III. Situation des produits forestiers au Niger
Le Niger, pays sahélien, est en réalité sans «vraie forêt ». En effet le pays est soumis à des conditions climatiques rudes, qui ont favorisé l’installation de formations forestières «sèches » caractéristiques du Sahel.
Concernant le couvert forestier existant, il n'existe pas à l'heure actuelle de statistiques récentes et fiables sur les disponibilités en ressources ligneuses, leur état, leur capacité de production et même leur répartition spatiale (adapté de Mahaman M.L 99).
En 1970, les superficies boisées étaient estimées à 14 millions d’hectares. Les travaux du PUSF ont permis d’avancer une première stratification des massifs forestiers à trois niveaux :
terrains forestiers primaires : couvert forestier > 5% de la surface ;
terrains forestiers marginaux : couvert dégradé mais existant, < 5% (essentiellement des jachères)
terrains non forestiers : sans capacité biologique de production forestière
Selon Landy (1980), le domaine forestier s'étendrait sur environ 9.000.000 ha dont 6.000.000 ha en zone sahélo-saharienne, 2.600.000 ha en zone sahélienne et 300.000 ha en zone sahélo-soudanienne. Parmi ses vastes domaines, on retiendra :
Les forêts classées au nombre de 84 couvrant une superficie de 600.000 ha ;
Les périmètres de restauration et de mise en défens (70.000 ha) ;
Les parcs et réserves de faune (8.413.000 ha).
En 1994, une étude de vulnérabilité des formations forestières nigériennes aux changements climatiques a estimé la superficie des forêts naturelles à 5.741.917 ha et celles des plantations à 40.984 ha. Selon une récente étude sur le défrichement au Niger (République du Niger, 1997), on estime que de 1958 à 1997 la perte de superficie des forêts est de l'ordre de 40 à 50 % au profit essentiellement de l'agriculture, des besoins énergétiques par la production de bois de feu et du développement urbain. Les forêts classées ont été fortement dégradées et plus de 50 % d'entre elles ont perdu une grande partie de leur potentiel végétal.
3.1. La foresterie dans l’usage des terres
En ce qui concerne les terres occupées par les forêts, leur contrôle et leur gestion traditionnelle sont de la compétence du Chef de village et au niveau supérieur de celle du Chef de canton ou de groupement qui sont dépositaires d’un pouvoir politique et judiciaire sur les terres. Les chefs coutumiers sont investis par l’Etat pour l’exercice du droit de contrôle sur les terres, ceci leur confère un pouvoir de décision sur la gestion des forêts protégées du terroir, donc sur les activités y afférentes (adapté de H.Garba).
L’évolution de la vie publique encourage une expression libre des communautés et l’appropriation par celles-ci de la gestion des espaces forestiers (Stratégie Energie Domestique PEII-VO). Ce privilège du droit coutumier est inscrit dans le code rural et dans la démarche de mise en place des marchés ruraux à bois. Les populations locales peuvent donc avoir la responsabilité de la gestion et de l'exploitation des forêts.
3.1.1. Les usages des terres forestières
Au Niger, un espace forestier est en général le siège de multiples usages pour la production de biens matériels nécessaires à l’existence des communautés humaines avoisinantes, rurales ou urbaines. D’une manière générale les activités économiques qui s’y pratiquent sont l’agriculture, l’élevage, le prélèvement de bois de feu et de service, la chasse et la cueillette des sous-produits (H.Garba, 2000).
3.1.2. L'agriculture :
Un quart des 15.000.000 ha des terres cultivables est aujourd’hui mis en culture. Selon les estimations de la FAO (1993), ce sont 70.000 à 80.000 ha de nouvelles terres qui sont occupées annuellement par l’agriculture aux dépens des forêts et de l’élevage.
3.1.3. L’élevage :
La répartition spatiale du cheptel nigérien est liée à plusieurs facteurs dont entre autres la distribution des pâturages et la disponibilité en eau. En effet, en 1989 par exemple, seuls 37 % du cheptel national se trouvaient en zone pastorale traditionnelle, le reste (63 %) se sont maintenus en zone agricole et agro-pastorale. Ceci a accentué les risques de conflits d'utilisation.
