Page précédente Table des matières Page suivante


Chapitre 2. NATURE DE LA MALADIE


Définition

La fièvre de la Vallée du Rift (FVR) est une maladie virale transmise par des moustiques affectant principalement les ruminants et les humains. Elle peut causer des avortements chez les animaux gestants et une forte mortalité chez les jeunes animaux. Cependant, la plupart des espèces indigènes de bétail en Afrique présentent un niveau élevé de résistance à la maladie. Chez les humains, la FVR provoque une grave maladie semblable à la grippe, pouvant occasionner des complications hémorragiques plus sérieuses et la mort. En dehors de sa zone de distribution géographique habituelle, elle entraîne des épidémies majeures à des intervalles irréguliers de 5 à 35 ans.

Répartition mondiale

La FVR a été initialement identifiée lors d’une flambée d’avortements et de morts chez des moutons à laine exotiques et de maladies chez des humains, qui s’est vérifiée dans la Vallée du Rift au Kenya suite à de fortes pluies en 1930-1931. Des foyers se sont depuis déclarés dans les terres montagneuses du Kenya à intervalles irréguliers de 3 à 15 ans. L’épizootie la plus récente dans la région de l’Afrique de l’Est a eu lieu en 1997-1998 dans les zones plus sèches du nord-est du Kenya et du sud-ouest de la Somalie, après de fortes pluies associées à El Niño. Cela a provoqué des décès chez les humains et quelques pertes de bétail, en particulier des chameaux mais, de manière plus significative, la perturbation des exportations de bétail vers le Proche-Orient depuis la corne de l’Afrique.

La maladie a d’abord été enregistrée en Afrique australe en 1950, lorsque une épizootie majeure en Afrique du Sud provoqua environ 100 000 morts et 500 000 avortements chez des ovins. Une seconde vaste épizootie s’est vérifiée en Namibie et en Afrique du Sud en 1974-1975. De graves foyers ont également été observés à intervalles réguliers au Mozambique, en Zambie et au Zimbabwe.

En 1973, des foyers de FVR se sont déclarés dans les zones d’irrigation du Soudan. En 1977, la maladie a été reconnue en Egypte et a provoqué environ 600 décès humains ainsi que de lourdes pertes parmi les ovins, les caprins, les bovins, les buffles et les camélidés le long de la vallée et du delta du Nil. Des foyers de FVR se sont de nouveau déclarés en Egypte en 1993.

En 1987, un grave foyer de FVR s’est déclaré dans le bassin du fleuve Sénégal au sud de la Mauritanie et nord du Sénégal. Ce foyer a d’abord été révélé par la présence de graves maladies et de décès au sein de la population de cette zone, mais aussi par un taux élevé d’avortements chez les ovins et les caprins. Un autre foyer de la maladie s’est déclaré au même endroit en 1998.

Le virus de la FVR est probablement présent dans tous les pays de l’Afrique subsaharienne. Beaucoup de ces pays, en dehors de l’Afrique orientale et australe, ne possèdent pas de populations de races de bétail exotiques très vulnérables servant d’hôtes pour la maladie et agissant en tant qu’indicateurs de l’activité du virus de la FVR. La maladie chez l’homme peut être la première indication qu’une amplification du virus de la FVR se produit à des niveaux élevés dans ces pays, où les ruminants indigènes peuvent ne pas présenter de signes cliniques de la maladie si ce n’est des niveaux d’avortement faibles et insignifiants.

Jusqu’à une époque récente, on pensait que la FVR était limitée à l’Afrique. Cependant, elle a été signalée dans la région Tihama en Arabie saoudite et au Yémen en septembre 2000. La plaine de Tihama - large d’environ 50 km - est située à l’ouest de ces pays, entre les montagnes et la mer Rouge, sur le côté oriental de la Vallée du Grand Rift. Il s’agit d’une zone semi-aride avec un transport des alluvions issues des montagnes qui forment l’escarpement du Rift. Ses caractéristiques écologiques sont similaires à celles du versant occidental correspondant de la Vallée du Rift en Afrique, où sévit la FVR. L’activité du virus de la FVR est fortement associée à ces zones limitées d’alluvions riveraines. De nombreux avortements se sont vérifiés chez les ovins et les caprins, ainsi que quelque 855 cas graves au sein de la population entraînant 118 décès. Le virus était similaire à celui qui sévissait au Kenya et en Somalie en 1997-1998.

