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1. INTRODUCTION


1.1 Besoin d'aménager les pêcheries
1.2 Processus d'aménagement des pêcheries
1.3 Concepts et contraintes biologiques et environnementales (7.1.1)
1.4 Considérations d'ordre technologique
1.5 Dimensions sociale et économique
1.6 Concepts et fonctions institutionnels
1.7 Echelles de temps applicables au processus d'aménagement des pêcheries
1.8 Approche de précaution

1.1 Besoin d'aménager les pêcheries

La pêche revêt une grande importance sociale et économique. On évalue à 12,5 millions le nombre de personnes employées dans des activités halieutiques et à 40 milliards de dollars des Etats-Unis le montant annuel des échanges internationaux de poisson au début des années 1990. La production totale de la pêche de capture et de l'aquaculture pendant la même période a atteint une masse totale de 100 millions de tonnes et s'est plus ou moins maintenue à ce chiffre.

Mais à l'heure actuelle une grande partie des stocks de poisson exploités dans le monde sont pleinement exploités, surexploités, épuisés ou demandent à être reconstitués tandis que bon nombre subissent le contrecoup de la dégradation de l'environnement, particulièrement dans les zones aquatiques intérieures et côtières. On relève déjà souvent de graves dommages écologiques qui risquent de ne pas être toujours réversibles ainsi que des pertes économiques.

De nouvelles découvertes technologiques telles que les systèmes de détermination de position, le radar, l'échosondeur, des bateaux plus puissants et des méthodes de transformation améliorées (par exemple le surimi) ne cessent de renforcer la capacité des pêcheurs d'exploiter davantage de ressources biologiques de manière plus intensive, ce qui risque d'aggraver le problème.

La situation actuelle des ressources bio-aquatiques dans le monde est largement le résultat de l'incapacité des processus actuels de bonne gouvernance de la pêche d'assurer un aménagement responsable et efficace des pêches. Les pêcheurs, les autorités chargées de l'aménagement des pêcheries et les halieutes ainsi que ceux qui sont responsables d'effets indirects tels que la dégradation de l'environnement doivent accepter de partager la responsabilité de la situation actuellement peu satisfaisante des pêcheries et des ressources bio-aquatiques dans le monde. C'est aux Etats qu'il incombe de veiller à ce que des mesures communes soient prises pour renverser ces tendances. On trouvera mises en exergue ci-après les mesures nécessaires à la mise en place d'un aménagement responsable des pêches.

Il importe que les gestionnaires des pêcheries se rendent compte que, lorsque les ressources sont surexploitées ou exploitées de manière irresponsable, ne rien faire pour y remédier aura des conséquences négatives à l'avenir. Réduire les stocks de poisson à des niveaux biologiquement et écologiquement critiques entraînera une perte des avantages potentiels notamment pour l'alimentation, le revenu et l'emploi, aussi bien dans l'immédiat qu'à long terme. La très grande faiblesse d'un stock donné aura sans doute une incidence négative sur d'autres stocks qui en dépendent et les pertes peuvent aller au-delà du stock touché dans l'immédiat. On ne peut supposer qu'en pareil cas, un allégement de la pression de pêche suffira automatiquement à reconstituer pleinement ou immédiatement le stock et l'écosystème qui y est associé. Dans certains cas, les pertes peuvent être de longue durée, voire permanentes.

1.2 Processus d'aménagement des pêcheries

Il n'existe pas de définition claire et communément admise de l'aménagement des pêcheries. On pourrait adopter aux fins du présent document la définition suivante:

Processus intégré de rassemblement de l'information, d'analyse, de planification, de consultation, de prise de décisions, de répartition des ressources et de formulation et d'application des règlements ou des règles qui régissent les activités halieutiques - s'appuyant s'il y a lieu sur des mesures d'exécution - visant à maintenir la productivité des ressources et à assurer la réalisation des autres objectifs de la pêche.
L'aménagement de la pêche suppose un ensemble complexe et très large de tâches visant à assurer l'obtention d'avantages optimaux pour les utilisateurs locaux, l'Etat ou la région grâce à une utilisation raisonnable des ressources bio-aquatiques auxquelles ils ont accès. L'aménagement des pêcheries a beau reposer sur la recherche et l'analyse halieutiques et parfois sur des mécanismes institutionnalisés de fourniture de services consultatifs, il convient de ne pas le confondre avec ces activités car s'il est vrai qu'il les englobe, il va bien au-delà. Comme il ressort de la définition ci-dessus, on peut considérer que l'aménagement des pêcheries implique:
(i) de fixer des politiques et des objectifs pour chaque pêcherie ou stock à gérer, compte tenu des caractéristiques biologiques du stock, de la nature des pêcheries existantes ou potentielles et d'autres activités relatives au stock ou ayant une incidence sur lui et de l'apport économique et social potentiel de la pêche aux besoins et aux objectifs nationaux ou locaux;

(ii) de déterminer et d'appliquer les mesures qui permettront aux autorités chargées de l'aménagement des pêcheries, aux pêcheurs et aux autres groupes d'intérêt de collaborer pour atteindre les objectifs fixés. Cette tâche devrait être menée en consultation avec tous les groupes intéressés. Il s'agira entre autres de formuler et mettre en oeuvre des plans d'aménagement pour tous les stocks gérés, de veiller à ce que le stock ou les stocks, les écosystèmes dans lesquels ils se présentent et leur environnement soient maintenus en état productif, de rassembler et d'analyser les données biologiques et halieutiques nécessaires à l'évaluation, au suivi, contrôle et surveillance, d'adopter et de promulguer les lois et règlements adéquats et efficaces nécessaires à la réalisation des objectifs et de veiller à ce que les pêcheurs les respectent pour atteindre lesdits objectifs;

(iii) de procéder à des consultations et des négociations avec les utilisateurs ou les groupes d'intérêt concernés par les ressources ainsi qu'avec ceux qui n'ont pas de rapport direct avec les activités halieutiques mais dont l'activité a une incidence sur la pêche. Il s'agirait par exemple de groupes se livrant, dans un bassin fluvial ou lacustre ou dans la zone côtière, à des activités ayant une incidence sur la pêche. Les autorités responsables de l'aménagement des pêcheries doivent veiller à ce que les intérêts halieutiques soient bien pris en compte dans la planification et l'intégration de ces activités;

(iv) de revoir régulièrement, en consultation avec les utilisateurs, les objectifs de l'aménagement des pêcheries et les mesures afin de s'assurer que ces objectifs restent adaptés et efficaces;

(v) de faire rapport aux gouvernements, aux utilisateurs et au public sur l'état des ressources et les résultats obtenus grâce à l'aménagement des pêcheries.

Dans le Code de conduite, la principale responsabilité du contrôle de l'aménagement des pêcheries incombe aux arrangements et aux organisations concernant les pêches. Pour qu'ils soient opérationnels et permettent une bonne gestion, ces arrangements et organisations doivent être définis et intégrés dans des structures d'appui institutionnelles, c'est-à-dire les institutions chargées de l'aménagement des pêcheries. Dans le présent document, ces institutions ont été arbitrairement regroupées en deux grandes catégories: les autorités chargées de l'aménagement des pêcheries et les parties intéressées.

Aux fins de ces directives, on a retenu une définition très large de l'Autorité chargée de l'aménagement des pêcheries afin de centrer l'attention sur le processus d'aménagement proprement dit plutôt que sur les distinctions juridiques, par ailleurs importantes, entre la très grande variété d'organismes (tant nationaux qu'internationaux) qu'englobe cette expression telle que définie ici.

