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APERÇU DE LA SURVEILLANCE ET DU ZONAGE

Qu'est-ce que la surveillance des maladies?

La surveillance est un mécanisme qui s'applique à collecter et interpréter des données sur la santé de populations animales, pour décrire précisément leur statut sanitaire au regard de maladies spécifiques. Cela peut être en appui sur des données scientifiques et historiques démontrant l'absence, dans certaines circonstances, de cas cliniques d'une maladie chez un hôte sensible. La surveillance ciblée qui permet de prouver l'absence d'infection par un pathogène spécifique, peut être utilisée pour renforcer des données historiques et/ou passives qui ne seraient pas concluantes. Comme indiqué dans la section relative aux définitions, le terme de surveillance est utilisé pour la détection des maladies nouvelles ou exotiques, alors que le suivi est destiné à détecter des augmentations des niveaux d'une infection établie ou endémique qui pourrait signaler la résurgence d'un foyer de maladie. Le terme de programme de surveillance est souvent utilisé pour inclure à la fois les activités de surveillance et de suivi.

Le concept de surveillance est schématisé dans la Figure 1. Les parties prenantes incluent les personnes qui dépendent d'une productivité substantielle en animaux aquatiques, les instances gouvernementales responsables de la protection du commerce et de l'exploitation des ressources naturelles, et de la protection de l'environnement. L'un des facteurs les plus critiques, au-delà de cette première approche, sont les boucles de contrôle. La communication rapide et transparente entre les parties prenantes et les gestionnaires de la surveillance est essentielle pour la pertinence des données et leur efficacité d'utilisation pour le contrôle des maladies. De nombreux pays et des organisations internationales ont rendu obligatoire la déclaration des foyers de maladies en en faisant une obligation légale pour s'assurer que les maladies ne puissent se propager sans être rapportées. Au-delà de cet aspect légal, toutefois, il en va de l'intérêt de toutes les parties prenantes de faire immédiatement part de soupçons, dans la mesure où le coût d'une intervention tardive est toujours largement supérieur à celui d'une intervention précoce. Dans les pays où l'obligation d'information n'est pas encore obligatoire, les bonnes pratiques de gestion (BPG) au niveau de l'élevage peuvent être utilisées pour aider à une gestion effective de la santé. Ces bonnes pratiques de gestion sont particulièrement efficaces là où des fermes qui opèrent sous de tels programmes peuvent contrôler de façon plus forte les parts de marché ou les coûts d'agrément de site. Cela peut répondre au souci d'«autorégulation»et promouvoir le transfert d'information rapide et volontaire.

La Figure 2 montre les différentes composantes d'un programme de surveillance incluant la surveillance efficace, la population hôte et les facteurs environnementaux.

La surveillance et le suivi nécessitent une expertise confirmée, des laboratoires équipés de façon appropriée, des structures de soutien légal, un réseau de transport et de communication, etc.L'application efficace de cette structure de support nécessite une bonne connaissance des populations hôtes, porteuses ou susceptibles de l'être, ainsi que de leur environnement local. C'est sur cette base que les différentes activités de surveillance et de suivi conduiront à des données pertinentes et à la connaissance de la distribution et de l'importance des agents pathogènes visés par ce programme. Enfin, mais non des moindres, l'information collectée et analysée doit être communiquée aux parties concernées, incluant le personnel impliqué dans la surveillance elle-même. Cela complète les boucles de contrôle nécessaires à la réduction du risque de transfert de maladies avec les mouvements d'animaux aquatiques vivants, quel qu'en soit le propos.

Figure 1: Aperçu de surveillance d'une maladie.

Figure 1

Figure 2: Relations entre les différents composants d'un programme de surveillance.

Figure 2

Importance de la surveillance des maladies

L'un des problèmes courants lorsqu'on établit des directives pour des pratiques de commerce à bas risques est que la situation n'est jamais figée. Un certain nombre de facteurs contribue au changement dans le statut des maladies, leur prolifération et leur propagation. Ceci inclut:

La globalisation. Il y a une intégration continue et une interdépendance des marchés et des systèmes économiques mondiaux. Ceci inclut l'augmentation actuelle du commerce des animaux vivants, de leurs produits, d'aliments pour les animaux et des produits qui s'y rapportent. Concomitamment à des transports plus rapides et plus volumineux, à l'augmentation des voyages et déplacements humains, il y a une augmentation significative des risques d'introduction de «nouvelles» 5 maladies ou d'infections.

