Deuxième partie: orientations opérationnelles
Qu'est-ce qu'une politique de développement en faveur des femmes rurales?
1.1 But général de cette politique
1.2 Objectifs particuliers de cette politique
1.3 Conditions préalables, postulats, principes
L'intégration de la problématique des femmes et du développement dans toute planification générale et sectorielle d'un pays peut contribuer favorablement à l'obtention d'un développement harmonieux et durable. L'oubli et l'invisibilité des femmes peuvent, au contraire, provoquer des déséquilibres et des effets pervers dans le changement.
Une politique de développement en faveur des femmes rurales, inscrite dans les mécanismes de planification, consiste en un processus de concertation qui conduit à trouver et mettre en oeuvre des solutions aux problèmes rencontrés par les femmes pour faire reconnaître et valoriser leur rôle de productrice à part entière. La politique retenue constitue un cadre général permettant de formuler des plans d'actions, sur la base d'objectifs approuvés par tous les partenaires du développement, intégrés dans les programmes et projets de développement du secteur agricole et rural.
La préparation et la mise en oeuvre d'une politique de développement en faveur des femmes font appel à la multidisciplinaire. Elle est étroitement liée à une série de facteurs politiques, économiques, sociaux et environnementaux. Elle ne peut donc faire l'objet d'une systématisation. En revanche, pour sa pertinence et son efficacité, une démarche opérationnelle et le respect de certains éléments clefs sont suggérés.
Pour permettre un langage commun, il est d'abord procédé à un exercice de terminologie sur la définition des vocables couramment utilisés dans un processus de formulation d'une politique en faveur des femmes rurales. Ces propositions n'ont aucun caractère d'immuabilité; elles sont plutôt à considérer comme des conventions pour une meilleure compréhension.
Situation (analyse de) - Le quoi?: présentation et analyse des faits et de la réalité.
Principes - Le pourquoi?: un ensemble de points fondamentaux, de règles, de postulats qui guide le raisonnement.
Politique - Intention et option, ligne de conduite retenue pour aider à la prise de décisions.
Plan d'action - Le comment?: description détaillée de l'approche et de la démarche retenues pour atteindre les objectifs ainsi que les différentes étapes à respecter, les tâches à accomplir et les responsabilités à assumer.
Objectifs - But précis, concret, orienté vers l'action, concentré sur les intérêts et les besoins des femmes, réaliste, mesurable et faisable dans un laps de temps déterminé avec des moyens définis.
Stratégie - Série de démarches développées pour atteindre les objectifs en argumentant le choix et les priorités retenus, avec leurs effets potentiels et leur impact escompté. La stratégie concerne aussi la gestion des ressources disponibles et leur mobilisation.
Développement durable - Aménagement et conservation des ressources naturelles et orientation des changements techniques et institutionnels de manière à satisfaire les besoins des générations actuelles et futures.
Développement équitable - Développement où tous (individus et groupes) bénéficient de résultats similaires en respectant et en valorisant les spécificité.
Analyse différentielle selon les genres Prise en compte des activités et des responsabilités des hommes et des femmes ainsi que des effets spécifiques que les politiques, les programmes et les projets peuvent avoir sur les uns et sur les autres.
Intégration des femmes au développement - Planification où les aspects féminins sont inclus et où les programmes fournissent aux femmes des outils et des opportunités équitables pour participer à part entière au développement. Les problèmes, les besoins, les intérêts et les perspectives des femmes sont intégrés dans les politiques nationales et sectorielles et ne sont pas traités comme un secteur à part.
Parler de politique de développement en faveur des femmes rurales peut paraître contradictoire avec une volonté de ne pas marginaliser les femmes et de ne pas les isoler. Cela peut également engendrer l'idée que ce qui est conçu au niveau des politiques de développement agricole et rural s'adresse aux hommes et que les femmes en sont exclues.
Il existe une situation de fait, observable par tous. La mesure et l'évaluation des effets et de l'impact des programmes et des projets de développement apportent des conclusions qui permettent d'affirmer que depuis trop longtemps (ou depuis toujours), les femmes sont oubliées, invisibles et marginalisées. Dans le secteur agricole et rural, elles n'ont pas ou difficilement accès aux facteurs de production, aux ressources et aux biens. Elles profitent peu des bénéfices des changements dus au développement. Elles sont souvent écartées des prises de décision parce que leur parole est considérée accessoire. Ce constat est irréfutable et les illustrations sont nombreuses.
Cette situation est le produit des mécanismes sociaux de régulation et de contrôle, des systèmes dominants de production ainsi que des modes de conception, d'exécution et d'évaluation des programmes et projets de développement. D'une part, les comportements et les mentalités n'ont pas encore totalement intégré la réalité que les femmes rurales sont productrices, opératrices et agents économiques à part entière dans le système de production. D'autre part, les méthodes d'analyse et les mécanismes de prise de décision à la base des choix de développement n'associent pas encore les questions liées au genre.
Les méthodes de planification, jusqu'à ce jour en vigueur, ont occulté l'importance de la contribution des femmes à l'économie nationale. Les planificateurs ne se penchent aucunement sur les effets négatifs ou positifs que toute décision d'investissement a sur ce groupe de population, dont la participation à la constitution du produit national est loin d'être négligeable.
C'est ainsi que la formalisation explicite d'une politique associée à un plan d'actions en faveur des femmes est encore une nécessité et qu'il ne peut en être fait l'économie. Marquer l'identité, la complémentarité et la spécificité de la population féminine en liaison avec la population masculine et associer ces deux groupes dans une même démarche sont une garantie de réponse aux perspectives, préoccupations et intérêts du monde rural en général, des femmes en particulier et, finalement, du pays.
Le but général d'une politique de développement pour les femmes rurales est de:
garantir explicitement leur prise en compte et leur association à tous les programmes et projets de développement en tant qu'agents productifs, à part entière, au secteur agricole et rural et comme agents de la continuité et de la pérennité de la société.
L'intégration des femmes dans le développement est un problème multidimensionnel qui nécessite une approche holistique; des solutions sectorielles ou sous-sectorielles pourraient fournir, à ce niveau, des réponses appropriées à des problèmes déterminés sans pour autant se montrer satisfaisantes dans le contexte général; la cohérence intra et intersectorielle est donc, pour ce qui concerne l'agriculture et le développement rural durables, d'une extrême importance; en conséquence, il est indispensable que toute politique de développement en faveur des femmes rurales:
- s'inscrive dans une logique de politique intégrée conjuguée à une bonne compréhension entre les organismes, institutions et partenaires concernés;
- soit intégrée dans la planification globale du pays et dans celle du secteur agricole et rural;
- concrétise dans les programmes et projets de développement, soit par le développement d'actions exclusivement consacrées aux femmes, soit par l'intégration, la promotion et la participation effectives des femmes dans tous les programmes et projets du secteur agricole et rural;
- consolide par une législation et une réglementation favorables à la reconnaissance de la femme rurale dans tous les aspects de ses rôles productif et reproductif.
La façon d'atteindre le but que se fixe une politique de développement en faveur des femmes rurales ainsi que le type et l'importance des objectifs qui seront développés différeront d'un pays à l'autre. Les variations seront le fait, en plus de la situation politique du pays, du niveau de prise de conscience, d'information, de compréhension et de formation des différents partenaires concernés par cette problématique. Quel que soit le contexte, une politique de développement en faveur des femmes rurales, en plus de son but final, doit être une référence permanente pour les différentes institutions gouvernementales et non gouvernementales pour:
- développer les compétences et renforcer les capacités institutionnelles pour la conception et la mise en oeuvre de stratégies et d'actions favorisant la prise en compte des femmes;
- doter le secteur agricole et rural de programmes et projets intégrés ou spécifiques, conformes au but final de la politique en faveur des femmes et ceux des politiques nationale et sectorielles;
- mettre en place des mécanismes garantissant la coordination, la collaboration et la participation de tous les partenaires, y compris les bénéficiaires principaux (hommes et femmes), aux prises de décision, à l'action et à l'évaluation;
- se fixer, dans le cadre des objectifs globaux du secteur agricole et rural, des objectifs spécifiques, concrets, réalistes, faisables, mesurables quant à leur degré de réussite, orientés vers l'action et en prise directe avec les activités conduites par les femmes dans la production et la transformation agricoles et le monde rural;
- initier un système d'information entre partenaires nationaux, gouvernementaux ou non, régionaux et internationaux; ce qui suppose une capacité de gestion, de recherche de l'information et l'établissement de réseaux.