Une autorité chargée de l'aménagement des pêcheries se définit donc comme étant l'entité juridique à laquelle un Etat ou des Etats ont donné pour mandat de s'acquitter de certaines fonctions particulières en matière d'aménagement des pêcheries. Dans le cadre de systèmes nationaux, y compris de systèmes fédéraux, une telle autorité prendra d'ordinaire la forme d'un ministère, d'un département à l'intérieur d'un ministère (par exemple de l'agriculture) ou d'un office. Il pourrait également s'agir d'une institution à caractère international constituée par une organisation ou un mécanisme sous-régional, régional ou mondial. Dans la définition donnée rien ne préjuge du caractère gouvernemental, para-étatique ou privé de l'organisme en question.

L'expression partie intéressée (ou groupe d'intérêt) s'entend de toute partie qui a été reconnue par l'Etat ou les Etats concernés ou par l'autorité chargée de l'aménagement des pêcheries au nom de cet Etat ou de ces Etats comme ayant un intérêt légitime dans les ressources halieutiques à gérer.

1.3 Concepts et contraintes biologiques et environnementales (7.1.1)


1.3.1 Contraintes en matière de ressources
1.3.2 Contraintes environnementales
1.3.3 Diversité biologique et considérations biologiques

1.3.1 Contraintes en matière de ressources

(i) Les populations biologiques ou les stocks sont susceptibles de croître en abondance et en biomasse mais jusqu'à un certain point seulement. La limite de cette croissance est déterminée par la taille actuelle de la population par rapport à son abondance moyenne à l'état non exploité et par l'environnement dans lequel le stock évolue. Le maintien du stock à un niveau productif exige une abondance appropriée d'individus adultes matures du point de vue de la reproduction, les géniteurs, et un environnement convenable pour que les différentes étapes du cycle biologique puissent être franchies avec succès. Toutefois, par suite notamment de la variabilité de l'environnement, la croissance d'un stock d'une année sur l'autre est généralement très variable.

(ii) La meilleure manière de déterminer la productivité potentielle des stocks est de procéder à des analyses scientifiques fondées sur des concepts concertés et en utilisant des méthodes types permettant d'obtenir des résultats reproductibles et comparables. Toutefois, lorsque les moyens manquent, par exemple dans certaines communautés côtières traditionnelles, on peut obtenir certaines évaluations grâce à une observation empirique des volumes de capture antérieurs. L'évaluation moderne des stocks vise à déterminer la situation d'un stock et sa productivité potentielle en fonction des différentes stratégies de gestion. Les décisions des gestionnaires concernant les ressources et donc la rentabilité de l'utilisation de ces ressources doivent donc reposer sur les évaluations de stocks aussi fiables que possible (voir sections 2.2, 2.3 et 2.4).

(iii) Une pêche responsable ne doit pas permettre de récolter en moyenne plus de ressources biologiques que ne peut remplacer une croissance nette du stock. Cela ne signifie pas que les prises annuelles ne peuvent jamais dépasser la production annuelle nette et, dans la plupart des stratégies de récolte, la variabilité naturelle et les incertitudes sont telles que les prises dépasseront probablement la production certaines années. Toutefois, il ne doit pas en résulter une baisse de la biomasse du stock ou des stocks au-dessous du point de référence limite prédéterminé (voir section 3.1) au-dessous duquel le risque d'épuisement devient inacceptable. Faute d'appliquer cette règle, la ressource s'appauvrira peu à peu jusqu'à atteindre des niveaux moyens de productivité et de rentabilité économique inférieurs au seuil optimal. Si l'on ne prend pas de mesures pour redresser cette situation, le risque d'un épuisement biologique d'une durée indéfinie et de pertes économiques ou d'extinction de la pêcherie augmentera jusqu'à atteindre un niveau inacceptable (7.2.1).

(iv) Les espèces de poissons se présentent dans des populations pouvant être composées d'un grand nombre de stocks génétiquement bien isolés les uns des autres par des caractéristiques comportementales, océanographiques ou topographiques. Dans toute la mesure du possible, l'aménagement des pêcheries doit s'intéresser à chaque stock séparément et viser à une exploitation consistant en prélèvements raisonnables dans chaque stock (7.3.1) ou fixer un taux global d'exploitation qui évite de faire baisser les composantes d'une ressource multispécifique jusqu'à des niveaux dangereusement bas. Faute de quoi, certains stocks individuels risquent l'extinction ou un grave dépeuplement même si l'ensemble de la population semble en bonne santé. L'isolement génétique des stocks peut engendrer une extinction locale irréversible et des dommages permanents pour l'état et la productivité de la population dans son ensemble ainsi que pour les pêcheries locales.

(v) Les responsables de l'aménagement des pêcheries doivent non seulement éviter la surexploitation de tel ou tel stock mais également éviter toute mesure qui ait un effet négatif sur la diversité génétique d'un stock ou d'une population. Une pression de pêche sur le long terme au-dessus d'un niveau viable sur certains éléments d'un stock tels que de gros individus, risque d'avoir pour effet de réduire la fréquence de certaines caractéristiques génétiques et donc de réduire l'hétérozygotie du stock ou de la population. Il convient d'éviter ce genre d'effet sélectif prolongé.

(vi) Même si bon nombre de pêcheries et de stratégies d'évaluation et de gestion des stocks ne visent qu'une seule espèce ou un seul stock, dans la réalité toutes les espèces des ressources aquatiques fonctionnent au sein de communautés dont elles sont tributaires et qui présentent une complexité variable en termes de nombre d'espèces. La récolte de telle ou telle espèce aura presque certainement un effet sur d'autres espèces, que ce soit par suite d'interactions technologiques telles que la capture imprévue d'autres espèces au cours de la pêche ou par suite d'effets sur la chaîne alimentaire tels que la réduction par la pêche de l'abondance d'un prédateur d'une proie ou d'un concurrent d'autres espèces. L'impact sur les liens écologiques (par exemple par le biais de la chaîne trophique) entre les espèces peut provoquer des changements dans la dominance des espèces et perturber l'équilibre dynamique du système de ressources, ce qui risque du même coup de compromettre des options futures. Ces effets simultanés sur plusieurs espèces doivent être pris en considération pour assurer une pêche responsable qui veille à ce qu'aucune espèce, qu'il s'agisse de l'espèce ciblée, d'une capture accessoire ou d'une espèce subissant l'effet indirect de la pêche, ne se voit ramenée au-dessous du seuil de viabilité (7.6.9).

(vii) Les effets de la pêche sur diverses espèces ont pour conséquence importante qu'il est impossible d'assurer simultanément le rendement équilibré maximal de chacune des espèces d'un assemblage vivant dans une zone donnée et comprenant un mélange de prédateurs et de proies. Chaque élément de cette assemblage présente ses propres paramètres et caractéristiques biologiques et nécessiterait un régime de pêche particulier permettant la seule capture de cette espèce, une condition impossible à respecter dans la pratique. En outre, modifier l'abondance des prédateurs (ou des proies) aura une incidence sur l'abondance des autres éléments de l'assemblage à l'intérieur de laquelle ils vivent dans une interdépendance qu'il est généralement difficile de prévoir. De ce fait, la productivité optimale d'un assemblage d'espèces dans une zone donnée sera toujours inférieure à la somme des productivités potentielles de chaque espèce. Une pêche responsable ne devrait donc pas viser à obtenir la productivité viable maximum de chaque élément d'une communauté multispécifique car il en résultera une surexploitation d'au moins certains des stocks concernés (7.2.3).