L'augmentation de la production d'aquaculture. L'aquaculture est à l'heure actuelle le secteur de production alimentaire dont la croissance est la plus rapide au niveau mondial, avec une production presque triple de celle de 1990 pour atteindre 45,71 millions de tonnes en 2000. Les pays en voie de développement fournissent l'essentiel de cette augmentation de production. Les pressions d'une croissance continue à cette cadence augmentent les risques liés aux changements rapides dans les systèmes de production et d'émergence et de propagation de «nouvelles»maladies.

L'adaptation microbienne. Les micro-organismes ont une capacité remarquable à s'adapter aux changements dans leur environnement. Par exemple, l'utilisation étendue d'antibiotiques dans le traitement des maladies humaines et animales a conduit à l'apparition problématique d'organismes résistants aux traitements. De même, les changements climatiques et le réchauffement global commencent à montrer les signes de changements dans la distribution géographique de certains agents pathogènes ou de leurs vecteurs.

Ces considérations suggèrent que la situation des maladies en aquaculture va continuer à changer de façon assez imprévisible. Quelques exemples récents de maladies qui ont émergé en aquaculture sont montrés dans le Tableau 1.

Tableau 1. Exemples de maladies importantes qui ont émergé dans les systèmes poisson, crustacé et mollusque.

PoissonsCrustacésMollusques
Syndrome ulcératif épizootique (SUE)Maladie des points blancs (MPB)Maladie à sphère multinuclée inconnue (MSX)
Nécrose nerveuse virale (NNV)Maladie de la tête jaune (MTJ)Bonamiose
Herpès virus de la carpe Koi (HVK)Syndrome Taura (ST) 

L'augmentation des échanges de marchandises issues des animaux aquatiques (animaux vivants, produits frais ou congelés) a conduit à un examen plus minutieux des risques de propagation des maladies dus à ces échanges. En retour, cela a montré les besoins en systèmes d'investigation et d'information plus efficaces, et répondant aux principales menaces causées par les maladies des animaux aquatiques. La démonstration fiable du caractère indemne pour des maladies données est l'un des principaux défis du développement de tels programmes. Les accords internationaux actuels sur le commerce animal (notamment l'Accord SPS de l'OMC), nécessitent une justification scientifique pour toute restriction des échanges basée sur la santé animale, tel qu'un risque clair pour le statut indemne d'un pays ou d'un territoire vis-à-vis d'une maladie particulière ou d'une menace potentielle pour l'efficacité d'un programme de contrôle officiel d'une maladie. Les standards internationaux pour les maladies des animaux aquatiques (le Code et le Manuel de l'OIE) recommandent un certain nombre de requis pour la surveillance en soutien à la déclaration d'un pays de son statut indemne d'unemaladie6. Ceci est nécessaire pour tout pays souhaitant imposer des mesures de protection pour prévenir son exposition via des importations à partir de pays où les maladies préoccupantes existent. Afin de permettre à un pays, une région ou toute autre zone de prendre des décisions en connaissance de cause sur les actions préventives ou curatives, il est essentiel de disposer de moyens efficaces pour l'identification et le suivi des maladies ainsi que de l'appréciation de leurs effets.

La surveillance des maladies est un composant fondamental de tout programme officiel de protection sanitaire des animaux aquatiques. Une telle surveillance forme la base du système d'alerte précoce pour déceler les foyers de maladies imminentes ou émergentes;elle permet de planifier et maintenir des programmes de contrôle des maladies; de fournir un conseil avisé en matière de santé des animaux aquatiques aux secteurs de l'élevage et de la protection de l'environnement; elle permet également la certification à l'exportation pour l'information internationale et la vérification du statut indemne vis-à-vis des maladies concernées. La surveillance proactive, avant toute émergence de foyers de maladies, fournit les données essentielles pour répondre immédiatement et efficacement en vue d'isoler la source et d'identifier l'étendue du problème. Connaître la source et l'étendue d'un foyer de maladie constitue un gain de temps et d'efforts permettant de concentrer les efforts de contrôle sur les points qui en ont le plus besoin.

Propos et objectifs de la surveillance

Une définition claire des objectifs est de première importance pour l'efficacité de la surveillance. Les points qui suivent sont résumés de la Consultation, ainsi que des rapports se rapportant à ce problème.

