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Partie II Mil


Introduction
Tendances de la production
Utilisation
Commerce international, prix sur le marché international et stocks
Commerce intérieur et politiques nationales
Innovations, considérations environnementales et orientation de la recherche
Perspectives à moyen terme5
Résumé et conclusion

Introduction

Le terme "mil" regroupe un ensemble de graminées alimentaires annuelles qui ont pour caractéristique commune la petitesse de leurs graines. Ces céréales sont surtout cultivées sur les terres marginales dans les régions sèches des zones tempérées, subtropicales et tropicales. Les espèces les plus importantes sont le mil pénicillaire, l'éleusine, le millet commun et le millet des oiseaux (voir Annexe I, Les différentes espèces de mil). Le mil pénicillaire compte pour près de la moitié de la production mondiale du mil. C'est l'espèce la plus importante du point de vue des superficies cultivées et de la sécurité alimentaire, car dans plusieurs régions d'Afrique et d'Asie c'est l'une des rares cultures qu'on peut produire. L'éleusine est produite en altitude dans des régions fraîches d'Afrique et d'Asie; c'est à la fois une culture vivrière et un ingrédient apprécié dans la fabrication d'une bière traditionnelle. Le millet commun est utilisé en alimentation humaine en Asie et il entre sur le marché des graines pour les oiseaux dans les pays développés. Le millet des oiseaux est une culture importante dans certaines régions de l'Asie (surtout la Chine) et de l'Europe. Les autres espèces - le panic pied de coq, l'herbe à épée, le millet indien, les fonios et le teff - sont des cultures importantes dans certaines sous-régions ou dans des pays individuels. Chacune des espèces ont des caractéristiques physiques, une qualité de grain, des besoins édaphiques et climatiques, ainsi que des cycles de croissance qui leur sont propres.

Les pays en développement - surtout en Afrique et en Asie - produisent 94 pour-cent de la production mondiale du mil, estimée à 28 millions de tonnes (moyenne 1992-94, Tableau 1). Le mil pénicillaire compte pour environ 15 millions de tonnes, le millet des oiseaux 5 millions de tonnes, le millet commun 4 millions de tonnes et l'éleusine plus de 3 millions de tonnes (Annexe II). Presque toutes les espèces de mil sont produites pour les besoins alimentaires des ménages et le marché local par des paysans pratiquant une agriculture à petite échelle. Le mil pénicillaire est très important pour la sécurité alimentaire dans les régions les plus chaudes et les plus sèches du monde.

Dans les pays développés, la production du mil est très faible et surtout destinée au marché spécialisé des graines pour les oiseaux. De très petites quantités de mil sont transigées sur le marché international.

Les statistiques sur le mil sont généralement rares et incomplètes. Les recensements nationaux distinguent rarement les différentes espèces botaniques. Dans certains pays, on regroupe dans une catégorie générale appelée "autres céréales secondaires", les données sur le mil, le sorgho ou d'autres céréales. Plusieurs statistiques sont des approximations et l'on doit être prudent dans l'interprétation des analyses qui en découlent.

Le mil est généralement mieux adapté que la plupart des autres cultures aux sols secs et infertiles. Il est souvent cultivé dans des conditions extrêmes - températures élevées, précipitations faibles et irrégulières, saison brève, sols acides, très peu fertiles et ayant une faible capacité de rétention en eau. La plupart des espèces de mil ont un système racinaire robuste et profond, ainsi qu'un court cycle de croissance; leur croissance est rapide lorsque l'eau est disponible. Le mil peut survivre et produire de façon relativement fiable de petites quantités de graines dans les régions où les précipitations annuelles sont aussi basses que 300 mm par an. Les besoins minimums en eau sont de 400 mm pour le sorgho et 500-600 mm pour le mais. Quelques espèces (mil pénicillaire et millet commun) sont plus tolérantes aux températures élevées que le sorgho et le mais, mais leur tolérance aux longues périodes de sécheresse est moindre que le sorgho.

Systèmes de production du mil

Dans la plupart des régions du monde, le mil est consommé localement et sert de culture vivrière de subsistance. La production commerciale du mil est risquée, surtout en Afrique, car l'absence de débouchés commerciaux importants signifie que les fluctuations de la production se répercutent de façon particulièrement sensible sur les prix, surtout dans les régions où le mil est la principale culture vivrière. Le mil n'est pas cultivé que pour son grain, on l'utilise aussi pour les pâturages, le fourrage vert ou l'ensilage. L'élevage est une composante importante de la plupart des systèmes de production du mil, les résidus de récolte étant une source importante de fourrage. En Inde, par exemple, quelques variétés locales qui atteignent plus de 3 m de hauteur sont appréciées pour la grande quantité de paille qu'elles procurent, même si leur rendement en grain est relativement faible1.

1 Le fourrage sec du mil a souvent une valeur fourragère totale inférieure à celle du sorgho ou d'autres céréales, car les tiges sont lignifiées et leur teneur en énergie digestible est plus faible. Mais, dans les régions où le mil est cultivé, c'est souvent le seul fourrage disponible.

Dans les pays en développement, la culture du mil est généralement extensive et les technologies améliorées sont peu répandues, sauf dans certaines régions de l'Inde où l'agriculture est plus commerciale. La culture est généralement pratiquée, sans irrigation ni apport d'engrais chimiques, sur des sols légers, bien drainés et pauvres en matière organique. Lorsqu'ils ont les moyens d'irriguer leurs champs, les paysans se tournent vers des cultures plus rentables. Mais certaines régions font exception, comme l'état du Gujarat en Inde, où il y a une forte demande saisonnière pour les résidus de récolte du mil pénicillaire, lesquels servent à l'alimentation des animaux laitiers. Dans les régions où la campagne culturale est suffisamment longue pour permettre deux cultures successives, des cultivars du mil à cycle court sont cultivés sous irrigation avant ou après la culture de rente.

Tableau 1. - Superficies cultivées en mil, rendement et production par région1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

 

Superficie (million d'hectares)

Rendement (t/ha)

Production (million de tonnes)