1.3.2 Contraintes environnementales

(i) Les cycles de vie des poissons sont tributaires des conditions environnementales lesquelles peuvent influer sur les taux de croissance, de reproduction et de mortalité. Les premières étapes du cycle de vie sont particulièrement sensibles à ces influences qui peuvent provoquer une forte variabilité de l'abondance et de la production sur toute une gamme d'échelles de temps. Dans l'aménagement des pêcheries interviennent beaucoup les fluctuations du recrutement d'une année sur l'autre et les modifications du régime écologique dans le cadre desquels les caractéristiques fonctionnelles de l'écosystème, notamment la composition, l'abondance et l'emplacement de la communauté ichtyologique sont des variables importantes pour l'aménagement. Elles peuvent changer considérablement d'une décennie à l'autre sous l'effet des forces environnementales. L'aménagement des pêcheries doit tenir compte de cette variabilité et, s'agissant particulièrement de la variabilité interannuelle, viser à y répondre dans des plans d'aménagement (7.2.3). Il faut pour cela que les pêcheries, sans faire subir au stock trop de nouveaux effets négatifs, puissent faire face à la situation les années où le stock et sa productivité sont ramenés à des niveaux au-dessous de la moyenne sous l'effet des fluctuations environnementales naturelles. Aussi la capacité des pêcheries (c'est-à-dire, ici, l'effort potentiel qu'elles peuvent exercer) doit-elle être calculée et fixée non pas en fonction de la productivité réalisable en moyenne les bonnes années mais en fonction de la moyenne à long terme avec une certaine souplesse qui permette de réduire l'effort les mauvaises années. Faute de respecter ce principe, lorsque les ressources sont variables, on sera continuellement amené à surexploiter les pêcheries les années en dessous de la moyenne en obtenant au total de mauvais résultats économiques.

(ii) La variabilité de l'environnement peut également influer sur la disponibilité du poisson dans la pêcherie, par suite, par exemple, d'une plus forte dispersion du poisson qui le rend moins accessible ou par suite d'une concentration dans des zones où il est plus facile de le capturer. Il faut veiller à ne pas interpréter ces changements de disponibilité comme des changements dans la taille du stock, ce qui risquerait d'entraîner des décisions erronées en matière d'aménagement et à des prises excessives non viables.

(iii) Dans la plupart des écosystèmes non perturbés, un stock que l'on n'exploite pas aura tendance à osciller autour d'un niveau maximum moyen correspondant à la capacité de charge moyenne de l'habitat correspondant à ce stock. La productivité à long terme d'un stock est liée à cette capacité de charge. Toutefois, la capacité de charge non seulement peut évoluer avec le temps sous l'effet de la variabilité naturelle mais également diminuer par suite d'une activité humaine telle que la pêche destructive (au moyen par exemple de la dynamite ou du cyanure), la dégradation de l'habitat côtier (par exemple par suite de l'urbanisation ou d'un chalutage destructif dans des habitats sensibles), d'une modification du débit des cours d'eau ou de la pollution. Le résultat peut en être une réduction de la productivité des stocks et donc un risque de surexploitation. L'aménagement des pêcheries devrait impliquer d'évaluer ces impacts sur l'état des stocks ichtyologiques et de leurs habitats naturels et l'adoption de mesures visant à redresser la situation de manière i) à empêcher toute incidence négative sur l'environnement due à une activité humaine (7.2.2.f) et g); 7.2.3), ii) à adapter l'effort de pêche pour que, le cas échéant, soient pris en compte les changements de productivité, iii) à reconstituer les stocks et remettre en état les habitats pour assurer une situation satisfaisante de production (7.6.10).

(iv) Une approche complémentaire consiste à améliorer l'habitat pour influer positivement sur la productivité des stocks de poisson, par exemple en créant d'une manière écologiquement rationnelle des récifs artificiels, en assurant des niveaux satisfaisants de fertilisation des lacs, le contrôle des prédateurs, la restauration de zones d'habitat détruites ou endommagées sur les côtes, les lignes de rivage ou les rives de cours d'eau ou bien en améliorant la qualité de l'eau. Il faudrait s'attacher à entretenir ou, si nécessaire, à restaurer les frayères et les parcours migratoires, y compris les grandes voies migratoires parallèles à la côte et entre la haute mer et les eaux intérieures.

(v) Les pêcheries continentales sont particulièrement sensibles aux facteurs écologiques extérieurs et une utilisation responsable de ces pêcheries suppose de déterminer les principaux facteurs extérieurs qui influent sur elles ainsi que leurs effets sur le stock ou les stocks de poisson. Il est indispensable de connaître ces facteurs pour pouvoir prendre les mesures appropriées d'aménagement lorsque des changements sont provoqués par un ou plusieurs de ces facteurs. Ces mesures peuvent consister à réguler la mortalité des poissons mais peuvent également consister en mesures correctives ou de régénération. Les facteurs extérieurs les plus courants intervenant dans la production des pêcheries continentales sont les suivants:

1.3.3 Diversité biologique et considérations biologiques

(i) La pêche est d'ordinaire délibérément ciblée sur une ou plusieurs espèces d'un écosystème. Toutefois, elle touche souvent également d'autres éléments de l'écosystème du fait, par exemple, de la capture accessoire d'autres espèces, des dommages physiques causés à l'écosystème ou des effets de la chaîne alimentaire. Un aménagement responsable des pêcheries doit tenir compte de l'impact de la pêche sur l'ensemble de l'écosystème, y compris sa diversité biologique et doit tendre à une utilisation viable des écosystèmes et des communautés biologiques dans leur ensemble (7.2.2d).

(ii) Comme indiqué au paragraphe 1.1, bon nombre de stocks de poisson sont déjà surexploités et appauvris dans le monde entier, d'où une productivité des stocks au-dessous de la normale (ou bien une moindre qualité et une moindre valeur économique des quantités de poisson débarquées) et davantage de risque d'épuisement des stocks et d'évolution écologique négative. Il est prévu par la Convention sur le droit de la mer de 1982 (et par le Code de conduite) que l'aménagement des pêcheries implique de ramener les populations épuisées (7.6.10) à des niveaux supérieurs à ceux auxquels se produit la productivité maximale (par exemple à des niveaux de biomasse supérieurs aux niveaux correspondant au rendement équilibré maximal). Cette règle correspond à l'idée actuelle selon laquelle pour assurer une marge de sécurité qui tienne compte du coefficient de variabilité et d'incertitude, il faut que l'aménagement des pêcheries prenne le rendement équilibré maximal comme limite et non pas comme cible.

1.4 Considérations d'ordre technologique

(i) Pour gérer une pêcherie de capture qui ne fait pas l'objet d'apports en alevins de l'extérieur, le seul mécanisme disponible pour maintenir le stock de poisson au niveau souhaité et lui conserver une composition par âge qui permette d'éviter la sur pêche des recrues consiste à contrôler la mortalité due à la pêche, c'est-à-dire les proportions des divers groupes d'âge du stock qui ont été prélevés par la pêche pendant une période donnée, d'ordinaire définie comme d'une durée d'un an. Grâce à une régulation des efforts de pêche exercés, assurée moyennant contrôle de la capture ou de l'effort, grâce à la réglementation des engins ou de la méthode de pêche employée ou grâce à l'établissement d'un calendrier des périodes de pêche autorisées, l'autorité responsable de l'aménagement peut contrôler la masse et la taille ou l'âge des poissons pêchés, dans les limites du coefficient naturel de variabilité et d'incertitude. Cette question est traitée au paragraphe 3.1.