C'est ainsi que les objectifs de cette politique s'articuleront avec ceux assignés au secteur agricole et rural. Les contenus seront en harmonie et cohérents avec ceux des objectifs retenus pour la politique sectorielle et nationale. Le renforcement de ces dernières passe par la favorisait d'une équité entre hommes et femmes quant à l'accès et le contrôle des ressources, à l'obtention et au profit de bénéfices et à l'élévation du niveau de participation et de la capacité de décision. Des actions et mesures seront prévues pour: s'efforcer d'améliorer le climat juridique et contrecarrer les mentalités rétrogrades, afin de permettre aux femmes d'être les agents et les bénéficiaires du développement agricole et rural durables par une reconnaissance, une adaptation et une explicitation de leurs droits et de leurs responsabilités;
- reconnaître et soutenir la contribution des femmes au développement économique et social comme agents économiques par un accès effectif à leur droit aux ressources, aux facteurs de production, aux services de valorisation des ressources humaines, aux équipements et aux technologies;
- respecter l'interdépendance entre le champ productif et le domaine reproductif et les interpeller de façon opérationnelle et constructive dans les programmes et projets de développement par une coordination des actions améliorant les conditions de travail et garantissant une réelle qualité de vie;
- admettre et stimuler la participation des femmes aux prises de décisions, valoriser leurs connaissances et leurs pratiques, soutenir leurs formes d'organisation par une compréhension de leurs logiques et ouvrir aux femmes les organisations communautaires, populaires et professionnelles et les métiers relatifs au domaine agricole et rural;
- mettre à disposition des hommes et des femmes toutes les informations et formations nécessaires à la reconnaissance des droits et du rôle des femmes et à une meilleure maîtrise des responsabilités des uns et des autres.
La détermination d'objectifs précis et quantifiés pour une situation donnée fait alors partie de la démarche de préparation de la politique de développement pour les femmes rurales (cf. section 2).
Conditions préalables
Les conditions préalables à une politique de développement en faveur des femmes rurales peuvent se résumer ainsi:
- le gouvernement est déterminé à apporter des changements dans l'orientation de ses politiques et à modifier ses pratiques pour aboutir à une véritable prise en compte des femmes rurales dans les processus de décision et de planification ainsi que dans les programmes et projets de développement en cours ou à venir;
- le gouvernement est prêt à apporter et mobiliser les ressources nécessaires pour la préparation et l'application de la politique de développement pour les femmes rurales ainsi qu'à maintenir son appui et son soutien tout au long des phases d'exécution, de suivi, d'évaluation et de révision;
- le gouvernement accorde les différentes institutions sur leurs mandats et responsabilités respectifs et sollicite la participation de tous les partenaires pour un effort commun et l'échange d'informations.
Postulats
Ensuite pour garantir la validité et le sucés de la politique de développement en faveur des femmes, il est indispensable que le gouvernement et l'ensemble des institutions nationales se mobilisent et cherchent un consensus à partir d'un certain nombre de postulats, à savoir que:
- les femmes sont elles aussi porteuses de changement. La prise en compte explicite et entière de leur rôle est primordiale. Les femmes rurales s'investissent et sont impliquées dans toutes les activités de production et de reproduction du système rural. Elles sont continuellement sollicitées et y répondent favorablement. L'accomplissement de leurs tâches et de leurs responsabilités est peu soutenu. Elles sont souvent oubliées dans la distribution du profit résultant de leurs efforts; leur contribution, importante, à la construction du pays est méconnue, non comptabilisée. Prendre en compte les femmes signifie intégration du monde rural et non marginalisait d'un groupe, participation pleine et entière de tous et non discrimination des uns par rapport aux autres, association des intérêts de l'ensemble de la population et non renforcement d'une forme particulière de projets;
- la coutume et la tradition sont les produits de la société et donc sujettes à modification. La reconnaissance des femmes est un des enjeux d'une société équitable. Les droits accordés aux femmes par les textes législatifs et réglementaires doivent permettre de pallier les effets discriminatoires des habitudes acquises et trop souvent admises comme seules références;
- l'économie nationale et le développement agricole et rural sont entre les mains des hommes et des femmes. L'accès aux moyens de production, aux revenus du travail, à leur contrôle et à leur bénéfice sont nécessaires et indispensables à tout agent de production. Tous les intrants et services destinés au monde rural doivent se diriger vers tous les groupes de la population; le renforcement de la capacité d'organisation et de négociation des femmes pour un juste profit est la voie pour consolider leur place et leur rôle dans le processus du développement rural;
- le partenariat entre tous les membres de la collectivité est possible: l'histoire de chaque pays, ancienne ou récente, ainsi que les projets de développement en cours permettent d'affirmer que les femmes sont déjà prêtes à être sur le front du développement de leur société. Elles ont cependant besoin que les hommes soient de véritables partenaires, convaincus de l'importance de la participation des femmes au pouvoir de décision concernant l'unité d'exploitation, la famille et la collectivité. La capacité nationale à traiter les questions d'intégration et celles liées aux spécificité et complémentarités des uns et des autres est l'indispensable charnière pour favoriser ce partenariat.
Principes
Une fois ces points admis, compris et présents dans l'esprit de tous, un certain nombre de principes doivent être suivis auxquels tous les partenaires doivent souscrire:
- la durabilité et la pérennité des ressources humaines, économiques et naturelles: une politique de développement en faveur des femmes prouvera que l'implication des femmes, en fonction de leurs responsabilités et de leurs activités inscrites dans une globalité, renforcera la capacité de répondre aux besoins des générations actuelles sans compromettre le potentiel des générations futures;
L'interrelation permanente des nécessités du monde rural en général et celles des hommes et des femmes en particulier, ainsi que le maintien d'une cohérence entre l'indispensable promotion de la femme et la nécessaire évolution du secteur rural seront garantis par le montage de projets, de programmes et de politiques viables, faisables, acceptables, conformes aux capacités nationales et à leur mobilisation. La dépendance liée à l'appui extérieur sera ainsi abolie;
- l'équité et la justice sociale, ce qui signifie accès équitable des ressources aux facteurs de production, juste répartition des bénéfices. Ceci passe par l'atténuation, sinon la disparition, des différences sociales, économiques dans le rapport hommes-femmes et un accroissement du pouvoir de gestion et de décision des uns et des autres;
- la participation populaire: tous les acteurs du développement seront entendus, encouragés et apporteront leur contribution à la résolution des problèmes qui concernent la collectivité et ce, pour une amélioration des conditions et une évolution positive de la situation;
- le consensus sur l'identification des problèmes et les options, orientations et modes de résolution par tous les partenaires sera obtenu;
- la transparence des démarches, des méthodes utilisées, des résultats obtenus par une information accessible et compréhensible par tous sera recherchée.
Un pays soucieux de l'intégration des femmes au développement devrait pouvoir mettre en oeuvre un processus qui permette, avec l'appui d'une démarche participative, la planification, le contrôle, la prise de décisions, le suivi, la gestion et la mobilisation des ressources nationales et extérieures.
La stratégie devrait privilégier les aspects suivants:
- l'autosuffisance et la gestion des ressources par le renforcement et le développement des capacités nationales pour une planification cohérente intégrant les femmes dès l'initiation du processus;
- l'adhésion des femmes rurales au processus de changement marqué par leur volonté de dépasser les contraintes liées aux traditions;
- la mobilisation de tous par des campagnes d'information sur la réalité de la situation des femmes rurales en utilisant tous les supports et médias disponibles et pertinents;
- l'institutionnalisation du concept d'intégration au développement par l'engagement au plus haut niveau et par la mise en place de structures et de mécanismes performants;
- la présence sur tous les fronts pour que l'intégration des femmes au développement soit inscrite dans tous les agendas;
- la concertation et la coopération entre tous les partenaires concernés par l'amélioration du statut de la femme. La participation à tous les niveaux est requise. L'approche favorisant cette implication demande un système participatif décentralisé ascendant (bottom up). L'engagement des partenaires internationaux est également indispensable pour une harmonisation et une coordination des appuis;
- la cohérence pour aboutir à une politique, des stratégies et des actions concrètes inscrites dans les stratégies sectorielles rurales et agricoles, dans le cadre plus large des objectifs nationaux de développement et des autres secteurs;
- l'action pour une intégration rapide des femmes dans le développement en harmonie avec les rapports hommes-femmes existants, par la mise en oeuvre immédiate de mesures dans les programmes existants;
- la flexibilité pour la préparation et la mise en oeuvre de la politique afin de pouvoir répondre, rapidement, à tout changement et évolution;
- l'actualisation des situations pour des ajustements qui reposent sur la pratique et l'expérience par un système permanent de gestion de l'information, de suivi et d'évaluation; la diffusion des résultats et des changements acquis par la multiplication des expériences positives et des relations soutenues entre femmes.
