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CHAPITRE IV: LES INSTITUTIONS DE GESTION DES RESSOURCES NATURELLES


L'historique de la décentralisation au Mali

L'administration coloniale avait jeté les bases d'une décentralisation moderne que la première République, née en 1960, a essayé d'élargir en créant la commune de Bougouni. La deuxième République, née en 1968 d'un coup d'Etat, a créé des structures dotées de pouvoir de conception, de décision, de programmation, d'exécution et de contrôle au niveau régional, local et sub-local. La troisième République, démocratiquement établie en 1992, a mis en place une mission de décentralisation qui, dès 1993, a élaboré une série de lois et décrets dont la loi N°93-008 du 11/02/93 déterminant les conditions de libre administration des collectivités territoriales, la loi N°95-034 du 12/04/95 portant code des collectivités territoriales, et la loi N°96-050 du 16/10/96 portant principes de constitution et de gestion du domaine des collectivités territoriales.

Ces textes sont conformes à la Constitution de la République du Mali du 25 février 1992 et à la loi N°86-91AN-RM portant Code Domanial et Foncier.

Les institutions étatiques et les partenaires au développement

Au Mali, la constitution définit l'orientation générale de la politique de décentralisation alors que des institutions spécifiques jouent des rôles relatifs à des ressources particulières. Il en va ainsi des codes élaborés pour le foncier, les textes forestiers, etc...

Le Code Domanial et Foncier.

Selon le code de 1986 en vigueur, la condition de l'appropriation foncière, c'est l'immatriculation. Cette conditionnalité n'a jamais été satisfaites par les ruraux qui, du reste, n'ont jamais réclamé un tel droit ni un tel statut pour les terres qu'ils exploitent.

Le nouveau Code Domanial et Foncier élaboré mais non encore voté prévoit plus d'ouverture en direction de tous les acteurs conformément à l'esprit de la décentralisation. Ledit code laisse une place confortable et explicite pour les droits coutumiers qu'il reconnaît et qu'il tente encore de conduire vers une modernité, à savoir l'appropriation individuelle à partir du respect de certaines conditions préalables.

Les textes forestiers de 1986 ont été interprétés de façon partisane par les agents forestiers dans les localités. Il faut rappeler que c'est en protestation contre les abus commis par lesdits agents dans l'application des textes que le monde rural a compris sa propre participation à la révolution de Mars 1991. Avec la restructuration du Ministère chargé du Développement Rural et de l'Eau (qui a désormais 3 directions nationales au lieu de 6), l'Etat recentre ses actions en faisant un distinguo entre les rôles qu'il peut jouer au même titre que les autres intervenants, et les rôles qu'il ne devrait pas jouer et qui relèvent du secteur privé. Les 3 directions nationales, à travers leurs démembrements, réaliseront des activités de service public et apporteront leur appui technique et leurs organisations professionnelles, plus particulièrement de vulgarisation en conseils de gestion et de recherche-développement.

Forêt et décentralisation

Depuis la décentralisation le domaine national forestier comprend: le domaine forestier de l'Etat, le domaine forestier des collectivités décentralisées et le domaine forestier des particuliers.

Les textes forestiers révisés accordent la priorité au droit d'usage aux populations riveraines et réglementent les activités de pêche, de chasse et de cueillette.

Dans les textes de la décentralisation relatifs au schéma d'aménagement, il est fait mention des domaines composant le terroir de la commune et qui sont: les domaines agricole, de l'habitat, faunique, forestier, minier, pastoral, et piscicole.

Les textes ne disent pas de quelle manière seront disposés les différents domaines les uns par rapport aux autres.

Chaque commune étant gérée par un conseil municipal, ce dernier devra prendre des décisions relatives aux différents domaines ou espaces, ce qui exige de lui des compétences pour persuader les institutions traditionnelles qui sont villageoises et qui ne sont pas suffisamment impliquées par défaut d'informations totales. Certes la loi suggère que le conseil municipal requière l'avis du conseil de village. Il reste évident que seule une institution villageoise bien informée peut donner un avis éclairé.

Le conseil de village a le devoir d'élaborer et de mettre en oeuvre des actions de développement au bénéfice de sa communauté.

La collaboration comme forme de coexistence

Les services de l'agriculture, de l'élevage, de la pêche, des forêts et les organisations professionnelles telles que les Chambres régionales d'agriculture (CRA) et leurs subdivisions professionnelles spécifiques sont appelés à fonctionner avec les institutions locales notamment pour la fixation et la perception des redevances: dans le domaine forestier, l'art. 23 de la loi 96-05 prévoit des contrats de gestion dans les mêmes conditions que ceux prévus pour le domaine agricole.

Notons que si cette collaboration est mentionnée dans les textes de loi, aucune obligation de gestion commune ou de gestion partagée n'est faite aux organisations professionnelles et aux collectivités décentralisées.

