En RCA, la forêt a toujours été une des composantes fondamentales du milieu de vie des populations du fait des produits de cueillette, de chasse et de bois qu’elles y récoltent. Même de nos jours, l’utilisation industrielle de matières ligneuses est bien moins importante en volume que la consommation domestique. L’utilisation des ressources ligneuses par le secteur traditionnel revêt trois formes principales: bois de service, bois de feu et charbon de bois. La consommation en bois de service, principalement pour la construction d’habitations, a été estimée à 200 000 m3 en 1981 par la FAO.
Depuis une trentaine d’années, plusieurs institutions ont mené diverses études et enquêtes pour essayer de mesurer l’ampleur du problème de la dégradation de la couverture végétale autour des grands centres urbains, dégradation provoquée essentiellement par la récolte du bois de feu et dans une moindre mesure pour le charbon de bois. Les récoltes annuelles de bois de feu sont le fait des paysans qui, après les récoltes, prélèvent le bois disponible qui procure un appoint pour leur revenu monétaire.
Certaines études ont montré que la quantité de bois fournie de cette manière dépasse de loin les besoins nationaux, surtout en ce qui concerne les ménages. Par exemple, le bois qui approvisionne la ville de Bangui provient de trois zones principales:
• de la zone forestière du sud-ouest qui assure la plus grande proportion de cet approvisionnement;
• des zones de savanes et de galeries forestières au nord de la ville pour une faible quantité;
• des formations forestières de la RDC.
Dans le cadre du projet PARN, une enquête effectuée en 1985 a montré que ce sont 550 000 tonnes de bois qui sont libérés chaque année dans le sud-ouest de Bangui. La situation actuelle se traduit par une déforestation au sud-ouest de Bangui, sur les collines voisines, et par un appauvrissement des savanes du nord de Bangui. Les consommations ménagères sont en moyenne de l’ordre de 1,2 kilogrammes par habitant par jour. Si l’on incorpore les consommations des commerçants et artisans, les besoins réels sont de l’ordre de 1,5 à 1,6 kilogrammes de bois sec par habitant et par jour. Ainsi, la seule consommation de bois énergie de Bangui correspondrait à la production annuelle d’un périmètre de plantation d’essences à croissance rapide dépassant 40 000 hectares ou à la récolte (théorique) de produits ligneux à partir de 1 500 à 2 000 hectares de forêt dense humide par an. En 1991, les besoins en bois énergie calculés pour tout le pays étaient estimés à 1,59 millions de tonnes pour le bois de feu et 3 650 tonnes de charbon de bois.
Dans les zones forestières, même en région de savanes, les populations autochtones pratiquent la cueillette pour leur alimentation et divers services. Les produits ainsi récoltés varient selon les régions: vin de palme, fruits sauvages, champignons, chenilles, escargots, insectes, légumes, notamment Gnetum africanum très prisé des centrafricains. Les chenilles, souvent récoltées en grande quantité suivant les saisons, ne s’intéressent qu’à un nombre limité d’espèces d’arbres de savane ou de forêt.
Certains produits de la forêt autre que le bois font l’objet de commerce avec l’extérieur. Il s’agit d’espèces végétales utilisées à des fins médicinales et autres, comme le rotin, Rauwolfia, Piper guineense, Xylopia aethiopica et Kyllinga erecta. La quantité exportée chaque année varie entre 5 et 10 tonnes. Un autre produit très consommé localement provient de la feuille de Marantacées utilisée pour l’emballage et autres produits pour la cuisson.
La forêt dense humide centrafricaine est présente dans deux massifs. Celui de la région du sud-est (forêt de Bangassou: 1,2 millions d’hectares) n’a jamais fait l’objet d’exploitation industrielle, et le second massif dans le sud-ouest, avec près de 3,5 millions d’hectares, constitue à l’heure actuelle la seule zone d’exploitation forestière industrielle en RCA.
La forêt du sud-ouest est sur le plan économique, l’une des plus riches d’Afrique avec une densité relativement élevée de sapelli et d’autres Méliacées (sipo, kossipo, tiama) et de forte concentration d’ayous et de limba. L’exploitation forestière y a commencé en 1945, mais elle est restée modeste jusqu’en 1968. Jusqu’à cette date, l’exploitation s’est uniquement localisée dans la préfecture de la Lobaye, près de Bangui, afin de satisfaire le marché local et régional.
Sur la base des inventaires menés durant les années 50 et 60 dans la Sangha, des permis d’exploitation importants ont été octroyés à partir de 1968 et l’exploitation était régie par des conventions d’établissement passées entre l’Etat et les sociétés. Un cahier des charges précisait les modalités d’exploitation (délais de mise en exploitation, diamètre d’exploitabilité, marquage des billes, carnet de chantier, exécution des coupes, etc.) et la durée des permis d’exploitations était en principe de 15 ans renouvelable.
Sur l’ensemble des 3,5 millions d’hectares de forêts supposées exploitables dans le massif forestier du sud-ouest, environ un million d’hectares auraient été exploités en première coupe et souvent de façon incomplète depuis 1945. En 1950, l’ensemble des permis concédés ne dépassait pas 50 000 hectares. La superficie des permis attribués est passée de 100 000 hectares en 1966 à 850 000 hectares en 1970, puis à 1,950 millions en 1994. En 2001, la superficie totale des permis concédés est de 3,466 millions d’hectares.
Depuis la promulgation de la loi 90/03 du 9 juin 1990 portant code forestier centrafricain, les permis d’exploitation et d’aménagement sont octroyés pour une période égale à la durée de la société d’exploitation et pour une superficie pouvant assurer la reconstitution de la forêt par le système d’alternance et de fermeture de zones exploitées et d’ouverture de nouvelles zones. Un cahier des charges précise les modalités d’exploitation. La situation de tous les permis concédés en 2001 est présentée dans l’annexe 2.
Les méthodes d’exploitation sont celles qui se pratiquent couramment en forêt dense tropicale. L’abattage et le tronçonnage laissent sur la coupe près de 40 pour cent de produits ligneux dont une perte en matière ligneuse commercialisable de 10 pour cent.
Des études ont montré que le rythme moyen d’exploitation de la forêt dense est d’environ 20 000 hectares par an. Ce chiffre a tendance à augmenter compte tenu de l’octroi de nouveaux permis d’exploitation et du niveau croissant de production autorisée aux sociétés par le service forestier.
L’exploitation forestière est restée longtemps très modeste car la production de grumes-fûts n’a atteint 100 000 m3 qu’à partir de 1960. Elle a augmenté par la suite pour atteindre un pic de 670 687 m3 en 1974. Cette production est descendue à son plus bas niveau en 1991 avec 114 000 m3, puis n’a pas cessé de croître durant ces dernières années pour atteindre 702 000 m3 en 2000 dont 249 000 m3 de grumes exports. En RCA, l’exploitation forestière est sujette à beaucoup d’aléas de tous ordres. Elle est conditionnée non seulement par la situation du marché international, mais l’éloignement même de ce marché limite le nombre d’essences à exporter, obligeant ainsi les sociétés à ne s’intéresser qu’aux essences de grande valeur économique telles que celles de la famille des Méliacées. Le tableau 2, sur la page suivante, présente l’évolution des productions, exportations et ventes locales des produits forestiers de 1984 à 2001.