La formulation d'une politique de développement pour les femmes rurales est le premier pas que puisse faire un gouvernement pour résoudre les problèmes des femmes et changer leur situation. Une politique sert à éviter l'incohérence entre différents plans et programmes adoptés par le gouvernement et entre les diverses mesures qui y sont retenues. Cependant, il faut se rappeler que:
- une politique est un élément d'un tout: elle doit s'inscrire dans le processus de développement du pays et dans les processus de planification retenus par l'Etat, que ce soit au niveau global ou au niveau sectoriel;
- une politique ne peut concerner que ce qui est de la compétence du gouvernement et elle est soumise aux engagements de celui-ci, au contexte politique, économique, social, national et international ainsi qu'aux ressources disponibles et mobilisables;
- une politique ne peut pas tout résoudre à la fois: il est nécessaire d'établir des priorités. Vouloir tout couvrir en même temps est une perte d'énergie, de ressources, d'efficacité et de crédibilité. Une politique, conçue à un moment donné, doit être considérée comme une étape et non comme un aboutissement; elle doit être évolutive et progressive;
- une politique n'a d'effets que si elle est précise, c'est-à-dire qu'il faut y spécifier ce qui doit être fait, comment, avec quelles ressources, quand et qui est responsable. Les critères de mesure des résultats et les indicateurs d'évaluation y sont déjà abordés;
- une politique ne peut être valide que si elle est formulée avec la participation directe de l'ensemble des partenaires pour garantir sa cohérence, son opportunité et sa validité. Un système de consultation associant tous les niveaux est indispensable;
- une politique n'est pas une fin en soi: c'est un support pour guider l'action et rassembler un ensemble de ressources à un moment donné pour accomplir des actions précises.
C'est ainsi qu'une politique de développement pour les femmes rurales ne peut résoudre l'ensemble de la problématique qui concerne les femmes, leur statut, leur rôle, leur fonction, leurs difficultés, leurs préoccupations, leurs désirs. Parallèlement, il existe des domaines où des problèmes graves subsistent et dont la résolution ne relève pas seulement de l'intégration des femmes dans le processus de développement. L'ensemble du monde rural est concerné et la réponse à ces problèmes est souvent de l'ordre des droits de l'homme: droit à des conditions de vie dignes: eau, santé, alimentation, logement, etc. droit à la propriété, droit à l'intégrité et aux choix personnels,...
Une politique orientée et conçue en fonction des besoins et des intérêts des femmes peut aider à réduire les discriminations entre hommes et femmes, entre différentes classes de la société et favoriser une résorption des iniquités. Cependant, il est important de garder présent à l'esprit que l'objectif à long terme est de rendre caduque cet exercice, parce qu'il sera totalement assimilé aux définitions des politiques générales.
Une politique de développement pour les femmes rurales associée à la définition de buts et d'objectifs variera d'un pays à l'autre, d'une situation à une autre. Suivant l'initiateur, le promoteur, l'existence d'une institution responsable des femmes, la présence d'associations, de groupes, etc., la durée de la préparation, les mesures à prendre, les ressources à mobiliser, les informations à rechercher, seront sensiblement différentes.
La préparation d'une politique de développement pour les femmes rurales est à comprendre comme un processus permettant aux décideurs de respecter certaines étapes indispensables, de mettre en relation divers éléments et d'adopter une démarche garantissant l'inscription de cette politique dans tout exercice de planification de développement du secteur agricole et rural.
La préparation d'une politique de développement en faveur des femmes rurales vise:
- la conception d'une politique de développement en faveur des femmes inscrite dans la planification globale du secteur agricole et rural, en cohérence avec celle-ci et avec l'ensemble de la politique nationale;
- la définition d'une stratégie nécessaire à la mise en oeuvre de la politique en faveur des femmes rurales;
- la formulation d'un plan d'actions prioritaires avec et en faveur des femmes rurales, c'est-à-dire un plan qui s'inscrive dans les programmes et projets du secteur agricole et rural ou qui les complète.
Les activités principales pour obtenir ces résultats sont les suivantes:
- une analyse de la situation des femmes dans le secteur agricole et rural et dans les secteurs connexes, de la dynamique existante, des perspectives, des relations entre secteurs et l'articulation avec les orientations nationales de développement;
- un renforcement de la capacité des institutions concernées par le développement d'une politique en faveur des femmes rurales à analyser, décider, planifier, mettre en oeuvre une telle politique;
- le choix des buts et des objectifs prioritaires d'une politique en faveur des femmes rurales en fonction des problèmes, des contraintes et des potentialités;
- la préparation et l'adoption d'une stratégie cohérente avec la politique de développement rural et agricole;
- la confirmation de l'appui des politiques de développement national et l'obtention des ressources nécessaires.
Quatre étapes fondamentales sont à distinguer. Elles sont étroitement liées, progressives, tout en n'écartant pas un possible chevauchement:
Etape 1 Orientation
Etape 2 Information et concertation
Etape 3 Approfondissement de la problématique
Etape 4 Formulation et planification
Etape 1 - Orientation
L'étape 1 débute dès que le pays a exprimé son intérêt et, éventuellement, demandé un appui pour développer une politique en faveur des femmes rurales. Cette étape doit aboutir à:
(a) une clarification institutionnelle;
(b) un diagnostic préliminaire de la situation des femmes dans le secteur agricole et rural.
Clarification institutionnelle
Toute politique qui s'adresse aux femmes peut être revendiquée par de multiples structures gouvernementales comme étant de leur responsabilité. La transversabilité de ce thème et sa dynamique potentielle sont des sources de valorisation, de mobilisation de ressources et de renforcement des compétences.
La clarification de la volonté de développer une politique en faveur des femmes rurales devrait faire l'objet d'une réflexion. Cerner et peser les enjeux, les intérêts, les attentes, etc., de l'initiateur et ceux des partenaires pressentis immédiats et futurs sont une prévention aux revendications de prérogatives, aux conflits institutionnels et aux pressions d'alliances. Chaque institution gouvernementale a ses propres logiques, volontés et objectifs. Circonscrire les mandats respectifs et les domaines de compétence évitera les blocages, facilitera la prise de décision et garantira le succès maximal.
Diagnostic préliminaire
La connaissance de la situation existante est un passage obligé avant de concevoir la politique, c'est-à-dire savoir ce qui se fait, ce qui existe et ce qu'il en a résulté. Elle servira à dégager les problèmes cruciaux, les questions importantes, les contraintes limitantes et les potentialités. Elle facilitera la définition d'objectifs prioritaires, réalistes et cohérents, avec la réalité vécue par l'ensemble de la population rurale. Elle évitera de retendre ce qui a déjà été expérimenté, de faire des erreurs, de dupliquer les actions en cours et de valoriser les résultats positifs.
Parallèlement, une évaluation de la capacité nationale de formuler et mettre en oeuvre une politique et des stratégies sera conduite. Le succès dépend de la performance de cette capacité nationale à prendre des initiatives, à se doter d'instruments d'intervention, à planifier et à suivre les projets et programmes. Un document de projet de renforcement et de développement de la capacité nationale peut, si le besoin s'en fait ressentir, être préparé.
Cette étape sera réalisée par des personnes ayant une compétence dans le domaine, intéressées par le sujet, connaissant le pays et les systèmes de coopération et une capacité à associer les bénéficiaires (femmes et hommes) à la réflexion et à la recherche.
Les résultats escomptés de cette clarification et de ce diagnostic préliminaire seront:
- une institution reconnue responsable du processus de formulation d'une politique en faveur des femmes rurales, consciente de ses engagements;
- des partenaires gouvernementaux identifiés, informés et d'accord avec la responsabilité accordée à une institution précise d'être l'opérateur principal pour la formulation de la politique en faveur des femmes rurales;
- un document d'orientation avec:
* une analyse de la problématique des femmes rurales inscrite dans le secteur agricole et rural et dans les sphères juridique, économique, sociale et politique;
* une analyse des orientations de politique globale et sectorielle du pays, avec les interrelations entre chaque secteur concerné par le développement d'une politique en faveur des femmes;
* une identification des actions en cours, des résultats, des différents intervenants, des ressources existantes;
* une identification des contraintes à la planification et à la mise en oeuvre de programmes et projets prenant en compte les femmes rurales;
* une identification des problèmes, obstacles, contraintes et des potentialités à l'intégration des femmes au développement avec leur hiérarchisation en fonction de l'urgence, de l'importance et de la capacité de résolution du pays;
- la définition d'objectifs provisoires de la politique en faveur des femmes rurales;
- la préparation d'un plan de travail spécifiant les tâches à réaliser et les échéances ainsi que les domaines de recherches complémentaires;
- un projet de développement et de renforcement de la capacité nationale, si besoin est.
Les principales activités conduites seront:
- un travail de réflexion et de précision sur la volonté de conduire un processus de formulation d'une politique;
- la confirmation d'une institution responsable de cet exercice;
- l'accord des partenaires gouvernementaux pour contribuer et collaborer avec l'institution responsable;
- la description de la situation actuelle;
- l'évaluation de la capacité nationale;
- un plan de travail avec une démarche de préparation d'une politique en faveur des femmes rurales s'inscrivant dans le cadre de la politique de développement agricole et rural et dans son processus de planification.
Etape 2 - Information et concertation
Cette étape se conduit en parallèle, ou en faible décalage dans le temps, avec l'étape précédente. Elle vise la collaboration entre tous les partenaires et leur engagement pour obtenir un consensus conciliant les intérêts de tous. La mise en place d'un mécanisme d'orientation et de concertation est indispensable.
Les causes de marginalisait des femmes rurales sont nombreuses. Les questions sociales, économiques et politiques doivent être abordées en reconnaissant leur interdépendance et leur imbrication. La pertinence et l'application de la politique de développement en faveur des femmes rurales dépendent des échanges d'information de qualité, du dialogue, de la discussion et de la participation de tous les acteurs concernés par la situation de la femme rurale.
