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4. Gérer des opérations commerciales réussies


4.1 Les composantes fondamentales de la gestion commerciale
4.2 Les participants à la gestion commerciale
4.3 Planification
4.4 Organisation
4.5 Direction et motivation
4.6 Suivi et évaluation

4.1 Les composantes fondamentales de la gestion commerciale

La commercialisation comprend une variété d'opérations et de processus qui établissent des liens entre les producteurs et les acheteurs de manière que ces deux groupes puissent en tirer des bénéfices. Les activités peuvent être entreprises par un producteur individuel, une coopérative d'agriculteurs ou une organisation de commercialisation, ou encore par une série d'intermédiaires qui coordonnent ces différentes fonctions.

Différents facteurs déterminent le niveau de complexité des activités commerciales, y compris la taille de l'opération, la répartition du travail et le nombre de produits fournis et de marchés. Si l'on ne tient pas compte de l'échelle de l'entreprise, la gestion comprendra quatre éléments fondamentaux et interactifs: le diagnostic et la planification, l'organisation, la motivation et la direction de la mise en oeuvre, et le suivi et l'adaptation.

4.2 Les participants à la gestion commerciale

En organisant des activités commerciales, il importe avant tout d'identifier les participants et leurs rôles. Chacun d'eux apportera des connaissances, des compétences, des ressources et des expériences particulières au processus.

Les producteurs ont potentiellement le plus à gagner d'une meilleure commercialisation de leurs produits. En adaptant la production à la demande, ils peuvent d'une part intensifier leur production et, de l'autre, accroître considérablement leurs revenus.

Les organisations commerciales peuvent améliorer les relations de travail entre les producteurs, les consommateurs et le gouvernement.

Les organisations commerciales peuvent renforcer les relations de travail entre les producteurs, les consommateurs et le gouvernement Outre la mise au point du produit, le choix des circuits de distribution, la promotion, la fixation des prix et la vente, la commercialisation comprend des activités matérielles telles que l'emballage, l'entreposage, le classement, le transport et la collecte des informations commerciales. Pour gérer ces processus, les producteurs peuvent recourir à des organisations commerciales ou communautaires qui fournissent des services de commercialisation. Les petits exploitants et les villageois qui entreprennent des activités agroforestières et forestières peuvent bénéficier des connaissances et des capacités commerciales de leurs organisations, qu'il s'agisse de petits groupes informels, d'associations ou de coopératives bien organisées. Les organisations commerciales remplissent aussi une fonction importante de formation de leurs membres à divers aspects de la production et de la commercialisation.

Les institutions gouvernementales peuvent jouer elles aussi un rôle important en appuyant la gestion des opérations de commercialisation. La gestion des fonctions commerciales et autres dans une entreprise exige des capacités particulières. Les vulgarisateurs ou consultants qui fournissent à une organisation paysanne une aide à la gestion devraient tenir compte de sa capacité globale de la réaliser et dispenser une formation à des aspects particuliers, tels que la commercialisation. Une fois que les organisations de producteurs seront raisonnablement formées à cette fonction, elles pourront mieux concevoir un plan d'entreprise ayant une forte composante commerciale.

Les institutions gouvernementales peuvent fournir des services d'information générale, y compris la collecte et la diffusion de données sur la production et les prix, ainsi que des bulletins météorologiques annonçant les perspectives de récolte. Ces institutions entreprennent souvent des recherches approfondies, coûteuses et menées sur une longue période concernant les liens entre production, prix et consommation. La structure de la gestion commerciale est parfois influencée par la législation en vigueur en matière de contrats commerciaux, différends (arbitrage) et normes de classement et de qualité. Ces institutions s'assurent aussi que les politiques sont mises en oeuvre et interprétées correctement par les producteurs et leurs organisations commerciales.

Les organisations non gouvernementales jouent d'importants rôles complémentaires. Elles peuvent fournir des services valables qui complètent ceux offerts par les institutions gouvernementales. Ces groupes peuvent offrir une aide technique et financière aux organisations de producteurs sous forme d'études de marché, de systèmes et services d'information, de promotion des programmes et de cours de formation en matière de gestion. La présence d'une ONG nationale ou locale qui oeuvre dans un village peut être déterminante pour la formation et le renforcement des organisations commerciales.

Le secteur privé, y compris les compagnies et les particuliers, fournissent des services valables aux producteurs et aux organisations commerciales communautaires. Les compagnies privées (transport, vente en gros ou au détail, commerce, etc.) offrent des services d'une importance vitale aux organisations locales. Leurs consultants peuvent dispenser à leurs membres des avis en matière de commercialisation ainsi qu'une formation.