Le premier but de la surveillance des animaux aquatiques est de fournir une information, au meilleur coût, et scientifiquement pertinente, pour l'appréciation et la gestion des risques de transfert des maladies associées au commerce (domestique et international) des animaux aquatiques et de l'efficacité des productions animales et de la santé publique. Cette affirmation est en accord avec l'Accord SPS de l'OMC, le Code aquatique de l'OIE, et la conception internationale de ce que la surveillance des maladies est supposée atteindre dans les systèmes terrestres et aquatiques.

Les maladies qui méritent des programmes de surveillance devraient être celles qui constituent une menace significative pour les échanges, la productivité (sauvage ou d'élevage), et/ou la santé publique. Ces maladies peuvent être listées par l'OIE ou être d'autres maladies spécialement préoccupantes pour un pays. Les objectifs qui définissent la surveillance pour les maladies des animaux aquatiques sont:

Ces objectifs définissent ce que la surveillance est censée accomplir, soit pour décrire la répartition et la prévalence d'une maladie importante, pour garantir le maintien de zone de maladie, ou pour évaluer le succès d'une éradication, d'une mise en jachère ou de toute autre mesure de contrôle d'une maladie.

Types de surveillance

De nombreux termes ont été utilisés pour décrire les différents types de surveillance, reflétant en cela les différents objectifs de la surveillance. Les termes de surveillance passive, de surveillance active, de surveillance générale, de surveillance ciblée ou spécifique et, plus récemment, de surveillance de balayage (Scudamore, 2002) sont utilisés dans la littérature. Dans la mesure où ces termes ont fréquemment été inter changés, et utilisés sans définition claire, une brève explication est donnée ci-dessous pour chacun d'eux. Une étude plus exhaustive des surveillances, active et passive, est donnée par Cameron (2002). Un programme complet de surveillance peut comprendre une combinaison de plusieurs approches pour la collecte de données de surveillance.

La surveillance passive est l'utilisation secondaire de données collectées en routine pour d'autres propos. L'information spécifique sur une maladie est un «sous produit»d'activités plus générales relatives aux maladies, comme la collecte en routine d'informations sur des incidents rapportés par des éleveurs ou des agents de terrain, ou les résultats d'échantillons soumis aux laboratoires de diagnostic, ou examinés dans le cadre de programmes de recherche. La surveillance générale est très utile à la détection précoce des maladies émergentes et fournit souvent une image générale de la situation d'une maladie dans une population. Toutefois, elle ne fournit qu'un nombre négligeable de données quantifiables sur les niveaux d'infection, ou de données fiables sur la distribution géographique exacte de la maladie. Ce type de surveillance ne peut pas être utilisé pour démontrer de façon fiable l'absence d'une maladie particulière dans un espace donné. Du fait de sa nature largement non spécifique, la surveillance générale est parfois appelée «passive»ou de «balayage».

La surveillance spécifique, ou ciblée, implique la récolte planifiée de données précises de terrain sur la présence d'une maladie ou d'un pathogène spécifique au sein d'une population définie. Les programmes de surveillance active d'une maladie, peuvent être (i) de type «tout attraper»destinés à détecter toute présence de maladie importante; (ii) peuvent viser des maladies spécifiques; ou (iii) peuvent suivre les progrès du contrôle d'une maladie spécifique ou des efforts d'éradication. Ce type de surveillance peut fournir les données requises pour prouver que les populations spécifiées sont indemnes d'une maladie spécifique. De sorte à maximiser la valeur de la surveillance spécifique, celle-ci devrait être basée sur des techniques d'enquête qui fournissent des échantillons représentatifs de la population susceptible ciblée. Les techniques d'échantillonnage visent à maximiser la probabilité de détection d'un pathogène, elle-même basée sur l'information épidémiologique disponible.

Dans la mesure où la surveillance générale n'est jamais complètement «passive»et que la surveillance peut inclure des activités autres que celles planifiées pour la surveillance active (comme les rapports d'études de foyers de maladie), la compréhension claire des activités de surveillance peut donc être compliquée et des termes hybrides tels que surveillance active spécifique peuvent apparaître. Pour éviter la confusion dans le contexte du présent rapport, les définitions et terminologie ci-dessous sont utilisées tout au long de ce document.