1979-81

1989-91

1992-92

1979-81

1989-91

1992-94

1979-81

1989-91

1992-94

Pays en développement

34,70

34,40

35,60

0,68

0,73

0,75

23,67

25,00

26,60

Afrique

11,50

15,80

18,50

0,67

0,66

0,61

7,68

10,46

11,36


Afrique du Nord

1,10

1,05

1,96

0,40

0,18

0,28

0,44

0,19

0,55



Soudan

1,10

1,05

1,95

0,40

0,18

0,28

0,44

0,19

0,55


Afrique occidentale

8,30

12,60

14,00

0,67

0,68

0,64

5,52

8,55

9,00



Burkina Faso

0,80

1,21

1,24

0,49

0,54

0,64

0,39

0,65

0,79



Ghana

0,18

0,19

0,20

0,64

0,64

0,82

0,12

0,12

0,17



Côte-d'Ivoire

0,06

0,08

0,08

0,58

0,61

0,84

0,04

0,05

0,07



Mali

0,64

1,19

1,20

0,72

0,69

0,61

0,46

0,82

0,73



Niger

3,01

4,19

4,87

0,44

0,34

0,38

1,31

1,43

1,86



Nigeria

2,40

4,50

5,20

1,04

1,04

0,89

2,50

4,67

4,62



Sénégal

0,93

0,90

0,89

0,60

0,64

0,61

0,56

0,58

0,55



Togo

0,12

0,13

0,13

0,36

0,51

0,50

0,04

0,07

0,06


Afrique centrale

0,63

0,79

0,93

0,59

0,51

0,48

0,37

0,40

0,45



Cameroun

0,13

0,06

0,05

0,75

1,06

1,01

0,10

0,06

0,06



Tchad

0,36

0,54

0,59

0,50

0,40

0,47

0,18

0,22

0,28


Afrique orientale

1,46

1,33

1,46

0,89

0,97

0,91

1,31

1,29

1,33



Ethiopie

0,23

0,25

0,25

0,90

0,95

1,05

0,20

0,24

0,27



Kenya

0,08

0,10

0,09

1,05

0,67

0,65

0,08

0,07

0,06



Tanzanie

0,45

0,23

0,32

0,80

0,94

0,71

0,36

0,22

0,23



Ouganda

0,30

0,38

0,41

1,59

1,53

1,57

0,47

0,58

0,63



Zimbabwe

0,35

0,27

0,25

0,43

0,50

0,27

0,15

0,14

0,07


Afrique australe

0,09

0,11

0,21

0,41

0,49

0,18

0,04

0,06

0,04

Asie

22,98

18,29

16,99

0,69

0,79

0,89

15,75

14,45

15,17


Proche-Orient

0,19

0,18

0,15

1,02

0,58

0,78

0,19

0,10

0,12


Extrême-Orient

22,79

18,41

16,84

0,68

0,78

0,89

15,56

14,35

15,05



Chine

3,98

2,25

1,90

1,45

1,74

1,93

5,79

3,92

3,67



Inde

17,84

15,19

13,95

0,51

0,64

0,77

9,19

9,76

10,70



Myanmar

0,18

0,17

0,20

0,45

0,69

0,66

0,08

0,12

0,13



Népal

0,12

0,20

0,21

0,99

1,16

1,14

0,12

0,23

0,24



Pakistan

0,51

0,44

0,43

0,50

0,41

0,44

0,25

0,18

0,19


Amérique centrale et Caraïbes

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00


Amérique du Sud

0,20

0,04

0,04

1,21

1,49

1,53

0,25

0,06

0,06



Argentine

0,20

0,04

0,04

1,21

1,49

1,53

0,25

0,06

0,06

Pays développés

2,94

4,13

2,49

0,65

0,88

0,72

1,93

3,64

1,79


Australie

0,03

0,03

0,03

1,00

0,88

1,05

0,03

0,03

0,03


Etats-Unis

0,09

0,15

0,15

1,20

1,20

1,20

0,11

0,18

0,18


CEI2

2,79

3,92

2,27

0,63

0,87

0,68

1,76

3,40

1,54

Monde

37,60

38,60

38,10

0,68

0,74

0,74

25,70

28,65

28,38

2 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.
Source: FAO

Pour ces raisons, et d'autres qui seront données dans la section "Tendances de la production", les rendements du mil sont généralement beaucoup plus bas que ceux des autres céréales (cultivées dans des conditions beaucoup plus favorables). Le mil représente 5 pour-cent des superficies cultivées en céréales dans le monde, mais seulement 1,5 pour-cent de la production céréalière mondiale. De plus, les rendements du mil sont très variables d'une campagne à l'autre. Au Niger, par exemple, les rendements du mil pénicillaire ont été de 510 kg/ha en 1988, 240 kg/ha en 1990 et 360 kg/ha en 1992.

Répartition géographique

En Asie, la culture du mil se limite presque exclusivement à deux pays, l'Inde et la Chine. Le Myanmar, le Népal et le Pakistan ne produisent que de petites quantités de mil. L'Inde est le premier pays producteur du mil au monde; sa production est d'environ 11 millions de tonnes par an, soit presque 40 pour-cent de la production mondiale (Fig. 1). Le mil pénicillaire compte pour environ les deux tiers de la production indienne du mil. Il est cultivé dans les régions sèches du pays, principalement dans les états du Rajasthan, du Maharashtra, du Gujarat, de l'Uttar Pradesh et de l'Haryana. L'éleusine est surtout cultivée dans l'état du Karnataka, mais on en produit aussi dans les états de l'Orissa, de l'Uttar Pradesh et du Tamil Nadu. C'est l'espèce la plus importante au Népal et au Bhoutan. La Chine produit environ 3,7 millions de tonnes de mil par an (surtout du millet des oiseaux) dans les provinces de Hebei, Shanxi et Shadong.

En Afrique, la culture du mil est pratiquée dans un grand nombre de pays, notamment au Nigeria (40 pour-cent de la production régionale), au Niger, au Burkina Faso, au Mali, au Sénégal et au Soudan (Tableau 1, Fig. 2). Le mil pénicillaire est largement cultivé au sud du Sahara (dans les pays sahéliens et les régions septentrionales des pays côtiers de l'Afrique de l'Ouest), ainsi que dans les régions sèches de l'Afrique orientale et australe. L'éleusine est surtout cultivée en Afrique orientale et australe; les principaux pays producteurs de cette céréale sont l'Ouganda et la Tanzanie. L'Ethiopie est l'un des rares pays où le teff est une culture céréalière. De petites quantités de fonio blanc sont produites dans l'ensemble de l'Afrique sub-sahélienne, surtout au Mali. Le fonio noir est cultivé dans des bassins isolés au Nigeria, au Togo et au Bénin. Le fonio à grosses graines n'est cultivé que dans le massif du Fouta-Djallon au nord-ouest de la Guinée et dans les régions voisines en Sierra Leone. Le millet des oiseaux et le millet commun sont des cultures très secondaires en Afrique; ils sont cultivés au Kenya et d'autres régions de hautes terres en Afrique orientale. L'herbe à épée est souvent récoltée dans ses formes spontanées en Afrique occidentale; les formes cultivées ne sont trouvées qu'en Asie. En Amérique latine, la culture du mil n'est pratiquée que dans une petite région de l'Argentine.

Figure 1. Principaux pays producteurs du mil.

Figure 2. Importance relative du mil dans le monde.

Dans les pays développés (Groupe II), la culture du mil (presque exclusivement le millet commun) est concentrée dans la Communauté des Etats indépendants (CEI), surtout la Fédération de Russie, le Kazhakastan et l'Ukraine. La production du mil est infime en Amérique du Nord, en Australie et en Europe. Dans certains pays, on cultive du mil lorsque les conditions agro-climatiques sont défavorables lors des semis de la culture principale. Le grain n'est pas toujours récolté et on laisse les animaux paître dans les champs.

Tendances de la production

Dans le monde, les superficies cultivées en mil sont relativement stables depuis deux décennies, soit environ 38 millions d'hectares (Tableau 1). La production et les rendements du mil ont augmenté d'un peu plus de 10 pour-cent dans les années 1980, mais ils sont demeurés stables depuis. La production mondiale du mil est actuellement d'environ 28 millions de tonnes et le rendement moyen de 0,75 t/ha. Cependant, on observe de différences régionales marquées, surtout entre les deux principales régions productrices du mil, l'Asie et l'Afrique (Fig. 3, 4 et 5).

Pays en développement

En Asie, les superficies cultivées en mil ont diminué de 2,4 pour-cent par an entre 1979 et 1994, passant de 23 à 17 millions d'hectares (Tableaux 1 et 2). Cependant, cette diminution a été compensée par une augmentation des rendements (1,5 pour-cent par an). Au cours des trois dernières décennies, les rendements ont presque doublé en Chine - où ils sont parmi les plus élevés au monde - et ils ont augmenté de plus de moitié en Inde. Ce progrès a été obtenu grâce aux programmes d'amélioration et à la diffusion d'hybrides de mil pénicillaire en Inde et de variétés à pollinisation libre de millet des oiseaux en Chine.

Sur ce continent, la tendance de la production a été très influencée par un changement des politiques agricoles chinoises. Dès 1987, l'économie du mil était pratiquement libéralisée en Chine. Auparavant, le gouvernement fixait les quotas de production et les prix à la ferme et à la consommation. Suite à ce changement, les paysans chinois se sont tournés vers des cultures plus rentables tout en cherchant à s'adapter aux nouvelles préférences des consommateurs. Dans ce pays, les superficies cultivées en mil sont passées de 2,3 millions d'hectares en 1989-91 à 1,9 million d'hectares en 1992-94. La production actuelle est environ la moitié des sommets atteints au milieu de la décennie 1980. En fait, le gouvernement a cessé ses achats du mil suite à ce déclin.

Figure 3. Evolution de la production du mil dans le monde, 1979-94.

Figure 4. Evolution des superficies cultivées en mil dans le monde, 1979-94.

