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9. Conclusions


1. Certains avantages potentiels des animaux génétiquement modifiés tels qu'une amélioration de la production animale et de la qualité des produits, ou l'apparition de produits nouveaux d'origine animale, pourraient se réaliser à court ou à moyen terme. Parmi les autres applications possibles à plus long terme, on peut citer l'utilisation d'animaux transgéniques comme indicateurs biologiques, ou encore leur utilisation dans la lutte biologique ou pour la xénotransplantation.

2. Divers dangers d'ordre génétique et immunologique peuvent être dus à l'intégration, l'expression ou à l'instabilité des transgènes. Les résultats escomptés des travaux de recherche et de développement sur la conception des vecteurs (y compris l'utilisation d'éléments isolants ou d'éléments frontière et la suppression des gènes de résistance aux antibiotiques) permettront d'écarter ou de réduire certains problèmes de sécurité sanitaire et, ainsi, de concevoir et de produire des animaux génétiquement modifiés présentant d'emblée une sécurité accrue.

3. La xénotransplantation offre des avantages pour les êtres humains receveurs de cellules, de tissus et d'organes, mais présente aussi, pour eux et pour la population humaine, des dangers qui tiennent au fait qu'il est possible que des maladies se transmettent plus facilement entre les porcs et les êtres humains et que les porcs servent d'hôtes permettant le développement de nouveaux agents pathogènes pour l'homme. Il existe par ailleurs une possibilité que les produits provenant d'animaux créés pour la xénotransplantation pénètrent dans l'alimentation de l'homme, ce qui constituerait un danger pour la sécurité sanitaire des aliments.

4. La probabilité de la pénétration et de la persistance d'animaux génétiquement modifiés dans l'environnement variera en fonction des taxons, des systèmes de production, des caractères modifiés et des milieux receveurs. La dispersion et la persistance de poissons et de crustacés transgéniques ou de leurs transgènes dans l'environnement pourraient constituer une voie de pénétration indirecte dans l'alimentation humaine de produits issus d'animaux génétiquement modifiés. Cela tient au fait que des individus échappés ou leurs descendants pourraient par la suite être capturés au cours d'opérations de pêche visant leur espèce. Des mécanismes analogues pourraient s'appliquer à des volailles telles que canards et cailles, chassés pour le sport ou pour la nourriture. Le transport et la vente de poissons et de volailles transgéniques vivants constituent aussi une voie de fuite d'animaux transgéniques et un risque de pénétration dans l'environnement.

5. Lorsque la pénétration d'animaux génétiquement modifiés dans l'alimentation par le biais de l'environnement constitue un risque pour la sécurité sanitaire présentant une probabilité élevée, il est indispensable que les animaux soient confinés. Toutefois, les normes actuelles de confinement applicables à la recherche sur des animaux génétiquement modifiés ne visent pas la production commerciale d'animaux transgéniques.

6. La stérilisation fait disparaître le risque de dissémination de transgènes dans l'environnement, mais n'élimine pas tous les risques de nocivité écologique. La triploïdie monosexe est la meilleure méthode qui existe pour stériliser les poissons et crustacés, mais elle nécessite absolument des contrôles rigoureux.

7. Il existe des méthodes permettant de détecter des animaux génétiquement modifiés après leur libération dans l'environnement, mais il reste encore à définir et à valider des protocoles d'application. Diverses méthodes écologiques pourraient être utilisées pour déterminer, après leur libération, si des animaux génétiquement modifiés sont nocifs pour l'environnement, mais elles sont très difficiles à appliquer.

8. L'évaluation de la sécurité sanitaire des animaux génétiquement modifiés et des aliments qui en sont issus peut, dans une large mesure, être réalisée selon les directives déjà établies pour l'évaluation des plantes à ADN recombiné et leurs dérivés destinés à être consommés. La première étape de l'évaluation de la sécurité sanitaire sera donc une étude comparative de la sécurité sanitaire de l'animal génétiquement modifié et de l'animal traditionnel de référence, qui comportera une étude de l'ingestion alimentaire et sera suivie d'une caractérisation complète des risques.