La surveillance générale peut être utilisée pour développer des programmes de surveillance spécifique. Par exemple, des contrôles de santé en routine lors d'épisodes de mortalités d'huîtres au Canada Atlantique ont révélé la présence de maladie à MSX pour la première fois dans les eaux canadiennes. Ceci a alors déclenché un programme de surveillance ciblée pour déterminer l'étendue et la dispersion de la maladie dans les populations d'huîtres canadiennes. La conception de ce programme s'est fortement appuyée sur les données historiques ainsi que sur les transferts actuels d'huîtres dans l'ensemble de la région Atlantique (Stephenson et al., 2003).

Encadré 1. Surveillance générale et spécifique
La surveillance générale (ou passive) est le travail continu d'observation du profil d'une maladie endémique dans une population sensible de sorte que tout changement inattendu ou non prédit puisse être reconnu et enclencher des actions le plus rapidement possible. De plus, les données de diagnostic des laboratoires peuvent être utilisées à définir le seuil de syndrome non diagnostiqué qui enclenchera des études approfondies pour les caractériser. Par exemple, si une maladie des branchies excédait une certaine prévalence, il faudrait procéder à un diagnostic de laboratoire pour savoir s'il pourrait s'agir d'une nouvelle maladie. Une telle surveillance des syndromes pourrait également être collectée par les agents des pêcheries ou les producteurs.
La surveillance spécifique collecte les informations sur une maladie ou une condition spécifique de sorte que son niveau au sein d'une population définie puisse être mesurée, ou son absence objectivée.

Qu'est-ce qu'une zone et le zonage?

Le zonage des maladies est un outil destiné à faciliter le commerce, domestique ou international, tout en prévenant la dissémination de maladies importantes. Les zones définies par des mécanismes appropriés de surveillance comme indemnes de telles maladies, peuvent être utilisées pour faciliter le commerce et offrir une protection contre l'introduction de leurs agents pathogènes. Les zones définies comme étant infectées par un pathogène donné peuvent également pratiquer des transferts sans restrictions avec des zones infectées par le même pathogène. De sorte qu'une zone qui est positive pour une maladie n'est pas nécessairement l'objet d'un arrêt absolu d'échanges, même s'il peut s'avérer nécessaire de mettre en place certaines restrictions telles que le mouvement autorisé uniquement pour les œufs désinfectés en surface, pour prévenir la propagation d'agents viraux verticalement transmis vers des zones ou des pays non infectés.

Le zonage des maladies est le procédé de délinéation des populations infectées ou non infectées dans un pays ou un groupe de pays. Les termes de «zones infectées»et de«zones indemnes»s'appliquent en général au regard de maladies spécifiques, sauf à de rares occasions où un ensemble de maladies distinctes partage des caractéristiques épidémiologiques communes, ou peut être détecté par un diagnostic commun (non spécifique d'une de ces maladies). Une zone indemne peut être établie dans un pays sur la base du statut sanitaire d'une espèce d'hôte sensible pour une maladie donnée et dans un espace géographique ou hydrographique donné. L'OIE fournit les grandes lignes du concept de zonage dans le Chapitre 1.4.4 du Code, dans la section relative à l'analyse du risque à l'importation. Le zonage est particulièrement approprié au contrôle des maladies des animaux aquatiques dans la mesure où celles-ci ne répondent que difficilement aux mesures de contrôle utilisées pour l'isolement et l'enrayement des maladies dans les structures à terre ou pour les animaux terrestres.

Les zones pour les maladies sont habituellement des espaces géographiques clairement délimités au sein d'un pays, mais elles peuvent également être à cheval sur les frontières de plusieurs pays. Des rivières ou des bassins versants peuvent être utilisés pour définir des zones continentales, alors que les zones côtières peuvent être basées sur les mouvements d'eaux sous influence océanique ou tidale (ce qui peut embrasser de larges espaces). Le zonage côtier pour des maladies spécifiques est souvent rendu plus compliqué par des hôtes migrateurs ou des espèces réservoirs mal, ou peu, connues. Les outils utilisés pour la délinéation des zones doivent correspondre au but du zonage, c'est-à-dire la capacité de détection précoce des infections (sensibilité), et par conséquent:

Dans la mesure où différentes maladies ont différents modes de propagation, la délinéation efficace d'une zone dépend de l'utilisation d'outils applicables à une maladie donnée.