Figure 5. Evolution des rendements du mil dans le monde, 1979-94 (moyenne mobile, 3 ans).

Tableau 2. - Taux de croissance du mil, 1979-94.

 

Superficie

Rendement

Production

Production par habitant

(%/an)

(%/an)

(%/an)

(%/an)

Pays en développement

0,3

0,4

0,6

-1,4

Afrique

4,1

-0,6

3,4

0,6


Afrique du Nord

2,7

-2,7

-0,1

-2,6



Soudan

2,7

-2,7

-0,2

-2,5


Afrique occidentale

4,7

-0,4

4,2

1,2



Burkina Faso

3,8

2,0

5,9

3,0



Ghana

0,7

3,0

3,7

0,4



Côte-d'Ivoire

2,6

2,5

5,2

1,3



Mali

5,1

-1,0

4,0

2,3



Niger

3,9

-1,0

2,8

-1,3



Nigeria

7,7

-2,3

5,2

2,2



Sénégal

0,1

1,4

1,5

-1,4



Togo

3,5

-1,5

1,9

-1,2


Afrique centrale

3,6

-1,3

2,3

0,0



Cameroun

-6,1

3,3

-3,0

-5,8



Tchad

5,4

-0,5

4,8

2,0


Afrique orientale

0,5

-0,1

0,4

-2,4



Ethiopie

1,1

0,8

1,8

-1,0



Kenya

3,7

-2,4

1,2

-2,3



Tanzanie

-2,0

-2,4

-4,4

-7,3



Ouganda

2,3

0,5

2,8

-0,5



Zimbabwe

-1,6

-2,6

-4,2

-7,2


Afrique australe

5,9

-4,5

1,1

-1,8

Asie

-2,4

1,5

-0,9

-2,8


Proche-Orient

-2,0

-3,1

-5,0

-7,7


Extrême-Orient

-2,4

1,5

-0,9

-2,7



Chine

-6,1

1,8

-4,5

-5,8



Inde

-1,8

2,7

0,9

-1,2



Myanmar

0,5

1,5

2,0

-0,2



Népal

4,6

1,5

6,2

3,5



Pakistan

-1,8

-1,2

-3,0

-6,3


Amérique centrale et Caraïbes

0,0

0,0

0,0

0,0


Amérique du Sud

-12,5

2,3

-10,5

-12,2



Argentine

-12,5

2,3

-10,5

-11,8

Pays développés

-0,3

0,4

0,1

-0,9


Australie

0,6

-0,5

0,2

-1,3


Etats-Unis

4,3

-0,1

4,3

3,3


CEI1

-0,6

0,2

-0,3

-2,0

Monde

0,3

0,4

0,7

-1,1

1 Communauté des Etats indépendants. Jusqu'en 1991, superficie dans l'ex-URSS.
Source: FAO

L'Afrique est la seule région du monde où la production du mil augmente, ayant passé de 8 millions de tonnes en 1979-81 à plus de 11 millions de tonnes en 1992-94 (Tableau 1). L'augmentation de la production du mil s'est surtout faite durant la première moitié de la décennie 1980. Depuis, elle s'est maintenue par une augmentation des superficies cultivées, surtout au Sahel et, dans une moindre mesure, d'autres pays de la région. Dans plusieurs pays africains, les rendements ont stagné ou diminué (Tableaux 1 et 2), en partie parce que les cultures sont de plus en plus pratiquées dans des régions où les sols sont pauvres et la pluviométrie faible et irrégulière. La production totale a augmenté un peu plus rapidement que la population et la consommation par habitant a progressé de 0,6 pour-cent par an entre 1979 et 1994. Cependant, cette situation devrait se renverser dans un proche avenir. Dans plusieurs pays, les niveaux de consommation de cette céréale-clé n'ont pu être maintenus qu'en augmentant les superficies cultivées. La sécurité alimentaire de plupart des régions productrices du mil demeure incertaine. Les contraintes en terre deviennent plus graves et il est urgent d'augmenter la productivité pour assurer un niveau minimal de sécurité alimentaire.

Pays développés

Parmi les pays développés, le seul producteur important est la Communauté des Etats indépendants (Tableau 1). Les gains de productivité importants réalisés pendant la décennie 1980 ont permis d'augmenter sensiblement la production (les rendements sont passés de 0,63 t/ha en 1979-81 à 0,86 t/ha en 1989-91). Par la suite, la culture du mil a connu une évolution similaire à celle survenue en Chine. Dans la Fédération de Russie, par exemple, les niveaux de production étaient soutenus par des prix qui ne correspondaient pas aux coûts de production et par des quotas de production fixés par le gouvernement. Le marché s'est effondré lorsque ces politiques ont été abolies. Le mil a été remplacé par le blé ou d'autres céréales. La production du mil est passée de 2,3 millions de tonnes en 1989 à 482 000 tonnes en 1994. Traditionnellement, le Kazhakastan produisait du mil pour les autres régions de l'ex-URSS. Au début des années 1990, lorsque ce marché a disparu suite à une diminution de la demande, la production du mil est passée de 1,0 million de tonnes à 300 000 tonnes par an.

Contraintes de la production

Dans les pays en développement, surtout en Afrique, la production du mil est soumise à de nombreuses contraintes - sols peu fertiles, pluviométrie faible et irrégulière, températures élevées, infestation de Striga, mildiou et dégâts causés par les oiseaux.

La pression démographique dans ces pays a entraîné une diminution de la période de jachère et, conséquemment, de la fertilité des sols, ainsi qu'une expansion de l'aire de culture du mil et l'exploitation de terres encore plus marginales. Cela se reflète dans la baisse de rendement observée, au cours de 15 dernières années, dans les principaux pays producteurs du mil en Afrique (Niger, Mali, Nigeria). Une situation semblable a été observée en Asie dans les milieux les plus difficiles, notamment dans l'ouest de l'état du Rajasthan en Inde.

Le mil est cultivé sur de petites parcelles fragmentées, souvent en association (généralement avec une légumineuse et parfois avec le sorgho ou le maïs). L'incertitude causée par l'irrégularité des précipitations et la demande limitée sur les marchés commerciaux amènent les paysans à n'utiliser qu'un minimum d'intrants tels que les engrais chimiques, les pesticides ou la main-d'oeuvre salariée.

L'amélioration génétique du mil est généralement plus compliquée que celle de la plupart des autres cultures, car ces céréales sont produites dans un milieu extrêmement difficile (voir la section "Innovations"). Les programmes nationaux d'amélioration du mil ont débuté beaucoup plus tardivement que ceux des autres cultures. Dans la plupart des pays, les budgets consacrés à l'amélioration du mil sont faibles. De plus, l'expertise acquise dans les pays développés n'est pratiquement pas transférable dans les pays en développement, contrairement à ce qui a pu être fait dans le cas du blé ou du maïs. Parmi les espèces de mil, seul le mil pénicillaire et, dans une moindre mesure, l'éleusine ont fait l'objet de recherches internationales. L'adoption de nouvelles technologies, qu'il s'agisse de cultivars ou de pratiques agronomiques, a été faible, car la vulgarisation est inadéquate et, dans ces milieux extrêmement difficiles, les paysans sont généralement plus réticents à prendre des risques. Le rendement de l'investissement (capital et temps de travail) dans la production du mil peut être moindre que celui obtenu dans une activité agricole autre ou dans des entreprises non agricoles. Enfin, plusieurs nouvelles technologies n'ont peut-être pas suffisamment pris en compte les contraintes très graves que doivent surmonter les paysans.

