégrer des écosystèmes complets (voir Application de l’approche écosystémique à la gestion des pêches de capture, Deuxième partie, p. 55) pèse sur les ressources administratives et budgétaires des organismes d’aménagement des pêches.

Tant les pays en développement que développés doivent se débattre pour faire face aux incidences de la mondialisation du commerce sur tous les aspects du secteur halieutique. La certification des captures, la déclaration aux fins du commerce international et l’assurance de la qualité des produits alimentaires sont des questions importantes qui évoluent très rapidement et qui créent des incitations qui modifient les stratégies de récolte, de production et de commercialisation à un rythme que la plupart des administrations des pêches et des processus de réglementation ne peuvent pas soutenir (voir, Certification des captures et documentation des captures, Deuxième partie, p. 66). Bien que ces changements soient inévitables et qu’ils ne soient pas forcément indésirables, la plupart des stratégies d’aménagement actuelles n’ont pas les moyens d’y faire face. Les problèmes liés à la mondialisation croissante du commerce, en particulier dans les pays en développement, modifient les incitations en rapport avec les pêches industrielles et leur capacité de générer des devises et de favoriser le développement économique mais, souvent, il n’y a pas de spécialistes du commerce et du développement au sein des groupes chargés des politiques stratégiques ou de la planification dans les organismes d’aménagement des pêches.

Gouvernance des pêches régionales

La communauté internationale accorde une grande importance à la coopération sous-régionale et régionale en matière de conservation et d’aménagement des pêches parce que, par définition, de nombreux stocks de poissons ne connaissent pas de frontières et ne peuvent pas être gérés par un seul Etat.

Depuis 1945, environ 30 organisations régionales et sous-régionales de gestion des pêches et arrangements ont été mis en place. Le Chapitre 17 d’Action 21, le Programme d’action décidé par les Nations Unies à la Conférence de Rio, l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons de 1995 et le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO de 1995 soulignent le rôle des organisations régionales de gestion des pêches dans l’application des mesures d’aménagement conçues pour garantir des résultats responsables et durables à long terme.

La tâche principale de la plupart des organisations régionales de gestion des pêches est d’aménager les pêches. Certaines s’en acquittent très bien alors que d’autres n’y parviennent pas. Pourquoi certaines organisations régionales de gestion des pêches obtiennent-elles des résultats médiocres? Comment la gouvernance régionale des pêches peut-elle être renforcée?

Des instances internationales, telles que le Comité des pêches de la FAO (COFI), ainsi que des revues spécialisées, débattent du rôle et des activités des organisations régionales de gestion des pêches. Les débats se concentrent généralement sur l’efficience de ces organisations et sur la nature et la portée de leurs travaux, mais en l’absence de points de référence convenus, il est difficile d’évaluer leurs résultats. Lors d’une réunion de la FAO organisée en 2001, les représentants des organisations régionales de gestion des pêches se sont montrés en principe favorables à l’établissement d’indicateurs de rendement pour les organisations régionales de gestion des pêches et de directives connexes, tout en reconnaissant que certaines organisations utilisaient déjà des indicateurs de développement durable pour évaluer leur performance.

L’inaction est la principale manifestation du manque d’efficacité. C’est le problème de la plupart des organisations régionales de gestion des pêches parce qu’elles fonctionnent selon le principe du consensus, qui est souvent très difficile à dégager. Réduire les sources potentielles de conflits semblerait être un bon moyen de renforcer la confiance entre les membres. A cette fin, il a été suggéré que chaque organisation régionale de gestion des pêches mette en place des normes scientifiques convenues sur l’évaluation des stocks, les procédures de révision des allocations, le partage des informations concernant les flottes étrangères et des normes concernant les responsabilités de l’Etat du port.