Importance du zonage

Historiquement, la présence d'une maladie au sein des frontières d'une nation conduisait à la suspension ou à la réduction du commerce de l'espèce sensible (ou de ses produits) pour l'ensemble du pays. Récemment, cependant, des barrières climatiques, géographiques et hydrologiques ont été reconnues comme aussi efficaces à délimiter et contrôler la propagation d'une maladie à partir d'un espace affecté, en l'isolant efficacement dans une zone au sein d'un pays donné. L'acceptation des bases biologiques des variations dans l'occurrence d'une maladie est la première étape du concept de zonage pour la gestion sanitaire des animaux aquatiques. Un schéma efficace de zonage peut permettre aux zones indemnes d'un pays de continuer à commercer/échanger alors que la zone «infectée»est placée sous mesures appropriées de contrôle de la maladie, incluant des restrictions de commerce ou de mouvements. Le zonage est également applicable et efficace pour prévenir la propagation et réduire les pertes économiques dues à une maladie importante dans un pays.

Comment définir les limites d'une zone?

Pour les animaux terrestres, une zone infectée peut se définir simplement comme un espace d'un rayon déterminé autour d'une propriété infectée. Pour les animaux aquatiques, cependant, la délimitation des frontières d'une zone est plus difficile. Le système de zonage en eau douce, le plus simple, est constitué des fermes qui reçoivent leur eau d'entrée à partir d'un réseau fluvial qui leur est propre, un réservoir indépendant d'eau de surface, un approvisionnement par source ou forage. Dans de telles situations, le zonage peut effectivement être basé sur l'infrastructure d'élevage, ainsi les transferts d'animaux peuvent continuer même si les installations voisines (avec lesquelles il n'y pas de lien hydrographique) sont infectées. A l'intérieur des terres, toutefois, la plupart des installations aquacoles communiquent avec des systèmes fluviaux communs ou autres voies d'eau partagées, par lesquels l'agent pathogène peut être véhiculé jusqu'aux populations d'animaux aquatiques sauvages, ou à d'autres fermes situées en aval. La «zone»minimale qui peut être appliquée à une maladie des animaux aquatiques d'eau douce, dans un tel cas, serait alors le réseau fluvial dans son entier ou le bassin versant du fleuve. D'énormes bassins fluviaux, comme le Delta du Mékong ou les Grands Lacs demandent à être abordés par des juridictions politiques multinationales et régionales. La gestion d'une maladie d'un côté d'un plan d'eau commun qui n'aurait pas d'équivalent de l'autre côté, risque de ne pas être très efficace. En conséquence, la coopération politique (intra ou internationale) est nécessaire.

Le zonage des espaces marins et estuariens est également compliqué, car il dépend des caractéristiques océanographiques, de la distribution et des caractéristiques des vecteurs et des hôtes, mais aussi, dans de nombreux cas, des frontières politiques communes et des activités humaines qui n'ont pas de rapport direct (activités récréatives et de loisir, navigation, etc.).

Types de zones

Dans un pays désireux d'établir des zones pour contrôler une maladie d'animaux aquatiques déterminée, cette maladie doit impérativement être une maladie à déclaration obligatoire.Ceci est nécessaire pour éviter des foyers de maladies «cryptiques» ou «non signalées»qui nuiraient à l'efficacité de la surveillance et aux mécanismes de réponse qui y sont associés. A la fois l'OMC et l'OIE appuient leurs standards sur le postulat selon lequel le contrôle d'une maladie est toujours beaucoup plus efficace avec un signalement rapide et franc des acteurs affectés. Lorsque la déclaration obligatoire n'est pas impérative, ou ne fait pas clairement partie de l'arsenal législatif, la surveillance peut encore malgré tout être instaurée avec les partenaires qui adhèrent aux objectifs. Dans un tel cas, l'«autocontrôle»permet un équilibre provisoire en attendant que le signalement obligatoire ne dispose d'une base légale. Le signalement peut également faire partie des bonnes pratiques de gestion (BPG) ou du système d'autorisation et d'agrément des fermes/sites.

La taille, l'emplacement, la délinéation et les impératifs de gestion des différents types de zones varient en fonction des maladies qu'elles sont censées contrôler. L'étendue des zones et leurs limites devraient être établies par l'Autoritécompétente du pays et mises en vigueur par la législation nationale, mais également délimitées de façon claire par des frontières naturelles, artificielles ou légales, qui se justifient de manière scientifique. Des conditions strictes pour la surveillance sanitaire et la gestion des données doivent être satisfaites pour affirmer le caractère indemne de maladie, incluant le signalement obligatoire ou un mécanisme équivalent garantissant que toute manifestation d'une maladie significative soit rapidement examinée par un laboratoire capable de diagnostics et conforme aux normes nationales ou internationales (directement ou par l'intermédiaire de laboratoires de référence régionaux ou nationaux). Ceci inclut un signalement approprié et immédiat à l'Autorité compétente pour la gestion et le contrôle des maladies des animaux aquatiques, quand nécessaire.