Amélioration variétale

Les programmes d'hybridation du mil ont ciblé les milieux relativement favorables, bien qu'ils soient plus difficiles que ceux de la plupart des autres cultures. Des hybrides de mil pénicillaire ont été mis au point en Inde et aux Etats-Unis. Ces hybrides destinés à la production de grain réussissent mieux dans les régions où la pluviométrie est fiable. Dans les régions plus sèches, où la pluviométrie est plus irrégulière, il est beaucoup plus long et difficile d'identifier les combinaisons qui puissent donner un hybride pouvant être cultivé à deux fins (grain et fourrage) et qui soit supérieur dans des conditions variables de croissance. Dans ces régions, les chercheurs ont tenté de mettre au point des variétés à pollinisation libre ayant des rendements en grain et en paille stables et adaptés aux conditions pluviométriques prévalantes (cela plutôt que de maximiser le potentiel de rendement dans des conditions plus favorables).

Cultivés avec un peu ou moyennement d'intrants, les rendements en grain des cultivars améliorés du mil peuvent être de 20 pour-cent supérieurs à ceux des variétés locales. Ces variétés améliorées offrent un avantage encore plus important; elles arrivent souvent à maturité plus rapidement et elles ont ainsi plus de chance d'échapper aux sécheresses. Des cultivars améliorés sont cultivés en Chine (millet des oiseaux), dans la Communauté des Etats indépendants (millet commun), en Inde (mil pénicillaire) et aux Etats-Unis (millet commun, millet des oiseaux et mil pénicillaire), mais leur adoption ailleurs dans le monde est très faible. Par exemple, au Niger, le quatrième pays producteur au monde, les variétés améliorées ne couvrent que 5 pour-cent des superficies cultivées en mil; cela s'explique, en partie, par les systèmes de multiplication et de distribution des semences qui sont inadéquats.

Utilisation

Le mil représente moins de 2 pour-cent des céréales utilisées dans le monde. Néanmoins, il est très important dans de nombreux pays des zones tropicales semi-arides, où les faibles précipitations et la pauvreté des sols limitent la pratique d'autres cultures. Le mil est presque exclusivement utilisé dans les pays en développement; cela d'autant plus que la production et l'utilisation du mil dans la Communauté des Etats indépendants, le principal producteur dans les pays développés, ont fortement chuté. Dans la majorité des pays, l'information sur l'utilisation du mil est incomplète mais on estime qu'environ 80 pour-cent de la production mondiale (plus de 95 pour-cent en Asie et en Afrique) est utilisée en alimentation humaine. Le reste de la production sert à l'alimentation animale (7 pour-cent), d'autres utilisations (semences, bière, etc.,) ou est perdu (Tableau 3).

Tableau 3. - Types d'utilisation du mil par région et dans certains pays sélectionnés, moyenne 1992-94.


Alimentation humaine ('000 tonnes)

Alimentation animale ('000 tonnes)

Autres utilisations ('000 tonnes)1

Utilisation totale ('000 tonnes)

Consommation par habitant (kg/an)

Pays en développement

21776

966

3767

26509

5,08

Afrique

8673

187

2328

11188

13,40


Burkina Faso

683

2

126

811

68,52


Ethiopie

108

0

153

260

1,97


Mali

658

3

119

781

74,63


Niger

1440

17

259

1716

162,45


Nigeria

3315

100

1155

4570

31,50


Ouganda

517

20

95

633

25,93


Sénégal

505

5

83

593

61,61


Soudan

364

20

76

460

14,14


Tanzanie

177

2

53

233

6,41


Tchad

217

0

41

258

33,73

Asie

13103

748

1433

15284

4,17


Chine

3277

327

257

3861

2,74


Inde

9216

283

1100

10599

10,23

Amérique centrale et Caraïbes

0

0

0

0

0,00

Amérique du Sud

0

31

6

37

0,00

Pays développés

513

970

323

1805

0,40


Amérique du Nord

0

180

0

180

0,00


Europe

0

4

1

5

0,00


CEI

504

736

316

1555

1,73


Océanie

0

1

0

1

0,00

Monde

22289

1936

4090

28314

4,00

1 Semences, produits manufacturés et pertes.

Alimentation humaine

La consommation du mil par habitant varie grandement d'un pays à l'autre. Elle est plus élevée en Afrique, où le mil est une denrée de base essentielle dans les régions les plus sèches. Le mil représente environ 75 pour-cent de la consommation totale de céréales au Niger et plus de 30 pour-cent dans la plupart des autres pays sahéliens. Il est également important en Namibie (25 pour-cent de la consommation céréalière totale) et en Ouganda (20 pour-cent).

En Asie, l'utilisation du mil en alimentation humaine est importante dans certaines régions de l'Inde, de la Chine et du Myanmar. Elle est négligeable en Amérique latine, dans les Caraïbes et dans les pays développés, à l'exception de l'ex-URSS jusqu'à la fin des années 1980. Dans ce pays, le processus de transition économique a eu un effet très dépressif sur la production et l'utilisation du mil.

Le mil est un aliment très énergétique, nutritif, particulièrement recommandé pour les enfants et les personnes âgées ou en convalescence. La façon d'apprêter le mil varie d'un pays à l'autre, même à l'intérieur d'un pays donné. Il s'agit surtout de bouillies et de pains ressemblant à des galettes. Cependant, la farine de mil devient rapidement rance et elle ne peut être conservée que pour une courte période de temps. Traditionnellement, le grain est pilé dans un mortier. Mais, la préparation mécanique est de plus en plus populaire - le grain est alors passé dans une décortiqueuse et un moulin à farine. Cette méthode soulage d'un travail laborieux. De plus, elle permet généralement d'améliorer la qualité de la farine.

A l'échelle mondiale, la consommation du mil a très peu augmenté au. cours des 30 dernières années, alors que celle des autres céréales a presque doublé. Le mil est aussi nutritif que celles-ci; il est parfois supérieur2. Cependant, la demande des consommateurs a chuté. Plusieurs facteurs expliquent cette situation, entre autres: un changement des préférences alimentaires qui a favorisé le blé et le riz (des denrées importées peu chères sont disponibles dans plusieurs pays), les approvisionnements irréguliers, l'augmentation des revenus et l'urbanisation rapide. En outre, dans les centres urbains principalement, le coût d'opportunité pour le temps de travail des femmes a favorisé l'adoption de produits alimentaires déjà transformés (riz usiné, farine de blé, etc.,) qui sont plus faciles et plus rapides à apprêter.

2 La teneur en protéines du mil pénicillaire, du millet commun et du millet des oiseaux est comparable à celle du blé, de l'orge et du maïs. L'éleusine a une teneur un peu inférieure, mais la qualité des protéines est généralement aussi bonne, sinon supérieure, à celle des autres céréales. L'éleusine est riche en calcium et en fer, et contient des niveaux relativement élevés de méthionine, un acide aminé qui fait défaut dans plusieurs céréales tropicales.

Alimentation animale

L'utilisation du grain de mil en alimentation animale est très secondaire. On estime que moins de 2 millions de tonnes, environ 7 pour-cent de l'utilisation totale, sont destinés à l'alimentation animale - par rapport à environ 30 millions de tonnes pour le sorgho, soit presque la moitié de la production totale de cette culture. Dans les pays en développement, cette forme d'utilisation est pratiquée en Asie, mais elle est négligeable en Afrique. Cependant, les résidus de récolte du mil est une ressource essentielle dans les systèmes agro-pastoraux où le mil est cultivé.

L'estimation de l'utilisation du grain du mil en alimentation animale repose en bonne partie sur des hypothèses faites pour la Chine, le troisième pays producteur au monde. En fait, on dispose de peu d'information confirmée sur l'utilisation du mil en alimentation animale dans ce pays. Des calculs très approximatifs sur l'utilisation du mil en alimentation animale dans la Communauté des Etats indépendants permettent d'établir à environ 1,0 million de tonnes par an l'utilisation ainsi faite du mil dans les pays développés (Tableau 3). L'Europe occidentale, l'Amérique du Nord et le Japon utilisent ensemble un peu plus de 200 000 tonnes, presque exclusivement comme graines pour les oiseaux. L'utilisation récente du mil pénicillaire comme substitut au maïs fourrager dans les exploitations piscicoles, laitières et avicoles en Inde et dans le sud-est des Etats-Unis n'est pas bien documentée. Elle ne représente actuellement qu'une toute petite partie de l'utilisation du grain du mil en alimentation animale.

