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PANORAMA GÉNÉRAL DES BESOINS EN FORMATION

La gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique centrale nécessite des compétences qui ne sont pas toujours disponibles. Dans l'Administration forestière, par exemple, le personnel actuel, formé à "l'ancienne école" et n'ayant pas accédé à des stages de mise à niveau, présentent des lacunes en matière de compétences pour faire face aux nouveaux défis (Hiol Hiol, 2001). L'identification des besoins en formation s'inscrit, dans ce contexte, dans une perspective d'adaptation des compétences aux évolutions récentes. En d'autres termes, les groupes d'acteurs concernés disposent déjà de compétences, mais celles-ci ne permettent pas de réaliser correctement les nouvelles tâches.

En raison de la diversité des groupes d'acteurs, il n'a pas été possible d'analyser les besoins en formation à partir de la description des activités professionnelles par poste fonctionnel (population-cible). Nous avons opté pour une identification des besoins globaux en formation en focalisant les investigations sur le groupe d'acteurs (ou population-mère) et les domaines thématiques. Six domaines thématiques, parmi les plus importants, ont été identifiés; il s'agit de la politique et l'Administration forestières, l'aménagement et la gestion durable des forêts, les techniques et opérations forestières, la gestion de la faune et des aires protégées, l'industrie du bois et le commerce du bois. Les déficits de compétences - qui ont permis de définir les besoins globaux en formation - ont été, par conséquent, abordés par le biais d'entretiens individuels ou de groupe sur les nouvelles compétences induites par l'évolution prévue des fonctions et des activités dans le secteur forestier.

LES BESOINS EN FORMATION PAR DOMAINE THÉMATIQUE

La politique et l'Administration forestières

Les politiques forestières des pays d'Afrique centrale, dérivées de celles léguées par les administrations coloniales dans lesquelles le domaine forestier était défini comme propriété exclusive de l'État, ont évolué pour s'adapter au contexte actuel. Cependant, une étude récente a montré que ce sont ces politiques forestières elles-mêmes qui sont en partie responsables de la dégradation des forêts (Koyo, 1999). Les capacités en formulation et en analyse de politiques forestières apparaissent actuellement trop limitées (IDE, 1998). Parmi les solutions évoquées, figurent le passage de l'approche gestionnaire à l'approche par la négociation, si l'on veut reprendre les termes de Buttoud et Samyn (1999), tout en mettant l'accent sur les points suivants, proposés par Koyo (1999).

A cela s'ajoute, la gouvernance et le suivi. Un programme de formation et de coopération en développement des politiques forestières dans le Bassin du Congo a été mis en œuvre par la Banque mondiale et l`Union Européenne en 1998-1999. Toutefois, il est apparu que les besoins en formation sont encore importants, comme on peut le constater dans le tableau n°5.

Tableau n° 5 : Besoins en formation dans le domaine de la politique et l'Administration forestières

Acteurs

Besoins en formation "politique et administration forestières"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Être

Administration forestière

- Procédure de formulation de la politique forestière

- Instruments économiques de la gestion forestière / fiscalité environnementale

- conventions internationales

- principes, critères, indicateurs de gestion durable

- techniques de planification stratégique

- communication

- gestion participative et négociation

- techniques d'organisation du contrôle et de suivi

Être capable de:

- maîtriser la logique et les méthodes de formulation des politiques et plans forestiers

- concilier les intérêts multiples

- intégrer les instruments techniques, réglementaires et économiques de la gestion forestière

- planifier l'Administration forestière (stratégies, programmes de travail)

- communiquer et promouvoir la transparence

- suivre, documenter les leçons apprises et réviser

- être partenaire

- être leader, capable de faciliter des processus

Secteur privé
(Sociétés d'exploitation forestière)

- étapes d'un processus participatif de formulation des politiques et lois forestières

- communication

- Instruments économiques de la gestion forestière

- participer à la formulation des politiques et lois forestières

- respecter et faire respecter la loi forestière

- être partenaire

ONG nationale

- étapes d'un processus participatif de formulation des politiques et lois forestières