Or, l'avenir et le succès de la décentralisation dépendent fortement de la qualité des relations entre institutions coutumières et institutions modernes. C'est pourquoi cette collaboration ne devrait pas rester tributaire du bon vouloir du conseil communal, tel que cela peut être compris à la lecture de la loi N°96-050 du 16 Octobre 1996.

La tutelle comme responsabilité de l'Etat

La tutelle est obligatoire dans la mesure où c'est principalement à travers elle que l'Etat manifeste sa présence. Cette présence de l'Etat est d'autant plus prouvée que, selon l'article premier de la loi N°93008 du 11 Février 1993 déterminant les conditions de la libre administration des collectivités territoriales, c'est dans le respect de l'unité et de l'intégrité du territoire (national) que les collectivités territoriales de la République du Mali sont: les Régions, le District de Bamako, les Communes urbaines et les Communes rurales.

La tutelle permet une surveillance de conformité avec les lois.

4.1. Les institutions de gestion à Diangoumérila

Comme partout, au Mali et ailleurs en Afrique, chaque village recèle désormais des institutions modernes en sus de ses institutions traditionnelles de gestion de la vie économique, économique, culturelle et sociale. Une analyse fine visant à distinguer le moderne du traditionnel n'est pas le propos recherché ici. Le point de distinction sera la rencontre historique de deux sociétés défendant chacune un type de droit. Le droit non écrit des indigènes est coutumier alors que celui écrit du colonisateur est moderne. Ainsi, tout ce qui vient du dehors (hors du village, de l'ethnie, des traditions), est considéré comme moderne au sens de nouveau mais sans pour autant être forcément positif. Et les villageois sont méfiants des nouveautés.

Et, dans la mesure où, les organisations traditionnelles sont nécessairement sollicitées - sinon à qui s'adresserait-on dans un village?- lors de l'introduction du “nouveau”, on obtient une organisation traditionnelle jouant un scénario “moderne”, d'où cette qualification de “néo-traditionnel”.

4.1.1. Les institutions néo-traditionnelles de Diangoumérila

Le chef de village joue un rôle entièrement écrit pour lui; ce rôle fait de lui un “caméléon” qui est tantôt un chef coutumier pour les villageois, tantôt un une autorité moderne investie de mission par une instance extérieure au village.

Dans le Koussan (commune de la forêt de Diangoumérila), aucun chef de village, en tant qu'autorité coutumière, n'est compétent pour attribuer des terres. Mais, en tant que représentant de l'administration, le chef de village est présent aux séances de réunion de la commission de classement de la forêt.

A Diangoumérila, ni la forêt ni la terre de culture n'ont jamais été objets de litige. L'explication réside dans la croyance selon laquelle la terre est sacrée, qu'elle appartient plutôt aux génies et qu'elle n'a qu'une valeur d'usage pour les hommes: donc il ne saurait y avoir de conflit à son propos, et d'autant moins que les fétiches des ressources ne manqueront pas de condamner quiconque se rendant coupable de sacrilège.

L'abondance des ressources naturelles explique le respect voué jusqu'ici aux coutumes qui ont, du reste, la souplesse des règles; on a l'impression que les anciens avaient conçu des règles dont l'application devait rester quasiment impossible, tant l'étendue des terres agricoles au regard de la population semblait inépuisable.

Les étrangers au terroir qui viennent demander des terres cessent d'être considérés comme des étrangers dès lors qu'ils s'installent et épousent des filles du village. Le mariage se présente comme un moyen d'intégration intercommunautaire et n'est pas considéré comme une affaire interindividuelle: c'est pourquoi aucun village du Koussan ne compte d'“étrangers”.

Les chefs de village ont toujours face à eux une communauté sans ségrégation où ils ne règlent que les litiges nés de l'application d'une décision administrative. Il représente le village dans les litiges entre villages.

Le gwatigi est une institution qui a un pouvoir territorial et politique moins étendu que celui du chef de village, beaucoup plus fort parce que plus enraciné et plus proche des préoccupations sociales, culturelles et surtout religieuses des habitants du village.

Le gwa peut être un lignage, une multitude de lignages, sous l'autorité d'un seul chef, le gwatigi. Autant le chef de village est inapte à gérer les ressources naturelles, autant le gwatigi est le maître incontesté de ses décisions dans sa communauté dans les domaines sociaux tels que le mariage, le baptême, le divorce, les litiges (réduits aux divorces et aux dégâts causés aux champs) et dans le domaine des préventions des calamités alimentaires ou environnementales. Il arrive qu'un chef de village soit incapable de résoudre un problème du village, mais il n'arrive quasiment jamais qu'un gwatigi baisse les bras devant une préoccupation de sa communauté. Le gwatigi a une telle autorité pour trancher les litiges qu'il constitue le dernier recours avant la saisine des autorités administratives. Il est dépositaire des connaissances techniques, du savoir-faire, de la mémoire collective, des croyances, du droit et il ne tranche aucun litige s'il n'est entouré du Conseil des Sages formé par les chefs de lignages composant le Gwa.

