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3. L'impact du VIH/SIDA sur les mécanismes traditionnels de survie dans les économies rurales


3. L'impact du VIH/SIDA sur les mécanismes traditionnels de survie dans les économies rurales

Les conséquences économiques et sociales de la maladie frappent directement la famille rurale. En l'absence de systèmes de soins de santé opérationnels dans les pays africains, les frais médicaux occasionnés par les membres de la famille malades doivent être supportés entièrement par la famille nucléaire ou le réseau familial élargi. En plus des frais médicaux, dont les dépenses afférentes à l'achat des médicaments et au traitement médical traditionnel, les frais d'obsèques des membres de la famille grèvent lourdement le budget familial. Dans certains milieux, les frais d'obsèques semblent même plus élevés que les frais médicaux.5

5 Une étude sur les ménages menée par la Banque mondiale dans le District de Kagera en République Unie de Tanzanie a révélé que, en moyenne, on dépense 60 $ américains pour une victime du SIDA, dont 60 pourcent sont destinés aux frais d'obsèques et les 40 pourcent restants aux frais médicaux.

Les paysans ont mis au point des mécanismes pour faire face aux impacts du VIH/SIDA sur leurs stratégies de subsistance. Traditionnellement, dans les situations d'urgence dues aux catastrophes naturelles et dans les cas de difficultés, le réseau familial élargi a réussi à mettre au point des mécanismes de survie qui sont toujours opérationnels dans les communautés pré impact et celles à impact initial. Toutefois, l'accroissement de la morbidité et de la mortalité lices au VIH/SIDA dans les communautés à plein impact où l'impact de la maladie conduit déjà à une dislocation des familles nucléaires, les mécanismes traditionnels de survie ont presqu'atteint le point de rupture.

Les mécanismes traditionnels de survie reposent essentiellement sur les retours aux champs et/ou à la cellule familiale. Même la contribution du travail des enfants peut être accrue (avec la déscolarisation des enfants, particulièrement les filles) parce que la famille lutte pour maintenir les systèmes de culture actuels. Mais au fur et à mesure que s'accroît l'appauvrissement de la famille, elle n'a peut-être pas d'autre choix que de produire pour satisfaire ses propres besoins de consommation. Même dans ce cas, les niveaux nutritionnels de la famille pourraient être progressivement compromises. Dans les districts/communautés à plein impact, il n'est pas rare de voir des familles entières d'enfants n'ayant pour toute forme de soutien que des grands-parents âgés.

Le VIH/SIDA étant surtout une maladie sexuellement transmise, très souvent, plus d'un membre de la famille est touché et en meurt. Il s'ensuit que tous les biens et toutes les économies d'un grand nombre de familles, déjà maigres avant le déclenchement de la maladie, peuvent être totalement dépensés, laissant les membres survivants sans ressources. Une étude menée en Ouganda6 a montré que le poids de l'impact socio-économique du VIH/SIDA pèse sur les femmes rurales de façon disproportionnée. Dans les districts couverts par l'étude, on a trouvé que la majorité des familles avaient à leur tête des veuves du SIDA plutôt que des veufs du SIDA. Les femmes ayant des enfants à charge s'étaient enfoncées dans la pauvreté du fait des pressions socio-économiques liées au VIH/SIDA. Les femmes n'avaient plus accès à la terre, à la main d'oeuvre, aux intrants, au crédit et aux services d'appui. La stigmatisation due au VIH/SIDA a davantage précarisé leur situation avec la fin de l'assistance de la famille élargie et de la communauté, leur principal filet de sécurité.

6 D. Topouzis. 1994. Ouganda: l'impact socio-économique du VIH/SIDA sur les familles rurales, en particulier les jeunes. FAO, Rome, Italie.

Dans les familles touchées, le degré de malnutrition dépend du type de mécanismes de survie, des contraintes subies par les ressources familiales, du contexte socio-culturel et du stress émotionnel. Avec la baisse de la capacité à produire et à accumuler nourriture et revenus, la famille entame une spirale descendante de taux de dépendance croissante, de nutrition et de santé sans cesse sur le déclin, d'utilisation croissante des ressources (temps et argent) pour résoudre des problèmes de santé, de pénuries alimentaires plus fréquentes, de viabilité familiale moindre et de dépendance accrue vis-à-vis de la famille élargie et de la communauté en général. Le Tableau 1 décrit les effets du VIH/SIDA sur les familles rurales et l'impact possible de la maladie sur la santé des paysans et la nutrition des familles paysannes. La complexité de l'impact de la maladie sur la production agricole et la sécurité alimentaire familiale appelle une réponse multisectorielle qui devrait inclure la vulgarisation agricole, les soins de santé primaires, l'éducation et les organisations non gouvernementales (ONG) compétentes.

Tableau 1: L'impact du VIH/SIDA sur la situation alimentaire et nutritionnelle des familles rurales

En outre, l'on a observé que la baisse des revenus agricoles due à un déclin de l'intensité des cultures et de la production animale, et qui s'accompagne d'une augmentation des frais médicaux et des frais d'obsèques, peut conduire à une dislocation de la famille nucléaire et du système traditionnel d'entre-aide. Le Tableau 2 présente les liens réciproques entre l'accroissement de la morbidité et de la mortalité dues au VIH/SIDA, le manque d'intrants agricoles et de main d'oeuvre, la détérioration de l'économie familiale et l'impact sur l'éducation, la santé ainsi que sur le système social et qui, en fin de compte conduisent à une dislocation des mécanismes traditionnels de survie.

Tableau 2: L'impact du VIH/SIDA sur les mécanismes traditionnels de survie dans les économies rurales

Le Programme Conjoint des Nations Unies sur le SIDA (ONUSIDA) qui constitue le principal avocat du Système des Nations Unies pour une réponse planétaire à la maladie se consacre à la prévention de la transmission du VIH, à la réduction des souffrances causées par le VIH/SIDA et à l'adoption de mesures pour contrer l'impact de la pandémie sur les individus, les familles, les communautés et les sociétés. L'ONUSIDA regroupe, au niveau national, les multiples et différentes forces techniques et opérationnelles des agences partenaires en vue d'améliorer la qualité de l'assistance accordée aux actions nationales de lutte contre le SIDA. Aussi, l'ONUSIDA peut-il contribuer à renforcer les mécanismes traditionnels de survie, tout d'abord en veillant à ce que le Système des Nations Unies accorde un soutien efficace et coordonné au programme national VIH/SIDA. L'ONUSIDA fournit l'appui technique, la formation et le suivi de sorte que tous les acteurs nationaux aient accès à l'information portant sur les meilleures pratiques au plan international et, en retour, ces acteurs veillent à ce que leurs expériences nationales contribuent à formuler les politiques et programmes au plan mondial. Il est à noter que l'ONUSIDA ne finance pas de projets sauf dans des cas particuliers. Les Equipes Nationales d'Appui du FNUAP, les Représentants du FNUAP dans les pays, les bureaux régionaux, sous-régionaux et nationaux de la FAO devraient collaborer avec l'ONUSIDA aux niveaux régional et national pour promouvoir une réponse multisectorielle à la pandémie.

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