Page précédente Table des matières Page suivante


DIRECTIVES POUR LA SURVEILLANCE ET LE ZONAGE

Diagnostiquer une maladie

Avant de développer des programmes de surveillance et de zonage, il est important de bien comprendre les principes qui gouvernent la surveillance des populations animales (Cameron, 2002). La compréhension des différents types de diagnostics et l'établissement de définitions de cas claires (critères permettant de déterminer quand une infection constitue une maladie qui pose problème) sont essentiels. Chacun d'eux est influencé par la nature de la maladie étudiée, notamment les caractéristiques de l'infection, les facteurs environnementaux locaux qui ont une influence sur la virulence, les activités humaines associées, et la fiabilité (spécificité/sensibilité) des outils diagnostiques disponibles.

La maladie, au sens médical classique, inclut les maladies non infectieuses, mais pour la plupart des programmes de contrôle de maladies (national ou international), les maladies infectieuses sont le point de mire. La gestion des maladies non infectieuses est généralement de la responsabilité des éleveurs ou des agents locaux de développement/de terrain.

Dans le contexte du contrôle des maladies infectieuses, les animaux sont considérés comme étant «malades»dès qu'ils deviennent infectés, bien avant que des signes cliniques ou des changements pathologiques ne deviennent évidents. Cela est également vrai pour les hôtes porteurs ou les hôtes réservoirs, qui peuvent porter ou transmettre des agents infectieux viables, mais eux-mêmes ne montrer aucune pathologie détectable ou aucuns signes de la maladie en question. Cela signifie que les définitions de cas sont très importantes dans le contexte de la conception de programmes de surveillance efficaces. Par exemple, la surveillance pour une maladie clinique est bien moins compliquée que le criblage d'hôtes porteurs ou de porteurs sains. Cependant, de sorte à prévenir une maladie ou définir le statut sanitaire de populations d'animaux aquatiques de façon aussi pertinente que possible dans des zones définies, à la fois les hôtes cliniques et non cliniques doivent être inclus.

La logistique de surveillance de populations saines, considérées comme sensibles à des pathogènes importants, a récemment été remise en question. L'Union européenne (EU) et la Commission pour les animaux aquatiques de l'OIE (AAHSC) révisent l'analyse coût-bénéfice de cet effort exhaustif sous l'hypothèse que, si la population hôte est effectivement sensible, et si l'agent de la maladie est effectivement hautement virulent, alors, le premier signe de la présence de l'infection devrait être une maladie clinique. Le débat sur cette hypothèse s'articule sur le fait que les interactions entre hôte, pathogène et environnement sont complexes, et qu'il existe un degré de risque dans cette hypothèse relatif à la génétique ou à des modifications de l'environnement. De plus, l'expression clinique d'une maladie peut ne pas être directement apparente, tel que c'est le cas pour de nombreuses maladies des mollusques. Avec l'augmentation de la connaissance en épidémiologie pour les maladies importantes, toutefois, le risque de manquer ou de passer à côté d'animaux affectés devrait être réduit.

Les cliniciens et les pathologistes dévouent une quantité substantielle de temps et d'efforts pour arriver à un diagnostic «correct»lorsqu'ils explorent une maladie. Les chercheurs compétents utilisent leur jugement basé sur une solide culture bibliographique, l'expérience, les résultats de tests diagnostiques, et, lorsque c'est approprié, des vérifications croisées ainsi que des observations historiques (souvent fournies par le personnel de terrain) pour interpréter leurs résultats et observations et atteindre une conclusion diagnostique ou un résultat pertinents.

Le Tableau 2 dresse la liste des méthodes diagnostiques qui sont appliquées aux maladies des animaux aquatiques en routine. Celles-ci peuvent être utilisées seules ou en combinaison pour arriver à un diagnostic confirmatoire. Toutes les méthodes de diagnostic, cependant, ont des limites. Les erreurs aléatoires, dues à un manque de précision et des erreurs non aléatoires, dues à des résultats faussement négatifs ou faussement positifs, doivent toujours être prises en considération. Les tailles d'échantillonnage et les stratégies de collecte sont les méthodes les plus fréquemment utilisées pour minimiser les erreurs de diagnostic, qu'elles soient ou non aléatoires. L'appréciation quantitative précise du niveau d'infection au sein d'une population (prévalence, intensité ou incidence) nécessite davantage d'analyses statistiques et de facteurs de correction afin de gérer les erreurs de sensibilité/spécificité dans les méthodes de diagnostic. Lorsque les niveaux d'infection deviennent importants, la surveillance générale de maladies endémiques (au sein de «zones infectées») pour des niveaux excédant un seuil prédéfini de tolérance devrait déclencher des actions de contrôle de la maladie.