Le chef de lignage a l'autonomie de gestion foncière mais en tant que membre du conseil des sages du gwa, il est tenu d'informer le gwatigi de toute attribution qu'il fait. De village en village, la procédure d'information peut varier: c'est soit au moment de la demande soit au cours de l'attribution. Son autorité ne concerne que les espaces reconnus comme propriétés du lignage. Les terres hors de la gestion des chefs de lignages constituent les terres publiques que seul le gwatigi peut attribuer.

Le Conseil des sages est la plus haute autorité de décision et il est composé de membres de qualités et de statuts différents parce que peuvent y prendre place sous la présidence du Coordinateur des gwatigi: tous les chefs de lignage, le chef de village, l'imam, et toutes autres compétences en cas de besoin. C'est ainsi que le Conseil peut être élargi aux jeunes et aux femmes selon l'ordre du jour. Les décisions extrêmement importantes se prennent à l'unanimité des membres permanents.

Chaque village a son autonomie et son originalité pour la constitution des instances de règlement des conflits.

4.1.2. Les institutions religieuses et culturelles

L'imam est une autorité religieuse et aussi une référence autant pour les questions à caractère socio-religieuse que pour les ressources naturelles. Il est d'autant plus écouté et respecté que, comme les hommes de caste, il a eu à bénir chaque famille pour soit un mariage, soit un baptême, soit un décès, soit pour la réalisation de voeux particuliers et secrets.

Le “Zome”, gardien et instructeur des jeunes circoncis du village, il est considéré comme un guide partageant beaucoup de secrets avec les multiples générations de circoncis qui se suivent dans l'histoire du village. Il devient une référence morale et la coutume veut que ceux qu'il a encadrés lui renouvellent en toutes circonstances leur reconnaissances: ce contact renouvelé est donc très utile pour la recherche de solutions aux conflits locaux.

Le “Muso Koma” ou fétiche de femmes est une association protectrice et très crainte à cause de son efficacité contre les calamités. La qualité et le statut de ces femmes d'un certain âge en garantissent le respect qui lui est voué.

Les guérisseurs du Koussan sont parmi les meilleurs herboristes du pays. Les guérisseurs sont parmi les principaux usagers de ressources naturelles et leur fine connaissance du cycle végétatif et des vertus qui y sont attachées les placent également parmi les principaux protecteurs de la nature. Très strictes sur les règles traditionnelles les guérisseurs font en réalité un usage limité ou quasi nul de la forêt de Diangoumérila parce que les terroirs recèlent d'énormes potentialités en flore médecinale.

Les musiciens et les danseurs. Ici, comme partout ailleurs en Afrique, la musique est le véhicule et le support du fonctionnement des institutions populaires. Par elle, on convoque une assemblée, une battue, une pêche collective, une recherche de personne en perdition en brousse, un début et une fin d'événement. Dans ce coin du Wassoulou, rien ne se fait sans la musique, d'où la place prépondérante qu'occupent les musiciens. A preuve, la corporation la plus structurée, celle des chasseurs est connue du peuple par sa musique d'abord.

Les chasseurs et les musiciens sont tout d'abord célèbres pour leur folklore spécifique: c'est une musique dansante empreinte de sacralité et réservée aux braves praticiens de l'art. Eminents chanteurs les chasseurs-danseurs constituent pour la société et les ressources naturelles le protecteur au quotidien et l'espoir le plus sûr pour la sauvegarde de toute valeur traditionnelle d'utilité incontestable. Leurs utilités les plus visibles pour les non initiés sont, entre autres: abattre les fauves menaçant la sécurité des hommes, servir de corps d'armée en cas d'agression de la communauté, poursuivre les bandits, assurer la garde des champs, assurer la protection des femmes dans le besoin de se rendre en brousse, rechercher les personnes égarées, animer les grands événements tels que funérailles, réception; transmettre des messages urgents, réparer les profanations de la brousse susceptibles d'engendrer des calamités, etc...

4.1.3. Les institutions modernes

Sous la première République (socialiste), les populations étaient totalement privées d'initiatives dans le seul but de permettre à l'Etat d'asseoir des principes et des normes standard dans tous les domaines de la vie économique, sociale et même culturelle. L'Etat, malgré le passage à une deuxième république, continue à garder le monopole des initiatives de développement. C'est avec la naissance d'une troisième république que les communes naissent ensemble partout.