Bois-énergie
Plusieurs enquêtes réalisées montrent la consommation est de : 0,6 à 0,8 kg/personne /jour
Tableau n°1 : Besoins en bois énergie calculés en 1991
(Source PN/LCD, 1991, cité par E.M. Lawali, 1999)
|
Département |
Besoins en tonnes |
|
Agadès Diffa Dosso Maradi Tahoua Tillabéri Zinder Niamey (CUN) |
80.424 53.613 312.206 435.146 394.203 390.975 425.995 220.220 |
|
Total des besoins |
2.312.784 |
Bois de service
La consommation en bois de service est importante. Elle a été estimée en 1990 à 113 000 tonnes par an (Projet Energie II : M.Hamadou). Le bois d’œuvre est quasiment importé des pays côtiers. Cette partie, objet de la présente étude sera développée dans les pages qui suivent le document.
3.2.1. Productivité des formations végétales
Plusieurs méthodes d’inventaire sont utilisées dans l’évaluation des ressources forestières. On peut citer par exemple des méthodes développées par Alegria (1986) dans le cadre des activités du Projet PUSF (1982 à 1989), du Projet Energie II (1992) dans le cadre de l'élaboration des schémas directeurs d'approvisionnement en bois énergie des centres urbains, de Ichaou Aboubacar (1995) sur les brousses contractées de la partie Ouest de la République du Niger.
Par rapport à la productivité des formations forestières, le Projet PUSF (1986) l'a estimé à 0,5 stères/ha/an dans la forêt à Combretacées de Guesselbodi. Ce chiffre est actuellement utilisé par tous les aménagistes de la forêt au Niger pour estimer les formations forestières à physionomie dominée par des Combretacées. En fait cette productivité est très variable suivant les sites, de 0,5 stères à 1 stère par ha et par an, et fonction de la couverture et de l'espèce qui domine la strate. Par exemple, dans le cadre de l'élaboration des schémas directeurs d'approvisionnement en bois énergie, le Projet Energie II a estimé le volume de bois sur pied à 5,22 stères/ha, ce volume correspond à 1,45 m3/ha puisque 1 m3 est égal à 3,6 stère d'après une étude de projet forestier IDA dans la forêt de Faïra. Il en est de même que un (1) stère de bois sec pèse environ 240 kg (adapté de MML, 1999).
Par contre en ce qui concerne les formations plantées, il existe très peu de statistiques récentes sur l'estimation en volume au Niger. Toutes les informations datent des années 80, période des grands projets de reboisement. Sur la base des plantations réalisées par le projet forestier IDA (1989), la productivité obtenue des plantations en sec de Azadichta indica et de Eucalyptus camaldulensis varie entre 0,6 et 1 m3/ha/an ; celle des brise-vent sur les périmètres hydroagricoles est de 9,6 m3/ha/an ou 6 m3/km/an ; celle des plantations forestières irriguées de Eucalyptus camaldulensis varie entre 3 et 7 m3/ha/an selon les types de sols.
Ainsi l'accroissement en volume de bois apporté par les reboisements chaque année pourrait se chiffrer à 5.000 m3, si l'on prend comme hypothèse que la plupart des plantations évoluent actuellement à sec.