Tableau 2. Méthodes de diagnostic utilisées en routine pour les maladies des animaux aquatiques.

Information de terrainTechniques de laboratoireTechniques expérimentales
  • histoire (pertes récurrentes, anormales, zootechnie)
  • économie (mesure des pertes dues a des baisses de performance, ou mortalité directe)
  • comportement
  • signes cliniques
  • examens physiques (autopsie ou observations macro)
  • épidémiologie (dynamique de la maladie)
  • réponse au traitement (poissons principalement, certaines maladies bactériennes des crustacés)
  • microbiologie
  • empreintes tissulaires
  • histologie
  • sérologie (immunologie) (poissons)
  • microscopie électronique (MET, MEB, colorations négatives)
  • culture cellulaire (lignées pour certaines maladies des poissons - absence de lignées cellulaires pour les autres groupes)
  • analyses moléculaires (PCR, HIS, etc.)
  • challenges physiologiques (stress)
  • essais de transmission (bio essais pour évaluer la sensibilité des hôtes)

Chaque investigation va fournir une information qui peut être appliquée à la collection de données de surveillance générale, et au diagnostic avec des degrés variables de certitude dépendant de la complexité des maladies considérées. Dans certains cas, l'investigation peut ne pas produire un diagnostic concluant, mais être limitée à la description d'un «incident»(à savoir en termes de morbidité, mortalité, durée du problème, signes cliniques, aspect des lésions macroscopiques). Ceci est particulièrement commun pour les maladies des animaux aquatiques, dont la plupart (principalement les maladies microbiennes) sont encore «nouvelles» pour la science.

Le niveau de certitude du diagnostic sera largement déterminé par la capacité du chercheur à reconnaître les caractéristiques des maladies spécifiques, ainsi que de savoir si cela nécessite d'être suivi d'une étude plus détaillée nécessitant le recours à une expertise spécialisée. Dans la plupart des cas, le niveau le plus haut de certitude diagnostique pour les maladies reconnues importantes sur le plan international est atteint lorsque les résultats positifs sont confirmés par un laboratoire de référence internationalement accrédité (habituellement un laboratoire reconnu pour avoir, pour une maladie particulière, une grande capacité diagnostique en termes d'équipement, d'expertise du personnel, d'expérience et de publications dans des journaux scientifiques à comité de lecture). Pour des maladies ayant un impact local ou régional, les mêmes considérations s'appliquent à la confirmation par des laboratoires qui ont une capacité diagnostique adéquate et une expertise reconnue sur cette maladie.

La plupart des diagnostics en première instance de «nouvelles» maladies ou maladies «émergentes» nécessite une confirmation par un laboratoire de référence indépendant disposant d'une expertise établie pour le pathogène suspecté ou un groupe de ces pathogènes. La confirmation par référé est un pré requis essentiel pour tout diagnostic ayant des implications significatives en terme de zonage, contrôle de maladie ou de commerce. Même des laboratoires internationalement reconnus s'appuient sur des croisements de résultats pour les diagnostics en dehors du cadre de leur spécialité (à savoir les maladies exotiques). Il est donc nécessaire d'inclure l'évaluation de la certitude d'un diagnostic (suspect, présomptif ou confirmatoire) pour tout résultat d'investigation de maladie.

Trois niveaux de diagnostic ont été définis pour permettre les mouvements transfrontaliers sécurisés d'animaux aquatiques ainsi que la surveillance et le contrôle de leurs maladies dans la région Asie Pacifique, cependant, ils s'appliquent également à toutes les autres régions du monde du point de vue du diagnostic des maladies des animaux aquatiques, dans la mesure où tous les laboratoires de diagnostic (qu'il s'agisse du Niveau II ou III en terme de complexité technique) bénéficient de l'information de Niveau I (terrain). Ces trois niveaux de diagnostic sont décrits par Bondad-Reantaso et al., 2001 et sont résumés dans le Tableau 3. Le Niveau I de diagnostic peut être réalisé pour certaines maladies sur site sans aucune confirmation par un laboratoire. Toutefois, la plupart des informations de Niveau I sont utilisées pour renforcer le diagnostic de Niveau II qui demande le soutien d'un laboratoire. Les techniques de diagnostic de Niveau III nécessitent un équipement de laboratoire sophistiqué et une formation et sont habituellement réservés à la confirmation de diagnostics qui restent présomptifs aux Niveaux I et II.