Ici, comme dans le Samori, dans tous les villages il existe des structures adaptées aux besoins du développement. Certaines d'entre elles se sont pérennisées à force de sollicitations par tous les régimes parcequ'elles sont, d'une part, conformes à la tradition qui les a créées et que, d'autre part, elles demeurent fonctionnelles dans tout cadre socio-politique qui souhaite une main-d'oeuvre disciplinée et organisée. Le “TON” est le prototype d'une telle structure.

Le “ton” est le mot qui désigne tout groupe de la communauté orienté vers un but plus ou moins permanent.

Ici comme dans la totalité des villages du Mali, le partenaire actif prestataire de service public est le “ton”. Il est vrai que dans quelques communes il faut compter avec le risque d'écarter des institutions néo-traditionnelles au profit des organisations professionnelles.

Certes, à l'heure actuelle, les élections municipales ont eu lieu; mais il faut peut-être savoir si toute l'information relative non seulement à la libre administration des collectivités mais, aussi aux conséquences d'ordre économique, réglémentaire etc...ont été suffisamment dévoilées aux populations. Les populations, à l'époque des présentes enquêtes, n'avaient pas acquis toute la conviction du bien fondé de la décentralisation; cependant, elles avaient sûrement l'espoir d'obtenir ce qui leur semblait convenir au niveau local si elles gardaient le libre choix de leurs dirigeants.

4.1.4. Les aspects frontaliers

Les relations frontalières forestières ne sont pas conflictuelles. Les frontières entre le Mali, la Guinée et la Côte d'Ivoire sont très animées mais peu respectées par des populations qui ne vivent l'effet de frontière qu'en présence d'agents de l'Etat. Le commerce trans-frontalier etc déjà une amorce de coopération entre communes de part et d'autre d'une ligne imaginaire dénuée de sacralité.

N°1 Représentations des Institutions coutumières Villageoises De l'espace-forêt de Diangoumérila (village de Pissa, commune rurale de Koussan, cercle de Yanfolila, région de Sikasso).

Institutions

Dimension
Sociale

Ressources
Naturelles

Dimension
Spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Chef de village

Chef de toute la population du village

Voie délibérative et consultative dans la Gestion des ressources naturelles (GRN)

Le Terroir villageois

Administrateur et dépositaire des actes de gouvernance

Les ressources naturelles ne lui appartiennent pas.

Gwatigi

Chef d'un certain nombre de lignages juxtaposés: le Gwa

“Propriétaire” des ressources du Gwa

Tout ou partie du terroir villageois

Gestionnaire et Protecteur occulte des RN

Les Gwatigi ont un coordinateur. Chaque Gwatigi est impliqué dans la GRN

Lignages

Ensembles des ménages ayant le même patronyme

Propriétaires des RN à l'intérieur du même lignage

Une portion du Terroir: Gwa

Se réfère au Gwatigi pour gérer les RN

Seul le lignage fondateur du Gwa peut assurer la chefferie

Chef Unité de Production

Familles/
Ménages

Exploitation des RN

Champs et RN

Sous le contrôle des chefs de lignages

Les membres de l'Unité de Production ont les mêmes droits de jouissance

Chasseurs

Tous les praticiens du village

Exploitants multiformes

Terroir villageois et inter-villageois

Garant de la gestion paisible des RN

Les chasseurs constituent une corporation sollicitée par toutes les institutions, les populations et les usagers

Tableau N°2 Représentations des Institutions coutumières Villageoises, espace-forêt Diangoumérila (CR de Koussan, cercle de Yanfolila, région de Sikasso).

Institutions

Dimension
Sociale

Ressources
Naturelles

Dimension
Spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Artisans (forgerons, menuisiers et potières).

Groupe de métiers

Utilisateurs du bois et de l'argile

Terroirs villageois et inter-villageois

Accomplir des actions spécifiques (abattages, protection et surveillance)

Instruments d'exploitation des ressources naturelles.

Sociétés secrètes des femmes

Veuves et vieilles du terroir villageois

Lutte mystique contre les catastrophes naturelles (insectes, sécheresses)

Initiation des non initiés, encadrement.

Terroirs villageois

Protection mystique des RN

Elles interviennent dans la gestion et dans la résolution des conflits sociaux liés à l'usage des RN

Imam et Zome

Chefs spirituels de tout le village

Moralisation de la vie sociale

Prévention et Gestion des conflits

Prévention et Gestion des conflits

L'Imam et le Zomé ont une influence sur plusieurs générations: tenures, actes des institutions de GRN

Artistes

Dépositaires de la tradition orale

Célébration des événements relatifs à la Gestion et à l'exploitation des RN


Animation sociale, diffusion de l'information socio-culturelle.

Les artistes participent à la recherche de solutions et contribuent à l'adoption de ces solutions.