Zone marécageuse typique propice à la reproduction des moustiques

ROGER PASKIN

La FVR a néanmoins le potentiel de s’étendre au niveau international, en particulier avec les changements climatiques auxquels on pourrait s’attendre du fait du réchauffement de la planète. Les zones sensibles à haut risque sont, par exemple, la zone du delta du Tigre/Euphrate au nord-est de l’Iraq et la République islamique d’Iran.

Etiologie

Le virus de la FVR est un membre du genre Phlebovirus des Bunyaviridae. Il s’agit d’un virus à ARN monocaténaire avec trois segments. Les virus Zinga et Lunya initialement isolés, respectivement en République centrafricaine en 1969 et en Ouganda en 1955, sont identiques.

Le virus de la FVR est sérologiquement lié à d’autres phlébovirus, mais il peut en être différencié par des tests de séroneutralisation du virus. Il existe un seul sérotype de virus de la FVR. Le virus est inactivé par des solvants lipides (par exemple l’éther) et par de fortes solutions d’hypochlorite de sodium ou de calcium (la chlorine résiduelle devrait dépasser les 5 000 ppm).

Caractéristiques épidémiologiques

Espèces sensibles

Bien que de nombreuses espèces de mammifères soient vulnérables face à une infection de FVR, ce n’est pas le cas des oiseaux. Parmi les espèces de bétail, les ovins sont les plus sensibles, suivis dans l’ordre par les caprins, les bovins, les chameaux et les buffles domestiques. En Afrique, les races exotiques de bétail sont bien plus sensibles à la maladie clinique que les races indigènes. L’infection pour ces dernières est habituellement latente. Les races indigènes d’ovins, de caprins et de bovins, principalement Bos indicus en Afrique, présentent un niveau élevé de résistance à la FVR déterminé génétiquement. D’autres espèces animales sensibles au virus de la FVR comprennent les antilopes, les buffles du Cap, les singes, les chats, les chiens et les rongeurs.

Cycle théorique de transmission du virus de la FVR

BERNARD MONDET (IRD)

Les êtres humains sont sensibles à la FVR. La maladie se manifeste à un faible pourcentage (2,5 à 5 pour cent) sous forme de fièvres hémorragiques virales présentant un taux élevé de mortalité. Elle peut également se manifester cliniquement sous forme de graves hépatites ou de lésions oculaires ou donner lieu à une méningo-encéphalite.

Transmission de la FVR

Le virus circule entre les hôtes vertébrés et les moustiques. Il ne requiert pas de cycles continus vecteur-hôte-vecteur pour se maintenir. Le maintien interépizootique existe par transmission du virus par les œufs de Aedes spp. du groupe Neomelaniconium. Ce sont des espèces de moustiques se reproduisant dans les zones inondées dont les œufs peuvent rester en dormance dans les plaines d’inondation ou dans un habitat de prairie pendant de longues périodes. Le virus est transmis biologiquement par les moustiques, et de nombreuses espèces de moustiques sont des vecteurs efficaces - notamment les espèces des genres Culex, Aedes, Anopheles, Eretmapodites et Mansonia. D’autres insectes piqueurs peuvent transmettre le virus mécaniquement. Les animaux sont contagieux pendant leur période virémique, qui peut être brève (6 à 18 heures) ou persister jusqu’à six à huit jours. Il n’y a pas d’état de porteur chez les animaux. La transmission qui ne s’effectue pas par un vecteur n’est pas significative chez les animaux.

Les moustiques infectés peuvent être transportés sur de longues distances par des vents ou des courants d’air de basse altitude, ce qui peut conduire à une propagation rapide du virus de région à région ou même internationalement. Cela peut avoir été un facteur dans l’expansion vers et en Egypte en 1977 et 1993.

Les humains peuvent être infectés par des piqûres de moustique mais on pense que la majorité des cas humains résultent de la manipulation de sang, de tissus, de sécrétions ou d’excrétions d’animaux infectés, notamment après un avortement. Cela peut se produire par le biais de la manipulation, de la traite, de l’abattage, de la préparation pour la boucherie ou de l’autopsie de ces animaux. Des infections en laboratoire se vérifient également.

