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3. Examen de la législation agricole 1996 des Etats-Unis


3.1 Introduction
3.2 Politique en matière de production céréalière
3.3. Mesures relatives à la commercialisation et à la détention de stocks
3.4 Politiques en matière de commerce et d'aide alimentaire
3.5 Résumé et conclusions


3.1 Introduction

La nouvelle législation agricole (Farm Bill 1995) a été adoptée fin décembre 1995, à l'expiration de la législation précédente, et a été promulguée en avril 1996 en tant que Fédéral Agricultural Improvement and Reform (FAIR) Act (Loi fédérale sur l'amélioration et la réforme de l'agriculture), en vigueur pour sept ans, de 1996 à 2002 inclus4. Dans l'ensemble, le PAIR Act renforce les politiques orientées sur le marché mises en place dès 1985 et cherche à réduire l'intervention du gouvernement. Parmi ses principales caractéristiques, le FAIR Act dissocie les paiements de soutien du revenu des prix agricoles, remplace les primes de complément par des paiements compensatoires directs, supprime les obligations en matière de réduction des superficies et assouplit le régime des emblavures. Il modifie également les dispositions concernant le soutien des prix et la détention de stocks, les subventions à l'exportation et les programmes alimentaires. Parmi tous les titres et programmes inclus dans le FAIR Act, ont été retenus pour le présent chapitre de l'Examen, ceux qui intéressent plus directement le secteur céréalier5.

4 Dans le passé, les lois sur l'agriculture restaient en vigueur pendant cinq ans.

5 Pour une description plus détaillée du FAIR Act, les lecteurs sont priés de se reporter à Provisions of the Federal Agricultural Improvement and Reform Act of 1996. ERS, USDA, Agricultural Information Bulletin 729, septembre 1996; Agricultural Outlook Supplement. ERS, USDA, avril 1996; la loi précédente est traitée dans Y Examen des politiques céréalières 1990-91.

3.2 Politique en matière de production céréalière


3.2.1 Principaux changements dans la politique de soutien du revenu agricole
3.2.2 Suppression des programmes de réduction des superficies (ARP)
3.2.3 Modification du programme de mise en réserve des terres fragiles (CRP)


3.2.1 Principaux changements dans la politique de soutien du revenu agricole

La nouvelle législation a pour caractéristique principale de suspendre les deux principaux éléments de la politique de soutien du revenu agricole des Etats-Unis, à savoir: les prix d'objectifs les primes de complément6. Dans le passé, les agriculteurs participant aux programmes de produits avaient droit à des paiements directs de la part du gouvernement, appelés primes de complément, calculés en fonction du déficit couvert, de la superficie et du rendement reconnu de la culture en question7. Le principal objectif de la prime de complément était de combler la différence entre un prix d'objectif et le prix sur le marché (ou le taux de prêt, s'il était plus élevé). Toutefois, avec le Food Security Act de 1985 (FAS) et le Food, Agriculture, Conservation and Trade (FACT) Act de 1990, d'autres politiques, plus orientées sur le marché, ont fait leur apparition. En vertu du FACT Act, les prix d'objectif des céréales ont été gelés à leur niveau de 1990 pour la période 1990-95, soit une diminution annuelle en termes réels. En outre, la superficie, et par conséquent le volume de la production, ouvrant droit à des primes de complément ont également été réduits.

6 Le FAIR Act a suspendu pour sept ans certaines "dispositions permanentes" - à savoir des dispositions sans date de péremption - de l'Agricultural Adjustment Act de 1938 et de l'Agricultural Act de 1949. Ceci implique un retour à la loi de 1949 en 2002 à moins que le Congrès n'en décide autrement.

7 Le déficit couvert est la différence entre le prix d'objectif (fixé à des niveaux qui sont censés procurer aux agriculteurs un profit optimal) et le plus élevé du prix sur le marché moyen national pendant une période donnée ou du taux de prêt (que l'agriculteur n'est pas obligé de rembourser en espèces) de soutien des prix.

En vertu du FACT Act, les paiements versés aux agriculteurs diminuaient si plus de 15 pour cent de leur superficie de base étaient plantés en cultures hors programme ou laissés en friche, tandis qu'avec le FAIR Act, les agriculteurs peuvent semer n'importe quelle culture (à l'exception des fruits et légumes) sur 100 pour cent de leur superficie totale sous contrat sans être pénalisés. Toutefois, le FAIR Act conserve le taux de prêt comme filet de sécurité principal, bien que les taux de prêt maximums ne puissent pas dépasser les niveaux de 1995 pour les cultures relevant du programme (voir section 3 ci-après). Pour bénéficier des paiements, les agriculteurs qualifiés doivent s'acquitter de certaines obligations en matière de conservation et maintenir la terre en culture, tout en respectant les restrictions visant la production de fruits et légumes8.