Association des Groupes d'Ages

Tous les villageois sans distinction de sexe et de lignage

Surveillance, formation aux us et coutumes

Terroirs villageois

Instruments de gestion et d'exploitation des RN

Les associations de groupes d'âge assurent la police (sociale, économique, environnementale), de prestations de services et/ou rémunérées.

RN: Ressources Naturelles
GRN: Gestion des Ressources Naturelles

Litiges. Cependant, deux éléments, le gwatigi et l'imam respectivement représentant de la tradition profonde et de la religion manifeste, demeurent des recours qu'il ne serait pas souhaitable d'épuiser (dans le sens social et juridique) sous peine de bannissement implicite pour tout récalcitrant.

4.2. Le institutions dans le Samori.

Chaque institution, moderne ou traditionnelle, joue un rôle spécifique. Toutefois, les institutions étatiques et locales ont appris à travailler ensemble dans la forêt de Samori quoiqu'elles utilisent des méthodologies souvent divergentes.

4.2.1. Les institutions modernes: démembrements de l'Etat, chambres consulaires d'agriculture, partenaires au développement.

L'encadrement rural, par voie d'appuis-conseils est dispensé aux usagers par les démembrements du Ministère du développement rural et ont pour noms A-SLACAER et A-SLRLC.

L'aménagement et l'équipement sont aux mains du projet d'aménagement du terroir, PAGTV/SG appuyé par un nombre important de sources de financement et de sous-projets. Les institutions modernes sont nombreuses et elles sont caractérisées par leur existence mesurée dans le temps et dans l'espace en fonction de buts ponctuels à atteindre alors que les institutions traditionnelles se manifestent par leur pérennité dans la forme et leur adaptabilité aux caprices politiques, ce qui fait dire à certains chercheurs qu'il n'existe, à l'heure actuelle que des institutions néo-traditionnelles.

4.2.2. Les institutions néo-traditionnelles.

Dans la zone d'étude, l'autorité coutumière de chaque village repose sur le fonctionnement de 5 institutions: le chef du culte, le chef coutumier, le juge (cadi ou sariatigi), le chef de village (politico-administratif) auxiliaire de l'administration d'Etat et le conseil des sages.

Le chef du culte, le plus âgé du lignage, est toujours issu de la famille fondatrice du village-mère et il s'appelle Hogon chez les Dogons, Zora chez les Dafing et MawDo-leenyol. La sacralité de la propriété foncière sur le terroir villageois tient au fait que le chef du culte est aux yeux des populations <<le propriétaire de l'âme de la terre>>.

Chef religieux, chef de famille, chef de communauté, le chef du culte, dans la forêt du Samori, décentralise son pouvoir par délégation aux chefs de lignages. Lorsqu'un chef de culte arbitre, ses indications ont valeur de paroles divines.

Le Chef de village Sa fonction, distincte de celle du chef de culte, a certes une origine traditionnelle mais dont la pratique s'est hybridée avec les rôles d'un type nouveau que lui ont fait jouer les administrations pré et post indépendantes. Il est utile de savoir que l'on peut difficilement opposer le chef du culte et le chef de village parce qu'ils sont sinon frères, du moins issus du même lignage fondateur du terroir.

Le conseil de Sages regroupe le chef de village et les doyens des lignages du village, sans distinction de classe sociale ni d'appartenance ethnique. Le Baouro chez les Dogon, les Massaden et Zoraden chez le Dafing, le Batu Mawdo chez les Peuls constitués sur fond gérontocratique, sont les véritables contre-pouvoirs qui jouent le rôle de société civile. Le conseil des sages a droit de regard sur tout ce qui touche à l'existence et aux moyens de survie de la communauté.

Le conseil des sages requiert, à chaque fois que cela s'avère utile, l'éclairage du chef de culte animiste ou musulman.

Le Juge du village, Sariatigi chez les Dafing ou Cadi chez les Peuls, est choisi pour son érudition et ses qualités morales. Il jouit de son indépendance quoique sa nomination ait été prononcée par le chef du culte. Sa juridiction se limite au terroir originel du village.

Les autres institutions dans le Samori

Aux institutions gérontocratiques et démocratiques, à fonctions délibératives, s'ajoutent d'autres relevant de groupes d'âge, de sexe ou de catégories socio-professionnelles et qui jouent le rôle d'instruments de gestion des ressources naturelles.

La spécifité de certaines activités telle que la forge, la menuiserie (pourvoyeuses d'outils de travail à l'ensemble de la société) permet d'accéder aux ligneux en juste proportion aux besoins immédiats.

Le Bara-Hogon, ou <<roi de la brousse>>, constitué des aînés mâles des familles, est chargé de la surveillance de ligneux du terroir.