Tableau n°2 : Evolution de la production et de la demande en bois de chauffe de 1989 à 2010
(Source : GARBA. H et al)
|
Année |
Evolution Population |
Evolution forêts surface (ha) |
Production (tonnes) De l'année |
Evolution des besoins (tonnes) |
Demande totale (tonnes) |
|
|
Ruraux |
Urbains |
|||||
|
1990 |
7.736.395 |
10.500.000 |
1.260.000 |
1.920.173 |
254.140 |
2.174.313 |
|
1991 |
7.991.696 |
10.248.000 |
1.229.760 |
1.983.539 |
262.527 |
2.246.066 |
|
1992 |
8.255.422 |
10.002.048 |
1.200.246 |
2.049.004 |
271.190 |
2.320.194 |
|
1993 |
8.527.850 |
9.762.000 |
1.171.440 |
2.116.612 |
280.140 |
2.396.752 |
|
1994 |
8.809.269 |
9.527.712 |
1.143.085 |
2.186.460 |
289.384 |
2.475.844 |
|
1995 |
9.099.975 |
9.299.047 |
1.115.886 |
2.258.614 |
298.934 |
2.557.548 |
|
1996 |
9.400.274 |
9.075.870 |
1.089.104 |
2.333.148 |
308.799 |
2.641.947 |
|
1997 |
9.710.483 |
8.858.049 |
1.062.966 |
2.410.142 |
318.989 |
2.729.131 |
|
1998 |
10.030.929 |
8.645.456 |
1.037.455 |
2.489.676 |
329.516 |
2.819.192 |
|
1999 |
10.361.949 |
8.437.965 |
1.012.556 |
2.571.836 |
340.390 |
2.912.226 |
|
2000 |
10.703.893 |
8.235.454 |
988.254 |
2.656.706 |
351.623 |
3.008.329 |
|
2001 |
11.057.121 |
8.037.803 |
964.536 |
2.744.377 |
363.226 |
3.107.603 |
|
2002 |
11.422.006 |
7.844.896 |
941.388 |
2.834.942 |
375.212 |
3.210.154 |
|
2003 |
11.798.932 |
7.656.619 |
918.794 |
2.928.495 |
387.595 |
3.316.090 |
|
2004 |
12.188.296 |
7.472.860 |
890.743 |
3.025.135 |
398.086 |
3.423.221 |
|
2005 |
12.590.510 |
7.293.511 |
875.221 |
3.124.964 |
413.598 |
3.538.562 |
|
2006 |
13.005.997 |
7.118.467 |
854.216 |
3.228.088 |
427.247 |
3.655.335 |
|
2007 |
13.435.195 |
6.947.624 |
833.715 |
3.334.615 |
441.346 |
3.775.961 |
|
2008 |
13.878.556 |
6.780.881 |
813.706 |
3.444.657 |
455.910 |
3.900.567 |
|
2009 |
14.336.548 |
6.618.140 |
794.177 |
3.558.331 |
470.955 |
4.029.286 |
|
2010 |
14.809.654 |
6.459.305 |
775.117 |
3.675.756 |
486.497 |
4.162.253 |
Le tableau ci-dessus donne une évolution de la production et de la demande en bois de 1989 à 2010. Il a été établi sur la base des hypothèses suivantes :
Le recensement général de la population (RGP, 1988) a donné une population d'environ 7.250.000 habitants dont 85 % de ruraux et 15 % d'urbains. Le taux d'accroissement est pratiquement resté stable à 3,3 %.
Le taux de régression annuel des formations forestières nigériennes est de 2,4 %. Ce taux correspond aux changements dus au défrichement agricole et aux changements climatiques.
La productivité moyenne des formations forestières naturelles est de 0,5 stères/ha/an soit 0,12 tonnes/ha/an
La consommation de bois énergie en milieu urbain est de 0,6 kg/personne/jour, celle du milieu rural est de 0,8 kg/personne/jour.
On remarque que depuis 1990 la demande (rurale et urbaine) en bois (surtout bois énergie) dépasse largement la productivité totale des formations forestières. Elle serait de plus de cinq (5) fois supérieure à l'offre soutenue en 2010. Ce qui sous-entend un prélèvement sur le capital forestier sur pied.
3.2.2. Production des autres types de bois
Le Niger n'est ni un pays producteur de bois industrie, ni un pays d'industrie de transformation de bois. Presque 100 % du bois d'œuvre, de sciage ou de panneau consommé au niveau national est importé soit du Nigeria, du Bénin ou de la Côte d'Ivoire.
3.2.3. Production PFNL
Les produits forestiers non ligneux les plus représentatifs sont la gomme arabique, les fruits consommables d'arbres forestiers, les produits dérivés des palmiers (rônier, doumier), les arbres médicamenteux forestiers et certains produits de la faune sauvage. Ainsi le Niger recèle d'importants peuplements de gommiers et de palmiers dont Acacia senegal (200.000 ha), Borassus aethiopum (plus de 30.000 ha), Hyphaene thebaïca du Dallol, de Goulbi N'kaba.