Malgré les lacunes de la gouvernance des pêches régionales, certaines organisations régionales de gestion des pêches se sont concentrées sur un nouveau type de coopération régionale comme moyen d’améliorer l’aménagement. Des solutions novatrices ont été adoptées pour traiter le problème de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Tant les parties contractantes que les parties non contractantes aux organisations régionales de gestion, et les navires de pêche inscrits sur des registres d’immatriculation libre ont pratiqué ce genre de pêche, ce qui compromet les efforts déployés pour mettre en place une stratégie d’aménagement responsable des pêches. Un nombre de plus en plus grand d’organisations régionales de gestion des pêches cherchent à promouvoir et à appliquer des mesures au niveau des ports et de la commercialisation pour empêcher le «blanchiment» des produits de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Ces mesures sont assez révolutionnaires et jusque récemment n’auraient pas été considérées comme pouvant résoudre les problèmes d’aménagement des pêches. Cette nouvelle situation dénote un changement d’état d’esprit de la communauté internationale dans son désir de lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée et les pratiques connexes.

Une question difficile à laquelle sont confrontées les organisations régionales de gestion des pêches est leur capacité et leur volonté d’accueillir des nouveaux membres de manière équitable et cohérente. Ne pas traiter les problèmes d’adhésion, de capacité, de répartition et d’équité pourrait mettre en péril le travail futur de ces organisations et provoquer une augmentation de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Ces dernières années, l’absence de critères convenus a provoqué une scission au sein de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA), entravant la capacité de l’organisation de gérer efficacement tous les autres problèmes. Cependant, à la fin de 2001, la CICTA a trouvé une solution nouvelle pour gérer les problèmes de répartition, y compris pour les nouveaux membres.

Les organisations régionales de gestion des pêches sont nécessaires pour faciliter et renforcer la coopération régionale. Au cours des 10 prochaines années, elles devront relever le défi lié à la mise en œuvre de certaines parties d’Action 21, de l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons de 1995 et du Code de conduite de la FAO pour une pêche responsable de 1995. Cependant, même une recherche scientifique, un financement et des mesures d’application de vaste ampleur n’amélioreront pas l’efficacité des organisations régionales de gestion des pêches, sauf si leurs membres collaborent plus étroitement et sont prêts à prendre des décisions difficiles, qui pourraient avoir à court terme des coûts sociaux et économiques indésirables mais produiraient à long terme des gains en terme de durabilité.

Afin de consolider réellement et efficacement le travail des organisations régionales de gestion des pêches, il faudrait résoudre certains problèmes fondamentaux de rendement. Les Etats doivent s’engager à prendre des initiatives qui prévoient les mesures de compensation nécessaires, même si ces initiatives risquent de désavantager les pêcheurs dans l’immédiat. Il faut faire des choix difficiles pour soutenir des solutions durables. Une plus grande participation des parties prenantes, y compris du secteur halieutique, aux activités des organisations régionales de gestion des pêches pourrait améliorer leur performance et leur efficacité, surtout si elles sont convaincues de la nécessité d’appliquer des décisions pénibles et difficiles.

Mise en œuvre de l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons de 1995

L’Accord aux fins de l’application des dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s’effectuent tant à l’intérieur qu’au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs (Accord de 1995 sur les stocks de poissons) a été adopté le 4 août 1995. Cet Accord est entré en vigueur le 11 décembre 2001, un mois après le dépôt du trentième instrument de ratification ou d’adhésion auprès du Secrétaire général des Nations Unies.

L’objectif de l’Accord de 1995 sur les stocks de poissons est de faciliter la mise en œuvre de certaines dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 (Convention de 1982) relatives à la conservation et à l’aménagement des stocks de poissons chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs. Cet accord complète l'Accord de la FAO de 1993 visant à favoriser le respect par les navires de pêche en haute mer des mesures internationales de conservation et de gestion (Accord de 1993 de la FAO) et le Code de conduite de la FAO pour une pêche responsable adopté en 1995.

La mise en œuvre de l’Accord de 1995 sur les stocks de poissons lance un défi majeur aux Etats et aux organisations régionales ou sous-régionales de gestion des pêches et doit s’appuyer sur une coopération internationale concertée. Les Etats qui adhèrent à au moins l’un des deux accords, directement ou par l’intermédiaire des organisations régionales de gestion des pêches, sont tenus de collaborer pour garantir l’efficacité de la conservation et de l’aménagement des stocks de poissons chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs.