8 Les agriculteurs qualifiés sont ceux qui disposent d'une superficie de référence cultivée définie ou d'une superficie de référence relevant d'un programme de mise en réserve des terres fragiles susceptible d'être mise en culture début janvier 1995.

Les agriculteurs qualifiés reçoivent des paiements en vertu du Production Flexibility Contract (PFC) (Contrat de souplesse de la production) équivalant à 85 pour cent de leur superficie de référence, multipliés par leur rendement reconnu puis par le taux de paiement contractuel. La superficie pouvant être placée sous contrat est égale à la superficie de référence de l'exploitation pour 1996, calculée en vertu du FAIR Act de 1990 (qui, pour le blé et les céréales secondaires, était égale à la moyenne des superficies emblavées entre 1988 et 1990), plus toute superficie relevant précédemment du Conservation Reserve Programme (CRP) (Programme de mise en réserve à des fins de conservation), mais remise en culture et moins toute nouvelle superficie inscrite à ce programme. Les rendements utilisés pour le calcul des paiements au titre du programme sont gelés aux niveaux de 1995. Le taux de paiement contractuel devrait être revu chaque année, dans la mesure où le taux de paiement contractuel annuel est propre à chaque culture et égal au niveau de dépenses autorisé pour chaque produit pour l'exercice financier, divisé par la somme des paiements reçus au titre de tous les contrats pour un exercice financier donné.

En ce qui concerne le plafonnement des paiements, le FAIR Act réduit le montant maximum des paiements directs et indirects qu'une personne peut recevoir par exercice financier. Comme dans le passé, une personne peut recevoir des paiements pour un maximum de trois exploitations ou entités distinctes. Toutefois, le FAIR Act ramène le total des paiements à 80 000 dollars E.-U. par personne et par an, contre 100 000 dollars E.-U. en vertu de la législation précédente. Les paiements directs annuels ne peuvent pas dépasser 40 000 dollars E.-U., mais une personne peut recevoir jusqu'à 40 000 dollars E.-U. supplémentaires pour deux autres entités (soit, par exemple, 20 000 dollars E.-U. pour chacune des deux entités supplémentaires). En outre, le FAIR Act prolonge les dispositions limitant le prêt à la commercialisation et les primes de complément à 75 000 dollars E.-U. par personne et par an.

Si, du fait de l'entrée en vigueur du FAIR Act, les agriculteurs des Etats-Unis étaient censés réagir aux signaux du marché au moment de décider des emblavures, la suspension des mesures de soutien du revenu a coïncidé avec une hausse du prix des céréales pendant la campagne 1995/96. Cette augmentation a permis aux agriculteurs de bénéficier non seulement du revenu constitué par les paiements au titre du PFC, mais aussi de prix à la production plus élevés. En revanche, l'efficacité du FAIR Act pour ce qui est de réduire les dépenses budgétaires grâce à la suspension des primes de complément n'est pas encore prouvée. Le tableau 5 indique le montant projeté des primes de complément, si elles avaient été maintenues jusqu'en l'an 2002, le budget total du PFC par exercice financier et les paiements annuels par céréale. Il ressort clairement de ce tableau que les versements au titre du PFC sont sensiblement supérieurs aux primes de complément projetées et il semble même que pendant la période de sept ans considérée, les paiements totaux au titre du PFC seront plus de trois fois supérieurs à ce qu'auraient été les primes de complément. Toutefois, on peut soutenir également que du fait que les paiements PFC sont prévus pour une période de sept ans se terminant en 2002, le maintien des primes de complément pour une durée illimitée a été jugé plus coûteux à long terme que les paiements au titre du FAIR Act, conçus comme compensation à la suppression des programmes d'aide aux agriculteurs pendant une période de transition de sept ans. En outre, les années où les prix seront faibles, les paiements au titre du PFC devraient fournir une protection moindre que les programmes précédents, mais les producteurs auront plus de latitude pour décider des emblavures. On peut conclure que, si les prix chutaient sensiblement pendant la durée de vie du FAIR Act et tombaient en particulier à des niveaux inférieurs à ceux de 1995, la réintroduction de mesures plus coûteuses dans les futurs projets de loi sur l'agriculture ne serait pas à exclure.9

9 Par exemple, voir Orden, David "The 1996 Farm Bill: How Much Change and How Permanent?" in The American Farm Bill: Implications for CAP Reform. (Colman David, Editer). The University of Manchester Centre for Agricultural, Food and Resource Economics, School of Eocnomic Studies, mai 1997.