Etablir une définition de cas

Il est important, dans le cadre d'études de maladies au niveau d'une population, de maintenir une cohérence dans le diagnostic quelque soit les méthodes de diagnostic utilisées. Cela implique de développer une définition de cas ainsi que de procéder à la validation de terrain des techniques de diagnostic et de développer un système d'assurance qualité/de contrôle qualité pour garantir la cohérence du diagnostic entre les structures de diagnostic et le terrain. Dans le cas contraire, le programme de surveillance serait sujet à des biais (erreur non aléatoire) et à des incohérences. Une telle situation peut causer des erreurs importantes dans le zonage et dans le contrôle des maladies, notamment pour ce qui est des processus décisionnels, avec des impacts importants du point de vue de la maladie ou de l'économie.

Une définition de cas est un ensemble de critères normatifs pour décider si une unité d'étude individuelle est atteinte par une maladie particulière d'intérêt ou tout autre conclusion d'intérêt. L'unité d'étude peut être un animal individuel ou un groupe d'animaux tel qu'un basin de crevettes, une cage de poissons, un banc de mollusques ou un estuaire.

Par exemple, l'étude peut s'intéresser à comparer la présence d'une maladie particulière dans les poissons d'élevage de deux pays différents. Un soin particulier doit être apporté dans une telle comparaison, si l'un des pays utilise des techniques de balayage microbiologique alors que l'autre pays s'appuie sur l'observation de signes macroscopiques uniquement pour diagnostiquer une même maladie.

Une définition de cas optimale dépend de critères qui peuvent être appliqués à n'importe quel cas potentiel dans la population source. Dans bien des situations, il est difficile de définir un ensemble de critères qui incluent tous les cas avérés de la maladie en question et excluent toutes les conditions similaires mais non liées. Peu de cas montrent la gamme complète des critères attribués à une maladie et il existe toujours des «non cas» qui montrent des signes cliniques similaires à ceux de la maladie spécifique en question. Cela est particulièrement vrai pour les maladies des animaux aquatiques, où les signes cliniques sont rarement pathognomoniques (à savoir spécifiques d'une maladie unique). Une approche utile au développement de la définition de cas est donnée par Stephen et Ribble (1996).

Tableau 3. Trois niveaux d'information diagnostique, conditions requises associées et responsabilité(Bondad-Reantaso et al.,2001).

Niveau - ActivitésAptitudes et équipementResponsabilitéBesoins
Activités de Niveau I
Observation des animaux et de l'environnement. Examen clinique et macroscopique.
Connaissance des situations normales (alimentation, croissance, comportement, etc.).
Observations fréquentes et régulières des cheptels
Collecte des informations incluant l'environnement et l'archivage.
Connaissance des contacts pour une assistance diagnostique.Capacitéàsoumettre ou fixer un échantillonreprésentatif.
Ouvriers et responsables d'exploitation, agents de développement, vétérinaires, biologistes des pêcheries.Eléments clés du terrain. Formats pour les registres de fermes. Listes d'équipement. Modèles de feuilles de données cliniques. Check liste de bassin. Protocoles pour la fixation et le transport des échantillons.
Activités de Niveau II Parasitologie Bactériologie Mycologie HistologieLaboratoires avec équipements de base et personnel formé et avec expérience dans le domaine des maladies des animaux aquatiques.
Registre des examens de diagnostic. Conservation et stockage des spécimens. Connaissance des différents champs de spécialisation du Niveau II. Connaissance de qui contacter pour assistance avec le Niveau III de diagnostic.
Vétérinaires Biologistes Parasitologistes Mycologistes Bactériologistes Histologistes Techniciens.Modèles pour les registres de laboratoire. Protocoles pour la fixation et le transport des échantillons vers Niveau III. Listes des équipements et des produits. Information sur les contacts pour expertise spécialisée Niveau II et III. Guide pour le diagnostic des maladies aquatiques en Asie. OIE Manual of diagnostic tests for aquatic animals. Manuels régionaux généraux de diagnostic.
Activités de Niveau III
Virologie
Microscopie électronique Biologie Moléculaire Immunologie
Laboratoires avec équipements spécialisés et personnel formé. Registre des examens.Conservation et stockage des spécimens.Contact avec les personnes responsables de l'échantillonnage.Virologistes Ultra microscopistes Biologistes moléculaires Techniciens.Modèles pour les registres de laboratoire. Listes des équipements et des produits. Information sur les contacts pour laboratoires de référence. Fiches de poste. Protocoles pour la fixation et le transport des échantillons vers diagnostic confirmatoire. Manual de l'OIE pour les tests de diagnostic des animaux aquatiques. Références en diagnostic moléculaire et en microbiologie. Guide pour le diagnostic en Asie.