(ii) Il est bien connu que la surcapacité dans une pêcherie pousse ses gestionnaires à dépasser la mortalité optimale par la pêche dans un stock et rend plus difficile l'application des règles limitant l'effort de pêche. Cette situation se produit sous l'effet de pressions sociales et politiques tendant à utiliser au maximum cette surcapacité de prise et de transformation et à conserver leur emploi aux personnes bénéficiant de cette surcapacité. Or il ne s'agira manifestement là que d'une solution à court terme qui à long terme entraînera des problèmes encore plus graves. D'autre part, la surcapacité se traduit inévitablement par une inefficacité économique. Il est donc dans l'intérêt des utilisateurs et de la ressource de maintenir la capacité de pêche potentielle à un niveau compatible avec la productivité à long terme du stock. Pour ce faire, il existe des mécanismes qui sont étudiés au paragraphe 3.1 (7.1.8; 7.2.2a), (7.6.1 et 7.6.3).

(iii) Les responsables de l'aménagement des pêcheries doivent tenir compte du fait que les pêcheurs s'efforcent sans cesse d'améliorer la technologie qu'ils utilisent ainsi que la rentabilité de leur activité. Or, cette situation tend à rendre leur pêche plus performante. Dans une pêcherie soumise à un contrôle de l'effort de pêche, il peut en résulter que l'effort effectif et donc la mortalité par pêche augmentent en fait peu à peu au fur et à mesure que les pêcheurs trouvent de nouveaux moyens de devenir plus performants même si l'effort nominal (par exemple le nombre de jours de pêche) est soumis à contrôle. Ce phénomène doit être pris en compte à la fois dans le cadre du contrôle de la pêche lorsque le contrôle de l'effort sert d'outil de gestion, ainsi que dans l'interprétation des statistiques relatives à l'effort dans le cadre de l'évaluation des stocks. Les progrès technologiques supposent que, afin de maintenir la capacité de pêche et la mortalité par la pêche au niveau souhaité, il faut procéder continuellement à des ajustements pour respecter les niveaux d'effort autorisés.

1.5 Dimensions sociale et économique


1.5.1 Contraintes sociales et culturelles
1.5.2 Contexte et contraintes économiques

(i) D'un certain point de vue, l'activité halieutique de l'homme peut être considérée comme ayant un impact formidable voire irréversible sur les ressources. On peut également voir dans ces ressources un capital susceptible, s'il est géré de manière responsable, de procurer des avantages sociaux et économiques considérables et durables. Considérer les dimensions sociale et économique de la pêche revient à étudier son effet sur les individus et la manière d'obtenir des avantages optimums pour les parties intéressées ou les groupes d'intérêt et pour la société en général. Parmi les groupes d'intérêt il faut inclure les personnes qui utilisent la technologie pour exploiter les ressources halieutiques: pour capturer et produire le poisson, pour lui faire subir diverses transformations et pour le commercialiser ou en tirer d'une autre manière leurs moyens de subsistance. Aux parties intéressées on peut ajouter les consommateurs, les groupes de pression et d'autres groupes qui peuvent se trouver indirectement touchés par les décisions concernant l'aménagement des pêcheries. La pêche de loisir revêt une importance sociale et économique considérable dans de nombreux pays et, en pareil cas, les associations représentant ce secteur devraient aussi être incluses parmi les groupes d'intérêt.

(ii) Une pêche responsable suppose que les facteurs critiques qui constituent les dimensions sociale et économique du système de gestion soient bien compris (7.4.5). La dimension sociale englobe toute une série de variables à caractère humain. Il s'agit essentiellement de l'interaction entre les personnes: comment et pourquoi des individus ou des groupes ont tel ou tel comportement les uns vis-à-vis des autres et vis-à-vis des ressources halieutiques qu'ils utilisent ou dont ils sont tributaires. Dans ces relations interviennent divers comportements, habitudes et coutumes d'ordre culturel, des moyens d'échange, des institutions et des motivations individuelles ou de groupe. D'autre part, les pêcheries représentent principalement des activités économiques, or, la dimension économique implique des recettes et des coûts qui varient en fonction du niveau d'exploitation et sont liés aux forces dynamiques du marché.

(iii) Les variables sociales et économiques influent fortement les unes sur les autres et toute décision en matière d'aménagement aura sans doute une incidence, par exemple, sur la répartition du revenu et de la richesse, sur le volume et le type d'emploi, sur l'attribution des droits d'usage, sur la composition et la cohésion des groupes et des sous-groupes concernés. D'une manière plus générale, l'attitude de ces groupes vis-à-vis des régimes d'aménagement, qu'elle soit positive ou négative, sera influencée par les décisions et les mesures prises. Les mesures d'aménagement des pêcheries peuvent en outre intervenir dans la contribution de la pêche aux délicates questions de politique générale que sont la sécurité alimentaire, les gains nets en devises, les subventions et d'autres avantages et coûts.

(iv) Il se peut aussi que les dimensions sociale et économique entrent en conflit, auquel cas il conviendra de veiller à faire correspondre du mieux possible les objectifs sociaux et économiques concertés du plan d'aménagement en cause. Si l'on ne se met pas d'accord sur un niveau minimum de compatibilité, l'acceptabilité et l'applicabilité du plan d'aménagement se trouveront directement compromises. Cette concordance entre les objectifs doit être d'autant plus facile à obtenir que l'activité de pêche concernée est simple. Par exemple, il devrait être normalement plus facile de se mettre d'accord dans des pêcheries purement industrielles, particulièrement dans des pêcheries internationales, où d'ordinaire la dimension économique l'emporte. En revanche, dans les pêcheries artisanales, ce sont les considérations sociales qui dominent souvent. Il peut s'agir par exemple de la transmission des connaissances, du recrutement des équipages, des programmes d'investissement et de crédit, de la solidarité, des obligations et des droits réciproques qui lient des individus de conditions sociales différentes. Ces facteurs dépendent souvent à leur tour de l'âge, du sexe, des antécédents familiaux, des croyances et des coutumes locales. Par ailleurs, dans les pêcheries artisanales, les rapports entre les groupes d'usagers, les dirigeants politiques et les administrations dépendent d'ordinaire essentiellement de mécanismes et d'institutions à caractère social. S'agissant donc de la pêche de subsistance, artisanale et aux petits métiers, il convient d'accorder une attention particulière aux conditions sociales et à la propre perception des participants (7.2.2c)). C'est dans les pêcheries mixtes (technologie et espèces) poursuivant des objectifs économiques, sociaux et biologiques mixtes que l'on risque d'avoir le plus de difficultés à faire correspondre les objectifs.

1.5.1 Contraintes sociales et culturelles

(i) La situation sociale est sans cesse soumise à des changements dans le temps et dans l'espace. Ces changements peuvent intervenir à divers niveaux: les cycles à long terme de l'évolution historique, les cycles à court terme du changement saisonnier et les changements immédiats à l'échelle du mois ou de la journée qui peuvent être liés aux conditions météorologiques, à l'emploi, à l'offre et à la demande et à d'autres conditions. Ces changements influeront sur le mode de gestion de manière interactive car les individus seront touchés par le régime d'aménagement mais, à leur tour, leurs attitudes vis-à-vis de ce régime et donc sa viabilité seront influencées par toute une série de conditions sociales dynamiques du moment. Même dans les sociétés traditionnelles, où le rythme de changement peut sembler lent, il faut tenir compte de ces éléments du système social et de l'évolution historique de l'exploitation des ressources halieutiques (7.6.6).

(ii) Quelques variables sociales sont, jusqu'à un certain point, quantifiables et peuvent donc être mesurées et donner lieu à une analyse quantitative, voir à une modélisation. En revanche, d'autres variables sont liées au sens, aux valeurs que les groupes concernés donnent à la vie sociale et à l'organisation de cette vie sociale. Ces variables peuvent être difficiles à identifier et encore plus à quantifier, dans la mesure où elles proviennent souvent de la combinaison d'éléments dynamiques tels que la culture de la population concernée et son évolution historique. On peut citer comme variables qualitatives de ce genre: la motivation des individus, les attitudes, stratégies et la conception du risque en matière de pêche, le statut et l'influence politique dans un groupe ou une communauté, le point de vue sur la légitimité morale de certaines pratiques de gestion et l'accès à l'information. Il faut connaître les variables aussi bien qualitatives que quantitatives pour pouvoir évaluer la compatibilité d'une option en matière de gestion avec le contexte social dans lequel elle doit intervenir (7.6.7).