ENCADRE 7: Calcul du paiement au titre du Programme du FAIR Act

L'exemple ci-après concerne un producteur de maïs hypothétique. L'équation qui permet de calculer les paiements au titre du Production Flexibility Contract ou PFCt pour chacune des sept années (t-1996..., 2002) est la suivante:

PFCt = (Ba*Ym*Pmt)*0,85, Ba est la superficie de référence qui peut faire l'objet d'un Production Flexibility Contract fondé sur des accords d'avant 1996. Pour cet agriculteur, Ba est égal à 80 hectares. Ym et Pm représentent respectivement les rendements et les paiements contractuels par tonne. Le rendement reconnu au titre du programme est de 6,3 tonnes par hectare. Les paiements contractuels annuels sont fondés sur les projections de l'USDA indiquées ci-après. En appliquant la formule ci-dessus, cet agriculteur recevrait au titre du FAIR Act un total de 37 948 dollars E.-U. sur la période de sept ans du contrat.

Exercice financier

Superficie sous contrat

Rendement reconnu #

Coefficient de paiemeat contractuel anneul@

Paiement par tonne*

Paiements reçus au titre du PFC: par an



(en tonnes par ha)


(en $E.-U.)

(en $E.-U.)

1996

80

6,3

0,85

9,84

4215

1997

80

6,3

0,85

18,11

7758

1998

80

6,3

0,85

14,17

6070

1999

80

6,3

0,85

13.78

5903

2000

80

6,3

0,85

12,60

5398

2001

80

6,3

0,85

10,24

4387

2002

80

6.3

0.85

9.84

4215

Paiement total 37 948 $E.-U.

# Le rendement "reconnu" au titre du programme est égal au rendement utilisé pour le calcul des paiements correspondant à la récolte de 1995 sur cette exploitation.

@ 0,85 est un coefficient de réduction proportionné, du fait qu'au titre de la loi précédent, 15 pour cent de la superficie de référence ne donnaient pas lieu à une prime de complément.

* Les paiements et les taux au titrie du PFC 1997 sont des estimations provisoires extraites du n° 211.96 (26 avril 1996) de USDA New Release.

On notera que le paiement final ou effectif dépend du nobre de producteurs participant chaque année au programme et aussi des inscriptions au programme de mise en réserve des terres fragiles. On trouvera des renseignements supplémentaires sur les paiements et taux PFC dans le tableau 1 de l'Annexe du document Provisions of the Federal Agricultural Improvement and Reform Act. Pour 1996, les paiements estimés sont ajustés à la baisse pour tenir compte de paiements restant dus pour 1994. Inversement, les paiements de 1997 sont ajustés à la hausse pour tenir compte du remboursement des paiements différentiels anticipés de 1995.

Tableau 5 - Montant total des paiements au titre du PFC, par exercice financier, et répartition par céréales, 1996-2002 (campagnes agricoles)1/

Exercice financier

Primes de complément projetées2/

Total des paiements au titre du PFC3/

Blé

Maïs

Orge

Avoine

Sorgho

Riz4/



Montant des paiements annuels en milliards de dollars E.-U.



1996

1,500

5,700

1,4627

2,5745

0,1203

0,0084

0,2846

0,4718

1997

0,500

5,380

1,4141

2,4889

0,1163

0,0081

0.2752

0,4561

1998

2,300

5,800

1,5231

2,6808

0,1253

0,0087

0,2964

0,4913

1999

2,400

5,600

1,4713

2,5897

0,1210

0,0084

0,2863

0,4756

2000

2,000

5,130

1,3471

2,3711

0,1108

0,0077

0,2621

0,4345

2001

1,50

4,130

1,0845

1,9089

0,0892

0,0062

0,2110

0,3498

2002

1,100

4,010

1,0525

1,8525

0,0866

0,0060

0,2048

0,3395

Total

11,300

35,626

9,3553

16,4664

0,795

0,0535

1,8204

3,0186

Sources: Hoffman in Provisions of the Federal Agricultural Improvement and Reform Act of 1996. USDA, ERS Agricultural Information Bulletin 729, September 1996; and Young and Westcott in The 1996 US Faim Act Increases Market Orientation. USDA, ERS, 1996.

l/ Le montant annuel en dollars sera ajusté pour tenir compte des remboursements, des limites de paiement et des résolutions de contrat.