L'instauration d'un consensus dépend de la participation conjointe de la population et du gouvernement. Pour amener différents groupes à participer, leur identification pertinente avec leurs besoins, leurs intérêts et leurs capacités est impérative. Ensuite, les mécanismes mis en place doivent leur permettre de prendre part à la préparation de la politique et de les engager dans une coopération pour la préparation, la formulation et le suivi de la politique.
L'établissement d'un comité d'orientation et de concertation est une des mesures possibles. Il regrouperait les partenaires étatiques, civils, associatifs et financiers. Il serait nécessaire d'impliquer, d'une part, les nationaux: politiciens, cadres de la planification, de la conception et agents d'exécution, les représentants des organisations non gouvernementales, des communautés rurales, des agriculteurs et agricultrices, des associations. D'autre part, les internationaux représentant les coopérations, les financeras, les organisations non gouvernementales internationales ne sauraient être négligés.
Les décideurs et les responsables président aux décisions d'orientation et d'investissements du pays. Ils sont dans les ministères (ou toute autre appellation des structures d'état) chargés du plan, des finances, de l'éducation, de la santé et naturellement de l'ensemble du bloc développement rural. Ils devraient être pleinement conscients des problèmes posés pour et par la prise en compte des femmes dans le développement, en mesurer l'importance et savoir pourquoi et comment l'intégrer dans les programmes et projets. Ce sont eux qui conçoivent les documents soumis à décision et qui donnent l'accord de financement. Leur adhésion au concept de la participation des femmes au développement et leur conviction de son bien-fondé sont capitales pour passer à une action planifiée et raisonnée.
Les associations, groupes civils et organisations non gouvernementales doivent jouer un rôle essentiel pour garantir la participation de tous. Leur incorporation est nécessaire pour apporter le point de vue des hommes et des femmes à la base. Ce sont également les seuls en prise avec le terrain qui peuvent initier une démarche participative décentralisée.
L'implication des organismes extérieurs ne peut être ignorée car, si pour la plupart ils sont convaincus d'une politique en faveur des femmes, ils sont porteurs de mobilisation de ressources.
Le comité d'orientation et de concertation aurait pour fonction d'obtenir l'appui politique, d'assurer la collaboration intersectorielle, d'amorcer et de soutenir, par le dialogue, le débat orienté vers l'obtention d'un consensus. Il réfléchira sur les implications politiques, financières, structurelles et humaines d'une politique pour les femmes rurales. L'organisation d'une participation de la base sera également à sa charge et fera des propositions pour mettre sur pied des modalités de décentralisation de la concertation.
Au cours de cette étape d'information, de réflexion, se situerait la mise en oeuvre du projet de développement et de renforcement des capacités nationales. Au comité d'orientation et de concertation serait demandé d'informer les membres sur les questions liées aux caractéristiques spécifiques à chaque genre et de susciter les participations au projet.
Un grand nombre de problèmes existants ou potentiels (conflits d'intérêts, luttes d'influence, faiblesse des ressources, émergence difficile des groupes représentatifs des populations bénéficiaires) pourrait être surmonté par le démarrage, dès le début du processus, de la collaboration. Celle-ci peut être soutenue par un engagement à haut niveau politique, une information complète sur les modalités et les effets positifs d'une politique pour les femmes rurales. Une campagne d'information nationale, appuyée par les médias, serait une action à privilégier
Les résultats attendus de cette étape sont:
- une identification des partenaires gouvernementaux et non-gouvernementaux et des personnes ressources;
- un engagement dans le processus de formulation de la politique;
- une prise de conscience et une conviction de l'opportunité et du bien-fondé de l'intégration des femmes au développement;
. une collaboration pour une harmonisation des interventions;
- un démarrage concret de la participation populaire.
Les activités principales à mener sont:
- la mise en place d'un mécanisme d'orientation et de concertation pour le contrôle et le suivi du processus de formulation de la politique pour les femmes rurales;
- un système d'information et de réflexion;
- une campagne nationale d'information.
Etape 3 - Approfondissement de la problématique
Cette étape a pour but d'approfondir et de mieux cerner les problèmes, les contraintes et les potentialités définies à l'étape 1. Elle aboutira à l'identification d'options possibles pour remédier aux problèmes identifiés, éliminer certaines contraintes particulières et valoriser les potentiels existants. Il s'agit de dresser un diagnostic approfondi de la problématique de l'intégration des femmes au développement du secteur rural
Les études spécifiques et recherches complémentaires identifiées lors de l'étape 1 seront conduites et seront les objets principaux de l'approfondissement de la connaissance. Ces études sont orientées sur l'action et conduites en fonction des objectifs prioritaires définis à l'étape d'initiation du processus. Les problèmes seront ainsi beaucoup mieux compris grâce à ces thèmes d'études. Les priorités pourront alors être revues en fonction des résultats puisque le processus s'inscrit dans une démarche flexible.
Chaque étude spécifique s'attachera à l'analyse d'un problème prioritaire, de ses causes et à la détermination de solutions possibles. Le coût prévisible de l'opérationnalisation des options sera également chiffré. Chaque rapport d'étude suivra le même cadre afin de garantir une cohérence entre les différentes recherches pour une combinaison harmonieuse des actions et des mesures.
Pour mener à terme la connaissance approfondie de la situation, l'approche participative doit être totalement utilisée. Si les bénéficiaires directs (hommes et femmes) ne sont pas entendus, différentes options ne pourront être envisagées. Les décisions de priorités demandent que tous les partenaires soient associés.
Le mécanisme d'orientation et de concertation mis en place à l'étape 2 trouvera ici toute son amplitude. Le système décentralisé de participation sera déployé. Une série de consultations, de tables rondes, de rencontres, de débats sera organisée à partir des représentants de l'ensemble des partenaires du comité d'orientation et de concertation. Il faut veiller à ce que la parole des femmes et des hommes ruraux ne soient pas seulement exprimée au travers des mécanismes administratifs, étatiques et élitistes.
Les résultats de cette étape seront:
- une évaluation complète de la problématique de l'intégration des femmes rurales dans le développement grâce au diagnostic préliminaire, les études spécifiques, dont les conclusions principales sont consignées dans un document de synthèse (voir en fin de section: Axes d 'analyse et d 'études pour la connaissance de la problématique d 'intégration des femmes rurales au développement);
- un examen des politiques qui influencent et déterminent la situation des femmes rurales;
- une analyse en profondeur des capacités et des ressources humaines des institutions gouvernementales et non gouvernementales qui s'occupent de l'amélioration du statut et du rôle des femmes dans le développement;
- une description des options proposées pour résoudre les problèmes et valoriser les potentialités.
Les activités menées sont surtout les études spécifiques grâce à une approche participative développée par le mécanisme d'orientation et de concertation.
Etape 4 - Formulation et planification
L'étape de planification et de formulation de la politique vise à comparer les différentes possibilités de répondre à une véritable intégration des femmes au développement et de retenir les stratégies et les orientations d'action les plus pertinentes.
Les différents partenaires sont consultés et associés à ce processus afin que les stratégies et les actions retenues rencontrent un consensus.
Les résultats de cette phase seront:
- la formulation d'une politique de développement pour les femmes rurales;
- les options possibles;
- une stratégie avec les objectifs à atteindre (voir en fin de section: Objectifs d'action), les mesures à prendre (institutionnelles, législatives, politiques) et les ressources nécessaires;
- un plan d'action avec des objectifs quantifiés, les mesures et actions, les investissements nécessaires, les projets en cours concernés et les projets à développer. Un calendrier avec les principales activités sera présenté avec les différentes phases à entreprendre.
Les activités à mener pour ces résultats seront:
- une consultation des partenaires concernés, au niveau décentralisé et national à qui seront présentés des documents provisoires de politique, de stratégie, de plan d'action. Après discussion, les documents sont revus et finalités. Ils contiendront de façon détaillée, les objectifs visés, les actions proposées, les effets possibles de la politique, les priorités de mise en oeuvre, les coûts et besoins d'investissements en ressources et les mesures immédiates à prendre;
- la préparation et la tenue d'une rencontre avec tous les financeras intéressés par des programmes et projets de développement rural et agricole où les femmes sont réellement bénéficiaires à part entière. Il leur sera diffusé le document final avec une présentation claire et argumenté des priorités à financer.
Toute cette préparation fera l'objet de la mise en place d'un suivi, d'une part pour garantir l'aboutissement de cet exercice dans les conditions requises (participation, respect de la cohérence, intersectorialité), et d'autre part, pour poser les jalons du système de suivi de l'application de la politique. Tout au long de cette phase, de nombreuses informations seront recueillies et traitées. Leur analyse et leur évaluation serviront de situation de référence pour mesurer les évolutions et les changements.
AXES D'ANALYSE ET ETUDES POUR LA CONNAISSANCE DE LA PROBLEMATIQUE D'INTEGRATION DES FEMMES RURALES AU DEVELOPPEMENT
Cette liste n'est pas exhaustive. Elle donne les orientations et les points principaux à ne pas omettre. Le contexte spécifique à chaque pays permettra de choisir les axes les plus pertinents.