Même avant l’entrée en vigueur de cet accord, les Etats – individuellement ou dans le cadre d’une collaboration – s’étaient engagés dans diverses activités visant à promouvoir sa mise en œuvre. Depuis 1995, plusieurs d’entre eux ont adopté de nouvelles lois et/ou réglementations leur permettant d’exercer un contrôle plus rigoureux sur les navires battant leur pavillon lorsque ceux-ci se livrent à des activités en haute mer. Les initiatives visant à renforcer ces contrôles se sont multipliées à mesure que les inquiétudes à propos de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée se faisaient plus nombreuses au sein des instances internationales, notamment lors des réunions de l’Organisation des Nations Unies, de la FAO et des organisations régionales de gestion des pêches (voir l’encadré 8). On n’a pas manqué de souligner que la volonté politique des Etats de traiter ces problèmes et les questions de conservation et d’aménagement connexes, qui compromettent le travail et l’efficacité des organisations régionales de gestion des pêches, était essentielle pour relever les défis.


ENCADRÉ 8

Pêche illicite, non déclarée et non réglementée

La pêche illicite, non déclarée et non réglementée et son impact sur la durabilité des ressources est une question qui préoc-cupe l’ensemble de la communauté internationale. Il est admis que si la pêche illicite, non déclarée et non réglementée et ses activités connexes ne font pas l’objet de solutions efficaces et globales, les efforts déployés par les administrations nationales et par les organisations régionales de gestion des pêches pour mettre en place un aménagement responsable des pêches seront inutiles.

Conscient de la situation, le COFI a adopté par consensus, à sa vingt-quatrième session tenue le 2 mars 2001, le Plan d’action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, que le Conseil de la FAO a approuvé à sa cent-vingtième session le 23 juin 2001.

Ce Plan d’action international est un instrument volontaire élaboré dans le cadre du Code de conduite de la FAO pour une pêche responsable adopté en 1995. Il encourage les Etats et les organisations régionales de gestion des pêches à prendre des mesures pour lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Le Plan d’action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer ce type de pêche est novateur à de nombreux égards, particulièrement en ce qui concerne le recours à des mesures commerciales convenues à l’échelon international. En fait, il demande aux Etats d’élaborer et de mettre en œuvre des plans d’action nationaux – visant à atteindre les objectifs du Plan d’action international – au plus tard dans les trois ans suivant son adoption (le 23 juin 2004).

Pour appuyer la mise en œuvre du Plan d’action international, la FAO a publié dans la série Directives techniques pour une pêche responsable n° 9, Mise en œuvre du Plan d’action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (2002, Rome). Ce document fournit des orientations pratiques sur la mise en œuvre du Plan d’action international aux Etats, aux organisations régionales de gestion des pêches et aux autres parties concernées. Pour diffuser des informations relatives au Plan d’action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, la FAO a également publié un document non technique intitulé Mettre un terme à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Ce document est destiné aux pêcheurs, aux communautés de pêcheurs et au grand public.

Source: D. Doulman, Département des pêches de la FAO.

L’Accord de 1995 sur les stocks de poissons confère aux organisations régionales de gestion des pêches une position centrale et déterminante aux fins de l’application de cet accord; ces organisations constituent le mécanisme essentiel grâce auquel les Etats participants devraient coordonner leurs efforts pour parvenir à améliorer l’aménagement et la conservation des ressources. Plusieurs organisations régionales de gestion des pêches dont le mandat englobe la conservation et l’aménagement des stocks chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs ont révisé, ou sont sur le point de le faire, certaines dispositions de leurs conventions respectives pour s’assurer qu’elles étaient compatibles avec l’Accord. Dans certains cas, des modifications importantes ont été proposées ou introduites. Cependant, malgré ces progrès, les organisations régionales de gestion des pêches se débattent avec les aspects pratiques liés à la mise en œuvre de l’Accord: comment appliquer le principe de précaution à l’aménagement des pêches, comment mettre en œuvre la gestion des écosystèmes et comment traiter la question de la transparence.

L’Accord de 1995 sur les stocks de poissons a donné naissance à deux nouvelles organisations régionales de gestion des pêches: l’une s’occupant de l’aménagement des stocks de poissons chevauchants et l’autre de l’aménagement des stocks de poissons grands migrateurs.