Des essais d'alimentation ont montré que le grain du mil pénicillaire se compare favorablement au maïs et au sorgho comme ingrédient énergétique et protéique dans l'alimentation de la volaille, des porcs, des bovins et des ovins. Alors comment expliquer que le mil soit si peu utilisé. Premièrement, le mil est cultivé sur des terres marginales et la production est à peine suffisante pour satisfaire les besoins alimentaires des ménages; très peu de mil est disponible pour les animaux. Deuxièmement, la production varie considérablement d'une année à l'autre, car la pluviométrie est très variable et des sécheresses sévissent dans les principales régions productrices. Il est difficile d'intégrer la production du mil à des activités intensives d'élevage. Troisièmement, les rendements du mil sont généralement moindres que ceux des autres cultures produites commercialement. Les coûts de production et de transport sont souvent prohibitifs par rapport aux autres céréales fourragères.

Autres utilisations

Il y a peu d'autres formes d'utilisation du mil. Au Zimbabwe, de petites quantités d'éleusine sont utilisées par des brasseries commerciales. Des technologistes alimentaires ont évalué des farines composées dans lesquelles on trouve du mil pénicillaire, mais l'application commerciale de cette technologie reste limitée.

Commerce international, prix sur le marché international et stocks

Le commerce international du mil se situe entre 200 000 et 300 000 tonnes (Tableau 4a et b), soit environ 0,1 pour-cent du commerce mondial des céréales ou 1,0 pour-cent de la production mondiale du mil. Les principaux pays exportateurs sont l'Inde, les Etats-Unis, l'Argentine et la Chine qui réalisent ensemble environ les deux tiers des exportations recensées. Une partie importante (environ 100 000 tonnes) du commerce international consiste en exportations de millet commun effectuées par les Etats-Unis, l'Argentine et l'Australie vers des pays développés. Les exportations indiennes du mil pénicillaire sont de 60 000 tonnes. La Chine exporte depuis quelques années un certain volume de millet des oiseaux.

La Communauté européenne3 effectue plus de 50 pour-cent des importations totales. En 1992-94, elle a acheté en moyenne 145 000 tonnes du mil par an (Tableau 4b). Les autres principaux pays importateurs sont le Japon, la Suisse et le Canada; les importations de ces pays sont régulières. Par contre, des pays comme le Kenya, la Mauritanie, le Nigeria, la Tanzanie et l'Ouganda ont cessé d'importer du mil (du moins de façon qui soit recensée).

3 L'Accord Lomé IV permet aux pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) d'exporter vers la Communauté européenne jusqu'à 60 000 tonnes par année sans taxe à l'importation.

En marge de ce commerce international officiel, des quantités importantes de mil sont commercialisées dans certaines sous-régions de l'Afrique entre régions excédentaires et déficitaires. En Afrique de l'Ouest, par exemple, il y a, lorsque les récoltes sont bonnes, un mouvement de mil allant des régions productrices vers le Sud, où se trouvent des régions plus pluvieuses mais déficitaires en mil, et vers le Nord, pour approvisionner les populations nomades.

Le volume du commerce international recensé a diminué légèrement au cours des 20-30 dernières années et il y a eu un léger changement des destinations. Les importations des pays développés a eu tendance à diminuer au cours des deux dernières décennies. Les importations des pays en développement ont été stables durant la décennie 1960, elles ont augmenté durant la décennie 1970, puis elles ont diminué, les importations du mil étant remplacées par des importations plus grandes de blé et de riz. Les pays développés comptent actuellement pour 70 pour-cent des importations mondiales recensées, par rapport à environ 50 pour-cent au début des années 1960.

Tableau 4a. Commerce international du mil ayant été recensé: exportations1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

Exportations

1979-81
('000 tonnes)

1989-91
('000 tonnes)

1992-94
('000 tonnes)

Afrique

57,9

26,4

20,2


Mali

0,02

15,0

18,0


Niger

36,7

0,1

0,0


Soudan

2,1

1,3

0,0

Asie

12,0

16,8

84,6


Chine

8,7

4,6

21,6


Inde

0,0

7,0

58,5

Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud et Caraïbes

145,9

119,1

90,3


Argentine

112,9

41,0

42,9


Etats-Unis

33,0

75,5

45,5

Europe

20,5

33,0

43,7


Communauté européenne (12 pays)3

15,6

22,6

28,3


Hongrie

4,4

6,9

13,0

Océanie

14,6

13,6

16,3


Australie

14,6

13,6

16,3

Monde

250,9

208,7

255,0

Pays en développement

181,9

84,0

147,4

Pays développés

69,0

124,7

107,6

2 Zéro lorsque le volume est inférieur à 50 tonnes.
3 Incluant le commerce entre les pays membres.
Source: FAO

Tableau 4b. - Commerce international du mil ayant été recensé: importations1.

1 Chaque entrée est la moyenne des trois années couvertes par la période indiquée, ex. 1979-81.

Importations

1979-81
('000 tonnes)

1989-91
('000 tonnes)

1992-94
('000 tonnes)

Afrique

82,0

7,9

40,9


Angola

0,02

0,0

21,7


Côte-d'Ivoire

0,0

2,6

1,2


Gabon

0,0

0,0

0,1


Mauritanie

1,0

0,0

0,0


Mali

40,0

0,0

0,5


Niger

8,0

2,4

0,5


Nigeria

26,7

0,5

0,0


Sénégal

0,0

2,1

15,0


Soudan

0,0

0,0

0,3


Zimbabwe

0,2

0,0

0,3

Asie

58,9

40,3

44,3


Japon

53,1

23,7

20,3


Koweït

1,1

0,3

0,5


Malaisie

0,7

2,1

2,4


Arabie Saoudite

1,4

1,5

2,8


Singapour

0,4

1,1

0,7


Thaïlande

0,8

1,7

1,8

Amérique du Nord, Amérique centrale, Amérique du Sud et Caraïbes

4,0

26,2

18,1


Brésil

3,8

3,7

5,8


Canada

0,0

5,9

8,2

Europe

145,7

145,5

155,4


Autriche

2,3

1,2

0,8


Communauté européenne (12 pays)3

114,9

131,5

145,2


Suisse

26,0

9,2

8,2

Océanie

0,8

0,8

5,7

Monde

291,4

220,8

264,3

Pays en développement

90,5

43,8

75,4

Pays développés

201,0

177,0

188,8

2 Zéro lorsque le volume est inférieur à 50 tonnes.
3 Incluant le commerce entre les pays membres.
Source: FAO

Note: Certains pays exportateurs ne rapportent pas leurs ventes de mil ou les regroupent avec d'autres céréales; cela explique en bonne partie la divergence entre les importations et les exportations.

Le commerce international du mil est contrôlé par quelques sociétés spécialisées. On pratique généralement une vente sur échantillon. Seule l'Argentine aurait établi des normes officielles de qualité pour ses exportations. Les prix sur le marché international sont très volatils. Ils dépendent grandement du volume des inventaires. En général, ils ne sont pas corrélés à ceux des autres céréales comme le maïs, le sorgho et l'orge. Les cours4 ne sont pas publiés sur une base régulière ou enregistrés si on en croit les statistiques officielles. Le Tableau 5 présente les prix d'exportation du mil en Argentine, en Australie et aux Etats-Unis. La grande variabilité des prix, même à l'intérieur d'une année donnée, s'explique par la petitesse du marché; le volume transigé est faible et il y a très peu d'acheteurs et de vendeurs.

4 Les cours internationaux sont publiés dans le Public Ledger, Londres, pour les importations du Royaume-Uni et dans le STAT (STAT Publishing, Blaine, WA 98230, BC, Canada) pour les exportations de l'Argentine et des Etats-Unis.