4.3 Planification

La commercialisation fait partie intégrante du plan de toute entreprise réussie. Il faut qu'elle soit planifiée par rapport tant aux ressources disponibles qu'à la gestion financière et de la production. Une bon plan d'entreprise n'est pas statique; il se compose d'un ensemble de directives qui évoluent à mesure qu'augmentent les informations recueillies. Le processus de planification est, par définition, en mouvement constant; il suit le marché qui, lui aussi, se développe, évolue et s'adapte.

La planification est conditionnée par un certain nombre de facteurs, y compris la décision initiale de commercialiser. Dans le premier cas, l'agriculteur ou le producteur forestier dispose d'un excédent de produits commercialisables mais n'a que peu d'informations fiables sur la demande ou les lieux où se font les mouvements de fonds. Si les biens sont périssables, il sera forcé de prendre des décisions rapides et à court terme concernant le moment, le lieu et la manière de vendre son produit. La hâte de vendre risque de faire baisser ses revenus en espèces.

Dans le deuxième cas, le producteur peut concevoir un plan de production à long terme pour mettre au point des produits qui répondent à la demande du marché. La planification de la production (quoi planter, à quel moment, quand récolter) vise à assurer des disponibilités adéquates et régulières aptes à générer un revenu en espèces continu. Le plan devra tenir compte des systèmes de transformation, des niveaux de technologie, de la disponibilité et de la compétence de la main-d'oeuvre, des questions relatives aux sexes et de l'interaction entre les membres de la famille au cours de la production et de la commercialisation, des moyens de transport, des circuits de distribution et des systèmes d'information sur le marché.

Chaque étape de l'activité commerciale impose un programme et une évaluation, et l'information devra être incorporée dans le processus de prise de décisions concernant la planification et le budget. La commercialisation doit être associée à d'autres importants secteurs d'une entreprise. Ensemble, ils fournissent des informations pertinentes au processus de planification et permettent de réaliser les objectifs du plan d'entreprise.

Lorsqu'une organisation communautaire décide d'introduire pour la première fois la fonction de commercialisation dans ses tâches de gestion, elle doit être bien consciente des implications relatives. Comment se réalise-t-elle? Quelles sont les ressources et compétences disponibles et quelles sont celles qui manquent? Peut-on combler les lacunes et de quelle manière? La première étape de la planification comprend trois éléments: connaissance du marché, évaluation de l'approche adoptée par l'organisation, et accord sur son orientation future. Cette étape comprend aussi le diagnostic et la planification basés sur l'information commerciale et des études de marché spécifiques qui collectent et analysent les données, effectuent des projections de la demande du produit, identifient les facteurs commerciaux et étudient la concurrence.

Les plans de commercialisation doivent être élaborés dès le début de la mise en place de l'entreprise

Le premier pas consiste à réunir les membres de l'organisation pour décider ce qu'il faut faire et identifier les débouchés et les contraintes. Après cet examen, et sur la base des conclusions auxquelles seront parvenus les membres, les producteurs devront intégrer leurs propres solutions dans un plan d'action. Ils étudieront comment rendre compatible le budget, le crédit, la production et les activités de gestion des ressources avec la commercialisation. L'identification des objectifs fait partie de ce processus de planification stratégique. Il faudra aussi définir le type et la quantité d'informations nécessaires pour la mise au point du plan. Les cours de formation dispensés aux membres de l'organisation peuvent tirer parti d'études de cas réussis, d'exemples simulés ou de projets de planification de groupe s'appliquant immédiatement à la situation actuelle. Il faudra pour cela arriver à un consensus au moyen de réunions appuyées par des comités spéciaux de producteurs et, au besoin, d'experts qui proposeront des idées et feront des suggestions. La démarche comprend les mesures à prendre avant la production, la planification de cette dernière, les avis consécutifs à la production, la commercialisation et la vente.

Les organisations communautaires devront elles aussi être en mesure de gérer un plan de commercialisation à long terme de même que le crédit, la production et les ressources. A la planification des aspects tant à court terme qu'à long terme de la commercialisation devra certainement participer la direction. Dans ces petites organisations, il faudra que directeurs et membres travaillent de concert dans tous les aspects des opérations. Des ONG et des vulgarisateurs pourront également prendre part au processus de planification en tant que participants temporaires et fournir des avis spécifiques ou étalés sur une période prolongée concernant la conception, la mise en oeuvre, la révision et les adaptations nécessaires.

Un aspect important de ce processus est l'évaluation de la capacité de l'organisation de répondre à la demande et d'affronter la concurrence. La collecte et l'analyse des données doit être simple, économique et compatible avec les besoins des petits exploitants ou cueilleurs. Il faudra rassembler des informations claires sur des facteurs tels que les volumes, les classes, les qualités, les délais de livraison, les prix et le caractère saisonnier du produit pour prévoir la réaction du marché et la participation de l'organisation.