Quelques exemples de définitions de cas pour l'étude de la maladie des points blancs (MPB) des crevettes sont donnés dans le Tableau 4. Le choix d'une définition de cas particulière dépend des objectifs de l'étude et, quelque soit la définition de cas utilisée, elle ne sera jamais parfaite. Par exemple, des crevettes dans certains foyers de maladie des points blancs peuvent ne montrer aucun signe de points blancs sur leur carapace, de sorte que l'utilisation de la première définition de cas dans le Tableau 4 peut produire des résultats faussement négatifs pour des individus ou des cheptels. Les résultats faussement négatifs sont dus à une sensibilité de détection inadéquate alors que les résultats faussement positifs sont dus à une spécificité d'identification inadéquate.

Il est souvent nécessaire de définir les cas «suspects» ainsi que les cas confirmés. Cela est particulièrement utile dans les cas où l'obtention du diagnostic confirmatoire peut prendre du temps (à savoir des semaines). Là où une maladie potentiellement sérieuse et jusqu'alors inconnue est trouvée, il est recommandé d'utiliser une définition de cas suffisamment large pour englober tous les cas possibles. La définition, et les protocoles de surveillance et de diagnostic associés, doivent être révisés à mesure que davantage d'information est obtenue.

Tableau 4. Exemples de définitions de cas pour la maladie des points blancs (MPB)8 chez les crevettes.

Unité d'étudeDéfinitionde cas
AnimalUne crevette avec au moins une tache blanche visible et isolée sur la face interne de la carapace.
AnimalUne crevette conduisant à un résultat positif enPCR pour le virus de la maladie des points blancs.
BassinUn bassin ou une crevette au moins avec au moins une tache blanche visible et isolée sur la face interne de la carapace.
BassinUn bassin ou une crevette au moins conduisant à un résultat positif enPCR pour le virus de la maladie des points blancs.
BassinUn bassin sujet a une pêche d'urgence parce que selon l'opinion du gérant il y a un risque de mortalité massive pour cause de maladie des points blancs.
Population (source possible depost-larves sauvages)Unepopulation sauvage ou une crevette au moins avec au moins une tache blanche visible et isolée sur la face interne de la carapace.
PopulationUne population sauvage ou une crevette au moins conduisant à un résultat positif en PCR pour le virus de la maladie des points blancs.
PopulationUne population sauvage sujette a une mortalité massive du fait de la maladie des points blancs.

Des exemples de définitions de cas pour suspicion et confirmation sont donnés pour le syndrome ulcératif épizootique (SUE) dans le Tableau 5. Toutes les définitions de cas du Tableau 5 sont légitimes pour le SUE, variant du plus spécifique du point de vue du pathogène, mais moins sensible (première définition), au plus sensible mais moins spécifique (quatrième définition) pour les animaux individuels.

Bien que toujours sujet à débat, le consensus des experts est de dire que le SUE est une condition spécifique qui inclut des lésions tissulaires dues à un agent fongique, Aphanomyces piscicida/invadans, quels que soient les facteurs prédisposant.

Bien que la maladie pourrait être appelée aphanomicose, impliquant l'infection par Aphanomyces piscicida/invadans comme cause, d'autres champignons de type Aphanomyces peuvent également causer des lésions chez les poissons et une maladie ayant des symptômes similaires à ceux du SEU. La prudence est donc nécessaire dans l'utilisation d'une nomenclature des maladies basée sur le nom de genre suivi de la terminaison «-ose». Un exemple classique en médecine humaine est celui de l'Herpes qui est maintenant reconnu comme recouvrant un grand nombre de maladies et de pathologies.

Tableau 5. Définitions de cas possibles pour le syndrome ulcératif épizootique.