Les initiatives visant à créer la Southeast Atlantic Fisheries Organization (SEAFO) (Organisation des pêches de l'Atlantique Sud-Est) et la Western and Central Pacific Tuna Commission (Commission pour la conservation des thonidés du Pacifique Centre et Ouest) ont été prises essentiellement pour les mêmes raisons et avaient les objectifs suivants:

Organisation des pêches de l'Atlantique

Sud-Est

La Convention sur la conservation et la gestion des ressources halieutiques de l'Atlantique Sud-Est, qui prévoit la création de l’Organisation des pêches de l'Atlantique Sud-Est (SEAFO), a été ouverte à la signature le 20 avril 2001. Son objectif est d’assurer la conservation à long terme et l’utilisation durable des ressources halieutiques dans la zone couverte par la Convention grâce à l’application efficace de cette convention. Les négociations portant sur la création de la SEAFO se sont déroulées sur une période de cinq ans. Lorsqu’elle a été ouverte à la signature, la Convention a été signée par sept Etats et par la CE.

La zone couverte par la Convention est fondée sur la Zone statistique 47 de la FAO. Elle ne concerne que la haute mer et touche aux ZEE de quatre Etats côtiers: Afrique du Sud, Angola, Namibie, et Royaume-Uni (territoire d’outremer de Sainte-Hélène et ses dépendances de Tristan da Cunha et l’île de l’Ascension).

La SEAFO sera chargée de l’aménagement des stocks qui chevauchent les ZEE des Etats côtiers et les zones de la haute mer adjacentes. Les espèces visées par l’aménagement sont notamment le béryx commun, l’hoplostète orange, la tête casquée, le cernier commun et le merlu du large du Cap. Elle sera également chargée de l’aménagement de petits stocks de haute mer, tels que les crabes rouges, bien qu’ils ne soient pas visés par les dispositions de l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons de 1995. Lénagement de ces stocks est une conséquence logique et pratique des caractéristiques géographiques de la région, des stocks de poissons présents et de leur répartition ainsi que des besoins en matière d’aménagement. La Convention ne concerne pas l’aménagement des stocks de poissons grands migrateurs, étant donné qu’ils sont déjà visés par la CICTA.

Les aspects clés de la Convention sur la conservation et la gestion des ressources halieutiques de l'Atlantique Sud-Est de la SEAFO sont: la création d’une commission, d’un secrétariat, d’un comité scientifique et d’un comité chargé des sanctions; l’application de l’approche de précaution, le respect des obligations des parties contractantes3, des devoirs de l’Etat du pavillon, des devoirs de l’Etat du port et des mesures que prend un tel Etat; la surveillance, l’inspection, la vérification de la conformité et la mise en place de sanctions; le processus décisionnel; la coopération avec d’autres organisations; la compatibilité entre les mesures de conservation et d’aménagement et les opportunités de pêche; la reconnaissance des besoins spécifiques des pays en développement de la région et des parties non contractantes; et l’application de la Convention.

Le Gouvernement namibien a créé un secrétariat intérimaire pour faciliter la mise en œuvre de la Convention. Il remplira ce rôle jusqu’à l’entrée en vigueur de la Convention et la complète mise en œuvre des arrangements administratifs. Le secrétariat intérimaire mettra en œuvre des arrangements provisoires concernant les autorisations et la notification des navires de pêche, les normes auxquelles ils doivent se conformer, les observations scientifiques et la collecte d’informations destinées à étayer l’évaluation des stocks.

Commission pour la conservation et la gestion des stocks de poissons grands migrateurs du Pacifique Centre et Ouest

La Convention sur la conservation et la gestion des stocks de poissons grands migrateurs du Pacifique Centre et Ouest a été ouverte à la signature le 5 septembre 2000 après quatre années de négociations complexes et intenses, 19 Etats l’ont signée. De plus, un représentant de Taïwan Province de Chine a signé le 5 septembre 2000 un arrangement relatif à la participation d’entités se livrant à la pêche.