Schémas épidémiques de la FVR

En Afrique, les épidémies majeures se déclarent à intervalles irréguliers de 3 à 15 ans ou même plus dans les zones de bordure de forêt, de terres montagneuses ou côtières caractérisées par de fortes précipitations et une forte humidité. Dans les zones semiarides à arides, l’activité épidémique est bien moins fréquente, potentiellement seulement une fois tous les 25-50 ans. La fréquence dépend des caractéristiques écologiques du pays ou des parties du pays. La périodicité des épizooties de FVR peut être fortement modifiée par les températures croissantes de l’océan Antarctique, qui influencent dans une large mesure les précipitations en Afrique et ailleurs. Une plus grande amplitude de ces oscillations a été constatée dans un passé récent, avec des effets dramatiques sur les conditions d’inondation et de sécheresse dans le monde.

Pour que les épidémies se produisent, trois facteurs doivent être présents:

Au cours des épidémies de FVR, des niveaux extrêmement élevés d’amplification du virus se vérifient au moment où les populations de vecteurs sont les plus nombreuses. Les animaux les plus vulnérables sont infectés à ce moment-là. Ces périodes d’activité intense du virus persistent généralement pendant 6 à 12 semaines. Le degré de morbidité et de mortalité du bétail dépendra du fait que la population est constituée de manière prédominante de races exotiques ou améliorées, ou d’animaux indigènes relativement résistants. Des niveaux assez élevés d’activité du virus peuvent se rencontrer chez les bovins du type zébu Bos indicus, par exemple, sans aucune manifestation clinique. De la même manière, le nombre des cas chez les humains dépendra du nombre de personnes exposées et de leur niveau de contact avec des animaux infectés ou des moustiques.

Survie interépidémique du virus

Au cours des longues périodes interépidémiques, des niveaux faibles d’activité du virus peuvent se vérifier dans certains foyers dans les zones épidémiques et enzootiques, et ceux-ci resteront non détectés à moins que des activités de surveillance intensive ne soient effectuées. L’activité du virus peut être révélée par des isolements casuels de moustiques ou par des maladies humaines occasionnelles. De petits foyers locaux de FVR peuvent se déclarer, lorsque et là où les conditions microenvironnementales sont favorables et que du bétail vulnérable est présent. Cependant, l’incidence de l’infection est habituellement suffisamment faible pour être indétectable. La maladie clinique chez les humains ou les animaux n’est généralement pas détectée en l’absence d’une surveillance spécifique, bien ciblée et active.

La transmission par les œufs et sexuelle du virus de la FVR se produit chez certaines espèces de moustiques Aedes du groupe Neomelaniconium. Les œufs de ces moustiques, et le virus qu’ils véhiculent, peuvent rester viables pendant de très longues périodes dans la boue de mares de surface asséchées ou de dépressions peu profondes (localement connues sous le nom de dambos, ou cuvettes), ou dans les plaines d’inondation. Les moustiques infectés y éclosent lorsque ces endroits sont de nouveau inondés. C’est la raison pour laquelle le virus persiste pendant des périodes interépidémiques prolongées dans les prairies et les régions semiarides de l’Afrique orientale, occidentale et australe.

FVR cryptique (ou sylvatique)

En Afrique, le cycle infectieux est latent chez les animaux vertébrés indigènes, domestiques et sauvages, ainsi que chez les moustiques, pour le bétail comme pour les humains. Dans les zones de forêt équatoriale et les zones boisées plus humides du pays, le virus circule silencieusement entre les espèces sauvages et domestiques et les insectes vecteurs. On parle d’activité cryptique ou sylvatique du virus de la FVR. La FVR cryptique est extrêmement difficile à déceler et se vérifie dans la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne.

Signes cliniques

Ovins et caprins

La maladie clinique se déclare chez les ovins sensibles (tels que les moutons à laine importés) de tous âges, mais elle touche plus sévèrement les jeunes agneaux. Le taux de morbidité chez les troupeaux infectés approche les 100 pour cent. Le taux de mortalité peut atteindre 95 pour cent chez les agneaux de moins d’une semaine, environ 40 à 60 pour cent chez les agneaux sevrés, et 5 à 30 pour cent chez les ovins adultes. Le taux d’avortement peut approcher les 100 pour cent.

Dans les cas suraigus, les ovins sont soit trouvés morts, soit ils sont soudainement affaiblis et s’écroulent lorsqu’ils sont conduits aux champs. Dans les cas aigus, on assiste à une très courte période d’incubation - moins de 24 heures - suivie par de la fièvre, un pouls rapide, un affaiblissement, une démarche instable, des vomissements, un jetage nasal mucopurulent et la mort dans les 24 à 72 heures. D’autres signes souvent observés sont une lymphadénite, une colique, une diarrhée hémorragique et des pétéchies ou hémorragies ecchymotiques dans les membranes muqueuses visibles.