La gomme arabique a été pendant longtemps un produit d'exportation au Niger. En effet, l'exportation de la gomme s'est faite de façon constante depuis près de 50 ans. A titre d'exemple, le volume exporté est passé de 261 tonnes en 1979 à 200 tonnes en 1995 (source : Direction des Statistiques et des Comptes Nationaux du Ministère du Plan, cité dans le document de projet appui à la relance de la gomme arabique). Toutefois, le volume enregistré ne représente qu'une infime partie du volume réellement exporté et dont l'essentiel transite par le secteur informel. Cette filière qui se développe actuellement réaliserait un chiffre d'affaires de l'ordre de 400 à 500 millions de FCFA par an.
3.2.4. Conservation de l’environnement
La lutte contre l'ensablement
L'ensablement des terres de culture, des infrastructures, des habitations est l'une des manifestations les plus visibles de la désertification au Niger. Il sévit partout dans le pays et se généralise dans le département d'Agadez, dans l'Est et le Nord - Est de ceux de Diffa et de Zinder. Il est préoccupant sur certains sites des départements de Tahoua, Maradi, Tillabéry, et menace dangereusement le fleuve Niger.
Les actions de lutte contre l'ensablement ont débuté relativement tard, vers la fin des années 70. Les premières expériences sont : la fixation de la dune de Morey dans l'arrondissement de Keita et celle de Yegalalane dans celui de Bouza par le CWS et CARE International respectivement. Les résultats concluants de ces deux opérations ont permis de lancer un vaste programme auquel plusieurs projets ont contribué.
La Conservation des Eaux et des Sols, Défense et Restauration des Sols (CES/DRS)
Les premières actions de grande envergure menées en matière de CES/DRS remontent aux années 1960 avec les interventions CTFT / ORSTOM dans le département de Tahoua.
Plus tard, d'autres projets ont emboîté le pas (FED, Suisse, CARE, CWS, Projet Productivité de Tahoua, Projet Intégré de Keita, etc.) dans le même département, le transformant en un véritable laboratoire sur les techniques de CES/DRS pour le Niger et à l'échelle régionale.
Malheureusement, en dehors des opérations du Projet Keita et dans une moindre mesure le projet CARE / Galmi, presque toutes les actions ont l'inconvénient d'être ponctuelles et à impact très limité. Les meilleurs résultats en matière de CES/DRS sont en effet obtenus dans le cadre de traitements globaux de bassins versants qui abordent les problèmes d'érosion dans leur ensemble. Deux contraintes majeures entravent le développement de ces opérations :
l'insécurité foncière qui ne favorise pas de tels investissements, dont la portée est à long terme ;
le coût relativement élevé et le faible encadrement des paysans.
Pourtant, des expériences ont montré qu'on peut doubler ou même tripler les rendements agricoles grâce à de tels travaux.
La lutte contre les feux de brousse
Les feux de brousse sévissent chaque année dans tout le pays, particulièrement en zone pastorale, dans le Sud des départements d'Agadez et de Diffa, le Nord des départements de Tillabéry, Tahoua, Maradi, Zinder et dans l'arrondissement de Say (Réserve de faune de Tamou, Parc National du W).
Sur la base des statistiques disponibles, les services techniques ont pu définir la zone à hauts risques dans le Tamesna et le Tadress dans les régions de Tahoua et d'Agadez. En 1986 par exemple, soixante et un cas de feux ont été enregistrés au Niger au 15 décembre, brûlant une superficie de 692.457 ha dont 660.000 ha dans cette zone, soit 95% du total de l'espace total brûlé.
Les actions de lutte contre les feux sont caractérisées par leur irrégularité liée aux financements. L'essentiel des interventions menées a été financé par des projets forestiers, des projets d’Elevage et par le Programme Intérimaire de Reboisement (PIR).