Unité d'étudeDéfinitionde cas
AnimalUn poisson avec des dégénérations et un durcissement des tissus du globe oculaire (dermatite glaucomateuse nécrosante) et/ou inflammation du tissu musculaire (myosite) et/ou agrégats localisés de cellules sanguines (granulomes) dans les organes internes associés à la présence d'Aphanomyces piscicida/invadans.
AnimalUn poisson avec un ou plusieurs granulomes contenant Aphanomyces piscicida/invadans.
AnimalUn poisson avec des lésions contenant Aphanomyces piscicida/invadans.
AnimalUn poisson avec une ou plusieurs lésions de surface pouvant être décrites comme «taches rouges».
BassinUn bassin avec un ou plusieurs poissons répondant aux définitions précédentes.
RivièreUne rivière avec un ou plusieurs poissons répondant aux définitions applicables aux individus.

Les objectifs de surveillance dictent la spécificité ou la sensibilité de la définition de cas:

  1. Une détection précoce est nécessaire parce que la maladie n'a jamais été rapportée dans une zone et elle présente une menace importante. Alors n'importe quel poisson peut potentiellement représenter un cas important et la définition de cas la plus sensible est nécessaire - dans ce cas «points rouges». La confirmation par un laboratoire de la présence d' Aphanomyces piscicida/invadans serait nécessaire pour confirmer (ou réfuter) le diagnostic présomptif.

  2. Dans une zone endémique pour le SEU, déterminer la prévalence de cette condition serait important pour le suivi des foyers potentiels de SEU, et une définition de cas plus spécifique requise particulièrement si il y a d'autres maladies présentes qui puissent produire des lésions de type «points rouges» similaires.

Etudier un foyer de maladie

La base de toute bonne surveillance est la capacité des Autorités compétentes et des services de diagnostic pour les maladies des animaux aquatiques à étudier efficacement les foyers inhabituels de maladies.

Une étude de foyer devrait viser à l'identification systématique des causes et des origines de l'infection de sorte à:

Dans la plupart des situations, le premier objectif d'une étude de foyer de maladie est d'en déterminer la cause et d'identifier les voies de prévention de toute propagation de l'agent de la maladie. Une infection issue de l'introduction d'un agent exotique, présente habituellement un foyer source d'infection. L'émergence d'une maladie endémique à des niveaux pathogènes peut se centrer sur les groupes les plus vulnérables au sein d'une population sensible ou montrer des infections plus sporadiques (chroniques ou aléatoirement aigues) dont la fréquence s'intensifie. L'enregistrement et l'analyse de ces profils pour atteindre l'objectif premier qui est de prévenir la propagation vers les populations sensibles non infectées est du ressort du groupe chargé de l'investigation. L'étude des foyers de maladie inclut les activités suivantes:

Etudier un foyer de maladie

Foyer étape 1 - Le diagnostic. Le diagnostic «présomptif» initial d'un foyer est habituellement réalisé sur les signes cliniques; un aspect d'infection, des activités humaines ou environnementales associées avec morbidité ou mortalité; et des lésions macroscopiques. Dans la mesure du possible, des tests de laboratoire devraient être entrepris dès que possible pour vérifier le diagnostic présomptif. Dans la mesure où certaines procédures de laboratoire peuvent nécessiter des semaines, la mise en place de mesure de contrôle devrait être basée sur le diagnostic présomptif de maladies importantes.

Dans la mesure où tout groupe d'animaux aquatiques peut contenir un ensemble de pathogènes et, même lorsqu'il existe un pathogène avéré, il peut y avoir des infections secondaires, il est vital qu'un ensemble complet d'échantillons soit pris d'un nombre d'animaux à différents stades de développement de la maladie - tout spécialement d'animaux sains àproximité du foyer, de sorte que des observations comparatives puissent être réalisées. Lorsqu'on choisit des animaux sains pour leur examen, il est important de les obtenir d'au moins deux sources: (a) de sites qui semblent avoir le problème particulier, et (b) d'un ou plusieurs sites de la même zone qui ont des cheptels ne montrant aucun signe de maladie. L'éventail géographique du dernier peut dépendre de la sévérité du diagnostic présomptif et de la distribution des populations sensibles exposées directement ou indirectement au site initial de détection de la maladie.

Foyer étape 2 - Définition d'un cas. Là où un grand nombre d'animaux meurt rapidement, un cas peut simplement être un animal récemment mort (de préférence moribond pour les infections microbiennes).