La maladie subaiguë est plus probable chez les ovins adultes. Une fièvre biphasique est accompagnée d’anorexie et d’affaiblissement. On peut assister à des vomissements et des signes de douleurs abdominales, avec ou sans gastro-entérite hémorragique. Une hépatite et une jaunisse sont développées dans la plupart des cas. L’infection chez les brebis gestantes débouche presque inévitablement sur un avortement qui peut se vérifier en phase aiguë de la maladie comme en phase de convalescence.

La FVR chez les caprins est similaire à celle des ovins mais n’est habituellement pas aussi grave. Il est important de se souvenir que les moutons et les chèvres à poils indigènes en Afrique peuvent ne présenter aucun des signes susmentionnés et aucun signe clinique si ce n’est quelques avortements. Les troupeaux comprenant ou voisins d’animaux exotiques avec une FVR sévère peuvent ne présenter aucun signe.

PRÉCAUTIONS DE SÉCURITÉ

De nombreux cas de fièvre de la Vallée du Rift sont apparus chez des vétérinaires, des employés de laboratoire, des exploitants et autres suite à la manipulation de sang ou de tissus infectés ou d’autres matériels contaminés par le virus.

Une grande prudence est de mise dans le déroulement des autopsies d’animaux suspectés d’avoir succombé à la maladie, et dans la manipulation des avortons. Des gants de caoutchouc et des masques faciaux doivent être portés et la désinfection personnelle doit être minutieuse. Il faudrait se débarrasser des carcasses autopsiées en les enterrant ou les incinérant. Un niveau élevé de bioconfinement est également requis dans les laboratoires qui manipulent des matériels infectieux associés au virus de la FVR.

Les personnes à haut risque professionnel de contamination par la FVR doivent envisager une immunisation. Un vaccin de culture expérimental inactivé pour un usage humain fabriqué aux Etats-Unis pourrait être mis à disposition à cette fin.

Bovins et buffles domestiques

Chez les bovins, comme pour les ovins, la forme la plus grave de la maladie se rencontre chez les jeunes animaux. Le taux de mortalité chez les veaux exotiques des races Bos taurus, telles que les Frisonnes, peut atteindre les 30 pour cent, voire davantage chez les nouveau-nés. Certains animaux ayant atteint l’âge de 6 mois et même de 12 mois peuvent être gravement malades et débilités par une hépatite et une jaunisse pendant quelques mois. La maladie aiguë est similaire à celle du mouton. Chez les bovins adultes, le taux de mortalité se situe au-dessous des 2 à 5 pour cent. Les vaches avortent. Elles peuvent présenter de la fièvre, une baisse nette de la production de lait, avec une adénite, de l’anorexie et des malaises. Les hémorragies de la bouche et des naseaux se vérifient souvent, et s’accompagnent de coliques et de diarrhées hémorragiques. Chez les bovins élevés de manière extensive, les avortements peuvent ne pas être notés et une baisse des taux de vêlage peut être le seul signe apparent.

Camélidés

Bien que l’infection soit généralement latente chez les animaux adultes, les chamelles gestantes peuvent avorter à tout moment de la gestation et des morts néonatales peuvent se vérifier. Des taux d’avortement de 70 pour cent des gestantes ont été observés avec de nombreuses morts au moment de la mise bas et jusqu’à l’âge de 3 à 4 mois.

Humains

Après une période d’incubation de deux à six jours, les patients présentent une maladie semblable à la grippe avec une poussée soudaine de fièvre, de l’asthénie, des maux de tête, des maux de dos et autres douleurs musculaires, et souvent une photophobie et des vomissements. La fièvre est biphasique. On constate habituellement un certain degré de dommages au foie avec jaunisse. Dans les cas sans complications, la maladie se résorbe généralement d’elle-même en une semaine. De nombreux cas sont anodins. Cependant, la FVR chez les personnes affectées par des maladies préexistantes telles que la shistosomose ou une malnutrition peut se révéler grave ou même mortelle.

Les complications de la FVR qui se produisent à un faible pourcentage d’infections humaines incluent:

Pathologie

Pathologie macroscopique

Les lésions les plus caractéristiques sont des nécroses du foie à divers degrés. On trouve également des pétéchies et hémorragies ecchymotiques sur toutes les surfaces séreuses, les nœuds lymphatiques, l’hypoderme, les reins et dans divers tissus.