(iii) Une première mesure pour déterminer les variables pertinentes entrant dans la dimension sociale consiste à identifier et à retenir les groupes sociaux bien définis qui sont concernés par les ressources halieutiques, leur utilisation et les avantages que l'on peut en tirer, autrement dit les groupes sociaux composant les différentes parties intéressées. Une deuxième mesure consiste à analyser la manière dont ces groupes influent les uns sur les autres et à évaluer de quelle manière les différents modes de gestion peuvent avoir une incidence sur chacun d'entre eux. Les regroupements sociaux varieront d'ordinaire en fonction du type d'unité de production. Selon les circonstances, la compétence professionnelle, les liens de parenté, l'âge ou le groupe ethnique sont autant d'éléments qui peuvent intervenir dans la composition de l'unité de production et dans l'établissement de relations sociales et économiques entre les membres de l'unité. Il convient de ne pas négliger ces considérations si l'on veut que le système de gestion soit accepté.

1.5.2 Contexte et contraintes économiques

(i) Un objectif des plus importants pour l'ensemble du secteur de la pêche est de réaliser pleinement son potentiel économique lequel se mesure à long terme en additionnant les retombées économiques nettes bénéficiant à tous les producteurs et consommateurs, y compris la rente qui pourrait être obtenue de l'activité.

(ii) Dans des conditions optimales, les forces du marché garantissent d'ordinaire l'efficacité économique. Toutefois, le secteur de la pêche ne connaît généralement pas de conditions optimales et il faut tenir bien compte de l'impact, entre autres, des externalités et des distorsions de prix qui peuvent entraîner une surexploitation économique des fonds de pêche. Il s'agit là fréquemment de sources importantes d'inefficiences économiques qui se traduisent généralement par une dissipation de la rente et requièrent une intervention des responsables de l'aménagement.

(iii) Faute de mécanismes de gestion appropriés, les pêcheurs ne sont généralement pas suffisamment stimulés et informés pour tenir compte des effets que leurs activités ont sur autrui à long et à court terme. D'où une tendance généralisée à accroître excessivement l'effort de pêche au-delà du seuil de rendement économique maximum. La surpêche économique se traduit par une attribution excessive de moyens de production aux pêcheries, qui entraîne, particulièrement dans les pêcheries industrielles, une surcapitalisation et fréquemment une surcapacité au fur et à mesure que les stocks s'épuisent. Finalement, dans la plupart des pêcheries, un seuil sera atteint au-delà duquel le coût de la pêche dépassera la valeur de la prise. En outre, cette situation se produit habituellement dans un contexte où il y a sans cesse des fluctuations dans l'abondance du poisson, les prix du marché et les coûts de fonctionnement qui provoquent des cycles d'investissement et d'épuisement des stocks. Les Etats devraient donc s'efforcer d'éviter ou, s'il y a lieu, d'éliminer la surcapacité de pêche, de manière à maintenir l'effort de pêche à des niveaux compatibles avec la productivité de la ressource ou des ressources halieutiques (7.1.8; 7.6.3).

(iv) Des distorsions de prix peuvent également contribuer à un surinvestissement et à un gaspillage économique et aggraver souvent les contraintes en matière de gestion. Il peut s'agir entre autres des nombreuses subventions que l'Etat fournit au secteur en ce qui concerne les investissements ou certains moyens de production tels que le combustible et les divers types d'exonérations et d'abattements fiscaux (voir section 3.2.1).

(v) Les externalités sont fréquentes dans le secteur de la pêche. Il s'agit en particulier d'externalités internes liées à la nature des stocks et à leur exploitation. Ces externalités peuvent être imposées par un utilisateur de la ressource à un autre utilisateur ou groupe d'utilisateurs, par exemple, lorsque de grands navires performants pêchent dans les mêmes zones que des pêcheurs artisans, ce qui entraîne des interactions négatives entre les deux sous-secteurs ou bien lorsque des engins mobiles se retrouvent au contact d'engins à fond fixe (7.6.5). Ces externalités peuvent se traduire par de profondes modifications du comportement et des stratégies de pêche dans les groupes concernés. Il peut s'ensuivre des conflits et des frais importants pouvant entraîner une baisse d'efficacité économique.

(vi) La performance économique des pêcheries est fortement influencée par le contexte économique général. Faute d'intégrer les facteurs macroéconomiques et de tenir compte des externalités au secteur de la pêche, on risque de saper les fondements des mesures prises en faveur de l'aménagement des pêcheries et d'encourager à nouveau les conflits. La pêche est influencée par exemple par l'évolution des taux de change, la réglementation commerciale et les changements dans la politique fiscale. En outre, particulièrement au niveau local, le secteur de la pêche est souvent en concurrence avec d'autres secteurs, fréquemment dans l'utilisation des ressources mais également sous l'effet d'autres externalités telles que l'impact sur la pêche de la dégradation de l'environnement causée par d'autres secteurs.

(vii) Les conflits entre les différents utilisateurs des mêmes ressources aquatiques sont courants (par exemple entre le tourisme et la pêche dans les zones côtières ou entre la pêche et l'agriculture pour l'utilisation des eaux continentales) et les autorités compétentes ont pour tâche importante d'évaluer les conflits en cours et potentiels afin de les réduire au maximum et d'obtenir une rentabilité optimale de la ressource. Un dialogue intersectoriel et interinstitutionnel s'impose donc et devrait être assuré, par exemple, entre les autorités responsables des pêcheries et les ministères des finances et de la planification ou au sein des enceintes internationales appropriées. Ce dialogue et cet échange d'information permettront au secteur de la pêche de tirer parti des grandes orientations exogènes et des changements dans la situation économique ou de s'y adapter. Il sera ainsi plus facile d'élaborer des options ou des propositions cohérentes et logiques qui permettront d'amener la pêcherie concernée à participer à la poursuite des objectifs fixés dans le cadre des politiques macroéconomiques, des stratégies de développement local ou en fonction de l'évolution du contexte international.

(viii) De nombreux concepts actuels en matière d'aménagement des pêcheries reposent sur des cas où un seul Etat a une totale juridiction sur une pêcherie. Dans le cas de pêcheries transfrontières, les Etats se comportent généralement comme des exploitants concurrents, chacun étant amené à ne pas tenir compte de l'incidence de sa propre récolte sur le stock et sur la productivité à venir. Pareille attitude aura comme effet probable d'engager le stock et les pêcheries, des deux côtés de la frontière, dans la spirale de surcapitalisation évoquée plus haut. Si les pays concernés ne concluent pas un accord contraignant ou, à défaut, ne collaborent pas, tout au moins pour assurer la conservation et la gestion communes de la pêcherie, il est peu probable que les résultats économiques de chacun des Etats participants puissent être maximisés.

(ix) Toutefois, les mauvais résultats économiques et les erreurs de gestion sont souvent directement liés à la complexité de la plupart des pêcheries (prises accessoires et rejets inévitables, incertitude et information incomplète, juridictions mal délimitées et multiples, objectifs irrémédiablement incompatibles). Ces contraintes sont souvent aggravées par l'incapacité ou le refus d'appliquer et d'assumer des mesures d'aménagement qui réduisent les externalités. Il faut donc, au moment d'évaluer les résultats économiques, qu'on ne simplifie pas trop la variabilité des paramètres économiques propres à la pêche. C'est particulièrement le cas des pêcheries multispécifiques où les diverses espèces interagissent normalement les unes sur les autres.