Comme décrit ci-dessus au paragraphe «L'établissement d'une définition de cas», dans les cas où l'étiologie de la maladie est initialement sombre, il vaut mieux avoir une définition de cas suffisamment large pour garantir que toutes les causes possibles sont bien incluses dans l'investigation. La définition de cas peut être affinée au fur et à mesure de l'obtention d'information et les données ré analysées en conséquence.

Foyer étape 3 - Confirmation du foyer. Cette étape peut paraître superflue, mais dans des situations où une maladie proche est endémique, ou où les conditions environnementales extrêmes peuvent causer des mortalités basées sur le stress physiologique, une telle confirmation est essentielle. Pour les besoins du suivi (plutôt que du zonage basé sur la surveillance), un certain niveau d'infection peut être normal, cependant, toute augmentation peut conduire à des pertes de production sévères si elle n'est pas identifiée précisément et rapidement. C'est pourquoi distinguer un foyer de maladie dû à l'augmentation du niveau d'une infection endémique plutôt qu'à un foyer de maladie nouvelle ou exotique est, par conséquent, critique.

Foyer étape 4 - Caractérisation du foyer. Il est important d'essayer de repérer le temps, la population/le cheptel et l'endroit associés avec le foyer de maladie là où la cause en est obscure. Cela est nécessaire pour identifier les sources possibles, les modes de transmission et les risques d'établissement de l'infection:

  1. Moment:

  2. Animal:

  3. Lieu:

(a) Moment. Pour les maladies infectieuses, identifier le cas index est utile à l'identification de la source du foyer (si on suppose que c'est une source focale). Le cas index peut être un animal individuel, un bassin, une ferme, ou un cheptel (sauvage ou d'élevage). Une méthode pour cartographier un foyer de maladie issu d'un cas index est de tracer une courbe épidémique. Celle-ci peut avoir quatre ou cinq segments; (1) le niveau endémique (où l'infection est établie), (2) une branche ascendante, (3) un pic ou un plateau, (4) une branche descendante, et (5) un pic secondaire (Figure 5).

La durée de toute épidémie peut être influencée par:

La pente de la courbe dans sa deuxième phase (2) peut indiquer le type d'exposition. Si la transmission est rapide et si la période d'incubation est courte, comme avec une maladie infectieuse importante, alors la phase ascendante sera plus pentue que si la transmission était lente ou la période d'incubation longue.

Figure 5. Segments d'une courbe épidémique.

Figure 5

La longueur du plateau (3) et la pente de la courbe descendante (4) dépendent de facteurs décrits pour la durée de l'épidémie, tels que les densités d'élevage, les mécanismes de transmission, et les niveaux des cheptels sensibles ou des réservoirs. Les pics secondaires (5) sont généralement dus à l'introduction récente d'animaux sensibles, un changement dans le mode de transmission ou à une suppression temporaire et saisonnière de la prolifération de l'agent pathogène (par exemple hivernage).

Le choix de la fréquence d'échantillonnage requise pour suivre une courbe d'épidémie est important. Des intervalles de temps adéquats peuvent varier de plusieurs heures (par exemple pour des infections microbiennes aigues) à des mois ou des années pour des maladies de progression plus lente, ou des maladies liées à la disponibilité saisonnière en hôtes intermédiaires. Des différences subtiles dans les profils temporels sont masquées si la fréquence d'échantillonnage est trop longue, par exemple les pics secondaires (5) de la transmission d'individu à individu, de la suppression saisonnière des hôtes intermédiaires ou porteurs, ou de stades libres d'agents infectieux. Dans la mesure où la période d'incubation de la plupart des agents pathogènes des animaux aquatiques est hautement variable et sujette aux variations des conditions hydrographiques et climatiques, au moins un ou deux cycles saisonniers (dépendant du climat tropical ou tempéré) devraient être inclus. Ceci est en accord avec les standards de l'OIE (OIE,2003b) où un minimum de deux années est requis avant qu'une structure, une zone, ou un pays puisse être déclaré indemne d'une maladie.

En général, l'OIE recommande une approche qui soit plus souple et plus spécifique de la maladie considérée. Le Manuel de diagnostic de l'OIE (OIE,2003c) stipule que le nombre d'unités à échantillonner pour une population donnée devrait être calculé en utilisant les techniques statistiquement valides qui prennent en compte au moins les facteurs suivants: la sensibilité et la spécificité du test diagnostique, ou du système de test; la prévalence estimée; et le niveau de confiance qui est souhaité pour les résultats de l'enquête. Les besoins spécifiques d'échantillonnage devront être adaptés pour chaque maladie, prenant en compte ces caractéristiques et la spécificité et la sensibilité des méthodes acceptées de testage pour la détection de la maladie dans les populations hôtes9.