2/ Source: Young and Westcott, 1996.

3/ Le total des paiements au titre du PFC inclut 4,14 milliards de dollars E.-U. pour le coton pour la période de sept ans.

4/ Le riz bénéficiera d'une allocation supplémentaire de 8 500 000 dollars E.-U. par exercice à partir de 1997 jusqu'en 2002.

3.2.2 Suppression des programmes de réduction des superficies (ARP)

A compter de la récolte de 1996, le FAIR Act a supprimé l"'autorité" pour les programmes ARP et a de ce fait levé l'obligation de mise en réserve comme condition des primes de complément. Au titre des FARM Act de 1985 et de 1990, pour avoir droit aux paiements au titre du programme, les producteurs céréaliers participants devaient mettre une partie de leur superficie de référence en jachère ou la mettre en réserve à des fins de conservation. Etant donné que le principal objectif des programmes ARP était d'éviter la production d'excédents agricoles, les niveaux ARP étaient déterminés par le ratio stocks de clôture-utilisation de chaque céréale projeté. La suspension des programmes ARP n'affectera, semble-t-il, les emblavures entre 1996 et 2002, que dans la mesure où les programmes ARP ont influé sur les choix des agriculteurs en matière d'emblavures pendant la législation précédente. Les niveaux de réduction ARP avaient déjà sensiblement baissé pendant les dix ans qui ont précédé le FAIR Act. Ainsi, comme indiqué au tableau 6, un taux de zéro pour cent de réduction a été imposé en 1994 et 1995 pour le blé, l'orge, le sorgho et l'avoine, tandis qu'en 1995 les producteurs de maïs et de riz ont dû réserver 7,5 et 5 pour cent, respectivement, de leurs terres de culture répondant aux conditions voulues.10

10 En vertu de la loi de 1990, un taux de réduction de zéro pour cent pour l'avoine est resté en vigueur de 1991 à 1995, tandis que pour d'autres céréales secondaires, les taux de réduction ont été fixés séparément.

Tableau 6 - Réduction des emblavures, 1989-1995


1990

1991

1992

1993

1994

1995

(............. en pourcentage..............)

Blé

5

15

5

0

0

0

Maïs

10

7,5

5

10

0

7,5

Sorgho

10

7,5

5

5

0

0

Orge

10

7,5

5

0

0

0

Avoine

5

0

0

0

0

0

Riz

20

5

0

5

0

5

Source: USDA (divers rapports)

Les résultats de diverses études donnent à penser que même si les programmes de réduction des superficies avaient été maintenus jusqu'en 2002, ils auraient très vraisemblablement été fixés à des niveaux proches de zéro pour la plupart des céréales, du fait essentiellement que la demande d'exportation de céréales, notamment blé et maïs, produites aux Etats-Unis, devrait rester forte. La suppression des dispositions tendant à la mise en réserve de certaines terres devrait normalement contribuer à l'expansion des emblavures des cultures, comme le maïs, pour lesquelles des niveaux de réduction élevés avaient été imposés ces dernières années.

3.2.3 Modification du programme de mise en réserve des terres fragiles (CRP)

Le Programme CRP est l'un des trois principaux programmes de conservation relevant du Environmental Conservation Acreage Reserve Programme (Programme de mise en réserve des terres à des fins de conservation de l'environnement), programme de mise en réserve volontaire des terres cultivées établi en vertu de la loi de 1985. En plaçant des terres cultivées extrêmement fragiles en réserve au titre du Programme CRP pendant dix ans, les propriétaires terriens étaient assurés de recevoir une rente annuelle et le remboursement partiel du coût de l'application de méthodes de conservation, en plus d'avantages fiscaux de la part du gouvernement et d'autres programmes11. En 1996, on estimait à 14,7 millions d'hectares la superficie totale inscrite à ce programme12, dont 58 pour cent environ de terres naguère céréalières, comme indiqué au tableau 7. Le FAIR Act fixe à 14,7 millions d'hectares la superficie maximum visée par le CRP, mais les terres peuvent être retirées de ce programme avant l'expiration du contrat initial afin de pouvoir éventuellement bénéficier du contrat PFC, après cinq ans au moins d'inscription.

11 On trouvera des détails supplémentaires dans The Conservation Reserve Program. USDA, ERS, Report Number 626, 1990.

12 Sur quelque 41 millions d'hectares de terres cultivées extrêmement fragiles présentant les conditions voulues pour être inscrites au CRP.