Dans les principaux pays exportateurs, les rendements du mil sont beaucoup inférieurs à ceux des autres céréales, et compte tenu du coût d'opportunité à cultiver du mil plutôt que d'autres cultures, les prix doivent être beaucoup plus élevés pour rentabiliser cette culture. Aussi, les prix sont généralement plus élevés que ceux des autres céréales, sauf en Inde, où les prix du mil et du sorgho sont presque égaux. Ces prix n'incitent pas à utiliser le mil dans les aliments du bétail. Il est rare qu'on remplace le sorgho ou le maïs par du mil dans la composition des aliments du bétail. Les prix du mil doivent alors être très bas.

Tableau 5. Prix annuels moyens d'exportation du mil.

Année

Argentine
($US/tonne)

Etats-Unis
($US/tonne)

Australie
($ US/tonne)

1979-81 moyenne

129

186

224

1983

147

175

251

1984

166

176

254

1985

107

171

210

1986

139

151

195

1987

108

154

162

1988

123

173

110

1989

190

177

249

1990

143

188

318

1991

107

156

249

1992

114

170

249

1993

156

223

245

1994

228

254

325

Source: FAO

Les stocks mondiaux du mil, évalués présentement à 3 millions de tonnes, ne représentent que 1,0 pour-cent des stocks mondiaux des céréales. La plupart des stocks non commerciaux (non recensés officiellement) sont conservés par les paysans des pays en développement pour la consommation du ménage, les semences et un petit commerce sur les marchés locaux. Ces stocks sont d'une importance vitale pour la sécurité alimentaire des ménages et de la communauté, mais ils ne sont pas significatifs à l'échelle du commerce international.

La plupart des espèces de mil se prêtent très bien au stockage. Elles peuvent être conservés pendant 4-5 ans dans des installations aussi rudimentaires que les greniers traditionnels. Le péricarpe dur des graines protège l'endosperme de l'attaque des insectes. De plus, les graines sont généralement récoltées et stockées dans des conditions sèches. Aussi, la production peut varier considérablement d'une année à l'autre, mais il est techniquement possible de reconstituer les stocks après une mauvaise récolte.

Commerce intérieur et politiques nationales

Dans plusieurs pays en voie de développement, les canaux de commercialisation du mil ne sont pas très développés. Trois raisons principales expliquent cette situation:

· l'offre est irrégulière et éparse;

· les distances entre les régions productrices et les principaux centres urbains sont grandes; et

· la demande dans les centres urbains est limitée.

Seulement 15-20 pour-cent du mil pénicillaire produit en Inde, et peut-être 5-10 pour-cent en Afrique, entreraient dans un système de commercialisation. Plusieurs pays en développement ont une réglementation permettant d'intervenir sur les marchés pour stabiliser les prix intérieurs du mil. Mais, cette politique n'est effectivement appliquée que dans quelques pays. Compte tenu des grandes variations interannuelles des récoltes, il est souvent difficile pour le gouvernement de soutenir de façon adéquate les revenus agricoles tout en maintenant des stocks adéquats en prévision des mauvaises années. Enfin, plusieurs gouvernements n'incluent pas le mil dans leurs programmes de soutien des prix.

Innovations, considérations environnementales et orientation de la recherche

Les recherches sur le mil ont surtout porté sur le mil pénicillaire, l'espèce la plus importante. L'adaptation est un problème plus difficile à résoudre chez le mil que chez la plupart des autres cultures. Le mil pénicillaire est originaire d'Afrique occidentale. Il a évolué dans un milieu difficile, en présence d'un grand nombre d'insectes et de maladies. Les variétés locales, issues de la sélection opérée par l'homme et la nature, ne donnent que de faibles rendements, mais elles sont relativement tolérantes à la plupart des aléas. Les variétés améliorées introduites d'Asie, d'Afrique orientale ou des Etats-Unis, où ces problèmes sont moins graves, n'ont généralement pas été supérieures aux variétés locales. Au contraire, le matériel végétal introduit a eu de graves problèmes d'adaptation, car il manque de tolérance aux températures élevées, les plantules ne résistent pas aux vents de sable et il est plus sensible aux maladies et aux insectes.

L'amélioration de la tolérance à la sécheresse - un problème important dans le milieu où le mil est cultivé - est difficile, car il n'est pas aisé de simuler correctement les conditions de sécheresse et l'amélioration de la tolérance à une phase de croissance donnée risque de se traduire par une sensibilité plus grande à une autre phase.

Malgré ces difficultés, les programmes nationaux et internationaux de recherche ont fait des progrès importants. L'augmentation des rendements du mil pénicillaire dans les pays en développement, surtout en Inde, a été rendue possible grâce à la mise au point d'hybrides et de variétés à pollinisation libre. Ces cultivars améliorés ont été largement adoptés, notamment par les paysans de subsistance dans un milieu relativement favorable au mil (ex. dans les états indiens du Gujarat, de l'Haryana et du Maharashtra). Le faible taux de semis (3-4 kg de semences/ha) et le taux élevé de multiplication (200 à 500 fois par génération) ont favorisé la multiplication des semences de ces cultivars et leur adoption.

En Afrique, les hybrides n'ont pas encore eu un impact sensible sur la production, car la vulgarisation et l'industrie semencière sont peu développées. Cependant, des variétés améliorées ont été adoptées en Afrique australe. Le rendement en grain de ces variétés est légèrement supérieur à celui des variétés traditionnelles, mais leur cycle de croissance est plus court et elles risquent moins de subir les sécheresses en fin de saison.

La dégradation de l'environnement est un problème commun à plusieurs cultures, mais il est particulièrement grave dans le cas du mil. La croissance démographique a entraîné une réduction de la période de jachère (ce qui a affecté la fertilité des sols) et l'expansion de l'aire de culture du mil sur des terres encore plus marginales. Ce phénomène est évident en Afrique. Sur ce continent, les superficies cultivées ont augmenté au cours des 15 dernières années, mais les rendements ont diminué. Ce problème est moins grave en Asie. Cependant, dans les milieux particulièrement difficiles, comme ceux trouvés au Rajasthan, l'exploitation des terres marginales rendra plus difficile les futures gains de productivité.

L'objectif principal de la recherche sur le mil demeure la fiabilité des rendements en grain et en fourrage. La recherche s'oriente présentement dans deux grandes directions:

· la diminution du cycle de croissance du mil pour atteindre 70-80 jours (par rapport à environ 90 jours actuellement), afin de permettre à la plante d'échapper aux sécheresses qui surviennent en fin de campagne;

· l'amélioration de la tolérance aux sécheresses qui surviennent en milieu de campagne.

Les programmes d'amélioration collaborent davantage avec les paysans, afin de développer des technologies qui tiendront mieux compte de leurs contraintes et qui auront plus de chance d'être adoptées. Une attention particulière est accordée à la résistance durable au mildiou et aux maladies foliaires. D'autres objectifs importants de recherche sont les suivants:

· l'identification des sources de résistance au Striga et la mise au point de moyens de lutte qui permettront de réduire les pertes causées par cette plante parasite, surtout en Afrique de l'Ouest;

· l'élaboration de stratégies de lutte intégrée contre les foreurs des tiges.

Perspectives à moyen terme5

5 Couvre la période allant de 1992-94 à 2005. Les perspectives de la production se fondent sur une estimation des superficies cultivées et des rendements, prévus à partir des tendances récentes et en tenant compte de certains ajustements pour des pays individuels; on assume qu'il n'y aura pas de changements majeurs dans les politiques. Les perspectives de la demande sont basées sur les prévisions démographiques des Nations Unies et sur les taux de croissance des revenus prévus par la Banque mondiale.

La production mondiale du mil devrait passer de 28 millions de tonnes (moyenne de 1992-94) à environ 33 millions de tonnes en 2005 (Tableaux 6 et 7). L'augmentation proviendra principalement des pays en développement, où le taux de croissance devrait être de 1,4 pour-cent par an et la production devrait passer de 27 millions de tonnes en 1992-94 à 31 millions de tonnes en 2005. L'Afrique devrait avoir le plus fort taux de croissance (2,4 pour-cent par an) et la plus forte augmentation de la production.