- communication

- techniques de lobbying

- le métier d'observateur indépendant

- participer à la formulation et à la mise en œuvre des politiques et lois forestières

- faire circuler l'information sur les politiques et lois forestières

- consolider la bonne gouvernance

- être neutre

- être partenaire

Populations locales

- étapes d'un processus participatif de formulation des politiques et lois forestières

- rôle des populations dans la gestion forestière

- communication

- participer à la formulation des politiques et lois forestières

- s'approprier les politiques et lois forestières

- participer à la consolidation de la bonne gouvernance

- être partenaire

L'aménagement et la gestion durable des forêts

Le concept de gestion durable des forêts soulève des polémiques diverses. Il peut s'appliquer à une forêt de production ou à une forêt communautaire7. Sans prétendre s'aventurer dans les débats d'écoles, on peut retenir que:

L'aménagement d'une forêt de production a pour principal objectif la récolte équilibrée, soutenue et durable de produits forestiers, à partir d'une exploitation forestière programmée et planifiée, assise sur un massif permanent, tout en assurant le maintien du patrimoine et des fonctions sociales et environnementales de la forêt.

Estève, 2001

L'aménagement et la gestion durable des forêts sont encore à un stade expérimental. Ils exigent une vision holistique, une prise en compte des fonctions multiples de la forêt, une approche interdisciplinaire et un travail d'une haute technicité liée notamment à l'usage de la cartographie numérique. Suite à la diversité d'acteurs, l'aménagement et la gestion durable des forêts doivent être considérés comme l'aboutissement par consensus d'un processus de concertation et d'arbitrage entre les différents partenaires. Les "aménagistes forestiers" sont encore rares. C'est pourquoi, les entreprises forestières font appel à des bureaux d'études spécialisés.

La foresterie communautaire s'inscrit dans la perspective de transférer aux communautés les possibilités de planifier et mettre en œuvre leurs choix de développement local, assorti d'une responsabilité de gestion durable des espaces forestiers. Au Cameroun, la foresterie communautaire est trop souvent assimilée à une autorisation donnée aux communautés de devenir exploitant.

Le tableau n°6 présente les besoins en formation dans le domaine de l'aménagement et la gestion durable des forêts.

Tableau n° 6 : Besoins en formation dans le domaine de l'aménagement et la gestion durable des forêts

Acteurs

Besoins en formation "Aménagement et gestion durable des forêts"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Etre

Administration Forestière

- Démarche de l'aménagement forestier

- Inventaire multi-ressources

- cartographie numérique / SIG

- études d'impact environnemental

- gestion participative

- principes, critères, indicateurs, vérificateurs de gestion durable

Être capable de:

- élaborer les normes d'aménagement

- évaluer la faisabilité des directives d'aménagement

- suivre/contrôler l'exécution d'un plan d'aménagement

- Respecter les savoirs locaux et les modes d'appropriation locales

- être partenaire

- savoir rendre compte (imputabilité)

Secteur privé
(Sociétés d'exploitation forestière
& Bureaux d'Études)

- élaboration, mise en œuvre et suivi du plan d'aménagement

- inventaires multi-ressources (prospecteurs, boussoliers)

- cartographie numérique / SIG

- études d'impact environnemental

- traitements sylvicoles améliorés

- techniques d'exploitation à faible impact (abattage, débardage, tronçonnage etc.)

- principes, critères, indicateurs, vérificateurs de gestion durable

- Communication sociale

- coordonner les activités à chaque étape de l'élaboration du plan d'aménagement

- négocier les directives d'aménagement

- réaliser un inventaire d'aménagement

- mettre en œuvre et suivre le plan d'aménagement

- Respecter les savoirs locaux et les modes d'appropriation locales

- être partenaire

ONG nationale

- gestion participative / gestion des conflits

- Étude du milieu (Analyses socio-économiques)