Tableau 7 - Terres céréalières inscrites au programme de mise en réserve des terres fragiles


1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

(............................. en millones de hectáreas.............................)

Blé

4,2

4,2

4,3

4,4

4,4

4,4

4,3

Maïs

1,5

1,6

1,7

1,7

1,7

1,7

1,6

Sorgho

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

Orge

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

1,1

Avoine

0,5

0,5

0,6

0,6

0,6

0,6

0,6

Riz

0,005

0,005

0,005

0,005

0,005

0,005

0

Total

8,301

8,423

8,625

8,827

8,827

8,827

8,498

Source: USDA (divers rapports)

Dans le passé, une augmentation (diminution) de la superficie placée sous CRP n'aurait entraîné une diminution (augmentation) des superficies visées par les Programmes ARP qu'à moyen terme, dans la mesure où les niveaux de réduction ARP étaient ajustés chaque année. Avec la suppression des Programmes ARP et le raccourcissement des obligations d'inscription au Programme CRP de dix à cinq ans, le Programme CRP pourrait bien fonctionner comme mesure de contrôle de l'offre influençant la superficie emblavée. Toutefois, son efficacité sera largement déterminée par le niveau des prix du marché et par les critères d'accession au Programme. Du fait de la fixation à 14,7 millions d'hectares de la superficie totale visée par le CRP, des superficies importantes pourraient quitter le CRP si les prix des céréales atteignaient un niveau tel qu'il deviendrait plus avantageux d'augmenter les emblavures que de recevoir des paiements au titre du Programme CRP. Toutefois, alors que le niveau des prix pourrait affecter les superficies inscrites au CRP, le FAIR Act n'indique pas les critères précis d'accession au Programme. Ainsi, si, la priorité était accordée aux critères de qualité de l'eau, cela favoriserait la libération de terres CRP dans les régions céréalières, tandis que si c'est à l'érodabilité et à la faune sauvage que revient la priorité, un relèvement des rentes serait nécessaire pour assurer le maintien des terres dans le CRP13. Bien que 14 pour cent environ des terres adaptées à la culture du blé soient enrôlées dans le CRP, les superficies qui pourraient être retirées de ce programme et rendues à la culture du blé, plutôt qu'à d'autres cultures, dépendraient des critères du programme ainsi que des prix relatifs des céréales.

13 Pour un examen plus détaillé de cette question, se reporter à V.H. Smith et J.W. Glauber "The Effects of the 1996 Farm Bill on Feed and Food Grains " in The American Farm Bill: Implications for CAP Reform.

En outre, les terres placées sous CRP qui sont ensuite rendues à la production continuent à être soumises à des obligations de conservation. Toutefois, en vertu de la législation précédente, l'accès à des subventions au titre de programmes telles que les primes de complément dépendait de l'adoption de pratiques de conservation des sols. Autrement dit, l'efficacité des mesures de conservation dépendait aussi de l'attrait des mesures de soutien du gouvernement incitant les agriculteurs à participer aux programmes de produits. Avec la suppression des primes de complément, les paiements PFC seront liés aux pratiques de conservation des agriculteurs; de toute façon, il s'agit de paiements qui diminuent régulièrement et ne peuvent être perçus que par des producteurs s'étant inscrits lors de l'ouverture des inscriptions en août 1996.

3.3. Mesures relatives à la commercialisation et à la détention de stocks

Le FAIR Act conserve l'essentiel du filet de sécurité que constituent les dispositions relatives aux prêts remboursables à forfait accordés pour certains produits et aux prêts à la commercialisation, en vigueur de la campagne agricole de 1996 à celle de 2002, sous réserve d'un taux de prêt maximum.14 Excepté pour le riz et l'orge, les taux de prêt de base continuent à être calculés sur la base de 85 pour cent de la moyenne des prix à la production des cinq années précédentes, à l'exclusion des années les plus favorables et les moins favorables. Les taux de base pouvaient être réduits à la discrétion du Secrétaire à l'agriculture de 10 pour cent au maximum, sur la base du ratio stocks de clôture-utilisation totale.15

14 Les dispositions en matière de prêt prévoient que tous les producteurs céréaliers participant au PFC recevront un prêt d'aide à la commercialisation de la Commodity Credit Corporation (CGC), leur production (y compris celle provenant de superficies qui ne sont pas sous contrat) servant de garantie. Ces prêts sont appelés des prêts forfaitaires parce que si l'emprunteur décide de renoncer à sa récolte au profit du CCC plutôt que de rembourser le prêt, le gouvernement n'a aucun recours et est contraint d'accepter les produits en remboursement du prêt. Le Secrétaire à l'agriculture peut aussi proposer aux producteurs céréaliers une option consistant à rembourser les prêts liés au soutien des prix à un taux inférieur au niveau de soutien des prix annoncé, essentiellement pour encourager les dédits potentiels et réduire autant que faire se peut l'accumulation de stocks.