A l'échelle mondiale, la croissance proviendra principalement d'une augmentation des rendements (Tableau 7). En Afrique, les superficies cultivées augmenteront (1,1 pour-cent par an), ainsi que les rendements (1,4 pour-cent). Cependant, l'augmentation de la production restera inférieure à la croissance démographique. Sur ce continent, la consommation par habitant diminuera. En Asie, l'augmentation devrait être faible et la production passer de 15 millions de tonnes en 1992-94 à 16 millions en 2005. Elle proviendra surtout d'un gain de productivité - les rendements devraient passer de 0,9 t/ha en 1992-94 à 1,1 t/ha en 2005. La production augmentera surtout en Inde. En Chine, les rendements du mil sont déjà parmi les plus élevés du monde. Ils devraient augmenter encore, surtout si l'on met au point de nouveaux hybrides et si la culture des hybrides, encore peu pratiquée, se répand. Toutefois, la production totale chutera probablement, car l'utilisation des terres se modifie en faveur d'autres productions agricoles ou activités économiques.

Tableau 6. - Production, utilisation et commerce du mil ('000 tonnes), 1992-94 à 2005.

 

Moyenne 1992-94 (situation actuelle)

2005 (situation prévue)

Production

Utilisation totale

Alimentation humaine

Alimentation animale

Bilan commercial1

Production

Utilisation totale

Alimentation humaine

Alimentation animale

Bilan commercial1

Pays en développement

26592

26509

21776

966

83

31394

31421

25510

1542

-27

Afrique

11 358

11 188

8673

187

170

15072

15138

11 705

438

-66


Afrique du Nord

554

467

365

26

87

765

738

499

136

27


Afrique occidentale

8986

8921

6987

129

65

12024

12051

9430

243

-27


Afrique centrale

447

435

356

4

12

505

502

437

10

3


Afrique orientale

1 332

1 326

929

29

6

1 740

1 792

1289

49

-52


Afrique australe

39

39

35

0

0

39

55

50

0

-16

Asie

15171

15284

13103

748

-113

16229

16235

13805

1 104

-6


Proche-Orient

117

118

75

30

-1

148

145

79

49

3


Extrême-Orient

15054

15166

13028

718

-112

16081

16090

13726

1055

-9

Amérique du Sud

63

37

0

31

26

92

46

0

39

46

Pays développés

1786

1806

513

970

-20

1662

1 595

488

1009

67

Monde

28378

28314

22289

1936

64

33056

33016

25 998

2 591

40

1 Production moins utilisation.
Source: FAO/ICRISAT

Demande pour l'alimentation humaine

Le mil continuera d'être surtout utilisé pour l'alimentation humaine. Il demeure une source importante de calories et une composante essentielle de la sécurité alimentaire dans les régions semi-arides des pays en développement. L'utilisation du mil à des fins d'alimentation humaine restera, exception faite de la CEI, le propre des pays en développement - déjà 98 pour-cent du mil utilisés en alimentation humaine le sont dans ces pays. Entre 1992-94 et 2005, la demande pour le mil en alimentation humaine dans les pays en développement devrait augmenter de 1,3 pour-cent par an. Mais, il y aura des différences importantes entre l'Asie et l'Afrique. L'Asie compte actuellement pour 59 pour-cent de la consommation humaine du mil et l'Afrique 39 pour-cent; en l'an 2005, ces pourcentages seront de 53 pour-cent pour l'Asie et 45 pour-cent pour l'Afrique (Tableau 6).

En Asie, l'utilisation du mil en alimentation humaine ne devrait croître que de 0,4 pour-cent par an (Tableau 7); les consommateurs optant pour d'autres aliments. En Afrique, la croissance sera bien supérieure (2,6 pour-cent par an) et limitée davantage par l'offre que par la demande. La consommation par habitant diminuera. Les calories nécessaires aux ménages proviendront de plus en plus d'importations ou de la production de céréales dans les régions du pays où le potentiel est élevé.

Il est inquiétant de voir que plusieurs pays enregistreront des déficits en mil, surtout en Afrique. Sur ce continent, où l'on enregistre présentement un "surplus" de 170 000 tonnes, les déficits sont estimés à 66 000 tonnes en 2005 (Tableau 6). Ce déficit pourra être partiellement compensé par des importations ou de l'aide alimentaire. Cependant, la chute de la production par habitant pourrait avoir des conséquences graves sur la sécurité alimentaire et la nutrition dans une région qui a déjà été confrontée à de nombreuses pénuries alimentaires. En outre, on notera que cette estimation est basée sur un taux de croissance relativement optimiste de 2,4 pour-cent par an d'ici 2005.

Demande pour l'alimentation animale

La demande mondiale pour le mil fourrager devrait passer de 1,9 million de tonnes en 1992-94 à environ 2,6 millions de tonnes en 2005 (Tableau 6). La croissance de l'utilisation du mil en alimentation animale se fera surtout dans les pays en développement. Cette croissance est évaluée à 60 pour-cent d'ici 2005. Elle dépendra surtout de l'évolution de la culture du mil dans des pays comme l'Inde, le Nigeria et le Soudan. En Chine, l'utilisation du mil en alimentation animale devrait diminuer. Dans les pays développés, l'utilisation du mil comme graines pour les oiseaux ne devrait guère changer par rapport aux niveaux actuels. Dans ces pays, il est peu probable que le mil remplace les céréales fourragères dans la composition des aliments du bétail, car il coûte trop cher pour être concurrentiel. Toutefois, il pourrait y avoir une exception dans le cas du mil produit localement sur les sols légers dans certaines régions des Etats-Unis.

Commerce

Il est très difficile d'établir les perspectives du commerce international du mil, car le volume du commerce formel est très petit, on ignore le volume du commerce informel et l'offre et la demande sont incertaines.

Tableau 7. - Taux de croissance prévus pour le mil, 1992-94 à 2005.

 


Superficie


Rendement


Production


Production par habitant

Utilisation

Totale

Alimentation humaine

Alimentation animale

(%/an)

(%/an)

(%/an)

(%/an)

(%/an)

(%/an)

(%/an)

Pays en développement

0,2

1,2

1,4

-0,5

1,4

1,3

4,2

Afrique

1,1

1,2

2,4

-0,7

2,6

2,5

7,4


Afrique du Nord

0,9

1,8

2,7

0,4

3,9

2,6

14,8


Afrique occidentale

1,1

1,4

2,5

-0,9

2,5

2,5

5,4


Afrique centrale

-0,1

1,1

1,0

-2,1

1,2

1,7

7,9


Afrique orientale

1,8

0,4

2,3

-1,0

2,5

2,8

4,5


Afrique australe

6,6

-6,1

0,5

-3,0

2,8

3,0

0,0

Asie

-0,9

1,5

0,6

-1,1

0,5

0,4

3,3


Proche-Orient

0,0

1,9

1,9

-0,7

1,7

0,4

4,2


Extrême-Orient

-0,9

1,5

0,6

-1,0

0,5

0,4

3,3

Amérique du Sud

2,5

0,8

3,3

1,6

1,8

0,0

1,9

Pays développés

-2,2

1,6

-0,6

-1,1

-1,0

-0,4

0,3

Monde

0,1

1,2

1,3

-0,3

1,3

1,3

2,5

Source: FAO/ICRISAT

Si des surplus importants devenaient disponibles dans certains pays (ex. en Afrique de l'Ouest), les possibilités de commercer devraient se faire plus nombreuses. Cependant, on ne prévoit aucun essor important du commerce compte tenu des grandes distances, du coût élevé du transport et de la variabilité des volumes commercialisables. D'ici 2005, comme par le passé, la plus grande partie du commerce international du mil devrait se limiter à des échanges transfrontaliers entre certains pays en développement, ainsi qu'à des achats limités, mais réguliers, par les pays en développement.