L'équipe des sanctions, le Bojinaton ou Ton, est une association de jeunes pouvant user d'une riche panoplie d'armes morales contre les malfaisants. Elle dispose de l'arme de l'humiliation publique contre les usagers délinquants; elle use aussi de la bouffonnerie, de la bravoure, des fétiches et du stoïcisme pour cultiver l'esprit de responsabilité et d'équipe.

Grâce à cet esprit d'équipe et de responsabilité, chez les Dogons les Almodiou sont compétents pour jouer aujourd'hui un rôle majeur dans la décentralisation; leur fédération au niveau communal devrait être un moyen puissant de surveillance des ressources naturelles et de l'occupation de l'espace. Notons que les Almodiou ont su résister aux tentatives d'étouffement faites par les services locaux des Eaux et Forêts.

Les Almodiou fonctionnent au-delà des limites des terroirs villageois et utilisent un réseau d'information dans les foires hebdomadaires. Ils disposent d'un organe directeur au sein duquel le seri est le chef chargé de la discipline; le saga est adjoint, conseiller et informateur du seri; le balajiriwon est le gérant des ressources; le jiriwon est le juge des litiges; les soroman, délégués des séri au niveau du village, sont des instructeurs des jeunes dans l'art de protéger les ressources naturelles; les brigadiers villageois, sont des surveillants volontaires des ressources sous les ordres des Soroman des villages.

Dans le domaine de la police sociale il existe également des auxiliaires supra-villageois (kaana) et villageois (tondéni). Ainsi, le tondéni assure la police sociale sous la supervision du zora ou du masa selon les ethnies. Ils assurent également la police économique en veillant sur la sécurité des récoltes stockées dans les champs; ils assurent la police environnementale en relation avec la transhumance et les méfaits de l'élagage des ligneux par les pasteurs.

4.2.3. Les effets de l'évolution du temps

De la période animiste à la période d'indépendance, en passant par celle de l'islamisation, des royaumes du Macina et de Ségou, de la colonisation française, les institutions traditionnelles ont connu des secousses, des déformations et souvent des collaborations voire des hybridations avec les institutions des occupants.

A l'ère animiste, c'est le souci de pureté et de morale de bonne conduite qui a présidé à la naissance et au maintien des diverses organisations vouées au cadre de vie et de survie collective. C'est pourquoi toutes obéissent plus aux chefs religieux qu'aux chefs temporels.

- Avec l'islamisation (par les empires théocratiques), le maintien du chef, de village conquis, dans ses fonctions administratives a accrédité davantage cette institution. Par ailleurs, au plan judiciaire, la cohabitation entre les règles coutumières et la Charia a été plutôt peu conflictuelle.

- L'administration coloniale a fait du chef de village son auxiliaire et le village en a fait son délégué auprès du pouvoir. A côté des grands principes de cette administration, les pratiques nées de l'animisme et de l'Islam ont perduré.

- A l'indépendance, le Masa choisit ses conseillers au lieu de les faire élire par la population. Le chef de village, en sa qualité d'auxiliaire de l'administration, est désormais le promoteur du développement du village.

Sous l'impulsion de la riziculture, l'émergence de multiples hameaux de culture a quelque peu affaibli le pouvoir centralisé de certaines institutions et, cela, avec l'aide de l'administration malienne. En effet, cette culture a changé la confiance que les propriétaires de terres avaient en méfiance définitive vis-à-vis des demandeurs qui, après quelques années d'exploitation, refusaient de restituer les champs empruntés, argant que la terre appartient à l'Etat, c'est-à-dire à tous.

La rupture du fragile équilibre entre autorités coutumières et administration du fait de la création de villages-hameaux riziculteurs dans la vallée du Sourou.

Tableau N°7a Rôles des institutions foncières coutumières dogons de l'espace-foret du Samori (village de Pissa, commune rurale de Baye, cercle de Bankass, région de Mopti).

Institutions

Dimension
sociale

Ressources
Naturelles
(GRN)

Dimension
spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Hogon

Patriarche du lignage fondateur du territoire du village mère Kani Bonzon et des villages satellites crées par les ressortissants de Kani Bonzon.

Détenteur des actes coutumiers en matière de GRN.

Territoire du village mère Kani Bonzon et des villages satellites dont Pissa.

“Propriétaire de l'âme de la terre”.

Protecteur et Gestionnaire mystiques des RN.

Fonctions multiples de police (sociale, économique et environnementale).

Ordonnateur des sacrifices de purification de la terre.

Chef coutumier du village mère

Gestionnaire coutumier actif du territoire.

Gère les RN par voies consultative et délibérative.

Territoire village mère Kani Bonzon et des villages satellites dont Pissa.

Gestionnaire délégué du patrimoine foncier des lignages

Fonctions déléguées multiples sous l'égide du Hogon.

Juge du Village

Familles lignagères, ménages, usagers autochtones et allochtones.