- planification du développement local et des projets communautaires

- gestion des projets communautaires

- initier et faciliter un processus de cogestion et de gestion des conflits

- accompagner un processus de développement local

- réaliser les études socio-économiques

- être neutre

- savoir susciter la confiance et honorer de cette confiance

Populations

Forêt de production

- techniques de négociation

- gestion des projets communautaires

- développement institutionnel et renforcement organisationnel

- communication sociale

- défendre leurs "droits"

- s'approprier du développement local

- échanger avec les autres acteurs

- être partenaire

- savoir rendre compte (imputabilité)

Forêt communautaire

- Procédures d'attribution des forêts communautaires

- Élaboration des plans simple de gestion

- Comptabilité et financement du développement

- monter un dossier de demande d'attribution de forêt communautaire

- utiliser les techniques d'exploitation à faible impact

- gérer les recettes et les dépenses d'une unité de foresterie communautaire

- avoir le sens de l'intérêt communautaire

- savoir rendre compte (imputabilité)

Les techniques et opérations forestières

Les techniques et opérations forestières concernent l'extraction de la forêt (naturelle ou artificielle) du bois (bois d'œuvre, bois de feu, charbon de bois) et des produits non ligneux. L'exploitation de bois d'œuvre s'est industrialisée depuis quelques décennies. Autrefois cueillette de quelques arbres de fortes dimensions, l'exploitation forestière s'est transformée en un prélèvement systématique des essences commercialisables (Dupuy, 1998). Le volume de prélèvement réalisé a augmenté considérablement ainsi que les dégâts dans le peuplement.

En Forêt de Dimako (Cameroun), une exploitation a prélevé 0,35 arbres/ha soit environ 5m3/ha. La surface de la troué moyenne est de 524m²/arbre abattu. 5.5% de la surface totale a été endommagées pour chaque arbre abattu.

Forni, 1994

L'exploitation forestière induit aussi la disparition d'une faune spécifique à la canopée. Certains mammifères voient disparaître une grande partie de leurs ressources alimentaires. Les impacts indirects sont liés surtout à la chasse commerciale associée à l'ouverture des routes qui permettent l'accès à des zones "vierges". Pour limiter l'impact de l'exploitation forestière, il est préconisé ces dernières années de contrôler cette opération avec tous les soins possibles dans le cadre d'un aménagement des espaces forestiers. Des nouvelles qualifications de personnel sont par conséquent exigées. Elles entraînent des besoins en formation, non seulement au niveau des sociétés d'exploitation forestière, mais aussi des autres groupes d'acteurs.

Tableau n° 7 : Besoins en formation dans le domaine des techniques et opérations forestières

Acteurs

Besoins en formation "techniques et opérations forestières"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Être

Administration forestière

- Régénération forestière et pratiques sylvicoles améliorées

- Études d'impact environnemental

- Cartographie numérique/SIG

- Systématique forestière

Être capable de:

-définir les normes et les règles d'exploitation en veillant à la réduction des impacts écologiques et sociaux

- faire respecter les normes et les règles d'exploitation

- être partenaire

Secteur privé
(Sociétés d'exploitation forestière)

- normes et règles d'exploitation forestière

- pratiques sylvicoles améliorées

- Cartographie numérique/SIG

-exploitation à faible impact (abattage, débardage, tronçonnage, construction des routes, etc.)

- études d'impact environnemental

- connaître et appliquer les normes et les règles d'exploitation forestière

- appliquer les techniques d'exploitation à faible impact

- faire preuve d'un travail soigné

- être un bon manager

ONG nationale

- études d'impact environnemental

- techniques de lobbying

- évaluer les impacts de l'exploitation forestière

- sensibiliser l'exploitant forestier sur le niveau des impacts observés

- attirer l'attention des autres parties prenantes en cas d'abus

- être neutre

Populations locales

- normes et règles d'exploitation forestière

- exploitation à faible impact

- agroforesterie

- respecter les normes et les règles d'exploitation du bois de feu et des produits forestiers non ligneux