9. Du fait que chaque animal génétiquement modifié (fondateur) possèdera une constitution génétique propre par l'intégration de la construction génétique, l'évaluation de la sécurité sanitaire devrait être effectuée cas par cas, même si une même construction génétique a été utilisée pour la modification. Si l'amélioration des techniques génétiques (par exemple la recombinaison homologue et l'insertion avec isolant) devait permettre, à l'avenir, de réduire les possibilités d'effets liés à l'insertion, il serait envisageable de passer à des méthodes plus génériques pour l'évaluation de la sécurité sanitaire des animaux génétiquement modifiés et des produits qui en sont issus.

10. La comparaison entre la situation des animaux et celle des végétaux génétiquement modifiés fait apparaître quelques grandes différences. Premièrement, le nombre d'animaux génétiquement modifiés issus d'un animal génétiquement modifié fondateur est généralement très inférieur, à l'exception des animaux aquatiques, au nombre de modifications effectuées sur des végétaux génétiquement modifiés et au nombre de végétaux des générations qui en sont issues. Cela pourrait avoir pour conséquence que le nombre d'animaux disponibles pour les études comparatives de la sécurité sanitaire serait limité, ce qui obligerait à recueillir davantage de données historiques que dans le cas des plantes, pour lesquelles les données sont déjà plus nombreuses. La seconde différence réside dans l'omniprésence de toxines naturelles dans les produits végétaux et la rareté des cas où il s'est avéré que des produits animaux contenaient des substances antinutritives pour l'homme. En revanche, les zoonoses et les organismes pathogènes pour l'homme provenant du genre animal sont un sujet d'inquiétude dont il convient de tenir compte dans le cas des animaux génétiquement modifiés.

11. Une évaluation rigoureuse avant mise sur le marché de la sécurité sanitaire des aliments issus d'animaux génétiquement modifiés devrait donner des assurances suffisantes quant à leur innocuité. Le recours à la surveillance après mise sur le marché devrait être envisagé comme moyen d'obtenir des informations sur les effets potentiels à long terme ou les effets inattendus indésirables ou bénéfiques des aliments issus d'animaux génétiquement modifiés ou d'animaux traditionnels. Cette surveillance pourrait être utile dans certains cas où des interrogations bien définies requièrent, par exemple, une estimation plus précise de l'ingestion et des conséquences nutritionnelles d'aliments dérivés d'animaux génétiquement modifiés, ou une meilleure estimation du devenir dans l'environnement des animaux génétiquement modifiés et de leurs transgènes.

10. Recommandations

1. Les efforts devraient tendre à rendre dès le départ les animaux génétiquement modifiés sans danger, par exemple en choisissant judicieusement les buts de la sélection et en améliorant la conception des vecteurs. Il est indispensable d'améliorer les systèmes vecteurs-transformation (en développant, par exemple, la recombinaison homologue ou l'insertion avec isolant) afin de réduire le caractère aléatoire de l'insertion de gènes et, par voie de conséquence, de réduire les effets non intentionnels. La Consultation a recommandé d'éviter l'utilisation de séquences d'ADN inutiles dans la construction génétique, y compris les gènes marqueurs.

2. Il est recommandé de poursuivre l'uniformisation de la caractérisation moléculaire pour l'étendre aux régions contiguës.

3. La constitution de bases de données sur la variation naturelle des constituants essentiels des produits d'origine animale, y compris les produits à base de poisson, sera un élément important pour pouvoir évaluer les effets non intentionnels d'une modification génétique.

4. La Consultation est convenue que les stratégies et méthodes d'étude de l'allergénicité des animaux génétiquement modifiés ne différaient pas fondamentalement de celles actuellement utilisées pour évaluer les végétaux génétiquement modifiés. Il a été admis que les modèles animaux d'étude du pouvoir allergène, même en l'absence de validation, pouvaient être utiles pour identifier d'éventuels allergènes. La Consultation a recommandé que les efforts soient poursuivis pour développer et valider ces modèles. Des recherches supplémentaires devraient être consacrées à l'étude des mécanismes de l'allergénicité.

