Trois hypothèses peuvent être formulées compte tenu de la situation actuelle et étant donnée les contraintes et les tendances énumérées dans les secteurs qui constituent les moteurs du changement :
1ère hypothèse : Hypothèse optimiste (croissance) dans le meilleur des cas les contraintes tant du développement de la ressource que sa gestion proprement dite sont partiellement ou totalement levée. Les moteurs du changement contribuent favorablement à lever ces contraintes en même temps qu'ils suscitent le développement du secteur forestier.
2ème hypothèse : Hypothèse 0 dans un contexte de statu quo où rien ne change, les paramètres restent les mêmes.
3ème hypothèse : Hypothèse pessimiste.
Contrairement à ce qu'on pourrait souhaiter la mise en œuvre des différents types de stratégies nationaux contribuent à créer un phénomène qui accentue l'exploitation de la ressource. Dans cette hypothèse pessimiste la prévision repose sur l'échec de la mise en œuvre des provinces autonomes et celui de la gestion communautaire ainsi que la privatisation et la libéralisation. L'hypothèse est que compte tenu des besoins économiques mondiaux (application de l'ADPIC* qui élimine les frontières douanières), de la recherche de rentabilité (privatisation, délocalisation), de la stagnation du niveau de l'éducation au niveau national (constitue un frein au développement des techniques et technologiques et accentue les tendances dans le recours aux modes traditionnelles d'exploitation et donc à la réussite de la gestion communautaire) les performances économiques de la nation n'atteignent pas les chiffres prévus et génèrent une action en chaîne qui contribue à dégrader encore plus la ressource.
Comme les chiffres disponibles ne permettent pas de mesurer les tendances pour la première et la dernière hypothèse, la prospective présentée concerne donc le contexte de statut quo c'est-à-dire que les paramètres restent les mêmes.
La plantation qui s'est développée avec la dynamique de l'état sera en perte de vitesse avec la politique de désengagement. La prospective des plantations forestières montre une tendance à la baisse du nombre de superficie reboisée par le secteur public. Ceci est normal dans un contexte de désengagement de l'Etat et compte tenu du peu d’intérêt du privé pour le reboisement. Cependant, l'on ne sait pas pour le moment l'importance de l'implication du privé pour conclure l'état des plantations d'ici 2020, étant donné que le cadre incitatif existe (décret 2000/383 du 07 juin 2000 : incitation financière, incitation technique et incitation foncière), d'autant plus que des calculs économiques ont montré la rentabilité sur les espèces exotiques.
Les plantations villageoises ont atteint jusqu'à maintenant un peu plus de 16000 ha mais ces chiffres ne considèrent que les surfaces plantées qui ne peuvent pas arriver à maturité compte tenu des menaces permanentes que sont les feux de brousse et le défrichement.
Fig.1 : Prospective 2020 des plantations par le secteur public à Madagascar

Les ressources devront logiquement diminuer avec la persistance des contraintes actuelles. L'exploitation forestière diminuera en surface faute de ressource.
Les tendances de l'exploitation montrent également une diminution notable de près de 30% des surfaces faisant l'objet de prélèvement d'ici 2020. Ceci compte tenu de la diminution de la productivité des ressources forestières et cela malgré l'augmentation des besoins en matériaux bois, conséquence de la croissance économique qui s'est amorcée et de la mise en œuvre de la politique d'incitation à la construction immobilière. La tendance serait donc une diminution progressive des surfaces à exploiter de 40 000 ha à 30 000 ha/an. Ceci suppose qu'une valorisation des espèces devra s'opérer au niveau de la demande et que la recherche devra anticiper en proposant d'autres essences autochtones capables de suppléer les Ebènes, palissandres, ocotea ou canarium. Cette valorisation est d'autant plus probable que les besoins en bois augmentant (à cause de la croissance et des différents programmes de développement des infrastructures) la productivité par hectare doit nécessairement augmenter pour pouvoir satisfaire la demande.

Fig. 2 : Prospective 2020 de l'exploitation forestière
Les feux de végétation qui font partie du système de production agricole augmenteront encore un peu plus surtout si les techniques culturales ne se modernisent pas. Dans un contexte de statu quo les surfaces susceptibles d'être parcourues par les feux augmenteraient de plus de %pour passer de 12000 ha actuellement à un peu moins de 60000 ha en 2020.
Fig. 3 : Prospective 2020 des surfaces incendiées

Le défrichement persistera également et surtout dans les zones enclavées. Le défrichement suit également cette tendance avec une augmentation probable de près de % en risquant de passer de 50000 ha actuellement à plus de 300000 ha d'ici 20 ans. Mais, de fortes réserves sont à considérer au niveau du phénomène de défrichement. En effet, les chiffres actuels sont bien en deçà de la réalité alors que les surfaces défrichées n'augmentent pas forcement d'année en année puisqu'une parcelle est utilisée au moins sur trois ans avant sa mise en jachère.