Lorsqu’il est gravement atteint - par exemple, chez les jeunes agneaux - le foie est gonflé et la capsule est contractée, donnant une impression externe de fermeté. Cependant, lorsqu’il est sectionné, l’organe est assez friable, congestionné et présente de nombreuses hémorragies. Lorsqu’elle n’est pas masquée par le sang, la couleur du foie va du gris-brun pâle au jaune-brun. De nombreux foyers gris-blanc, de 1 à 2 mm de diamètre, sont éparpillés à travers le parenchyme. La vésicule biliaire peut être œdémateuse et présenter des pétéchies ou hémorragies ecchymotiques. Tous les nœuds lymphatiques de la carcasse sont probablement hypertrophiés, œdémateux et hémorragiques.

L’appareil gastro-intestinal présente divers degrés d’inflammation, de catarrheux à hémorragique et nécrotique. Des pétéchies ou hémorragies ecchymotiques sont présentes dans la plupart des organes internes. Des ascites, un hydropéricarde, un hydrothorax et des œdèmes pulmonaires peuvent être observés. Les fluides dans les cavités du corps sont fréquemment souillés de sang et la carcasse marquée par la jaunisse.

Histopathologie

Dans le foie des jeunes animaux, il existe des foyers primaires bien définis de nécroses coagulées sévères, qui peuvent être centrilobulaires. Elles sont accompagnées de pan-nécroses massives et diffuses impliquant la plupart (ou la totalité) du reste du parenchyme. Certains foies présentent également une minéralisation d’hépatocytes nécrotiques éparpillés (ou en petits groupes). Les foyers nécrotiques primaires sont ensuite infiltrés par des histiocytes, des lymphocytes et des neutrophiles, dont beaucoup présentent une pycnose et une caryorrhexie marquées. Des corps intracytoplasmiques de Councilman peuvent être présents dans les hépatocytes dégénérés ou libres dans les sinusoïdes. Des corps d’inclusion éosinophiliques se trouvent souvent dans les noyaux des cellules qui sont encore reconnaissables comme hépatocytes.

Chez les animaux plus âgés, la nécrose hépatique peut être moins extensive et confinée aux zones focales des lobules individuels.

Immunité

Les anticorps IgM apparaissent d’abord trois à cinq jours après le déclenchement de l’infection de FVR, au moment où la virémie s’arrête. Ils persistent pendant un à deux mois, ou même trois à quatre mois chez certains animaux. Les anticorps IgG apparaissent 10 à 14 jours après le début de l’infection et persistent pendant au moins un à deux ans, ou à vie. L’immunité de convalescence après une infection naturelle est longue. La progéniture de mères immunisées peut avoir acquis de manière passive l’immunité maternelle pendant les trois à quatre premiers mois de leur vie.

Diagnostic

Diagnostic de terrain

Les épidémies de FVR doivent toujours être fortement suspectées lorsqu’il y a un déclenchement soudain de nombres importants d’avortements chez les ovins, les caprins, les bovins ou les camélidés, et des morts chez les agneaux, les chevreaux ou les veaux. Cela est particulièrement le cas en présence d’une inondation de surface dans la savane ou les zones semi-arides après des pluies prolongées (ou dans les zones irriguées); si les populations de moustiques sont importantes; et si une maladie est constatée simultanément chez les populations humaines. La maladie chez les animaux domestiques peut n’être décelée qu’après l’identification comme FVR de la maladie chez les personnes.

Des cas sporadiques ou de petits foyers peuvent également se vérifier dans des circonstances non épidémiques, qui sont plus difficiles à diagnostiquer sur le terrain et peuvent donc ne pas être détectés.

Diagnostic différentiel

Un certain nombre de maladies peuvent être confondues cliniquement avec la FVR. Il faut également ne pas perdre de vue que les conditions favorables à un foyer de FVR peuvent aussi être favorables à d’autres maladies transmises par les insectes, telles que la fièvre catarrhale du mouton, la maladie de Nairobi et la maladie de Wesselsbron. D’autres maladies du bétail et maladies transfrontalières, telles que la peste des petits ruminants (PPR), la peste bovine, la pleuropneumonie contagieuse caprine et bovine et la fièvre aphteuse (FA), peuvent également se vérifier avec la dislocation des communautés d’exploitants et le déplacement des animaux à la suite d’inondations. L’apparition simultanée d’autres maladies peut accroître les difficultés de diagnostic.