- appliquer les techniques d'exploitation à faible impact

- domestiquer les espèces à haute valeur économique

- être partenaire

- faire preuve de plus de responsabilité

La gestion de la faune et des aires protégées

La protection et la valorisation de la biodiversité sont des objectifs majeurs des nouvelles politiques forestières des pays de la sous-région. Il est prévu de constituer plus de 10% du territoire de chaque pays en aires protégées à l'horizon 2010. Cette évolution s'accompagne d'une remise en cause des approches d'intervention. Ainsi en est-il, par exemple, de l'approche qui consiste à mettre sous cloche les espaces forestiers qui a été dénoncée et de la promotion des aires protégées transfrontalières. Dans le domaine de l'aménagement, l'accent est dorénavant mis sur la recherche de compromis entre toutes les parties prenantes autour de la conciliation des objectifs de la conservation et des objectifs de développement, la sécurisation des moyens d'existence des populations riveraines, la problématique de la viande de brousse, la valorisation des aires protégées à travers l'écotourisme, l'exploitation des produits forestiers non ligneux, etc.

Malgré toutes ces dispositions, la biodiversité dans les aires protégées est soumise à une forte pression: chasse, exploitation forestière et minière, etc. Chaque aire protégée devrait être doté d'un plan d'aménagement, mais très rares sont celles qui en disposent.

La gestion de la faune en dehors des aires protégées obéit aux mêmes principes. Elle est envisagée dans la perspective d'une utilisation durable afin de répondre aux besoins de sécurité alimentaire et de la sécurisation des moyens d'existence des populations locales. Les opérations "musclées" de lutte anti-braconnage n'ont pas conduit à des solutions durables.

D'une manière générale, les aires protégées manquent de personnel qualifié (Doumenge et al., 2001). Les compétences actuelles sont en deçà des qualifications requises. Les besoins en formation identifiés sont présentés dans le tableau n°8.

Tableau n°8 : Besoins en formation dans le domaine de la gestion de la faune et des aires protégées

Acteurs

Besoins en formation "gestion de la faune et des aires protégées"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Etre

Administration forestière

- méthodes et démarches d'aménagement des aires protégées et des zones de chasse

- gestion participative (en rapport avec le développement)

- écotourisme

- communication / marketing

- inventaires de la faune

-cartographie numérique / SIG

- suivi de la biodiversité

Être capable de:

- coordonner l'élaboration, la mise en œuvre et le suivi d'un plan d'aménagement

- impliquer les autres parties prenantes à toutes les étapes de l'aménagement

- valoriser les aires protégées (utilisation "douce" des ressources)

- apprendre par l'action

- être partenaire

- savoir rendre compte (imputabilité)

- être un bon manager

- savoir susciter la confiance et honorer de cette confiance

Secteur
privé

Guides
de chasse

- élaboration d'un plan de gestion de la zone de chasse

- normes et règles d'exploitation de la faune

- gestion participative

- connaître et appliquer les normes et les règles d'exploitation de la faune

- élaborer et mettre en œuvre le plan de gestion (en collaboration avec les populations riveraines)

- être partenaire

Sociétés d'exploitation forestière

- dispositions légales sur la protection des espèces menacées

- l'intégration de la gestion de la faune dans le plan d'aménagement

- assumer ses responsabilités en matière de gestion de la faune dans les concessions forestières

- être partenaire

ONG nationale

- gestion participative/ gestion des conflits

- communication

- développement organisationnel

- planification du développement local

- initier et faciliter un processus de gestion participative

- promouvoir l'apprentissage par l'action

- faciliter la communication

- appuyer l'écodéveloppement

- être neutre

- savoir susciter la confiance et honorer de cette confiance

Populations locales

- gestion participative / gestion des conflits

- gestion des zones de chasse communautaire (au Cameroun et en RCA)

- communication

- éducation à l'environnement

- planification et financement du développement local

- Agroforesterie

- techniques de domestication des espèces animales à haute valeur économique

- participer à l'élaboration du plan d'aménagement

- développer des alternatives à la chasse dans les aires protégées

- respecter les engagements pris conjointement

- faciliter la circulation des informations

- maîtriser les techniques d'agroforesterie

- être partenaire

- faire preuve de plus de responsabilité

L'industrie du bois

L'industrie du bois est caractérisée surtout par les activités de première transformation: sciage, déroulage et tranchage pour la fabrication de contre-plaqués. La deuxième transformation de bois, étape qui génère le plus de valeur ajoutée et la création d'emplois, connaît un grand retard dans les pays d'Afrique centrale. Face à cette situation, les administrations forestières se sont engagées à stimuler l'investissement industriel à travers des obligations de transformation locale de bois liées à l'attribution des concessions.8.