Dans le champ du politique
Analyse de la politique gouvernementale en faveur des femmes, des textes juridiques nationaux et des textes internationaux ratifiés. Plus particulièrement analyse des lois et réglementations foncières, des mécanismes de financement privés par l'intermédiaire des circuits bancaires et mutualistes, de crédit.
Analyse du plan de développement du pays: objectifs, planification, moyens, ainsi que des politiques sectorielles du développement rural (agriculture, élevage, pêches, environnement) et les effets qu'elles induisent sur la situation globale des femmes.
Analyse du budget national et sectoriel et des affectations budgétaires aux domaines qui concernent les femmes et qui sont réellement orientées vers elles.
Analyse du programme d'ajustement structurel, de ses effets et de ceux de la crise économique sur la situation des femmes.
Dans le champ de la société civile
Repérage et identification de toutes les personnes ressources potentielles, associations, groupes concernés et intéressés par la problématique de prise en compte des femmes dans les politiques et stratégies de développement.
Identification des comités de liaison, de coordination, de réflexion travaillant sur cette problématique et analyse de leur fonctionnement et de leurs activités.
Identification d'événements politiques, sociaux et économiques auxquels les femmes participent et pour lesquels elles ont manifesté clairement leurs intentions.
Dans le champ des institutions
Analyse des rapports des institutions nationales et internationales, du fonctionnement des structures d'intégration de la femme au développement et des mécanismes interinstitutionnels.
Recensement et analyse des systèmes et politiques de financement des bailleurs de fonds nationaux et internationaux présents dans le pays.
Analyse des stratégies développées par les institutions gouvernementales ou non dans les différents domaines qui concernent les femmes: économie, commerce, finances, santé, éducation, etc.
Dans le champ des actions
Repérage, recensement et traitement de la documentation existante.
Recensement de toutes les actions en faveur des femmes conduites par les différents ministères, structures, organisations non gouvernementales, organisations bilatérales et internationales.
Analyse des résultats obtenus, des effets induits et repérage des potentialités et des contraintes à la conduite des actions.
Mesure de la fiabilité et de la validité des statistiques nationales et agricoles prenant ou non en compte les femmes, leur contribution, leur statut,...
Dans le champ de la connaissance des femmes rurales
Connaissance et analyse de l'environnement socio-démographique: population, éducation, santé, assainissement, etc.
Analyse de la situation vécue et exprimée par les femmes dans les différentes sphères de leur vie (juridique, politique, économique, domestique) avec une mise en évidence des difficultés, contraintes, blocages qu'elles connaissent.
Analyse des mécanismes de contrôle, de régulation et de prise de décisions de la société rurale et des pouvoirs accordés aux hommes et aux femmes individuellement et conjointement.
Mesure des contraintes et des opportunités (marge de manoeuvre) des femmes ainsi que de leur contribution à la vie économique, sociale et politique.
Analyse de la participation des femmes au marché du travail agricole avec ses tendances salariales, à la production agricole et particulièrement à la production des cultures commerciales transformées ou non.
Analyse des effets et de l'incidence de l'émigration des hommes sur les activités des femmes ainsi que de l'influence des fluctuations saisonnières du marché du travail sur la charge de travail des femmes.
Mesure du niveau de capacité et de réponse des femmes à s'impliquer dans l'amélioration de leur situation (logique, organisation, fonctionnement).
Mesure de l'ouverture de la société et plus particulièrement des hommes à prendre en compte les femmes dans le processus de développement.
Dans le champ des recherches spécifiques (liées aux problèmes prioritaires)
Mécanismes de crédit, d'accessibilité, d'impact et d'effet pour la valorisation des activités économiques des femmes.
Effets des innovations technologiques introduites dans les filières de production sur le travail, les ressources et les bénéfices des femmes.
Implication des femmes dans les programmes de vulgarisation et de formation du monde rural.
Etude de faisabilité et de rentabilité des activités spécifiques aux femmes dans le domaine de la production, transformation, mécanisation, artisanat.
Etude des modes d'accès et de contrôle des facteurs de production, des services ruraux, des organisations professionnelles.
OBJECTIFS D'ACTION
Caractéristiques
Les objectifs s'inscrivent obligatoirement dans les objectifs assignés au secteur rural: il ne peut être question de développer des objectifs dont le contenu pourrait entrer en contradiction avec ceux retenus pour le monde rural. Il s'agit de renforcer la politique globale du développement rural et de favoriser une équité entre hommes et femmes en termes d'accès et de contrôle des ressources, d'obtention de bénéfices et de capacité de décision.
Les objectifs d'une politique en faveur des femmes sont orientés sur l'action, concentrés sur les intérêts des femmes et les besoins ressentis, réalistes, faisables et quantifiés. Ils sont en prise directe avec les activités des femmes dans la production et la transformation agricoles. Les résultats visés doivent s'inscrire dans les logiques d'exploitation et dans les stratégies développées par les femmes.
Par exemple, dans les programmes de vulgarisation, la politique en faveur des femmes rurales aura pour objectif d'y associer les femmes, en utilisant des méthodes qui favorisent leur prise en compte. Il pourrait s'agir d'impliquer les femmes à la recherche-développement, d'élargir les contenus de vulgarisation aux activités agricoles spécifiques des femmes, aux opérations culturales dont elles ont la charge, de produire du matériel de communication, pédagogique et didactique adapté aux femmes, d'informer et former les vulgarisateurs à l'association des femmes dans leur programme d'activités.
Autre exemple: dans un programme d'équipement du monde rural, il pourrait être question d'expérimenter avec les femmes des équipements et des technologies améliorant leurs conditions de travail, d'élargir la gamme d'équipement et d'outillage des activités liées au transport, à la transformation, au stockage et à la conservation, de répondre à la nécessité de modernisation technologique autant pour les hommmes que pour les femmes, etc.;
Dans les différentes sphères, les objectifs suivants pourraient être développés (cette liste n'est pas exhaustive):
Dans la sphère juridique
L'amélioration et la révision de la législation en faveur des femmes passerait par:
- la reconnaissance des femmes comme agricultrices à part entière;
- la reconnaissance du statut de chef de famille et d'exploitation, en situation de fait, afin que les femmes puissent prétendre, à situation égale, aux mêmes droits, avantages et devoirs que les hommes;
- la reconnaissance à être membre d'organisations professionnelles, agricoles, syndicales;
- la reconnaissance des droits à l'héritage;
- la reconnaissance au droit d'usage et de propriété d'une terre en qualité et en quantité suffisante;
- la reconnaissance d'une capacité à accéder au crédit à des conditions bancaires et financières tenant compte du statut juridique des femmes, de leur potentiel économique et surtout de leur potentiel humain;
- la diffusion et l'explication des textes existants aux femmes et aux hommes pour la connaissance de leurs droits et des limites et des potentialités qu'ils induisent.
Dans la sphère économique
Les contraintes et les potentialités de la situation économique de la femme pourraient permettre le développement d'objectifs axés sur:
- l'ouverture de la recherche sur les questions de genre appliquée aux exploitations et systèmes agricoles et aux logiques paysannes, à la répartition du travail entre sexe, aux alternatives technologiques proposées aux hommes et aux femmes;
- l'élargissement de la recherche et de l'expérimentation aux activités des femmes;
- l'accès aux terres aménagées, réhabilitées, irriguées par des mesures d'attribution favorables aux femmes;
- l'accès à la vulgarisation et l'adaptation des systèmes de vulgarisation en vigueur en fonction des activités des femmes dans les différentes filières de production agricoles, d'élevage, des forêts et de la pêche et de leurs activités dites domestiques tenant compte de leur disponibilité, de leur charge de travail, de leur niveau d'éducation, etc.;
- l'accès à la formation pour conduire, techniquement et avec une gestion rationnelle, des activités économiques rentables et pour devenir des opératrices maîtrisant un métier compétitif face à la concurrence commerciale et valorisante sur le marché du travail;
- l'accès et le contrôle des techniques, technologies, équipement, intrants nécessaires à toutes leurs activités (agricoles, artisanales, d'élevage, etc.) pour la production, la récolte, la transformation, la conservation, le stockage et le transport;
- la satisfaction des besoins en ressources naturelles, leur sauvegarde et leur pérennisation: eau, pâturage, bois, produits forestiers de cueillette;
- l'accès au crédit soit, dans un premier temps, par le développement de modalités de financement ancrées dans les systèmes d'entraide maîtrisés par les femmes soit, préférentiellement, par l'adaptation des systèmes formalisés de crédit (garantie, apport initial, destination, remboursement).