Avec toutes les causes d’avortement chez les ruminants, les maladies à prendre en considération dans le diagnostic différentiel de la FVR comprennent:

Diagnostic de laboratoire

Collecte et transport des prélèvements pour le diagnostic. Le sang total, le foie, les nœuds lymphatiques et la rate sont les tissus sélectionnés pour isoler le virus. Les échantillons de sang doivent être prélevés sur des animaux fébriles dans de l’acide éthylènediamine-tétracétique (EDTA) ou de l’héparine où des antibiotiques ont été ajoutés comme agents de conservation (pénicilline 200 unités et streptomycine 200 µg/ml, concentration finale). Les échantillons de foie et de rate doivent être prélevés de manière aseptique à l’autopsie à la fois sur des animaux morts frais et sur des fœtus avortés, s’ils sont disponibles, et placés dans des récipients stériles. Des prélèvements en double de tissus doivent être ponctionnés dans du formol tamponné neutre pour l’histopathologie.

Les échantillons de sang, environ 20 ml chacun, doivent être prélevés sur des animaux dans les phases aiguë et de convalescence de la maladie, pour le sérum.

Histopathologie. La découverte de lésions histologiques caractéristiques avec des pan-nécroses (voir la section sur l’histopathologie page 16) dans les foies des jeunes animaux ou des fœtus est caractéristique de la FVR.

Isolement du virus. Le virus de la FVR peut être isolé à partir de sang total ou d’homogénats de tissus frais par injection intracérébrale sur des souris de lait ou par injection intrapéritonéale sur des souris ou des hamsters adultes. Il peut également être facilement isolé dans diverses cultures de cellules primaires (par exemple des cellules primaires du foie ou des testicules d’agneau et de veau) ou des lignées cellulaires (à savoir BHK-21 et Vero). L’identité du virus isolé est confirmée par une réaction en chaîne de la polymérase (PCR) et un essai d’immuno-absorption enzymatique (ELISA), des tests de coloration fluorescente aux anticorps ou de séroneutralisation du virus.

Détection des antigènes. L’antigène de la FVR peut être détecté par des tests d’immunofluorescence directe ou indirecte sur des frottis par impression ou des coupes congelées de foie, de rate et de cervelle. Un diagnostic rapide peut parfois être fait par des tests d’immunodiffusion en gélose (IDG) sur des tissus frais. Le test ELISA, la coloration histochimique de coupes congelées ou de tissus fixés au formol, et la PCR sont maintenant beaucoup plus largement utilisés pour la FVR.

Détection des anticorps. Le test ELISA a maintenant remplacé les anciens tests d’inhibition de l’hémagglutination (IHA), d’immunofluorescence (IFA) et de séroneutralisation comme test de prédilection. Les tests ELISA sont disponibles pour tester la présence d’IgM et d’IgG, qui sont extrêmement précieux dans les enquêtes épidémiologiques. Le test de séroneutralisation du virus dans les procédés de microtitrage de tissus en culture est encore le système de test qui fait autorité. Il est hautement spécifique, avec peu ou pas de neutralisation croisée avec d’autres phlébovirus. Il peut être utilisé pour détecter des anticorps chez toutes les espèces animales. Cependant, comme il requiert l’utilisation du virus vivant, il n’est pas recommandé pour un usage en dehors des pays endémiques, à moins qu’un niveau élevé de bioconfinement ne soit disponible dans les laboratoires.

D’autres tests sérologiques sont moins spécifiques, mais ont encore un rôle très utile.

Le test ELISA indirect est un test fiable et sensible et peut fournir des résultats en quelques heures. Il existe des tests pour les deux anticorps IgM et IgG. Dans un cas-signal dans la situation d’un foyer, les réactions sérologiques croisées de faible niveau avec d’autres membres du genre Phlebovirus peuvent causer des problèmes. Les résultats incertains doivent donc être interprétés avec prudence et peuvent nécessiter une confirmation par le biais de tests de séroneutralisation (SN) dans un laboratoire de référence.

Détection de matériel génétique viral. Un test PCR de rétrotranscriptase est maintenant disponible pour détecter le matériel génétique viral. Le séquençage de la région par protéine-codage NS (S) du génome peut être utilisé pour une analyse phylogénétique (prise des empreintes génétiques) d’isolats du virus.


Page précédente Début de page Page suivante