
Les pays industrialisés accordent un accès préférentiel à leurs marchés aux pays en développement pour un large éventail de produits, par le biais de tarifs (inférieurs à ceux de la nation la plus favorisée (NPF)) et de contingents tarifaires (CT). À l’origine, ces préférences commerciales ont été conçues comme un moyen d’augmenter la production et les exportations des pays en développement et à terme de les aider à devenir concurrentiels sur le plan international.
Les préférences commerciales, qui constituent des dérogations au principe NPF du GATT, sont inscrites dans le Système généralisé de préférences (SGP). À l’heure actuelle, il existe 15 programmes de SGP offerts par 29 pays accordant des préférences. Ces programmes sont très différents les uns des autres, tant en ce qui concerne l’admissibilité et la couverture des produits que les marges préférentielles. À la lumière des résultats du Cycle d’Uruguay, les pays industrialisés ont ajusté leurs programmes de SGP et élargi leur couverture des produits agricoles.
Depuis quelque temps, les accords commerciaux bilatéraux et régionaux entre pays en développement et pays industrialisés se multiplient. Selon les règles de l’OMC, ces accords, à la différence des programmes de SGP, doivent être réciproques et couvrir l’essentiel des échanges commerciaux. Les accords préférentiels antérieurs tels que la Convention de Lomé de l’UE (aujourd’hui Accord de Cotonou) et la Caribbean Basin Initiative des États-Unis d’Amerique, qui accordaient des préférences à un groupe limité de pays en développement, ne répondaient pas à ces critères et faisaient donc l’objet de dérogations à ces règles.
Devant la nécessité de restructurer leurs programmes préférentiels spéciaux, un certain nombre de pays industrialisés ont récemment décidé d’accorder aux pays les moins avancés un large accès hors contingent et hors tarif à leurs marchés. L’initiative de l’Union européenne «tout sauf des armes» est une des plus importantes dans ce domaine, mais des programmes d’accès au marché hors contingent et hors tarif ont également été adoptés par d’autres pays développés, dont la Nouvelle-Zélande, la Norvège et la Suisse. La loi sur la croissance et l’accès aux marchés de l’Afrique (Africa Growth and Opportunity Act [AGOA]) passée par les États-Unis offre des conditions d’accès semblables aux pays africains.
Étant donné que les tarifs NPF sont toujours élevés pour de nombreux produits agricoles (voir Tableau 1), et en fonction des réductions décidées lors du présent cycle de négociations sur l’agriculture, il reste probablement une large marge de manœuvre en faveur du maintien et de l’expansion des préférences commerciales dans l’agriculture. Dans de nombreux pays vulnérables à faible revenu, la culture des produits bénéficiant d’un traitement préférentiel, tels que le sucre, les bananes, les fruits et les légumes, constitue une source majeure de devises, emploie une importante proportion de ruraux pauvres et contribue sensiblement à la sécurité alimentaire et au développement rural.
Tableau 1: Crêtes tarifaires dans quelques pays développés *
Groupe de produits |
Crêtes tarifaires moyennes |
Viande |
145 |
Produits laitiers |
153 |
Céréales secondaires |
124 |
Céréales |
131 |
Oléagineux et huiles |
115 |
Sucre |
83 |
Fruits et légumes |
120 |
Cacao |
117 |
Café |
70 |
Note: Par crête tarifaire, on entend un tarif supérieur à 20 pour cent de la valeur. *Afrique du Sud, Australie, Canada, États-Unis d’Amérique, Europe des 15, Hongrie, Islande, Israël, Japon, Nouvelle-Zélande, Norvège, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovénie et Suisse. Source: Document FAO CCP 01/12 (2001) et AMAD | |
Ainsi, bien que la valeur totale des préférences accordées au titre des divers programmes ne soit pas considérée comme importante (elle est de l’ordre de 1 à 3 milliards de dollars EU) par rapport à la valeur des échanges, elle est très appréciable pour plusieurs pays tributaires de l’agriculture – dans certains cas, elle représente jusqu’à 10 pour cent de leur PIB.
Une libéralisation multilatérale sur la base NPF éroderait les marges de préférence et causerait des pertes de parts du marché et de revenus. La FAO estime que la marge de préférence globale dont jouissent tous les pays du groupe CAP pour tous les produits agricoles dans le cadre de la Convention de Lomé a chuté de 16 pour cent entre 1995 et 2000 du fait des réductions tarifaires imposées pendant la période de mise en œuvre du Cycle d’Uruguay. Vu les nouvelles réductions des taux consolidés anticipées lors des négociations du Cycle de Doha, les marges préférentielles actuelles risquent de fondre encore plus. Il s’ensuivra des coûts d’ajustement pour ces pays, qui seront particulièrement élevés dans les pays dont la base d’exportations est étroite.
Nombre de pays en développement bénéficiant de préférences ont tiré un large profit de l’accès préférentiel accordé à leurs exportations de sucre, bananes, fruits et légumes. Le maintien et/ou l’approfondisse ment de ces préférences commerciales peut les aider à faire face aux nouveaux changements et à se concentrer sur le renforcement de leurs capacités de production et de leur compéti tivité tant sur le marché intérieur que sur celui de l’exportation.
Vu ce qui précède, le projet de modalités de négociations du Président de l’OMC pour les négociations sur l’agriculture comprend les propositions suivantes:
Les grands enjeux