Les projections fondées sur la collecte systématique des données commerciales devraient coïncider avec l'importance et le niveau technique des exploitants, des cueilleurs et de leurs organisations. Ces projections pourront être établies soit pour un ou deux ans soit pour une seule récolte. Pour prendre leurs décisions commerciales, les directeurs des organisations agricoles ou agroforestières devront recourir à des projections simples, économiques et pertinentes.

Il est évident que l'information n'est utile que dans la mesure où elle est précise, facteur qui dépendra de la fiabilité de sa source et de la rapidité avec laquelle elle est diffusée. Les producteurs étant dispersés, il est très important que l'information provienne d'une seule source fiable de manière à ce qu'elle soit la même pour tous. Des sources multiples et une information transmise de façons diverses peut donner lieu à de la confusion et retarder le temps de réaction aux ajustements du marché.

II est essentiel que l'information soit précise

II faudra fixer les objectifs commerciaux portant sur les volumes, les clients et la gamme des variables choisies en fonction de l'analyse et des projections. Ces objectifs devront être quantifiables et introduits dans un cadre chronologique tel que le mois ou la campagne agricole. Outre le volume de la production et le nombre de clients à atteindre durant la période en question, ils devront indiquer clairement quelles sont les personnes qui participent à l'activité. Qui s'occupe de quoi? Qui est responsable?

Il faudra mettre au point des stratégies appropriées pour réaliser ces objectifs. La stratégie choisie tiendra compte de la mise au point et de la présentation du produit, du prix à lui attribuer, des circuits à travers lesquels il sera distribué et de la façon de desservir le marché et de communiquer correctement avec les clients. Pour les petits exploitants et leurs organisations, le choix des stratégies sera sans nul doute limité.

4.4 Organisation

Lorsqu'on initie à la commercialisation et à ses fonctions les petits exploitants et les cueilleurs, il importe de s'assurer qu'ils s'engagent à les mettre en oeuvre aussi efficacement que possible. Les compétences commerciales qu'ils possèdent déjà pourraient être améliorées moyennant les services spécialisés d'organisations de commercialisation. Les vulgarisateurs, les organisations non gouvernementales et les chefs de communauté peuvent jouer un rôle important en introduisant à la commercialisation les petits exploitants et les associations paysannes.

Normalement, les producteurs forestiers ne créent une organisation pour profiter des économies d'échelle et de débouchés possibles que lorsqu'ils sont déjà engagés dans la vente de leur produit. Les efforts de commercialisation en matière d'agroforesterie et de foresterie communautaire devraient être organisés de la manière la plus simple et la plus économique possible. Il est probable qu'une seule personne ou à un petit nombre d'experts soit chargée de ces tâches. Des opérations trop complexes mettent à dure épreuve la capacité de structures institutionnelles faibles. Cependant, à mesure que l'on dispose de ressources supplémentaires et que le personnel est adéquatement formé et motivé, le système pourra être perfectionné.

Des efforts concertés améliorent les gains

Une émission radiophonique parrainée par le gouvernement et destinée aux communautés forestières d'une zone reculée donnait des informations sur les prix de divers produits forestiers. Les exploitants de caoutchouc indiens Kaxinawa, bien qu'ils fussent désormais au courant de ces prix, n'ont pas pu profiter de ces nouvelles informations. En effet, les producteurs individuels ne récoltaient que des quantités limitées du produit et ne pouvaient en payer le transport. Ils ont été obligés de le vendre à un marchand itinérant à des prix bien inférieurs à ceux transmis par la radio. Cependant, en s'organisant et en louant un bateau pour transporter leurs marchandises parle fleuve jusqu'à un marché plus important, les Kaxinawas sont parvenus à vendre leur produit à des prix suffisamment élevés non seulement pour couvrir les frais de transport mais aussi pour augmenter considérablement leurs revenus. Des efforts organisés et concertés ont été la clé de leur accès au marché.

Les coopératives et les institutions de crédit rural pourraient remplir déjà un nombre de fonctions essentielles et les perfectionner en se réorganisant et en recourant à un apport de matériel, des infrastructures, des véhicules et des services de formation. Dans ces cas, l'introduction d'une gestion commerciale n'aboutit souvent qu'à une augmentation marginale de la productivité. Il est en général plus facile et moins coûteux de multiplier les fonctions d'une même organisation que d'en créer une nouvelle. La solution consiste à équilibrer d'une part les objectifs de la gestion et, de l'autre, le niveau de complexité que l'organisation est à même d'affronter.