(x) Pour mesurer les résultats économiques il faut évaluer tous les coûts et tous les avantages, directs et indirects (voir section 2.3.3), associés à une pêcherie ou à un sous-secteur donné, concernant les utilisateurs et les autorités chargées de l'aménagement et provenant de l'intérieur ou de l'extérieur du secteur. Chaque étape de l'aménagement implique des coûts de transaction liés notamment à la collecte de l'information, à la coordination des participants, à la solution des conflits, à l'examen continu des conditions et à l'application des décisions. Les coûts de transaction de l'aménagement des pêcheries varient normalement en fonction de la plus ou moins grande participation des utilisateurs au mécanisme d'aménagement (voir section 3.3) et il convient également de les mesurer.

(xi) Dans les pêcheries internationales, la mesure des coûts et des avantages peut faire appel à des considérations tout à fait particulières. Par exemple, il peut y avoir des coûts et des bénéfices propres aux mesures de coopération nécessaires à la gestion internationale de la pêche. Les contraintes économiques imposées à l'aménagement transfrontières peuvent par exemple provenir du fait que certaines parties non contractantes à un arrangement de coopération trouvent un avantage à éviter les frais qu'impliquent la gestion et le respect de la stratégie et du plan d'aménagement concerté (par exemple le coût d'entretien des observateurs, de la modification des engins et des mesures d'exécution). Ce non-respect pourrait également entraîner des coûts externes pour toutes les parties contractantes tels que la réduction de la prise globale entraînant un déplacement des navires avec une éventuelle perte de recettes nettes. Une autre difficulté en ce qui concerne les pêcheries internationales tient à l'existence probable d'intérêts et d'objectifs nationaux divergents risquant de déboucher sur des conflits. Ces divergences pourraient concerner le taux d'escompte, les coûts de production, les préférences des consommateurs ou les prix du poisson sur les marchés nationaux.

(xii) Une gestion responsable de la pêche suppose une évaluation des répercussions économiques de chaque mesure d'aménagement (7.6.7). Il est avant tout nécessaire de calculer la valeur de la pêcherie et d'en tenir compte dans les diverses options qui s'offrent pour l'allocation de la ressource et l'obtention de sa rente. La valeur nette d'une pêcherie pour la société correspond au rapport obtenu après déduction du coût d'opportunité de la main-d'oeuvre et du capital employé. L'Etat ou les pouvoirs publics locaux peuvent obtenir une rente en prélevant soit des taxes (sur les prises ou l'effort de pêche) soit une redevance sur l'utilisation de la ressource. Il est également possible de laisser les rentes à l'industrie de manière à ce que leur valeur puisse être capitalisée sous forme de droits de propriété. Quelle que soit l'option retenue, pour obtenir une rente raisonnable il faudra généralement limiter l'accès à la ressource.

(xiii) Pour déterminer la valeur d'une pêcherie ou d'une ressource exploitée, il sera essentiel de définir l'unité de gestion et les unités de production qui en relèvent (voir section 2.3.3). Ces définitions doivent être assez larges pour englober tous les facteurs économiques qui ont une incidence sur la pêche. Faute de quoi, le contrôle d'un secteur (par exemple le secteur commercial) peut involontairement entraîner le transfert d'avantages à destination ou en provenance d'un autre secteur (par exemple le secteur de la pêche récréative). Par ailleurs, il faut prendre conscience que réglementer seulement une partie des activités de pêche concernant une ressource ou une zone, par exemple le secteur de la pêche industrielle, risque de provoquer une distorsion économique par exemple dans le secteur artisanal avec des répercussions imprévues qui pourraient empêcher d'atteindre les objectifs fixés à l'ensemble du secteur de la pêche. Les unités de gestion devraient donc, dans toute la mesure du possible, englober toutes les activités halieutiques et connexes interdépendantes.

1.6 Concepts et fonctions institutionnels


1.6.1 Contexte et caractéristiques institutionnels
1.6.2 Rôle et fonction des institutions chargées de l'aménagement des pêcheries

(i) Les institutions chargées de l'aménagement des pêcheries, telles que définies à la section 1.2, doivent respecter les règles d'un aménagement responsable. Elles doivent, dans chaque cas, être adaptées aux caractéristiques de la pêcherie et du pays concernés et, dans la mesure du possible, être conçues de manière à répondre aux attentes et aux façons de voir des utilisateurs.

(ii) Au sens large, les institutions peuvent inclure les différents types de relations entre les individus ou les groupes de parties intéressées et l'Etat ou les Etats et qui définissent leurs droits et responsabilités respectifs. Il peut s'agir de règles (par exemple concernant la désignation du régime d'aménagement), de mécanismes (par exemple le mécanisme de prise de décisions) et des structures organisationnelles d'appui qui élaborent et mettent en oeuvre les règles régissant l'utilisation des ressources halieutiques. Ces structures organisationnelles peuvent par exemple être une administration des pêches, un organisme intergouvernemental d'aménagement, un collectif de notables de village ou bien un comité d'utilisateurs.

(iii) Dans le présent document, les arrangements ou les organisations visant à l'aménagement des pêcheries sont essentiellement étudiés dans le cadre de deux grandes catégories d'institutions: les autorités d'aménagement des pêcheries et les parties intéressées. Les premières sont les entités juridiques qui ont été désignées par un Etat ou par des Etats pour prendre les décisions nécessaires sur la manière de mener l'activité halieutique et pour appliquer les décisions. Elles se chargent normalement de services auxiliaires tels que l'allocation des ressources, la consultation avec les parties intéressées ou la détermination des conditions d'accès à l'aire de pêche. L'expression "partie intéressée" (ou groupe d'intérêt) s'entend généralement de toute partie qui a été acceptée par l'Etat ou les Etats ou par l'autorité chargée de l'aménagement au nom de l'Etat ou des Etats comme ayant un intérêt légitime dans les ressources halieutiques à gérer.

(iv) S'agissant de pêcheries internationales, les parties intéressées sont normalement les représentants des Etats concernés qui doivent se charger de défendre les intérêts de leurs citoyens dont certains peuvent eux-mêmes appartenir à des groupes d'intérêt à l'intérieur des Etats ou entre les Etats, notamment des associations de pêcheurs ou des organisations non gouvernementales (7.1.6). Dans le cas des pêcheries relevant de la juridiction nationale, les Etats doivent décider qui doit figurer parmi les parties intéressées à l'intérieur de la pêcherie et de ses segments directs et indirects (7.1.2). Dans un cas comme dans l'autre, les Etats doivent accepter que les représentants des Etats ou des groupes qui peuvent prouver qu'ils ont un intérêt légitime dans la réalisation des objectifs à long terme de l'aménagement de la pêcherie et sont décidés à les poursuivre peuvent également être admis en tant que parties intéressées (7.1.4).

1.6.1 Contexte et caractéristiques institutionnels

(i) Les institutions chargées de l'aménagement peuvent être de nature très différente et remplir toute une série de fonctions dont, comme c'est souvent le cas pour les institutions traditionnelles, d'autres fonctions que l'aménagement des pêcheries. Les institutions différeront de par leurs propres règles, leurs mécanismes et leurs structures ainsi que par leurs organes subsidiaires. L'efficacité d'une autorité chargée de l'aménagement des pêcheries dépend fortement de la pertinence de ses différentes composantes et de la manière dont celles-ci entrent en relation. Une mauvaise gestion des pêcheries tient souvent à des carences institutionnelles liées aussi bien aux fonctions qu'à l'organisation de ces organismes. Par ailleurs, l'idée que l'on se fera de leur légitimité influera sur leur degré d'efficacité dans l'accomplissement de leurs responsabilités.