Depuis 1982, le Projet Forestier IDA/FAC/CCCE a pris en charge plus de 90% des réalisations de lutte contre les feux dans le cadre de son volet Appui aux Actions Intérieures. Les conséquences de son achèvement se sont nettement fait sentir sur le volume des pare - feux ouverts en 1989 et 1990 (adapté de H.garba).
La mise en défens
La pratique des mises en défens est depuis très longtemps reconnue comme étant une méthode efficace pour la régénération d'écosystèmes dégradés. Elle consiste à mettre les terres à l'abri de toute intervention humaine et animale jusqu'à la reconstitution du potentiel biologique.
Plusieurs expériences ont été menées par les services forestiers dont les plus anciennes remontent aux années 1950 où 40.942 ha ont été mis en défens entre 1949 et 1953. D'autres expériences plus récentes ont été conduites à travers certains Projets Forestiers (Aménagement autour des forages de Tahoua, Projet Forestier, Projet Reboisement Rive Droite Téra, etc. ). Ces actions ont été de faibles dimensions et n'ont pas abouti aux résultats escomptés.
Si durant la période coloniale, la coercition a permis d'interdire l'accès aux zones mises en défens, les projets récents ont utilisé des moyens très coûteux (grillage). En effet, ces projets n'ont su ni imposer, ni convaincre les populations pour réussir les opérations. Même clôturées, toutes les mises en défens n'ont pas permis d'une manière générale une protection efficace sur plus de deux ans et par conséquent, n'ont pas donné de résultats concluants. Néanmoins, une expérience de mise en défens sans clôture, tentée tout récemment sur environ 3.000 ha à Timia (Agadez) sur l’initiative des populations, a donné des résultats prometteurs(adapté de H.Garba).
3.3. La foresterie dans l’économie de substance
Au Niger, un espace forestier est en général le siège de multiples usages pour la production de biens matériels nécessaires à l'existence des communautés humaines avoisinantes, rurales ou urbaines. D'une manière générale, les activités socio-économiques qui s’y pratiquent dans les espaces forestiers sont relatives au prélèvement de bois de feu et de bois de service, à la chasse et la cueillette des sous-produits forestiers, à l’élevage et l'artisanat, et accessoirement à l’agriculture. Il faut noter que ces activités sont variables, suivant la situation socioculturelle, le type de forêt et son statut juridique (classée ou protégée) et les saisons. Les forêts relèvent des terres non cultivées qui sont constituées aussi des zones d’habitat, des aires de pâturage, des couloirs de passage d’animaux, des espaces non cultivables et des zones sacrées.
Ces sous-espaces recèlent des réalités multiples : géographiques, fonctionnelles et administratives. Cette multi-fonctionnalité de l’espace rural lui confère des usages variés selon la conception locale :
Au plan alimentaire : Beaucoup d'espèces forestières notamment le néré (Parkia biglobosa), le baobab (Adansonia digitata) sont très riches en protéines, en sucre et en certains oligo-éléments tels le fer, le magnésium et le zinc. De ce fait, les sous-produits forestiers contribuent à augmenter l'apport protidique au régime alimentaire des populations rurales du Niger, qui est essentiellement constitué de céréales, ce qui permet de réduire les déséquilibres alimentaires en protéines et d'améliorer la santé des populations. En période de graves crises alimentaires, les populations nigériennes font souvent recours à l'usage de certains sous-produits forestiers (feuilles, fruits, noix) de certaines espèces ligneuses et herbacées comme base ou complément alimentaire (Saadou, M. Soumana I. , 1993) ; les espèces les plus couramment utilisées sont Boscia senegalensis (feuilles et fruits), Parkia biglobosa (farine obtenue à partir de la pulpe), Murua crassifolia, Cenchrus biflorus, Panicum turgidum, leptadania hastata, Cassia tora, Adansonia digitata, Ceratitheca sesamoides.