Zone indemne de maladies spécifiques

Installations aquacoles - Fermes ou établissements situés à l'intérieur d'une zone infectée, mais disposant d'une alimentation en eau protégée et indépendante, et satisfaisant aux autres conditions relatives à l'élevage. Chaque installation peut démontrer qu'elle est indemne de la maladie concernée, de sorte qu'elle peut approvisionner d'autres fermes indemnes de la ou des maladie (s) spécifique (s) au sein de ce pays ou dans d'autres pays officiellement indemnes de la maladie. Des conditions strictes pour la surveillance sanitaire et la gestion des données doivent être satisfaites pour affirmer le statut indemne de maladie d'établissements aquacoles à l'intérieur d'un périmètre où la maladie est endémique. Le zonage basé sur les installations aquacoles peut s'appliquer également aux maladies affectant un espace national ou régional au sein d'un pays, mais ne peut s'appliquer aux installations situées dans les estuaires ouverts ou les eaux côtières où l'isolement d'avec les populations sauvages ou d'autres cheptels est impossible.

Espaces hydrographiques - Périmètres à l'intérieur desquels les populations (sauvages ou d'élevage) d'animaux aquatiques sensibles sont démontrées comme étant indemnes d'une maladie spécifique d'importance (nationale, régionale, ou listée par l'OIE) grâce à une surveillance ciblée et l'absence d'exposition à des populations ou des cheptels provenant de «zones infectées»(telles que décrites ci-dessous).

Zone tampon pour les maladies spécifiques

Il s'agit d'une zone - à laquelle on se réfère souvent comme «zone de surveillance»(ce qui prête pour le moins à confusion puisque toutes les zones,de facto, nécessitent un certain degré/niveau de surveillance) - qui est établie dans une zone non infectée entourant une zone infectée. La surveillance à l'intérieur de cette zone aide à maintenir une délimitation précise de la zone infectée. Dans le cas d'un foyer de maladie, une zone tampon peut être établie autour d'une zone identifiée infectée, pour contrôler la propagation de la maladie pendant que l'on évalue l'étendue réelle de la propagation à partir des zones infectées connues.

Zone infectée pour des maladies spécifiques

Une «zone infectée»est une zone où une maladie spécifique:

Si l'éradication est possible, comme dans une installation aquacole, les mesures de contrôle pour tenter d'éradiquer l'agent pathogène peuvent être entreprises. La zone conservera son caractère «infecté» jusqu'à ce que l'éradication de l'agent pathogène soit objectivée grâce à une surveillance ciblée convenant à la démonstration de l'absence de la maladie. Dans les cas d'eaux ouvertes/de circuits ouverts où l'éradication est impossible, la délimitation de la zone infectée est maintenue grâce à la surveillance générale de la zone et la surveillance ciblée de la zone tampon qui l'entoure.

Mouvements d'animaux entre zones

La gestion continue est indispensable pour empêcher que des animaux aquatiques vivants ne soient transportés d'une zone infectée à une zone non infectée, incluant les zones tampon. De même, il est nécessaire de contrôler l'envoi d'autres vecteurs connus de la maladie tels que le matériel génétique, les vaccins, le matériel infectieux et les aliments pour les animaux aquatiques, d'une zone infectée à une zone non infectée.

Manifestement, la «sensibilité»peut couvrir le champ des porteurs sains de l'agent pathogène (tolérance à la maladie), jusqu'à une véritable résistance (absence d'infection). On constate donc qu'une même espèce peut avoir des sujets résistants/tolérants, ainsi que des sujets naïfs ou vulnérables. Par conséquent, la surveillance ciblée de populations individuelles est un pré requis essentiel pour évaluer une véritable sensibilité. Le principe général pour le mouvement entre des zones différentes est montré à la Figure 3.