Moralisation de la vie sociale dans le territoire.

Territoire et terroirs inter-villageois.

Conseiller spécial du Hogon chargé de la gestion des conflits.

Désigné suite à des recherches mystiques et aux enquêtes de moralité, il jouit d'une grande notoriété dans le territoire.

Conseil des Sages (BAURO)

Ensemble de Patriarches des familles lignagères du territoire

Propriétaires des patrimoines foncièrs lignagers

Territoire, terroirs villageois et patrimoines lignagers

Délibère sur tous les problèmes afférents à la GRN.

Groupe de Gérontocrates s'assimilant à un réel contre-pouvoir.

Tableau N°7b Rôles des institutions foncières coutumières dogons de l'espace-forêt du Samori (village de Pissa, commune rurale de Baye, cercle de Bankass, région de Mopti).

Institutions

Dimension
sociale

Ressources
Naturelles
(GRN)

Dimension
spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Chef de lignage (Chef Unité de Production)

Familles/
Ménages

Exploitation des RN du lignage

Champs, Ressources communes

Gestionnaire du patrimoine lignager

Les membres du lignage ont les mêmes droits de jouissance.

Chasseurs

Explorateurs des sites d'implantation des villages.

Exploitants multiformes des RN (explorateurs, thérapeutes, médiateurs).

Territoire et Terroirs inter-villageois.

Conseillers spéciaux du Hogon et garants de la gestion paisible des RN.

Ils interviennent dans la résolution de tous les conflits villageois et inter-villageois.

Les chasseurs constituent la corporation la plus sollicitée par les femmes, toutes les institutions et tous les usagers.

Chef politico-administratif du village

Auxiliaire de l'Administration Publique (coloniale et post-coloniale).

Gère les RN par voie consultative auprès de l'Administration Publique et du Chef coutumier du village.

Terroir villageois de Pissa.

Représentant de l'Administration publique.

Chargé des relation extérieures du pouvoir coutumier.

A l'époque actuelle la conduite du chef de village est écartelée entre le maintien des pratiques polythéistes et l'adoption franche du monothéisme.

Conseil de Village

Ensemble des Patriarches des familles lignagères du terroir villageois.

Assiste le chef politico-administratif dans la gestion du terroir villageois.

Terroir villageois de Pissa.

Délibère sur tous les problèmes afférents à la GRN.

Cette fonction date de l'indépendance du Mali.

Tableau N°8 Rôles des institutions foncières coutumières peules de l'espace-foret du Samori (village de Libbé-Peul, commune rurale de Baye, cercle de Bankass, région de Mopti).

Institutions

Dimension
sociale

Ressources
Naturelles
(GRN)

Dimension
spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Mawdo Leenyol

Patriarche du lignage fondateur.

Détenteur des actes coutumiers de l'organisation de l'espace foncier et de GRN.

Terroir villageois et espaces pastoraux.

Imam et Garant du culte.

Protecteur mystique des RN.

Ordonnateur des sacrifices de purification de la terre.

Aamiru

Chef coutumier et politico-administratif du village. Auxiliaire de l'Administration Publique.

Voies consultatives et délibératives dans la GRN

Terroir villageois et espaces pastoraux.

Gestionnaire actif du patrimoine foncier des lignages.

Fonctions multiples de gestion du terroir.

Juge du Village (Cadi)

Encadrement des familles, ménages, usagers (autochtones et allochtones).

Moralisation de la vie sociale

Terroirs villageois et inter-villageois.

Gestionnaire des conflits sociaux et fonciers.

Il jouit d'une grande notoriété auprès de la population, des institutions foncières et des instruments de GRN.

Conseil des Sages (Batu Mawdo)

Assemblées des Chefs lignagers fondée sur la gérontocratie.

Propriétaires des RN.

Terroir villageois, patrimoines lignagers, espaces pastoraux.

Gestionnaires des RN délibérant sur tous les problèmes afférents à la GRN.

Assiste le Mawdo Leenyol et l'Aamiru dans la gestion du terroir.

Hoore Golle

Encadrement des usagers de l'espace de production (agriculture, élevage)

Protection de l'espace de production,

Exploitation des RN

Terroirs villageois et inter-villageois

Protecteur mystique des RN conféré par le Mawdo leenyol

Au nom du Mawdo leenyol, il officie les sacrifices visant à purifier les champs et pâturages.

Chef de Lignage (Chef Unité de production).

Familles/
Ménages

Se réfère à l'Aamiru pour l'exploitation des RN.

Champs, ressources pastorales.

Gèrent les RN sous l'égide du Chef de lignage

Jouit des mêmes droits que les autres membres du lignage.

Tableau N°9a Rôles des institutions foncières coutumières dafings de l'espace-foret du Samori (villages de Baye et Oula, commune rurale de Baye, cercle de Bankass, région de Mopti).