15 Par exemple, les taux de prêt pour le blé et le maïs pourraient être réduits de 5 pour cent si les ratios stocks-utilisation se situaient dans une fourchette de 15 à 30 pour cent et de 12,5 à 25 pour cent, respectivement. On trouvera des détails et des exemples supplémentaires dans V Examen des politiques céréalières, 1990/91.

Toutefois, le pouvoir qu'avait le Secrétaire à l'agriculture de décider d'un ajustement discrétionnaire de 10 pour cent supplémentaires est abrogé16. A la différence de la législation précédente, les taux de prêt ne peuvent pas dépasser leurs niveaux de 1995; ainsi, pour le blé et le maïs, les taux de prêt maximums sont de 95 et 74 dollars E.-U. la tonne, respectivement. Pour l'orge, l'avoine et le sorgho, les taux de prêt continuent à être fixés à des niveaux jugés "raisonnables" par rapport aux taux de prêt du maïs. Pour le riz (paddy), le taux est fixé à 145,6 dollars E.-U. la tonne, tandis que pour le seigle, les taux de prêt ne sont plus en vigueur. Des dispositions relatives aux prêts à la commercialisation sont conservées pour le blé, les céréales secondaires et le riz. Les prêts à la commercialisation ont été rendus discrétionnaires pour le blé et les céréales secondaires en 1985, mais cette possibilité n'a jamais été utilisée à ce jour.

16 Just et Laslie in Provisions of the Federal Agricultural Improvement and Reform Act of 1996 USDA (1996).

L'importance du mécanisme des taux de prêt comme instrument servant essentiellement à soutenir les prix du marché a considérablement diminué depuis le milieu des années 80. Toutefois, comme les taux de prêt élevés étaient responsables de la constitution de stocks détenus par le gouvernement et par conséquent entraînaient des coûts de stockage élevés, ils ont été réduits en 1990 de 40 pour cent environ par rapport à leurs niveaux de 1985. Avec l'entrée en vigueur du FAIR Act, le rôle des taux de prêt comme instrument d'une politique de soutien du revenu risque de diminuer encore, dans la mesure où les taux maximums sont gelés à leurs niveaux de 1995, tandis que les prix du marché pourraient continuer à dépasser largement ces taux, comme en témoignent les deux dernières campagnes.

Le FAIR Act a également suspendu la Former Owned Reserve (FOR) (Réserve appartenant aux agriculteurs) jusqu'à la récolte de 2002. En vertu de la législation précédente, les producteurs de blé ou de céréales secondaires auxquels la Commodity Credit Corporation (CCC) avait accordé des prêts ordinaires sur neuf mois pouvaient, sous certaines conditions, bénéficier de prêts forfaitaires FOR pour une durée maximum de 33 mois, sans compter les paiements mensuels supplémentaires pour le stockage et un prêt. Traditionnellement, la FOR contribuait à stabiliser les prix puisqu'elle encourageait le stockage des céréales lorsque les prix tombaient à un niveau inférieur à un certain seuil et encourageait au contraire la distribution des stocks lorsque ces prix dépassaient un certain plafond. Toutefois, en raison de plusieurs modifications apportées depuis 1985, y compris la réduction des taux de prêt et l'adoption de critères d'entrée plus restrictifs, la FOR avait déjà perdu beaucoup de son importance. Enfin, dans le même ordre d'idées, le FAIR Act a modifié l'Agricultural Act of 1980 et créé la Food Security Commodity Reserve (Réserve de produits de base aux fins de la sécurité alimentaire). La loi de 1980 avait établi la Food Security Wheat Reserve (Réserve de blé à des fins de sécurité alimentaire), constituée d'un maximum de 4 millions de tonnes de blé uniquement, mis de côté pour répondre aux besoins des programmes d'aide alimentaire d'urgence des Etats-Unis en faveur des pays en développement. En vertu du FAIR Act, la réserve de 4 millions de tonnes inclura désormais, outre le blé, du maïs, du sorgho et du riz 17.

17 Le FAIR Act porte la distribution des secours humanitaires d'urgence en cas de catastrophe de 300 000 à 500 000 tonnes en cas de besoins imprévus et autorise la distribution supplémentaire de 500 000 tonnes de produits de base agréés.