Fig. 4 : Prospective 2020 de la tendance des défrichements
4.2.1 Etat des industries forestières
La prospective du secteur industriel montre une tendance à la baisse du nombre d'entreprise et de l'emploi alors que le chiffre d'affaire et la production tendent à l'augmentation passant respectivement de 200 à 1400 milliards de fmg et de 20 à plus de 140 millions de m3 d'ici 2020. Dans ce contexte, la viabilité de l'industrie forestière passe par une mécanisation et une professionnalisation du métier que malheureusement l'environnement macro-économique actuel ne permettrait pas faute de politique de financement et de programme de développement technologique. L'effet de cette contrainte serait alors l'augmentation des activités informelles (méthode d'exploitation et de transformation traditionnelle) qui se développera compte tenu des enjeux financiers concernés par les volumes de production et des chiffres d'affaires.
Fig.5 : Prospective 2020 de l'industrie du bois

La demande devra dépasser l'offre compte tenu de la dégradation forestière, du cantonnement d'une partie des forêts et du faible développement de la plantation. La productivité des forêts restante a été évaluée à près de 293 millions de m3 sur pied (soit l'équivalent à de près de millions de m3 EBR) par l'ONE. Or, la prospective de la demande montre une tendance à l'augmentation de près de 30 millions de m3 EBR par an soit près de 600 millions de m3 EBR (Equivalent Bois Rond). Malgré l'importance des reboisements d'Eucalyptus à même de se régénérer rapidement et le cantonnement d'une partie des forêts dans le domaine national, il est à craindre que la nécessité de la satisfaction des besoins en bois ne réduise à néant tous les efforts et les moyens mobilisés dans le cadre tant du programme environnemental, de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, que dans le développement industriel. En effet, la raréfaction du bois fera augmenter rapidement sa valeur et dans le cas où il n'y pas amélioration globale de l'environnement macro économique, la logique économique des acteurs qui est fondé sur la maximisation du profit devra engendrer une exploitation sauvage dégradante de la ressource forestière.

4.2.2 Implication sociale et économique
Sans une croissance plus élevée, le revenu par tête d'habitant aura tendance à stationner au deçà des 250$ par an. Ceci est trop peu élevé et fera persister les besoins monétaires des riverains de la ressource forestière ainsi que leur dépendance vis à vis des négociants urbains. Comme au niveau national la politique de développement des infrastructures de communication ne définit pas d'une façon claire et précise les objectifs à court et à moyens termes des réfections et des nouvelles constructions ! Il est impensable que d'ici 20 ans une amélioration notable soit susceptible de désenclaver toutes les zones et permettre ainsi aux communautés gestionnaires des ressources de renverser la tendance de domination des spéculateurs urbains.
Fig. 6 : Prospective 2020 de la tendance du revenu

Source: D'après la Stratégie Nationale de lutte contre la pauvreté, janvier 2000
4.2.3 La consommation d’énergie
La consommation énergétique reposera encore pendant quelques décennies sur le bois énergie. La prospective 2020 montre une augmentation de la consommation d'énergie tant au niveau des ménages que des autres utilisateurs en zone rurale ou en zone urbaine, sauf pour le bois de feu en zone urbaine. Les autres types de combustible augmentent également mais pas avec la même intensité (pente). Le gaz et l'électricité ont une pente faible frolant la stagnation tandis que le kérosène suit une courbe de la même façon que le bois de feu et le charbon de bois. Ceci serait du au fait que le kérosène est utilisé pour le transport et pas forçemment pour les ménages. Or, le cas est exactement le contraire pour l'électricité et le butane. Puisque l'industrie ne connaît pas encore un essor industriel remarquable, la consommation énérgétique restera encore alors importante au niveau de ménages. Or, la situation actuelle engendre que les ménages soient encore contraint au choix du combustible le moins couteux et pas forçemment le plus énérgétique ou le plus convivial. Cet état de fait devra s'ajouter pour accentuer les besoins en ressources forestières pour les 20 prochaines années.

Fig.7 : Prospective 2020 de la consommation énergétique des ménages

Fig. 8: Prospective 2020 de la consommation énérgétique à Madagascar

Fig.9: Prospective 2020 de la consommation énergétique des autres secteurs
4.2.4 Le cadre institutionnel
Compte tenu des différents programmes qui préconisent la réforme des institutions, le cadre institutionnel du secteur forestier devra pouvoir s'améliorer. Mais, des contraintes persistent puisque comme il l'a été mentionné dans les moteurs du changement, le service forestier a besoin des compétences humaines et des outils nécessaires à la dynamisation du secteur forestier. Or, il n'existe pas de plan précis de formation du secteur forestier qui devrait pourtant contribuer à la mise en œuvre des différents programmes élaborés actuellement.