Institutions

Dimension
sociale

Ressources
Naturelles
(GRN)

Dimension
spatiale

Fonctionnalité
/Rôles/
Attributions

Observations

Zora

Patriarche du lignage fondateur

Détenteur des actes coutumiers du territoire.

Territoire (village mère et villages hameaux)

Purificateur de la terre, Chef de culte

Fonctions rituelles, foncières et GRN.

Zoraden

Membres du lignage fondateur

Détenteurs des actes coutumiers du territoire.

Territoire (village mère et villages hameaux)

Assistants gestionnaires rituels du Territoire

Organisation cadastrale et rituelles.

Massa

Appartient au lignage des conquérants

Gestionnaire actif (Territoire et RN)

Territoire (village mère et villages hameaux)

Gestionnaire actif du patrimoine foncier

Fonctions multiples (foncières et GRN)

Les conquérants ont conclu un pacte social avec le lignage fondateur

Massaden

Membres du lignage des conquérants

Assistants gestionnaires du Territoire

Gestionnaires actifs (villages hameaux)

Territoire (village mère et villages hameaux)

Assistants Gestionnaires du patrimoine foncier

Organisation cadastrale et GRN

Chasseurs

Explorateurs des sites d'implantation des villages

Exploitants multiformes des RN (explorateurs, thérapeutes, médiateurs)

Villages mères (Baye et Oula) et villages-hameaux

Conseillers spéciaux du Zora et du Massaké

Corporation très sollicitée par les femmes, les institutions et les usagers en matière de renforcement de la cohésion sociale et de santé

Tableau N°9b Rôles des institutions foncières coutumières dafings de l'espace-foret du Samori (villages de Baye et Oula, commune rurale de Baye, cercle de Bankass, région de Mopti).

Institutions

Dimension
sociale

Ressources
Naturelles
(GRN)

Dimension
spatiale

Fonctionnalités
/Rôles/
Attributions

Observations

Juge du Village

(ChariaTigi)

Membre du lignage fondateur chargé de l'encadrement des familles et ménages

Moralisation de la vie sociale

Village mère (Baye et Oula) et villages hameaux)

Gestionnaire des conflits

Il est désigné par le Zora

Conseil des Sages Zoraden-Masaden

Ensemble des chefs lignagers

Propriétaires des RN du lignage

Gestionnaires des patrimoines lignagers

Délibèrent sur les problèmes afférent à la gestion du terroir

Assistent le Zora et le Massake dans la gestion du terroir.

Chef politico-administratif du village

Auxiliaire de l'Administration Publique (coloniale et post-coloniale).

Gère les RN par voie consultative auprès de l'Administration Publique et du Chef coutumier du village.

Villages mères (Ba-et Oula) et villages hameaux.

Répondant du pouvoir coutumier auprès de l'Administration publique.

Cette fonction marque une courroie de transmission entre le polythéisme et le monothéisme.

Conseil de Village

Ensemble des Patriarches des familles lignagères du terroir villageois.

Assiste le chef politico-administratif dans la gestion du terroir villageois.

Villages mères (Baye et Oula) et villages hameaux.

Délibère sur tous les problèmes afférent à la GRN.

Cette fonction date de l'indépendance du Mali.

Chef de lignage (Chef Unité de Production)

Familles/Ménages

Exploitation des RN

Villages mères (Baye et Oula) et villages-hameaux.

Gestionnaire du patrimoine lignager

Jouit des mêmes droits que les autres membres du lignage.

4.2.4. Les conflits entre villages

L'émergence des premiers conflits est concomitante de la riziculture qui se manifeste comme une nouvelle forme d'utilisation foncière, débordant des normes jusques là établies par les coutumes en fonction de la qualité du sol et des variétés culturales.

Les conflits entre systèmes de production sont de nature à bloquer les projets de développement dans le village et dans la commune.

Par rapport à l'application de la loi moderne, le Samori présente l'interface d'une crise de légitimité née des divergences d'intérêts entre l'application des règles coutumières et la réglementation étatique sur un seul et même espace: les institutions traditionnelles sont affaiblies dans la coexistence avec les intervenants extérieurs, d'autant plus que les pouvoirs successifs depuis le début du siècle (colonisation, indépendance, projets de développement, ONG, etc) se sont servis des institutions traditionnelles et ont fini par leur donner de nouvelles orientations.

De toutes les institutions et organisations précoloniales, seul le Ton (qu'il soit association d'âge, des sexe, villageois ou intervillageois) semble avoir gardé le maximum de vivacité pour être utilisable par tous les régimes politiques et toutes les formes d'organisations importées.

Il n'y a pas de doute qu'il sera le mieux placé pour appuyer les actions de décentralisation.


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