Dans la sphère sociale
L'évolution positive de la sphère sociale doit être appréhendée comme intéressant toute la population. Les objectifs devront être pensés comme appui, support, accompagnement à l'ensemble de ses préoccupations et intérêts. Il pourrait s'agir de:
- l'information et la formation des hommes à l'amélioration du cadre de vie pour un partage équitable des tâches et des responsabilités ainsi que des charges financières; l'accès et le contrôle de l'eau de qualité, en quantité suffisante, à proximité, avec des moyens d'exhausser, de puisage et de stockage facilités et rationnels et avec des pratiques saines de consommation et d'utilisation;
- l'accès et le contrôle de techniques et technologies pour le travail quotidien qui soient améliorées, adaptées, éprouvées, supportables financièrement, et qui utilisent au maximum les innovations, les énergies nouvelles, renouvelables et modernes pour une moindre fatigue et un temps restreint;
- l'accès des hommes et des femmes à l'information et à la formation pour l'amélioration de la qualité de vie: gestion des ressources économiques individuelle et du ménage, nutrition saine et équilibrée, santé, contrôle et choix des naissances;
- le- rééquilibrage et l'amélioration des niveaux d'éducation des femmes par une réelle alphabétisation fonctionnelle pour leur ouvrir les champs de réflexion, discussion et les outils de négociation nécessaires au partenariat et à la participation.
Dans la sphère des décisions
Il incombe à une politique en faveur des femmes de veiller à ce que celles-ci, en relation et en rapport avec les hommes, puissent identifier et définir leurs propres buts et modalités de changement. Leur participation au niveau communautaire et au niveau professionnel, à la décision des priorités, de la gestion et de l'organisation est capitale.
Les objectifs à définir dans ce sens demandent que tous les partenaires reconnaissent que toute personne, quels que soient son sexe, sa classe, son origine et son âge, a des besoins, des intérêts, des attentes et qu'elle a droit et pouvoir sur leur expression, leur maîtrise, leur contrôle et leur résolution. Les objectifs à définir pourraient être orientés vers:
- la participation réelle et effective à la prise des décisions et à la gestion au sein du ménage, de l'exploitation, de la communauté, des organisations paysannes, professionnelles et syndicales;
- l'organisation de mécanismes de discussion et de réflexion pour la détermination des modalités de participation, à part entière, des hommes et des femmes pour l'utilisation et la sauvegarde des ressources naturelles, la garantie d'une eau suffisante et potable, l'attribution des facteurs de production;
- le dépassement des traditions et l'élimination progressive des obstacles de tout ordre (juridiques, civils, sociaux, éducatifs, économiques, politiques) à la participation des femmes au niveau du pouvoir, du contrôle et de la négociation;
- l'implication des femmes dans les processus de vie des programmes et projets de développement;
- l'appui à la création, l'organisation, le fonctionnement, la gestion, la négociation d'organisations féminines par centre d'intérêt lié au monde économique et professionnel ainsi que pour les initiatives privées;
- la valorisation des initiatives de groupes de femmes par des échanges, des voyages, des contacts extérieurs;
- l'animation masculine" pour associer les hommes à cette dynamique et les rendre responsables du devenir de la société qui est étroitement lié à une amélioration de la situation et des conditions vécues par les femmes;
- l'adhésion des femmes aux politiques, programmes et projets qui visent l'amélioration de leur statut, de leur fonction et de leur rôle.
La mise en oeuvre d'une politique de développement en faveur des femmes rurales devrait être assurée par le cadre institutionnel qui a été responsabilité conduire à bien la préparation. Les modifications structurelles sont à éviter. Pour éviter que la politique ne soit dissociée des programmes, projets, activités en cours dans le secteur rural, elle doit être intégrée au fonctionnement des institutions existantes.
Une politique de développement en faveur des femmes rurales peut débuter dès la phase de planification, avec le renforcement de la capacité nationale et avec la prise de décision de mesures d'action immédiate. Ces activités donnent l'élan nécessaire pour maintenir la dynamique tout au long de la préparation et de la mise en oeuvre de la politique.
Pour un pays, un des points essentiels dans la préparation d'une politique de développement en faveur des femmes est sa capacité à élaborer celle-ci, à développer et mettre en oeuvre des plans, et à promouvoir toute activité ayant un impact positif sur l'intégration des femmes et leur prise en compte comme bénéficiaires. Pour rendre plus performante cette capacité, il est souvent nécessaire de concevoir et réaliser un projet pour son développement et son renforcement.
Toutes les personnes du secteur rural et des secteurs connexes, responsables de la planification et/ou de la réalisation des programmes et projets sur le terrain, devraient avoir conscience des questions liées à la prise en compte des femmes dans le développement et pouvoir y répondre. Les orientations à donner au renforcement de la capacité des ressources humaines sont l'acquisition de méthodes et la maîtrise d'outils pour concevoir des politiques et des programmes qui satisfassent, d'une part, aux besoins essentiels et aux intérêts stratégiques des hommes et des femmes et qui, d'autre part, favorisent l'équité dans les répercussions et les bénéfices du changement.
Les objectifs sont d'informer sur les questions liées aux spécificité de chaque genre, de réfléchir sur les implications politiques, financières, structurelles et humaines qu'elles supposent et de fournir les méthodes et les outils permettant d'en tenir compte dès la planification et tout au long du processus des programmes et des projets.
L'axe de cette information-formation s'articule autour de l'analyse différentielle selon les genres qui considéré le rôle et les responsabilités tant des femmes que des hommes dans leur contexte social, politique et économique. Les problèmes spécifiques aux femmes sont réintégrés dans leur cohérence avec le système de fonctionnement de la société. La méthode de l'étude de cas, conçue à partir des programmes et projets de développement en cours dans le pays, est particulièrement indiquée pour maîtriser cette analyse parce qu'elle engage les participants et fournit une expérience sur la manière d'aborder les problèmes.
Cette approche permet, non seulement d'apporter un appui aux ressources humaines, mais aussi d'avoir un effet immédiat au niveau des opérations en cours. Les supports de réflexion sont puisés dans le contenu de la pratique professionnelle quotidienne des personnes impliquées dans ce processus d'information-réflexion-formation.
C'est un mécanisme extrêmement efficace pour intégrer, au niveau de la planification et de la formulation de programmes, les perspectives et les intérêts des femmes. L'expérience, qui a pu être conduite dans certains pays d'Afrique, a montré que l'ensemble des cadres et responsables ayant participé à ce type de projet, en plus d'y être favorable, le considère utile pour l'accomplissement de leurs responsabilités et de leur mandat.
Ce projet peut être mis en oeuvre par les personnes qui sont directement responsables de la préparation de la politique en faveur des femmes. Si leurs compétences dans ce domaine font défaut, elles seront appuyées par des personnes ressources nationales ou extérieures, sachant que c'est la disponibilité d'une capacité nationale performante qui est visée. Au cours de la mise en oeuvre de la politique, son renforcement sera poursuivi. Cette démarche sera réitérée avec l'ensemble des cadres de terrain, agents de développement (vulgarisateurs, formateurs, animateurs, techniciens) pour qu'ils puissent à leur tour saisir et maîtriser les mécanismes d'intégration des femmes dans le développement.
La finalité de ce développement et renforcement de la capacité nationale repose sur le fait qu'il est vain de penser concevoir et formuler des programmes porteurs de résultats si les responsables n'ont pas la compétence pour analyser une situation et déterminer les solutions grâce à des outils pertinents.
Un projet de renforcement des compétences des ressources humaines est fondamental dans le processus d'une politique et à la promotion d'activités ayant un impact positif sur le développement rural en général. En plus de doter le pays de ressources humaines capables de mener à bien la préparation et l'application d'une politique favorable aux femmes, un tel projet contribue à l'appui institutionnel. Il permet de répondre à la nécessité d'initier des réorientations d'intervention dans les programmes en cours, de soutenir des institutions et de faciliter la participation et le consensus. Les investissements en seront optimisés. Un tel projet est un facteur clef au succès de la politique de développement pour les femmes rurales.
Au cours de la préparation et de la mise en oeuvre de la politique en faveur des femmes, le changement dans la méthode d'approche aura un effet immédiat sur les objectifs d'intervention et aussi sur la destination des allocations budgétaires, sans pour autant demander une augmentation des moyens et des ressources humaines. L'introduction, dans les programmes et projets du secteur rural, de propositions nouvelles, de modifications ou de réorientations, apparaîtra rapidement comme une nécessité. Leur concrétisation passera avant tout par des décisions ministérielles, soutenues par des directives de travail. Les différents domaines qui sont en relation directe ou connexe avec le secteur rural seront touchés voir enfin de section: Quelques exemples de mesures d'action immédiate).
Un regard particulier doit être porté sur les décisions et mesures à prendre dans le domaine législatif et réglementaire du foncier. Une politique en faveur des femmes comprend obligatoirement des propositions de changement à apporter à la législation et à la réglementation régissant l'accès et le contrôle d'une terre en qualité et en quantité suffisantes. Les femmes doivent être sécurisées par rapport à ce facteur de production pour assurer et garantir la pérennité des activités de production agricole.