Au plan médical : Les populations rurales et depuis la dévaluation du franc CFA, de plus en plus de citadins, font recours à la médecine traditionnelle, essentiellement basée sur la pharmacopée. Selon l'OMS, 80 % de la population nigérienne a recours à la pharmacopée traditionnelle. Les espèces les plus couramment utilisées sont : Khaya senegalensis, Guera senegalensis, Eucalyptus camaldulensis, Cassia sieberiana, Cassia siamea, Cassia singureana, Azadirachta indica, Bauhinia rufesens, Schweita americana, Boswellia odorata, Acacia nilotica var. adansonii.
Sur le plan alimentaire du bétail : Les sous-produits forestiers (fruits et feuilles) rentrent pour 25 % dans la ration alimentaire des ruminants au Niger. Cet apport est d'autant plus important qu'il intervient en période de grand déficit alimentaire (saison sèche). Cette alimentation très riche en protéine n'est malheureusement pas sans conséquences sur les formations forestières qui subissent de graves mutilations. Les espèces les plus sollicitées sont : Faidherbia albida, Prosopis africana, Balanites aegyptiaca, Acacia radiana, Comiphora africana, bauhinia rufescens, …
Au plan économique : Les communautés rurales récoltent des matériaux forestiers ligneux et non ligneux aussi bien pour les besoins des ménages que pour la commercialisation. Dans le domaine de l'artisanat, elles fabriquent des meubles en rachis de rônier (Borassus aethiopum), des paniers, cordes et des nattes en feuilles de palmiers doum (Hyphaene thebaica), et tirent de l'huile de cuisine, des aliments, des fruits et des noix, des produits de tannage (Acacia nilotica). Le bois tiré de diverses espèces forestières est utilisé dans la fabrication de nombreux objets (tam-tam, selles des animaux, construction d'habitats, manches d'instruments aratoires, pirogues, récipients et ustensiles de cuisine, lits, forge, …). Elles réalisent aussi des revenus en espèces en récoltant des fruits sauvages et en les vendant sur les marchés locaux. C'est ainsi que l'on remarque au niveau des marchés de différentes villes du Niger le développement d'une importante filière de commercialisation des fruits de Ziziphus mauritiana, Hyphaene thebaica, Adansonia digitata, Balanites aegyptica, et de la gomme de Acacia senegal, Acacia laeta, Sterculia setigera, Combretum nigricans et des graines de Parkia biglobosa. Le revenu issu de la commercialisation des sous-produits forestiers et des matériaux forestiers non ligneux en milieu rural est estimé à près d'un tiers du revenu extra agricole.
Ainsi, l'espace forestier est de ce fait, et quel que soit l'usage qui en est fait, un enjeu économique et social majeur. La connaissance préalable des droits divers que se reconnaît la population sur la forêt, son espace et ses produits, devient incontournable pour la mise en œuvre des actions d'aménagement.
Au sud du pays, la pression exercée sur le foncier par l'agriculture se traduit par la disparition progressive des jachères et des zones de pâturage et, par conséquent le transfert de la fonction pastorale des forêts déjà fortement sollicitées pour le bois de chauffage et les feuilles. La compétition pour l'espace entre agriculteur et l'éleveur a atteint un tel point de rupture que les pratiques coutumières aussi anciennes que les contrats de fumure ont disparu de même que les aires de pâturage et les couloirs de passage. Ce dérèglement de la complémentarité naturelle entre le Nord pastoral et le Sud agricole, conjugué aux effets d'un accroissement massif de la population et du cheptel dans les zones sédentaires est un facteur de dégradation de la forêt dans toute la bande sud du pays.
3.4. La contribution de la foresterie dans le secteur moderne
Dans le secteur moderne les produits forestiers occupent une place importante en terme d’utilisation de bois de service, de bois d’œuvre et autres produits à base de bois particulièrement en raison des besoins de modernisation des habitations. Cependant depuis les expériences de production industrielle de bois initiées dans le cadre d’un projet financé par la banque mondial (Projet IDA FAC, 1987) à travers des plantations irriguées, seules quelques plantations très localisées ont eu lieu pour la production de bois de service.
Il n’y pas non plus d’industrie forestière au Niger. Sur place on ne rencontre que des unités de transformation de bois.
Les besoins par la modernisation ont ainsi été crées et ont suscité un développement important du commerce extérieur du bois et autres produits dérivés.