La Convention concilie les intérêts des Etats côtiers et ceux des pays pratiquant la pêche hauturière dans plusieurs domaines importants (par exemple entrée en vigueur de la Convention et processus décisionnel). Elle entrera en vigueur 30 jours après le dépôt des instruments de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion par trois Etats situés au nord du 20e parallèle Nord (pays pratiquant la pêche hauturière) et sept Etats situés au sud du 20e parallèle Nord (Etats côtiers de la région). Si la Convention n’a pas été ratifiée par trois Etats situés au nord du 20e parallèle Nord dans les trois années qui suivent son adoption (d’ici septembre 2003), elle entrera néanmoins en vigueur six mois après le dépôt du treizième instrument de ratification, d’acceptation, d’approbation ou d’adhésion.

L’objectif de la Convention est de garantir la conservation à long terme et l’utilisation durable des stocks de poissons grands migrateurs du Pacifique Centre et Ouest grâce à un aménagement efficace, conformément aux dispositions de la Convention de 1982 et de l’Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons de 1995. La Convention s’applique à l’aménagement de tous les stocks de poissons grands migrateurs de la région, mais principalement aux espèces de thon les plus répandues et à forte valeur marchande dans la zone couverte par la Convention – en particulier le listao, l’albacore, le thon obèse et le germon du sud.

La zone d’application de la Convention est considérable et couvre une portion de l’océan Pacifique délimitée par les coordonnées géographiques au sud et à l’est. A l’ouest et au nord, en raison d’un certain nombre de questions politiques délicates et sensibles, les limites sont définies en fonction de l’aire de migration des stocks. Ainsi, la Commission, en se fondant sur les arrangements de coopération conclus avec d’autres organisations régionales de gestion des pêches compétentes, définira la zone d’application des mesures de conservation et d’aménagement pour chaque espèce en particulier.

La Convention cherche à faire fond sur les arrangements régionaux existants qui ont été mis en place et ont fait leur preuve (par exemple, le système régional d’observateurs), à réduire au minimum les coûts et à éviter les doubles emplois en faisant appel aux compétences des organisations régionales existantes (par exemple les connaissances scientifiques du secrétariat du Programme des pêches océaniques de la Communauté du Pacifique).

La Convention porte notamment sur: la création d’une commission, d’un secrétariat, d’un comité scientifique, d’un comité technique et d’un comité chargé des sanctions; le processus décisionnel, la transparence et la collaboration avec les autres organismes; les obligations des membres de la commission; les devoirs de l’Etat du pavillon; le respect des mesures et l’application de sanctions, un programme régional d’observateurs et la réglementation des transbordements; les besoins des pays en développement; le règlement pacifique des différends; et les dispositions relatives aux parties non contractantes à la Convention.

En vu de l’entrée en vigueur de la Convention, la Conférence sur les thonidés du Pacifique Centre et Ouest a mis en place, lors de sa session finale, une conférence préparatoire qui a commencé ses travaux en avril 2002. Cette conférence est chargée de mettre en place le cadre financier et administratif de la nouvelle Commission et de ses organes subsidiaires, pour faire en sorte que, dès sa création officielle, la Commission se mette à l’œuvre sans tarder. La Conférence engagera également le processus de collecte et d’analyse de données sur l’état des stocks de poissons et, le cas échéant, recommandera des mesures de conservation et d’aménagement. La conférence préparatoire devrait en principe terminer ses travaux en septembre 2003.

1 FAO. 2002. Inland capture fishery statistics of Southeast Asia: current status and information needs, par D. Coates. RAP Publication 2002/11. Bangkok, Bureau régional de la FAO pour l’Asie et le Pacifique. 121 pages.
2 Voir, par exemple, les débats sur les attributions initiales de quotas transférables de pêche (effort) et de poisson (capture) pour plus de 23 pêcheries. FAO. Case Studies on the allocation of transferable quotas rights in fisheries. FAO, Document technique sur les pêches n° 411. Rome.
3 Les obligations des parties contractantes, telles que définies à l’alinéa a) de l’Article 6 exigent que les parties contractantes veillent à ce que les navires relevant de leur juridiction pêchent dans la zone couverte par la Convention et que leurs industries respectent les dispositions de la Convention.

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