Dès la préparation de la politique, les propositions faites devraient déjà donner lieu à des actions. Si cela n'a pas lieu, il faudra donner suite aux recommandations de la politique concernant les modifications à apporter aux textes, tôt dans la mise en oeuvre. Si elles ne sont pas assez précises, il sera impératif de prévoir un travail d'analyse et d'études dans le champ du foncier pour permettre des prises de décision répondant aux besoins des femmes. Ce travail sera complété par la rédaction de projets de lois, d'amendements législatifs, de nouveaux réglemente. Ils devront être approuvés par les législateurs et les décideurs responsables dans le domaine du foncier. Très souvent, les codes et textes, autres que ceux relatifs au foncier, devront être revus, étudiés et modifiés. Les réglementations foncières et le droit foncier qui les induit ne peuvent être isolés de l'ensemble de la législation.
La mise en oeuvre de la politique sera assurée par un mécanisme institutionnel qui, en plus du respect de la politique, permettra l'information des différents partenaires, le soutien de la réflexion et de l'implication de tous, le maintien de la coordination et des échanges d'information.
Comité de coordination
Un comité de coordination sera chargé de la coordination générale de la mise en oeuvre de la politique. Le comité de coordination et de concertation qui aura été mis sur pied pour la préparation de la politique sera ainsi poursuivi. Sa composition initiale sera maintenue. Des modifications pourront intervenir au fur et à mesure de l'avancement de l'application de la politique en faveur des femmes. Il aura pour fonctions de faciliter l'adoption des législations et l'application des mesures par chaque partenaire. Il examinera régulièrement les orientations de la politique par son suivi et assurera la coordination entre institutions, organismes et financeras.
La participation du Ministère du Plan à ce comité de coordination est impérative. Sans lui, les recommandations et les réajustements financiers et institutionnels, ne seront pas respectés et ne seront pas inclus dans les différents plans de développement concernés par l'intégration des femmes. Tant qu'il n'y aura aucune adhésion et aucune implication visible et active, à haut niveau, les plans d'action découlant de la politique en faveur des femmes en resteront au niveau de simples opérations ponctuelles.
Institution responsable
L'institution responsable la plus appropriée pour la politique de développement en faveur des femmes rurales sera celle qui aura été à la tête de la préparation de la politique. Il s'agira du Ministère chargé du secteur agricole et rural qui est certainement le plus approprié et le plus pertinent pour être le chef de file de cette politique qui s'inscrira dans ses propres politiques, ses stratégies et son fonctionnement.
Cette institution aura pour responsabilité de s'assurer que les mesures nécessaires soient prises par toutes les parties concernées. Elle sera le point de contact et de rencontre de l'information sur l'exécution de la politique qu'elle recueillera pour y être analysée et diffusée. Et, surtout, cette institution sera chargée de l'exécution du plan d'action et de son insertion effective (objectifs et activités) dans les programmes et projets de développement en cours et à venir. Les procédures de mise en oeuvre des actions et des mesures suivront celles déjà existantes.
Le chef de file de la politique en faveur des femmes rurales devra assurer une liaison harmonieuse avec le Ministère, ou la structure, ayant mandat à l'égard de la politique générale pour les femmes. Des modalités communes et un système de relation, d'échangés d'information, de coordination et d'harmonisation seront établis. Ces deux structures veilleront à:
- clarifier respectivement et conjointement leur mandat, leur champ de compétence et leurs responsabilités propres;
- tenir des séances communes d'information, de discussion, de réflexion au niveau central et à chacun de leurs niveaux décentralisés: région, province, département, commune, district;
- s'accorder sur les modalités d'intervention et de financement;
- unir leurs ressources humaines sur le terrain pour un renforcement mutuel de leurs compétences et de leurs complémentarités.
Dans la mesure où le plan d'action aura une grande portée, sa mise en oeuvre demandera la participation concrète d'autres ministères ou organismes. Des responsabilités précises leur seront dévolues. L'institution responsable aura à ce niveau un rôle de suivi et de diffusion de l'information.
Les organisations non gouvernementales seront naturellement représentées au sein du comité de coordination et en contact avec l'institution responsable. Leur rôle sera défini conjointement. Leur participation efficace se situera certainement au niveau du terrain. Elles seront encouragées à créer entre elles une plate-forme commune pour échanger leurs expériences, coordonner leurs activités et participer au comité de coordination. Le secteur non-gouvernemental est un secteur de plus en plus développé avec une audience très large au niveau des populations rurales. Leur exclusion de la mise en oeuvre de la politique et des plans serait une erreur à ne pas commettre
3.4.1 Les ressources humaines
La mise en place d'un processus participatif populaire est déjà un premier point. Il faut y ajouter le choix et la nomination d'agents (du niveau décisionnel au niveau de terrain) qui soient compétents et prêts à assumer leurs responsabilités par rapport à la problématique de la femme et du développement.
Le réflexe de recruter des femmes pour la mise en oeuvre d'actions orientées vers les femmes devrait être raisonné. La réponse 3 l'intégration des femmes se situe au niveau de la compétence a des qualifications. L'échange et le dialogue avec les femmes rurales n'est pas une question de sexe; c'est une question de respect et de reconnaissance mutuelle. Ce n'est pas en augmentant le nombre de femmes dans les structures que la prise en compte des femmes dans les programmes et les projets de développement sera effective. La nature n'a jamais fait la fonction.
Si, a priori, les ressources humaines doivent être autant féminines que masculines, la compétence ne peut en rien être préjugés à partir du critère d'appartenance à un sexe ou l'autre. De même, s'il est souvent convenu, à tort ou à raison, (plus par facilité que par réalité), qu'il est préférable de privilégier des agents féminins pour travailler avec les femmes, ceci n'exclut en rien que les agents masculins doivent, eux aussi, travailler avec les femmes.
Il sera donc retenu de:
- conduire une politique de gestion de personnel en fonction de critères liés 3 la compétence la qualification et la capacité;
- identifier, informer, former le personnel du ministère responsable et des autres organisations collaboratrices (associations, organisations non-gouvernementales, autres ministères) sur les questions liées au genre;
- identifier, recenser, établir des contacts avec les personnes ressources locales tant féminines que masculines;
- valider une méthodologie d'analyse différentielle selon les genres adaptée à chaque pays, produire des documents pédagogiques, techniques et didactiques, les diffuser, les présenter et les expliquer;
- poursuivre les activités de renforcement de la capacité nationale initiées lors de la phase de préparation de la politique en s'attachant tout particulièrement aux aspects liés à la planification, l'amélioration systèmes d'information, la recherche et le suivi-évaluation.
3.4.2 Les ressources financières
Une politique de développement en faveur des femmes rurales associée à un plan d'action ne signifie pas automatiquement la recherche de fonds supplémentaires. Il s'agit de faire en sorte que les ressources financières existantes bénéficient également aux femmes. La mobilisation des ressources financières est donc à comprendre comme une vérification de la destination des investissements et, éventuellement, leur réallocation pour une affectation équitable.
Il sera également nécessaire d'intéresser les organismes de financement à tout le processus de réflexion pour qu'ils s'engagent et apportent leur appui dans le cadre des orientations et des stratégies retenues. La cohérence du plan d'action doit être également maintenue lors des accords de financement extérieurs. C'est ainsi que l'aide au développement pourra avoir tendance à financer des actions spécifiques pour les femmes. Ce soutien est le résultat de la position affirmée par la plupart des organismes financeras pour une intégration des femmes au développement. Il conviendra d'orienter les financements vers les actions prioritaires retenues lors de l'élaboration de la politique et du plan d'actions. En outre, ces actions devront répondre à l'exigence de la cohérence des stratégies du secteur rural. Ce qui signifie qu'un système de régulation et d'harmonisation des financements destinées à des actions pour les femmes est indispensable.
Le ministère chargé du plan et des finances, en collaboration avec le ministère chargé du secteur rural, devra pouvoir répondre à ce souci d'efficacité.. Il ne pourra le faire que si la prise en compte des femmes dans les programmes de développement est inscrite dans les préoccupations de la planification. C'est ainsi qu'il pourra:
- gérer et attribuer les ressources financières en provenance du budget de l'Etat de façon à ce que les bénéficiaires soient également les hommes et les femmes;
- assurer une cohérence financière entre les plans de développement, la politique en faveur des femmes et celle du secteur rural;
- éviter les duplications, les chevauchements et les contradictions d'actions;
- négocier avec les différents bailleurs de fonds les engagements et les investissements;
- établir au sein de la planification gouvernementale des mécanismes qui aient le souci d'insérer les femmes comme actrices et bénéficiaires du développement.
La mise en oeuvre d'une politique de développement en faveur des femmes rurales doit pouvoir s'appuyer, pour le suivi, l'évaluation l'adaptation permanente des plans et des programmes de travail, sur un système d'information efficace. C'est une entreprise de grande envergure comprenant l'établissement et la mise à jour d'un grand nombre de données. Dans la plupart des pays, il existe une quantité impressionnante d'informations sur les femmes. Rares sont ceux qui ont pu suivre et traiter cette variété et diversité de données. Pourtant, la demande existe, est régulière mais n'est pas pour autant satisfaite. Il en résulte une répétition des recherches, des analyses et des diagnostics sans que les travaux précédents puissent alimenter la réflexion et favoriser l'avancement de la connaissance.