Les organisations commerciales devront aussi accorder une attention particulière aux nombreux facteurs extérieurs qui influencent le marché et la capacité des producteurs de le desservir. Ces facteurs comprennent les infrastructures telles que les routes et les ports, des sources disponibles de fonds de roulement et les règlements ou interventions du gouvernement. Les gestionnaires devront non seulement tenir compte de ces facteurs extérieurs mais aussi les intégrer dans leur planification pour qu'ils favorisent la réalisation des objectifs de l'organisation.

Comment une association de producteurs peut-elle mettre en place les capacités de gestion nécessaires pour remplir ces complexes fonctions de commercialisation? Comme on l'a vu plus haut, un premier pas pourrait consister à les simplifier en se concentrant sur les facteurs qui assurent le maximum de profit aux producteurs. On pourrait grouper les fonctions de la gestion en diverses composantes qui opéreraient séparément pour diminuer au maximum le besoin de coordination. Les activités pourraient, elles aussi, être entreprises progressivement en fonction de la capacité de l'organisation de s'acquitter de nouvelles tâches.

Il sera utile d'identifier ses points forts et de choisir des activités compatibles avec l'expérience et la capacité de ses membres. Les institutions faibles devront entreprendre les activités commerciales qui leur réussissent le mieux. L'affectation des responsabilités devra être clairement définie.

4.5 Direction et motivation

La mise en place d'une organisation commerciale de petits producteurs imposera sans nul doute le plein engagement de ces derniers. Les membres devront améliorer leurs connaissances sur la commercialisation et ses techniques, et la personne ou les personnes directement responsables d'activités désignées devront recevoir une formation spéciale. L'évaluation des besoins de formation tiendra compte de l'ensemble du système de commercialisation, voire du processus de planification tout entier, afin de créer les capacités nécessaires à la préparation et la mise en oeuvre du plan d'entreprise de l'organisation. Il est essentiel que chaque membre connaisse la nature, le but et les opérations de l'activité commerciale ainsi que la manière dont elle est gérée au sein de l'organisation. En outre, ils devront être en mesure de comprendre les liens existant entre ces activités, la production et la transformation de façon à se conformer aux changements du marché.

Une fois qu'ils auront assimilé les fonctions de base de la commercialisation, il est probable qu'ils s'efforceront de perfectionner leurs capacités productives. Plus les gens ont de connaissances, plus ils sont à même de tirer parti de leurs propres compétences et expérience, et d'appliquer ces connaissances à l'ensemble de l'entreprise. Dans une organisation, la formation doit être perçue comme une activité à long terme et permanente. Celle des directeurs responsables des fonctions commerciales est tout aussi importante au succès, voire à la survie, d'une organisation dont l'objectif est de commercialiser des produits sur un marché concurrentiel.

Pour réussir, il faut que les membres participent aussi bien à la planification qu'à l'exécution du plan d'entreprise. La motivation et la participation augmentent quand les membres s'aperçoivent que la commercialisation peut accroître leurs revenus et leurs bénéfices.

4.6 Suivi et évaluation

II faudra surveiller les progrès accomplis dans la réalisation des objectifs quantifiables. Les directeurs devront être au courant du volume des ventes, du revenu, des coûts et du nombre de clients atteints et satisfaits, et savoir jusqu'à quel point le plan de commercialisation est efficace. Ils devront suivre et évaluer l'information en provenance des marchés qui influence la ressource et la mise au point du produit, et la transmettre aux autres services de l'organisation. Cette fonction fait partie du processus d'évaluation et de perfectionnement de l'ensemble du plan d'entreprise et, en particulier, de la composante commerciale. Un suivi périodique permet de détecter et de corriger des erreurs de planification et de commercialisation et d'accroître les possibilités de réaliser des bénéfices.

Le suivi et l'évaluation fournissent des informations qui permettent d'adapter les plans aux besoins

Les organisations de petits producteurs devront mettre au point une technique de suivi simple et systématique. Elle permettra de collecter les informations concernant le volume du produit vendu, les prix, le nombre de clients, les plaintes de ces derniers et l'efficacité du plan de commercialisation. Il faudra transmettre cette information de façon claire pour que les directeurs et les membres de l'organisation la comprennent bien. En utilisant les données de base initiales comme norme de calcul, les responsables de la commercialisation pourront déterminer le nombre des opérations journalières ordinaires qui contribuent à la réalisation des objectifs commerciaux. Les rapports mensuels devront comparer les résultats obtenus aux projections de manière à effectuer les adaptations voulues rapidement et efficacement. Le suivi n'est autre que la réponse aux débouchés et contraintes signalés par l'information. Le meilleur indicateur du succès est le taux d'accroissement des revenus nets tant des producteurs individuels que de l'ensemble de l'organisation.


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