(ii) Les groupes de parties intéressées devraient, pour leur constitution, prévoir de préférence des conditions d'admission qui répondent à des normes concrètes en matière de gestion des pêcheries (par exemple: en terme de marché, de production, de conservation des ressources, protection de l'environnement, etc.). C'est lorsqu'ils répondent à des intérêts ou des facteurs communs clairement définis, tels que des zones géographiques, le rattachement à des ports, l'appartenance à une communauté, l'utilisation de tel ou tel type d'engin ou de ressources, que ces groupes peuvent être le plus efficaces et obtenir finalement de meilleurs résultats que s'ils sont mal définis et de composition hétérogène. Dans l'aménagement des pêcheries, ces institutions ou les mécanismes de prise des décisions qui leur sont rattachés, constitueront le principal point de contact entre les individus qui composent les groupes de parties intéressées et les autorités responsables de l'aménagement des pêcheries chargées de l'élaboration de plans.

(iii) En dernière instance ce sont généralement les pouvoirs politiques compétents qui ont la responsabilité de la prise de décisions. Toutefois, un aménagement des pêcheries responsable suppose d'admettre que des partenariats institutionnels offrant divers types de collaboration avec les parties intéressées constituent une solution capable de se substituer à l'attribution de toute la gamme des responsabilités d'aménagement à des structures ou à des arrangements de type purement gouvernemental (7.1.2).

(iv) Les formules institutionnelles permettant d'assurer la collaboration des parties intéressées à l'aménagement des pêcheries sont variées. Il est ainsi possible de mettre en place des mécanismes d'information visant essentiellement à présenter les résultats de l'aménagement planifié ou bien des mécanismes de consultation conçus principalement pour permettre à l'administration responsable de réunir l'information et de recevoir des avis des parties intéressées ou encore de mettre en place des panoplies bien définies de mécanismes qui permettent de partager les responsabilités en matière d'aménagement en déléguant les compétences à un degré ou à un autre (voir section 3.3).

(v) Lorsque cela est possible, il convient de prévoir des mécanismes pour que les parties intéressées participent au coût de fonctionnement des autorités d'aménagement des pêcheries à un niveau suffisant pour que ces instances puissent s'acquitter de leurs fonctions.

(vi) Les institutions sont par essence dynamiques et doivent faire l'objet constamment d'un suivi, d'une évaluation et d'ajustements pour garantir en permanence leur efficacité et leur légitimité. L'adaptation institutionnelle est une opération complexe et parfois incertaine. Par exemple, l'adoption d'arrangements institutionnels qui facilitent l'efficacité économique peuvent se heurter à des obstacles tels que les valeurs culturelles, l'inertie au sein des associations de producteurs ou une certaine sensibilité politique aux effets du changement. Pour adapter les institutions chargées de l'aménagement à l'état et à la nature des pêcheries, il faut s'efforcer d'adopter une démarche souple qui prévoit explicitement la possibilité de renégocier les mesures de gestion. Les Etats doivent, par intervalles - normalement tous les trois à cinq ans - étudier les résultats obtenus par leurs responsables de cet aménagement et les instances internationales dont ils sont membres.

1.6.2 Rôle et fonction des institutions chargées de l'aménagement des pêcheries

(i) Toute institution chargée de l'aménagement des pêcheries a normalement pour fonction principale de déterminer et de faire appliquer les règles et les procédures permettant de gérer la pêcherie concernée d'une manière durable qui réponde aux objectifs établis. D'ordinaire, ces règles servent essentiellement à traduire ces objectifs de politique en droits et obligations avec l'aide, si nécessaire, d'instruments de politique générale. Par exemple, elles peuvent préciser la nature et l'étendue des droits des utilisateurs ou définir les conditions d'accès à une aire de pêche et peuvent s'appuyer sur un programme fiscal visant à obtenir une rente. Quel que soit leur caractère (officiel ou officieux), les règles une fois définies doivent être incorporées par l'Etat ou les Etats dans le régime juridique en vigueur (voir section 4.3.1) ou sanctionnées par les pouvoirs publics.

(ii) L'aménagement responsable des pêcheries suppose l'existence d'institutions à vocation de gestion dont une ou plusieurs seront explicitement désignée (s) comme étant l'autorité d'aménagement des pêcheries. Plus particulièrement, les fonctions de toute autorité d'aménagement doivent au minimum habiliter cette dernière à:

Il convient de définir avec précision le domaine de compétence et les ressources halieutiques, les pêcheries et les zones géographiques dont l'autorité d'aménagement a la charge et est responsable.

(iii) Une autorité d'aménagement des pêcheries peut être dotée d'autant de sub-structures ou d'organes subsidiaires qu'il le faut pour s'acquitter de diverses fonctions, ou peut se composer de plusieurs organes autonomes distincts mais interdépendants et coordonnés. L'existence et le nombre des organes subsidiaires et la nature des rapports qui les unissent varieront notablement en fonction de facteurs tels que le contexte politique, géographique ou halieutique et en fonction de la nature des pouvoirs ou du mandat qui leur sont respectivement attribués. Toutefois, il importe s'il y a lieu de préciser clairement les niveaux de responsabilité incombant aux différents organes subsidiaires. Quelle que soit la structure retenue, il faut s'assurer de l'existence de liens de communication, d'interaction et de retour d'information efficaces entre les diverses composantes de l'autorité d'aménagement, ainsi qu'avec les parties intéressées et avec toute autre institution indirectement concernée par la pêcherie.

(iv) Lorsque les Etats délèguent en totalité ou en partie leurs fonctions d'aménagement aux administrations ou aux groupements locaux, notamment à des comités de gestion, aux associations de producteurs ou aux communautés de pêcheurs, cette délégation d'autorité doit s'accompagner de précisions sur les fonctions de chacun et, le cas échéant, d'une délimitation de la zone géographique ou de l'unité de gestion relevant de chaque juridiction. Dans le cas de pêcheries gérées au niveau local, il convient de s'attacher tout particulièrement à établir des arrangements sans équivoque concernant la nature et l'attribution des droits d'accès, le processus de consultation, les mécanismes de collecte et d'analyse des données de l'information et la structure chargée de faire respecter et de faire appliquer les règles (voir section 3.3).

(v) Les cadres institutionnels généraux concernant les stocks transfrontières et la pêche en haute mer sont définis dans la Convention des Nations Unies de 1982 sur le droit de la mer et, pour ce qui est de la pêche en haute mer, sont précisés dans la Convention des Nations Unies de 1995 sur les stocks chevauchants et les stocks de poissons grands migrateurs. Ils sont également évoqués dans le programme "Action 21" adopté par la Conférence des Nations Unies de 1992 sur l'environnement et le développement. D'une manière plus générale, les responsabilités, les modalités de fonctionnement et la structure des arrangements ou institutions internationaux ou régionaux pour l'aménagement des pêcheries marines ou continentales ne devraient pas être d'une nature très différente de celle des institutions nationales du même type. D'ordinaire, la différence tient essentiellement au caractère international de l'arrangement ou de l'institution, qui en renforce fréquemment la complexité. En particulier, les Etats ou les autorités responsables de l'aménagement concernés doivent trouver un équilibre entre les intérêts nationaux et les intérêts communs et doivent pallier la capacité généralement limitée qu'ont les institutions intergouvernementales de faire respecter les dispositions adoptées.