Un projet d'appui spécifique à l'institution responsable de la mise en oeuvre de la politique pourra être envisagé pour conduire à bien ce processus de gestion de l'information. Il aura pour objet de renforcer les procédures de collecte et de traitement de l'information, l'établissement de recueil statistique amélioré et la mise sur pied d'un système d'information nécessaire au suivi et à l'évaluation. Un projet de ce type sera également et avant tout bénéfique à l'ensemble du secteur rural, favorisera la mise en relation des différents partenaires intéressés à ce sujet et permettra l'établissement de réseaux basé sur la connaissance de l'existant.
Suivi
Le suivi doit accorder une attention particulière à la réalisation des objectifs et des buts, à la qualité des mesures prises et des actions développées ainsi qu'à l'utilisation des ressources. L'institution responsable concevra un système de suivi. Ses procédures déjà en place seront utilisées et améliorées si besoin est. Des rapports d'avancement seront préparés. Ils contiendront des éléments sur les réalisations, les problèmes et les enseignements. Le comité de coordination en sera destinataire et veillera à ce que les mécanismes de participation populaire mis en place, à tous les niveaux, puissent apporter leurs commentaires et suggestions. La transparence et, donc, l'engagement des différents partenaires seront ainsi garantis.
Evaluation
L'évaluation s'effectuera à échéance régulière, avec une portée plus large que les rapports d'avancement. Elle suivra les procédures habituelles.
Dans les évaluations, il est régulièrement constaté que les mesures de pertinence, d'efficacité, d'efficience, des effets et de l'impact par rapport aux bénéficiaires, occultent souvent les femmes. L'origine provient des modes de conception et de formulation qui oublient la spécification explicite des femmes comme destinataires. L'autre cause est directement le fait de la méconnaissance du type d'indicateurs à développer pour effectuer les mesures.
Le mécanisme d'établissement des indicateurs est identique à celui appliqué pour toute évaluation, à savoir retenir des critères de mesure et d'explication de l'écart entre la situation initiale, la situation escomptée et la situation réelle. Les aspects quantitatifs et qualitatifs sont également retenus.
La situation de référence est la situation initiale appréhendée et analysée pour la préparation de la politique en faveur des femmes rurales. Ensuite, secteur par secteur, objectif par objectif, activité par activité, seront définis des indicateurs qui évalueront le taux et le niveau de participation, de motivation et les résultats obtenus dans la catégorie "femmes" et la catégorie "hommes".
Une confrontation entre ces deux catégories sera effectuée, des hypothèses d'explication seront développées pour trouver les causes de ces différences. Cette comparaison permet, en plus de relever d'éventuelles iniquités, de mieux réajuster des programmes et projets dans une optique de justice, de participation et de pérennité.
Il faut aussi retenir qu'il est inutile de se fixer des indicateurs qui ne seront pas utilisés ni utilisables. Il est préférable de se fixer peu d'indicateurs et de privilégier leur pertinence. La participation aux activités de vulgarisation et de formation, l'augmentation des revenus, la représentation au sein des instances communautaires et professionnelles du monde rural en sont des exemples (voir en fin de section: Quelques exemples d'indicateurs).
Ainsi, l'évaluation permettra de savoir comment la politique de développement en faveur des femmes a contribué à résoudre les problèmes rencontrés par les femmes, surtout en ce qui concerne l'accès aux services ruraux, le contrôle des facteurs de production et l'amélioration du cadre juridique. Les effets et l'impact des programmes et projets de développement sur la situation des femmes seront également mesurés.
L'évaluation veillera aussi à vérifier le niveau d'intégration de la politique en faveur des femmes dans les plans nationaux de développement, sa contribution à la réalisation des objectifs nationaux, les changements provoqués, le renforcement des capacités nationales et la durabilité des investissements.
Régulièrement, la mise à jour de la politique, de la stratégie et du plan d'actions est nécessaire. Cette révision se fera à partir des évaluations des programmes et projets de développement dans le secteur agricole et rural et des résultats constatés quant à l'atténuation des disparités entre hommes et femmes. La redéfinirions des buts et des stratégies sera alors possible et opportune ainsi que les ressources nécessaires.
A chaque actualisation, l'hypothèse à la base de la formulation d'une politique de développement en faveur des femmes rurales devra être présente à tous les esprits: cet exercice particulier doit, à terme, être caduque pour être totalement intégré aux exercices réguliers de la planification nationale et sectorielle.
QUELQUES EXEMPLES DE MESURES D'ACTION
Au niveau de la planification
Attribution d'un mandat spécifique au Ministère du Plan et aux cellules de planification sectorielle pour la prise en compte des femmes dans les programmes de développement par la responsabilisation officielle de personnes qui veilleront à ce que tous les exercices de planification insèrent cet aspect dans leur travail.
Contrôle par le Ministère du Plan que tout programme ou projet présenté par les instances nationales et internationales intègre les spécificité féminines, condition indispensable à son approbation.
Révision des outils statistiques, des méthodes de collecte et de traitement de l'information nécessaires aux prises de décision de planification pour que les données soient disponibles et traitées en les désagrégeant par sexe.
Au niveau de la législation
Lecture, révision et amendement des textes législatifs pour modifier les situations défavorables aux femmes dans l'ensemble des domaines: économique, travail, social, politique, etc. et plus particulièrement en ce qui concerne la reconnaissance d'un statut de citoyen majeur, responsable et actif socialement et économiquement.
Révision des procédures, modalités et réglementations d'accès, de contrôle, de propriété de la terre afin que les femmes n'en soient ni écartées ni marginalisées.
Révision des procédures, modalités et réglementations d'accès au crédit, de capacité à l'acte commercial et bancaire, des modalités de garantie afin que les femmes puissent être recevables par les mécanismes financiers et bancaires et bénéficier de sources de financement.
Au niveau des programmes d'enseignement agricole
Insertion dans les contenus de formation initiale et professionnelle s'adressant aux futurs techniciens, agents et cadres du développement rural (agriculture, élevage, environnement, eaux et forêts, etc.) et ceux en activité, l'apprentissage et la maîtrise de méthodes et d'outils d'analyse liés aux questions de genre.
Développement de cours spécialisés à destination des professionnels (futurs ou en activité) sur la dynamique familiale, ses mécanismes de prise de décision et de gestion, le partage des responsabilités et le contrôle des ressources.
Réorientation des méthodes d'analyse proposées pour la connaissance du milieu afin de développer des modes de réflexion et de compréhension qui permettent l'identification des besoins et des intérêts des hommes et des femmes par rapport à la formation et à l'organisation.
Au niveau institutionnel
Nomination, désignation et responsabilisation officielle d'unités compétentes chargées de l'insertion dans les programmes et projets de développement des questions liées au genre, dotées d'un mandat, d'un profil de poste et de moyens nécessaires et suffisants.
Amorce d'un dialogue équitable et d'une reconnaissance des femmes par le recrutement de personnel féminin formé, compétent et de niveau égal au personnel masculin dans les structures et projets de développement pour des fonctions et des responsabilités égales à celles des agents et cadres masculins.
Mise en place d'un mécanisme interinstitutionnel, incluant la recherche et l'université, pour garantir l'application de la politique, les échanges d'information, la coordination, l'approfondissement de la connaissance de la problématique des femmes rurales.
Au niveau de l'information
Etablissement d'une banque de données sur la situation des femmes rurales par la localisation, la codification, le traitement, l'accessibilité des études, des informations, des recherches et des publications, traitant de cette problématique.
Mise en réseau des groupes, associations, organisations féminines existant dans le pays entre elles et avec celles des pays voisins pour des échanges d'information, des jumelages, des visites.
Campagne d'information nationale destinée à l'ensemble du pays, par les moyens de communication médiatiques, sur la réalité vécue par les femmes, leurs activités, leur rôle et leur importance pour renforcer la conviction de tous, plus spécialement des hommes, qu'un développement sans les femmes est voué à l'échec.
EXEMPLES D'INDICATEURS
Pour une action de vulgarisation
- Nombre et taux global de participation des exploitants agricoles aux activités de vulgarisation: journées d'information, séances de démonstration.
- Décomposition en nombre et taux de participation des hommes et des femmes par rapport
à l'ensemble de la population et par rapport à chaque catégorie.
- Contenu des séances de démonstration.
- Par spéculation, nombre de contenus traités ayant rapport aux opérations culturales conduites par les femmes, ayant rapport aux opérations culturales conduites par les hommes, ayant rapport aux opérations culturales conduites par les deux, ayant rapport à l'ensemble des opérations culturales.
Pour une action de crédit
- Type de crédit accordé: main-d'oeuvre, élevage, transformation, etc.
- Durée du crédit.
- Nombre de crédits par type accordés aux hommes, aux femmes, à l'ensemble.
- Montant global des crédits par type.
- Montant moyen accordé pour chaque crédit aux hommes, aux femmes, par rapport aux crédits accordés dans la catégorie et par rapport au montant global.
- Utilisation et rentabilité des crédits accordés aux uns et aux autres.
- Comparaison de la nature du crédit accordé à la demande exprimée et aux besoins constatés.