D'une manière générale, les scieries sont vétustes9. La productivité est demeurée faible, accentuée par un manque de personnel qualifié (Fometé, 1998). Le rendement matière en sciage est très bas (35% en moyenne au Cameroun). Ce qui explique la prépondérance des rebuts de bois le plus souvent non récupérés, favorisant ainsi un gaspillage.

On assiste aussi au développement rapide d'un secteur informel de production de sciage en zone rurale. Les "scieurs de long", équipés d'une tronçonneuse et d'un guide, exploitent et transforment le bois sur place. Le rendement matière est très faible. Les besoins en formation identifiés sont présentés dans le tableau n° 9.

Tableau n°9 : Besoins en formation dans le domaine de l'industrie du bois

Acteurs

Besoins en formation "Industrie du bois"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Être

Administration forestière

- outils économiques et stratégie de promotion de l'industrialisation forestière

Être capable de:

- proposer des options (choix) stratégiques appropriées pour la politique nationale

- être en mesure de travailler en équipe pluridisciplinaire

Secteur
privé

Cadre

- technologie du bois

- investissement dans l'industrie forestière

- valorisation des sous-produits du sciage

- sécurité

- améliorer le rendement matière

- valoriser les essences secondaires

- veiller au respect des consignes de sécurité

Être un bon manager

Ouvrier

- affûtage

- conduite de séchoirs

- contrôle de qualité

- sécurité

- organiser et gérer le poste d'affûteur / conducteur de séchoir

- connaître les règles de sécurité

- respecter les consignes de sécurité

- faire preuve d'un travail soigné

- être ordonné

Populations locales

- techniques améliorées de sciage en long

- artisanat

- menuiserie traditionnelle

- sécurité

- faire usage des techniques améliorées de sciage en long

- utiliser des techniques d'exploitation à faible impact

- réaliser localement les objets domestiques en bois

- connaître les règles de sécurité et respecter les consignes de sécurité

- faire preuve d'un travail soigné

- faire preuve de plus de responsabilité

Le commerce du bois

Ce domaine rassemble toutes les opérations commerciales du bois destinés à l'exportation. Il y a encore quelques années, l'attention était portée sur la recherche des débouchés, l'accès à des segments de marchés, la valorisation des essences dites secondaires, etc. L'image récemment véhiculée par les mouvements écologistes de la forêt piège à carbone et réserve de biodiversité a relancé la problématique du commerce du bois dans une nouvelle direction. Le contrôle par le marché de la gestion durable des forêts devient un moyen de faire pression sur les exploitants forestiers. Parmi les instruments développés pour cela, on peut citer la Convention sur le commerce international d'espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction10 (CITES), les normes internationales (ISO, par exemple) et l'écocertification. Suite à cette évolution, des nouvelles qualifications sont recherchées. Ce constat a été renouvelé par les participants à l'atelier sous-régional sur l'élaboration d'une stratégie de renforcement des capacités en matière de certification11. Les besoins en formation identifiés sont consignés dans le tableau 10.