Résumé et conclusion

Le mil pénicillaire est surtout cultivé pour son aptitude à produire du grain dans un milieu chaud et sec, où les sols infertiles ont une faible capacité de rétention d'eau; là où les autres cultures seraient probablement vouées à l'échec. Il est généralement produit dans les régions périphériques des principaux centres de production et centres urbains des pays en développement. Les rendements sont bas, moyennant seulement les trois quarts des rendements du sorgho en Afrique et en Asie. La plupart des paysans qui dépendent de cette culture sont pauvres et souvent confrontés à des déficits alimentaires. Une petite partie seulement de la récolte est vendue dans les marchés; la plus grande partie ne quitte jamais la ferme où elle a été produite. En fait, les paysans qui cultivent le mil ont plus de chances d'être des acheteurs que des vendeurs d'aliments.

La conjugaison de la pauvreté des paysans et des conditions difficiles du milieu freinent l'augmentation de la productivité du mil pénicillaire. Les rendements augmentent en Asie. Mais, plusieurs paysans africains ne sont pas en mesure d'augmenter leurs rendements, car la culture est de plus en plus pratiquée dans un milieu sec et difficile, et l'adoption des technologies "améliorées" est faible. Cette faible adoption s'explique en bonne partie par le coût élevé des technologies ou leur inadaptation dans ces milieux extrêmes.

En Asie, l'augmentation des rendements du mil pénicillaire est due à l'adoption de cultivars améliorés (hybrides et variétés à pollinisation libre) et des investissements minimaux dans la fertilité des sols. Les paysans augmentent aussi leurs investissements dans la maîtrise de l'eau, lorsque les contraintes en terre deviennent plus graves. L'augmentation des rendements serait supérieure si la tendance à remplacer le mil pénicillaire par des cultures oléagineuses plus rentables (ex. arachide, sésame et ricin) n'était pas si forte dans les régions qui se prêtent bien à la culture du mil.

En Afrique, la plupart des paysans continuent de cultiver leurs variétés locales traditionnelles. On y manifeste un intérêt pour les nouvelles variétés à pollinisation libre, mais les sociétés semencières privées ne croient pas que cette région soit rentable et les investissements du secteur public dans la production de semences sont limités. En Asie, la promotion des hybrides a favorisé l'investissement privé dans la production de ces semences, mais les perspectives d'adoption des hybrides en Afrique demeurent inconnues. Le coût de distribution des semences hybrides est plus élevé en Afrique qu'en Asie (car le densité de population est moindre) et on ignore si les paysans africains se montreront intéressés à acheter des semences hybrides. Cependant, compte tenu que le paysan a besoin de peu de semences pour les semis et que les coûts de production des hybrides sont bas (vu le taux élevé de multiplication), les producteurs africains de mil pénicillaire, même pauvres, pourraient, comme les petits paysans asiatiques, trouver avantageux d'investir dans des semences améliorées, que ce soit des variétés à pollinisation libre ou des hybrides.

Les gouvernements auraient de bonnes raisons d'investir davantage dans la production et la distribution des semences du mil. C'est un moyen de réduire le coût de l'aide pour combattre les effets de la sécheresse. On devra s'assurer que la réglementation semencière est raisonnable et applicable. L'expérience acquise montre qu'une réglementation excessivement contraignante diminue la concurrence dans le secteur semencier et entraîne des pénuries de semences et des prix injustement élevés.

En Afrique et en Asie, les perspectives d'adoption des technologies améliorées sont limitées. D'abord, il est difficile pour les paysans, surtout en Afrique, d'évaluer le rendement potentiel de ses investissements, compte tenu de la forte variabilité de la pluviométrie annuelle. Deuxièmement, des contraintes en main-d'oeuvre limitent l'adoption des systèmes améliorés d'exploitation du sol et de l'eau, car les enfants vont à l'école et les adultes vont dans les centres urbains en quête d'emploi. Enfin, les paysans comparent le rendement du capital engagé dans l'achat d'intrants, comme les engrais, a celui pouvant être obtenu par l'épargne et l'achat d'aliments, l'investissement dans l'élevage ou encore l'éducation de leurs enfants.

Les chercheurs et les vulgarisateurs doivent prendre en compte ces facteurs et être plus imaginatifs dans la mise au point de technologies adaptées à ces milieux particulièrement difficiles. Les sélectionneurs doivent tenir compte des préférences des paysans: plus de grain ou de fourrage; des rendements plus élevés ou plus stables; faible ou fort apport d'intrants. Les ingénieurs agronomes doivent savoir que les décisions des paysans changeront en cours de campagne, en fonction de la pluviométrie, et identifier les moyens d'améliorer, ne serait-ce que de façon marginale, l'efficacité d'utilisation de l'eau et la fertilité du sol. Cela peut consister en un petit investissement dans les engrais comme complément à l'utilisation de fumier ou la rotation avec une légumineuse, plutôt qu'un investissement visant à maximiser les profits à court terme mais comportant de plus grands risques.

En Afrique, les perspectives d'expansion du commerce du mil sont limitées. La meilleure opportunité réside dans l'expansion du commerce entre ménages ruraux dont la production est excédentaire ou déficitaire. La variabilité interannuelle de la production et les grandes distances entre les ménages dans des régions relativement peu peuplées posent problèmes. Les commerçants ont de la difficulté à identifier les régions déficitaires et excédentaires et les coûts de la collecte et du transport du grain sont élevés. Cependant, il devrait être possible d'améliorer l'information sur les marchés et les mesures favorisant l'investissement privé dans le commerce des grains. Cela a été bénéfique en Inde, où le commerce du mil, quoique modeste, a progressé. Ces investissements sont justifiés, car ils sont une composante des stratégies nationales et régionales pour combattre les effets de la sécheresse. Dans les régions où les prix du mil varient considérablement d'une campagne à l'autre ou d'une année à l'autre, ces programmes d'aide pourraient aussi servir à reconstituer les stocks des familles et des villages.

En Asie et en Afrique, de petites quantités de grain sont achetées pour la fabrication de farine et de bière. En Afrique, la faible productivité et le coût élevé du transport du mil restreindront ce commerce à un marché à prime. En Asie, les perspectives d'expansion du commerce du mil sont meilleures. La productivité y est plus grande et les coûts de commercialisation moindres (plus forte densité de la population et meilleure infrastructure commerciale). Cependant, il sera encore difficile pour le mil de concurrencer les céréales cultivées sur des terres sensiblement plus productives, situées dans les régions où la pluviométrie est plus élevée. Dans les régions où le mil est compétitif sur le plan des prix et de la valeur fourragère, le grain de cette céréale pourrait être davantage utilisé dans les exploitations piscicoles et avicoles. Le mil pénicillaire est particulièrement bien adapté aux températures élevées et aux sols infertiles ayant une faible capacité de rétention d'eau. Dans les régions où ces contraintes sont importantes, ce mil pourrait concurrencer efficacement les autres céréales sur le marché des grains fourragers, car il n'aura pas à être transporté sur de grandes distances à un coût élevé. Enfin, le mil gardera sa niche sur le marché des graines pour les oiseaux.

Il semble que le mil pénicillaire devienne de plus en plus important comme culture fourragère et culture de protection dans les système intensifs de production des légumineuses sur les sols tropicaux acides, ainsi qu'un important grain fourrager de remplacement dans les régions subtropicales de plusieurs pays. Cependant, ces nouvelles utilisations sont relativement secondaires, par rapport à l'importance du mil comme culture vivrière dans les régions rurales pauvres, surtout dans les zones tropicales semi-arides.

En somme, le mil restera surtout associé à la sécurité alimentaire des populations vivant dans les régions prédisposées à subir la sécheresse. La productivité a traîné, surtout en Afrique, car les conditions de culture du mil sont extrêmes et la pression démographique a bouleversé les systèmes extensifs basés sur de longues jachères. Les gains de productivité contribueront directement à la diminution de la pauvreté et de l'insécurité alimentaire. Les perspectives d'expansion du commerce du mil sont raisonnablement bonnes dans le cas des échanges entre des ménages dont la production est excédentaire ou déficitaire. Cependant, les autres perspectives commerciales sont limitées, sauf pour de petits marchés spécialisés (farine, malt, grains fourragers, graines pour les oiseaux).


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