3.4 Politiques en matière de commerce et d'aide alimentaire

Les Etats-Unis sont le principal pays exportateur de céréales et toute modification de sa politique céréalière a par conséquent des incidences mondiales. Si la loi de 1996 introduit des modifications mineures dans les programmes d'exportation de céréales jusqu'en 2002, ses incidences à long terme pourraient être plus importantes. Dans le passé, les exportations de céréales, blé et maïs notamment, bénéficiaient dans une large mesure de programmes d'assistance du gouvernement. Par exemple, dans les années qui ont précédé le FAIR Act, 80 pour cent environ des exportations de blé des Etats-Unis bénéficiaient d'une aide gouvernementale sous une forme ou une autre18. Parmi les divers programmes, ceux qui concernent plus particulièrement les exportations céréalières sont l'Expert Enhancement Programme (EEP) (Programme de soutien aux exportations), les programmes de garantie du crédit à l'exportation (GSM) et les programmes d'aide alimentaire.

18 On trouvera des détails supplémentaires dans Agricultural Export Programs: Background for 1995. USDA, ERS, Agricultural Economic Report 716, juin 1995.

En vertu du FAIR Act, les dépenses totales au titre de l'EEP sont plafonnées à un niveau inférieur à ceux autorisés en vertu de l'Accord du Cycle d'Uruguay sur l'agriculture pour la période de 1996-1999, puis portées aux niveaux maximums autorisés en vertu de cet Accord de l'an 2000 à l'an 200219. Toutefois, pendant toutes ces années, pratiquement, les dépenses annuelles au titre de l'EEP autorisées par le FAIR Act seront inférieures à ce qu'elles étaient sous le régime précédent. Le FACT Act de 1990 établissait un niveau de financement annuel minimum de 500 millions de dollars E.-U. En 1994, les dépenses au titre de l'EEP ont atteint le montant record de 1,5 milliard de dollars E.-U., avant d'être ramenées à 800 millions de dollars E.-U. en 1995. On notera que les subventions de l'EEP n'ont pas été utilisées depuis juillet 1995, compte tenu essentiellement de la hausse des cours internationaux des céréales pendant la campagne 1995/96 et de leur bonne tenue pendant la campagne 1996/97.

19 Le FAIR Act limite les dépenses totales au titre de l'EEP à 350 millions de dollars E.-U. pendant l'exercice financier 1996; à 250 millions de dollars E.-U. pendant l'exercice financier 1997; à 500 millions de dollars E.-U. pendant l'exercice financier 1998; à 550 millions de dollars E.-U. pendant l'exercice 1999; à 579 millions de dollars E.-U., en l'an 2000 et à 478 millions de dollars E.-U. pendant les exercices financiers 2001 et 2002.

En ce qui concerne les crédits à l'exportation, les débats sur la discipline internationale dans ce domaine sont en cours, mais aucune décision n'a encore été prise. Le FAIR Act maintient le programme de garantie du crédit à l'exportation à court terme (jusqu'à trois ans) (GSM-102) et le programme de garantie du crédit à l'exportation de durée intermédiaire (trois à dix ans) (GSM-103) et fixe le niveau de financement annuel du programme à 5,5 milliards de dollars E.-U. jusqu'en 2002, tout en autorisant une certaine souplesse dans la répartition des fonds entre chaque programme. Le Emerging Democracies Programme (Programme pour les démocraties naissantes) établi par le FACT Act est également autorisé jusqu'en 2002, mais a été rebaptisé Emerging Markets Programme (EMP) (Programme pour les marchés naissants); ce programme prévoit la fourniture de crédits CCC directs ou de garanties du crédit d'un montant d'au moins 1 milliard de dollars E.-U. pour promouvoir les exportations agricoles des Etats-Unis vers les "démocraties naissantes". Le FAIR Act remplace aussi le Market Promotion Programme (MPP) (Programme de promotion du marché) par le Market Access Programme (MAP) (Programme d'accès au marché) et limite son financement annuel à 90 millions de dollars E.-U., alors que le FACT Act autorisait un minimum de 200 millions de dollars E.-U.