Tableau n°10 : Besoins en formation dans le domaine du commerce du bois

Acteurs

Besoins en formation "Commerce du bois"

Savoir

Savoir Faire

Savoir Etre

Administration forestière

- convention CITES

- certification forestière

- normalisation

- commerce du bois et traçabilité

- technique de l'audit forestier

- principes, critères, indicateurs et vérificateurs de gestion durable

Être capable de:

- défendre une image positive des bois d'Afrique centrale

- fixer les modalités d'application de la CITES dans le pays

- combattre le commerce illégal du bois

- contrôler l'application des normes

- être partenaire

- faire preuve de probité morale

Secteur privé
(Sociétés d'exploitation forestière)

- convention CITES

- certification forestière

- normalisation

- marketing / communication

- commerce du bois et traçabilité

- classement et contrôle de qualité

- principes, critères, indicateurs et vérificateurs de gestion durable

- préparer les conditions pour une certification des forêts exploitées

- redorer l'image de la profession

- vendre le bois à un prix rentable

- avoir du flair

- avoir le sens des relations publiques

- être courtois

ONG nationale

- technique de l'audit forestier

- principes, critères, indicateurs et vérificateurs de gestion durable

- vérifier les principes, critères et indicateurs de gestion durable

- défendre une image positive des bois d'Afrique centrale

- être neutre

- faire preuve de probité morale

PRIORISATION DES BESOINS EN FORMATION

Les besoins en formation dans le secteur forestier qui ont été identifiés sont nombreux, diversifiés et parfois transversaux. Une tentative de priorisation de ces besoins a été réalisée au niveau de chaque pays. L'exercice a consisté à hiérarchiser les besoins en formation et à distinguer les besoins qui sont prioritaires de ceux qui ne le sont pas. Il est apparu que cet exercice est relativement complexe surtout quand on s'intéresse à des besoins globaux de formation par domaine thématique. Dans les études au niveau de chaque pays, l'entrée par la pondération a été privilégiée. Cependant, comme l'a fait remarquer Nzala et Boukoulou (2002), il s'agit d'un exercice qui ne peut être entièrement dépourvu de subjectivité.

Face à ces limites et en raison du niveau des observations (celui des besoins globaux), nous avons privilégié une priorisation des besoins en formation par groupe d'acteurs. Cette démarche a permis d'observer les besoins en formation partagés et les besoins en formation de chaque groupe d'acteurs.

Besoins partagés

On entend par "besoins partagés", des besoins transversaux (presque) à toutes les thématiques et partagés par tous les groupes d'acteurs. Les besoins en formation identifiés qui répondent à ce critère sont principalement liés à la position de partenaire que chaque acteur est invité à occuper dans l'arène de la gestion durable des écosystèmes forestiers

La position de partenaire dans la gestion durable des espaces forestiers

La revue des besoins en formation, notamment la rubrique "savoir être", montre que dans le contexte actuel, tout acteur devrait se considérer comme partenaire dans la gestion forestière. Dans cette optique, l'agent de l'Administration forestière, par exemple, est appelé à se démarquer de la tradition héritée du passé colonial qui est basée sur les respect de la réglementation forestière et la répression, tout en faisant des autres parties prenantes des délinquants potentiels. Il devrait dorénavant se considérer comme partenaire. Dans cette position de partenaire, il doit faire preuve d'une capacité à reconnaître l'existence du pluralisme dans la gestion des ressources naturelles, accepter la différence des représentations, reconnaître la légitimité du savoir et des normes auxquelles se réfèrent les autres parties prenantes, privilégier le dialogue, être prêt à perdre certaines prérogatives au profit de l'intérêt commun (Nguinguiri, 2001). Les besoins en formation portent ici sur:

Besoins par groupes d'acteurs

Les besoins en formation prioritaires au niveau de chaque groupe d'acteurs ont été identifiés en prenant en compte les centres d'intérêts respectifs. Au niveau du secteur privé, par exemple, le centre d'intérêt en matière de besoins en formation est orienté vers la formation d'aménagistes.

Les besoins en formation prioritaires au niveau du secteur privé se focalisent sur l'aménagiste, qu'il soit technicien aménagiste ou expert aménagiste. En effet, l'aménagiste occupe une position qui est à l'interface de tous les acteurs concernés par l'aménagement forestier durable au sein de l'entreprise. En renforçant ses capacités, on s'attend à un effet multiplicateur qui touchera inévitablement le personnel de terrain impliqué dans les inventaires (prospecteurs, notamment), l'abattage, le débardage, etc.