(vi) Si le domaine de compétence de l'autorité chargée de l'aménagement, telle qu'elle a été constituée, ne couvre qu'une partie de la zone occupée par le stock ou, lorsque le domaine d'attribution d'une telle instance chevauche les domaines d'attribution d'une ou plusieurs autres instances, il convient de créer des mécanismes de coopération ou bien des organisations ou arrangements institutionnels bilatéraux, sous-régionaux ou régionaux spécifiques (7.1.3). Un élément essentiel de cette coopération doit consister à rassembler d'une manière uniforme et précise pour l'ensemble du stock, les données biologiques, socio-économiques et environnementales pertinentes et à échanger ces données (7.3.4).

1.7 Echelles de temps applicables au processus d'aménagement des pêcheries

Il importe de tenir compte du fait que l'aménagement des pêcheries exige des buts, une recherche et des mesures répartis sur différentes échelles de temps (allant de quelques jours à plusieurs années) et niveaux politiques (allant des institutions locales aux institutions intergouvernementales). Les activités menées aux différents échelons se chevauchent considérablement et il est fréquent que les mêmes particuliers, les mêmes groupes et les mêmes institutions interviennent dans les mécanismes et les décisions relevant de plusieurs échelles de temps et de plusieurs niveaux politiques. Cet éventail d'échelles intervient au niveau régional ou supérieur dans le cas des pêcheries transfrontières ou bien au niveau national ou local dans le cas des stocks restreints à une seule zone économique exclusive ou à une zone locale.

Trois activités principales, qui se déroulent et font appel à des niveaux différents, doivent être explicitement prises en compte par les autorités chargées de l'aménagement des pêcheries.

(i) Politiques et planification du développement de la pêche. Les pêcheries et l'utilisation optimale des ressources bio-aquatiques jouent fréquemment un rôle important dans l'économie nationale ou locale et sont également en rapport avec d'autres activités sociales et économiques géographiquement contiguës ou bien sont en concurrence pour l'utilisation de ressources communes telles que les habitats côtiers ou fluviaux, l'utilisation de l'eau, etc. Ce contexte macropolitique et macroéconomique exige de tenir compte dans les activités halieutiques des stratégies nationales de planification du développement. Il est donc important que les décisions de politique générale et de planification soient prises en pleine connaissance des répercussions, des coûts, des avantages et des autres possibilités d'utilisation des ressources. Ces décisions de politique ne porteront pas sur le détail de la gestion quotidienne des pêcheries, notamment les mesures concrètes de contrôle mais donnent les grandes orientations sur la manière dont les ressources doivent être utilisées et les priorités établies. La politique ou les politiques adoptées prévoient normalement l'énoncé des critères d'accès aux ressources. Par exemple, la politique appliquée au secteur de la pêche pourrait déterminer si, pour chaque pêcherie, la préférence doit être accordée aux pêcheurs artisans traditionnels ou aux grandes entreprises industrielles, ou bien faire l'objet d'un autre arrangement. C'est normalement au gouvernement, conseillé par l'autorité chargée de l'aménagement des pêcheries et par d'autres administrations compétentes, qu'il incombe d'élaborer et de mettre en oeuvre la politique générale. Cette politique doit être réexaminée régulièrement (par exemple tous les cinq ans).

(ii) Plan et stratégie d'aménagement. La politique des pêches établit normalement les grandes orientations et priorités à suivre dans l'utilisation des ressources bio-aquatiques d'un pays. Cette politique, appliquée à une pêcherie ou un stock donné, doit être traduite, pour chaque pêcherie, en un plan détaillé d'aménagement (7.3.3; voir section 4) qui porte sur les stocks visés, sur les objectifs biologiques, sociaux et économiques convenus, sur les mesures de contrôle et les règlements s'y rapportant, sur les détails du suivi, du contrôle et de la surveillance exercés et qui contienne d'autres informations précisant la manière de gérer la pêcherie. Le plan et la stratégie d'aménagement doivent être élaborés par l'instance responsable qui bénéficiera de toute la contribution possible de la part des groupes d'intérêt reconnus et faire l'objet d'une évaluation et d'un réexamen, y compris d'un "audit" des résultats obtenus, tous les trois à cinq ans.

(iii) Mise en oeuvre du plan d'aménagement. Le plan d'aménagement prévoit en détail la manière dont la pêcherie doit être gérée et par qui elle doit l'être. Y est prévue une procédure d'aménagement qui indique en détail la manière dont les décisions de gestion doivent être prises en fonction de l'évolution de la situation propre à la pêcherie, particulièrement en réponse aux modifications que subit l'état des ressources d'une année à l'autre. Par exemple, le plan d'aménagement peut opter pour une gestion à partir d'un total de prises autorisées tandis que la procédure d'aménagement précisera ensuite de quelle manière ce volume total doit être calculé chaque année en fonction, par exemple, de l'évaluation des stocks fondée sur les statistiques commerciales relatives aux prises et à l'effort de pêche et d'après les résultats d'une enquête indépendante sur les pêcheries. La mise en oeuvre du plan d'aménagement suppose que les mesures et les décisions nécessaires soient prises pour veiller à ce que ce plan soit mis en application et fonctionne efficacement. D'où le besoin de procéder à certaines tâches telles que la collecte des données nécessaires à la prise de décisions en matière de contrôle des ressources et de la pêche fondées par exemple sur le calcul du total admissible de capture (TAC) effectué conformément à la procédure d'aménagement, sur l'octroi de permis aux pêcheurs, sur le suivi, le contrôle et la surveillance voulus et sur un échange d'information, avec les groupes d'intérêt, sur l'état de la pêcherie et des ressources dans le cadre du plan d'aménagement. Ces questions sont reprises à la section 4.

1.8 Approche de précaution

L'article 7.5 du Code de conduite est consacré à l'approche de précaution appliquée aux pêches de capture et aux introductions d'espèces (FAO, Document technique sur les pêches, 350/1, réédité sous le titre de FAO Directives techniques pour une pêche responsable, No 2, Rome, FAO, 1996, 73 p.) Le concept d'approche de précaution en matière de protection de l'environnement a été consacré dans le Principe 15 de la Déclaration de Rio de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement qui se lit comme suit:

"Pour protéger l'environnement, des mesures de précaution doivent être largement appliquées par les Etats selon leurs capacités. En cas de risque, de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement."
L'approche de précaution appliquée aux pêches de capture et aux introductions d'espèces a des implications qui ont été examinées de près dans les directives précitées. La section 1.6 de ces directives résume ces implications comme suit.

"1.6. L'approche de précaution implique une vision prudente. Compte tenu des incertitudes des systèmes halieutiques et de la nécessité d'avoir à prendre des initiatives avec des connaissances incomplètes, il faut, entre autres:

a. prendre en compte les besoins des générations futures et éviter toutes modifications qui ne soient pas potentiellement réversibles;

b. identifier préalablement les effets indésirables et les mesures qui permettront de les éviter ou de les corriger rapidement;

c. lancer sans tarder toutes mesures correctives nécessaires et faire en sorte qu'elles atteignent rapidement leur but, dans un laps de temps qui ne dépasse pas deux ou trois décennies;

d. si l'on n'est pas sûr de l'impact probable qu'aura l'utilisation des ressources, donner la priorité à la conservation de la capacité productive de la ressource;

e. veiller à ce que la capacité de récolte et de transformation soit à la mesure des niveaux durables estimés de la ressource et limiter tous autres accroissements de la capacité quand la productivité de la ressource est extrêmement incertaine;

f. subordonner toutes les activités de pêche à l'autorisation préalable des organes de gestion et les soumettre à un examen périodique;

g. instituer, pour la gestion des pêcheries, un cadre juridique et institutionnel officiel à l'intérieur duquel des plans d'aménagement mettant en application les principes ci-dessus seront dressés pour chaque pêcherie; et

h. prévoir une attribution appropriée de la charge de la preuve en appliquant les critères ci-dessus."


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