Dans le cas de pathogènes exotiques, l'exposition d'une population hôte naïve produira généralement une courbe d'épidémie semblable à celle de la Figure 5. L'exposition initiale indique une transmission rapide dans un corps d'eau défini ou une population dense, avec de grands nombres d'animaux affectés sur une courte période de temps. Les survivants de l'épidémie initiale peuvent connaître des foyers subséquents, avec l'installation de la maladie dans un mode d'infection cyclique et l'apparition de facteurs de tolérance dans l'environnement et chez l'hôte.

A court terme, le diagnostic rapide et précis a la plus grande priorité. Cependant, pour être efficace à long terme, le contrôle des maladies qui ne peuvent être éradiquées, demande la compréhension des facteurs influençant la courbe d'épidémie.

(b) Animal. Le terme d'«animal» est utilisé pour les cheptels, les populations, les sites, etc. L'âge, le sexe, l'origine géographique et le génotype sont fréquemment associés, avec une sensibilité variable, aux effets de la maladie. Toutefois, des profils d'infection sont aussi liés aux caractéristiques physiologiques et écologiques de l'agent infectieux de la maladie.

Une méthode pour analyser le profil d'infection d'une maladie dans un foyer est de mesurer le taux d'attaque (TA). Le taux d'attaque est le nombre de cas d'une maladie donnée divisé par le nombre d'animaux àris que au début de l'éruption, par exemple, le SEUsemble affecter plutôt les petits poissons que les gros au sein d'un même bassin. Dans ce cas, les calculs suivants seraient nécessaires:

S'il y avait 1000 petits poissons dans un bassin et que 300 étaient atteints par le SEU, et s'il y avait 1000 gros poissons dont 100 atteints par le SEUau cours de l'éruption, les taux d'attaque seraient respectivement de 30 pour cent (TA1) et de dix pour cent (TA2).Cela montre que les petits poissons sont trois fois plus sensibles au SEUque les gros. Ce procédé d'évaluation pourrait être utilisé de la même manière pour tester l'hypothèse selon laquelle des poissons stressés du point de vue nutritionnel sont plus sensibles aux infections que les poissons bien nourris (voir Tableau 6).

Tableau 6. Taux d'attaque (TA) pour des poissons infectés par le SEU avec et sans stress nutritionnel.

 AvecstressnutritionnelSansstress nutritionnel 
FacteurSEUTotalTA (%)SEUTotalTA(%)TA Diff (%)RR
petit3010030%355007%23%4.3
moyen2020010%4540011%-1%1.1
grand153005%5030017%-12%0.3

Dans le Tableau 6, les taux d'attaque sont exprimés en pourcentages. L'avant-dernière colonne (taux d'attaque différentiel) est la différence des taux d'attaque entre les groupes. La colonne intitulée «risque relatif»(RR), donne le taux de SEUtrouvédans les poissons avec, ou sans, stress nutritionnel. Plus les valeurs pour le taux d'attaque différentiel et le risque relatif seront élevées, plus le facteur analysé sera significatif du risque accru de maladie. Dans cet exemple, les petits poissons sont trois fois plus susceptibles de développer le SEUque les poissons de taille moyenne, et six fois plus que les gros poissons. Les poissons de taille moyenne sont deux fois plus sensibles que les gros poissons. Cet exemple soutient également l'hypothèse qu'un stress nutritionnel est un facteur dans la sensibilité relative à la taille au syndrome SEU.

Dans le contexte de la surveillance et du zonage, il est important de déterminer l'importance relative de facteurs de contribution aussi nombreux que possible (par exemple, l'acidification soudaine de l'eau pour le SEU). Cela peut aider à concentrer les efforts de surveillance, dont le but est soit la détection précoce de foyers endémiques, ou la démonstration du caractère indemne d'une maladie. Tous les programmes de surveillance doivent se centrer sur les secteurs les plus vulnérables de la population sensible.

(c) Endroit. Définir la source exacte d'un foyer peut être facilité par la cartographie de la zone/du site ou de l'installation affecté(e), en enregistrant les dates où les cas ont été détectés, et le stade de développement de l'infection. Une telle carte peut indiquer si oui ou non le foyer est dû à une infection de source focale ou à une autre source. La surveillance dont le but est de cartographier l'étendue d'un foyer devrait travailler autour d'un point source apparent. Une telle approche réduit le risque de propagation par des activités de surveillance radiant à partir d'un site connu pour être infecté.

