CHANGEMENT POLITIQUE ET INSTITUTIONNEL DU SECTEUR FORESTIER
L'épuisement des maigres ressources forestières par la conjugaison simultanée d'une sécheresse persistante et de la satisfaction d'une forte demande en combustibles ligneux sous l'effet d'une croissance démographique très marquée, ont conduit à la destruction massive du couvert végétal.
Suite à cette situation, le Gouvernement Mauritanien a réalisé des efforts immenses dans le cadre de la lutte contre la déforestation et la conservation des ressources génétiques forestières avec la participation des populations locales. Ainsi les actions menées portent sur :
La mise en œuvre de projets de Lutte contre la Désertification (reboisement, fixation des dunes, interdiction des pratiques destructrices de l’environnement...) ;
La sensibilisation des populations sur les problèmes environnementaux pour une meilleure adhésion à la préservation des ressources naturelles ;
La diffusion des foyers améliorés pour limiter l’utilisation des ressources énergétiques (bois et du charbon de bois) ;
La diffusion du gaz comme moyen de substitution aux ressources naturelles ;
L’élaboration de textes réglementaires ouverts à la participation de la population et encourageant la sauvegarde des ressources naturelles ;
La signature et ratification de toutes les conventions internationales relatives à la gestion et sauvegarde de l’environnement d’une part, et des ressources naturelles en particulier ;
La préparation d’un code environnemental en vue d’harmoniser les différents cadres stratégiques d’interventions pour la prise en compte de la dimension environnementale dans toute action de développement. La loi cadre qui doit déboucher sur ce futur code de l’environnement vient d’être adopté (juillet 2000).
Orientations de gestion des ressources forestières
Les plantations forestières doivent avoir pour objectif de compléter le domaine naturel encore boisé, là où elles ne peuvent pas satisfaire les besoins économiques et sociaux en matière de protection des sols et des eaux, de la lutte contre l’ensablement ou de l’équilibre écologique (production - consommation), des produits forestiers. Il s’agit en fait de :
La satisfaction dans les meilleures conditions des besoins des populations en services fournis par la forêt ;
Du maintien des équilibres écologiques.
Pour y parvenir, on doit orienter les activités de reboisement vers :
La recherche d’un optimum économique ;
Un développement équilibré et intégré ;
La mise en valeur optimale des potentialités en terre, en eau et en ressources humaines ;
L’émergence d’une économie forestière.
Au point de vue technique, la Mauritanie a entrepris une vaste campagne de reboisement pour stabiliser les mouvements des dunes et lutter contre l’ensablement des agglomérations et des infrastructures socio-économiques de base.
Parallèlement à cette action capitale de fixation des dunes, d’autres mesures étaient engagées afin d’encourager la fixation des populations à leur terroir, à savoir :
Une importante campagne de sensibilisation à l’utilisation rationnelle de l’énergie traditionnelle (bois et charbon de bois) par la mise en place d’un foyer amélioré et l’étalement des points de vente du gaz butane à des prix promotionnels ;
L’instauration du vivre contre travail afin d’impliquer la population aux activités de reboisement et de développement du pays,
La réalisation des pare-feux pour sécuriser les pâturages des dégâts causés par les feux de brousse ;
La plantation de l’Acacia du Sénégal pour relancer la production de la gomme arabique et organiser la filière de commercialisation ;
La politique de gestion des zones humides qui a le mérite de préserver ces espaces de toute colonisation et pratiques agro-pastorales, pour jouer pleinement la double fonctionnalité de réservoirs de diversités bio-écologiques. C’est dans ce cadre qu’il y a eu la création de deux parcs nationaux (Banc d’Arguin et Diawling) pour la restitution et la réhabilitation de la flore et de la faune ;
La politique de classement des forêts : les forêts classées constituent des réservoirs d’espaces potentiellement favorables tant à la reconstitution de la faune sahélienne qu’à la conservation de la diversité biologique du pays en général et à la satisfaction des populations riveraines en particulier.
L'aménagement, la gestion et l'exploitation du patrimoine forestier sont régis par le code forestier. L’ancien code de 1982 consacrait, la domanialité de toutes les forêts non immatriculées et non concédées ou celles qui, mêmes immatriculées ou concédées, pour les collectivités et les particuliers qui peuvent détenir ou immatriculer en leurs noms des domaines forestiers (périmètres reboisés notamment), à l’Etat.
Ce code est du type centralisateur et confère à l'Etat et à ses démembrements tous pouvoirs en matière de surveillance, d'aménagement et d'exploitation des formations forestières.
Les collectivités riveraines n'ont que des droits d'usage notamment de circulation, de ramassage de bois mort, de récolte de fruits, de plantes alimentaires ou médicinales et de pâturage sans installation, même temporaire.
En ce qui concerne les forêts classées, le droit de pâturage est cependant soustrait aux droits d'usage, sauf dans les cas de force majeure. Le code interdit tout abattage d'arbres en zone sahélienne.