La loi de 1996 prolonge de sept ans le programme d'aide alimentaire Public Law 480 et les accords Food for Progress (FFP) (Nourriture pour le progrès), mais en mettant l'accent sur leurs aspects de développement du marché. Le programme d'aide alimentaire des Etats-Unis connu sous le nom de Food for Peace Programme (Nourriture pour la paix) ou P.L. 480 est régi essentiellement par le Agricultural Trade Development and Assistance Act (Loi sur le développement et le soutien du commerce agricole) de 1954. La loi de 1990 avait déjà apporté d'importants changements au programme PL 480 en introduisant, par exemple, un nouveau programme de dons bilatéraux, des responsabilités directes en matière de gestion et l'annulation des créances. Parmi les principales modifications apportées par le FAIR Act, il faut citer l'amendement du Title I, programme de prêts à des conditions libérales, qui finance les ventes de produits agricoles des Etats-Unis aux pays en développement, qui inclut désormais des entités privées en plus des organes gouvernementaux des pays bénéficiaires, la période de remboursement de dix ans étant supprimée et la période de grâce maximum réduite de sept à cinq ans. Le FAIR Act relève également le niveau maximum de financement disponible au titre de Title II et ajoute des organisations intergouvernementales, comme le Programme alimentaire mondial, à la liste des organisations habilitées à recevoir ces fonds. En outre, il modifie le Title IV pour élargir la gamme des produits disponibles pour la programmation en vertu du programme Public Law 480. Enfin, le FAIR Act prolonge les accords FFP jusqu'en 2002 et autorise la vente à crédit à tous les pays remplissant les conditions requises et non plus aux seuls Etats de l'ex-URSS nouvellement indépendants.

3.5 Résumé et conclusions

Le FAIR Act supprime le lien entre les paiements de soutien du revenu et les prix agricoles; il abroge le Area Réduction Programme (Programme de réduction des superficies); suspend la Former Owned Reserve (Réserve appartenant aux agriculteurs); et apporte certaines modifications au mécanisme de prêts et aux programmes d'aide à l'exportation et d'aide alimentaire. Le FAIR Act remplace les primes de complément, qui étaient liées au niveau des prix agricoles, par des paiements au titre du Production Flexibility Contract qui sont fixes, mais qui diminuent progressivement, pendant sept ans (1996-2002). En vertu de ce contrat, les agriculteurs participants recevront du gouvernement des subventions indépendantes des fluctuations des prix agricoles et des niveaux de production. Cette disposition, avec l'abolition du Area Réduction Programme, permettra aux producteurs de cultiver la totalité de leurs terres sous contrat, plus une superficie supplémentaire où ils pourront cultiver une culture de leur choix (avec des limitations pour les fruits et légumes) sans perdre aucun de leurs droits. De ce fait, les producteurs devraient tenir davantage compte du marché pour orienter leurs décisions en matière de production.

Le FAIR Act maintient les prêts forfaitaires de base, en vertu desquels les producteurs peuvent soit rembourser le prêt et rester propriétaires du produit servant de garantie au prêt, soit abandonner leur produit au gouvernement. En règle générale, les taux de prêt annuels continueront à être calculés sur la base de 85 pour cent de la moyenne des prix agricoles des cinq années précédentes (à l'exclusion des années les plus favorables et les moins favorables) tout en restant plafonnés. L'Agricultural Act de 1980 a été amendé de façon à établir une Food Security Commodity Reserve (Réserve de produits aux fins de la sécurité alimentaire), dont les 4 millions de tonnes autorisés ne seront plus composés uniquement de blé, mais aussi de maïs, de sorgho et de riz. Le FAIR Act a également suspendu jusqu'à la campagne agricole 2002 le pouvoir accordé précédemment au Secrétaire à l'agriculture d'autoriser l'entrée de blé et de céréales secondaires dans la Farmer Owned Reserve.

Le FAIR Act apporte également plusieurs modifications aux programmes d'aide à l'exportation et d'aide alimentaire. Il limite les dépenses au titre de l'EEP pour la période 1996 à 2000 à des niveaux inférieurs au maximum autorisé en vertu de l'Accord du Cycle d'Uruguay sur l'agriculture. Les programmes de garantie du crédit à l'exportation du CCC ont également été rationalisés, tandis que les programmes d'aide alimentaire ont été modifiés afin d'accroître le rôle du secteur privé et d'élargir la gamme des produits de base inclus.

Si, en réduisant les mesures de soutien et les subventions à l'exportation, le FAIR Act atteint son principal objectif, qui est d'accentuer l'orientation sur le marché et de renforcer l'efficacité de l'agriculture américaine, les Etats-Unis pourraient devenir un exportateur de céréales plus compétitif. Si, de ce fait, les Etats-Unis augmentaient leur part de marché, le commerce international et les cours des denrées de base seraient encore plus sensibles à la situation de l'offre aux Etats-Unis.


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