Relation entre surveillance et zonage pour l'analyse de risques à l'importation

Les pays membres de l'OMC sont obligés de suivre différents accords multilatéraux, incluant l'Accord SPS de l'OMC. L'Accord SPS de l'OMCreconnaît l'OIE comme l'organisation internationale responsable du développement et de la promotion des normes applicables aux recommandations internationales sur la santé animale concernant l'échange d'animaux vivants et des produits d'origine animale.Le Code de l'OIE fournit les directives aux Autorités compétentes nationales pour mettre en application les principes contenus dans l'Accord SPS pour les maladies des animaux aquatiques concernés par le commerce. La section 1.4 du Code de l'OIE fournit un cadre pour l'analyse des risques inhérents au transfert international de maladies considérées comme ayant une importance pour le commerce d'après la Commission de l'OIE pour les normes de santé des animaux aquatiques (AAHSC, précédemmentnomméeCommissionpour les maladies des poissons). Les maladies qui ont été évaluées comme présentant le risque le plus élevé sont celles qui: (a) sont grandement infectieuses pour les espèces (sauvages ou d'élevage) d'importance économique ou écologique; (b) ont peu de possibilités de contrôle efficace, voire aucune; et (c) présentent un risque élevé de provoquer des infections endémiques chez des espèces hôtes sensibles et/ou réservoirs. La menace peut être directe, causant une perte sanitaire importante, ou indirecte, affectant les marchés domestiques ou internationaux de produits vivants ou transformés. Les flèches indiquent la direction des transferts à bas risques compatibles avec les principes généraux de contrôle sanitaire, alors que les lignes en pointillé indiquent des mouvements qui auraient de moindre choix de mesure pour réduire les risques sanitaires, ou les risques posés par des situations sanitaires inconnues. Ferme/zone de surveillance=Ferme/zone tampon7.

Un autre impact économique, souvent mésestimé, est celui de la dévaluation de la valeur du produit par le consommateur. Celui-ci estime qu'un produit provenant de «populations malades»est de peu de qualité ou de moins bonne qualité qu'un produit issu de sources «indemnes», et ce y compris là où la maladie n'a pas de répercussions sur la santé humaine ou la qualité des fruits de mer.

Figure 3. Transferts d'animaux aquatiques vivants entre pays, zones et fermes ayant des situations de connaissances sanitaires différents (Diagramme d'après Anon., 2000).

Figure 3

Tous ces facteurs de risques sont d'une importance clef dans la sélection des maladies qui justifient la surveillance et le zonage. Le Code de l'OIE dresse la liste de plusieurs critères qui permettent d'évaluer si une maladie présente un risque suffisamment important pour justifier de figurer dans le Code (OIE, 2003b).Ces critères sont les suivants:

Diagnostic - Existence de moyens de détection/diagnostic qui soient robustes et répétables.

De plus, le Code de l'OIE fournit des critères pour la notification immédiate des maladies des animaux aquatiques (OIE, 2003b). Ce sont:

A. Pour les maladies listées,

B. Pour les maladies non listées,

Maladie/agent pathogène émergent(e) si on a découvert qu'ils avaient une importance épidémiologique pour d'autres pays.

D'après le Code de l'OIE, l'analyse de risque se compose de quatre éléments majeurs.Ce sont:

L'identification du risque et son évaluation prennent davantage de sens lorsqu'ils s'appuient sur une bonne compréhension des conditions sanitaires des populations animales aquatiques en question, à la fois des eaux importatrices ou exportatrices (zones, régions ou pays). Cela nécessite des données provenant de programmes de surveillance ciblée détaillée, complète et efficace et de surveillance générale. De même, les conditions sanitaires déterminant les zones individuelles ne peuvent être établies que grâce à une analyse précise et une interprétation des données de surveillance. Une fois que les zones sont établies, un certain niveau de surveillance continue des zones non infectées est requis pour vérifier le statut non infecté de la zone et assurer une détection rapide de tout changement de ce statut.

Les relations entre ces différents éléments sont expliquées à la Figure 4.

Figure 4. Eléments pour l'évaluation du risque à l'importation et étapes de l'évaluation du risque.

Figure 4

5 Jusqu'alors non observées, non rapportées ou non documentées.

6 Voir Chapitre 1.1.4., «Requirements for surveillance for international recognition of freedom from infection»; 4ème édition, 2003, Manual of diagnostic tests for aquatic animals OIE. http://www.oie.int/eng/normes/en_amanual.htm

7 Anon. 2000. Aquaplan Zoning Policy Guidelines . Agriculture, Fisheries, Forestry - Australia, Canberra, Australia. 41 pp.


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