Selon les dispositions du code, des autorisations de coupes peuvent être délivrées à des exploitants forestiers régulièrement immatriculés auprès des inspections de la protection de la nature. Les permis de coupe donnent lieu à la perception de redevances fixées présentement à 160 UM/quintal pour le charbon et à 100 UM par stère pour le bois y compris le bois mort. La circulation des produits ligneux est également soumise à autorisation.
La faiblesse principale de ce code réside dans l'exclusion des populations riveraines de la gestion et de l'exploitation des forêts. Celles-ci sont les principales victimes de la déforestation mais ne tirent aucun revenu direct de l'exploitation des forêts.
Cette faiblesse est aggravée par l'incapacité des services spécialisés de l'Etat à assumer efficacement l'ensemble des attributions qui leurs sont dévolues.
Pour pallier les insuffisances de l’ancien code et être conforme à l'esprit des conventions issues de Rio, le Gouvernement a adopté le 20 janvier 1997 un nouveau code forestier (loi N°97-007). Ce nouveau code encourage la participation des communautés riveraines à la protection (défrichement, surpâturage et feu de brousse), l'aménagement et l'exploitation rationnelle des domaines forestiers.
Il prévoit la possibilité de concéder aux communes et, à travers elles, aux collectivités villageoises, une partie du domaine forestier de l'Etat, réparti en unités forestières.
L'application de cette clause doit être précédée par un inventaire des formations forestières existantes ainsi qu'un important travail de délimitation et de bornage des unités forestières.
L'Etat devra également élaborer un modèle de convention de gestion et former des cadres nationaux aux techniques d'aménagement et de gestion améliorée des unités forestières qui seraient concédées.
Dans cette perspective, il serait impératif d'harmoniser les dispositions du code forestier avec celles de la loi domaniale et notamment faciliter les procédures d'immatriculation et de délivrance des titres fonciers afin de sécuriser les investissements villageois et privés.
Les personnes physiques ou morales qui auront contribué de manière notable à la réussite de cette politique de l'Etat en matière de reboisement, de protection de l'environnement et de lutte contre la désertification pourront bénéficier d'un appui technique matériel et financier de l'Etat.
L'exploitation, à des fins commerciales, des domaines forestiers par l'Etat, les collectivités et les personnes physiques ne peuvent être faite que par vente de coupes, permis de coupe d'un nombre déterminé d'arbres, de pièces ou de stères ou par arrêté du Ministre chargé de l'environnement.
Le code n'est pas très explicite sur le niveau de redevances et les modalités de partage des revenus tirés de l'exploitation des unités forestières concédées aux collectivités.
L'esprit du texte suggère en tous cas que les revenus tirés de l'exploitation de forêts, ayant fait l'objet de convention d'aménagement et de gestion, soient pour l'essentiel affectés aux collectivités concernées en guise d'incitation.
Pour confirmer l’élaboration et la mise en œuvre des orientations politiques et le cadre stratégique en matière de protection de l'environnement, le Ministère du Développement Rural est devenu depuis 1992 le Ministère du Développement Rural et de l'Environnement.
La restructuration du Ministère du Développement Rural et de l'Environnement(MDRE), opérée en mars 1993 dans le cadre du Programme d'Ajustement du Secteur Agricole, a pour objectif de définir et d'exécuter les politiques intégrées de développement rural, d'améliorer la gestion des moyens financiers, matériels et humains, de décentraliser et d’intégrer les activités d'élevage, d'agriculture, d'environnement et d'aménagement rural puis d'encourager la prise en charge totale de la gestion des ressources naturelles par les populations locales concernées.
La transformation de la Direction de la Protection de la Nature (DPN) en Direction de l'Environnement et de l'Aménagement Rural(DEAR), marque une nouvelle étape vers le renforcement des responsabilités des institutions publiques chargées des questions environnementales et vers la confirmation d'une approche multisectorielle, intégrée et participative. Ainsi et conformément aux dispositions du Décret n°22/93 du 3 mars 1993 portant restructuration du MDRE, la DAER est chargée : d'élaborer les politiques cohérentes d'environnement et d'aménagement de l'espace rural, en particulier d'identifier les méthodes et techniques de lutte contre la désertification, la dégradation des sols et du couvert végétal. Elle a aussi en charge le contrôle et le suivi technique des établissements publics chargés des aménagements hydro-agricoles.
Pour mener à bien la mission qui lui est dévolue, la DEAR dispose de quatre services techniques notamment : Service de la Protection de la Nature, Service de l’Environnement, Service de l’ingénierie et Service de l’Hydrologie. Chacun de ces services comprend 2 à 4 divisions.
La mission assignée à la DEAR est la protection des sites et paysages, de l’amélioration du cadre de vie, de la lutte contre les pollutions et les nuisances de toutes sortes, de la lutte contre la désertification, du développement de la production ligneuse, de la protection de la faune et de la flore, de l’aménagement de l’espace rural, du développement de l’équipement et des infrastructures du domaine rural.