5. Il faut améliorer l'accès et l'interconnexion des bases de données existantes ou constituer une base de données centralisée concernant les épitopes linéaires et structurels et créer des instruments utiles pour rechercher le pouvoir allergène des transgènes.

6. Il est clair qu'il faut poursuivre le développement d'outils de profilage génomique, protéomique et métabolomique et d'instruments de détection des effets non intentionnels.

7. Il est indispensable de disposer d'une base de données accessible partout dans le monde, reliée aux activités menées dans ce domaine, et contenant des informations sur les méthodes de détection et d'identification et sur les matériels de référence pour les produits alimentaires dérivés d'animaux génétiquement modifiés présents sur le marché ou en cours de développement.

8. L'évaluation cas par cas des avantages et des risques pour l'environnement que présentent les animaux génétiquement modifiés devrait étudier chaque lignée transgénique (c'est-à-dire les individus ayant un génotype transgénique unique) en fonction des conditions écologiques locales, des modes d'agriculture et du mode d'alimentation humain. Il est indispensable d'étudier le cycle entier de la vie de l'animal, par exemple en estimant l'aptitude nette à la survie et à la reproduction, pour prévoir la probabilité de passage dans l'environnement de l'animal génétiquement modifié ou de ses transgènes. Il convient d'appliquer à l'analyse des risques et à la vérification de la sécurité sanitaire les principes établis de la biologie de l'évolution contemporaine, de biologie des populations et de l'écologie.

9. Il convient d'affiner les modèles prédictifs et les données à prendre en compte dans l'évaluation des risques pour l'environnement. Les méthodes employées pour produire des données doivent être validées, et des ensembles de données constitués pour réduire les principales lacunes dans les connaissances actuelles.

10. Des méthodes harmonisées de confinement des animaux génétiquement modifiés devraient être créées et validées pour permettre la gestion des risques lorsque la dispersion dans l'environnement d'animaux génétiquement modifiés ou de leurs transgènes constitue un danger pour la sécurité sanitaire des aliments. Le doublement des mesures peut s'avérer nécessaire pour que le confinement soit fiable. Il est également nécessaire d'améliorer les méthodes de stérilisation de certains animaux génétiquement modifiés et de mettre en place des systèmes de contrôle rigoureux pour toutes les espèces.

11. Le renforcement des capacités est une nécessité, particulièrement dans les pays en développement, en ce qui concerne la sécurité sanitaire des aliments et la gestion des animaux génétiquement modifiés, y compris les aspects écologiques et éthiques relatifs à la sécurité sanitaire des aliments.

12. La Consultation a appelé au renforcement de la coordination entre les organismes officiels nationaux et intergouvernementaux chargés de la sécurité sanitaire des aliments, de l'environnement, de l'agriculture et du commerce lorsqu'il s'agit d'évaluer et de gérer les risques liés aux animaux génétiquement modifiés. Cela est par ailleurs indispensable pour réagir à la pénétration accidentelle d'animaux génétiquement modifiés qui ne sont pas destinés à l'alimentation humaine dans les approvisionnements alimentaires.

13. La Consultation a recommandé d'associer toutes les parties concernées et le public à un débat participatif en faisant connaître les avantages potentiels, les risques et les incertitudes liés à la modification génétique des animaux afin de mieux informer la population et d'accroître la confiance. Le débat participatif devrait être engagé dès le début du développement des produits et à des points clés du processus de prise de décision.

14. Étant donné que les diverses parties ne se sont pas encore entendues sur un cadre universel pour l'évaluation pratique des aspects éthiques des biotechnologies animales, il est recommandé que l'OMS et la FAO cherchent à définir, en coopération avec les autres organisations concernées, les cadres nécessaires pour cette tâche, lesquels devraient rendre les évaluations éthiques plus transparentes et plus méthodiques, et ainsi les faire entrer dans le champ de l'assurance de qualité.


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