La surveillance devrait également être concentrée sur les sites voisins ayant des pertes liées à la maladie documentées (ou non documentées), et des liens avec le point source en matière d'eaux ou de cheptels, qu'il s'agisse de juvéniles, de géniteurs ou de transferts dans la commercialisation.Cela aidera à développer des cartes préliminaires précises de la distribution de la maladie. Les résultats négatifs sont aussi utiles que les résultats positifs pour traquer les foyers suspects de maladies hautement virulentes, quoiqu'ils ne permettent pas une cartographie aussi sûre que les résultats positifs. De telles cartes sont particulièrement importantes pour les maladies des animaux aquatiques, dans la mesure où l'observation directe d'animaux infectés peut être difficile car elle nécessite des pêches, des plongées, des bateaux disposant d'équipement spécialisé, etc.

Foyer étape 6 - Formulation des hypothèses. Basées sur l'analyse du moment, du lieu et des données relatives à l'animal, les options de contrôle et les priorités pour les investigations suivantes sont développées. Toute hypothèse doit être compatible avec les données confirmées et l'information épidémiologique correspondante. Des options de contrôle peuvent être développées en se basant sur de telles hypothèses, comme par exemple l'étude d'un foyer de MPBdans deux bassins d'une station de recherche a conduit à l'hypothèse d'une séquence d'évènementsqui contribuent au foyer de MPBdans un bassin de post-larves de crevettes de 70 jours (voir Figure 6).

Figure 6. Séquence d'évènements menant à un foyer de MPB.

Figure 6

Foyer étape 7 - Suivi intensif. Les études de suivi nécessitent l'analyse des données disponibles, la vérification de cas qui pourraient survenir dans d'autres endroits (en aval ou liés par des transferts de stock), l'examen des mouvements des cheptels, d'aliments, de toute autre activité humaine associée aux cheptels affectés. Des essais de gavage ou autres essais épreuves peuvent être nécessaires lorsque des agents non infectieux sont suspectés. Des expériences de transmission, pour établir l'étiologie de l'agent infectieux, peuvent également être nécessaires lorsque le doute persiste (le postulat de Koch-Henle).

Foyer étape 8 - Application de mesures de contrôle et de prévention. Une investigation efficace aidera à définir les options de contrôle efficaces pour réduire le risque de résurgence de foyers semblables. Les investigations peuvent toutefois indiquer que la possibilité de réinfection est inévitable, comme par exemple dans le cas des eaux ouvertes où, une fois établi dans des populations porteuses ou réservoir, l'éradication du pathogène n'est pas possible ou n'est pas économiquement faisable. Dans de telles situations, les mesures de contrôle visent à minimiser l'exposition au pathogène établi dans les eaux affectées et à prévenir sa propagation à des populations non affectées et sensibles.

Foyer étape 9 - Restitution des résultats et recommandations pour traiter les foyers futurs. Pour des fermes isolées sujettes à des foyers de maladie, les recommandations peuvent prendre la forme d'une brève conversation avec le gérant de la ferme, afin de clarifier les actions nécessaires pour la surveillance de manière à prévenir tout futur foyer. Un rapport écrit de l'information, des données et des recommandations développées à partir du foyer, fournit une référence utile. Pour des foyers plus vastes, les résultats devraient être publiés dans des journaux scientifiques à comitéde lecture et, en fonction de la maladie, rapportés àl'OIE pour garantir la transparence vis-à-vis des partenaires commerciaux. Les rapports d'investigation sur les maladies sérieuses devraient inclure: le contexte historique du cas; les méthodes utilisées pour le diagnostic et les investigations épidémiologiques; les résultats; les hypothèses; les impacts financiers et écologiques (lorsque c'est adéquat) et les recommandations pour le contrôle.

8 Du point de vue de la Commission de l'OIE des normes pour la santé des animaux aquatiques, un simple signal en PCR ne fournit pas la confirmation de la présence d'agents viables et transmissibles.

9 Voir chapitre 1.1.4 du Manuel de Diagnostic de l'OIE - “Requirements for surveillance for international recognition of freedom from infection” - http://www.oie.int/eng/normes/en_amanual.htm


Page précédente Début de page Page suivante