Les besoins en formation portent essentiellement sur les composantes environnementales et sociales de l'aménagement forestier. Au delà des aspects liés à la mise en œuvre, au contrôle et au suivi du plan d'aménagement, les besoins suivants ont été identifiés:

A cela, il faut signaler un autre centre d'intérêt lié à l'industrie du bois qui renvoie aux besoins en formation dans les techniques d'affûtage, de conduite de séchoirs, etc.

Une administration forestière renforcée sur ses fonctions régaliennes

Dans la configuration actuelle, le rôle des administrations forestières se focalise sur les fonctions régaliennes de l'État. Pour jouer efficacement ce rôle, le personnel des administrations forestières ont besoin d'acquérir de nouvelles compétences. Deux centres d'intérêt en matière de besoins en formation ont été notés. L'un se situe au niveau de la conception (formulation des politiques, élaboration des normes et réglementation, planification et allocation des ressources), et l'autre est au niveau du suivi et du contrôle.

Les besoins en formation qui se rapportent au premier centre d'intérêt sont les suivants:

Les besoins en formation suivants ont été identifiés au niveau du suivi et du contrôle:

Des ONG désireuses d'acquérir des compétences pour sonner l'alarme

Deux centres d'intérêt en matière de besoins en formation ont été observés. Le premier se rapporte au rôle de contre pouvoir que les ONG sont appelées à jouer pour promouvoir la bonne gouvernance. Le second est lié au rôle d'appui-conseil.

Les besoins en formation suivants ont été énumérés pour permettre aux ONG12 de sonner efficacement l'alarme en cas de disfonctionnements éventuels:

Dans le rôle d'appui-conseil, les besoins en formation identifiés portent sur:

Les populations locales à la recherche d'une reconnaissance

Il se dégage trois centres d'intérêts en matière de besoins en formation au niveau des populations locales. Il s'agit notamment de l'accès à l'information, l'accès aux techniques dites "responsables" et l'accès aux démarches de gestion participative et d'auto-promotion.

Les besoins en formation nécessaires pour améliorer l'accès à l'information (informations sur les politiques et lois forestières/ information sur les normes et règles d'exploitation forestière/ procédure d'attribution des forêts communautaires et de zone de chasse communautaires, etc.) s'articulent autour de la communication sociale.

Le second centre d'intérêts s'oriente vers la vulgarisation des techniques de gestion forestière. Parmi les besoins en formation identifiés, on note principalement :

Le troisième centre d'intérêts à trait au renforcement des capacités. Les besoins en formation suivants sont concernés:

CONCLUSION

Une panoplie de besoins en formation a été identifiée. Certains sont partagés, d'autres sont spécifiques aux principaux groupes d'acteurs. Après ce passage en revue des besoins en formation, on est droit de se demander si la faisabilité de la gestion durable des écosystèmes forestiers n'est pas compromise. Sans vouloir être pessimiste, il est opportun de d'évaluer les capacités actuelles des structures de formation forestière, d'expliquer pourquoi elles ne sont pas prêtes à répondre aux besoins en formation identifiés et de dégager éventuellement des pistes d'actions.


7 Les forêts communautaires sont prévues par la loi au Cameroun, en Guinée Équatoriale et récemment au Gabon.

8 En RCA, par exemple, la réglementation forestière stipule que 85% de la production de grumes doit être transformée localement (disposition n'est pas encore appliquée).

9 Peut être parce que, pour beaucoup d'industriels forestiers, la scierie a été installée pour se conformer à la réglementation, sans obligation de rentabilité sachant que des marges plus consistantes sont obtenues sur l'exportation des grumes (Fomété, 1998)

10 C'est dans le cadre de la CITES que les importations d'Assamela (Pericopsis elata) en provenance du Cameroun ont été interdites temporairement en Belgique.

11 Atelier organisé à Libreville, le 8 et le 9 Mai 2002 dans la cadre du projet Développement inter-institutionnel de renforcement des capacités de formation dans le domaine de la certification forestière avec l'appui de BMZ, GTZ, DFID et l'Union Européenne.

12 Il s'agit essentiellement des ONGs nationales.

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